DiffĂ©rence en plus des dĂ©cĂšs sur les naissances 82. Mariages. Ce doit ĂȘtre pour tout le monde un avis sĂ©rieux, de rĂ©gler ses habitudes et sa toilette sur les exigences de la saison, en attendant que le soleil d'avril ou de mai vienne paralyser ces causes d'insalubritĂ©. (Source : L’indicateur de Bayeux) Avril 1842 - Direction des postes aux lettres de Bayeux. - Le directeur

See other formats *l AĂ  / r r L ""V LA FIN DE L'ANCIEN REGIME DANS LA GÉNÉRALITÉ DE CAEN 1787-1790 Digitized by the Internet Archive in 2013 SociĂ©tĂ© de L'Histoire de la RĂ©volution Française LA FIN DE L'ANCIEN RÉGIME ET LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION DANS LA GÉNÉRALITÉ DE GAEN 1787-1790 PAR FÉLIX MOURLOT Inspecteur d'AcadĂ©mie, Membre de la SociĂ©tĂ© / 14- 1 °l fe °! r J*'lĂŻ PARIS, AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ 3, RUE DE FÙRSTENBERG, 3 1913 611 BIBLIOGRAPHIE Il me paraĂźt indispensable de donner comme prĂ©face au prĂ©sent travail une notice bibliographique trĂšs dĂ©taillĂ©e, afin de dĂ©truire les prĂ©jugĂ©s qui ont eu cours pendant un temps assez long sur la pauvretĂ© de la documentation relative Ă  l'histoire de la fin de l'ancien RĂ©gime et des dĂ©buts de la RĂ©volution en France. La RĂ©volution radicale... qui nous sĂ©pare de l'Ancien RĂ©gime en a obscurci, Ă©crivait Tocqueville, tout ce qu'elle n'en dĂ©truisait pas. » * Et, renchĂ©rissant sur Tocqueville, Doniol ajoutait La RĂ©volution française a jetĂ© dans une nuit profonde tout ce qu'elle a dĂ©truit... La France de 1788 est hors de notre intel- ligence, comme hors des faits. Le moyen-Ăąge n'a pas de coin plus obscur. » * La lecture de cette bibliographie suggĂ©rera une conclusion toute diffĂ©rente. Le nombre et l'importance des dĂ©pĂŽts consultĂ©s, l'abondante masse des documents mis en Ɠuvre, prouveront que la matiĂšre est plus riche qu'on ne l'avait cru, et que les histo- riens disposent de moyens d'information assez Ă©tendus et assez prĂ©cis sur cette pĂ©riode. L'on examinera successivement A, les documents contenus dans les divers dĂ©pĂŽts d'archives; — B, les documents manuscrits conservĂ©s dans les bibliothĂšques publiques ou privĂ©es ; — C, les travaux imprimĂ©s. A. — DOCUMENTS D'ARCHIVES Mes recherches ont portĂ© sur six catĂ©gories de dĂ©pĂŽts d'archi- ves, dont deux Ă  Paris et quatre en province, savoir 1° les 1 A. de Tocqueville, L'Ancien RĂ©gime et la RĂ©volution, p. 89. 2 Doniol, La RĂ©volution et la FĂ©odalitĂ©, p. 1. VITI ARCHIVES NATIONALES Archives nationales ; 2° les Archives du MinistĂšre des affaires Ă©trangĂšres ; 3° les Archives dĂ©partementales de 1 dĂ©partements de Normandie Calvados, Manche, Orne et Eure ; 4° les Archives communales de 11 villes et de 184 bourgs et villages de la Basse- Normandie ; 5° les Archives de deux greffes judiciaires du ressort de la Cour d'appel de Caen Caen et Coutances ; 6° des Archives privĂ©es. Les milliers de piĂšces que la consultation de ces divers dĂ©pĂŽts m'a permis d'utiliser sont pour la plupart inĂ©dites 1]. I. ARCHIVES NATIONALES. Les Archives nationales sont riches en documents sur l'his- toire de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen de 1787 Ă  1790, surtout pour la seconde moitiĂ© de cette pĂ©riode &K J'y ai trouvĂ© des renseignements utiles Ă  la biographie du dernier intendant de Caen, Cordier de Launay, dans les sĂ©ries suivantes E 999A n° 58. Collection formĂ©e par les secrĂ©taires du Conseil, annĂ©e 1725. — Ordonnance relative au paiement de l'office de receveur ancien et mi-triennal des tailles de l'Ă©lection de Paris, acquis par Jacques-RenĂ© Cordier de Launay. grand- pĂšre de l'intendant de Caen, 7 avril 1725. E 1066B n° 95. Ibid., annĂ©e 1731. - - ArrĂȘt du Conseil des finances, du 20 fĂ©vrier 1731, relatif Ă  l'acquisition dĂ©finitive de cet office. P 2462, fol. 119 v°. MĂ©morial de la Chambre des Comptes de Paris, annĂ©e 1751. — PiĂšces relatives Ă  la gestion des comptes de Jacques-RenĂ© Cordier de Launay comme ci-devant trĂ©sorier de l'extraordinaire des guerres, 7 aoĂ»t 1751. 1 J'ai fait un unique emprunt aux archives de l'Ă©glise Catherine, Ă  Saint-PĂ©ters- bourg, qu'un ami bienveillant, feu M. Loutreuil, ancien industriel Ă  Moscou, a compulsĂ©es Ă  mon intention. Un des registres de dĂ©cĂšs de cette Ă©glise m'a fourni la date de la mort du dernier intendant de Caen, Cordier de Launay, Ă©migrĂ© en Russie 24 janvier 18?0. 2 J'ai Ă©tĂ© guidĂ©, au cours de mes derniĂšres recherches, par le prĂ©cieux travail de M. Ch. Schmidt, Les Sources de l'Histoire de France depuis 17H9 aux Archives j\atio- nales, Paris, 1907, Champion. — Je dois aussi de vifs remercĂźments Ă  MM. Le Grand, sous -chef de section, Viard. et Mi rot, prĂ©sidents de la salle de travail des Archives, dont la grande obligeance a facilitĂ© ma tĂąche. ARCHIVES NATIONALES IX P 2470, fol. 345 v° Ibid., annĂ©e 1755. - PiĂšces relatives Ă  la gestion du mĂȘme comme ancien receveur des tailles et octrois de l'Ă©lection de Paris pour l'annĂ©e 1725. 9 novembre 1755. P 2479, fol. 398 Ibid., annĂ©e 1760. — Lettre de dĂ©charge Ă  Anne-ThĂ©rĂšse de Croezer, veuve de Jacques-RenĂ© Cordier de Launay, trĂ©sorier gĂ©nĂ©ral de l'extraordi- naire des guerres, des amendes et intĂ©rĂȘts prononcĂ©s sur les comptes de ladite trĂ©sorerie, 7 juin 1760. X 8738, fol. 500 Patentes et ordonnances diplomatiques. — Lettre de maintenance de noblesse pour le sieur Jacques-RenĂ© Cordier de Launay et sa postĂ©ritĂ©, 8 mars 1736. Y 60, fol. 379 Publications du ChĂątelet. — Testament et codi- cille de Mme de Launay, Ă©pouse de M. Cordier de Launay, de son vivant trĂ©sorier de l'extraordinaire des guerres, 30 mai 1772. T 1613 SĂ©questre. — Inventaire des papiers appartenant Ă  Cordier de Launay, Ă©migrĂ©, rue du Faubourg-Pois- sonniĂšre, ci-devant maĂźtre des requĂȘtes et intendant de Caen, 3 thermidor an III. V1 466. Provisions de maĂźtre des requĂȘtes pour Louis-Guillaume- RenĂ© Cordier de Launay, 9 juin 177,'. La premiĂšre partie de mon Ă©tude les huit premiers chapitres, relative Ă  la situation de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en 1787 et au condominium de l'intendant et de l'AssemblĂ©e provinciale, a empruntĂ© des documents aux sĂ©ries suivantes C 9 AssemblĂ©e des notables de 1788 et 13 AssemblĂ©es provin- ciales. Divhis 44 Papiers du ComitĂ© de division. Dvi 64 Papiers du ComitĂ© des finances. W 1408, 1420, 1453, 1455, 1584, 1585, 1587, 1588, 1589, 1593, 1594. 1595, 1597 et 1603. GĂ©nĂ©ralitĂ©s, MĂ©langes. Cette contribution est fort modeste, en comparaison de l'abon- dante documentation que les Archives dĂ©partementales du Cal- vados m'ont fournie sur le mĂȘme sujet. Pour la seconde partie de ce travail, du chapitre IX au cha- pitre XVIII Convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, troubles intĂ©rieurs, division de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en dĂ©partements, organisation X ARCHIVES NATIONALES administrative de ceux-ci, etc., les Archives nationales ont Ă©tĂ©, au contraire, une source d'information trĂšs prĂ©cieuse. J'en ai utilisĂ© les sĂ©ries suivantes 1° Pour l'histoire de la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux dans les bailliages de Caen et de Coutances chap. IX, X et XI Ba 27 et 35 Originaux et minutes. Bin 40, 53 et 54 Transcriptions de piĂšces, sĂ©rie des bailliages ; 166, 167 et 174 Ibid., sĂ©rie des villes. C 14, 17 et 18 ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales et piĂšces annexes. 2° Pour l'Ă©tude des progrĂšs de la RĂ©volution dans l'opinion publique, des troubles intĂ©rieurs, des retards dans la levĂ©e de l'impĂŽt et des manifestations locales de la vie politique en Basse- Normandie chap. XII, XIII, XIV, XVII C 88 Ă  120 Adresses des villes et communautĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 14 mai 1789-31 juillet 1790. Dvi 24, 38 et 43 Papiers du ComitĂ© des finances. Dxi 2 Papiers du ComitĂ© de liquidation. Dxin 4 Papiers du ComitĂ© d'agriculture et du commerce. Dxiv 2, 5 et 8 Papiers du ComitĂ© des droits fĂ©odaux. Dxxix 3, 8, 18, 20, 29, 30, 31, 32, 34, 40, 58, 78, 81, 83, 84 et 91. Papiers du ComitĂ© des rapports. Dxxixbis 2, 3, 4, 6 et 7 Papiers du ComitĂ© des recherches. F4 1051 ComptabilitĂ©. F? 36611, 36823 Police gĂ©nĂ©rale. F11 211, 215 Subsistances. H1 1453, 1455 MĂ©langes. 3° Pour l'Ă©tude de la division de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en dĂ©partements chap. XV Divhis 1, 2, 5, 10, 12, 21, 27, 55, 60, 90. Papiers du ComitĂ© de division. NN* 10, 12, 13. ProcĂšs-verbaux du ComitĂ© de division. NN 78, 112, 123. Cartes originales. 4° Pour celle de l'organisation administrative des dĂ©parte- ments du Calvados, de la Manche et de l'Orne Div 1, 2, 3, 5, 6, 7, 9, 11, 12, 21, 41. Papiers du ComitĂ© de consti- tution. ARCHIVES NATIONALES XI Flbn Calvados 1, Manche, 1, Orne 1. Personnel administratif. Flcm SĂ©rie dĂ©partementale. Calvados, 1 et 13 ; Manche, 1 et 12 ; Orne, 1. Esprit public et Ă©lections. 5° Pour le rĂ©cit de la fĂȘte de la FĂ©dĂ©ration en 1790 C 189148, 15°, 152, 133. ProcĂšs-verbaux des AssemblĂ©es nationales et piĂšces annexes. Je crois utile de donner ici, pour l'intelligence des annotations de cet ouvrage, l'analyse dĂ©taillĂ©e des emprunts faits Ă  ces diverses sĂ©ries, en passant successivement en revue celles - ci dans l'ordre alphabĂ©tique. SÉRIE B Élections et votes. Ba 27, liasse 45, contient 181 piĂšces originaux et copies rela- tives Ă  la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux dans le bailliage de Caen. Ces piĂšces sont rĂ©parties entre 18 dossiers. Ba 27, 1. 451. Extrait des dĂ©libĂ©rations de l'hĂŽtel de ville de Caen du 30 septembre 1788 et du 11 octobre 1788. MĂ©moire adressĂ© au garde des sceaux par les of- ficiers municipaux de Caen, le 22 octobre 1788, avec la lettre d'envoi. Lettre de Boismartin, dĂ©putĂ© du bureau des finances au garde des sceaux et Ă  Necker, 17 no- vembre 1788. — Extrait de la dĂ©libĂ©ration du bureau des finances de Caen, du 10 septembre 1788. — Minutes de rĂ©ponse du garde des sceaux aux officiers municipaux de Caen 27 octobre 1788 et Ă  Boismartin 21 novembre 1788. MĂ©moire des six corps de la ville de Caen sur le doublement du Tiers Ă©tat, dĂ©cembre 1788. Ba 27, 1. 45-. Lettre de DuperrĂ© de Lisle, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen au garde des sceaux, 19 fĂ©vrier 1789. — Lettres de Tirard-Deslongchamps, recteur de l'UniversitĂ© de Caen au garde des sceaux et Ă  Necker, 26 fĂ©vrier 1789. \ll ARCHIVES NATIONALES Ba 27, 1. i'y]. Copie du rallier de la corporation des mar- chands merciers, drapiers et quincailliers de la en, avec lettre d'envoi de Lentaigne, leur dĂ©putĂ©, 15 mars 1789. DĂ©libĂ©ration du bureau de la nouvelle commu- nautĂ© des marchands merciers de Caen, 2 mars 1789. Lettre de Le Fauconnier, syndic des maĂźtres en pharmacie de Caen au garde des sceaux, 22 fĂ©- vrier 1789. Lettre de du Belloys, avocat au bailliage de Caen, Ă  Necker, 15 mars 1789. Observations particuliĂšres sur le commerce de Caen, principalement sur les manufactures Ă  y Ă©lever; — observations sur diffĂ©rentes parties d'admi- nistration de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, adressĂ©es Ă  Necker par Girard Laforest l'aĂźnĂ©, avec lettre d'envoi du 12 avril 1789. Minutes des rĂ©ponses du garde des sceaux Ă  de Lisle 9 mars 1789, Tirard-Deslong- champs 4 mars 1789 et Le Fauconnier 17 mars 1789. Ba 27, 1. 45;{. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du clergĂ© du bailliage de Caen. Copie collationnĂ©e sur l'original. Cahier du clergĂ© du mĂȘme bailliage. Copie. Protestation de l'abbĂ© de Troarn. Copie, 24 mars 1789. Ba27, 1. 45*. RĂ©clamation du chapitre de Bayeux du 14 mars 1789 copie, avec lettre d'envoi des dĂ©putĂ©s du chapitre Ă  M. de Villedeuil, 20 mars 1789. Protestation des dignitaires et chanoines de Bayeux, 14 mars 1789. Copie. Protestation de l'Ă©vĂȘque de Bayeux, 18 mars 1789 copie. Proposition faite par les dĂ©putĂ©s du chapitre de Bayeux Ă  l'assemblĂ©e particuliĂšre du clergĂ© de Caen du 18 mars 1789 copie. Protestation s. d. des dĂ©putĂ©s du chapitre de Bayeux copie contenant le rĂ©cit dĂ©taillĂ© de l'assemblĂ©e du clergĂ©. Kxtrait du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du clergĂ© de Caen copie. ARCHIVES NATIONALES XIII Ba 27, 1. 45*. Lettre de l'Ă©vĂȘque et du grand-chantre de Bayeux au roi s. d. — Extrait d'une lettre Ă©crite de Caen Ă  M. B . . . le 21 mars 1789 [par Revel de Bretteville ? pro- cureur du roi au bailliage de CaenJ copie in- forme. Ba 27, 1. 45\ Lettre de l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  M. de Villedeuil, 21 mars 1789. — Lettre de M. de Villedeuil Ă  M. de Lessart, 25 mars 1789 avec sa minute. Lettre du duc de Coigny Ă  M. de Villedeuil, pour lui rendre compte de la marche des assem- blĂ©es Ă  Caen incident Soulavie, 27 mars 1789. Lettre de M. de Lessart Ă  M. de Villedeuil, 1er avril 1789 exprime la surprise peinĂ©e du roi Ă  propos de l'attitude de l'Ă©vĂȘque de Bayeux. Lettre de M. de Villedeuil Ă  M. de Lessart envoi d'un mĂ©moire au roi de l'Ă©vĂȘque de Bayeux, 28 juin 1789. Lettre de M. de Lessart Ă  M. de Villedeuil, 30 juin 1789 renvoi du mĂ©moire ci-dessus avec dĂ©sap- probation. Ba 27, 1. 45°. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la noblesse du bail- liage de Caen copie collationnĂ©e Ă  l'original. Extrait du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des trois ordres, 16 et 30 mars 1789 copie collationnĂ©e sur l'original. — MĂ©moire lu par le baron de Wimpfen Ă  l'assemblĂ©e de la noblesse, avec ses additions, 26 mars 1789. Cahier des pouvoirs et instructions de la noblesse, 16 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. Ba 27, 1. 457. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bail- liage de Caen, 5-6 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original avec lettre d'envoi du 7 mars 1789. — Etat des dĂ©putĂ©s des villes et des campagnes Ă  l'assemblĂ©e du 5 mars 1789 imprimĂ© — Liste des dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen, nommĂ©s les 12, 13 et 14 mars 1789 im- primĂ©. Ba 27, 1. 458. Liste des dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat nommĂ©s pour assis- ter Ă  l'assemblĂ©e des trois ordres du 16 mars 1789 imprimĂ©. XIV ARCHIVES NATIONALES Ba 27, 1. 45H. ProcĂšs-verbal de nomination et d'Ă©lection des six dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen, 17 mars 1789 copie collationnĂ©e. Lettre de DuperrĂ© de Lisle au garde des sceaux, 30 mars 1789. Ba 27, 1. 459. Lettre du marquis de Than, lieutenant gĂ©nĂ©ral d'Ă©- pĂ©e au bailliage de Caen, au garde des sceaux, 18 fĂ©vrier 1789, et piĂšces annexes rĂ©clame la prĂ©sidence de l'assemblĂ©e. — Minute de la rĂ©ponse du garde des sceaux au marquis de Than s. d.. Ba 27, 1. 4510. Bulletins de l'abbĂ© Soulavie ou Journal des Ă©lections du bailliage de Caen » suite de cinq bulletins manuscrits adressĂ©s Ă  Necker du 6 au 24 mars 1789. Ba 27, 1. 4511. Correspondance de DuperrĂ© de Lisle avec le garde des sceaux et Necker, 14 lettres du 9 fĂ©vrier au 13 avril 1789 relatives aux opĂ©rations Ă©lecto- rales. Ba 27, 1. 4512. Correspondance du duc de Coigny avec Villedeuil et Necker mars et avril 1789. Correspondance de l'intendant Cordier de Launay avec Villedeuil et le garde des sceaux 5 lettres du 15 fĂ©vrier au 20 avril 1789. Ba 27, 1. 4513. Onze piĂšces relatives Ă  la convocation de la noblesse du bailliage de Caen pour le 25 juillet 1789 pour le retrait de son mandat impĂ©ratif. Ba 27, 1. 4514. DĂ©libĂ©ration de l'hĂŽtel de ville deBayeux du 14 dĂ©- cembre 1788 adhĂ©sion Ă  l'adresse de Rouen, avec la rĂ©quisition des communautĂ©s et corpora- tions de la ville sur le mĂȘme objet, du 8 dĂ©cembre 1788. Adresse imprimĂ©e des mĂȘmes, 21 janvier 1789. — Lettre de Le Tuai, curĂ© de Saint-Vigor-le-Grand, Ă  Necker, 14 mars 1789. Lettre de Duhamel de Vailly, syndic de Tracy, au garde des sceaux, 16 fĂ©vrier 1789 demande d'instructions sur la prĂ©sidence des assemblĂ©es locales. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du bailliage particu- lier de Bayeux 4 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. ARCHIVES NATIONALES XV Ba 27, 1. 4515. 12 piĂšces relatives aux assemblĂ©es Ă©lectorales du bailliage de Falaise U. Ba 27, 1. 4516. 14 piĂšces relatives au procĂšs et Ă  l'acquittement du procureur du roi Ă  Falaise, Bertrand de l'HodiesniĂšre. Ba 27, 1. 4517. Deux lettres du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Torigni au garde des sceaux, 12 et 14 fĂ©vrier 1789. — Lettre des officiers municipaux de Vire au garde des sceaux, 7 dĂ©cembre 1788, avec mĂ©moire des gardes-jurĂ©s de la manufacture de draps, nĂ©gociants, marchands et autres citoyens du Tiers Ă©tat, du 30 novembre 1788. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du bailliage particu- lier de Vire et cahier de dolĂ©ances du bail- liage^ mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. Ba 27, 1. 4518 *. RequĂȘte deBarfleur et de son arrondissement au roi, avec lettre d'envoi des officiers municipaux, 20 dĂ©cembre 1788. — Explications de Bricquebec et environs Ă  Necker s. d.. — DolĂ©ances du curĂ© de Bretteville-la-PavĂ©e aux commissaires du clergĂ© du bailliage de Caen, 20 mars 1789, avec lettre d'envoi Ă  Necker, 12 avril 1789. — Lettre des officiers municipaux de Cherbourg Ă  Necker, 22 dĂ©cembre 1789. — RequĂȘte de la municipalitĂ© de Cherbourg au roi, 3 janvier 1789, avec lettre d'envoi Ă  Necker pour obtenir une dĂ©putation directe. — Cahier du Bocage, ou dolĂ©ances et objets d'utilitĂ© publique, par Aveline, notaire Ă  Caumont, avec lettre d'envoi Ă  Necker, 7 fĂ©vrier 1789. — Cahier de dolĂ©ances de la paroisse de Valcongrain bailliage de Caen. 1 Les paroisses de ce bailliage, an nombre de 240. Ă©taient presque toutes en-de- hors de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, et ne rentrent point, par consĂ©quent, dans le cadre de cette Ă©tude. 2 Plusieurs des piĂšces contenues dans ce dossier y sont dĂ©placĂ©es et devraient se trouver auB" 35, 1. 70. \\l ARCHIVES NATIONALES Ba35, liasse 70, contient 106 piĂšces originaux et copies, rĂ©- parties en 13 dossiers et relatives au mouvement Ă©lectoral du bailliage de Cotentin ' Ba35, 1. 70*. Lettres de Desmarets de Mpntchaton, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Coutances, au garde des sceaux, 12 et 14 fĂ©vrier, 19 mai et 9 juillet 1789. Lettres de Duhamel, lieutenant gĂ©nĂ©ral de police de Coutances, au garde des sceaux, 17 fĂ©vrier et 9 mars 1789. L>' .'ĂŻ5, 1. 70-. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat du bailliage principal de Coutances, 2-14 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. Ba35, 1. 703. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres, du bailliage de Coutances copie colla- tionnĂ©e Ă  l'original, avec lettre d'envoi du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage au garde des sceaux, 11 avril 1789. Ba35, 1. 70'*. Lettre de Mme HĂ©bert-Lheure, chĂątelaine de Cam- bernon, au directeur gĂ©nĂ©ral des finances, 17 fĂ©- vrier 1789. Lettre de Desplanques de Ventigny, chapelain de la cathĂ©drale de Coutances, Ă  Necker, 25 fĂ©- vrier 1789. Lettre d'Arnould, prieur de la BloutiĂšre, au garde des sceaux s. d.. Cahier de la noblesse du bailliage de Cotentin imprimĂ©, s. 1. n. d. Lettre de Frestel, curĂ© de Saint-Floxel, au garde des sceaux, 5 mars 1789. Protestation de la minoritĂ© du clergĂ© de Coutances imprimĂ© s. 1. n. d., du 27 mars 1789, avec deux lettres successives d'envoi au garde des sceaux, l'une signĂ©e par Tristan-Brission, curĂ© de Saint- Sauveur-Lendelin, du 27 mars 1789 ; l'autre, par Lejardinier des Landes, curĂ© de la Feuillie, du 5 mai 1789. Lettre de Desmarets de Montchaton au garde des sceaux, 2 avril 1789. 1 M. E. Bridrey a su tirer mi excellent parti des principaux documents de la sĂ©rie If' ‱'!‱"> dans son Recueil des Cahiers de dolĂ©ances du bailliage de Cotentin. Voir son Introduction, au tome 1, p. 18-19. ARCHIVES NATIONALE- XVII Ba 35, 1. 70j. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e dĂ©finitive du Tiers Ă©tat du bailliage de Cotentin, 20-30 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. Cahier de dolĂ©ances du Tiers Ă©tat du bailliage de Cotentin original signĂ© par les commissaires le 30 mars 1789. Etat des paroisses et du nombre des feux du bailliage de Coutances et nombre des dĂ©putĂ©s Ă  l'assemblĂ©e prĂ©liminaire. Lettres de Desmarets de Montchaton au garde des sceaux, 16 mars et 1er avril 1789. Ba 35, 1. 70°. MĂ©moire au Roi des avocats du bailliage d'Avran- ches sur les prochains Etats gĂ©nĂ©raux imprimĂ©, avec lettre d'envoi, 31 dĂ©cembre 1788, par Morin l'aĂźnĂ©, leur syndic en double expĂ©dition. — Lettre de TesniĂ©re de BrĂ©mesnil, maire d' Avranches, au garde des sceaux, 7 janvier 1789 envoi de deux dĂ©libĂ©rations de la municipalitĂ© relatives aux Etats provinciaux et gĂ©nĂ©raux. — Lettre des officiers municipaux d; Avranches au mĂȘme, 24 fĂ©vrier 1789 sur le partage des 8 dĂ©- putations du Tiers entre les 10 bailliages du Cotentin. — Lettres du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Carentan, Lavalley de la Hogue, au mĂȘme, 12 et 15 fĂ©vrier et 16 mars 1789. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat de la ville de Carentan. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bail- liage de Carentan. — Liste des paroisses omises dans la liste gĂ©nĂ©rale. — Lettres des officiers municipaux de Granville au garde des sceaux, du 26 octobre et au Roi, du 7 dĂ©cembre 1788. Ba 35, 1. 70". RĂ©clamations de la Commission intermĂ©diaire pro- vinciale de Caen, en faveur du bailliage de Mor- tain, 20 janvier et 7 fĂ©vrier 1789. — Lettre du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Mortain Ă  Xecker, envoyant un MĂ©moire sur le comtĂ© de Mortain et sa dĂ©putation en 1598 et 1614», 11 fĂ©vrier 1789. — Lettre du mĂȘme au garde des sceaux, 15 fĂ©vrier 1789, xviil Aiuui\is NATIONALES Ba 35, 1. 70". Lettres du marquis de GĂ©raldin, grand bailli d'Ă©- pĂ©e de Mortain, Ă  Necker et au garde des sceaux, 18 fĂ©vrier 1789. Ba 35, 1. 70s. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bail- liage de Mortain, 12 mars 1789 copie collation- nĂ©e Ă  l'original. — - Lettre du lieutenant gĂ©nĂ©ral, Vaufleury de Saint- Cyr, au garde des sceaux, 13 mars 1789. Ba 35, 1. 70°. Extrait du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du dĂ©par- tement de Saint-LĂŽ, 20 octobre 1788. MĂ©moire des citoyens du Tiers Ă©tat de Saint-LĂŽ du 5 dĂ©cembre 1788, suivi de la dĂ©libĂ©ration du 7 dĂ©cembre 1788, avec lettre d'envoi des offi- ciers municipaux au garde des sceaux, 7 dĂ©- cembre 1788. MĂ©moire des avocats de Saint-LĂŽ Ă  Necker, avec lettre d'envoi de Le Menuet, syndic des avocats, 16 dĂ©cembre 1788. Lettre des officiers municipaux de Saint-LĂŽ au roi, 19 janvier 1789. Ba 35, 1. 70 10. Lettres de Robillard, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Saint-LĂŽ, au garde des sceaux, 12, 13, 18, 27 fĂ©- vrier, 7, 19 mars et 8 avril 1789. — Cahier de dolĂ©ances de Saint-Jean-d' Agneaux, avec lettre d'envoi au garde des sceaux par Gonfrey, 11 mars 1789. Ba 35, 1. 7011. Lettres de Lescaudey de Manneval, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Saint-Sauveur-Lende- lin, au garde des sceaux, 13, 14 fĂ©vrier et 10 mars 1789. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bail- liage de Saint-Sauveur-Lendelin, 9 mars 1789 copie collationnĂ©e Ă  l'original. Lettres d'Ango , bailli de Saint-Sauveur-le- Vi- comte, au garde des sceaux, 17 fĂ©vrier et 11 mars 1789. Lettre de Guillouet, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Tinchebrai, au garde des sceaux, 4 mars 1789. Ba 35, RĂšglement du 21 juin 1777 pour l'administration municipale de Valognes copie collationnĂ©e. ArrĂȘtĂ© de l'hĂŽtel de ville de Valognes, 3 novembre 1788 copie collationnĂ©e. ARCHIVES NATIONALES XIX Ba 35, 1. 701"2. Lettre du bureau intermĂ©diaire de Valognes au garde des sceaux, 5 novembre 1788. — Protestation des chirurgiens de Valognes, 14 no- vembre 1788. Protestation de la noblesse du bailliage de Valo- gnes, 15 dĂ©cembre 1788 contre une dĂ©libĂ©ration inconstitutionnelle des officiers du bailliage avec lettre d'envoi au garde des sceaux, du mĂȘme jour. — RequĂȘte des paroissiens d'Alleaume Ă  l'intendant, 8 novembre 1789. — Protestations de la noblesse 15 dĂ©cembre, des marchands merciers 15 dĂ©cembre, du clergĂ© 18 dĂ©cembre, des laboureurs 18 dĂ©cembre, — copies collationnĂ©es, avec lettre d'envoi des officiers municipaux au garde des sceaux s. d.. — RequĂȘte des officiers du bailliage de Valognes Ă  l'intendant, avec rĂ©ponse des officiers munici- paux copies collationnĂ©es. — Lettre des officiers municipaux de Valognes au garde des sceaux, 20 janvier 1789 adhĂ©sion au RĂ©sultat du Conseil du 27 dĂ©cembre 1783. Ba 35, 1. 7013. Lettres de Sivard de Beaulieu, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Valognes, au garde des sceaux, 12, 17 fĂ©vrier, 14 mars, 3 et 25 avril 1789. — ProcĂšs- verbal et pouvoirs des 81 dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat du bailliage de Valognes, 9 mars 1789 co- pie collationnĂ©e* — Liste des dĂ©putĂ©s des villes, bourgs et commu- nautĂ©s Ă  l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Valognes. Bin 40 registre. Transcription de nombreuses piĂšces relatives au mouvement Ă©lectoral du bailliage de Caen et se- condaires Bayeux, Caen, Falaise, Torigni et Vire. Bin 53 registre. Transcription de documents du mĂȘme ordre pour le bailliage principal de Coutances et les baillia- ges secondaires d'Avranches et Coutances. Bin 54 registre. MĂȘmes transcriptions pour les bailliages secondaires de Carentan, CĂ©rences, Mortain, Saint- LĂŽ, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Saint-Sauveur-Len- delin, Tinchebrai et Valognes. XX ARCHIVES NATIONALES Il est inutile d'analyser en dĂ©tail ces trois registres, dont la plupart des piĂšces ne sont que des copies, souvent erronĂ©es, d'ori- ginaux existant dans les sĂ©ries Ba 27 et 35, C 17 et 18 des Archives nationales ou aux greffes de la Cour d'appel de Caen et du Tribu- nal de premiĂšre instance de CoutancesW. Bin 164-177, sĂ©rie des villes. On y trouve plusieurs documents dĂ©jĂ  vus dans la sĂ©rie desBa, par exemple Bm 166. Cahier du Bocage, par Aveline. Adresse de Barfleur sur le rĂ©tablissement des Etats gĂ©nĂ©raux et dolĂ©ances du curĂ© de Bretteville-la-PavĂ©e voir Ba 27, 1. 4518. Bm 167. Adresses de Caen, 22 octobre 1788 voir Ba 27, 1. 451, de Cherbourg, 22 dĂ©cembre 1788 ; de Coutances, 8 fĂ©vrier 1789, au garde des sceaux, avec rĂ©ponses de celui-ci ; lettres du prieur de la BloutiĂšre au garde des sceaux voir Ba 35, 1. 70*. Bm 168. Adresses de Granville, 7 dĂ©cembre 1788 voir Ba 35, 1. 706 et 26 fĂ©vrier 1789. Bm 174 . Cahier de dolĂ©ances de Valcongrain voir Ba 27, 1. 4518. SERIE C W ProcĂšs-verbaux des AssemblĂ©es nationales et piĂšces annexes. C 9, 1. 21-22, contient la Liste des personnes convoquĂ©es pour l'AssemblĂ©e des Notables du 3 novembre, remise au 6 du mĂȘme mois. Paris, imprimerie royale, 1788, 7 p. de Cagny, maire de Caen, y figure comme 23e dĂ©putĂ© du Tiers Ă©tat sur 25, et la liste des bureaux des Notables en l'annĂ©e 1788 de Cagny, 24e et dernier membre du 4e bureau, prĂ©sidĂ© par le prince de CondĂ©. C 13, I. 28. Lettres d'envoi des procĂšs-verbaux des AssemblĂ©es provinciales des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s de Normandie ne contient que les lettres d'envoi du procĂšs-verbal de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen. 1 Sur cette collection des Bm, voir A. Brette, Recueil des documents relatifs Ă  la tonvocalion des Etats gĂ©nĂ©raux, Paris, 1894, in-4°, Introduction, p. cxxi sqq. 2 L'inventaire de cette sĂ©rie a Ă©tĂ© publiĂ© par A. Tuetey, Les Papiers des Assem- blĂ©es de la RĂ©volution aux Archives Nationales, Paris, 1908, in-8°. ARCHIVES NATIONALES XXI C 17,1. 1{8, contient 15 piĂšces relatives au bailliage de Caen copies conditionnĂ©es aux originaux, et directement versĂ©es par les dĂ©putĂ©s du bailliage au bureau de l'AssemblĂ©e nationale, savoir ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e particuliĂšre du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen, 17 mars 1789 et jours suivants. ProcĂšs-verbal de prestation de serment des dĂ©putĂ©s au bailliage de Caen, nommĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de l'ordre de la noblesse, 17 mars 1789 et jours suivants. Protestation de MM. du chapitre deBay eux, 16 mars 1 789, Protestation de MM. les dignitaires et chanoines du chapitre deBayeux, 14 mars 1789. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du clergĂ©. DĂ©claration de l'ordre de la noblesse, 18 mars 1789. RĂ©ponse de l'ordre de la noblesse Ă  la dĂ©claration du clergĂ© pour la rĂ©union des cahiers. — Proposition faite par les dĂ©putĂ©s du chapitre de l'Ă©- glise cathĂ©drale deBayeux, 18 mars 1789. — Protestation de M. l'Ă©vĂȘque deBayeux, 18 mars 1789. — Protestation de MM. les dĂ©putĂ©s du chapitre de Bayeux, 19 mars 1789. — Protestation du fondĂ© de pouvoirs de l'abbĂ© de Troarn. — DĂ©claration des commissaires du bailliage de Caen du 24 mars 1789 pour remercier le clergĂ© de sa dĂ©clara- tion sur la participation aux impĂŽts. — Cahier du clergĂ© du bailliage principal de Caen et bail- liages secondaires. ProcĂšs-verbal de prestation de serment des dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen. C 18,1. I62, contient 7 piĂšces relatives au bailliage de Coutances originaux et copies, qui proviennent des secrĂ©tariats des trois ordres, savoir — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du clergĂ©, 20 mars 1789 et jours suivants. — - ProcĂšs-verbal de prestation du serment des dĂ©putĂ©s Ă©lus aux Etats gĂ©nĂ©raux, 1er avril 1789 en double expĂ©dition. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des communes, et de l'Ă©- lection des dĂ©putĂ©s du Tiers ordre, 20 mars 1789 et jours suivants. XMl ARCHIVES NATIONALES C 18, 1. 11-. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la noblesse. — Extrait du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat du bailliage de Saint-LĂŽ imprimĂ©. C 88 Ă  121 contient, en une sĂ©rie de cartons, les adresses des villes et communautĂ©s de France Ă  l'AssemblĂ©e nationale, de mai 1789 Ă  aoĂ»t 1790. Cette sĂ©rie m'a fourni les documents sui- vants C 88',r\ ArrĂȘtĂ© du bailliage de CĂ©rences, 6 juillet 1789, avec lettre d'envoi du lieutenant gĂ©nĂ©ral Brohon, 8 juillet 1789 sur l'heureuse rĂ©union des trois ordres. C 8833. Adresse de la ville de Bayeux Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 juillet 1789 mĂȘme objet. C 8854. Adresse de la ville de Coutances Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 27 juillet 1789 mĂȘme objet. C 893Ăź. Adresse des communes du bailliage de Mortain Ă  l'As- semblĂ©e nationale s. d., reçue dans la sĂ©ance du 10 juillet 1789 mĂȘme objet. — Adresse des officiers municipaux de Granville, 28 juil- let 1789 mĂȘme objet. — TrĂšs humble et trĂšs respectueuse adresse de la ville de Saint-Sauveur-le-Vicomte Ă  l'AssemblĂ©e nationale s. d. prĂ©sentĂ©e Ă  la sĂ©ance du 29 juillet 1789 sur le retour de Necker. C 89i7. Adresse de Quinette de Cloisel, de Granville, 16 juil- let 1789. Lettre de Philippe Delleville, de Bayeux, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 27 juillet 1789 demande d'Ă©largissement, C 89G2. ArrĂȘtĂ© pris par l'ordre de la noblesse du bailliage de Vire, le 24 juillet 1789, avec lettre d'envoi d'un gentilhomme Virois, d'Anjou de Boisnantier, 2 aoĂ»t 1789. G 90ℱ. Adresse des officiers du bailliage et prĂ©sidial de Cou- tances, 28 juillet 1789 sur l'heureuse rĂ©union des ordres. — - Adresse des officiers municipaux d'Avranches, 28 juil- let 1789 sur le retour de Necker. C 9038. Adresse des citoyens de la ville de Caen, 1er aoĂ»t 1789 notification d'existence du ComitĂ© permanent. ARCHIVES NATIONALES XXIlt C 917,. Adresse de l'UniversitĂ© de Caen, 8 aoĂ»t 1789. C 9171, Adresse du ComitĂ© permanent de Carentan, 8 aoĂ»t 1789 sur le retour de Necker et le dĂ©cret du 4 aoĂ»t. C 917'2. Lettre d'envoi par les officiers municipaux de Granville, le 14 aoĂ»t 1789, du procĂšs-verbal de formation du ComitĂ© permanent. — Lettre d'envoi par le ComitĂ© permanent de Granville, le 14 aoĂ»t 1789, du procĂšs-verbal de son Ă©tablisse- ment, et copie de sa premiĂšre dĂ©libĂ©ration admi- ration pour la nuit du 4 aoĂ»t. C 917;{. Adresse du ComitĂ© permanent de Torigni, 12 aoĂ»t 1789 adhĂ©sion aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e. C 9174. Adresse des habitants de la ville de Coutances, 20 aoĂ»t 1789 adhĂ©sion du ComitĂ© permanent au dĂ©cret du 4 aoĂ»t. C 9178, Adresse du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral de la ville de Saint-LĂŽ s. d. reçue le 8 aoĂ»t 1789 mĂȘme^objet. C 9276. Adresse du ComitĂ© permanent du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin, Ă  Paris, 25 aoĂ»t 1789 mĂȘme objet. C 9278. Adresse des citoyens des trois ordres de la ville de Caen, 31 aoĂ»t 1789/ — DĂ©cret du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral national d'Avranches, relatif Ă  la perception des droits et impĂŽts de tout genre, 31 aoĂ»t 1789. C 9281, 11 piĂšces relatives Ă  Bertrand LhodiesniĂšre, procureur du roi au bailliage de Falaise le dossier s'est trouvĂ© scindĂ© par la remise de 13 piĂšces au garde des sceaux le 6 juin C 9382. Adresse des citoyens de Coutances cĂ  l'AssemblĂ©e natio- nale, 1er septembre 1789 adhĂ©sion nouvelle du ComitĂ© permanent Ă  ses dĂ©crets. C 9388. Adresse de la municipalitĂ© de Granville, rĂ©unie en ComitĂ© national, 11 septembre 1789 demande l'or- ganisation prochaine d'Etats provinciaux et de mu- nicipalitĂ©s. C 94. Adresse de la municipalitĂ© d'Avranches Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 9 octobre 1789, avec lettre d'envoi du 14 octobre sur le dĂ©cret du 26 septembre 1789. C 96l,. Lettre du ComitĂ© municipal et national de Cherbourg, 26 octobre 1789 adhĂ©sion Ă  la loi martiale. — Adresse de 10 particuliers de Saint-LĂŽ Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 novembre 1789 objet imprĂ©cis. XXIV ARCHIVES NATIONALES C 96 m. Adresse du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral et permanent de Vire, 8 no- vembre 1789 adhĂ©sion aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale. C 9MI. Adresse du ComitĂ© national de Coutances, 9 novembre 1789 demande d'assemblĂ©es administratives et mu- nicipales. Envoi par la municipalitĂ© de Cherbourg du procĂšs- verbal de proclamation de la loi martiale du 4 no- vembre, 26 novembre 1789. C 971-1. Adresse de la milice nationale de Cherbourg, 22 novem- bre 1789 adhĂ©sion aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e natio- nale. C 97,2\ Adresse du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral et permanent de la ville de Caen, 3 novembre 1789 demande d'assemblĂ©es pro- vinciales et de municipalitĂ©s. C 98429. Adresse de la ville de Carentan Ă  l'AssemblĂ©e nationale s. d. demande d'une juridiction. C 9813i. Adresse et supplique de la commune deBricquebec s. d. mĂȘme objet. C 99m. Lettre de Dubois -Dubais, ancien garde du corps, 9 fĂ©- vrier 1790. C 99iil. Plainte des officiers du rĂ©giment d'Aunis, 20 dĂ©cem- bre 1789 contre la motion de Dubois CrancĂ© inju- rieuse pour l'armĂ©e. C 100100. Lettre du ComitĂ© municipal d'Isigny, 20 dĂ©cembre 1789 demande d'une juridiction. C 101162. Adresse du ComitĂ© municipal du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin sĂ©ant Ă  PĂ©riers, 23 dĂ©cembre 1789 demande le maintien du bailliage. Adresse de la municipalitĂ© de Tinchebrai, avec lettre d'envoi du 23 dĂ©cembre 1789 adhĂ©sion aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale. C 101 167. Adresse de la communautĂ© de Sourdeval, 28 dĂ©cembre 1789 demande d'un district et d'une juridiction. C101169. Adresse des officiers municipaux de Granville, 1er jan- vier 1790 vƓux de nouvel an Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale. C102171. Adresse de la paroisse de Tourlaville, limitrophe de Cherbourg, 3 janvier 1790 remerciement pour l'obtention d'un district Ă  Cherbourg. C102174. Adresse de la ville de Saint-LĂŽ, 9 janvier 1790 vote d'une offrande patriotique. ARCHIVES NATIONALES XXV C 10217G. Adresse de la municipalitĂ© et des nĂ©gociants de la ville de Cherbourg, 11 janvier 1790 contre le projet de suppression de l'esclavage aux colonies. C 102170. Adresse de la garde nationale du bourg de Bricquebec, 20 janvier 1790 fidĂ©litĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale. C 102180. Adresse du ComitĂ© municipal et du corps composant la garde nationale de Bayeux, 22 janvier 1790, avec lettre d'envoi de Leboucher-Deslongsparcs, prĂ©si- dent du ComitĂ©, du 24 janvier 1790. Adresse de la garde nationale de la ville de Bayeux, 22 janvier 1790 adhĂ©sion Ă  la constitution. C 10318l Adresse des soldats français en garnison Ă  Valognes et Ă  Cherbourg, janvier 1790 protestation contre la motion Dubois-CrancĂ©. C 104188. Adresse des maire et officiers municipaux de Granville, 8 fĂ©vrier 1790 notifie la formation de la municipalitĂ©. C 104193. Adresse des municipalitĂ©s des paroisses de l'Ă©lection de Mortain, 17 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. C 104194. Adresse des habitants du bourg de Creully et hameaux en dĂ©pendant, 19 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. C 104196. Adresse de la municipalitĂ© de Cherbourg, 21 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. — Adresse du Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune de Tourla- ville, 21 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. C 10520G. ProcĂšs-verbal de l'Ă©lection des officiers municipaux de Saint-LĂŽ et de la prestation du serment civique, 27 janvier, 15 fĂ©vrier 1790. C 108222. Adresse des officiers municipaux de Caen, 28 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. C 109223. ProcĂšs-verbal d'Ă©lection des officiers municipaux de Montebourg, 20-22 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. C 110241. Adresse des citoyens de la commune de GrĂ©ville-Ă -la- Hague, Basse-Normandie, 1er mars 1790 mĂȘme objet. C 110242. Adresse des membres de la municipalitĂ© d'Isigny, 2 mars 1790 mĂȘme objet. C lll246. Adresse des officiers municipaux de Cherbourg, 6 mars 1790, envoi de proclamations des 2 septembre, 6 novembre 1789 et 28 fĂ©vrier 1790, relatives Ă  la perception des impĂŽts indirects. C lll247. Adresse des officiers municipaux de Vire, 10 mars 1790 mĂȘme objet. XXVI ARCHIVES NATIONALES C 111 -i'' . Discours prononcĂ© par l'abbĂ© d'Agneaux dans l'Ă©glise de Villedieu pour la prestation de serment de la milice nationale des paroisses confĂ©dĂ©rĂ©es, Villedieu, Saultchevreuil et Saint-Pierre-du-Tronchet, 14 mars 1790. C 114-'S. ProcĂšs-verbal de la municipalitĂ© de Villedieu relatif Ă  une saisie de faux tabac, 7 avril 1790. C 1 1 4iK> . Adresse de la garde nationale de Caen du 15 avril 1790 avec lettre d'envoi de Faudoas, commandant. ProcĂšs-verbal de la prestation de serment par la garde nationale de Caen, 11 avril 1790, avec lettre d'envoi des officiers municipaux du 16 avril 1790. Proclamation du Conseil gĂ©nĂ©ral de Caen relative Ă  l'abolition de la contrebande, 9 avril 1790. Adresse des membres de la SociĂ©tĂ© patriotique et littĂ©raire de Coutances, 17 avril 1790, piĂšce origi- nale annonce d'un don remis aux indigents. — La mĂȘme, imprimerie Joubert, Coutances. 4 p. C 115u-. Adresse des maire et officiers municipaux d'Avranches, avec lettre d'envoi du 16 mai 1790 fĂ©licitations pour le dĂ©cret du 13 avril 1790. Discours du maire d'Avranches, TesniĂšre de BrĂ©mes- nil, lors de la prestation du serment par les ci- toyens d'Avranches, 2 mai 1790. 2 exemplaires imprimĂ©s. C 1153i3, Adresse de la commune de Valognes, 17 mai 1790 contre le manifeste des catholiques NĂźmois. ProcĂšs-verbal de prestation du serment par la garde nationale de Valognes, 6 juin 1790. Adresse des Ă©coliers du collĂšge de Valognes aux offi- ciers municipaux s. d. adhĂ©sion Ă  la Constitu- tion. Discours de Ribet, Ă©tudiant de philosophie, pro- noncĂ© le jour de la prestation du serment civique par les Ă©coliers. ProcĂšs-verbal de prestation du serment civique sur le Roc de Granville, 13 mai 1790, avec lettre d'envoi des officiers municipaux, 17 mai 1790. C 116J1G. Adresse des officiers de la garde nationale et des volontaires de Cherbourg, 20 mai 1790, avec lettre d'envoi du 21 mai 1790 mĂȘme objet. C 116318. Adresse des officiers de la sarde nationale d'Avran- ARCHIVES NATIONALES XXVII ches, 23 mai 1790, avec lettre d'envoi par Burdelot, lieutenant et secrĂ©taire du Conseil de la garde natio- nale adhĂ©sion Ă  tous les dĂ©crets de l'AssemblĂ©e. C 116318. Adresse de la garde nationale de Saint-LĂŽ, avec lettre d'envoi Ă  Vieillard, dĂ©putĂ© Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 23 mai 1790 mĂȘme objet. C 116323. Jugement de police prononcĂ© le 29 mai 1790 par les officiers municipaux de Baveux contre une dĂ©libĂ©- ration des commissaires du chapitre de la cathĂ©- drale, imprimĂ©e, considĂ©rĂ©e comme attentatoire aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale imprimerie veuve Nicolle, Ă  Bayeux, 7 p., avec lettre d'envoi des officiers municipaux du 11 juin 1790. C 1173-3. Adresse de l'assemblĂ©e primaire de Mortain, signĂ©e de Duhamel, maire et prĂ©sident, et de 56 autres citoyens, 31 mai 1790 fidĂ©litĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale. C 1 1 73-6 . Adresse de la section des Cordeliers, du canton de Valognes, 2 juin 1790 annonce la formation, avec les deux autres sections du canton, d'un Pacte fĂ©dĂ©ral pour la dĂ©fense de la Constitution. Adresse de la 3e section du canton de Sourdeval com- munes du Fresne-Poret et de Vengeons, 2 juin 1790 mĂȘme objet que Mortain. — Adresse de la lre section du canton de Villedieu, 2 juin 1790 rĂ©probation de libelles incendiaires. C 117333, Adresse des Ă©lecteurs des cantons de La Haye-du- Puits, PrĂ©tot et Lessay, 14 juin 1790 reprĂ©sen- tants Ă  l'AssemblĂ©e nationale. — Adresse de la garde nationale de Valognes, 18 juin 1790 nouvelle prestation de serment. C 118340, Adresse des officiers, bas officiers et soldats de la garde nationale de Valognes, 21 juin 1790 an- nonce qu'elle portera 3 jours le deuil de Franklin. — Adresse du dĂ©partement de l'Orne Ă  l'AssemblĂ©e nationale, par Le Veneur, prĂ©sident de l'assemblĂ©e Ă©lectorale, au nom des 601 Ă©lecteurs, 10 juillet 1790 adhĂ©sion Ă  la Constitution. C 119353. Adresse des jeunes patriotes de l'Education natio- nale des sieurs Mougeot, prĂȘtres Ă  Saultchevreuil, prĂšs Villedieu, 4 juillet 1790 adhĂ©sion Ă  la Consti- tution. XWIII ARCHIVES NATIONALES C 119353. Adresse de la garde nationale de Gavray aux PĂšres de la patrie, 4 juillet 1790 dĂ©vouement Ă  l'Assem- blĂ©e. C 121!,,T. Lettre d'envoi par les officiers municipaux de Cher- bourg du procĂšs-verbal de la fĂȘte du 14 juillet 1790, 25 juillet 1790. C 12137p. Proclamation du Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune de Saint-LĂŽ, du 24 juillet 1790 imprimerie Jou- bert, 12 p., concernant le paiement des imposi- tions et droits, avec lettre d'envoi de la municipa- litĂ© du 12 aoĂ»t 1790. C 1891**. Papiers trouvĂ©s aux Tuileries, dans l'appartement de Louis XVI, le 25 juin 1791. Liste des dĂ©putĂ©s des dĂ©partements et districts, envoyĂ©s Ă  la FĂ©dĂ©ration et passĂ©s en revue par Louis XVI, les 13 et 19 juil- let 1790. C 189,1°. M. Etats, listes et procĂšs-verbaux des dĂ©putĂ©s Ă  la FĂ©dĂ©ration de 1790, Calvados. C 189152. Id. Etats, listes, etc., de la Manche. C 189,r>{. Id. Etats, listes, etc., de l'Orne. SÉRIE D ComitĂ©s des AssemblĂ©es Nationales Div Papiers du ComitĂ© de constitution, créé le 3 juillet 1789. Cette sous-sĂ©rie comprend la correspondance des commissaires du roi pour la formation des dĂ©partements avec le comte de Saint-Priest, les rĂ©ponses du ComitĂ© de constitution Ă  des ques- tions posĂ©es par les dĂ©partements ; des piĂšces sur la formation des corps administratifs et des procĂšs-verbaux de formation et d'installation de ces corps. J'y ai consultĂ© les documents suivants Div l57. Tableau gĂ©nĂ©ral du dĂ©partement de la Manche divisĂ© en districts, cantons, assemblĂ©es primaires et com- munes, avec lettre d'envoi des trois commissaires du roi pour la formation du dĂ©partement, 31 juil- let 1790. Div liH. Lettre de FrĂ©min de Beaumont, commissaire du roi, au ComitĂ© de constitution, 1er juin 1790. ARCHIVES NATIONALES XXIX Div l39. Lettre du mĂȘme au mĂȘme ComitĂ©, 3 juin 1790. Div 212. Adresse de la ville de Granville Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 25 juillet 1790. Div 216. Lettre de Bernard, commissaire du roi, au ComitĂ© de constitution, 28 juin 1790. Div 317. Lettre des commissaires du roi, de la Manche, au Co- mitĂ© de constitution, 18 juin 1790. Lettre des commissaires du roi, du Calvados, Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 16 juin 1790. Div 543. Adresse des officiers municipaux de Bayeux au Corps lĂ©gislatif de France s. d., entre mars et juin 1790. Div 678. Lettre de Crafton, commandant de la garde nationale de La Hougue au ComitĂ© militaire de l'AssemblĂ©e nationale, 29 aoĂ»t 1790. Div 711''. ProcĂšs-verbal de formation de la municipalitĂ© de Bretteville-sur-Odon copie, 24 janvier 1790. Div 9132. Protestation de la Haye du Puits auprĂšs de l'Assem- blĂ©e nationale, 18 juillet 1790. Rapport des envoyĂ©s extraordinaires de la Haye du Puits sur l'insalubritĂ© de Carentan, 25 juillet 1790. Div 11169. ProcĂšs-verbaux de formation de la municipalitĂ© de CĂ©rence, 2, 7 et 21 fĂ©vrier 1790. — RequĂȘte de la municipalitĂ© contre les entreprises illĂ©- gales de Brohon, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de CĂ©rences, 14 mars 1790. — Ma justification » imprimĂ©, adressĂ©e par Brohon Ă  l'AssemblĂ©e nationale. Div 11170. Lettre des commissaires du roi, du Calvados, au ComitĂ© de constitution, 3 avril 1790. Div 12173. Lettre de Cauvin, apothicaire et notable de Creully, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 17 fĂ©vrier 1790. Div Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai au ComitĂ© de constitution, sur la garde nationale, 28 mars 1790. Div 21 422. Lettre d'Onfroy, procureur syndic de Tinchebrai, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 14 avril 1790. — Lettre des commissaires du roi, du Calvados, Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 29 mai 1790. Div 21431. Supplique des commis de l'administration provin- ciale de Basse-Normandie Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 24 juillet 1790. XXX ARCHIVES NATIONALES Div 21431. Lettre de CaillouĂ©, procureur de la commune d'Ar- gences, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 12 mars 1790. Div 21*38. Plaintes des habitants de Louvigny contre la muni- cipalitĂ©, 22 mars 1790. — Plaintes de Comin, maire de Magny, contre l'illĂ©galitĂ© de l'assemblĂ©e primaire des Capucins, de Bayeux, 29 mai 1790. — * MĂȘmes plaintes des paroisses de Geffosse, Longues, Marigny, Saint-Germain-des-EntrĂ©es, Sommer- vieu, Saint-Germain-de-la-Lieue, avec dĂ©libĂ©ration spĂ©ciale pour chaque paroisse. Plaintes de Brouard, avocat de Vire, contre les irrĂ©gu- laritĂ©s de l'assemblĂ©e primaire des Capucins de Vire, 25 mai 1790. Plaintes de la municipalitĂ© de Tinchebrai contre l'Ă©tat- major de la milice nationale, 31 mai 1790. Plaintes de Lacour, capitaine des canonniers garde- cĂŽtes, au sujet de la FĂ©dĂ©ration, 30 juin 1790. Div 21 m. Nouvelle protestation de Brouard, avocat de Vire, 9 juin 1790. Div 41I10!. Plaintes de Brohon, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de CĂ©rences, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 18 fĂ©vrier 1790. RequĂȘte de Saint-Nicolas-de-Granville Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 1er mars 1790, contre sa rĂ©union Ă  Granville. — Plaintes de Germain de Louvigny sur la formation irrĂ©guliĂšre de la municipalitĂ© de Sainte-Marie-des- Bois, 26 mai 1790. Div 11110'1. Lettre d'un armateur de Tourlaville, 12 fĂ©vrier 1790. Lettres de deux fermiers d'Anneville-l'Etre, mars 1790. Lettre d'Enguerran des Landes, officier municipal de Saultchevreuil s. d.. — RĂ©clamation contre l'Ă©lection de Chantereyne comme procureur de la commune Ă  Cherbourg, 22 juillet 1790. Div 4111!Vi. Adresse de Granville cĂ  l'AssemblĂ©e nationale, 26 mai 1790. Div ll,l,r\ Lettre des officiers municipaux de Granville Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 15 fĂ©vrier 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXI Div 41im. Lettre des officiers municipaux de Saint-Nicolas-de- Granville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 15 fĂ©vrier 1790. — AdhĂ©sion des bas officiers et fusiliers de la garde nationale de Mortain aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale, 23 juin 1790. Plaintes de la municipalitĂ© de Bricquebec contre l'insubordination de la garde nationale, 29 juillet 1790. Div 111117. ProcĂšs-verbal de formation de la municipalitĂ© de Coulouvray, accompagnĂ© d'une lettre de protesta- tions, 24 janvier 1790. — Lettre de la municipalitĂ© de Saint-Jean-de-Daye, janvier 1790. Lettre de la municipalitĂ© de Soulles, 31 janvier 1790. Divbis Papiers du ComitĂ© de division, 'instituĂ©, le 13 octobre 1791, par la LĂ©gislative pour continuer le travail inachevĂ© du ComitĂ© de constitution, dont il Ă©tait un dĂ©membrement. Cette sous-sĂ©rie comprend 110 cartons, relatifs Ă  la division adminis- trative et judiciaire de la France. J'y ai consultĂ© Divbis l-;{. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la province de Nor- mandie, 17 dĂ©cembre 1789. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s du Cotentin, 18 dĂ©cembre 1789. Note du duc de Coigny sur la division du dĂ©parte- ment de Caen en districts, 18 dĂ©cembre 1789. — Limites des dĂ©partements de Caen et d'Evreux, 21 dĂ©cembre 1789. Limites des dĂ©partements de Cotentin et d'Alençon, 22 dĂ©cembre 1789. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la province de Nor- mandie, 23 dĂ©cembre 1789. ‱ — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s du Cotentin, 24 dĂ©cembre 1789. — Carte du dĂ©partement de Cotentin, divisĂ© en 7 dis- tricts avec ratures, d'aprĂšs la nouvelle division adoptĂ©e le 24 dĂ©cembre 1789. — Limites du dĂ©partement de Beauvoisis et de la Nor- mandie, 1er janvier 1790. — Limites des dĂ©partements d'Evreux et de Mantes et Chartres, 2 janvier 1790. ARCHIVES NATIONALES Div1,is 123. Limites des dĂ©partements d'Evreux et de Chartres, 2 janvier 1790. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s du Coten- tin, 3 janvier 1790. Limites des dĂ©partements de Caen et de Cotentin, 7 janvier 1790. ProcĂšs-verbal de la division de la Normandie en dĂ©- partements et en districts, dressĂ© par Cherfils, Lindet, Goupil de PrĂ©felne, Delauney et de Bon- vouloir, commissaires nommĂ©s par les dĂ©putĂ©s de la province de Normandie, 7 janvier 1790. MĂ©moire sur la division du dĂ©partement de Cotentin, par Pouret-Roquerie, 8 janvier 1790. Rectification d'abornement entre les districts de Carentan et de Valognes, 15 janvier 1790. Etat des paroisses frontiĂšres entre les districts de Carentan et Valognes, de Carentan et Coutances, et des dix cantons Ă  former dans le district de Carentan, 15 janvier 1790. — Division en cantons des sept districts du dĂ©partement de Cotentin, 22 janvier 1790. Division en cantons des six districts du dĂ©partement d'Alençon, 6 fĂ©vrier 1790. Carte du dĂ©partement de Caen, divisĂ©e en districts, tracĂ©e sur la carte gĂ©nĂ©rale de Normandie traces de triangulation. Divbis 223. Constatation par les dĂ©putĂ©s du dĂ©partement de Chartres des procĂšs-verbaux de dĂ©marcation arrĂȘtĂ©s prĂ©cĂ©demment avec les dĂ©partements d'Evreux et d'Alençon, 20 janvier 1790. Pivbis 245. Fixation par les dĂ©putĂ©s de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Tours des limites entre le dĂ©partement du Mans et la Nor- mandie, 12 novembre 1789. Division du Perche entre les dĂ©partements d'Alençon et du Mans, 25 janvier 1790. Divbis517"2. Adresse de la municipalitĂ© de CondĂ©-sur-Noireau Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 dĂ©cembre 1789. ReprĂ©sentations de la ville et arrondissement du bailliage de Torigni sur la nouvelle division terri- toriale, 2 janvier 1790. — PrĂ©cis pour la ville de Torigni imprimĂ©, janvier 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXIII Divbis5172. Suppliques des municipalitĂ©s de Fresnes et Montsecret pour rester au district de Vire, 17 janvier 1790. Divbis 517;J. RĂ©ponse que fournit aux Etats gĂ©nĂ©raux un habitant de Vire Michel le Besnerais, avocat, aux obser- vations de MM. de la commune de Caen sur la division territoriale de la Normandie et sur le dĂ©partement de Caen, 20 dĂ©cembre 1789. — ‱ Supplique du canton d'Hamars Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 11 juin 1790. — Rapport du Directoire du Calvados sur la situation de sept communes entre Dives et Orne, rattachĂ©es malgrĂ© elles au district de Pont-1'EvĂȘque, 20 octo- bre 1790. Divbis10230. Adresses respectueuses de Saultchevreuil, Saint- Pierre-du-Tronchet, Sainte-CĂ©cile, la Colombe, le Chefresne, Fleury, la BloutiĂšre, Margray Ă  l'AssemblĂ©e nationale pour avoir un district Ă  Villedieu, novembre-dĂ©cembre 1789. — MĂ©moire de PĂ©iĂŻers contre la division du dĂ©partement de Cotentin en six districts, 25 dĂ©cembre 1789. — RĂ©clamations de trĂšs nombreuses paroisses du Coten- tin Ă  l'AssemblĂ©e nationale en faveur de PĂ©riers dĂ©libĂ©rations communales, du 6 dĂ©cembre 1789 au 17 janvier 1790. — Protestation de Pouret-Roquerie contre la division du dĂ©partement de Cotentin en sept districts, 30 dĂ©cembre 1789. — Adresse de Villedieu au ComitĂ© de constitution, 30 dĂ©cembre 1789. — RequĂȘtes de Percy et Montrabot pour ĂȘtre ratta- chĂ©es Ă  Villedieu, 30 dĂ©cembre 1789. — RĂ©clamation de Pouret-Roquerie en faveur de PĂ©- riers, 21 janvier 1790. Divbis10231. MĂ©moire du ComitĂ© municipal et national de Cher- bourg Ă  l'AssemblĂ©e nationale imprimĂ©, 12 aoĂ»t 1789. — Copie de la dĂ©libĂ©ration de l'hĂŽtel de ville de Gran- ville, 23 novembre 1789. — RĂ©futation de l'imprimĂ© ayant pour titre Obser- vations sur le chef -lieu du dĂ©partement de Cotentin », par Vieillard imprimĂ©, 19 dĂ©cembre 1789. \\\l\ ARCHIVES NATIONALES Div1,u10-,;il. Extrait du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s du Cotentin copie, 24 dĂ©cembre 1789 formation d'un septiĂšme district. Cf. Div,,is l-;{. RĂ©clamation de PerrĂ©e-Duhamel pour Granville, 2 janvier 1790 ; requĂȘte de Couraye-Duparc pour Granville, 3 janvier 1790. — .MĂ©moire de Valognes au ComitĂ© de constitution contre rĂ©tablissement d'un district Ă  Cherbourg, 7 janvier 1790. — Addition Ă  la rĂ©clamation de PerrĂ©e-Duhamel, 11 jan- vier 1790. — Lettre de Couraye-Duparc, 21 janvier 1790. RĂ©clamation de Granville contre le projet de division de la Basse-Normandie, arrĂȘtĂ© par les dĂ©putĂ©s de cette province imprimĂ© s. d.. Adresse de la garde nationale de Valognes Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 11 mars 1790. Cahier de dolĂ©ances de la Haye du Puits, 1er mars 1789, avec lettre d'envoi de Regnault de Bretel, en septembre 1789. RequĂȘte de la municipalitĂ© de Saint-Fraguaire au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 25 avril 1790. Lettre de Regnault de Bretel Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 18 juin 1790. — RequĂȘte de la municipalitĂ© de Vezins Ă  l'AssemblĂ©e nationale, aoĂ»t 1790. RequĂȘte de la municipalitĂ© de Ducey contre forma- tion vicieuse de son canton s. d.. — Adresse de Saint-Sauveur-le-Vicomte et paroisses voisines Ă  l'AssemblĂ©e nationale s. d.. Cf. Divbis27^. Divl,is12-Vl. RĂ©clamation de la municipalitĂ© de Saint - Pierre - du-Regard au ComitĂ© de constitution, 19 novem- bre 1790 pour sa rĂ©union au Calvados ; lettre du maire de CondĂ© au ComitĂ© de constitution s. d., mĂȘme objet. — MĂ©moire des propriĂ©taires fonciers de Saint-Pierre-du- Regard au ComitĂ© de constitution, 16 janvier 1791. Div,,is21,-S. RequĂȘte de CondĂ©-sur-Noireau Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 14 fĂ©vrier 1790. Divbis21{{M. RequĂȘte d'ĂŻsigny Ă  l'AssemblĂ©e nationale, jan- vier 1790. ARCHIVES NATIONALES XXXV Div,,is213-8. Supplique du maire de Croissanville Ă  Gossin, mem- bre du ComitĂ© de constitution, 6 juin 1790. Divbis21330. Observations soumises par la Commission inter- mĂ©diaire provinciale de Caen Ă  l'AssemblĂ©e na- tionale, s. d. pour obtenir un tribunal supĂ©rieur Ă  Caen. Divbisi27;nw. RequĂȘte de Carentan Ă  l'AssemblĂ©e nationale, novembre 1789 pour ĂȘtre chef-lieu de dĂ©parte- ment. — RequĂȘte des habitants de la Lande-d'Airou, 6 dĂ©- cembre 1789. — RequĂȘte des habitants de Tribehou et Saint-Mar- tin-des-Champs, janvier 1790. RemercĂźments de Carentan Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 30 janvier 1790. — Lettres des revendeurs de sel blanc de la Haye du Puits et de PĂ©riers Ă  Lesage, receveur principal de Carentan, 15 et 17 fĂ©vrier 1790. — Remontrances de la commune de PĂ©riers Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 19 juillet 1790. — MĂ©moire des dĂ©putĂ©s de la Haye du Puits Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 25 juillet 1790. Divbis 27394. Plan du Haut - Cotentin divisĂ© par cantons de 36 lieues carrĂ©es, 26 dĂ©cembre 1789 en faveur de la Haye du Puits. — MĂ©moire de Regnault de Rretel pour la Haye du Puits, 26 dĂ©cembre 1789. — Lettre de Regnault de Rretel Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 7 juin 1790. — MĂ©moires de Granville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 31 mars, 4 aoĂ»t 1790, accompagnĂ©s des dĂ©libĂ©- rations d'une trentaine de paroisses, prises du 31 dĂ©cembre 1789 au 3 janvier 1790. — Adresse de Saint-Sauveur-le-Vicomte Ă  l'Assem- blĂ©e nationale s. d.. — Carte topographique des villes, bourgs et paroisses qui relĂšvent confusĂ©ment des bailliages de Va- lognes et de Saint-Sauveur-le- Vicomte s. d.. — Carte de la presqu'Ăźle de Cotentin comprenant les ‱ districts de Cherbourg, Valognes, Saint-Sauveur- le-Vicomte, portion des districts de Carentan et PĂ©riers s. d.. XXXVI ARCHIVÉS NATIONALES Divhis 44 . Tableaux de population de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en 1787, dressĂ©s par bailliages et Ă©lections 13 ta- bleaux. Divbis 55. Liste des premiers noms donnĂ©s aux 83 dĂ©parte- ments par le ComitĂ© de constitution. Div,is 60 . Instruction sur la formation de l'assemblĂ©e du dĂ©par- tement du Calvados, par les quatre commissaires du roi imprimĂ©, 31 mai 1790. Div1is 92A. RĂ©pertoire des dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale constituante, concernant la division de la France en dĂ©partements, districts, cantons et munici- palitĂ©s leurs circonscriptions, la fixation des chefs-lieux et le placement des autoritĂ©s admi- nistratives et judiciaires, la rĂ©union des municipa- litĂ©s et paroisses, du 17 juin 1789 au 30 septem- bre 1791. Dvi Papiers du ComitĂ© des finances. Cette sous-sĂ©rie contient dans quatre cartons, 23 Calvados, 38 Manche, 43 et 44 Orne, les documents relatifs Ă  l'assiette et Ă  la perception des impĂŽts dans ces trois dĂ©partements. J'y emprunte les piĂšces suivantes Dvi 24314. Lettre des officiers municipaux de Sommervieu, Ă©lection de Bayeux, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 31 mai 1790 rĂ©clamation relative aux impositions. — MĂ©moire de la paroisse de Rye relativement Ă  plu- sieurs difficultĂ©s sur la rĂ©partition de l'imposition des ci-devant privilĂ©giĂ©s, 21 juin 1790. RĂ©clamation du chevalier de Vaudreuil contre la municipalitĂ© de CampandrĂ©, 26 mai 1790. Dvi 24345. Lettre des officiers municipaux de Rouffigny, Ă©lection d'Avranches, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 fĂ©vrier 1790 demande d'instructions sur la rĂ©partition des impositions. Lettre du curĂ© de Chouains Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 4 aoĂ»t 1790 dĂ©nonciation contre la municipalitĂ©. — Lettre de l'abbĂ© de Jumilly, ex-prĂ©sident du ComitĂ© national de Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 13 avril 1790 rĂ©clamation contre la lourdeur de lĂ  taxe reprĂ©sentative de la corvĂ©e imposĂ©e Ă  la ville de Caen. ARCHIVES NATIONALES XXXVII Dvi 24315. MĂ©moire de la municipalitĂ© de Margray, Ă©lection de Vire, 23 fĂ©vrier 1790 plainte contre la lourdeur des impositions. — MĂ©moire de la municipalitĂ© de Pontfarcy, Ă©lection de Vire, 16 fĂ©vrier 1790 mĂȘme objet. MĂ©moire de Cairon de la Varende, d'Amblie, 18 juil- let 1790 plainte contre l'imposition des ci-devant privilĂ©giĂ©s. Dvi 24316. MĂ©moire de la municipalitĂ© de CondĂ©-sur-Noireau, fin mars 1790 demande d'une rĂ©duction d'impĂŽt. A l'appui de sa requĂȘte, elle a joint des lettres de Lamy, dĂ©putĂ© du bailliage de Caen, et un exem- plaire imprimĂ© du procĂšs-verbal de la formation de la confĂ©dĂ©ration de CondĂ© du 26 aoĂ»t 1789, publiĂ© Ă  Caen, Chalopin, 1789. — MĂ©moire des marchands aubergistes de la ville et faubourgs de Caen, 4 aoĂ»t 1790 plaintes contre la duretĂ© de l'impĂŽt. — Lettre d'Aveline, notaire et syndic de la municipalitĂ© de Caumont, Ă©lection de Bayeux, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 6 fĂ©vrier 1790 plainte de 5 paroisses rurales contre le despotisme des villes. — Plainte anonyme des habitants, laboureurs, fermiers et exploitants des communautĂ©s de campagne de la Basse-Normandie Ă  NN. SS. de l'AssemblĂ©e nationale, 10 fĂ©vrier 1790 plaintes contre l'ins- truction de la Commission intermĂ©diaire de Caen du 19 janvier 1790. — Lettre de Mauduit, prĂ©sident du ComitĂ© national de Vire Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 9 dĂ©cembre 1789 plaintes contre l'exĂ©cution frauduleuse du dĂ©cret relatif Ă  l'imposition des ci-devant privi- lĂ©giĂ©s. Dvi 24317. RequĂȘte des employĂ©s de l'intendance de Caen Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 31 dĂ©cembre 1789 deman- dent Ă  ĂȘtre placĂ©s dans les bureaux de l'adminis- tration nouvelle. — Lettre de LangelĂ©-Duperrier, de Colleville prĂšs Bayeux, au ComitĂ© des finances, 8 aoĂ»t 1790 demande d'une manufacture pour la jeunesse. — RequĂȘte de Boutrais, marchand grainetier Ă  Caen, au ComitĂ© des finances, 16 fĂ©vrier 1791 demande WXYlii ARCHIVES NATIONALES d'indemnitĂ© pour le pillage de son magasin dans l'Ă©meute du 24 avril 1789, dossier de 17 piĂšces. Dvi 24{8. Lettre des habitants les plus notables et les plus imposĂ©s de Bricqueville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 19 fĂ©vrier 1790 protestation contre les irrĂ©gula- ritĂ©s de l'Ă©lection municipale. Dvi 24319, Lettre de Louvet, docteur-mĂ©decin Ă  Isigny, Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 3 octobre 1789 demande de travaux pour le soulagement des malheureux. Dvi 24i-°. RequĂȘte de Boislandry et Bougon-Longrais, dĂ©putĂ©s extraordinaires de la ville de Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 20 mai 1790 demande d'autorisation d'un emprunt de 50,000 livres. Dvi 38i45. Lettre des officiers municipaux de Baubigny Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 30 mars 1790 demande d'une rĂ©duction d'impĂŽt. Lettre des officiers municipaux de Saint-Pierre- Eglise Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 12 mars 1790 plainte contre l'Instruction de la Commission in- termĂ©diaire provinciale de Caen du 19 janvier 1790, avec exemplaire imprimĂ© de cette Instruction. — Lettre de Chauvel, notaire Ă  la Lande-d'Airou, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 6 juin 1790 sur l'abus de la contrebande. — Lettre de Bernard, vice-prĂ©sident du ComitĂ© national de Saint-LĂŽ, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 25 novem- bre 1789, accompagnĂ©e d'une dĂ©libĂ©ration de ce ComitĂ© du 23 novembre sur le changement appor- tĂ© Ă  la rĂ©gie des droits d'aides. — Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 12 mars 1790 plaintes contre la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, avec exemplaire imprimĂ© de l'Instruction du 19 janvier 1790. — Lettre de Payen de Chavoy, membre du Bureau intermĂ©diaire d'Avranches Ă  l'AssemblĂ©e natio^ nale, 3 janvier 1790 sur l'assiette des impositions. Plainte de 16 paroisses de l'Ă©lection de Valognes contre l'Instruction de la Commission intermĂ©- diaire provinciale de Caen du 19 janvier 1790, 30 mars 1790, avec un exemplaire imprimĂ© de cette Instruction. ARCHIVES NATIONALES XXXIX Dvi 38ii0. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 12 juin 1790 demande d'autorisation d'un octroi sur les boissons. Dvi 38;/7. Lettre des officiers municipaux Ă  Tourla ville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 7 avril 1790 protestation contre les insinuations de PomiĂšs, commissaire de la Nation, accompagnĂ©e d'une proclamation de la municipalitĂ© contre la fraude, du 28 mars 1790 placard imprimĂ©. Dvi 38r,/'8. Proclamation de la municipalitĂ© de Cherbourg rela- tive Ă  la perception des droits, 28 fĂ©vrier 1790 imprimĂ©. — MĂ©moire pour les habitants de Cherbourg contre la rĂ©gie gĂ©nĂ©rale des droits d'aides s. d.. Dvi 38549. Lettre de Leconte, maire de la Bonneville, Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 10 avril 1790 signale l'Ă©tat misĂ©- rable du pays. — Extrait d'une dĂ©libĂ©ration du Conseil gĂ©nĂ©ral de Saint-LĂŽ, du 25 fĂ©vrier 1790 contre les exigences excessives du directeur des aides. Dvi 38350. Lettre de Bucaille, maire de Brevands, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 12 mai 1790 sur la nouvelle Ă©lection de la municipalitĂ©. Liste des officiers municipaux de Gatteville Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 22 mars 1790 plaintes contre l'Instruction de la Commission intermĂ©diaire provinciale du 19 janvier 1790. — Lettre des officiers municipaux de Tocqueville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 14 mars 1790 mĂȘme objet. Lettre des officiers municipaux de Canteloup Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 18 mars 1790 mĂȘme objet. Dvi 38iy' . Lettre de Lefauqueux, greffier de la subdĂ©lĂ©gation de Saint-LĂŽ, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 2 juillet 1790 demande de secours. Dvi 3833i. Lettres Ă©crites Ă  l'AssemblĂ©e nationale au sujet de la contribution patriotique, par DesaunĂšs, de Caen, 1er avril 1790 ; Lehardy, de Caen, 2 avril 1790 ; Delaville, mĂ©decin de l'hĂŽpital des travaux de la rade de Cherbourg, 28 dĂ©cembre 1789 ; de Morel, avocat Ă  Carentan, 18 juin 1790. Dvi 43. Lettre de Guillouet, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Jinchebrai, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 17 fĂ©vrier 1790 XL ARCHIVES NATIONALES sur les nouvelles exigences des curĂ©s pour les dĂźmes et les pailles. Dvi 64. Etals de situation des finances de la France, de l'Ă©ten- due, de la population et des contributions de chaque gĂ©nĂ©ralitĂ© du royaume en 1788. Dxi Papiers du ComitĂ© de liquidation. Cette sous-sĂ©rie ne m'a fourni de renseignements que sur un point Dxi 29. Lettres et mĂ©moires relatifs Ă  l'indemnitĂ© accordĂ©e Ă  Bellissent, nĂ©gociant Ă  Caen, pour le pillage de son magasin de grains dans l'Ă©meute du 23 avril 1789. Dxm Papiers du ComitĂ© d'Agriculture et de Commerce Dxm 4. Adresse des fermiers en gĂ©nĂ©ral du Cotentin Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, s. d. 1790, 2 piĂšces. Dxiv Papiers du ComitĂ© des droits fĂ©odaux, comprend douze cartons, classĂ©s par ordre alphabĂ©tique de dĂ©partements. Trois d'entre eux renferment d'importants documents relatifs Ă  l'Ă©- poque Ă©tudiĂ©e dans ce travail, Ă  savoir Dxiv 213 pour le Calvados, 548 pour la Manche, 8 pour l'Orne. Dxiv2l* Cabourg. DĂ©tails importants et d'un intĂ©rĂȘt marquant pour l'utilitĂ© publique, en ce qui touche et la vie la tranquillitĂ© de toutes les classes de citoyens dans les campagnes, 2 juin 1790 mĂ©moire sur les dunes de Cabourg, par le comte de Persan, contre les habi- tants. — Landelles. Lettre de Mireaume-Deslandes au ComitĂ© des droits fĂ©odaux, 21 mars 1790. — Rots. Lettre des officiers municipaux de Rots au prĂ©si- dent de l'AssemblĂ©e nationale, 23 fĂ©vrier 1790 contre les usurpations de l'abbaye Saint-Etienne de Caen. — Lettre de Cotelle, avocat au bailliage de Vire, 13 octo- bre sur les dĂźmes infĂ©odĂ©es. Dxiv 5''8 Agon. RequĂȘte des habitants Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 16 janvier 1790 sur l'usurpation de biens commu- naux par le seigneur. — Avranches. Lettre de Gauquelin, prĂȘtre, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 18 aoĂ»t 1789 sur l'usur- pation des landes de Pontorson par le seigneur. ARCHIVES NATIONALES XLI Dxiv5''8 BrĂ©cey. Plaintes des habitants Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 28 mai 1790 sur l'abus et l'iniquitĂ© des redevances seigneuriales. — Bricquebec. Plaintes des habitants de Bricquebec, des Perques, de Quettetot et de Surtainville Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 20 septembre 1789 contre l'inter- diction par les seigneurs des droits d'usage dans la forĂȘt. — Carneville. Plaintes des habitants de Gonneville et Carneville, 30 mai 1790 contre les vexations du seigneur. — La Chapelle-Enjuger. Lettre de Dagobert, major des chevaliers royaux du DauphinĂ©, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 26 fĂ©vrier 1790 contre les vexations du seigneur. — Coutances. Lettre des officiers municipaux Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 15 mars 1790 sur le droit de havage. — Gavray . Lettre d' Hervieu, avocat Ă  Gavray , Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 14 fĂ©vrier 1790 sur le droit de banalitĂ©. — Mesnil-Amant. Lettre de Cabaret, avocat Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 27 aoĂ»t 1790 sur le droit de pĂȘche. HautevilĂźe-sur-Mer. RĂ©clamations des habitants Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 5 aoĂ»t 1790 contre l'usur- pation d'un marais par le seigneur. — La Haye-du-Puits. Lettre de Regnault de Bretel Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 2 mai 1790 sur le rachat des rentes seigneuriales. — Isigny, prĂšs Mortain. Lettre de Godard Ă  l'AssemblĂ©e nationale, aoĂ»t 1790 sur un droit Ă  la foire Saint- Mathieu. — RequĂȘte des habitants de Moyon, Tessy, Villebaudon, Mesnil-Opac, Beaucoudrai, Mesnil-Hermant, Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 17 fĂ©vrier 1790 contre les vexa- tions des agents du prince de Monaco. — Neufmesnil. MĂ©moire rĂ©digĂ© par Lesens, mars 1790, dĂ©bats avec paroisses voisines. — Torigni. Lettre de DechevriĂšre Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 4 dĂ©cembre 1789 refus gĂ©nĂ©ral du paiement des droits seigneuriaux. — Valognes. Lettre de Hubert, procureur de la maĂźtrise des eaux et forets, 21 novembre 1789 sur les droits de treiziĂšme. \ ARCHIVES NATIONALES Dxiv 8 Tinchebrai. Lettre de Mme Duchatel, veuve de Fierval, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 28 aoĂ»t 1791 sur refus de paiement des rentes par ses vassaux. Dxxix Papiers du ComitĂ© des rapports. Cette sous-sĂ©rie com- prend 101 cartons, classĂ©s par ordre de dĂ©partements 1 Ă  16 ; par ordre alphabĂ©tique des lieux 16 Ă  84, et des personnes 86 Ă  92. On y trouve d'assez nombreuses piĂšces relatives aux dĂ©buts de la RĂ©volution dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen Dxxix 8. Copie du registre destinĂ© pour recevoir les plaintes et griefs des citoyens de Granville contre M. de PrĂ©- fort, commandant du roi Ă  Granville, ouvert le 19 juillet 1790. MĂ©moire Ă  consulter pour le sieur de PrĂ©fort, comman- dant Ă  Granville. — Lettre de la municipalitĂ© de Granville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 4 octobre 1790 plaintes contre les mĂ©- faits de PrĂ©fort. Dxxix 18. Lettre de la municipalitĂ© et du ComitĂ© rĂ©unis d' Avran- ches Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 26 dĂ©cembre 1789 sur l'abaissement nĂ©cessaire du prix du sel blanc dans l'Avranchin. Extrait du registre des dĂ©libĂ©rations d'Avranches, 22 dĂ©cembre 1789 relatif au mĂȘme objet. Dxxix 29. Lettre du marquis d'Oilliamson au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 4 aoĂ»t 1789 sur l'incendie de son chartrier. — Lettre d'un bourgeois de Caen au prĂ©sident de l'As- semblĂ©e nationale, 7 octobre 1789 sur l'insubordi- nation des volontaires nationaux. Plaintes de tous les honnĂȘtes citoyens de la ville de Caen » Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 18 dĂ©cembre 1789 protestation contre le service de garde que le ComitĂ© veut leur imposer. . — Lettre de Boyer, directeur des aides et octrois de Caen Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 31 juillet 1789 sur l'Ă©- meute du 20 juillet. Lettre du Directoire du Calvados Ă  de Lessart, 24 juil- let 1789 avec piĂšces relatives Ă  l'indemnisation de Bellissent, pour le pillage de ses grains dans l'Ă©meute de Caen, des 23-24 avril 1789. ARCHIVES NATIONALES XLIII Dxxix 29. Lettre de Signard d'OuffiĂšres et Bougon-Longrais, dĂ©putĂ©s extraordinaires de Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 3 dĂ©cembre 1789 protestation contre un article du Journal gĂ©nĂ©ral de France », du 19 no- vembre, injurieux pour Caen. Lettre du comte de Vassy au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 27 juillet 1789 sur l'abandon forcĂ© de ses droits fĂ©odaux. Lettre de la femme Sosson Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 21 octobre 1789 relative au meurtre de Belzunce. — Lettre de Guilbourt, ancien juge consul de Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 novembre 1789 contre la composition dĂ©mocratique des assemblĂ©es pa- roissiales. — Etat, en deux tableaux, des signataires de l'assemblĂ©e de la paroisse Notre-Dame, du 18 novembre 1789, et des non signataires envoi de Guilbourt relatif au mĂȘme objet. — Lettre du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen, DuperrĂ© de Lisle, au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 16 octobre 1789 contre l'anarchie mu- nicipale. — Lettre du mĂȘme, mĂȘme date, sur l'impuissance du ComitĂ© national de Caen. — Lettre des principaux citoyens de Caen Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 27 octobre 1789 sur la situation trou- blĂ©e de cette ville. ‱— - MĂ©moire justificatif, par du Belloys, avocat, dĂ©tenu au chĂąteau de Caen, ms. autographe, 28 p. sur le meurtre de Belzunce, avec lettre d'envoi de du Belloys au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 1er novembre 1789. — PrĂ©cis de ce qui s'est passĂ© Ă  Caen au ComitĂ©, les 11 et 12 aoĂ»t 1789, 8 p. ms., avec lettre d'envoi par le ComitĂ© deCaenĂ l'AssemblĂ©enationale, 19 aoĂ»t 1789, - — Avis important d'un citoyen de Caen Ă  ses conci- toyens pour la rĂ©formation de leur ComitĂ© et la perfection de leur milice nationale, par Brion des Parcs fils, avec lettre d'envoi Ă  l'AssemblĂ©e natio- nale, 7 novembre 1789. Pxxix 30. Extraits des dĂ©libĂ©rations du Conseil municipal de Carentan, des 25, 27 et 30 mai et du corps des NATIONALES volontaires nationaux, du 27 mai, avec lettre d'envoi de la municipalitĂ©, du 3 juin 1790 sur l'Ă©meute de Carentan, du 17 mai 1790. Dxxix 32. Lettre de Garantot, ancien maire et subdĂ©lĂ©guĂ© de Cherbourg, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, avec l'Ă©tat des piĂšces qui ont pu ĂȘtre retrouvĂ©es chez M. de Garantot aprĂšs le sac de sa maison et jointes Ă  son adresse, 6 fĂ©vrier 1790. Lettres nombreuses de l'intendant de Launay et de Garantot, relatives Ă  l'approvisionnement de Cherbourg, de mars Ă  juillet 1789. PrĂ©cis de ce qui s'est passĂ© Ă  Cherbourg depuis le 21 juillet jusqu'au 2 aoĂ»t 1789, avec le procĂšs et le jugement des brigands sĂ©ditieux qui ont portĂ© la dĂ©solation et la terreur dans cette ville. Cherbourg, imprimerie Clamorgan, 1789, 28 p. Jugement prĂ©vĂŽtal du 31 juillet 1789 placard imprimĂ© Compte de vente et produit net des divers envois de grains faits Ă  Garantot par l'AssemblĂ©e nationale. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 25 dĂ©cembre 1789 sur la contre- bande. Extrait du registre des dĂ©libĂ©rations de l'hĂŽtel de ville de Cherbourg, du 21 juillet au 6 aoĂ»t 1789, avec lettre d'envoi des officiers municipaux Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 6 aoĂ»t 1789 sur les troubles de Cherbourg. Copie de l'adresse de la SociĂ©tĂ© des amis de la Consti- tution de Cherbourg au corps municipal de cette ville, 19 juillet 1790 et procĂšs- verbal de la presta- tion du serment fĂ©dĂ©ral du 14 juillet 1790 Ă  Cher- bourg, avec lettre d'envoi des officiers municipaux Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 25 juillet 1790 sur les illuminations du 14 juillet. Dxxix 33. Lettre de Gourjon, pasteur de Monchamps, Ă  l'abbĂ© Goutte, vice-prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 28 mai 1790 contre le fanatisme des prĂȘtres catho- liques de sa rĂ©gion. Dxxix 34. Lettre des officiers de la milice nationale de Cou- tances Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 26 juin 1790, et rĂ©ponses du ComitĂ© des rapports, 2 juillet et 2 aoĂ»t 1790 sur la destitution d'un garde national, notable de Coutances. ARCHIVES NATIONALES XLV Dxxix36. Adresse de SauvĂ©, maire de Ducey, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 31 janvier 1790, accompagnĂ© d'un procĂšs-verbal de dĂ©libĂ©ration des citoyens actifs de Ducey contre une accusation de malversation dont il est l'objet. Dxxix39. Lettre de GauchĂ©-Dumeslais, procureur du roi de la maĂźtrise des eaux et forĂȘts de Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 11 dĂ©cembre 1789 sur les dĂ©vastations des bois nationaux. ProcĂšs-verbal d'un sergent de la maĂźtrise des eaux et forĂȘts, 3 dĂ©cembre 1789 mĂȘme objet. ProcĂšs-verbal du mĂȘme, 4 dĂ©cembre 1789 mĂȘme objet. Dxxix40. RĂ©clamation Ă  l'AssemblĂ©e nationale par les arma- teurs, capitaines, officiers de navires, nĂ©gociants, fabricants et marchands de Granville contre l'arrĂȘtĂ© du 2 dĂ©cembre 1789, pris contre eux par le soi- disant ComitĂ© national. Lettre de Couraye-Duparc, maire et ancien subdĂ©lĂ©guĂ© de Granville, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 7 septem- bre 1789 sur la formation du ComitĂ© de Granville. — Lettre des officiers municipaux de Granville Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 19 juillet 1790 sur le mĂ©contente- ment causĂ© par le retour de PrĂ©fort, commandant du roi. — Lettre de Poulain de Boutancourt aux officiers muni- cipaux de Granville, 8 mai 1790 conflit entre Gran- ville et Saint-Nicolas. Dxxix 58. Lettre des officiers municipaux du Mont-Saint-Michel Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 30 juin 1790 sur la rĂ©- pression de la contrebande. Dxxix 71. Adresse du ComitĂ© national de Saint-LĂŽ Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 18 novembre 1789 sur un dĂ©lit relatif aux subsistances. PĂ©tition de Leduc, citoyen de Saint-LĂŽ Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 6 janvier 1790 relative au service de la garde nationale. Dxxix78. Lettre de La FilanchĂšre, contrĂŽleur des vingtiĂšmes de l'Ă©lection de Mortain, aux dĂ©putĂ©s des Etats gĂ©nĂ©raux, 1er aoĂ»t 1790 sur son exclusion de Tinchebrai. — Lettre du mĂȘme au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 15 septembre 1789 mĂȘme objet. \LM ARCHIVES NATIONALES Dxxix78. Lettre de la municipalitĂ© de Tinchebrai Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 23 dĂ©cembre 1789 long exposĂ© de griefs contre La FilanchĂšre, contrĂŽleur des vingtiĂšmes. D XXIX 81. Adresse des officiers municipaux de Valognes Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 22 j uillet 1789 adhĂ©sion Ă  ses travaux. — Lettre de Pernet-Desbordes, contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral des aides de Cherbourg Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 16 mars 1790 sur le manque d'autoritĂ© des employĂ©s. Lettre des officiers municipaux de Cherbourg Ă  l'As- semblĂ©e nationale, 20 mars 1790 plaintes contre la dĂ©livrance de contrebandiers par les gardes nationaux de Valognes. — ProcĂšs-verbal du 7 dĂ©cembre 1789 relatif Ă  la saisie de 7 sacs de sel blanc et Ă  la dĂ©livrance de neuf faux-sauniers par les habitants de Valognes. — ProcĂšs-verbal du 7 mars 1790 relatif Ă  la dĂ©livrance de deux contrebandiers de tabac par la garde nationale de Valognes. — Lettre des officiers municipaux de Valognes Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 16 avril 1790 protestation contre les accusations calomniatrices de Cherbourg. — Lettre des officiers municipaux de Valognes Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, s. d., envoi d'une dĂ©libĂ©ration de l'hĂŽtel de ville, du 9 mars 1790, sur l'insubordi- nation de la garde nationale et demande d'une rĂ©glementation gĂ©nĂ©rale. Dxxix 83. Adresse des municipalitĂ©s de Saultchevreuil, Ville- dieu et Saint-Pierre-du-Tronchet Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 26 mai 1790 adhĂ©sion Ă  ses dĂ©crets ; rĂ©cit d'une saisie de tabac. Dxxix 84. Lettre de Duboscq, Brouard, Cailly et Mauduit, com- missaires de la garde nationale de Vire Ă  l'Assem- blĂ©e nationale, 15 aoĂ»t 1790 rĂ©cit d'un attentat dirigĂ© contre le comte de PontĂ©coulant Ă  l'assem- blĂ©e Ă©lectorale de Vire, 7 juillet. Dxxix 91. Lettre de RouhiĂšre de Fontenelle, de Cherbourg, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 11 novembre 1789 au sujet de sa destitution comme aide-major de la milice nationale. Lettre de Viel, fabricant de bas au mĂ©tier Ă  Caen, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 18 novembre 1789 plaintes contre la libre circulation des grains. ARCHIVES NATIONALES xLVif Dxxixbis Papiers du ComitĂ© des recherches, comprend les lettres, mĂ©moires, procĂšs-verbaux et dĂ©libĂ©rations des munici- palitĂ©s, les dĂ©nonciations concernant les troubles dans les dĂ©par- tements. J'y ai relevĂ© les documents ci-aprĂšs Dxxix1^ 2*4 Dxxix'^333, Dxxixbis 315 Dxxixhis 4',s, Dxxixbis 4i/., du dĂ©partement d'Alençon Orne, dĂ©posĂ© le 24 mars 1790. SERIE W Tribunal rĂ©volutionnaire W 294-°. Dossier de la Roque, seigneur de Cahan, ancien subdĂ©- lĂ©guĂ© de Mortain. W 296-47. Dossier de Gabriel de Cussy, ancien dĂ©putĂ© du bail- liage de Caen aux Etats gĂ©nĂ©raux, puis conven- tionnel. W 3406-1. Dossier de Lacour, comte de Balleroy, ancien procu- reur-syndic provincial de Caen. ARCHIVES DU MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES SÉRIE AD BibliothĂšque administrative J'y ai particuliĂšrement utilisĂ© les sous-sĂ©ries suivantes ADi 60. RĂ©gime administratif et politique. ADxvi, 27, 49 et 56. Histoire des dĂ©partements. Les piĂšces ou brochures consultĂ©es sont mentionnĂ©es dans la partie de cette notice consacrĂ©e Ă  la bibliographie des imprimĂ©s. IL — ARCHIVES DU MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES L'administration de la province de Normandie relevant du secrĂ©tariat des affaires Ă©trangĂšres Ă  la fin de l'Ancien rĂ©gime jusqu'en 1788, les archives du ministĂšre actuel des affaires Ă©trangĂšres contiennent quelques documents relatifs au dĂ©but de la pĂ©riode qui fait l'objet de cette Ă©tude. Ils sont renfermĂ©s dans le fonds France, Affaires intĂ©rieures, et dans celui de Frange, Commerce lK J'y ai consultĂ© France. Affaires intĂ©rieures, 1401. Registre, piĂšce 29. Liste des notables composant l'assemblĂ©e des notables de 1787, parta- gĂ©e en 7 bureaux. Versailles. Imprimerie D. Pierres, 1787. Le comte de Vendceuvre, maire de Caen, y figure comme 16e mem- bre sur 19 du 7e bureau, prĂ©sidĂ© par le duc de PenthiĂšvre. Ici., 1403. Registre, piĂšce 53. Rapport du 7e bureau sur le MĂ©moire de GalonnĂ© relatif aux AssemblĂ©es provinciales. France. Commerce, 2006. MĂ©moires et documents, 1745- 1820, 46 piĂšces en un volume in-folio de 412 feuillets, piĂšce 35. Observations de la Chambre de commerce de Normandie sur le traitĂ© de commerce entre la France et l'Angleterre, fol0 292-323. IbicL, 2006, piĂšce 44. MĂ©moire d'Anquetil rĂ©sumant 4 bro- chures de polĂ©mique relatives Ă  ce traitĂ© de commerce, parues en 1788. 1 Inventaire sommaire des Archives du DĂ©partement des Affaires EtrangĂšres. MĂ©moi- res et Documents. France. Paris, Imprimerie Nationale, 1883. Inventaire supplĂ©men- taire. — Dans cette collection, le fonds France. Affaires intĂ©rieures, occupe les articles 744 Ă  1415, et le fonds France, Commerce, les articles 1984 Ă  2020. — Le fonds intitulĂ© Petits fonds provinces, articles 1416 Ă  1768, ne contient pour la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, aux articles 1662-1653 et 1762, que dos document-; antĂ©rieurs nu 26 aoĂ»t 1786. dont je n'ai pas eu Ă  tirer parti, LVI ARCHIVES DEPARTEMENTALES France. Commerce, 2013. MĂ©moires et documents, 1786-1829, 49 piĂšces en un volume in-folio de 374 feuillets, piĂšce 19. Plaintes des officiers municipaux de Granville, adressĂ©e au Roi et Ă  NN. SS. de son Conseil, contre le traitĂ© de commerce de 1786. IbicL, piĂšce 25. Lettre d'envoi des observations de la Chambre de commerce de Normandie au baron de Breteuil, par les syndics de cette Chambre, 15 octobre 1787 original. Ibid., piĂšce 26. Extrait des observations de la Chambre de com- merce, pour ĂȘtre placĂ© sous les yeux du roi. Ibid., piĂšce 27. Lettre de remercĂźments de l'intendant de Rouen, de Maussion, Ă  Breteuil, au nom de la Chambre de commerce de Normandie, 19 novembre 1787. TH. — ARCHIVES DÉPARTEMENTALES 1° Archives dĂ©partementales du Calvados J'y ai utilisĂ© de fort nombreux documents de la sĂ©rie C et accessoirement des sĂ©ries B, E, F et L. La sĂ©rie C compte prĂšs de 13,000 articles-1. Elle se compose des fonds de l'ancienne intendance de Caen et de ses subdĂ©lĂ©- gations, C 1-6957, C 9446-9565, et de la Commission intermĂ©- diaire provinciale de Basse-Normandie, C 7610-8578. L'Ă©tat de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen Ă  la fin de l'ancien rĂ©gime est exposĂ© d'aprĂšs C 267. Tableau nominatif des villes et communautĂ©s de la gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Caen en 1787. C 269-292 ; 1056, 1070. MĂ©moires statistiques des intendants et des subdĂ©lĂ©guĂ©s au cours du XVIIIe siĂšcle. C 6379. Tableau du sol, des productions, du commerce et des impositions de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen par l'intendant Fontette, 1770. 1 La sĂ©rie c du Calvados comprend exactement l,243arliclcs d'inventaire imprime'1 en 4 volumes et 5 feuilles ; 8,122 articles d'inventaire rĂ©digĂ©, pouvant donner la matiĂšre de 7 volumes Ă  l'impression ; en outre, 1,525 registres et liasses fonds de l'enregistrement et des domaines, reprĂ©sentant environ 30 u/0 de la sĂ©rie Ă  clas- ser. Rapport de M. Besnier, archiviste dĂ© arlemental du Calvados, 1008, p. 274. — C'est Ă  la complaisance inĂ©puisable et aux savantes directions de M. Armand BĂ©net, ancien archiviste du Calvados, que je dois la connaissance de celle importante sĂ©rie C. A l'hommage de reconnaissance pie je lui rends ici, j'associe son aimable cl obligea ni successeur, M. Besnier. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LVII C 151-190. Tableaux du mouvement de la population, 1773-1787. C 233. Tableau de l'administration de l'intendant Cordier de Launay, 1787-1790. C 6331. Tableau des dĂ©partements de l'intendance de Caen, 1769. C 201-228. Documents relatifs Ă  l'hĂŽtel de l'Intendance 1682- 1790. C 229-234 ; 6331-6332. Documents relatifs au personnel des bu- reaux de l'intendance. C 6880-6957; 9446-9565. Fonds des subdĂ©lĂ©gations Caen et Bayeux. Sur l'organisation de l'assemblĂ©e provinciale et l'Ă©bauche des assemblĂ©es d'Ă©lection chap. II, j'ai consultĂ© C 110. Edit concernant la formation et convocation des Assem- blĂ©es provinciales dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen im- primĂ©, 1787. C 6341-6343. RĂšglements, instructions et correspondance rela- tifs Ă  cet objet. La premiĂšre session de l'AssemblĂ©e provinciale et celles des assemblĂ©es d'Ă©lection de 1787 chap. III et IV, sont retracĂ©es d'aprĂšs les documents suivants C 7610-7618. ProcĂšs-verbaux des sĂ©ances, rapports et mĂ©moires de l'AssemblĂ©e provinciale, 1787. C 7643-7644. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e d'Ă©lection d'Avran- ches copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Boudent. C 7654. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Bayeux registre original. C 7663. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Caen copies collationnĂ©es par le secrĂ©- taire Hainguerlot. C 7689. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Caren- tan copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Duval. C 7698. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Coutan- ces copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Caillard. C 7705. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Mortain copies collationnĂ©es par le secrĂ©- taire Monnier. LYII1 ARCHIVES DEPARTEMENTALES C7711. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Saint-LĂŽ copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Vieillard. C7719. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Valognes co- pies collationnĂ©es par le greffier Duval. C 7725. Id. de l'assemblĂ©e d'Ă©lection de Vire registre original. L'Ă©tude du rĂ©gime municipal en 1787 et de la formation des municipalitĂ©s rurales de 1787 chap. V, s'est Ă©clairĂ©e des docu- ments suivants C 1049 . Edit concernant l'administration dans les villes et princi- paux bourgs delĂ  province de Normandie, juillet 1766. C 1050, 1051. Correspondance gĂ©nĂ©rale de 1692 Ă  1785. C 1058; 1061-1064; 7649. Correspondance relative Ă  l'adminis- tration municipale d'Avranches. C 1089-1095, 6478. Id. de Caen. C 1155-1157. Id. de Carentan. C 1168-1173. Id. de Coutances. C 1183-1186. Id. de Granville. C 1221, 6504, 7707. Id. de Mortain. C 1229, 1230. Id. de Saint-LĂŽ. C 1241, 1242, 7724. Id. de Cherbourg. C 1253-1257, 6507. Id. de Valognes. C 1277. Id. de Vire. C 6344. Incidents relatifs Ă  la formation des municipalitĂ©s rurales, 1787-1789. C 7680-7685. ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales des municipalitĂ©s de l'Ă©lection de Caen, 1787. C 7648. Tableaux de formation des assemblĂ©es municipales de l'Ă©lection d'Avranches. G 7662. Id. de l'Ă©lection de Bayeux. C 7697. Id. de l'Ă©lection de Carentan. C 7704. Id. de l'Ă©lection de Coutances. C 7710. Etat des assemblĂ©es municipales de Mortain et mĂ©- moire sur les assemblĂ©es municipales. C 7717. Tableau de formation des assemblĂ©es municipales de l'Ă©lection de Saint-LĂŽ. C 7731 . Id. de l'Ă©lection de Vire. L'activitĂ© de la Commission intermĂ©diaire provinciale, des bureaux intermĂ©diaires de dĂ©partement et des procureurs-syndics chap. VI, a Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©e d'aprĂšs ARCHIVES DEPARTEMENTALES LIX C 7619-7621. Compte-rendu de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie, 1790 3 exem- plaires imprimĂ©s. C 7622, 7623. Deux registres de correspondance de la Commis- sion intermĂ©diaire provinciale 1° 10 fĂ©vrier- 7 mai 1788 ; 2° 21 juin-7 octobre 1788. C 7624, 7625. Deux registres de correspondance des procureurs- syndics provinciaux 1° 29 aoĂ»t 1787-4 juillet 1788 ; 2o 20 dĂ©cembre 1789-3 avril 1790. C 7626-7628. Lettres adressĂ©es Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale, 1787-1790. C 7729, 7730. Edits, dĂ©clarations et lettres patentes, 27 octobre 1789-25 juillet 1790. C 7778-8312. Documents relatifs aux impositions Impositions en gĂ©nĂ©ral, 7778-7790 ; tailles, 7790-7816 ; Ă©tats d'imposition de 1788 pour les Ă©lections de Caen et de Vire, 7816-9089 ; capitation, 8090-8155 ; contribution patriotique, 8156-8157 ; vingtiĂšmes, 8158-8178 ; impĂŽt territorial, 8179-8255 ; corvĂ©e, 8256-8312. C 8320-8517. Documents relatifs aux ponts et chaussĂ©es. C 3087-3088. Correspondance de Lefebvre, ingĂ©nieur en chef. C 7655. Registre des dĂ©libĂ©rations et arrĂȘtĂ©s du bureau intermĂ©diaire de Bayeux, 6 octobre 1787-7 aoĂ»t 1790. C 7726. Registre des dĂ©libĂ©rations du bureau intermĂ©- diaire de Vire, 18 fĂ©vrier 1788-30 juin 1790 avec lacune du 24 octobre 1788 au 21 novembre 1789. C 7657-7658. Deux registres de correspondance du bureau inter- mĂ©diaire de Bayeux, mars 1788-7 aoĂ»t 1790 *. C 7647-7649. Dossiers de correspondance du bureau intermĂ©- diaire d'Avranches. C 7661. Id. du bureau intermĂ©diaire de Bayeux. C 7666-7678. Id. du bureau intermĂ©diaire de Caen. C 7693-7696. Id. du bureau intermĂ©diaire de Carentan. C 7701-7703. Id. du bureau intermĂ©diaire de Coutances. 1 Les archives dĂ©partementales du Calvados viennent de rentrer en possession du registre des dĂ©libĂ©rations du bureau intermĂ©diaire du dĂ©partement de Caen, 24 janvier 1788-6 aoĂ»t 1790, qu'un libraire de Tours a revendu Ă  M. Besnier, archi- viste dĂ©partemental. Cette prĂ©cieuse restitution Ă©lĂšve de 5 Ă  6 le nombre des dĂ©par- tements de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen pour lesquels nous possĂ©dons la trace les dĂ©libĂ©- rations des bureaux intermĂ©diaires. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7664 ‱ LX ARCHIVES DÉPARTEMENTALES C 7707-7709. Dossiers de correspondance du bureau intermĂš- de Mortain. C 7712-7716. Id. du bureau intermĂ©diaire de Saint-LĂŽ. C 7722-7724. Id. du bureau intermĂ©diaire de Valognes. C 7727-7730. Id. du bureau intermĂ©diaire de Vire. Sur les assemblĂ©es de dĂ©partement de 1788 et la campagne en faveur des Etats provinciaux de Normandie, j'ai consultĂ© C 7645. ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'assemblĂ©e d'Avranches 3 cahiers, copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Boudent. C 7654. Id. de l'assemblĂ©e de Bayeux registre original. C 7664. Id. de l'assemblĂ©e de Caen 3 cahiers, copies collation- nĂ©es par le secrĂ©taire Hainguerlot. G 7690. Id. de l'assemblĂ©e de Carentan registre, copies colla- tionnĂ©es par le secrĂ©taire Duval. C 7700. Id. de l'assemblĂ©e de Coutances cahier, copie colla- tionnĂ©e par le secrĂ©taire Caillard. C 7707 . Id. de l'assemblĂ©e de Mortain copie collationnĂ©e par le secrĂ©taire Monnier. C 7112-7714. Id. de l'assemblĂ©e de Saint-LĂŽ 3 cahiers, copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Vieillard. G 7720, 7721. Id. de l'assemblĂ©e de Valognes 2 cahiers, copies collationnĂ©es par le secrĂ©taire Duval. C 7725 . Id. de l'assemblĂ©e de Vire registre original. C 7631 . Etats de Normandie. MĂ©moires et notices, 1788-1790. C 7632-7634. DĂ©clarations des paroisses de l'Ă©lection de Caen en faveur du rĂ©tablissement des Etats de Normandie septembre-novembre 1788. Les archives dĂ©partementales du Calvados renferment d'assez nombreux documents sur le mouvement Ă©lectoral, les Ă©lections et les cahiers des bailliages de Caen et de Coutances en 1789 chap. IX, X et XI. Ce sont, dans la sĂ©rie C C 6345. ArrĂȘts, instructions, correspondance gĂ©nĂ©rale relatifs Ă  la Convocation, 1788-1789. C 6346. Documents relatifs aux dĂ©penses des assemblĂ©es de bailliages. C 6348-6359. Documents relatifs Ă  la Convocation surtout rap- ports de subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă  l'intendant pour Avran- ches 6318 ; Bayeux 6349 ; Caen 6350 ; Caren- ARCHIVES DEPARTEMENTALES EXI tan 6351 ; Cherbourg 6352 ; Coutances 6353 Granville 6354 ; Mortain 6355 ; Saint-LĂŽ 6356 Saint-Sauveur-le-Vicomte 6357 ; Valognes 6358 Vire 6359. La sĂ©rie B, non inventoriĂ©e, renferme le procĂšs-verbal et le cahier du clergĂ© du bailliage de Caen ; le cahier des pouvoirs et instructions de la noblesse ; le cahier d'observations et dolĂ©ances de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat de ce bailliage copies informes ; le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire des bailliages de Bayeux copie collationnĂ©e, signĂ©e du lieutenant gĂ©nĂ©ral, La Jumel- liĂšre, de Torigni copie collationnĂ©e par le greffier Dufresne, de Vire original signĂ© par tous les comparants avec le procĂšs-verbal original de l'assemblĂ©e du 5 mars 1789 ; les rĂ©flexions de MM. Le Canu et Laurent ; les protestations de Letellier, avocat Ă  Bayeux copies collationnĂ©es. Elle renferme aussi un certain nombre de cahiers paroissiaux ceux de 243 paroisses du bailliage de Fa- laise, 42 procĂšs-verbaux et 36 cahiers de dolĂ©ances du bailliage de Vire d. La sĂ©rie F fonds de Beaumont, contient, dans les papiers d'Eudes de la JumelliĂšre, une sĂ©rie de documents relatifs Ă  la convocation dans le bailliage de Bayeux, et notamment le cahier de dolĂ©ances de Villiers-le-Sec F 782. La sĂ©rie E famille de Vassy, non inventoriĂ©e, renferme une lettre intĂ©ressante du comte de Vassy, sur les Ă©lections aux Etats gĂ©nĂ©raux sans date $. Sur les troubles amenĂ©s par la disette des grains d'avril Ă  juillet 1789 chap. XII, j'ai consultĂ© C 2638-2641 ; 2663, 2665, 2670, 2674, 2675, 2679, 2684, 2685, 2688. Correspondance de l'intendant Cordier de Launay, relative Ă  l'approvisionnement des diverses villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. 1 J'ai consacrĂ© un article Ă  ces procĂšs-verbaux et cahiers, au lendemain de leur dĂ©couverte dans les greniers de la mairie de Vire, par M. A. BĂ©net. Voir La RĂ©vĂŽlu- lution française, tome XXXI, 1896, p. 300-346 et 414-426. 2 Ces archives contiennent aussi, dans un fonds tout rĂ©cemment acquis, relatif Ă  la famille de Savignac, une sĂ©rie de piĂšces trĂšs intĂ©ressantes sur les derniĂšres annĂ©es du rĂ©gime fĂ©odal dans le Bessin. et notamment des lettres de Leprestre, rĂ©gisseur du domaine de Meuvaines, au comte de Savignac, alors en rĂ©sidence Ă  Moissac, sur lea dĂ©buts de la RĂ©volution dans la Basse-Normandie, 1786-1790. LXII ARCHIVES DÉPARTEMENTALES C 6370. Rapport de Cordier de Launay sur l'Ă©meute de Cher- bourg, 28 mars 1790. F non inventoriĂ©. Registre de copies de lettres du directeur de la mine de Littry lettres relatives Ă  la grande peur, juillet 1789. Sur les milices urbaines antĂ©rieures aux milices nationales C 2105-2116. Sur la formation des municipalitĂ©s de 1790 chap. XIV C 1049. Lettres patentes et instructions de l'AssemblĂ©e nationale relatives Ă  la loi municipale du 14 dĂ©cembre 1789. C 7686-7688. ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales de 1790 Ă©lection de Caen. L non inventoriĂ©. Tableau de la formation des municipalitĂ©s du district de Bayeux et correspondance y relative. Sur la division de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en dĂ©partements, je n'ai trouvĂ© aux Archives dĂ©partementales du Calvados qu'un seul document, mais trĂšs important C 9. Carte originale de la division du dĂ©partement de Caen, signĂ©e par les dĂ©putĂ©s de ce dĂ©partement, le 25 fĂ©vrier 1790D. L'organisation administrative du dĂ©partement du Calvados et la liquidation des affaires relatives Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen font l'objet de nombreux documents de la sĂ©rie L, en trĂšs grande partie non inventoriĂ©e. En voici l'indication sommaire Registre des procĂšs-verbaux de la Commission du roi pour le dĂ©partement du Calvados, 29 mars-13 juillet 1790. Registre des ordonnances de cette Commission, 10 avril-11 juil- let 1790. Lettres-circulaires et expĂ©ditions de cette Commission, 29 mars- 13 juillet 1790. ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es primaires Ă©lectorales du Calvados et correspondance y relative. 1 C'est le double de la carie dĂ©posĂ©e au ComitĂ© de constitution et conservĂ©e aux Arch. nat., NN 78. Voir ci-dessus, p. u\. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LXIII ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement du Cal- vados, 11-14 juin 1790. ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales des trois districts de Caen, Bayeux et Vire. ProcĂšs-verbal des arrĂȘtĂ©s de Messieurs les Commissaires des dĂ©partements de la Manche, du Calvados et de l'Orne, 3 octobre 1790-6 juin 1791. Lettres d'Esmangart, ancien intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, Ă  Bayeux, procureur gĂ©nĂ©ral syndic du dĂ©partement du Calvados, 27 dĂ©cembre 1790 et 24 fĂ©vrier 1791. Lettre adressĂ©e au mĂȘme par Feydeau de Brou, ancien intendant de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, 12 janvier 1791. Tableau de partage entre les dĂ©partements du Calvados, de la Manche et de l'Orne des diverses espĂšces de fonds confiĂ©s Ă  l'administration de l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Nor- mandie ou de sa Commission intermĂ©diaire, conformĂ©ment au procĂšs-verbal signĂ© le 0 mars 1791. ProcĂšs-verbal dĂ©finitif de liquidation adressĂ© par les commissaires Ă  Roland, ministre de l'intĂ©rieur, 10 janvier 1793. La sĂ©rie C renferme Ă©galement deux liasses de documents rela- tifs au mĂȘme objet, l'un dans le fonds de l'intendance, et l'autre dans celui de la Commission intermĂ©diaire provinciale C 6334. Instructions relatives Ă  la remise des papiers adminis- tratifs par l'intendant de Caen aux Directoires de la Manche, du Calvados et de l'Orne, 8 juin-5 no- vembre 1790. C 7727. Instructions relatives Ă  la remise des papiers adminis- tratifs par la Commission intermĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie aux Directoires de la Manche, du Calvados et de l'Orne. 2° Archives dĂ©partementales de la Manche *. J'ai eu recours Ă  trois sĂ©ries de ce dĂ©pĂŽt les sĂ©ries B, C et L. La sĂ©rie B inventaire manuscrit dĂ©taillĂ©, contient des docu- ments relatifs Ă  la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux de 1789 dans les bailliages de Carentan, Valognes et Torigni. 1 Passage en blanc dans le texte. 2 Je remercie vivement M. Dolbet, archiviste dĂ©partemental de la Manche, de L'obligeant empressement qu'il a mis Ă  me faciliter la consultation de ce dĂ©pĂŽt. LXIV ARCHIVES DEPARTEMENTALES Pour le bailliage de Carentan, un seul procĂšs-verbal d'assem- blĂ©e primaire, celui de Carentan, et le cahier de cette ville sur 48 cahiers rĂ©digĂ©s dans le ressort; en outre, le cahier de l'assem- blĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat du bailliage 0. Pour celui de Valognes, collection Ă  peu prĂšs complĂšte des procĂšs-verbaux 120 et des cahiers 124 sur 129 rĂ©digĂ©s *. Pour celui de Torigni, 40 procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es Ă©lecto- rales, et 36 cahiers de dolĂ©ances, sur 59 rĂ©digĂ©s . La sĂ©rie C inventaire imprimĂ©, 1347 articles °, relative Ă  l'intendance d'Alençon, contient de rares documents sur les impositions de 24 paroisses de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen rattachĂ©es en 1790 au dĂ©partement de l'Orne. 1 Cf. Arch. Nat., NN* 12. Voir ci-dessus, p. liv. 2 J'exprime Ă  M. L. Duval, ancien archiviste de l'Orne, mes sincĂšres remerci- raents pour son obligeant concours. 3 Inventaire sommaire des Archives dĂ©partemen aies antĂ©rieures Ă  1796 Orne, sĂ©ries C et D, par Gravelle-Desulis. Paris, 1877, in-4*. LXVI ARCHIVES DÉPARTEMENTALES G 1298 1299. RĂŽles de la rĂ©partition faite, d'aprĂšs les mandements des bureaux intermĂ©diaires de Vire et de Mortain, de l'imposition du supplĂ©ment des ci-devant pri- vilĂ©giĂ©s pour les six derniers mois de 1789 dans ces 24 paroisses. La sĂ©rie L offre plus de ressources, la formation du dĂ©parte- ment ayant intĂ©ressĂ© les trois cantons d'Athis, Fiers et Tinche- bray, dont le territoire ressortissait presque entiĂšrement, sous l'ancien rĂ©gime, Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. L 376. Commission royale donnĂ©e Ă  Marescot, doyen du prĂ©si- dial d'Alençon, pour la formation du dĂ©partement de l'Orne, avec lettre d'envoi aux municipalitĂ©s, 7 avril 1790. L 377. Inventaire des piĂšces que MM. les Commissaires nommĂ©s par le roi pour la formation du dĂ©partement de l'Orne... ont remises au secrĂ©tariat dudit dĂ©parte- ment et dont ils demeurent dĂ©chargĂ©s P. L 383. Tableau de la formation et de la population active du dĂ©partement de l'Orne. Alençon, imprimerie veuve Malassis, 1790. L 388. ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es primaires des cantons d'Athis, Fiers et Tinchebray. L 391 . ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement de l'Orne, 30 juin-7 juillet 1790. L 392. ProcĂšs-verbal de la premiĂšre session du Conseil du dĂ©par- tement de l'Orne, 23 juillet 1790. L 396. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du district de Domfront, 16-19 juillet 1790. — ProcĂšs-verbal de la premiĂšre sĂ©ance du Conseil du district de Domfront. L 1022. Extrait du registre des actes et arrĂȘtĂ©s des commissaires des dĂ©partements du Calvados, de l'Orne et de 1 Parmi les piĂšces que mentionne cet inventaire, se trouvaient 1° un exemphrire imprimĂ© de la Commission donnĂ©e par le roi aux sieurs vicomte de Chambra y de la BelliĂšre, Ducoudray et Marescot, pour la formation du dĂ©partement de l'Orne ; — 2° une expĂ©dition du procĂšs-verbal des limites de dĂ©marcation de' la composition du dĂ©partement de l'Orne, arrĂȘtĂ© et signĂ© le 24 mars 1790 par les dĂ©putĂ©s Ă  l'Assem- blĂ©e nationale intĂ©ressĂ©s audit dĂ©partement, et attestĂ© par les commissaires-adjoints du ComitĂ© de constitution ĂȘtre un de ceux y dĂ©posĂ©s ». Ce prĂ©cieux document, dont le double existe aux Archives nationales. NX* 13, ne ligure plus aux Archives de l'Orne. ARCHIVES DEPARTEMENTALES LXYIl la Manche, entre lesquels les paroisses de la gĂ©nĂ©- ralitĂ© sont partagĂ©es, 3-5 octobre et 13 novembre 1790. L 1023. Liquidation des affaires communes de l'ancienne gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Caen compte de la Commission intermĂ©- diaire provinciale, 13 fĂ©vrier 1791. Id. compte des ci-devant intendants de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, 1er mars 1791 . — Id. procĂšs-verbal des commissaires vĂ©rificateurs, 1er juin 1791. L 1024. Tableaux des partages de dĂ©penses et de recettes faits entre les trois dĂ©partements de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Q SĂ©questre. Dossier relatif aux biens possĂ©dĂ©s dans l'Orne par l'intendant Cordier de Launay et son pĂšre Cordier de Montreuil seigneuries d'Echauffour, LigniĂšres et Mesnil-Vicomte. B non classĂ©. Cette sĂ©rie n'offre qu'un seul document un appel des dĂ©putĂ©s, fragment du procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Tin- chebrai. 4° Archives dĂ©partementales de l'Eure !. La sĂ©rie E supplĂ©ment non inventoriĂ©e de ce dĂ©pĂŽt contient le fonds important du Chartrier du Champ de bataille marquisat de Neubourg, provenant des archives de la famille d'Harcourt. J'y ai trouvĂ© des documents relatifs au rĂŽle jouĂ© par le duc de Beuvron, commandant en second, puis en chef, de la province de Normandie, pendant les troubles de l'annĂ©e 1789. En voici l'Ă©- numĂ©ration succincte Dossier relatif aux troubles de Saint-LĂŽ, mai 1789. — Lettre du comte deBalleroy Ă  l'intendant Cordier de Launay, 3 mai 1789 ; de Bernard, avocat du roi au bailliage de Saint-LĂŽ, au duc de Beuvron, 10 mai 1789 ; de Robillard, lieutenant-gĂ©nĂ©ral du mĂȘme bailliage, au premier prĂ©sident du Parlement de Normandie, 13 mai 1789 ; du ComitĂ© d'approvisionnement de Saint-LĂŽ, Ă  l'intendant de Caen, 18 juin 1789. 1 J'adresse mes sincĂšres remerciements Ă  M. Besnier qui, Ă©tant archiviste dĂ©par- temental de l'Eure Ă  l'Ă©poque de mes recherches, ma, par son extrĂȘme ohligeance, facilitĂ© celles-ci. LXVIII ARCHIVES COMMUNALES Dossier relatif aux troubles d'Isigny et d'Osmanville, juillet 1789. — Lettres du duc deBeuvron Ă  Paysant, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Bayeux, et au chevalier de Gualy, chef du dĂ©ta- chement d'Isigny. Lettre de Vaufleury de Saint-Cyr, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bail- liage de Mortain, au duc deBeuvron, 5 juillet 1789. Lettre de Lentaigne de LogiviĂšrĂ©, receveur gĂ©nĂ©ral des finances, Ă  Guyard, premier secrĂ©taire de l'intendance de Caen, 1er juil- let 1789. PiĂšces relatives au dĂ©sarmement de braconniers Ă  Robehomme, 19 mai 1789 ; Mesnil-Patry, 21 juin 1789 ; Saint-Fromond, 1er juil- let 1789. Lettres de Necker au duc de Beuvron et Ă  l'intendant Cordier de Launay, 23 juin 1789 sur la dĂ©sobĂ©issance du lieutenant gĂ©nĂ©- ral du bailliage de Bayeux aux Ă©dits concernant les grains. Etat gĂ©nĂ©ral des armes et munitions de guerre qui ont Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©es depuis le 1er juillet jusqu'au 1er octobre 1789 par Du- fresne, garde d'artillerie de Saint-LĂŽ, 1er octobre 1789. Relation de ce qui s'est passĂ© Ă  Cherbourg les 21 et 22 juil- let 1789 » rĂ©cit, malheureusement fragmentaire, d'un tĂ©moin oculaire. IV. ARCHIVES COMMUNALES 1° Archives communales de Caen. Les archives communales de Caen, qui sont situĂ©es dans les combles de l'hĂŽtel de ville, sont assez riches en documents sur les dĂ©buts de la RĂ©volution. Elles n'avaient jusqu'ici Ă©tĂ© l'objet que d'un classement tout Ă  fait rudimentaire ; mais l'inventaire vient d'en ĂȘtre terminĂ© pour la partie antĂ©rieure Ă  1790. Les prĂ©cieuses indications que M. Sauvage, archiviste, chargĂ© de ce travail, m'a fournies, me permettent de donner une cote ferme Ă  un certain nombre des documents utilisĂ©s. La sĂ©rie AA contient les documents suivants AA 42. Adresse de la ville de Caen au roi, relative aux Etats provinciaux, 1788. A A 43. MĂ©moire au roi, par les 6 corps de la ville de Caen, 1788 imprimĂ©. ARCHIVES COMMUNALES LXIX AA 44. Lettres et rĂšglement relatifs Ă  la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, 1789 6 piĂšces. AA 47. ProcĂšs-verbaux des dĂ©libĂ©rations des assemblĂ©es de corps et corporations de Caen, 1789. AA 48. RĂ©flexions relatives aux cahiers de dolĂ©ances, arrĂȘtĂ©es par MM. les Maires et Echevins de Caen, et lues Ă  l'assemblĂ©e du 28 fĂ©vrier 1789 imprimĂ©. AA 49. Cahiers de dolĂ©ances des corps et corporations, 1789. AA 50. Cahier d'observations et dolĂ©ances du Tiers Ă©tat de la ville de Caen original, 4 mars 1789 *. AA 51. DolĂ©ances du curĂ© et des prĂȘtres de la paroisse Saint- Sauveur-de-Caen, 1789 2 piĂšces. AA 52. DolĂ©ances et sentiments du curĂ© d'AmayĂ©-sur-Orne. AA 53. Cahier de dolĂ©ances de la paroisse de Moult original, 1er mars 1789. AA 54. Projet de cahier en 22 articles ms, sans date et sans nom d'auteur. AA 55. Discours de Revel de Bretteville, procureur du roi et de DuperrĂ©-Delisle, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, 22 octobre 1788 imprimĂ©. Lettre de Cagny, maire de Caen, Ă  Saffrey, prieur juge consul, 20 fĂ©vrier 1789. Discours de l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  l'ouverture de l'assem- blĂ©e du clergĂ©, 17 mars 1789 copie ms. — Lettre Ă  la noblesse de Caen par l'un de ses membres, NĂ©el de Tontuit, 23 mars 1789 copie ms. — Lettre de Necker aux officiers municipaux de Caen, 19 aoĂ»t 1789. — Lettres du duc d'Harcourt sur le mĂȘme objet, 24 aoĂ»t, 3 septembre 1789. — Lettres de l'intendant Cordier de Launay aux officiers municipaux de Caen sur le mĂȘme objet, 2 aoĂ»t, 30 septembre, 20 dĂ©cembre 1789. — ArrĂȘtĂ©s du Bureau des subsistances de Caen, 28 septem- bre, 10 novembre 1789. il Je donnerai, sur le contenu des articles AA 47, 49 et 50, des renseignement; plus dĂ©taillĂ©s dans la Notice bibliographique de ma thĂšse complĂ©mentaire, intitulĂ©e Le Cahier d'observations et dolĂ©ances 1249. 40. Avis des bons Normands suite de /' dĂ©diĂ© aux AssemblĂ©es de bailliages, sur la rĂ©daction du cahier des pouvoirs et instructions [par le mĂȘmej. Bibl. nat., Lb391250. 41. Circulaire adressĂ©e aux curĂ©s au nom du duc d'OrlĂ©ans par M. de Limon, 7 mars 1789, s. 1., in-4°. Bibl. nat., Lb391378. 42. ConsidĂ©ration du Tiers Ă©tat de la province de Normandie sur la forme des futurs Etats gĂ©nĂ©raux [par Chartier, avo- cat]. 1788, in-8°. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., GĂ©nĂ©ralitĂ©s, carton 3. 43 . Instructions envoyĂ©es par S. A. Mgr le duc d' OrlĂ©ans, s. 1. n. d. in-8°. Bibl. nat., Lb*4379. 44. Lettre d'un Bas-Normand au sujet de l'assemblĂ©e des Etats gĂ©nĂ©raux, 12 mars 1789. Imp., 47 p. Bibl. nat., Lb»140Ă». 45. Lettre de M. DuperrĂ© de Lisle, lieutenant gĂ©nĂ©ral au bailliage de Caen, Ă  M.... dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux. Arch. nat., ADxvi 27. 46. Prenez-y garde, ou avis Ă  toutes les AssemblĂ©es d'Ă©lection qui seront convoquĂ©es pour nommer les reprĂ©sentants des trois ordres aux Etats gĂ©nĂ©raux, prĂ©cĂ©dĂ© d'une observation importante pour les Normands sans nom d'auteur. Rouen, 1788, in-8°. 47. Projet d'un cahier gĂ©nĂ©ral destinĂ© Ă  l'instruction des dĂ©putĂ©s aux AssemblĂ©es gĂ©nĂ©rales des bailliages et siĂšges provin- ciaux et des dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux, fait par un gentilhomme de Normandie, ami de la Nation. Rouen, 1789, in-8. XCVIII IMPRIMÉS 48. RequĂȘte au roi, par un avocat de V ordre du Tiers, demeurant et exerçant son Ă©tat dans l'enclave du grand bailliage de Cotenlin, 26 avril 1789. ImprimĂ© chez un bon citoyen, in-12. Bibl. nat., Lb^lGl?. 49. Tiers Ă©tat de Normandie Ă©clairĂ© Le, ou ses droits justifiĂ©s. 1789, in-8°. Bibl. nat., Lb>1106. 50. Tribut d'un gentilhomme Normand aux Notables de France assemblĂ©s le 4 novembre 1788 i par Achard de Bon- vouloir , publiĂ© par Hippeau, Le gouvernement de Normandie. Voir n° 52, t, VI., p. 167-171. VI Recueils des cahiers de dolĂ©ances rĂ©digĂ©s dans l'Ă©tendue du ressort des deux bailliages de Caen et de Coutances. 51 . ProcĂšs-verbal de rassemblĂ©e du Tiers Ă©tat de la ville de Saint- LĂŽ, s. 1., 1789, in-12. 52. Hippeau, Le gouvernement de Normandie aux XVIIe et X VIIIe siĂšcles. Documents inĂ©dits tirĂ©s des archives du chĂąteau d'Harcourt. Caen, 1863-1869, 9 vol. in-8°. Le t. VI, consacrĂ© aux Ă©lections de 1789 en Normandie ; les t. VII et VIII, aux cahiers de 1789 en Normandie. Cette publication a Ă©tĂ© l'objet d'une sĂ©vĂšre, mais juste critique de M. Bridrey, Les cahiers du Cotentin, t. I. Introduction, p. 48-54. 53. Anquetil E., Etats gĂ©nĂ©raux de 1789, cahier du Tiers Ă©tat de Bayeux. Bayeux, 1883, in-8°. 54. Bridrey, Les cahiers de dolĂ©ances du bailliage de Cotentin. Paris, Impr. Nationale, 2 vol. in-8° 1907-1909. Le 3e volume de cette excellente publication est sous presse. 55. Mourlot, Le Cahier d'Observations et DolĂ©ances de la ville de Caen. Paris, CornĂ©ly, 1911, in-8°. SociĂ©tĂ© de l'his- toire de la RĂ©volution fiançaise. VII ComitĂ©s permanents et gardes nationales. 56. Adresse du ComitĂ© municipal de Bayeux Ă  ses concitoyens, 25 novembre 1789. Bibl. comm., Caen, piĂšces sur Bayeux, I 26. IMPRIMES XCIX 57 . Adresse gratis aux citoyens de la ville de Caen. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen. piĂšces sur Caen. 58. ArrĂȘtĂ© pris par les notables de la ville de Caen, assemblĂ©s Ă  Vhotel de M. le duc de Beuvron, concernant le soulage- ment des pauvres, 7 mars 1789. Caen, Le Roy, 1789. Arch. nat, ADxvi 27. 59. ArrĂȘtĂ© du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral de Coutances, 7 septembre 1789. Coutances, Joubert, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 60. ArrĂȘtĂ© de VassembtĂ©e gĂ©nĂ©rale de la municipalitĂ© et milice nationale de la ville de Mortain, 10 septembre 1789. Avranches, Lecourt, 1789. Arch. nat., ADxvi49. 61. Compte-rendu Ă  leurs commettants par les dĂ©putĂ©s de la no- blesse du grand bailliage de Cotentin aux Etats gĂ©nĂ©raux de France de 1789. Paris, de l'imprimerie Rain- ville, 1791, in-8o. Bibl. nat., Lb395455. 62. DĂ©cret du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral et national d' Avranches, 31 aoĂ»t 1789. Avranches, Lecourt. Arch. nat., ADxvi 49. 63. DĂ©cret du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral de Saint- Sauveur-le- Vicomte rela- tif au maintien des droits. Cherbourg, Clamorgan, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 64. Discours prononcĂ© dans V Ă©glise de V abbaye royale de Saint- Etienne de Caen, le 13 septembre 1789, lors de la bĂ©nĂ©- diction des Ă©tendards de MM. les Volontaires nationaux, par dom Mesnilgrand, prieur de la mĂȘme abbaye. Bibl. comm., Caen. 65. Discours de VĂ©vĂȘque de Bayeux au sujet de la bĂ©nĂ©diction des drapeaux de la garde nationale de cette ville, 22 novem- bre 1789. Bayeux, veuve Nicole, 1789. Bibl. comm., Caen, Bayeux, I, piĂšce 25. 66. Extrait du procĂšs-verbal du comitĂ© gĂ©nĂ©ral et national de la ville de Caen relatif Ă  la mort de M. de Belzunce. Caen, Le Roy, 1789. Arch. nat., AD xvi 27, et Bibl. nat., Lb392278. 67. Lettre de l'honorable Jean Rablu, maĂźtre crocheteur et caporal major de la milice de CĂ©na, Ă  l'honorable Pierre TubƓuf, garçon boucher de Poissy, 1790. Bibl. comm., Caen, piĂšces sur la RĂ©volution Ă  Caen. 68. Police intĂ©rieure du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral national de Caen et des bureaux particuliers. 15 aoĂ»t 1789. Caen, Le Roy. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la RĂ©volu- tion, II, piĂšce 11. IMPItIMI S 69. RĂšglement pour la composition et l'organisation de la muni- cipalitĂ© de Cherbourg, ourle par les reprĂ©sentants de la commune Ă  l'HĂŽtel de Ville, le 6 octobre 1789. Cherbourg, Clamorgan, 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 70. Hemeicicmenl des comtes de Fondons et d'Osseville aux ci- toyens de Caen, 28 aoĂ»t 1789. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la RĂ©volution, II, piĂšce 12. 71 . RĂ©ponse du bureau militaire de la garde nationale de la ville de Bayeux Ă  l'adresse du ComitĂ© municipal. Bibl. comm., Caen, Bayeux, piĂšces I, 27. 72. RĂ©volutions de Caen, capitale de la Basse-Normandie, ou rĂ©cit exact de ce qui s'est passe dans celle capitale et parti- culiĂšrement de la prise de la forteresse, juillet 1789. Paris, 1789. Arch. nat., ADxvi 27. Cf. Bibl. nat., Lb392023. VIII Division de la Normandie en dĂ©partements. 73. Aubry-Dubochet, Nouvelle division de la France en 110 dĂ©- partements, chacun pouvant former une assemblĂ©e pro- vinciale, etc. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD1 60. 74 . Bureaux de Pusy, Rapport sommaire sur la nouvelle division du royaume, 8 janvier 1790. Arch. nat., AD1 60. 75. Dupont de Nemours, Rapport sur le dĂ©cret gĂ©nĂ©ral relatif aux dĂ©partements du royaume, fait au nom du ComitĂ© de constitution, 15 fĂ©vrier 1790. Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat, AD1 60. 76. Duquesnoy, Opinion sur la division du royaume, 5 octobre 1789. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD*60. 77. mirabeau, Plan de division du royaume et rĂšglement pour son organisation. Arch. nat., AD1 60, incomplet. 78. MĂŽntier, Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la LĂ©gislative, 1789-1792. Paris, 1899, in-8°. SociĂ©tĂ© de l'histoire de la RĂ©volution française. 79. Observations sur le rapport du ComitĂ© de Constitution concer- nant la nouvelle organisation de la France, par un dĂ©putĂ© Ă  V AssemblĂ©e nationale, 2 octobre 1789. Versailles, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD1 60. IMPRIMES CI 80. Rabaut de Saint-Etienne, RĂ©flexions sur la division nouvelle du royaume et sur les privilĂšges et les assemblĂ©es des provinces d'Etals. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD* 60. 81 . Rabaut de Saint-Etienne, Nouvelles rĂ©flexions sur la nouvelle division du royaume, adressĂ©es Ă  ses commettants, Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat., AD^O. 82. Target, Opinion sur la division du royaume, 10 novembre 1789. Paris, Baudoin, 1789. Arch. nat., AD»60. 83. Thouret, Discours Ă  V AssemblĂ©e nationale sur la nouvelle division territoriale du royaume, les 3, 9 et 11 novem- bre 1789. Paris, imp. nat,, 1790. Arch. nat., ADl60. 84. DĂ©crets de i AssemblĂ©e nationale concernant la division du royaume en 83 dĂ©partements. Paris, Imp. Nat., 1790. Arch. nat., AD1 60. IX Adresses des villes Ă  l'AssemblĂ©e nationale. 85. Lettre Ă  mes commettants, par le chevalier de la VarigniĂšre, dĂ©putĂ© extraordinaire de Torigni. s. d. Arch. nat., ADxvi 49. 86. MĂ©moire relatif Ă  la division des deux dĂ©partements de la Basse-Normandie, par trois dĂ©putĂ©s extraordinaires de Carentan. Arch. nat., ADxvi 27. 87. Observations pour la ville de Cherbourg, par de Chanlereyne, avocat, dĂ©putĂ© extraordinaire. Veuve HĂ©rissant, 14 dĂ©- cembre 1789. Arch. nat., ADxvi 49. 88 . Observations sur la division territoriale de la Normandie et sur le dĂ©partement de Caen en particulier, prĂ©sentĂ©es par les dĂ©putĂ©s extraordinaires de la commune de Caen et Ă  NN. SS., de V AssemblĂ©e nationale et Ă  MM. les DĂ©putĂ©s de la province de Normandie. Caen, Le Roy, 1789, in -8°. 89. Observations soumises Ă  NN. SS. de V AssemblĂ©e nationale au nom de la commune de Caen par ses dĂ©putĂ©s extraor- dinaires. Caen, 1790, imp. Le Roy. Arch. nat., ADxvi 27. 90. Observations pour la ville de Carentan. Carentan, veuve Delaguette, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 91 . PrĂ©cis pour la ville de Carentan, par Y ver de la Bruchollerie. Imp. veuve Delaguette, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. Cil IMPRIMES 92. Addition au PrĂ©cis pour la ville de Carentan ou rĂ©ponse aux observations pour la ville de PĂ©riers. Carentan, s. d., veuve Delaguette. Arch. nat., ADxvi 49. X Organisation administrative des dĂ©partements. 93. Adresse de rassemblĂ©e Ă©lectorale du Calvados Ă  l'assemblĂ©e nationale, 19 juin 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la RĂ©vol., t. II, piĂšce 21. 94. Adresse du dĂ©partement du Calvados Ă  V AssemblĂ©e nationale. Caen, imp. Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 95. Discours de MM. les Commissaires du roi pour le dĂ©parte- ment du Calvados Ă  la municipalitĂ© de Caen, le 2 avril 1790. Caen, Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 96. Extrait des procĂšs-verbaux des assemblĂ©es primaires du dĂ©par- tement de la Manche, contenant la liste de MM. les Elec- teurs du dĂ©partement. Coutances, Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 97. Lettre circulaire des commissaires du roi aux municipalitĂ©s pour la formation du dĂ©partement du Calvados, 29 mars 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 98. ProcĂšs-verbal de rassemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement de la Manche. Coutances, imp. Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 99. Tableau du dĂ©partement du Calvados, contenant le nombre des citoyens Ă©ligibles et actifs de chaque paroisse. Caen, imp. Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la RĂ©volution, I, piĂšce 20. XI Les FĂȘtes de la FĂ©dĂ©ration. 100. Faudoas de, Discours prononcĂ© par Faudoas, comman- dant de la garde nationale de Caen, le 1er juillet 1790, jour de la ConfĂ©dĂ©ration du dĂ©partement du Calvados. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm. de Caen, G* 15*. 101 . PrĂ©cis sommaire de V ordre qui sera suivi lors de la fĂ©dĂ©ration. Caen, Le Roy, 1790. Bibl. comm., Caen, Broch. norm., Caen sous la RĂ©volution, II, piĂšce 23. IMPRIMES CIII 102. ProcĂšs-verbal de la confĂ©dĂ©ration des gardes nationales et troupes de ligne du dĂ©partement du Calvados, du 1er juil- let 1790. Caen, Le Roy, 1790. Arch. nat., ADxvi 27. 103. ProcĂšs-verbal de la fĂ©dĂ©ration des gardes nationales, troupes de ligne et marĂ©chaussĂ©es du dĂ©partement de la Manche, du 5 aoĂ»t 1790. Coutances, imp. Joubert, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. 104. ProcĂšs-verbal fait par la municipalitĂ© de Cherbourg Ă  V occa- sion du serment prĂȘtĂ©, le 14 juillet 1790, par les troupes de ligne et du serment fĂ©dĂ©ratif prĂȘtĂ© tant par la garde nationale que les troupes de garnison, de dĂ©tachement et de tous les citoyens rĂ©unis. Cherbourg, imp. Clamorgan, 1790. Arch. nat., ADxvi 49. XIXe ET XXe SIÈCLES I Histoire gĂ©nĂ©rale et histoire des institutions. 105. Annuaire de Normandie Annuaire des 5 dĂ©partements de l'ancienne Normandie, publiĂ© par l'Association nor- mande de 1833 Ă  nos jours. Bibl. nat., Lc1922. 106 . Annuaire du Calvados de 1829 Ă  nos jours. 107 . Annuaire du dĂ©partement de la Manche de 1829 Ă  nos jours. 108. Ardascheff, Provintsialnaia Administralsia vo Franlsie ve posliedniouiou porou staravo poriadka. Tome I Provintsialnie intendants Petersbourg, Valacheff, 1900, in-8° en russe. Tome II Lioudi, Kiev, Tchokoloff, 1906, in-8°, traduit par Jousserandot, Paris. 199. Ardascheff, Les Intendants de province sous Louis XVI, tome III. Appendice, premiĂšre partie, piĂšces justifi- catives. Youriev, 1904, in-8°. 110. Ardascheff, Razbore knigi A. Onou Bhibori 1789 goda vo Franlzii i nakazui tretriago solsloviia slotchki zriĂ©niia ikhe sootvietstviia istinnomou nastroenniiou straniei. Analyse du livre d'A. Onou, intitulĂ© Les Ă©lections de 1789 en France et les cahiers du Tiers Ă©tat, au point de vue de leur corrĂ©lation avec la vĂ©ritable opinion du pays. Saint-PĂ©tersbourg, 1909 en russe. CI\ IMPRIMÉS 111. Ă ulard, Histoire politique de la RĂ©volution française. Paris, Colin, 1901, in-8*. Bibl. nai., La762. 112. Aulard, Etudes et leçons sur la RĂ©volution française pre- miĂšre sĂ©rie. Paris, Alcan, 1905, in-18. Le programme royal aux Ă©lections de 1789, p. 41-54. Bibl. nat., La32695. 113. Bayeux, Notice sur la vie et les ouvrages de feu M. avocat au Parlement de Normandie. Caen, 1803, 1 broch. in-8°. Bibl. nal., Ln-7226. 114. BĂ©net Armand, Rapports annuels de i archiviste dĂ©parte- mentale du Calvados, de 1886 Ă  1906. 115. Bernier, Essai sur le Tiers Ă©tat rural, ou les paysans de Basse-Normandie au XVIIIe siĂšcle. Mayenne, 1891, lvol. in-8°. Bibl. nal., Ll112. 116. Besnier Georges, Rapports annuels de V archiviste dĂ©parte- mental du Calvados de 1907 Ă  1911. 117. Bloch Camille, Une EnquĂȘte sur lĂ©tal des paroisses en 1788. RĂ©volution fr., t. XXXIII, p. 145-152. 118. Bloch Camille, Les Cahiers du bailliage d'OrlĂ©ans au point de vue Ă©conomique. RĂ©volution fr., t. XXXIX, p. 427-454 et p. 481-500. 119. Bloch Camille, Eludes sur l'histoire Ă©conomique de la France, 1760-1789. Paris, 1900, in-8°. 120. Brette, Allas des bailliages et juridictions assimilĂ©es ayant formĂ© unitĂ© Ă©lectorale en 1789. Paris, imp. nat.,, 1904, in-foR Bibl. nat.,. L45 30. 121. Brette, Les Ă©lections du clergĂ© de Caen en 1789. Bulletins de VabbĂ© Soulavie, 6-25 mars 1789. RĂ©vol. fr., t. XXVII, p. 162-169. 122. Brette, La population de la France en 1789. RĂ©vol. fr., t. XLVI, p. 481-486. 123. Brette, Les limites et les divisions territoriales de la France en 1789. Paris, CornĂ©ly, 1907, in-8°. Bibl. nat., L727. 124. Brette, La RĂ©forme des dĂ©partements. Revue politique et parlementaire, 1909, t. LXII, p. 258-281. 125. Bridrey, La reprĂ©sentation des professions aux assemblĂ©es graduelles du Tiers Ă©tat dans le bailliage du Colentin en 1789. Paris, 1905. Extrait des comptes-rendus de l'Association française pour l'Avancement des Sciences congrĂšs de Cherbourg. 126. Bridrey, L'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres Ă  Coutances en 1789. Revue de Cherbourg et de la Basse-Norman- die, t. I, p. 92-105, 121-136. IMPRIMES CV 127. Champion, La France d'aprĂšs les cahiers de 1789. Paris, 1897 Armand Colin, 1 vol. in-8°. Bibl. nat., Lb3911593. 128. Chassin, Le GĂ©nie de la RĂ©volution. Paris, 1863, 2 vol. in-8°. Bibl. nat., La428. 129. ChĂ©rest, La chute de l'Ancien rĂ©gime, 1787-1789. Paris, Hachette, 1844-1886, 3 vol. in-8°. Bibl. nat,, Lb*>11359. 130. Dansin, Notice sur les libertĂ©s provinciales et V esprit public en Normandie en 1788. Paris, 1865, in-8°. Bibl. nat., in-8. Bibl. nat., Lk7744. 175. Carel P., Histoire de la ville de Caen. Paris, 1886-1888, in-8°. CVIII IMPRIMES 176. Delauney, dĂ©putĂ© Ă  l'AssemblĂ©e constituante, Bayeux et ses environs. Bayeux, 1804. Bibl. nat., Ye 19694. 177. Deschamps, Notice historique sur Saint-LĂŽ, Dela- marre. 178. Dumaine abbĂ©, Tinchebrai et sa rĂ©gion au Bocage nor- mand. Paris, Champion, 1882-1887, 3 vol. 179. FerriĂšre de la, Histoire de Fiers, ses seigneurs, son indus- trie. Paris, Dumoulin, 1855, in-8°. Bibl. nat., Lk72790. 180. FerriĂšre de la, Histoire du canton d' Alhis et de ses com- munes. Paris, Aubry, 1858, in-8° Bibl. nat., Lk62. 181. Huet, Histoire de CondĂ©-sur-N oireau. Caen, 1883, in-8°. 182. Hunger, Histoire de Verson Calvados. Caen, Brunet, 1910, in-8°. 183. Jamont, Mortain, 1789-1791. Esquisses d'histoire munici- pale. Annuaire des cinq dĂ©partements de Normandie, 1906. 184. Lecagheux abbĂ©, Documents pour servir Ă  V histoire de Montebourg, de 1789 Ă  1807. Valognes, Martin, 1874, in-8°. 185. Le Hardy, Notice historique sur Isigny. Annuaire de l'As- sociation normande, t. XXXVI, 1870. 186. Le Lorier, Monographie historique et statistique de la paroisse de BrĂ©ville. BrĂ©ville, 1898, in-8°. Bibl. nat., Lk731345. 187. Lepingard, Une page de V histoire de Saint-LĂŽ, ou notes sur rĂ©tablissement de V Administration dĂ©partementale Ă  Saint-LĂŽ. Annuaire de la Manche, 1866. 188. Pezet, Bayeux Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle. Bayeux, Saint- Ange-Duvant, 1857, in-8°. Bibl. nat., Lk7804. 189. Sauvage, Notice sur Saint-Hilaire-du-HarcouĂ«t. Annuaire des cinq dĂ©partements de Normandie, 1871. 190. Surville, Un coin du Bocage normand. L'ancienne paroisse Sainte- Suzanne, devenue la Chapelle- Biche. Le Mans, Harel, 1893, in-8°. INTRODUCTION Comme son titre V indique, ce livre a pour objet l'Ă©tude des deux phases successives de rĂ©volution qui s'est accomplie dans V organi- sation administrative de la France, Ă  une des Ă©poques les plus dĂ©cisives de son histoire. Le domaine chronologique de cette Ă©tude est la courte pĂ©riode des annĂ©es 1787-1790; son domaine gĂ©ogra- phique, une des circonscriptions administratives de l'ancienne monarchie la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Dans ce double cadre, elle em- brasse et confond les derniers jours d'un rĂ©gime d'autoritĂ© qui s'effondre et les premiers jours d'un rĂ©gime de libertĂ© qui s'Ă©difie. La premiĂšre partie chapitres I Ă  IX est consacrĂ©e Ă  la Fin de l'Ancien RĂ©gime. Si les intendants des pays d'Ă©lection avaient Ă©tĂ©, au cours du XVIIIe siĂšcle, les agents tout puissants de la royautĂ©, plus d'un s'Ă©tait aliĂ©nĂ©, par des actes arbitraires, la confiance de ses administrĂ©s. L'institution Ă©tait dĂ©jĂ  condamnĂ©e par l'opinion publique, lorsque la rĂ©forme dĂ©crĂ©tĂ©e par l'Ă©dit de juin 1787 vint entamer le pouvoir du dernier des intendants de Caen, Cordier de Launay, en crĂ©ant dans le ressort de sa gĂ©nĂ©ralitĂ© une administra- tion provinciale de Basse-Normandie, et en substituant Ă  son autoritĂ©, jusqu'alors sans partage, un condominium gros de futurs conflits. L' AssemblĂ©e provinciale de Caen, que son mode de recru- tement et sa composition aristocratique rendirent impopulaire avant sa tenue, n'eut pas le temps de poursuivre elle-mĂȘme la solution des importants problĂšmes qu'on avait soumis Ă  ses dĂ©libĂ©rations, et qui concernaient l'amĂ©lioration du rĂ©gime des impositions, des travaux publics, et de l'Ă©tat Ă©conomique du pays. Elle se borna Ă  en effleurer l'Ă©tude, dans son unique session. Les assemblĂ©es subordonnĂ©es qui, Ă©tablies aux chefs-lieux des neuf Ă©lections ou dĂ©partements et dans toutes les communautĂ©s du ressort provincial, devaient ĂȘtre ses collaboratrices, furent aussi impuissantes qu'elle. En effet, les assemblĂ©es de dĂ©partement, rĂ©unies deux fois seulement, ne purent qu'Ă©baucher l'examen du programme de rĂ©formes dont elles devaient CX INTRODUCTION Ă©tudier le mode d'application ; quant aux assemblĂ©es municipales rurales le rĂ©gime municipal des ailles n'avait pas Ă©tĂ© modifiĂ©, elles virent leur formation retardĂ©e par des causes multiples et V inexpĂ©rience de leurs membres paralysa le plus souvent leur activitĂ©. La Commission intermĂ©diaire provinciale, qui demeura chargĂ©e de l'administration jusqu'en aoĂ»t 1790, vit ses efforts annihilĂ©s par des obstacles de tout genre concours insuffisant des municipalitĂ©s qui s'essayaient gauchement Ă  leur noviciat adminis- tratif ; esprit d'indĂ©pendance et parfois d'insubordination des bureaux intermĂ©diaires de dĂ©partement ; hostilitĂ© sourde ou dĂ©clarĂ©e des officiers d'Ă©lection et du corps des ponts et chaussĂ©es, qui oppo- saient la rĂ©sistance ou la force d'inertie Ă  l'exĂ©cution de ses ordres ; et surtout, ombrageuse susceptibilitĂ© de l'intendant et de ses subdĂ©- lĂ©guĂ©s, source de perpĂ©tuels dissentiments oĂč se brisaient les ressorts d'un pouvoir exĂ©cutif imprudemment divisĂ©. La Normandie, qui avait acceptĂ© sans enthousiasme le rĂ©gime des AssemblĂ©es provin- ciales, ne tarda pas Ă  se lasser de son application. Sa protestation prit la forme d'une active propagande en faveur de la restauration de ses anciens Etats provinciaux ; mais la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux vint interrompre cette campagne en provoquant une consultation nationale qui devait Ă©largir les donnĂ©es du problĂšme de la rĂ©organisation administrative, conformĂ©ment au vƓu presque unanime des reprĂ©sentants du pays. La seconde partie chapitres IX Ă  XVIII, est consacrĂ©e Ă  l'Ă©tude des circonstances critiques au milieu desquelles s'accomplit cette rĂ©organisation, des institutions rĂ©volutionnaires qui furent alors improvisĂ©es pour la dĂ©fense de l'ordre public, et enfin des institu- tions lĂ©gales par lesquelles les dĂ©lĂ©guĂ©s de la Nation tentĂšrent d'asseoir un gouvernement stable, et d'en rĂ©gler le jeu normal en conciliant les principes d'autoritĂ© et de libertĂ©. Ce sont les DĂ©buts de la RĂ©volution. La plupart des dĂ©putĂ©s que les deux bailliages de Caen et de Coutances envoyĂšrent Ă  V AssemblĂ©e nationale Ă©taient animĂ©s d'un sincĂšre dĂ©sir de rĂ©formes ; les cahiers de dolĂ©ances de leurs commettants leur traçaient un vaste programme de revendi- cations en matiĂšre politique, administrative, judiciaire, sociale et Ă©conomique. La Basse- Normandie suivit avec une attention fiĂ©- vreuse les pĂ©ripĂ©ties de la lutte qu'ils livrĂšrent pour le triomphe de la cause chĂšre au Tiers Ă©tat. Des alternatives de joie enthousiaste et d'inquiĂ©tude affolante agitĂšrent des populations qui souffraient dĂ©jĂ  d'un malaise Ă©conomique profond. Emeutes urbaines excitĂ©es par la disette et le chĂŽmage, tentatives isolĂ©es de Jacquerie paysanne contre les derniers droits seigneuriaux, menaces de grĂšve fiscale INTRODUCTION CXI apparurent comme des symptĂŽmes prĂ©curseurs de catastrophes prochaines. Toute la province frĂ©mit au souffle de la Grande Peur. Pour remĂ©dier Ă  V inertie du pouvoir royal et de ses agents d'exĂ©- cution, incapables de rĂ©primer les excĂšs d'une anarchie qu'ils n'avaient pas su prĂ©venir, des pouvoirs nouveaux surgirent, d'un Ă©lan spontanĂ©, du sein de la Nation. Des ComitĂ©s locaux, vĂ©ritables ComitĂ©s de salut public anticipĂ©s, issus des suffrages populaires, et s'appuyant sur l'ardent civisme des jeunes milices de volontaires enrĂŽlĂ©s Ă  leur voix, assumĂšrent, au milieu de continuelles alertes, le pĂ©rilleux fardeau d'une double mission V approvisionnement des villes et des campagnes et la dĂ©fense de l'ordre. Cette rĂ©volution municipale, de forme si originale, ne fut pas, comme d'aucuns l'ont prĂ©tendu, une tentative insurrectionnelle, explosion malfai- sante d'une anarchie spontanĂ©e » ; ce fut, au contraire, pendant les sept mois que dura l'interrĂšgne de l'autoritĂ© administrative en France, de juillet 1789 Ă  fĂ©vrier 1790, un rĂ©gime improvisĂ© d' or- ganisation spontanĂ©e », qui prĂ©cĂ©da et prĂ©para l'organisation dĂ©crĂ©tĂ©e et lĂ©gale de la RĂ©volution. U AssemblĂ©e constituante allait accomplir cette Ɠuvre en votant deux lois capitales la premiĂšre unifiait le rĂ©gime municipal dans toutes les communes du royaume ; la seconde englobait ces com- munes dans des circonscriptions administratives nouvelles, moins Ă©tendues et mieux Ă©quilibrĂ©es que les anciennes. La loi municipale multiplia les prises de la RĂ©volution sur le pays par la crĂ©ation de milliers de cellules vivantes et l'appel de nombreux citoyens Ă  l'acti- vitĂ© politique; mais, en refusant celle-ci, par ses exigences censitaires, Ă  la masse des prolĂ©taires, dont elle faisait des citoyens passifs, elle endigua l'Ă©lan dĂ©mocratique des dĂ©buts de la RĂ©volution, et put ĂȘtre regardĂ©e comme une mesure d' ostracisme de la bourgeoisie Ă  l'Ă©gard du peuple. La rĂ©forme administrative, qui divisait la France en dĂ©partements, districts et communes, substitua aux trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s de Normandie cinq dĂ©partements, dont trois, la Manche, le Calvados et l'Orne empruntĂšrent leur territoire, en tout ou en partie, Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ; son exĂ©cution se poursuivit pendant plusieurs mois, au milieu d'une agitation populaire qui compromit, Ă  maintes reprises, la sĂ©curitĂ© des particuliers et la paix sociale. Elle amena au pouvoir une bourgeoisie riche et Ă©clairĂ©e, fidĂšle reflet du rĂ©gime censitaire dĂ©crĂ©tĂ© par V AssemblĂ©e nationale. Elle brisa le parti- cularisme rĂ©gianal au profit de l'unitĂ© politique de la France. Le J 4 juillet 1789, lendemain du jour oĂč le Conseil gĂ©nĂ©ral du Calvados tenant Ă  Caen sa premiĂšre sĂ©ance, avait Ă©lu son Directoire, et oĂč VentrĂ©e en scĂšne des nouvelles autoritĂ©s administratives prĂ©cipitait CXII INTRODUCTION dans la mĂȘme chute la vieille institution des intendants et la jeune et Ă©phĂ©mĂšre institution de la Commission intermĂ©diaire provinciale, la fĂȘte de la FĂ©dĂ©ration groupait Ă  Paris, sur le Champ-de-Mars, des dĂ©lĂ©guĂ©s venus de tous les points du royaume. Les banniĂšres des milices nationales du Calvados, de la Manche et de V Orne flottĂšrent autour de V autel de la Patrie, avec celles des 80 autres dĂ©partements. Le chef de la dĂ©lĂ©gation caennaise, Bonnet de Meautry, en retra- çant, dans une lettre Ă  ses concitoyens, les dĂ©tails de cette fĂȘte qu*il proclamait devoir ĂȘtre, sa/75 contredit, une Ă©poque mĂ©morable dans les fastes de notre histoire », traduisit les impressions optimistes de tous ses compagnons d'armes, penchĂ©s sur /' avenir avec un regard d'espĂ©rance attendrie, au souvenir de cette belle journĂ©e qui venait de cimenter limitĂ© morale de la France par l'adhĂ©sion solennelle des Français de toutes les provinces Ă  la cause de la RĂ©volution. F. M. SITUATION ET LIMITES DE LA GENERALITE DE CAEN CHAPITRE PREMIER L'ADMINISTRATION DE LA GÉNÉRALITÉ DE CAEN EN 1787 Situation et limites de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. — Ses ressources, sa popu- lation, ses charges fiscales. — GĂ©nĂ©ralitĂ© et intendance Ă©lections et subdĂ©lĂ©gations. — Le dernier intendant de Caen, Cordier de Launay ses origines. — L'hĂŽtel de l'Intendance et ses bureaux. — Les subdĂ©- lĂ©guĂ©s leur situation sociale et leurs attributions. — MunicipalitĂ©s urbaines et communautĂ©s rurales double caractĂšre des syndics paroissiaux. L'Intendance ou gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, c'est-Ă -dire le ressort administratif dont Caen se trouvait le chef-lieu Ă  la fin de l'Ancien rĂ©gime, Ă©tait la plus occidentale des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s de la Nor- mandie !. Elle avait pour limites au nord et Ă  l'ouest, la Manche ; au sud, la Bretagne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Rennes et le Maine gĂ©nĂ©ralitĂ© de Tours ; Ă  l'est, les gĂ©nĂ©ralitĂ©s d'Alençon et de Rouen. Sa frontiĂšre maritime Ă©tait de beaucoup la plus dĂ©ve- loppĂ©e, par suite de la protubĂ©rance de la presqu'Ăźle du Cotentin. Sa frontiĂšre terrestre Ă©tait une ligne irrĂ©guliĂšrement tracĂ©e de l'embouchure du Couesnon Ă  celle de la Dives. Depuis Pontorson, situĂ© sur la rive normande du Couesnon, jusqu'Ă  Saint-Cyr du Bailleul, vers la source de la SĂ©lune, la limite qui sĂ©pare actuelle- ment le dĂ©partement de la Manche de ses voisins bretons ou manceaux Ă©tait dĂ©jĂ  celle de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. De ce point jusqu'Ă  l'embouchure delĂ  Dives, la ligne de dĂ©marcation 1 Un historien russe, M. ArdaschefĂŻ, dans son ouvrage sur l'Administration pro- vinciale de la France Ă  la fin de l'ancien rĂ©gime Ă©dition russe, tome I, p. 167, propose de dĂ©signer exclusivement par le terme d'intendance, la circonscription administrative confiĂ©e Ă  un intendant, la gĂ©nĂ©ralitĂ© Ă©tant, au sens strict du mot, le ressort fiscal de l'ancien Bureau des finances, et ces deux ressorts ayant parfois une Ă©tendue et des limites diffĂ©rentes. Comme intendance et gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen coĂŻncidaient exacte- ment, j'ai cru pouvoir conserver l'expression de gĂ©nĂ©ralitĂ©, communĂ©ment adoptĂ©e jusqu'ici, et d'ailleurs couramment employĂ©e dans la langue officielle du xvni" siĂšcle. Sur ce sujet, voir A. Brette, Les limites et /es divisions territoriales de la France en 1789, p. 109-U4. 1 I LES PAYS DE LA BASSE-NORMANDIE pĂ©nĂ©trait en Normandie, avec une direction gĂ©nĂ©rale nord-est ; coupant l'Egrenne et la Halouze, petits sous-affluents de la Mayenne, elle venait aboutir Ă  l'Orne Ă  Mesnil-Hubert, englo- bant dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen une trentaine de localitĂ©s dĂ©pen- dant aujourd'hui du dĂ©partement de l'Orne, et dont les plus importantes sont Fiers, Athis et Tinchebrai. L'Orne servait de frontiĂšre de Mesnil-Hubert Ă  Thury-Harcourt ; de lĂ , contournant la lisiĂšre mĂ©ridionale de la forĂȘt de Cinglais, coupant la Laize, la Muance et le Laison, la ligne conventionnelle de sĂ©paration atteignait la Dives Ă  l'est de Croissanville et se confondait avec cette riviĂšre, laissant le pays d'Auge, situĂ© sur la rive droite de celle-ci, Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Rouen. Ainsi dĂ©limitĂ©e, la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen comprenait tout le dĂ©par- tement actuel de la Manche, la moitiĂ© occidentale de celui du Calvados'1, et un petit coin du dĂ©partement de l'Orne 2. La mĂȘme administration rĂ©unissait des rĂ©gions naturelles ou pays » de constitution gĂ©ologique, d'aspects et de ressources variĂ©s, dont les noms ont survĂ©cu aux remaniements successifs des circonscriptions qu'on y a taillĂ©es. Ce sont la Campagne de Caen, le Bessin, le Cinglais, le Bocage, l'Avranchin, le Penesme, le Cotentin. La Campagne de Caen, Ă©tendue sur les deux rives de l'Orne, de la Dives Ă  la Seulles, vaste plaine, presque dĂ©pourvue d'arbres, produisait dĂ©jĂ , grĂące Ă  la fertilitĂ© de son sol, des cĂ©rĂ©ales en abondance. A l'ouest, le Bessin, plaine lĂ©gĂšrement ondulĂ©e, Ă©talait autour de Bayeux ses cultures, ses prairies oĂč paissaient de nombreuses vaches, et fournissait le beurre dĂ©jĂ  renommĂ© d'Isigny. Au sud, le Cinglais, pays de forĂȘts et de chasses mĂ©diocrement fertile, accidentĂ©, se prolongeait, sur la rive gauche de l'Orne, par une rĂ©gion granitique plus tourmentĂ©e et plus pauvre, le Bocage normand. Le Bocage devait son nom aux bouquets d'arbres qui couvrent encore les pentes de ses collines, aux chĂȘnes et aux ormes plantĂ©s dans les haies vives qui en sĂ©parent les hĂ©ritages pays de petite propriĂ©tĂ© et de maigres cultures, alors presque dĂ©pourvu de routes, et dont les habitants vivaient de pain noir et de bouillie de sarrasin. Les rĂ©gions voi- 1 Les arrondissements de Bayeux et de Vire, l'arrondissement de Caen moins trois communes Airan, Cesny aux-Vignes, OnĂ©zy, la partie occidentale de l'arron- dissement de Falaise et trois communes de celui de Lisieux MĂ©ry-Corbcn, Crois- sanville et BissiĂšres. 2 Trois cantons de l'arrondissement de Domfront ceux d'Athis, Fiers et Tin- chebrai, Ă  peu prĂšs en totalitĂ©. POPULATION DE LA GENERALITE DE CAEN 6 sines, le Mortainais et l'Avranchin, vĂ©ritable Suisse normande, abondaient en sites pittoresques, mais n'offraient que trop de bruyĂšres, de rocs, de landes infertiles. C'Ă©tait la partie vraiment ingrate de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Vers le centre et le nord de la presqu'Ăźle, les herbages du Penesme, situĂ©s clans l'Ă©lection de Carentan, l'Ă©lection grasse », les vallons verdoyants du Coten- t'n, le val de Saire et la Hague, aux portes de Cherbourg, se prĂȘtaient Ă  un Ă©levage intensif et produisaient de belles moissons ; sur tous ces points, des plantations de pommiers faisaient ressem- bler la contrĂ©e Ă  un immense verger. VĂ©ritable grenier d'abon- dance, rĂ©gion dont la richesse se serait dĂ©veloppĂ©e, si le manque presque absolu de communications et de dĂ©bouchĂ©s ne l'avait trop longtemps confinĂ©e dans un isolement funeste t1. La superficie totale de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen Ă©tait, d'aprĂšs l'Ă©tat statistique qui en fut dressĂ© au contrĂŽle gĂ©nĂ©ral en 1788 t2, de 583 lieues carrĂ©es et demie ; c'Ă©tait plus du tiers de la Nor- mandie 3, et Ă  peu prĂšs la quarantiĂšme partie de la France. Sa population ne peut ĂȘtre qu'imparfaitement Ă©valuĂ©e ; les recen- sements ne se faisaient point alors avec la mĂȘme prĂ©cision qu'Ă  notre Ă©poque 4. Ce fut surtout depuis l'abbĂ© Terray et dans un but fiscal qu'on prescrivit aux intendants des recherches pĂ©riodiques sur le mouvement de la population dans les paroisses. On envoyait des tableaux imprimĂ©s que remplissaient habi- tuellement les greffiers des bailliages, moyennant gratification 5. Les subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă©taient chargĂ©s de recueillir les Ă©tats des pa- roisses de leur circonscription, quel que fĂ»t le ressort judiciaire de celles-ci ; les bureaux de l'intendance centralisaient les recher- ches. En 1784, Calonne ordonna aux curĂ©s de relever le nombre des baptĂȘmes, mariages et sĂ©pultures sur leurs registres parois- lj Cet aperçu trĂšs sommaire repose sur les rapports officiels des intendants et des subdĂ©lĂ©guĂ©s de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, rĂ©digĂ©s au cours du xvmc siĂšcle Ă  la demande des contrĂŽleurs gĂ©nĂ©raux enquĂȘtes de 1727, 1731, 1764, 1770, 1787, et con- servĂ©s aux arch. dĂ©p., Calvados, C 269 Ă  292, 1070 et 6379. Sur l'Ă©tat actuel des pays formant la Basse-Normandie, considĂ©rĂ©e comme rĂ©gion gĂ©ographique, voir R. de Felice, La Basse- Normandie. 2 Etat de situation des finances de la France, de l'Ă©tendue, de la population et des contributions de chaque gĂ©nĂ©ralitĂ© du royaume en 1788. » Arch. nat., D vi 64, 1. 107. 3 D'aprĂšs ce mĂȘme Etal, la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Rouen comptait 587 lieues et demie et celle d'Alençon 464 lieues ; au total, 1,635 lieues carrĂ©es pour la Normandie. 4 Voir A. Brette, La population de la France en 1789, dans RĂ©vol. fr., tome XLVI, p. 481 sqq. 5 Une somme de 1,336 livres leur est allouĂ©e en 1782. Arch. dĂ©p., Calvados, C 151. 4 ACCROISSEMENT DE CETTE POPULATION AU XVIIIe SIECLE siaux. L'intendant de Caen, Feydeau de Brou, se heurta, dans l'exĂ©cution de cette mesure, aux protestations des greffiers de bailliages, menacĂ©s de perdre leurs gratifications, et Ă  l'inertie des curĂ©s. Quatre ans plus tard, son successeur Cordier de Launay Ă©crivait Les curĂ©s font mal, quand ils veulent le faire, ce travail dĂ©sintĂ©ressĂ© », et il priait les Ă©vĂȘques de Bayeux, de Coutances et d'Avranches de stimuler sur ce point le zĂšle de leurs subor- donnĂ©s W. L'Ă©tat statistique mentionnĂ© ci-dessus Ă©value la population de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, pour l'annĂ©e 1788, Ă  644,000 habi- tants 2. Des Ă©tats gĂ©nĂ©raux du mouvement de population des paroisses, dressĂ©s par Ă©lections, et conservĂ©s pour la pĂ©riode 1783-1787 3, font osciller le chiffre des naissances, pour chaque annĂ©e, entre 24,000 et 25,000 unitĂ©s, celui des mariages entre 5,900 et 6,500, celui des dĂ©cĂšs entre 20 et 25,000 *>. Il semble que la population de la Basse Normandie s'est accrue au cours du xvme siĂšcle. Plusieurs indices rĂ©vĂšlent cet accroissement. Si l'on compare les rĂŽles des tailles de 91 paroisses de l'Ă©lection d'Avranches pour la pĂ©riode des annĂ©es 1700 Ă  1785 5, on trouve que le nombre total des feux s'y est Ă©levĂ©, pendant cette pĂ©riode, de 8,999 Ă  10,416 feux, soit une augmentation de 1,417 feux, un sixiĂšme environ. En 1786, l'intendant Feydeau de Brou, plaidant auprĂšs du Conseil d'Etat la cause des sauniers de l'Avran- chin et rĂ©clamant en leur faveur l'augmentation du nombre annuel des jours de fabrication du sel, attribuait la pĂ©nurie de cette denrĂ©e dans les pays de quart-bouillon au dĂ©veloppement de la population, qui, d'aprĂšs son Ă©valuation, avait cru dans la proportion d'un cinquiĂšme au moins 6. Deux ans plus tard, ce sont les sauniers du Cotentin qui, s'appuyant sur les mĂȘmes raisons, demandent le mĂȘme privilĂšge 7. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 151. Des Ă©tats de naissances et dĂ©cĂšs, dressĂ©s par les curĂ©s de l'Ă©lection de Carentan en 1785, sont toutefois accompagnĂ©s d'observations trĂšs intĂ©ressantes sur la situation de leurs paroisses. Ibid., C 169. 2 Cet Ă©tat attribue 528,300 habitants Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© d'Alençon, et 740,700 habi- tants Ă  celle de Rouen, au total 1,913,000 habitants Ă  la Normandie, et 24,800,000 habi- tants Ă  tout le royaume. Etat de situation des finances, etc. Arch. nat., D vi, 64, 1. 107. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 153 Ă  157. 1 Un relevĂ© officiel de la population de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en 1787 13 tableaux dressĂ©s par bailliages et Ă©lections, accuse 22,830 naissances et 19,268 dĂ©cĂšs. Arch. nat., D Ăźv bis 44. 5 Arch. dĂ©p., Manche, C 1 Ă  193. 6 Arch. dĂ©p., Calvados, C 5998. 7 Ibid., C 6006. LA GENERALITE, DIVISION FINANCIERE, ET LES ELECTIONS 5 MalgrĂ© l'exiguĂŻtĂ© relative de son territoire, la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen n'Ă©tait pas une des moins importantes du royaume. A une Ă©poque oĂč les ressources agricoles constituaient un des Ă©lĂ©ments essentiels de la richesse d'un pays, elle devait passer pour un des plus aisĂ©s, et attirer particuliĂšrement l'attention du fisc. Le total des impositions qu'elle supportait en 1785 s'Ă©levait, d'aprĂšs l'Ă©tat des finances de cette annĂ©e, Ă  13,680,000 livres. C'Ă©tait environ la trente-quatriĂšme partie du chiffre global des impositions de la France, Ă©valuĂ© dans le mĂȘme Ă©tat Ă  473 millions de livres *. Ce chiffre, proportionnellement assez lourd, devait exciter, aux dĂ©buts de la RĂ©volution, les protestations des premiers reprĂ©sen- tants de la Basse-Normandie Ă  l'AssemblĂ©e nationale 2. Le ressort territorial de l'intendance de Caen, tel qu'il s'est maintenu clans le cours du xvme siĂšcle, correspondait rigou- reusement Ă  celui de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, c'est-Ă -dire de l'ancienne circonscription fiscale soumise Ă  la juridiction du bureau des finances de Caen 3l La gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen datait du xvie siĂšcle elle fut une des seize que crĂ©a François Ier par l'Ă©dit de dĂ©cem- bre 1542. On avait groupĂ©, pour la former, sept des seize anciennes Ă©lections alors comprises en Normandie les Ă©lections de Caen, Bayeux, Vire, Avranches, Coutances, Carentan et Valognes 4. Le nombre de ces Ă©lections s'Ă©tait accru par la formation de deux ressorts nouveaux, ceux de Mortain et de Saint-LĂŽ 5 ; en 1787, la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen comptait neuf Ă©lections, avec 1,214 pa- roisses 6. L'intendance avait environ un siĂšcle d'existence en moins. 1 Exactement Ă  472,415,549 livres. Arch. nat., D vi, 64, 1. 107. — D'aprĂšs cet Etat, la Normandie payait 51,320,000 livres d'impĂŽts 21,800,000 livres pour la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Rouen, 12,840,000 livres pour celle d'Alençon. 2 Compte-rendu Ă  leurs commettants par les dĂ©putĂ©s de la noblesse du grand bailliage de Cotentin aux Etats-GĂ©nĂ©raux de 1789. Paris, 1791. Ils se plaignent de l'ancienne surcharge d'impĂŽts qui Ă©crasait la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen avant la RĂ©volu- tion, et dont continuent Ă  souffrir les nouveaux dĂ©partements. 3 C'est cette coĂŻncidence qui a amenĂ© la confusion frĂ©quente, mĂȘme dans le lan- gage officiel, de ces deux termes gĂ©nĂ©ralitĂ© et intendance. Voir Ardascheff, Pro- vinlsialnaia administratsia, tome I, p. 170 sqq. 4 Recherche de la noblesse par Raymon Montfaoucq en 1463. Arch. dĂ©p., Calva- dos, C 6424. 5 L'Ă©lection de Mortain existait en 1597 ; celle de Saint-LĂŽ, créée en 1639, suppri- mĂ©e en 1663, fut rĂ©tablie dĂ©finitivement en 1691, surtout aux dĂ©pens de celles de Rayeux et de Carentan. Arch. dĂ©p. Calvados, C 274 et 279. 6 Etat gĂ©nĂ©ral et nominatif des villes et communautĂ©s villageoises composant la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen en 1787, par Hommais, ancien commis de l'intendance. Ibid., C 267. 6 l'intendance et les subdĂ©lĂ©gations Sa constitution remontait au second quart du xvir3 siĂšcle. Les premiers commissaires dĂ©partis pour l'exĂ©cution des ordres du roi que l'on trouve Ă  Caen sont des maĂźtres des requĂȘtes, investis de missions spĂ©ciales et temporaires, comme Morant du Mesnil-Garnier en 1617, Paris en 1624, Turgot de Saint-Clair en 1632 ll Les pouvoirs de ces intendants de justice et de police » 2 Ă©taient surtout d'ordre judiciaire et n'Ă©taient pas contenus dans' les bornes d'une gĂ©nĂ©ralitĂ© financiĂšre. Mais, Ă  partir de Richelieu, les intendants de Normandie, aux attribu- tions desquels s'ajouta une compĂ©tence Ă©tendue en matiĂšre de finances, furent Ă©tablis Ă  poste fixe et d'une maniĂšre permanente au siĂšge de chacune des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s normandes, Ă  Rouen, Caen, Alençon. Au lendemain des troubles de la Fronde, l'institu- tion, un instant suspendue, fut dĂ©finitivement rĂ©tablie et l'inten- dance de Caen garda jusqu'Ă  la RĂ©volution les limites de la cir- conscription financiĂšre qui lui avait servi de cadre administratif. Les subdivisions administratives de l'intendance de Caen, ou subdĂ©lĂ©gations, correspondaient, Ă  deux exceptions prĂšs, aux Ă©lections de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. Les deux Ă©lections de Coutances et de Valognes prĂ©sentaient un territoire trĂšs Ă©tendu et une ligne de cĂŽtes trĂšs dĂ©veloppĂ©e. Elles contenaient des villes qui avaient dĂ©passĂ© en importance leurs chefs-lieux eux-mĂȘmes telle Cher- bourg, dans l'Ă©lection de Valognes ; Granville, dans celle de Coutances. Les rĂ©clamations de ces villes, l'accroissement continu de la besogne administrative avaient dĂ©terminĂ© l'intendant Feydeau de Brou Ă  crĂ©er deux subdĂ©lĂ©gations nouvelles, Ă  Gran- ville en 1783 3, Ă  Cherbourg en 1785 4;. Partout ailleurs les Ă©lections avaient formĂ© le cadre des subdĂ©lĂ©gations, ce qui portait le nombre de celles-ci Ă  onze pour la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen 5. Les 1,214 paroisses de cette gĂ©nĂ©ralitĂ© se rĂ©partissaient trĂšs inĂ©gale- ment selon l'Ă©tendue des divers ressorts et le mode d'habitat des diverses rĂ©gions. Tandis que la subdĂ©lĂ©gation de Mortain n'en comptait que 84, celle de Bayeux en avait plus du double 172 1 Floquet, Histoire du Parlement de Normandie, tome IV, p. 484 sqq. 2 C'est le titre que prend Turgot de Saint-Clair en 1632. Floquet, Histoire du Par- lement de Normandie, tome IV, p. 492. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 152. Cf. Arch. nat., D xxix 40. Leltre de Couraye Duparc, subdĂ©lĂ©guĂ© de Granville, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 7 septembre 1789. Sa commission date du 27 avril 1783. 4 Ibid., C 1185. 5 Il y avait, en outre, un subdĂ©lĂ©guĂ© spĂ©cial, Ă©tabli par l'intendant Fontette, et mis Ă  la tĂšte de la maison de force de Bcaulieu prĂšs Caen. Ibid., C 675 et 6332. LE DERNIER INTENDANT DE CAEN / et celle de Caen prĂšs du triple 234. La plus petite de toutes, la subdĂ©lĂ©gation de Cherbourg, taillĂ©e tardivement, dans celle de Valognes, ne comptait que 34 paroisses &\ L'intendance de Caen devait ĂȘtre assez enviĂ©e par suite de sa proximitĂ© de Versailles et de Paris. On y dĂ©butait rarement. Esmangart y vint de Bordeaux en 1775 ; Feydeau de Brou, avant d'ĂȘtre nommĂ© intendant de Caen en 1783, l'avait Ă©tĂ© Ă  Bourges et Ă  Dijon. Certains administrateurs y avaient fait d'assez longs sĂ©jours. Foucault y passa 17 ans 1689-1706 ; Aubry de Vastan 13 ans 1727-1740 ; Arnaud de la Briffe 12 ans 1740-1752. Fontette resta Ă  la tĂȘte de cette gĂ©nĂ©ralitĂ© pendant 23 ans 1752-1775 ; il y fĂ»t restĂ© plus longtemps, sans les scan- dales de son administration 2. En 1787, l'intendant de Caen Ă©tait Louis-Guillaume-BenĂ© Cordier de Launay. Il venait d'y succĂ©der Ă  Feydeau de Brou, nommĂ© surintendant gĂ©nĂ©ral des Ă©conomats. Il Ă©tait Ă©tranger Ă  la Normandie par ses origines ; mais sa famille avait rĂ©cemment fixĂ© sa rĂ©sidence dans cette province. En 1607, Etienne Cordier, sieur de Launay, avocat au Parle- ment de Dijon, obtenait la charge de conseiller secrĂ©taire du roi en la chancellerie de Bourgogne. Il devint ensuite contrĂŽleur ordinaire des guerres et de la compagnie des chevau-lĂ©gers de Louis XIII 3. En 1634, il Ă©pousa Ă  l'Ă©glise Saint-Paul, Ă  Paris, sa cousine, Marie Cordier, fille de Jacques Cordier, conseiller du roi, trĂ©sorier des aumĂŽnes, offrandes et dĂ©votions de Sa MajestĂ©. Son fils RenĂ©, Ă©cuyer, contrĂŽleur ordinaire des guerres et alter- natif de la compagnie des chevau-lĂ©gers et mousquetaires de la garde depuis 1672, Ă©pousa en 1680 Marie-Madeleine Renouard, fille d'un secrĂ©taire du roi. De ce mariage naquit Jacques -RenĂ©, le grand-pĂšre de l'intendant de Caen. En 1712, Jacques-RenĂ©, alors trĂ©sorier des troupes en garnison dans les villes de Bergues et Furnes, Ă©pouse Anne-ThĂ©rĂšse de Croeser, petite-fille du bourgmestre de Bergues i]. Il suit les armĂ©es de Louis XIV, pendant la guerre de la succession d'Es- pagne, aux Pays-Bas et sur le Rhin. TrĂ©sorier de l'extraordinaire des guerres Ă  Arras en 1716, il achĂšte en 1725 la charge de rece- 1 Ktat gĂ©nĂ©ral et nominatif de 1787, par Hommais, dĂ©jĂ  citĂ©. 2 F. Mourlot, Un Intendant de province sous Louis XV l'intendant Fontette, a Bibl. nat., Nouveau d'Hozier, vol. 201. 4 Ibid., collection ChĂ©rin, vol 59, ms. fr. 31621. Aux Arch. nat., Y 60, f° 37i>, se trouve le testament d'Anne-ThĂ©rĂšse de CroĂ«ser, en date du 30 mai 1772. 8 LA FAMILLE DE CORDIER DE LAUNAY veur ancien et mi-triennal des tailles de l'Ă©lection de Paris *. Son expĂ©rience et son honnĂȘtetĂ© dans l'exercice de cette charge » lui permettent d'obtenir l'un des deux offices de conseillers trĂ©soriers gĂ©nĂ©raux de l'extraordinaire des guerres créés en 1728 2 Le 1er fĂ©vrier 1736, Jacques-RenĂ© obtint des lettres-patentes du roi sur arrĂȘt du Conseil du 31 dĂ©cembre 1735, le maintenant lui et sa postĂ©ritĂ© dans le titre et privilĂšge de noblesse acquise par l'exercice de la charge de conseiller secrĂ©taire du roi autrefois octroyĂ©e Ă  son aĂŻeul Etienne » 3. Quelques annĂ©es plus tard, en 1740, il acquit les terres et baronnies d'Echauffour et de Montreuil l'ArgillĂ© *. Son fils, Claude-RenĂ©, appelĂ© d'ordinaire Cordier de Montreuil, Ă©pousait cette annĂ©e mĂȘme Madeleine Masson de Plissey, fille d'un secrĂ©taire du roi. Il fut prĂ©sident Ă  la cour des Aides de Paris et mourut dans cette ville le 26 nivĂŽse an III, dans un Ăąge fort avancĂ©. Sa vie s'Ă©tait Ă©coulĂ©e entre les occupations de sa charge et les loisirs de sa campagne d'Echauf- four 5. Cordier de Montreuil eut cinq enfants trois filles et deux fils. L'aĂźnĂ©e des filles, RenĂ©e-PĂ©lagie, Ă©pousa en 1763 le trop fameux marquis de Sade, dont elle fut sĂ©parĂ©e de corps et de biens par arrĂȘt du ChĂątelet de Paris, le 9 juin 1790 °. Des deux Arch. nat., E 999A, n° 58. Ordonnance du 7 avril 1725. 2 Bibl. nat, Nouveau d'Horier, vol. 201. — Arch. nat., E 999\ n° 58 ; E 1066, n°95 P 2462, f° 119 v° ; P 2470, f° 315 v° ; P 2479, f» 398. - A cette Ă©poque vivait une jeune femme qui jouit d'une certaine cĂ©lĂ©britĂ© dans le monde des lettres sous la RĂ©gence et qui, par une coĂŻncidence singuliĂšre, s'appelait Marguerite-Jeanne Cordier de Launay. MalgrĂ© cette homonymie rigoureuse, on ne peut Ă©tablir avec certitude que cette jeune fĂŻ lie, qui eut pour pĂšre un artiste peintre, et qui, aprĂšs avoir servi la duchesse du Maine au chĂąteau de Sceaux, raconta les divertissements de celte cour dans de captivants MĂ©moires, Ă©crits sous son nouveau nom de baronne de Staal, ait Ă©tĂ© unie par des liens de parentĂ© Ă  la famille du trĂ©sorier des galĂšres, grand-pĂšre du dernier intendant de Caen. 3 Bibl. nat., collection ChĂ©ri n 59, ras. fr. 31621. — Etienne n'avait exercĂ© cette charge que du 16 septembre 1607 au mois d'avril 1624. II lui manquait trois ans et sept mois pour avoir droit Ă  la noblesse, d'oĂč la nĂ©cessitĂ© de cet arrĂȘt du Conseil sollicitĂ© par son petit-fils. Lors de la recherche de la noblesse de 1666, Marie Cordier, veuve d'Etienne, au nom et comme tutrice de ses enfants mineurs, et RenĂ© Cordier, son fils, s'Ă©taient dĂ©sistĂ©s de la qualitĂ© d Ă©cuyers. Bibl, nat., Cabinet des Titres, ms, fr. 27338. — Cf. aux Arch. nat. XJA 8738, f° 500 copie de la lettre de maintenance de noblesse pour Jacques-RenĂ© Cordier de Launay, en 1736. 4 Echauffour, commune du canton de GacĂ© Orne; Montreuil-l'ArgillĂ©, commune du canton de Broglie Eure. 5 Arch. dĂ©p., Orne, sĂ©rie Q, Ă©migrĂ©s. Dossier Cordier de Montreuil.— J'ai pu voir, au chĂąteau d'Echauffour, une bibliothĂšque trĂšs fournie en ouvrages des xvne et xvme siĂšcles, avec reliure du temps et aux armes de la famille d'azur, au chevron d'or, accompagnĂ© de trois croissants d'argent, deux en chef et un en pointe ». 6 BibliothĂšque nationale, Cabinet des Titres, ms fr. 27338 billet de faire-part de ce mariage. PĂ©lagie de Montreuil mourut en 1810 Ă  Echaufiour et y fut enterrĂ©e. Une chapelle latĂ©rale de l'Ă©glise d'Echauffour conserve son inscription funĂ©raire. LA CARRIERE DE CORDIER DE LAUNAY \ fils, l'un Charles-Michel Cordier de ValĂ©ry devint colonel de cavalerie, puis marĂ©chal de camp ; l'autre, Louis-Guillaume- RenĂ© Cordier de Launay, nĂ© Ă  Paris au mois de novembre 1746, fut destinĂ© Ă  la magistrature. Conseiller au Parlement de Paris en 1769, puis maĂźtre des requĂȘtes au Conseil d'Etat en 1773 il\ il obtint l'intendance de Caen en 1787. Ce fut son premier et son unique poste dans l'administration provinciale. Il arrivait en Normandie rempli d'intentions gĂ©nĂ©reuses, rĂ©solu Ă  gĂ©rer avec zĂšle et Ă©quitĂ© les intĂ©rĂȘts de sa gĂ©nĂ©ralitĂ©, tĂ©moin une de ses premiĂšres lettres Ă  son secrĂ©taire Guyard. En tout il faut aller au but sans s'affecter des passions et contradictions qu'on ren- contre sur son chemin ; dans toute espĂšce d'opĂ©ration politique, il faut se monter sur deux sentiments qui paraissent contradic- toires, mais qui ne sont pas impossibles Ă  concilier il faut rĂ©unir l'amour du bien public, insĂ©parable de l'homme vertueux et l'indiffĂ©rence du mĂ©chant en appliquant le premier Ă  tout ce qui peut conduire au bien et l'autre Ă  tout ce qui tend Ă  nous en Ă©carter, on surmonte tout obstacle, et on fait tĂŽt ou tard triom- pher la vĂ©ritĂ© » 2. Sous ce style un peu guindĂ© percent de loua- bles intentions, que Cordier de Launay n'eut guĂšre le temps de rĂ©aliser. Il avait Ă©tĂ© nommĂ© intendant le 14 janvier 1787 3 ; aprĂšs l'Ă©dit de juin sur les AssemblĂ©es provinciales, celle de Basse-Normandie allait s'organiser au mois d'aoĂ»t, se rĂ©unir en novembre, et lĂ©guer ses pouvoirs Ă  une Commission intermĂ©- diaire provinciale permanente, destinĂ©e Ă  contrĂŽler l'intendant et Ă  le supplanter dans la plupart de ses attributions. Cordier de Launay ne possĂ©da ainsi rĂ©ellement qu'une dizaine de mois l'intĂ©gralitĂ© des fonctions ci-devant attachĂ©es Ă  son titre 4 » Il devait rester ensuite prĂšs de trois ans dans cette situation de magistrat dĂ©sarmĂ© et sans pouvoir, jusqu'au mois d'aoĂ»t 1790, Ă©poque oĂč la mise en mouvement des administrations dĂ©parte- 1 Provisions de maĂźtre des requĂȘtes, pour Cordier de Launay, du 9 juin 1773, mentionnant un extrait baptistaire du 12 novembre 1746. Il avait Ă©tĂ© nommĂ© conseil- ler au Parlement de Paris par provisions du 18 janvier 1769. Arch. nat., V1 466. — Voir A. Brette, Recueil de documents relatifs Ă  la convocation, tome III, p. 739. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 4156. 3 Je n'ai pu retrouver sa commission d'intendant dans les Lettres scellĂ©es de la maison du Roi, aux Archives nationales. La mention de sa nomination Ă  la date du 14 janvier 1787 est consignĂ©e dans un mĂ©moire rĂ©digĂ© vers cette Ă©poque et conservĂ© aux Arch. dĂ©p., Calvados, C 2211. 4 Tableau de l'administration de Cordier de Launay, dernier intendant de la gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Caen, ibid., C 233. 10 PROJET D'UN HÔTEL DE ^INTENDANCE A CAEN mentales nouvelles entraĂźna dans le mĂȘme abĂźme la vieille insti- tution des intendants et l'institution naissante des Commissions intermĂ©diaires. MariĂ© depuis trois ans, Cordier de Launay avait achetĂ©, le 26 octobre 1787, avec une partie de la dot de sa femme, la terre de LignĂšres et dĂ©pendances, situĂ©e dans le voisinage du domaine paternel V. Il possĂ©dait aussi un hĂŽtel Ă  Paris, rue du faubourg PoissonniĂšre 2. A Caen, il habitait l'hĂŽtel de l'Intendance, situĂ© rue des Carmes, et qui servait depuis une vingtaine d'annĂ©es de rĂ©sidence Ă  ses prĂ©dĂ©cesseurs. A la fin du xvne et pendant toute la premiĂšre moitiĂ© du xvme siĂšcle, les intendants de Caen Ă©taient logĂ©s dans une maison particuliĂšre de la rue Saint-Jean, que la ville avait louĂ©e en 1682 Ă  un sieur de GoupilliĂšre, directeur de la Monnaie. Le quartier, marĂ©cageux, Ă©tait des plus malsains ; le bĂątiment, vieux de prĂšs de deux siĂšcles, nĂ©cessitait de continuelles rĂ©pa- rations qu'on avait peine Ă  obtenir. En 1759, aprĂšs avoir habitĂ© sept ans la maison de GoupilliĂšre avec la crainte constante de la voir s'Ă©crouler, l'intendant Fontette demanda l'annulation du bail. Un arrĂȘt du Conseil l'autorisa Ă  se loger Ă  sa guise moyennant une indemnitĂ© de logement de 1,500 livres que la ville de Caen devait lui fournir. C'Ă©tait une mesure provisoire, en attendant le retour de la paix et la crĂ©ation des ressources nĂ©cessaires pour la construction d'un hĂŽtel de l'Intendance a. DĂ©logeant ses bu- reaux qu'il Ă©tablit rue de l'Oratoire, Fontette transfĂ©ra sa rĂ©si- dence au chĂąteau de Tilly qu'il venait d'acquĂ©rir et oĂč il sĂ©journa pour Ă©pargner des dĂ©penses de construction Ă  Caen et Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© » 4. Plusieurs projets Ă©taient mis en avant au sujet de l'emplacement du futur hĂŽtel. Les uns proposaient le quartier Saint-Jean, plus central, plus peuplĂ©, mais formant une sorte d'Ăźle marĂ©cageuse. D'autres avaient en vue le quartier Saint- Sauveur, plus excentrique, mais oĂč l'air Ă©tait plus pur et le terrain 1 Arch. dĂ©p., Orne, sĂ©rie ç», Ă©migrĂ©s. Dossier Cordier de Launay. — LignĂšres, commune du canton du Merlerault Orne. Cette acquisition lui avait coĂ»tĂ© 239,360 liv. Par son contrat de mariage, du 24 fĂ©vrier 3781, et par des actes postĂ©rieurs, sa femme, PĂ©tronille de la Lande, lui avait apportĂ© une fortune de 370,000 livres. 2 Almanach royal de 1787. Cf. Inventaire des papiers trouvĂ©s dans la maison de Cordier de Launay, Ă©migrĂ©, rue du faubourg PoissonniĂšre, par trois commissaires de la section PoissonniĂšre, 3 thermidor an III. Arch. nat., T 1013. Etat des gages et traitements des gens de la maison dudit Ă©migrĂ©. Ibid., P 1G86. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 201. 4 Ibid., C 204. AMÉNAGEMENT DE CET HÔTEL 11 plus solide. Le corps municipal de Caen ne manifestait pas ses prĂ©fĂ©rences, et, pour Ă©viter de nouvelles dĂ©penses, Ă©tait partisan du statu quo. Fontette se plaignit au contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral de la mutinerie du corps municipal » et menaça d'Ă©tablir le siĂšge de l'Intendance soit dans sa terre de Tilly, soit Ă  Bayeux comme l'avait fait Chamillart un siĂšcle auparavant &>. Les douze paroisses de Caen, dans leurs assemblĂ©es particu- liĂšres, approuvĂšrent en principe la construction d'un hĂŽtel de l'Intendance, en priant Fontette d'attendre la conclusion de la paix et de faire contribuer toute la gĂ©nĂ©ralitĂ© Ă  la dĂ©pense » 2. AprĂšs avoir pesĂ© les avantages et les inconvĂ©nients des deux quartiers proposĂ©s, Fontette obtint en 1765 un arrĂȘt du Conseil autorisant l'achat de terrains situĂ©s au bout de la place Saint- Sauveur, sur une place rĂ©cemment créée, Ă  laquelle on avait donnĂ© son nom. L'obstination de la municipalitĂ©, qui refusa de dĂ©placer les glaciers publics » 3 Ă©tablis en cet endroit et dont la ville Ă©tait propriĂ©taire, fit abandonner ce projet. Fontette demeura dans une maison qu'il avait achetĂ©e rue des Carmes et oĂč, en 1769, il fit transfĂ©rer ses bureaux. La mĂȘme annĂ©e, il ven- dait cet immeuble au roi ; les propriĂ©taires de deux immeubles voisins l'imitĂšrent *. Le tout coĂ»ta 96,550 livres. DĂšs 1769 commencĂšrent les travaux d'appropriation qui devaient amĂ©na- ger en un seul hĂŽtel les trois maisons rĂ©unies ; ils furent longs et onĂ©reux. Des agrandissements furent nĂ©cessaires quand arriva le successeur de Fontette, Esmangart. Celui-ci, qui n'avait pas de chĂąteau Ă  sa portĂ©e, avait besoin d'une installation plus confor- table. Il fallut construire un pavillon sur le jardin, et une aile en retour du corps de logis principal ; une chapelle y fut Ă©levĂ©e 5. Les dĂ©penses s'accrurent bien au-delĂ  des prĂ©visions, sans appor- ter d'amĂ©lioration sĂ©rieuse. On n'avait rĂ©ussi qu'Ă  Ă©tayer un logis croulant » 6. A peine arrivĂ© Ă  Caen, Cordier de Launay 1 Arcli. dĂ©p., Calvados, C 205. 2 Ibid., C 206 et sĂ©rie G non inventoriĂ©e. Registre des dĂ©libĂ©rations des paroisses Saint-Martin, Saint-Nicolas, Saint-Sauveur, Saint-Michel, etc. 3 Ibid., C 209, 210. Les fonds qui avaient Ă©tĂ© destinĂ©s Ă  cette dĂ©pense furent employĂ©s aux travaux de canalisation de l'Orne. 4 Ibid., C 211, 217. Ces deux propriĂ©taires Ă©taient Mmc de Chazot et Cairon de la Mothe. 5 Ibid., C 222, 3085, 3091. De 1776 Ă  1783, Esmangart obtint, Ă  force de demandes rĂ©itĂ©rĂ©es, et tn se heurtant Ă  une vive rĂ©sistance des contrĂŽleurs gĂ©nĂ©raux des finances, des sommes qui lui furent successivement accordĂ©es sur les fonds libres de la capilation, et dont le total monta Ă  68,928 livres. Arch. nat., H1 1408. 6 Letlrc d'Esmangart au contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral, 8 dĂ©cembre 1782. Arch. nat., H1 1408. 12 LES BUREAUX DE L'INTENDANT dut faire exĂ©cuter pour plus de 13,000 livres de travaux afin de rendre habitable le taudis appelĂ© hĂŽtel de l'Intendance » 1. C'est dans cet hĂŽtel de la rue des Carmes que l'intendant avait Ă©tabli ses bureaux, depuis 1769. Ils ressemblaient Ă  ceux de nos prĂ©fectures. A leur tĂȘte se trouvait un premier secrĂ©taire de l'in- tendance, prĂ©dĂ©cesseur du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des prĂ©fets d'au- jourd'hui. Sous Fontette, il y eut Ă  Caen un subdĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral, le nĂ©faste Malafait, dont l'administration fut dĂ©testĂ©e et qui contribua Ă  la disgrĂące de son chef 2. Depuis 1775, le premier secrĂ©taire Ă©tait Guyard, avocat qu'Esmangart avait amenĂ© de son intendance de Bordeaux, et que ses successeurs avaient conservĂ© 3. Il devait exercer ses fonctions jusqu'aux premiers jours de la RĂ©volution, avec des appointements d'environ 5,000 livres '4. Au-dessous de lui, les bureaux, dont le personnel avait augmentĂ© depuis quelques annĂ©es, par suite des exigences crois- santes du service, comprenaient en 1787 douze secrĂ©taires et commis, jouissant de traitements Ă©chelonnĂ©s entre 600 et 4,000 li- vres. Les employĂ©s trop ĂągĂ©s ou infirmes recevaient une pension annuelle de 600 livres prises sur les fonds libres de la capitation 5. Ces bureaux Ă©taient chargĂ©s de la correspondance administra- tive que l'intendant entretenait, d'une part, avec le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral, le ministre de la province et les divers ministres 6>, et 1 Lettre de Cordier de Launay Ă  M. de Villedeuil, mai 1787. Je suis, Ă©crivait-il, dans une humeur inconcevable de n'ĂȘtre pas logĂ©, et, tranchons le mot, de ne pou- voir jamais l'ĂȘtre dans la maison que M. de Fontette a si mal Ă  propos vendue au roi et affectĂ©e Ă  l'intendance... J'aime beaucoup M. et Mme de Fontette, mais, comme je suis forcĂ© de le dire et comme tout le monde ici le crie, il n'est pas permis Ă  un administrateur, pour le petit intĂ©rĂȘt personnel, de se dĂ©faire d'une maison, d'affecter Ă  un homme public une habitation non seulement archimalsaine, mais encore si petite, si mal tournĂ©e, qu'il est de toute impossibilitĂ© d'y demeurer les deux tiers de TannĂ©e et d'y tenir en aucun temps l'Ă©tat ni la reprĂ©sentation convenable. » Arch. nat., H1 1408. 2 F. Mourlot, L'Intendant Fontette, op. citĂ©, p. 14. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 231. 4 Ibid., C 229. Guyard devint, en 1789, receveur des tailles de l'Ă©lection de Valognes. Ibid., C 2805. Lamy DesvallĂ©es, qui le remplaça pendant les derniers jours de l'intendance, Ă©tait le frĂšre cadet de Michel-Louis Lamy, dĂ©putĂ© du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen aux Etats gĂ©nĂ©raux de 1789. 5 Arch. dĂ©p., Calvados, C 229. bj L'administration de la Normandie bureau de PĂ©tigny de Saint-Romain ressor- tissait en 1787 au dĂ©partement des affaires Ă©trangĂšres ; voir Inventaire du ministĂšre des affaires Ă©trangĂšres France, affaires intĂ©rieures, n° 1401-1403. — L'annĂ©e sui- vante, on la rattacha au secrĂ©tariat d'Etat de la maison du roi qui eut pour titulaires successifs le baron de Breteuil, Laurent de Villedeuil et le comte de Saint-Priest. Voir Almanachs royaux de 1787 Ă  1790. TABLEAU DES DEPARTEMENTS DE LTNTENDANCE 13 d'autre part avec ses subdĂ©lĂ©guĂ©s, les officiers municipaux des villes, et les chefs des diffĂ©rents services de son ressort. Adminis- trateur suprĂȘme de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, l'intendant y exerçait encore, au commencement de 1787, en sa qualitĂ© de commissaire dĂ©parti, une autoritĂ© absolue sur toutes les parties de l'administration, et sous la triple rubrique de justice, police et finances » Ă©taient confondus une foule d'objets dont aucun n'Ă©chappait Ă  son contrĂŽle. Un Tableau des dĂ©partements des secrĂ©taires de l'intendance de Caen », dressĂ© Ă  l'Ă©poque de Fontette, montre la diversitĂ© des affaires soumises Ă  l'administration d'un intendant avant l'institution des AssemblĂ©es provinciales, et le mode de rĂ©partition du travail entre les dĂ©partements », analogues aux divisions » de nos prĂ©fectures 0; Premier dĂ©partement. — M. Malafait Lettres de cachet et ordres du roi ; administration municipale de toutes les villes y compris les ouvrages publics Ă  leur charge particuliĂšre ; mendicitĂ© ; administration des hĂŽpitaux de charitĂ© ; affaires de l'UniversitĂ© et du clergĂ© ; affaires extraordinaires ; ouvrages des ports de commerce ; fortifications de terre et de mer ; artillerie, poudres et salpĂȘtres ; Ă©tapes, extraordinaire des guerres ; milice de terre, milice garde-cĂŽte, rĂ©giment de recrues ; marĂ©chaussĂ©e et gĂ©nĂ©ralement tout ce qui a rapport au militaire. DeuxiĂšme dĂ©partement. — M. Marescot Capitation ; impositions extraordinaires y compris les rejets ; vingtiĂšmes ; ponts et chaussĂ©es ; bacs et pĂ©ages ; toutes les fermes du roi ; domaines, ventes et reventes ; affaires de la reli- gion prĂ©tendue rĂ©formĂ©e ; postes et messageries ; Ă©glises et pres- bytĂšres ; huissiers priseurs et tabellionnages ; lettres de grĂące et de rĂ©mission ; Ă©rections de fiefs, garde-noble, etc.; hĂŽtel des Monnaies ; Ă©tats des crimes et dĂ©lits ; imprimerie et librairie ; rĂ©gie des cartes. TroisiĂšme dĂ©partement. — M. Darras Taille ; affaires de dessĂšchement ; sociĂ©tĂ© d'agriculture ; con- cessions de terrains incultes ; manufactures ; arts et mĂ©tiers et tout ce qui a rapport au commerce ; rĂ©unions des juridictions ; parties casuelles et offices ; Ă©cole royale militaire ; haras ; maladies et remĂšdes de la Cour. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6331. 14 LE CONSEIL DE L'INTENDANCE QuatriĂšme dĂ©partement. — M. Boisard Lettres de compliments et tous les dĂ©tails qui lui seront confiĂ©s par les autres dĂ©partements. En dehors de ces dĂ©partements », l'intendant Cordier de Launay avait attachĂ© Ă  son cabinet, en 1787, un secrĂ©taire parti- culier, Grandjean de Fouchy. Celui-ci Ă©tait plus particuliĂšrement chargĂ© de la correspondance journaliĂšre sur les questions urgentes, que l'intendant croyait devoir traiter sans le concours de ses bureaux. A la mĂȘme Ă©poque, l'intendance de Caen se trouvait dotĂ©e, depuis peu d'annĂ©es, d'une institution qui devait laisser des traces profondes dans notre droit administratif public le Conseil de l'Intendance, vĂ©ritable prototype du Conseil de prĂ©fecture actuel. Le point de dĂ©part de cette institution avait Ă©tĂ© la nĂ©ces- sitĂ© d'organiser une tutelle des communautĂ©s d'habitants. DĂšs son arrivĂ©e Ă  Caen, en 1775, l'intendant Esmangart avait remar- quĂ© les mauvaises habitudes de ces communautĂ©s rurales, prĂȘtes Ă  intenter des procĂšs pour les causes les plus futiles. En prĂ©sence d'un esprit de chicane aussi dĂ©veloppĂ©, son prĂ©dĂ©cesseur Fontette avait exigĂ©, pendant les derniĂšres annĂ©es de son intendance, la production par les communautĂ©s d'un avis, signĂ© de deux avocats, certifiant la validitĂ© de leurs moyens juridiques. Ce fut un palliatif insuffisant. Des consultations trop souvent mendiĂ©es ne ser- vaient guĂšre Ă  Ă©clairer l'administration ; le contrĂŽle Ă©tabli n'Ă©tait souvent qu'une vaine vaine formalitĂ©. Pour rĂ©duire le nombre de ces procĂšs ruineux, Esmangart rĂ©solut d'installer au siĂšge mĂȘme de l'intendance un conseil de trois avocats, chargĂ©s d'exa- miner les dĂ©libĂ©rations des communautĂ©s et toutes les piĂšces y ayant trait » avant qu'elles fussent soumises Ă  son visa. Cette institution fonctionnait avantageusement Ă  Bordeaux, d'oĂč il arrivait ; il l'Ă©tablit Ă  Caen dĂšs le mois de fĂ©vrier 1776 *. Ce ne fut pas sans obstacle. Les procureurs de l'Ă©lection de Caen pro- testĂšrent contre l'obligation du visa du Conseil des avocats pour l Arch. dĂ©p., Calvados, C 232 et 234. Dans son ouvrage dĂ©jĂ  citĂ© sur l'administra- tion provinciale en France, Prou intsialnaia Admin'stratsia, etc. tome I, p. 298, note 2, M. Ardascheff, en montrant la nouveautĂ© de cette institution, cite la date de 1778 comme la date la plus reculĂ©e oĂč elle apparaisse, et l'intendant d'Amiens, Bruno d'Agay, comme un des initiateurs de la rĂ©forme, et il pose la question Y en eut-il d'autres avant lui ? » La date de 1776 doit ĂȘtre adoptĂ©e pour l'intendance de Caen, et, d'aprĂšs le tĂ©moignage d'Esmangart, il faut remonter plus haut encore pour celle de Bordeaux. LES SUIÎDÉLÉGUÉS DE 1/lNTENDANT 15 les dĂ©libĂ©rations des communautĂ©s relatives au fait des tailles ». La Chambre des comptes de Rouen leur enjoignit mĂȘme de pous- ser les communautĂ©s Ă  la rĂ©sistance. Mais Esmangart tint bon,' et le conseil de l'intendance Ă©tait encore en activitĂ© en 1787 !. Les trois avocats-conseils » Ă©taient alors Le Paulmier, profes- seur Ă  la facultĂ© des droits et subdĂ©lĂ©guĂ© de l'intendant ; Descotils- Desjardins, aussi professeur Ă  la facultĂ© des droits, et Mares- cotW. Chacune des onze subdivisions administratives de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, ou subdĂ©lĂ©gations, avait Ă  sa tĂȘte un subdĂ©lĂ©guĂ©. Tem- poraires au dĂ©but, ces agents, nĂ©s des besoins, de la pratique administrative des intendants, Ă©taient vite devenus permanents ; une rĂ©sidence fixe leur avait Ă©tĂ© assignĂ©e. Ils Ă©taient Ă  peu prĂšs par rapport Ă  l'intendant ce que sont aujourd'hui les sous-prĂ©fets par rapport aux prĂ©fets. Toutefois ils n'Ă©taient pas, comme les sous-prĂ©fets, nommĂ©s par le pouvoir central c'est l'intendant qui, en vertu de sa commission, avait le droit de les nommer ; ils Ă©taient rĂ©vocables Ă  sa guise. Ajoutons que cette autoritĂ© arbi- traire de l'intendant Ă©tait toute thĂ©orique, et que celui-ci n'avait guĂšre l'occasion de l'exercer. En fait, les subdĂ©lĂ©guĂ©s jouissaient, vis-Ă -vis de leur chef, d'une assez complĂšte indĂ©pendance 3. Leur charge administrative n'Ă©tait la plupart du temps qu'une fonction accessoire ajoutĂ©e Ă  une fonction publique antĂ©rieure- ment acquise. Par l'exercice de cette premiĂšre fonction, par leur degrĂ© de culture, leur Ă©tat social, leur situation de fortune, ils Ă©taient au rang des notabilitĂ©s locales avec lesquelles l'intendant devait compter. Ainsi, sur les onze subdĂ©lĂ©guĂ©s de l'intendance de Caen, trois Ă©taient lieutenants gĂ©nĂ©raux de bailliages Robil- lard Ă  Saint-LĂŽ, Sivard de Beaulieu Ă  Valognes, Lavalley de la Hogue Ă  Carentan. Ferey de Montitier, subdĂ©lĂ©guĂ© cl'Avranches, qui venait de succĂ©der Ă  MeslĂ©, dĂ©cĂ©dĂ© en 1787, Ă©tait lieutenant particulier au bailliage de cette ville, et lieutenant en l'Ă©lection 4. 1 On trouve des traces de l'activitĂ© de ce Conseil aux arch. dĂ©p. du Calvados pour les Ă©lections d'Avranches, C 1055 ; de Caen, C 1088; de Carentan, C 1248; de Mortain, C 1219; de Saint-LĂ», C 1227-1228. 2 Chacun d'eux recevait une gi'atificalion annuelle de 400 livres, prise sur les fonds libres de la capitation. Arch. dĂ©p., Calvados, C 231. AprĂšs la mort de le Paul- mier, janvier 1788, Lepage, puis Desbordeaux, avocats, furent conseillers de l'inten- dance. 3 ArdaschefT montre trĂšs bien cette indĂ©pendance de fait des subdĂ©lĂ©guĂ©s, dans son ouvrage dĂ©jĂ  citĂ© Provintsialnaia Adminislratsia, etc., chap. V, Intendant v'svoei oblasli i iĂšuo podtchinenniĂ©. Subdelegati, p. 332 sqq. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 3378. 16 CONDITION SOCIALE DES SUBDÉLÉGUÉS Le Harivel de Gonneville, subdĂ©lĂ©guĂ© de Caen aprĂšs la mort de Le Paulmier, Ă©tait lieutenant gĂ©nĂ©ral criminel au siĂšge de police de cette ville *. Le subdĂ©lĂ©guĂ© de Granville, Couraye Duparc, y exerçait avant sa nomination l'office de vicomte avec intelli- gence et Ă  la satisfaction du public » et en avril 1787 il fut choisi, par le roi comme maire de cette ville 2. DĂ©mons de Garantot, subdĂ©lĂ©guĂ© de Cherbourg, y Ă©tait lieutenant gĂ©nĂ©ral de police depuis 1761 3, et maire depuis 1781 W ; c'est en cette qualitĂ© qu'il avait reçu Louis XVI, quand celui-ci vint visiter en 1786 les travaux du port. Sivard de Beaulieu figurait en 1788 parmi les notables de l'hĂŽtel de ville de Valognes 5, Robillard, avant d'occuper le siĂšge de lieutenant-gĂ©nĂ©ral du bailliage Ă  Saint-LĂŽ et d'y recevoir une commission de subdĂ©lĂ©guĂ©, avait Ă©tĂ© docteur agrĂ©gĂ© aux droits » Ă  Caen 6. GĂȘnas, subdĂ©lĂ©guĂ© de Bayeux depuis 1772, conseiller au bailliage, Ă©tait fils d'un ancien conseiller Ă  l'Ă©phĂ©mĂšre Conseil supĂ©rieur de cette ville C. S'ils tenaient au titre de subdĂ©lĂ©guĂ©, c'Ă©tait surtout en raison du surcroĂźt de considĂ©ration et d'influence locale qu'il leur donnait. La charge, en effet, Ă©tait plus honorifique que lucrative. Elle ne comportait aucune rĂ©tribution fixe. A peine les subdĂ©lĂ©guĂ©s recevaient-ils quelques gratifications, comparables aux frais de bureau ou de tournĂ©es de certains fonctionnaires actuels ; 9,000 livres leur Ă©taient annuellement allouĂ©es en bloc dans l'intendance de Caen, ce qui rĂ©duisait Ă  peu la part de chacun *. Aussi plus d'un la rece- vait-il avec hauteur 5. La situation matĂ©rielle et sociale de ces subdĂ©lĂ©guĂ©s explique les mĂ©nagements que les intendants Ă©taient obligĂ©s de garder vis-Ă -vis d'eux 6> ; elle nous expliquera plus tard la dĂ©fiance qu'inspireront Ă  Cordier de Launay, au dĂ©but de la crise rĂ©vo- lutionnaire, la plupart de ces subordonnĂ©s, lorsqu'il les verra, assoiffĂ©s de repos ou avides de popularitĂ©, abdiquer leurs fonc- tions occasionnelles de subdĂ©lĂ©guĂ©s, dĂ©chues dans l'opinion pu- blique, pour se confiner dans l'exercice de leurs charges antĂ©- rieures et fondamentales, ou pour briguer les suffrages populaires. Pour se rendre compte de la multiplicitĂ© et de la variĂ©tĂ© des attributions des subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă  la fin de l'Ancien RĂ©gime, il n'y a qu'Ă  feuilleter les archives des subdĂ©lĂ©gations. Si le dĂ©faut de mesures d'ensemble prises pour la conservation et le classement 1 MeslĂ© a tract' un portrait exact et trĂšs vivant des habitants de l'Avranchin. Arch. dĂ©p., Calvados, C 1070. 2 Sivard de Beaulieu fut subdĂ©lĂ©guĂ© Ă  Valognes pendant douze ans ; de Cheux de Saint-Clair, Ă  Vire pendant dix-neuf ans 1758-1777 ; MeslĂ©, Ă  Avranches, pendant vingt-quatre ans 1763-1787 ; de la Roque, Ă  Mortain, pendant vingt-huit ans 1762- 1790 ; de MombriĂšre, Ă  Coutances, pendant plus de quarante ans. 3 Deux GĂȘnas, l'oncle et le neveu, furent successivement subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă  Bayeux de 1736 Ă  1789. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 231. Encore prĂ©levait-on sur cette somme des gratifi- cations pour les secrĂ©taires de l'intendance. 5 De la Roque, subdĂ©lĂ©guĂ© Ă  Mortain, se croit au-dessus de toute gratification, ne veut pas convenir en avoir reçu, n'en a pas besoin ; GĂȘnas, de Bayeux, a 12,000 liv. de rente et est fort Ă©conome ; de Saint-Clair, Ă  Vire, a 8,000 livres de rente ; de Varoc, Ă  Saint-LĂč, fait de la dĂ©pense pour l'Ă©ducation de sa famille et reçoit l'intendant lors de sa tournĂ©e. » Notes de l'intendant Esmangart. Ibid., C 231. 6 Ibid., C 4156. Ni Feydeau de Brou, ni Cordier de Launay n'osent transmettre Ă  Robillard, subdĂ©lĂ©guĂ© de Saint-LĂŽ, une lettre de blĂąme de Castries, secrĂ©taire d'Etat de la marine. Ils la trouvent trop mortifiante » Ă  l'Ă©gard d'un homme qui sacrifie son temps et sa fortune au service public et qui offrirait immĂ©diatement sa dĂ©mis- sion ». 18 SUBDÉLÉGUÉS, AGENTS D'INFORMATION de ces archives a eu de fĂącheux rĂ©sultats, si les fonds des subdĂ©lĂ©- gations sont plutĂŽt rares W, les Archives] dĂ©partementales du Calvados ont eu la bonne fortune d'acquĂ©rir les papiers des deux plus importantes subdĂ©lĂ©gations de l'intendance de Caen celles de Caen et de Bayeux *2. ReprĂ©sentants de l'intendant dans leur circonscription, comme celui-ci Ă©tait le reprĂ©sentant du roi dans la sienne, les subdĂ©lĂ©guĂ©s de l'intendance de Caen nous apparaissent sous le double aspect d'agents d'information et d'agents d'exĂ©cution. Agents d'information, ils Ă©taient les correspondants, les conseil- lers de l'intendant. Ils Ă©taient ses yeux et ses oreilles ». On les consultait Ă  tout propos et sur tous les objets. Les statistiques qu'ils Ă©taient chargĂ©s de dresser Ă  intervalles pĂ©riodiques Ă©taient dĂ©jĂ  effrayantes par leur nombre Ă©tats annuels, par paroisses, des naissances, mariages et sĂ©pultures, avec leurs observations sur les maladies Ă©pidĂ©miques W ; Ă©tats du mouvement de la population dans les maisons religieuses et hĂŽpitaux 4 ; Ă©tats annuels de la situation des rĂ©coltes avec des indications prĂ©cises sur les causes qui en favorisaient ou en contrariaient l'abon- dance 5 ; Ă©tats mensuels, puis bimensuels du prix des grains et des diverses denrĂ©es qui se vendaient sur les marchĂ©s de leur subdĂ©lĂ©gation 6 ; tableaux des dessĂšchements et des dĂ©friche- ments 7. Il ne se passait guĂšre de semaine sans que le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral ne demandĂąt Ă  l'intendant, et celui-ci Ă  ses subdĂ©lĂ©guĂ©s, un rapport sur les questions les plus diverses, surtout d'ordre Ă©conomique. Quels sont les endroits oĂč se tiennent des foires et quelle est l'importance de celles-ci ? 8 Existe-t-il dans la gĂ©nĂ©- ralitĂ© des mines de charbon ou de fer ? 9. Quels sont les princi- paux objets du commerce de la rĂ©gion ? 10. Quelles industries y prospĂ©reraient ? i11. Autant de demandes auxquelles devaient rĂ©pondre les subdĂ©lĂ©guĂ©s. Une sociĂ©tĂ© d'agriculture va-t-elle se 1 Voir Ardascheff, ouv. citĂ©, p. 378. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6884 Ă  6917 subdĂ©lĂȘgation de Caen ; C 9446 Ă  9565 sub- dĂ©lĂ©gation de Bayeux. 3 Ibid., C 9450. 4 Ibid., C 9451. 5 Ibid., C 2689 Ă  2711. 6 Ibid., C 9455. 7 Ibid., C 6885, 9457. 8 Ibid., C 6886. 9 Ibid., C 6887. 10 Ibid., C 9458, 9462, 9463 et suivants. 11 Ibid., C 6887. SUBDÉLÉGUÉS, AGENTS D'EXÉCUTION 19 fonder, vite l'intendant les prie de dresser la liste des personnes capables d'en faire partie *. Supprime-t-on des communautĂ©s d'arts et mĂ©tiers, voilĂ  les subdĂ©lĂ©guĂ©s occupĂ©s Ă  apurer leurs comptes, Ă  dresser l'inventaire de leurs titres W. Leur avis est rĂ©clamĂ© sur les demandes de sauf-conduits ou d'arrĂȘts de sur- sĂ©ance 3, sur les Ă©rections de fiefs W et jusque sur les moindres dĂ©- tails des rĂ©jouissances publiques et les illuminations des villes P. Agents d'exĂ©cution, les subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă©taient comme les com- missaires dĂ©partis » de l'intendant. Ils servaient d'intermĂ©- diaires entre celui-ci d'une part, les corps municipaux des villes et les syndics des communautĂ©s rurales d'autre part. Ils leur transmettaient les ordres reçus et veillaient Ă  l'accomplissement de ceux-ci. Ces ordres Ă©taient, le plus souvent, leurs avis mĂȘmes qui, aprĂšs avoir suivi la voie hiĂ©rarchique, leur faisaient retour, Ă  la sortie des bureaux de l'intendance ou de l'administration cen- trale, transformĂ©s, soit en ordonnances de l'intendant, soit en dĂ©- cisions ministĂ©rielles, soit mĂȘme en solennels arrĂȘts du Conseil 6. Dans l'intendance de Caen comme dans les autres pays d'Ă©lection », l'activitĂ© des subdĂ©lĂ©guĂ©s se portait sur de multiples objets. On les voit collaborer avec les Ă©lus et les receveurs des tailles Ă  la prĂ©paration des mandements 7 ; rĂ©partir l'imposition territoriale et celle des bĂątiments de justice, spĂ©ciales Ă  la gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Caen 8 ; dresser les rĂŽles des paroisses qui supportaient la taxe reprĂ©sentative de la corvĂ©e y ; prĂ©sider aux adjudications de travaux publics 10 ; veiller Ă  la sĂ©curitĂ© et au bon ordre u ; organiser l'assistance et propager l'hygiĂšne ]2l L'administration militaire leur occasionnait une surcharge accablante. Dans beaucoup d'Ă©lections oĂč il n'y avait pas de commissaires des guerres, comme Ă  Bayeux, Vire, Saint-LĂŽ, etc., les subdĂ©lĂ©guĂ©s I Arch. dĂ©p., Calvados, C 2501. * Ibid., C 6889. 3 Ibid., C 6882. 4 Ibid., C 6917. 5 Ibid., C 6916. 6 Ibid., C passim. Les cartons de l'intendance de Caen renferment en abondance les preuves de la transcription littĂ©rale des rapports des subdĂ©lĂ©guĂ©s par les bureaux de 1 intendant, sous forme de projets d'arrĂȘts du Conseil. Ardascheff a insistĂ© sur ce point, ouv. citĂ©, p. 366. 7 Arch. dĂ©p., Calvados, C 94 1 a 9477 8 Ibid., C 9503 Ă  9519. 9 Ibid., C 9490 Ă  9502. 10 Ibid., C 9550. II Ibid, C 9452. 12 Ibid., C 9563, 9454 '20 MUNICIPALITÉS URBAINES ET COMMUNAUTÉS RURALES en faisaient fonction. Les fournitures nĂ©cessaires -pour le transport des troupes, pour leur casernement voitures, bĂȘtes de somme, lits militaires ; le dĂ©nombrement des garde-cĂŽtes, la levĂ©e de la milice, la police des dĂ©serteurs et des hĂŽpitaux militaires, le ser- vice de la marĂ©chaussĂ©e; en un mot, les mille dĂ©tails d'une admi- nistration trĂšs compliquĂ©e absorbaient tous leurs instants *. L'extension progressive des attributions des subdĂ©lĂ©guĂ©s avait fait de ceux-ci les chevilles ouvriĂšres de l'administration provin- ciale Ă  la fin de l'Ancien RĂ©gime. Leur tĂąche avait quadruplĂ©, si l'on en croit l'un d'eux, le subdĂ©lĂ©guĂ© de Vire 2. Aussi, en plus d'un endroit, se faisaient-ils aider par des secrĂ©taires. A Saint- LĂŽ, le secrĂ©taire de Robillard exerçait ces fonctions depuis 1741, .et il avait succĂ©dĂ© Ă  son pĂšre qui occupait cet emploi depuis 1721 3. A Avranches, Boudent Ă©tait Ă  la fois greffier de l'Ă©lection et de la subdĂ©lĂ©gation 4. Ces commis, choisis par les subdĂ©lĂ©guĂ©s, Ă©taient, en gĂ©nĂ©ral, exempts de capitation, des corvĂ©es, des droits d'aides et du logement des gens de guerre 5\ Entre les onze subdĂ©lĂ©gations de la gĂ©nĂ©ralitĂ© se rĂ©partissaient 1,214 paroisses, d'inĂ©gale importance villes, bourgs et villages. Une douzaine de villes Ă  forme municipale, dont les constitutions respectives, unifiĂ©es par l'Ă©dit de juillet 1766, avaient Ă©tĂ© diver- sifiĂ©es par des rĂšglements particuliers ultĂ©rieurs, et 1,200 com- munautĂ©s rurales, pourvues d'organismes encore rudimentaires et enfermĂ©es dans les Ă©troites bornes d'une vie exclusivement locale, telles Ă©taient au dĂ©but de 1787, les derniĂšres molĂ©cules administratives de la gĂ©nĂ©ralitĂ© ». Il n'y avait aucune circons- cription intermĂ©diaire entre la subdĂ©lĂ©gation d'une part, les municipalitĂ©s urbaines et les communautĂ©s rurales d'autre part. Les subdĂ©lĂ©guĂ©s correspondaient directement avec les officiers municipaux et avec les syndics paroissiaux. Les maires, chefs des municipalitĂ©s, Ă©taient nommĂ©s par le roi sur une liste de trois membres proposĂ©s par les hĂŽtels de ville ; il est probable que 1 Voir les lettres de Demortreux, subdĂ©lĂ©guĂ© de Vire, du 28 mai 1780, et de Robillard, subdĂ©lĂ©guĂ© de Saint-LĂč, du 18 mars 1781. Arch. dĂ©p., Calvados, C 231. .‱ 2 Je ne crois pas dire trop en disant que j'ai la subdĂ©lĂ©gation la plus surchar- gĂ©e et la plus attachante, et que je n'ai pas un seul jour tranquille ; mon travail, par l'extraordinaire, est quadruple du prĂ©cĂ©dent. » lbid., ibid. 3 Lefauqueux de la BesnardiĂšre, greffier de la subdĂ©lĂ©gation de Saint-LĂŽ, demanda, en raison des soixante-neuf ans de services accomplis par son pĂšre et lui, une gratification Ă  l'AssemblĂ©e nationale, le 2 juillet 1790. Arch. nat, Dvi 38, 1. 554. Cf. Arch. dĂ©p. Calvados, C 6289. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7647. Yvert Ă©tait greffier de la subdĂ©lĂ©gation de Caen, et Basley de celle de Baveux. Ibid., C 6916 et 9446. C> Ibid., C 7647. LES SYNDICS DES PAROISSES RURALES 21 l'avis de l'intendant influait sur ces choix, et que ce dernier s'en rapportait aux renseignements fournis par ses subdĂ©lĂ©guĂ©s 1>. Les syndics ruraux de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen Ă©taient Ă©lus par l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de leurs paroissiens ; depuis 1769, ils Ă©taient prĂ©posĂ©s d'office Ă  la collecte des vingtiĂšmes 2, et l'on avait joint Ă  cette fonction de nature fiscale la levĂ©e d'autres impo- sitions rĂ©cemment Ă©tablies en Basse-Normandie et spĂ©ciales Ă  cette rĂ©gion, comme l'imposition territoriale et celle des bĂąti- ments de justice 3. Comme l'intendant et comme les subdĂ©lĂ©guĂ©s, ces officiers publics des communautĂ©s urbaines et rurales Ă©taient revĂȘtus, mais dans un ressort de moindre Ă©tendue, d'attributions admi- nistratives, par dĂ©lĂ©gation indirecte de l'Etat. C'Ă©taient les organes administratifs du degrĂ© infĂ©rieur, les agents d'informa- tion et d'exĂ©cution placĂ©s au dernier rang de l'Ă©chelle adminis- trative, et l'on a pu dire avec raison, notamment des syndics ruraux, qu'ils Ă©taient des vice-subdĂ©lĂ©guĂ©s » 4, et qu'ils reprĂ©sentaient les subdĂ©lĂ©guĂ©s dans toutes les opĂ©rations ayant trait Ă  l'ordre public et au gouvernement » 5. Toutefois, en dehors des attributions qui leur Ă©taient com- munes avec les intendants et les subdĂ©lĂ©guĂ©s 6, les maires et syndics en avaient d'autres qui leur Ă©taient propres, et qu'ils n'exerçaient pas au nom de l'Etat. Ils Ă©taient les reprĂ©sentants et les chefs de l'association communale ; les syndics en Ă©taient mĂȘme partout les chefs Ă©lus. Le principe de l'Ă©lection, bien qu'il fĂ»t parfois violĂ© par l'action arbitraire des intendants, n'en subsistait pas moins comme un dernier vestige de l'indĂ©pendance locale, et il pouvait devenir le point de dĂ©part de libertĂ©s nou- velles. Il allait bientĂŽt franchir le cercle Ă©troit oĂč l'absolutisme monarchique l'avait enfermĂ©, pour rĂ©gĂ©nĂ©rer, Ă  tous les degrĂ©s de la hiĂ©rarchie, le rĂ©gime administratif du pays. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, G 1068, 1092, 1095, 1173, 1184, 1221, 1230 et 1257. 2 Ordonnance de l'intendant Fontelte concernant la nomination des syndics et prĂ©posĂ©s au recouvrement des vingtiĂšmes. Ibid., C 5295. 3 Ces deux impositions, spĂ©ciales Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, avaient Ă©tĂ© Ă©tablies, la premiĂšre par des arrĂȘts successifs du Conseil, de 1769 Ă  1785 ; la seconde, par un arrĂȘt du Conseil du 18 janvier 1786. Ibid., C 4398, 8172, 8174 et 8181. 4 Ardascheff, oiw. citĂ© Ă©d. russe, p. 524. 11 les appelle aussi des subdĂ©lĂ©guĂ©s en miniature ». 5 A. de Tocqueville, L'Ancien RĂ©gime et la RĂ©volution, p. 75. 6 Je rappelle que plusieurs subdĂ©lĂ©guĂ©s Ă©taient en mĂȘme temps maires de la ville chef-lieu de leur rĂ©sidence tel Garantot Ă  Cherbourg, MeslĂ© Ă  Avranches et Couraye-Duparc Ă  Granville. Mais aucun subdĂ©lĂ©guĂ© de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ne fut syndic rural. 22 l'Ă©dit de juin 1787 CHAPITRE II LA FORMATION DE l' ASSEMBLÉE PROVINCIALE DE BASSE-NORMANDIE. AOUT 1787 La rĂ©forme administrative de 1787 en Normandie son objet. — Critiques formulĂ©es contre les intendants ce qu'elles ont de fondĂ© dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. — DĂ©sirs et projets de rĂ©formes administratives en Normandie avant l'Ă©tablissement des AssemblĂ©es provinciales. Ledit de juin 1787. — L'assemblĂ©e prĂ©liminaire d'aoĂ»t 1787; sa composi- tion. — Formation complĂ©mentaire de l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie ; rĂ©partition gĂ©ographique et sociale de ses mem- bres assemblĂ©e de privilĂ©giĂ©s. — Ses organes d'exĂ©cution Commis- sion intermĂ©diaire provinciale et procureurs syndics provinciaux. — La premiĂšre moitiĂ© des assemblĂ©es d'Ă©lection condition sociale de leurs membres. — Atteinte portĂ©e au pouvoir de l'intendant par la crĂ©ation de l'institution nouvelle. L'annĂ©e 1787 vit s'opĂ©rer en Normandie, comme dans les autres pays d'Ă©lection » du royaume, une vĂ©ritable rĂ©volution administrative *. ConformĂ©ment Ă  l'avis Ă©mis par l'AssemblĂ©e des notables rĂ©unie au mois de fĂ©vrier, Louis XVI publia en juin un Ă©dit crĂ©ant des AssemblĂ©es provinciales dans toutes les gĂȘnĂ©- ralitĂ©s du royaume qui n'avaient pas d'Etats provinciaux i2. La Normandie, dont les Etats, pĂ©riodiquement rĂ©unis depuis le Moyen Ăąge, avaient Ă©tĂ© suspendus par Mazarin, devait avoir en vertu de cet Ă©dit trois AssemblĂ©es provinciales, correspondant Ă  ses trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s de Rouen, d'Alençon et de Caen. L'Ă©dit de juin fut suivi de deux RĂšglements royaux, l'un du 15 juillet 3, sur la formation et la composition des assemblĂ©es », 1 Voir le chapitre XIX de Tocqueville, L'Ancien RĂ©gime el la RĂ©volution, intitulĂ© Comment une grande rĂ©volution administrative avait prĂ©cĂ©dĂ© la rĂ©volution poli- tique, etc. y> 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 110. Cet Ă©dit fut enregistrĂ© au Parlement de Rouen le 10 avril 1787, et publiĂ© au bailliage et prĂ©sidial de Caen le 5 septembre. 3 Ibid., C 6341. LE RÈGLEMENT DU 15 JUILLET 1787 23 l'autre du 5 aoĂ»t l\ sur leurs fonctions et leurs relations avec l'intendant ». Le RĂšglement du 15 juillet Ă©tablissait trois sortes d'assemblĂ©es hiĂ©rarchiquement superposĂ©es municipales, d'Ă©lection et pro- vinciales. Des assemblĂ©es municipales, composĂ©es du seigneur et du curĂ©, membres de droit, et de trois, six ou neuf membres, plus un syndic, choisis par les habitants de la paroisse, en raison du nombre des feux, devaient ĂȘtre formĂ©es dans toutes les com- munautĂ©s oĂč il n'en existait pas encore. Neuf assemblĂ©es d'Ă©lec- tion » Ă©taient créées dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© » de Caen. Chaque Ă©lec- tion » Ă©tait divisĂ©e en un certain nombre de circonscriptions Ă©lectorales, ou arrondissements ; chaque arrondissement devait envoyer Ă  l'assemblĂ©e d'Ă©lection quatre dĂ©putĂ©s un du clergĂ©, un de la noblesse et deux du Tiers Ă©tat. L'Ă©lection de Caen, formĂ©e de 6 arrondissements, devait fournir 24 membres ; les huit autres Ă©lections, ne comprenant que 5 arrondissements, l'effectif de leurs assemblĂ©es respectives ne pouvait dĂ©passer 20 membres. L'AssemblĂ©e provinciale, sĂ©ant Ă  Caen, chef-lieu de la gĂ©nĂ©- ralitĂ©, devait ĂȘtre composĂ©e de 40 membres, dont 20 ecclĂ©sias- tiques, seigneurs laĂŻques ou gentilshommes les reprĂ©sentant, et 20 membres pris dans les dĂ©putĂ©s des villes et des paroisses. Les neuf Ă©lections devaient collaborer Ă  la composition de cette assemblĂ©e dans la proportion suivante 8 dĂ©putĂ©s pour l'Ă©lection de Caen, 4 pour chacune des huit autres Ă©lections. Dans l'avenir, c'est le systĂšme Ă©lectif qu'on devait employer au recrutement de ces trois espĂšces d'assemblĂ©es ; selon l'expres- sion de l'Ă©poque, elles seraient Ă©lĂ©mentaires » les unes des autres en d'autres termes, les membres de l'AssemblĂ©e provinciale devaient ĂȘtre choisis parmi ceux des assemblĂ©es d'Ă©lection, et ceux-ci parmi les membres des assemblĂ©es municipales. Toute- fois, pour mettre en mouvement la nouvelle institution, le roi s'Ă©tait rĂ©servĂ© le choix de la premiĂšre moitiĂ© de l'AssemblĂ©e provinciale, lui laissant le soin de se complĂ©ter elle-mĂȘme. Les premiĂšres assemblĂ©es d'Ă©lection devaient ĂȘtre formĂ©es d'aprĂšs les mĂȘmes principes la moitiĂ© des membres, Ă  la nomination des dĂ©putĂ©s provinciaux dĂ©signĂ©s par le roi, s'adjoindrait l'autre moitiĂ© par cooptation. Pour les assemblĂ©es municipales seules, 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7610, reproduit dans le ProcĂšs-verbal de Basse-Nor- mandie, pages 46 Ă  91. 24 LE RÈGLEMENT DU 15 JUILLET 1787 le systĂšme Ă©lectoral absolu Ă©tait immĂ©diatement mis en vigueur HY. On attendait du temps et de l'expĂ©rience le perfectionnement de l'institution. Ces diverses assemblĂ©es devaient avoir des rĂ©unions pĂ©rio- diques. L'AssemblĂ©e provinciale, annuelle, aurait une session de trente jours au plus ; les sessions, Ă©galement annuelles, des assemblĂ©es d'Ă©lection ne dĂ©passeraient pas quinze jours. Dans l'intervalle de ces sessions des bureaux permanents, Ă©lus parmi les membres de ces diverses assemblĂ©es, et appelĂ©s Commissions intermĂ©diaires » Ă©taient chargĂ©s de la suite des affaires ils de- vaient rendre compte de leur mandat aux assemblĂ©es suivantes par l'organe des deux procureurs-syndics, agents d'exĂ©cution placĂ©s auprĂšs de chacun d'eux. Les assemblĂ©es municipales, dont les rĂ©unions devaient ĂȘtre beaucoup plus frĂ©quentes, n'a- vaient pas de commission intermĂ©diaire et comme, seigneur et curĂ© exceptĂ©s, elles Ă©taient exclusivement issues du Tiers Ă©tat, elles n'avaient qu'un seul syndic. Dans les assemblĂ©es munici- pales la majoritĂ© Ă©tait partout acquise au Tiers Ă©tat. Quant aux assemblĂ©es supĂ©rieures, on s'Ă©tait prĂ©occupĂ© d'Ă©tablir une pro- portion rigoureuse dans la rĂ©partition de leurs membres une moitiĂ© appartenait aux deux ordres privilĂ©giĂ©s, clergĂ© et noblesse ; l'autre moitiĂ© au Tiers Ă©tat. Le maintien de deux procureurs- syndics rendait cette dualitĂ© plus sensible. Dans le prĂ©ambule du RĂšglement, Louis XVI avait expressĂ©- ment indiquĂ© que les dispositions en Ă©taient conformes Ă  l'esprit qui avait dirigĂ© les dĂ©libĂ©rations des Notables ». Le projet de GalonnĂ©, en effet, avait Ă©tĂ© modifiĂ© selon les vues des Notables, c'est-Ă -dire dans un sens rĂ©trograde. La distinction des trois ordres, supprimĂ©e par ce ministre, avait Ă©tĂ© rĂ©tablie. C'Ă©tait, sur un point capital, une concession faite aux ordres privilĂ©giĂ©s. Les Notables avaient encore obtenu gain de cause sur un autre point la prĂ©sidence des assemblĂ©es provinciales ou d'Ă©lection ne pou- vait ĂȘtre dĂ©fĂ©rĂ©e qu'Ă  un membre du clergĂ© ou de la noblesse. TrĂšs explicite sur le mode de recrutement et la composition des assemblĂ©es, le RĂšglement du 15 juillet n'indiquait ni leurs fonc- tions ni les relations qu'elles devaient entretenir soit entre elles, soit avec l'intendant. Un rĂšglement nouveau Ă©tait rendu nĂ©ces- saire par la juxtaposition de deux autoritĂ©s sur un champ d'action oĂč jusque-lĂ  il ne s'en Ă©tait exercĂ© qu'une seule. 1 Encore un clĂ©ment non Ă©lectif entrait-il dans leur composition avec les deux membres de droit reprĂ©sentant les deux premiers ordres, le seigneur et le curĂ©. LE RÈGLEMENT DU 5 AOUT 1787 25 Avant l'institution de l'AssemblĂ©e provinciale, l'intendant de Caen Ă©tait, on l'a vu, l'agent absolu du pouvoir central dans sa circonscription. Organe du Conseil d'Etat, dont il provoquait et prĂ©parait souvent les arrĂȘts avant de les faire exĂ©cuter, il avait l'initiative dans la dĂ©cision, l'indĂ©pendance dans l'action, l'administration sans contrĂŽle et sans partage. Le jour oĂč l'on plaçait prĂšs de lui, prĂšs de ses subordonnĂ©s les subdĂ©lĂ©guĂ©s et les syndics, toute une sĂ©rie d'assemblĂ©es pourvues d'attributions administratives, son autoritĂ© se trouvait singuliĂšrement amoin- drie. Il fallait au moins dĂ©terminer avec prĂ©cision les attributions de l'intendant et celles de l'administration nouvelle, essayer d'Ă©tablir entre elles une dĂ©marcation assez nette, une barriĂšre contre des empiĂ©tements possibles de part et d'autre, en un mot rĂ©gler les relations rĂ©ciproques des deux pouvoirs, de maniĂšre que la libertĂ© qu'il convenait de laisser Ă  l'action de chaque partie ne pĂ»t jamais altĂ©rer le concours et la surveillance mutuels qu'exigeait l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral de la province '-1 ». » Ce fut l'objet du RĂšglement du 5 aoĂ»t 1787. Son rĂ©dacteur devait avoir sous les yeux les lignes suivantes Ă©crites en 1778 par Necker Il est sans doute des parties d'administration qui, tenant uniquement Ă  la police, Ă  l'ordre public, Ă  l'exĂ©cution des ordres de Votre MajestĂ©, ne peuvent jamais ĂȘtre partagĂ©es et doivent, par consĂ©quent, reposer sur l'intendant seul ; mais il en est aussi, telles que la rĂ©partition et la levĂ©e des impositions, l'entretien et la construction des chemins, le choix des encourage- ments favorables au commerce, au travail en gĂ©nĂ©ral et aux dĂ©bouchĂ©s de la province en particulier qui, soumises Ă  une marche plus lente et plus constante, peuvent ĂȘtre confiĂ©es prĂ©fĂ©- rablement Ă  une commission composĂ©e de propriĂ©taires, en rĂ©ser- vant Ă  l'intendant l'importante fonction d'Ă©clairer le gouverne- ment sur les diffĂ©rents rĂšglements qui seraient proposĂ©s 2. » Telle fut prĂ©cisĂ©ment la division des attributions adoptĂ©e par le RĂšglement du 5 aoĂ»t. La rĂ©partition des divers impĂŽts, la surveillance et la direction des travaux publics, les Ɠuvres d'assis- tance, les encouragements Ă  l'agriculture, Ă  l'industrie et au commerce furent du ressort de l'AssemblĂ©e provinciale et de sa Commission intermĂ©diaire. L'intendant, par rapport Ă  l'Assem- blĂ©e, n'Ă©tait plus que le commissaire du roi », c'est-Ă -dire un 1 PrĂ©ambule du rĂšglement du 5 aoĂ»t 1787. ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 46. 2 Necker, MĂ©moire au Roi, p. 7 et 8. 26 DESIRS DE REFORME ADMINISTRATIVE haut fonctionnaire chargĂ© de la police et de l'ordre public. Il est vrai qu'il avait toujours le contrĂŽle sur les opĂ©rations de l'assem- blĂ©e, qu'il transmettait au pouvoir central les dĂ©libĂ©rations de celle-ci en les accompagnant de son avis, et qu'enfin il Ă©tait seul, par l'apposition de son visa, Ă  les rendre exĂ©cutoires aprĂšs leur ratification. Cette rĂ©forme administrative qui ne devait ĂȘtre rĂ©alisĂ©e dans la plus grande partie de la France qu'en 1787, au seuil mĂȘme de la RĂ©volution, s'accomplissait bien tardivement. Il y avait trois quarts de siĂšcle qu'on la dĂ©sirait. Depuis le jour oĂč FĂ©nelon avait rĂ©sumĂ© ses griefs contre l'administration de Louis XIV par ce seul cri Plus d'intendants ! » et oĂč Boulainvilliers, dans son Etat de la France» avait accusĂ© ceux-ci d'ĂȘtre les instruments de la misĂšre du peuple », les plaintes n'avaient pas cessĂ©. Non seulement des publicistes et des Ă©conomistes comme Saint- Simon m, le marquis de Mirabeau , mais les cours souveraines, les Parlements et les Cours des aides 4l, mais les hommes d'Etat, les ministres eux-mĂȘmes, d' Argenson 5, Tur- got 6, Necker P, avaient courageusement dĂ©voilĂ© les abus de la 1 Saint-Simon, Ecrits inĂ©dits publiĂ©s par FaugĂšre. Paris, 1880-1883, tome IV, p. 36. 2 Marquis de Mirabeau, L'Ami des hommes s. 1. 1755-1760, IVe partie MĂ©moire sur les Etals provinciaux. Etats provinciaux calquĂ©s sur ceux du Languedoc clergĂ©, noblesse, dĂ©putĂ©s des villes ; dĂ©libĂ©rations en commun et vote par tĂȘte. Ils ren- dront compte de leurs diverses opĂ©rations au roi par 1 intermĂ©diaire des intendants, ses commissaires, et recevront par le mĂȘme canal des ordres pour le bien-ĂȘtre gĂ©nĂ©- ral de l'Etat. » Une Commission intermĂ©diaire provinciale formĂ©e des syndics gĂ©nĂ©- raux, dont un Ă  la suite de la Cour. 3 Le Trosne, De l'Administration provinciale el de la rĂ©forme de l'ImpĂŽt. Paris, 1779. Projet d'administration provinciale liĂ© Ă  l'Ă©tablissement d'un seul impĂŽt, la taille. CommunautĂ© d'arrondissement canton. District. GĂ©nĂ©ralitĂ©. AssemblĂ©es, conseils administratifs, dont membres Ă  vie dĂ©signĂ©s par l'Ă©lection. Plus d'intendants; des dĂ©putĂ©s du Conseil national font chaque annĂ©e une inspection des gĂ©nĂ©ralitĂ©s. 4 Voir notamment les Remontrances de la Cour des aides de Paris de 1775 Les AssemblĂ©es provinciales sont le vƓu unanime de la nation. » 5 Marquis d'Argenson, ConsidĂ©rations sur le Gouvernement ancien et prĂ©sent de la France. Amsterdam, 1781, in 8°. Le chapitre VII de cet ouvrage, intitulĂ© Plan du gouvernement proposĂ© pour la France, comprend 52 articles ; les articles 27 Ă  36 concernent les intendances et subdĂ©lĂ©gations, dont l'auteur rĂ©clamait l'augmentation lune intendance par 200 paroisses, une subdĂ©lĂ©gation par 20 paroisses. 6 Turgot, MĂ©moire sur les municipalitĂ©s Ă  Ă©tablir en France rĂ©digĂ© en 1775. OEuvres posthumes de Turgot. Lausanne, 1787. Ancien intendant, Turgot dit que les intendants et leurs subdĂ©lĂ©guĂ©s ne peuvent guĂšre connaĂźtre en dĂ©tail les res- sources et besoins des peuples, d'oĂč dĂ©cisions arbitraires et abus. Projet de rĂ©forme radical. Non plus des Etats avec les trois ordres, mais des asssemblĂ©es de propriĂ©- taires fonciers municipales, de ville et village, d'Ă©lection, provinciales, gĂ©nĂ©rale avec simple voix consultative, agents d'enquĂȘte Ă©clairant le pouvoir central. Ce projet ne supprime pas les intendants et n'entame pas leur autoritĂ©. 7 Necker, MĂ©moire au Roi sur l'Ă©tablissement des AssemblĂ©es provinciales, p. 170-184, et De l'Administration des Finances de la France, t. III, p. 379-385. CRITIQUES CONTRE LES INTENDANTS 27 centralisation excessive. Longtemps avant leur disparition, les intendants Ă©taient condamnĂ©s. De tous leurs adversaires, Necker avait frappĂ© le plus fort et il avait portĂ© la premiĂšre atteinte grave Ă  leur autoritĂ© en Ă©tablissant, les assemblĂ©es provinciales du Berry et de la Haute-Guyenne modĂšles de toutes les autres. A deux reprises diffĂ©rentes, dans son MĂ©moire au Roi » de 1778, et dans son TraitĂ© de l'administration des finances de la France » publiĂ© en 1784, il s'Ă©tait Ă©levĂ© avec la plus grande sĂ©vĂ©ritĂ© contre les vices de l'institution des intendants. Les critiques si vives qu'il formulait, avec d'autres contem- porains *, contre leur mode de recrutement, leur ignoraance, leur ambition, leur esprit ombrageux, leur dĂ©sintĂ©ressement des affaires de leur province Ă©taient-elles justes en ce qui concerne l'intendance de Caen? Premier grief un long usage appelle uniquement aux intendances les maĂźtres des requĂȘtes. Pourquoi s'entĂȘter Ă  les prendre dans ce corps? Leur Ă©tat ne forme pas particuliĂšrement Ă  l'administration, car ils ne sont occupĂ©s que de rapporter au Conseil des requĂȘtes en cassation ; ils sont donc fatalement, au dĂ©but, des administrateurs inexpĂ©rimentĂ©s. Si encore on les choisissait avec discernement ! Mais, ou bien l'on suit aveuglĂ©ment l'ordre du tableau, ou ce qui est pis encore, des considĂ©rations de faveur amĂšnent de trop jeunes maĂźtres des requĂȘtes Ă  la tĂȘte des intendances'2. Ce reproche Ă©tait fondĂ© pour quelques-uns des derniers intendants de Caen. Fontette et Esmangart avaient Ă©tĂ© nommĂ©s Ă  34 ans, Feydeau de Brou Ă  22 ans, aprĂšs six mois au plus de prĂ©sence au Conseil d'Etat 3. 1 L'Espion dĂ©ualisĂ© attribuĂ© Ă  Baudoin de GuĂ©madeuc, ancien maĂźtre des requĂȘtes, p. 216 et suiv. L'Espion anglais attribuĂ© Ă  Pidansat de Mairobert, secrĂ©- taire des commandements du duc de Chartres, membre de l'AcadĂ©mie royale de Caen. Tome V, p. 96 et suiv. 2 L'Espion dĂ©ualisĂ© s'exprimait ainsi Depuis 1776 on a reçu au Conseil quel- ques fils de maĂźtres faits pour y ĂȘtre, mais qui sont de plats sujets. VoilĂ  cependant la pĂ©piniĂšre des 33 intendants du royaume On reçoit des fils de traitants, de maçons, de trĂ©soriers, puis on veut que les peuples respectent ces va-nu-pieds... » p. 216-217. — L'Espion anglais, tome V, p. 96, est tout aussi dur Ă  l'Ă©gard des inten- dants. Qu'est-ce qu'un commissaire dĂ©parti ? Un jeune freluquet qui sort de Paris pour la premiĂšre fois, ignorant souvent comment croĂźt le blĂ©, ayant presque tou- jours un intĂ©rĂȘt contraire Ă  celui de la province, courant la carriĂšre de la fortune avide des grĂąces de la cour qu'il doit obtenir par le canal du ministre des finances... » 3 Jugement de l'Espion dĂ©valisĂ© sur Esmangart, p. 220-221 Esmangart, fils d'un valet de chambre du Palais Royal. . . Ă©tait Ă  Bordeaux d'oĂč on l'a chassĂ© en 1774 parce qu'il faisait l'important; il s'Ă©tait vouĂ© en bas valet Ă  Maupeou... Sa mĂšre, qui Ă©tait auprĂšs de Madame de Chartres, a eu le crĂ©dit, par M. le duc d'OrlĂ©ans, de placer ce beau fils Ă  Bordeaux. Je vous demande ce qu'il a fait dans celte intendance 28 CRITIQUES CONTRE LES INTENDANTS Autre accusation, Ă©galement motivĂ©e. Leur ambition les pousse Ă  changer souvent de place, Ă  considĂ©rer l'intendance qu'on leur a- confiĂ©e comme un simple Ă©chelon, comme un lieu de passage. PrĂ©sumant qu'on avance plus par les intrigues et les relations que par le travail et l'Ă©tude, ils viennent souvent Ă  Paris, se font remplacer par leurs secrĂ©taires ou leurs subdĂ©lĂ©guĂ©s. Leur vie se passe Ă  courir la France, d'une intendance Ă  l'autre, et chacun de ces changements leur fait perdre, au grand dĂ©triment de leur province, le bĂ©nĂ©fice des connaissances qu'ils ont acquises sur elle. LĂ  encore Necker touchait juste, et il exprimait avec une ferme modĂ©ration des vĂ©ritĂ©s que les pamphlĂ©taires du temps traduisaient avec plus de vĂ©hĂ©mence rK L'intendance de Caen avait eu Ă  souffrir de cette instabilitĂ© de ses administrateurs. Du dĂ©part de Fontette 1775 jusqu'Ă  la RĂ©volution, elle compta trois intendants Esmangart 1775-1783, Feydeau de Brou 1783-1787 et Cordier de Launay. Esmangart arrivait de Bor- deaux et devait quitter Caen pour Lille. Feydeau de Brou avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ©, de 1776 Ă  1783, intendant de Bourges et de Dijon il cumulait, avec ses fonctions d'intendant, celles de directeur adjoint des Ă©conomats, ayant l'expectative de cette charge possĂ©- dĂ©e par son oncle Marville. Pendant plus de cinq ans, Ă  la fin de l'administration de Fontette, l'intendance de Caen avait Ă©tĂ© Ă  la merci d'un subdĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral haineux et improbe, qui avait accumulĂ© les fautes et les scandales 2, tandis que son chef demeu- rait Ă  la cour comme chancelier de Monsieur. Aussi la Basse-Normandie, lasse d'Ă©prouver les mauvais effets d'une telle administration, en attendait-elle avec impatience la rĂ©forme. Depuis assez longtemps dĂ©jĂ , elle avait joint ses rĂ©cla- mations particuliĂšres Ă  celles de l'opinion publique. Le vieux et ce qu'il peut faire Ă  Caen ? » Jugement, du mĂȘme libelle sur Feydeau de Brou, p. 218 De Brou, qui est Ă  Dijon en 1780, n'a pas Ă©tĂ© six mois au Conseil. Richis- sime, beau-fils, petit-fils d'un garde des sceaux par intĂ©rim,, il mĂ©prise la place et l'Ă©tat. » 1 Leur antipathie pour le travail ne leur permet pas d'acquĂ©rir des connais- sances personnelles, les provinces qu'ils rĂ©gissent leur demeurent toujours Ă©gale- ment inconnues. . . » Lettre de M. Ă  M. . . conseiller au Parlement, au sujet de ledit pour l'Ă©tablissement des administrations provinciales 26 avril 1781. Ne connaissant point les lieux qu'il n'a jamais habitĂ©s, oĂč il ne rĂ©side que trois Ă  quatre mois de l'annĂ©e, l'intendant sera obligĂ© de s'en rapporter Ă  ses subdĂ©lĂ©- guĂ©s pour la formation des mĂ©moires envoyĂ©s Ă  la cour. » L'Espion anglais, p. 97. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 229. Note de d'Ormesson sur Malafait, subdĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral de Caen. M. Malafait vante ses anciens services, mais il n'a pas travaillĂ© gratis ; bien des gens seraient contents de se retirer comme lui, Ă  la haine publique prĂšs. PROJET DE RÉFORME DE BALLEROY 29 marquis de Balleroy, exilĂ© dans ses terres par l'influence de la duchesse de ChĂąteauroux, avait occupĂ© ses loisirs Ă  tracer le plan d'une administration provinciale nouvelle *. Il Ă©tait l'ami intime du marquis d'Argenson, avec qui il entretenait une active corres- pondance'2. C'est d'aprĂšs ses conseils pressants, dit-on, que d'Argenson exposa un projet d'AssemblĂ©es provinciales dans ses ConsidĂ©rations sur le gouvernement ancien et prĂ©sent de la France ». L'ouvrage parut en 1764, sept ans aprĂšs la mort de d'Argenson. Balleroy aurait alors Ă  nouveau songĂ© Ă  leur com- mun projet et l'aurait mis sous les yeux de Fontette, intendant de Caen. Celui-ci, paraĂźt-il, le fit agrĂ©er au ministre, et fut chargĂ© de dresser un plan qui, oubliĂ© dans les cartons du contrĂŽle gĂ©nĂ©ral par des intendants de finances hostiles Ă  la rĂ©forme, devait tom- ber plus tard sous les yeux de Necker 3. Aucun document d'ar- chives ne m'a permis de contrĂŽler la vĂ©racitĂ© de cette assertion. Il serait peut-ĂȘtre excessif de faire de Fontette un partisan rĂ©solu de l'Ă©tablissement des assemblĂ©es provinciales. Il avait Ă  un trop haut degrĂ© l'ambition du pouvoir pour travailler lui-mĂȘme Ă  sa propre dĂ©chĂ©ance. Il n'est pas invraisemblable toutefois d'affirmer qu'il n'approuvait pas en tout point l'ordre de choses Ă©tabli Ă  son Ă©poque, et qu'il dĂ©sira une rĂ©forme administrative assez profonde. Il eut l'occasion d'exprimer ses vues Ă  ce sujet . en 1763. Le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral Bertin, en vue d'assurer une rĂ©par- tition plus Ă©quitable de la taille, voulait alors procĂ©der au dĂ©nom- brement et Ă  l'estimation de tous les biens-fonds du royaume. En rĂ©ponse au questionnaire du ministre, Fontette proposa un projet de cadastre, basĂ© sur la division de la Normandie en ser- genteries 4. Les assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales des communautĂ©s rurales, auxquelles prendraient part tous les contribuables, pauvres comme riches, roturiers comme nobles, tous citoyens », devaient Ă©lire chacune trois dĂ©putĂ©s. RĂ©unie au chef-lieu de la sergenterie, l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s paroissiaux devait nommer Ă  son tour 3 commis- saires dont au moins un laboureur, chargĂ©s de dĂ©signer les experts et arpenteurs, de veiller Ă  la rĂ©daction du cadastre de la sergen- 1 E. de BarthĂ©lĂ©my, Les Correspondants de la Marquise de Balleroy, tome I, notice prĂ©liminaire, p. 2 D'Argenson, Journal et MĂ©moires SociĂ©tĂ© de l'Histoire de France, Paris, 1859- 1867, tome IV, p. 112, mentionne l'exil de Balleroy dans sa terre de Normandie. 3 AbbĂ© Bidot, Histoire de Balleroy, p. 236. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 4523. Voir F. Mourlot, L'Intendant Fontette,, p. 11-12. 30 PROJET DE RÉFORME DE FONTETTE terie et de rĂ©gler toutes les contestations qui naĂźtraient Ă  ce sujet. Les commissaires de la sergenterie, renouvelables tous les trois ans, seraient ainsi de vĂ©ritables Ă©lus ». ReprĂ©sentants du peuple, ils jugeraient leurs pairs avec capacitĂ©, intĂ©gritĂ©, dĂ©sin- tĂ©ressement ». Les sergenteries se grouperaient pour nommer trois commissaires par Ă©lection et une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale formĂ©e des 27 commissaires de l'intendance de Caen se rĂ©unirait chaque annĂ©e, sous la prĂ©sidence de l'intendant, pour faire connaĂźtre au roi les besoins de la province. Les circonstances ne permirent pas au ministre Bertin de rĂ©aliser ce projet. Le caractĂšre normand s'accommoda fort bien de ce retard, tant les esprits Ă©taient prĂ©venus contre l'Ă©tablissement d'un cadastre. Le projet de Fontette Ă©tait en apparence, rĂ©volutionnaire ; c'Ă©tait, avant la lettre, les AssemblĂ©es provinciales de la fin de l'ancien rĂ©gime, et mĂȘme les conseils gĂ©nĂ©raux de notre France contemporaine. L'Ă©lection Ă©tait le mode de recrutement adoptĂ© pour ces assem- blĂ©es ; le but qu'on leur assignait Ă©tait la substitution d'estima- tions Ă©quitables et fermes Ă  l'arbitraire et aux variations des anciennes Ă©valuations fiscales. Toutefois l'intention de Fontette n'avait jamais Ă©tĂ© d'amoindrir le prestige et la puissance des intendants. L'originalitĂ© de son projet consistait dans la demande de suppression des tribunaux d'Ă©lection et des cours des aides, c'est-Ă -dire des juridictions anciennes encore capables de faire obstacle, sur le terrain de l'impĂŽt, Ă  l'extension continue des attributions de l'intendant. Fontette espĂ©rait sans aucun doute que les assemblĂ©es futures, purement consultatives, seraient des commissions fiscales entiĂšrement dĂ©pendantes de leur prĂ©sident, le commissaire dĂ©parti. ConsidĂ©rĂ©e sous ce point de vue, cette mesure de nivellement, qu'il conseillait au contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral, n'eut visĂ© qu'Ă  affermir le despotisme du pouvoir central sur les ruines des derniĂšres indĂ©pendances locales. La Lettre d'un habitant de C. . . Caen Ă  M. de 1. L. de la Londe, maire de la ville de B Bayeux sur les administra- tions provinciales^ » rĂ©vĂ©lait de tout autres prĂ©occupations. A la nouvelle que Necker avait Ă©tabli une AssemblĂ©e provinciale dans le Berry et s'apprĂȘtait Ă  en organiser une dans le DauphinĂ©, l'auteur anonyme de cette brochure invitait les gentilshommes de la Basse-Normandie Ă  s'unir pour demander au Roi, par l'in- termĂ©diaire du duc d'Harcourt, gouverneur de la province, Ă  ce 1 Lellre sur les administrations provinciales. Amsterdam, 1779. En Ă©pigraphe, on lit Felices sua si bona noscunt, Nortnani. » DEMANDES D'ASSEMBLEES PROVINCIALES 31 moment en tournĂ©e dans le Bessin, l'Ă©tablissement d'une ou de trois assemblĂ©es normandes, au chef-lieu de chaque intendance. Cet Ă©crit marquait une vĂ©ritable dĂ©fiance vis-Ă -vis de l'intendant Esmangart EspĂšre-t-on, y disait l'auteur, trouver plus d'amour pour la province, plus de connaissance de ses vrais intĂ©rĂȘts dans la personne d'un commissaire du Conseil, que dans la rĂ©union de ses propriĂ©taires? Croit-on que ce commissaire Ă©tranger dans sa gĂ©nĂ©ralitĂ© en connaisse aussi bien les besoins et les ressources que les habitants? » Il est fort probable qu'Ă  cette Ă©poque le duc d'Harcourt, le marquis de Blangy et d'autres grands seigneurs normands firent, sans succĂšs d'ailleurs, de nouvelles dĂ©marches auprĂšs du ministre pour obtenir l'extension Ă  la Normandie du rĂ©gime accordĂ© au Berry tt. L'idĂ©e d'une rĂ©forme administrative n'en avait pas moins continuĂ© Ă  faire son chemin et, en 1781, l'AcadĂ©mie royale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen avait proposĂ© pour sujet d'un de ses prix la question suivante DĂ©terminer les avantages qui devraient rĂ©sulter pour la Normandie de l'Ă©tablissement d'une AssemblĂ©e provinciale » 2. En 1787, Ă  l'AssemblĂ©e des notables, l'intendant de Rouen, Laurent de Villedeuil, qui allait devenir ministre, insista lui-mĂȘme sur la nĂ©cessitĂ© d'Ă©tablir des AssemblĂ©es provinciales, a ne dissi- mulant pas que la foule des occupations dont se trouvaient inves- tis les intendants les exposait Ă  de frĂ©quentes surprises » 3. A la mĂȘme Ă©poque, un Bas-Normand saluait la prochaine rĂ©union de ces assemblĂ©es comme devant affranchir la France de la tyran- nie ordinaire des intendants, subdĂ©lĂ©guĂ©s et autres suppĂŽts 4V 1 On saisit la trace d'un mouvement gĂ©nĂ©ral de la province de Normandie dans un extrait du registre de dĂ©libĂ©rations de l'hĂŽtel de ville de Carentan, conservĂ© aux archives du chĂąteau d'Harcourt, carton 264. Par cette dĂ©libĂ©ration, datĂ©e du 17 aoĂ»t 1779, Carentan dĂ©clare s'unir aux autres villes de la province pour obtenir les mĂȘmes avantages que le Berry et le DauphinĂ© ». — En 1781, le comte de Faudoas, premier Ă©chevin noble de Caen, dĂ©nonçait en ces termes l'ambition de DuperrĂ© de Lisle, alors avocat du roi au bailliage et son concurrent Ă  l'Ă©chevinat C'est un ambitieux, qui croit que les AssemblĂ©es provinciales auront lieu bientĂŽt et compte y jouer un rĂŽle intĂ©ressant ». Arch. dĂ©p., Calvados, C 1093. 2 ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e provinciale de Haute-Normandie, sĂ©ance du 11 dĂ©cembre 1787 ; discours de Bayeux, directeur de l'AcadĂ©mie, secrĂ©taire de rassemblĂ©e. 3 Nouvelles Ă  la main, du 19 mars 1787. Journal manuscrit donnant au vicomte d'Hautefeuille, brigadier des armĂ©es du Boi, toutes les nouvelles politiques et autres de Versailles et de Paris ; du 23 janvier 1787 au 20 fĂ©vrier 1788 Arch. dĂ©p., Calvados, E, famille d'Hautefeuille. 4 Lettre d'un candidat Ă  Larcher de la Londe, maire de Bayeux, du 25 avril 1787. CitĂ©e dans Pezet, Bayeux Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle, p. 78.. note 1. CARACTÈRE FISCAL DE LA RÉFORME 32 Ainsi, en Normandie, l'esprit public Ă©tait favorable Ă  cette institution. On y voyait un heureux essai de dĂ©centralisation administrative ; on en attendait la rĂ©surrection des anciennes libertĂ©s provinciales, dont l'exercice Ă©tait depuis si longtemps suspendu. A la considĂ©rer en effet dans ses traits gĂ©nĂ©raux, l'AssemblĂ©e provinciale de Caen semblait une satisfaction donnĂ©e Ă  l'opinion publique. Son titre mĂȘme rĂ©vĂ©lait les prĂ©occupations qui avaient dĂ» guider le roi et le gouvernement. Par une habile tactique, on avait effacĂ© les anciens noms des intendances, qui rappelaient une administration dĂ©testĂ©e, pour lui substituer des dĂ©nomi- nations provinciales. Aux anciennes gĂ©nĂ©ralitĂ©s de Rouen, de Caen et d'Alençon, succĂ©daient des ressorts administratifs dont les noms faisaient vibrer plus d'un cƓur provinces de haute, basse et moyenne Normandie. Ce nom de Normandie, systĂ©ma- tiquement Ă©cartĂ© du langage officiel et administratif par le despo- tisme de Louis XIV, y rĂ©apparaissait victorieusement comme une formule magique annonçant le rĂ©veil du vieux duchĂ© et le retour de ses libertĂ©s. L'Ă©tiquette nouvelle semblait prĂ©dire, Ă  des esprits superficiels, l'avĂšnement du rĂ©gime d'autonomie tant convoitĂ©. Mais, Ă  y regarder de plus prĂšs, l'illusion ne pouvait guĂšre durer. Calonne, le ministre inspirateur de l'Ă©dit de 1787 *, avait, dans l'Ă©tablissement des AssemblĂ©es provinciales, pour- suivi surtout un but fiscal. A ses yeux, l'association des provinces Ă  l'administration Ă©tait un expĂ©dient devenu nĂ©cessaire et un moyen efficace de parer au dĂ©ficit des finances. Il faut, disait-il, faire participer les contribuables Ă  l'assiette de leurs contribu- tions pour les leur faire paraĂźtre plus supportables et plus justes. » En rĂ©alitĂ©, l'ancienne province de Normandie restait dĂ©sarti- culĂ©e, dĂ©pecĂ©e en trois tronçons, et si on lui accordait un sem- blant de dĂ©centralisation et d'institutions libres, des espĂšces d'assemblĂ©es dĂ©libĂ©rantes, c'Ă©tait uniquement pour en tirer des subsides dont la royautĂ© avait besoin, et qu'elle aurait voulu obtenir sans faire appel aux Etats gĂ©nĂ©raux. Il y avait donc, dĂšs le dĂ©but, un dĂ©saccord complet entre les intentions du Roi et les espĂ©rances de la province, et la rĂ©forme de 1787 allait apparaĂźtre bientĂŽt comme une demi-mesure, impuissante Ă  satisfaire les exigences de l'opinion publique et Ă  produire les effets qu'on s'en Ă©tait promis. 1 Cet Ă©dit avait Ă©tĂ© promulguĂ©, aprĂšs la chute de Calonne, par son successeur Brienne. RECRUTEMENT DE L'ASSEMBLEE PROVINCIALE 33 L'Ă©dit de juin 1787 fut enregistrĂ© sans rĂ©sistance au Parlement de Rouen, le 10 aoĂ»t suivant ; cette cour se plaignit plus tard, il est vrai, que l'enregistrement avait Ă©tĂ© surpris pendant que beaucoup de ses membres Ă©taient en vacances et dans leurs terres. DĂšs le dĂ©but, elle garda une certaine rĂ©serve, considĂ©rant sans doute cette mesure comme un acheminement vers les Etats provinciaux, dont elle ne cessait de rĂ©clamer le rĂ©tablissement 1. L'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie pouvait dĂšs lors s'organiser. Il est incontestable que l'intendant Cordier de Launay $ et ses subdĂ©lĂ©guĂ©s ont pris une part indirecte, mais rĂ©elle, Ă  sa formation. Le 17 juin 1787, le secrĂ©taire de l'inten- dance priait les subdĂ©lĂ©guĂ©s de lui adresser une liste des personnes de leur ressort qu'ils jugeraient, en leur Ăąme et conscience, ĂȘtre les plus proposables, dans les trois ordres, pour former l'Assem- blĂ©e provinciale ». On leur recommandait d'avoir Ă©gard Ă  la propriĂ©tĂ©, Ă  la considĂ©ration dont la personne jouissait dans la rĂ©gion, au caractĂšre moral qui la distinguait ». D'autres listes leur Ă©taient demandĂ©es en vue de la constitution des assemblĂ©es d'Ă©lection on les invitait Ă  rĂ©partir leurs choix sur les diffĂ©rents points des Ă©lections, destinĂ©es Ă  ĂȘtre divisĂ©es en cinq ou six arrondissements ou districts, et Ă  ne proposer pour la premiĂšre fois que des hommes d'extraction 3 ». Ces diverses listes durent guider le choix du roi dans la dĂ©signation de la premiĂšre moitiĂ© de l'AssemblĂ©e provinciale, et plus tard, le choix de ces membres eux-mĂȘmes appelĂ©s, dans les derniers jours d'aoĂ»t, Ă  complĂ©ter leur nombre et Ă  former le noyau des assemblĂ©es d'Ă©lection. Les subdĂ©lĂ©guĂ©s ont aussi adressĂ© une liste de candidats Ă  la prĂ©si- dence des assemblĂ©es d'Ă©lection et parfois mĂȘme fixĂ© les chefs- lieux des districts entre lesquels les Ă©lections devaient ĂȘtre par- tagĂ©es u. Ce fut le 20 aoĂ»t que se rĂ©unit, Ă  l'abbaye de Saint-Etienne de Caen, l'assemblĂ©e prĂ©liminaire, sur la convocation de son prĂ©si- dent, le duc de Coigny. Marie-François-Henri de Franquetot, duc de Coigny, pair de France, lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du roi, grand bailli et gouverneur des ville et chĂąteau de Caen, des 1 Floquet, Histoire du Parlement de Normandie, t. VII, p. 100-101. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6343. L'intendant eut, en juillet 1787, plusieurs entre- vues Ă  ce sujet Ă  Versailles, avec Brienne et Villedeuil. 3 Ibid. Listes Ă©tablies par les subdĂ©lĂ©guĂ©s pour la formation de l'AssemblĂ©e provinciale et des assemblĂ©es d'Ă©lection. 4 Tels Robillard pour l'Ă©lection de Saint-LĂŽ, et de la Roque pour celle de Moi- tain. Ibid., C GJ43. 'M COMPOSITION DE L'ASSEMBLEE PRÉLIMINAIRE ville et citadelle de Cambrai, bailli et capitaine des chasses de la Varenne du Louvre, Ă©tait le petit-fils du cĂ©lĂšbre marĂ©chal de CĂŽignyO. Sa famille Ă©tait, avec celle des d'Harcourt, une des plus illustres de Normandie. La terre de Coigny, situĂ©e dans le Cotentin, et qui rapportait, dit-on, livres de rente, venait d'ĂȘtre Ă©rigĂ©e cette annĂ©e mĂȘme en duchĂ©-pairie. Coigny, qui avait fait la campagne d'Allemagne pendant la guerre de Sept Ans, sous le marĂ©chal d'EstrĂ©es, avait cinquante ans en 1787. Il jouissait d'un grand crĂ©dit Ă  la cour, oĂč il Ă©tait un des familiers les plus Ă©coutĂ©s de la reine Marie- Antoinette ; il Ă©tait aussi connu par sa liaison avec la princesse de GuĂ©mĂ©nĂ©e. Sa situai ion bril- lante Ă  Versailles, l'illustration de son nom, sa qualitĂ© de grand propriĂ©taire bas-normand l'avaient dĂ©signĂ© au choix du roi comme prĂ©sident de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen. Avec lui, dix-neuf autres membres, nommĂ©s aussi par le roi, devaient composer l'assemblĂ©e prĂ©liminaire. C'Ă©taient, dans l'ordre du clergĂ©, les trois Ă©vĂȘques de Basse-Normandie le vieil Ă©vĂȘque deBayeux, du Cheylus, aumĂŽnier de la comtesse d'Artois, prĂ©lat de cour, aimant la reprĂ©sentation et le jeu 2, TĂ©vĂȘque de Coutances, Talaru de Chalmazel ;*>, et celui d'Avranches, Godard deBelbƓuf, de vieille famille normande, frĂšre cadet du procureur gĂ©nĂ©ral au Parlement de Rouen4 ; deux autres membres du haut clergĂ©, l'abbĂ© de Cussy, archidiacre du Cotentin'5 et dom Verdier, prieur de l'abbaye de Savigny en Mortainais. Les reprĂ©- sentants de la noblesse Ă©taient, outre Coigny, le marquis d'HĂ©ricy, lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es, dont le chĂąteau de Vaussieux avait Ă©tĂ© le quartier gĂ©nĂ©ral du camp d'invasion de l'Angleterre 1 Armand Tirette, Recueil de Documents, t. II, p. 99-100. .' Dominique de Cheylus, nĂ© Ă  Avignon en 1719 ; successivement vicaire gĂ©nĂ©ral , I. I, p. 510. —BelbƓuf Ă©migra pendant la RĂ©volu- tion el mourut en Angleterre en 1868. La mĂȘme annĂ©e mourait aussi en Angleterre l'Ă©vĂȘque de Coutances. Quanl Ă  >\t\ Cheylus, il Ă©tait mort en 1797 a Jersey. 5 Moii a Paris sur l'Ă©cliafaud, le thermidor an II. Wallon, Histoire du Tribunal rĂ©volutionnaire, etc., t. V, p. 70 et 111. FORMATION COMPLEMENTAIRE DE l\\SSEMBLÉE 35 formĂ© en 1778 * ; le comte de Balleroy, lieutenant gĂ©nĂ©ral lui aussi, fils du vainqueur de Lawfeld, du vieil ami de d'Argenson 2 ; le marquis de Canisy, marĂ©chal de camp ; et enfin le marquis de Chiffrevast 3. Le Tiers Ă©tat avait fourni dix membres un riche industriel de religion protestante, Massieu, seigneur de Saint- Manvieu, et neuf maires des principales villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© le comte de VendƓuvre, maire de Caen, qui avait assistĂ© Ă  l'Assem- blĂ©e des notables ; le marquis de Colleville, maire de Valognes ; Larcher de la Londe, maire de Bayeux ; Vaufleury de Saint-Cyr, maire de Mortain ; de Bacilly, maire de Saint-LĂŽ ; Desplanques du Mesnil, maire de Carentan ; FrĂ©min de Beaumont, maire de Coutances ; MeslĂ©, maire d'Avranches, et Mauduit, maire de Vire W. L'assemblĂ©e prĂ©liminaire, que l'intendant vint ouvrir le 20 aoĂ»t en sa qualitĂ© de commissaire dĂ©parti, dans la salle du chapitre de l'abbaye Saint-Etienne, dura cinq jours. Son champ d'action Ă©tait nettement dĂ©terminĂ© par le RĂšglement du 15 juillet. Elle devait se complĂ©ter, nommer son greffier, sa commission inter- mĂ©diaire, ses procureurs-syndics, puis former le noyau des neuf assemblĂ©es d'Ă©lection. Pour l'aider dans la premiĂšre de ces opĂ©rations, l'assemblĂ©e eut sous les yeux les listes dressĂ©es par les subdĂ©lĂ©guĂ©s 5. Les cinq membres qu'elle s'adjoignit dans l'ordre du clergĂ© furent cinq abbĂ©s ou prieurs dom Mesnilgrancl, prieur de l'abbaye Saint-Etienne ; l'abbĂ© Bruzeau, prieur de Tailleville ; l'abbĂ© de Champigny, abbĂ© de Mondaye ; de Chiffrevast, abbĂ© de Saint- Sever, frĂšre du marquis et Hardy, prieur d'Englesqueville-LaĂźtre. Dans l'ordre de la noblesse, les choix tombĂšrent sur le marquis d'Hautefeuille, seigneur de Louvigny, marĂ©chal de camp, le 1 Pezet, Bayeux Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle, p. 29 et suiv. 2 Il s'Ă©tait distinguĂ© au combat de Saint-Cast pendant la guerre de Sept Ans, et avait, servi en Corse sous le comte de Vaux. II mourut sur l'Ă©chafaud le 6 germinal an II. Arch. nat., W 340. 3 Mort Ă  Paris sur l'Ă©chafaud., le 18 messidor an II. Arch. nal.. W 409. 4 Une premiĂšre liste, conservĂ©e dans les bureaux de l'intendance, et qui date de juillet 1787, proposait pour le Tiers Ă©tat dix habitants de Caen lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, lieutenant particulier des r;i\i\ et forĂȘts, procureur du roi de l'amirautĂ©, deux trĂ©soriers de France, un Ă©chevin et trois nĂ©go- ciants;. Cette omission systĂ©matique de dĂ©putĂ©s Ă©trangers Ă  Caen lit sans doute rejeter la proposition, mais le seul fait qu'un tel exclusivisme ait pu se manifester, tĂ©moigne du mĂ©diocre intĂ©rĂȘt que l'intendant prenait Ă  la reprĂ©sentation rĂ©elle de la province. 5 Les frĂ©quentes coĂŻncidences que l'on constate entre les propositions des subdĂ©- lĂ©guĂ©s et les choix faits par l'assemblĂ©e semblent le prouver 36 RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DE SES MEMBRES comte Louis de Vassy, seigneur de Brecey, mestre de camp ; deux capitaines de dragons, le comte de SĂ©beville et le marquis du Quesnoy ; de Montfarville, seigneur du Mesnil-Veneron, gen- tilhomme fermier de l'Ă©lection de Saint-LĂŽ. Les dix associĂ©s rangĂ©s dans le Tiers Ă©tat furent Burdelot, maire et vicomte de Pontorson ; Flaust, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Vire ; deux lieutenants particuliers de bailliages, Daigremont Ă  Caen, et Hervieu de Pont-Louis Ă  Carentan ; deux avocats du roi aux bailliages de Saint-LĂŽ et de Mortain, Bernard et Levesque ; Ga- briel de Cussy, ex-directeur de la Monnaie de Caen ; de la Lande du Mesnildrey, ancien avocat au prĂ©sidial de Coutances ; Le VĂ©el, ancien notaire, bourgeois de Valognes et Faucon, bon propriĂ©- taire et nĂ©gociant Ă  Isigny ». La rĂ©partition gĂ©ographique des membres de l'AssemblĂ©e provinciale sur le territoire de la Basse-Normandie fut Ă  peu prĂšs conforme au RĂšglement du 15 juillet. En effet l'Ă©lection de Caen fournit 8 dĂ©putĂ©s ; les autres Ă©lections en eurent presque toutes quatre C. Ce qui est important Ă  constater, c'est que, pour des raisons de fortune, des hommes de valeur furent, Ă  cause de leur Ă©loignement de Caen, Ă©cartĂ©s Ă  priori de l'assem- blĂ©e ; certains subdĂ©lĂ©guĂ©s ne les firent figurer sur leurs listes que pour dĂ©plorer l'impuissance oĂč la mĂ©diocritĂ© de leurs ressources les mettait d'ĂȘtre utiles Ă  leurs concitoyens 2. L'assemblĂ©e a dĂ» y perdre des lumiĂšres assez prĂ©cieuses. Autre remarque intĂ©res- sante plusieurs des membres proposĂ©s par les subdĂ©lĂ©guĂ©s comme faisant partie de la noblesse furent inscrits dans le Tiers Ă©tat tels Mauduit, de Colleville, FrĂ©min de Beaumont, Leforestier de VendƓuvre. C'Ă©tait en vertu de leurs fonctions, et non de leur qualitĂ© personnelle, que ces derniers, chefs de quatre munici- palitĂ©s du ressort provincial, avaient Ă©tĂ© appelĂ©s Ă  l'assemblĂ©e ; et c'est leur titre de maires qui les fit ranger dans le Tiers Ă©tat, comme dĂ©putĂ©s des villes 3. 1 L'Ă©lection de Baveux en comptait cinq, et celle de Saint-LĂŽ trois seulement ; l'Ă©vĂȘque de Baveux fut considĂ©rĂ© fictivement comme dĂ©putĂ© de cette derniĂšre Ă©lection. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C G343. Notes de Bobillard, subdĂ©lĂ©guĂ© le Saint-LĂŽ, sur Le Menuet de la JuganniĂšre Esprit trĂšs pĂ©nĂ©trant, bon citoyen, avocat renommĂ©, jurisconsulte instruit, mais ayant besoin de son Ă©tat pour soutenir sa maison. » Sur Le Tellier du Hutrel Elocution sĂ©duisante et connaissances fort Ă©tendues,... pas assez riche pour rester longtemps Ă  Caen, et cependant plus fait que tout autre pour Jigurer dans une AssemblĂ©e provinciale. » 3 Ce fut pour la mĂȘme raison que le comte de VendƓuvre, maire de Caen, et son successeur, MĂ©nage de Cagny, furent appelĂ©s, en qualitĂ© de membres du Tiers Ă©tat, le premier, Ă  l'assemblĂ©e des Notables de 1787, le second Ă  celle de 1788. Arch. nat., C 1 et 'J. LEUR RÉPARTITION SOCIALE 37 Si l'AssemblĂ©e provinciale, ainsi constituĂ©e, reprĂ©sentait assez exactement les diverses rĂ©gions de la Basse-Normandie, elle Ă©tait loin d'en reprĂ©senter toutes les classes. La rĂ©partition sociale de ses membres lui donnait un caractĂšre nettement aristocratique. Le clergĂ© n'y comptait que ses plus hauts dignitaires et on y eut vainement cherchĂ© un desservant rural. La noblesse d'Ă©pĂ©e seule figurait dans le second ordre. Quant au Tiers Ă©tat, il comprenait des magistrats municipaux ou des officiers de justice ayant presque tous la noblesse de robe, de riches nĂ©gociants ou propriĂ©- taires, et pas un laboureur venu de la campagne l1. La classe des paysans Ă©tait systĂ©matiquement tenue Ă  l'Ă©cart l'AssemblĂ©e provinciale Ă©tait Ă  proprement parler une assemblĂ©e de privilĂ©- giĂ©s. Les vues de l'auteur de la lettre de 1779 sur les administrations provinciales semblaient se rĂ©aliser la noblesse et la haute bour- geosiie allaient administrer seules. Par le fait de sa composition, due Ă  son mode originel de recrutement, l'AssemblĂ©e provinciale, qui ne tenait pas ses pouvoirs de l'investiture populaire, n'allait- elle pas exciter la dĂ©fiance des populations et apparaĂźtre Ă  priori, comme une simple commission d'agents fiscaux, comme un instrument ingĂ©nieusement placĂ© entre les mains du roi pour aggraver impunĂ©ment les charges publiques ? AprĂšs avoir choisi pour secrĂ©taire-greffier Alexandre, professeur Ă  la FacultĂ© de droit, l'assemblĂ©e procĂ©da Ă  la nomination de ses deux procureurs-syndics et de sa Commission intermĂ©diaire. Les deux syndics Ă©lus furent, pour le clergĂ© et la noblesse le comte de Balleroy et, pour le Tiers Ă©tat, Le Telier de Vauville, prĂ©sident trĂ©sorier de France au bureau des finances. La Commission intermĂ©diaire comprit, outre son prĂ©sident-nĂ©, le duc de Coigny, et les deux syndics, quatre membres un du clergĂ©, l'Ă©vĂȘque de Coutances ; un de la noblesse, le comte de Yassy et deux du Tiers Ă©tat, Daigremont, lieutenant particulier au bailliage de Caen et La Lande du MĂ©nildrey 2, ancien avocat au prĂ©sidial de Cou- tances. 1 L'assertion de KarĂ©iĂ«v sur la dĂ©putation des habitants de la campagne aux AssemblĂ©es provinciales est inexacte pour la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. KarĂ©iĂ«v, La Ques- tion paysanne dans le dernier quart du XVIIIe siĂšcle, p. 114. Cf. Arch. coram., Caen, carton 20. Lettre de M. de Chazot, du 18 octobre 1788, adressant Ă  l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Caen, dont il Ă©tait membre, ses plaintes sur l'absence de reprĂ©sen- tation des campagnes Ă  l'AssemblĂ©e provinciale de Caen. 2 Ce dernier, malade, fut remplacĂ© par Hervieu de Pont-Louis, lieutenant parti- culier au bailliage de Carentan. 38 NOYAU DES ASSEMBLÉES D'ÉLECTION L'assemblĂ©e s'occupa ensuite dĂ© dĂ©signer les membres qui devaient commencer Ă  former les assemblĂ©es d'Ă©lection, convo- quĂ©es pour le mois d'octobre. 11 devait y avoir neuf assemblĂ©es dans son ressort administratif. Le roi avait dĂ©jĂ  choisi leurs prĂ©sidents, tous dans les deux premiers ordres *. L'assemblĂ©e d'Ă©lection de Caen devait comprendre 24 membres; celles des huil autres, chacune 20 membres. C'Ă©tait au total un nombre de 83 membres i '.- que l'AssemblĂ©e Ă©tait appelĂ©e Ă  choisir, parmi les listes de notabilitĂ©s locales mises sous ses yeux. En gĂ©nĂ©ral, on tira du clergĂ© les membres les plus influents par leur origine 3>, leur situation 4 ou leur culture b; la noblesse fournit des seigneurs de vieille famille, rĂ©sidant pour la plupart dans leurs terres 6 ; les dĂ©putes du Tiers Ă©tat furent pris parmi les officiers des justices royales et seigneuriales 7, les officiers municipaux des villes8', les avocats °', notaires^10 et mĂ©decins'11'. On y fit entrer Ă©galement des nĂ©gociants 12, des propriĂ©taires cultivateurs 13, 1 Noms des prĂ©sidents par Ă©lection Caen, MĂ©ry de Berthenonville, doyen du SĂ©pulcre ; Bayeux l'Ă©vĂȘque; Vire lu marquis de MĂ©nĂźlĂŻet ; Saint-LĂŽ l'abbĂ© de Chiffrevast ; Carentan le comte d'OsseviHe ; Coutances le marquis de Vassy; Valognes le comte d'Octeville ; Avranches l'Ă©vĂȘque ; M or tain le comte de Sour- de val. 2 Sur 92 membres qui devaient composer la premiĂšre moitiĂ© des assemblĂ©es d 'Ă©- lection, les 9 prĂ©sidents Ă©taient dĂ©jĂ  nommĂ©s. 3 L'abbĂ© de Cairon, conseiller au Parlement de Rouen ; l'abbĂ© de la BazonniĂšre, curĂ© de Rampan l'abbĂ© de BeaudrĂ©, chanoine ; l'abbĂ© de Cheux, curĂ© de Vaudry ; I abbĂ© de Vaulleury, curĂ© de Barentin. 4 L'abbĂ© de Pradelle, vicaire gĂ©nĂ©ral de Baveux ; Brigeat, vicaire gĂ©nĂ©ral d Avranches ; l'abbĂ© 1. Les trois autres ne comptaient 1 Sur la procĂ©dure en matiĂšre de demandes de dĂ©charge d'impĂŽts. 2 ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 18 Ă  9!. 3 Trace de l'envoi de ces instructions au premier calepin pour le dĂ©part des lettres du contrĂŽle gĂ©nĂ©ral », 1787. Arch. nat., H1 1G05. 4 Philippe Lamare, secrĂ©taire de dom Goujet, bĂ©nĂ©dictin de l'abbaye de Fonte- nay, donne, dans son MĂ©morial, des dĂ©tails assez intĂ©ressants sur cette cĂ©rĂ©monie. La musique du rĂ©giment de Vivarais s'y lit entendre. Le duc de Coigny, en man- teau court, de velours noir, ayant un panache blanc Ă  son chapeau, se plaça au bas du chƓur, Ă  la premiĂšre place Ă  droite dans les hautes stalles . L'assemblĂ©e dĂźna chez le comte de Balleioy. MĂ©morial, etc., Ă©ditĂ© par G. Vanel, p. 242-243. & Autres membres abbĂ© de Cussy, marquis de Hautefeuille, marquis du Ques- noy, de la Londe, Hervieu de Pont-Louis, LĂ©vesque et Burdelot. '»'? BUREAUX ET PROGRAMME DE L'ASSEMBLEE que huit membres ; celui des fonds et de la comptabilitĂ© fut prĂ©sidĂ© par le marquis d'IIĂ©ricy i1 ; celui de l'agriculture, com- merce et bien public, par l'Ă©vĂȘque d'Avranches ; le 4 dĂ©cembre, sur les impositions parti- culiĂšres Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ©, imposition territoriale, impĂŽt des bĂąti- ments de justice, et sur la prestation reprĂ©sentative de la cor- vĂ©e {. Le bureau du bien public, les 23 et 24 novembre, fit un long rapport sur le RĂšglement du 15 juillet 1787 et sur l'adminis- tration de la province'1. Celui des fonds et de la comptabilitĂ©, dans une des derniĂšres sĂ©ances, traita la question importante des frais qu'allait entraĂźner le nouveau rĂ©gime administratif r,>. A la suite de ces rapports, l'AssemblĂ©e provinciale Ă©mit des vƓux, Ă©labora des projets de rĂšglement, rĂ©digea des arrĂȘtĂ©s. Elle entendit aussi des mĂ©moires, Ă©manant soit de ses membres, soit de particuliers, qui vinrent utilement seconder ses travaux, et Ă©clairĂšrent plus d'une de ses dĂ©cisions. Passons rapidement en revue les uns et les autres, en les groupant sous trois principaux chefs rĂ©gime des impositions ; des travaux publics ; bien public. 1° Impositions. — Les arrĂȘtĂ©s d'ordre financier pris par l'As- semblĂ©e provinciale eurent pour objet les vingtiĂšmes, l'impĂŽt territorial, la corvĂ©e et la taille. L'augmentation des vingtiĂšmes, imposĂ©e par le roi sous forme d'abonnement perpĂ©tuel, fut, on l'a vu, acceptĂ©e de mauvais grĂ© par l'AssemblĂ©e, qui dut borner ses efforts Ă  solliciter une remise. Elle avait cĂ©dĂ© sur ce point pour ne pas exposer les contribuables Ă  des recherches et vĂ©rifi- cations inquiĂ©tantes ». Mais pour marquer sa dĂ©fiance et protester contre les taxations des contrĂŽleurs, elle dĂ©cida que la rĂ©partition de cet impĂŽt serait assise sur la division fonciĂšre des paroisses en 1756, antĂ©rieure aux vĂ©rifications gĂ©nĂ©rales dont elle contes- tait l'exactitude. L'imposition territoriale Ă©tait une charge particuliĂšre Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Gaen. Etablie en 1769 pour divers besoins locaux 6, 1 ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 220-228. 2 Ces rapports ne sont pas insĂ©rĂ©s an procĂšs-verbal. On les trouve manuscrits aux Arch. dĂ©p., Calvados, C 7618. i,3 ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 279, 281, 282-286. 4 Ibid., p. 163-189. 5 Ibid., p. 315-321. 6 LevĂ©e d'abord pour les travaux du port de Granville, puis appliquĂ©e au rem- boursement des offices supprimĂ©s du Parlement de Rouen et Ă  l'achĂšvement de la maison de force de Beaulieu ; consacrĂ©e en partie aux grandes routes depuis 1772. Arch. dĂ©p., Calvados, C 3124. PRESTATION DE LÀ CORVEE ET TAILLE C>7 elle s'Ă©levait en 1787 Ă  la somme de livres. Cette somme Ă©tait alors affectĂ©e, en partie aux travaux de redressement de l'Orne, en partie au paiement des indemnitĂ©s des terrains expro- priĂ©s pour cette entreprise ou pour le tracĂ© des grandes routes. Une imposition dite des bĂątiments de justice, taxe de livres levĂ©e depuis 1782, venait s'y adjoindre et devait servir aux rĂ©parations des auditoires et prisons de la gĂ©nĂ©ralitĂ© l. Ces deux impĂŽts Ă©taient assis au marc la livre des vingtiĂšmes. L'AssemblĂ©e provinciale rĂ©solut de ne rien changer Ă  leur assiette et garda l'ancien usage. Une protestation s'Ă©leva dans son sein Ă  propos de ce dernier impĂŽt. Les dĂ©putĂ©s de Mortain demandĂšrent que leur Ă©lection en fut affranchie, parce que le duc d'OrlĂ©ans, comte de Mortain, pourvoyait seul Ă  l'entretien des locaux de justice de sa seigneurie, et qu'elle n'Ă©tait point ainsi Ă  charge Ă  la gĂ©nĂ©- ralitĂ© Pi La prestation de la corvĂ©e Ă©tait, depuis l'intendant Fontette, substituĂ©e Ă  la corvĂ©e en nature dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ; c'Ă©tait en 1787 une taxe de livres, ajoutĂ©e au brevet gĂ©nĂ©ral de la taille. Il y avait alors conflit Ă  son sujet entre le ministĂšre et le Parlement de Rouen. Celui-ci, en enregistrant la dĂ©claration du 27 juin 1787, avait fait ses rĂ©serves et rĂ©duit le montant lĂ©gitime de cette taxe Ă  livres 3. C'Ă©tait une diffĂ©rence de livres en faveur de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. L'Assem- blĂ©e provinciale, appelĂ©e Ă  prendre parti dans la question, hĂ©sita. Elle aurait dĂ©sirĂ© payer la moins forte somme, mais elle craignit de manquer Ă  quelques convenances et de compromettre quel- ques intĂ©rĂȘts, et elle crut prudent de s'en rapporter Ă  la bienfai- sance du Roi» livres ; ruais les comptes avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s depuis plusieurs annĂ©es depuis 1782 dans l'Ă©lection le Saint-LĂŽ. ProcĂšs- verbal de Basse-Normandie, p. 123, INTENTIONS REFORMATRICES DE LASSEMBLÉE 71 propriĂ©taires Ă©taient seuls Ă  en souffrir les plus aisĂ©s et les plus influents avaient pu se faire indemniser les premiers {}, RĂ©seau routier incomplet, nombreuses voies amorcĂ©es et non terminĂ©es, propriĂ©tĂ©s Ă©ventrĂ©es, dettes criardes tout le mal fait sans aucun avantage correspondant », telle Ă©tait en matiĂšre de travaux publics, la situation lĂ©guĂ©e par l'ancienne administration Ă  l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie. Cette situation Ă©tait des plus pĂ©rilleuses, car elle laissait l'AssemblĂ©e aux prises avec deux nĂ©cessitĂ©s contradictoires d'une part, le besoin qui se faisait chaque jour plus impĂ©rieux de communications et de dĂ©bouchĂ©s nouveaux, d'autre part, l'obligation de strictes Ă©cono- mies, imposĂ©e par la pĂ©nurie des ressources, et l'impossibilitĂ© de demander davantage Ă  des impositions dĂ©jĂ  trop accablantes. Pour compliquer les difficultĂ©s, l'AssemblĂ©e provinciale, dĂšs le dĂ©but de son administration, se trouvait en prĂ©sence d'un fait accompli, d'une mesure qui lui liait les mains, paralysait son activitĂ©, annihilait ses intentions rĂ©formatrices. Peu de mois avant sa rĂ©union, en vertu d'un arrĂȘt du Conseil du 12 mars 1787, quarante-quatre baux d'entretien ou d'ouvrages neufs avaient Ă©tĂ© passĂ©s avec trente entrepreneurs, engageant des travaux jusqu'au 1er avril 1790, et une dĂ©pense de 1,911,000 livres 2. N'y avait-il pas contradiction entre les pouvoirs qu'on semblait vouloir donner Ă  l'AssemblĂ©e et l'inaction forcĂ©e oĂč ces engage- ments allaient la laisser pendant trois ans ? Devait-elle assister, impuissante, Ă  l'accroissement de la dette publique, dont on la rendrait peut-ĂȘtre responsable ? L'AssemblĂ©e provinciale prit rĂ©solument le parti que les circonstances lui imposaient, et une sĂ©rie d'arrĂȘtĂ©s rendus du 21 novembre au 5 dĂ©cembre 1787 tracĂšrent son programme d'administration en matiĂšre de travaux publics. Protestant tout d'abord contre l'inaction absolue oĂč la laisse- rait l'exĂ©cution sous ses yeux de travaux qu'elle n'aurait pas ordonnĂ©s », elle demanda Ă  l'unanimitĂ© la rĂ©siliation des quarante- quatre adjudications d'avril r3K Prenant en main la cause des 1 De nombreuses rĂ©clamations se produisirent Ă  ce sujet pendant la tenue des assemblĂ©es de dĂ©partement en 1788 Ex ;i Coutances. Arcli. dĂ©p., Calvados, C 7699 et pendant la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, en 1789; plaintes de nombreux cahiers Breuville, Equeurdreville, Martinvast, Saint-Christophe-du-Foc, Saint-Sauvcur-le- Vicomte cahier de l'assemblĂ©e prĂ©lĂ©minaire du bailliage, etc.. 2 ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 125. 3 Ibid., p. 158-162. 72 RÈGLEMENTS SUR LES ROUTES ET ATELIERS DE CHARITÉ propriĂ©taires dĂ©possĂ©dĂ©s qui, depuis plus do sept ans, attendaient ' l'effet des promesses dont on n'avait cessĂ© de les flatter, et n'a- vaient pu toucher la somme la plus modique», elle dĂ©clara surseoir Ă  toute confection nouvelle de routes, sauf extrĂȘme urgence, jusqu'Ă  l'acquittement complet d'une dette sacrĂ©e pour la province » '. Elle chargea le duc de Coigny, son prĂ©sident, de demander au Roi une forte subvention, pour n'ĂȘtre point obligĂ©e Ă  effectuer ce rachat sur les fonds de la corvĂ©e, alimentĂ©s par les seuls roturiers *. Elle accepta la contribution volontaire, offerte au nom du clergĂ© et de la noblesse, d'une somme annuelle de 50,000 livres jusqu'Ă  extinction de la dette 3. Elle rĂ©digea un RĂšglement des travaux publics en trente-six articles, calquĂ© sur celui du Berry et visant Ă  l'achĂšvement progressif et mĂ©thodique du rĂ©seau routier par l'exĂ©cution de travaux dont la mesure serait graduĂ©e sur l'Ă©chelle des ressources et des besoins de la gĂ©nĂ©ralitĂ© » 4. La vicinalitĂ© rurale fut aussi l'objet de ses prĂ©occupations. AprĂšs la lecture du remarquable mĂ©moire du comte de Montfar- ville sur le mauvais Ă©tat des chemins vicinaux ,5>, elle vota en principe la construction d'un chemin dans chaque paroisse, Ă©tabli et entretenu aux frais de toute la communautĂ© et non plus des seuls bordiers. Elle adopta un rĂšglement en vingt-sept articles sur les ateliers de charitĂ©, qui rĂ©partissait ces derniers plus Ă©quita- blement entre les neuf Ă©lections de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, neuf filles Ă©galement chĂ©ries », qui introduisait une Ă©conomie plus grande dans leur rĂ©gie, et qui devait servir de rĂšgle et de loi immuable» pour les communautĂ©s 6. L'AssemblĂ©e provinciale porta enfin son attention sur les bĂąti- ments de justice de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, auditoires et prisons. Ils mĂ©ri- taient fort peu leur nom de palais de justice. La plupart d'entre eux, vieilles tours en ruines ou logis dĂ©labrĂ©s, Ă©taient dans un Ă©tat effrayant de vĂ©tustĂ© et d'insalubritĂ©. L'imposition spĂ©ciale de 50,000 livres, levĂ©e annuellement depuis 1782 sur tous les contri- buables de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, n'avait profitĂ© qu'Ă  la ville de Caen, oĂč l'on avait fait de vastes constructions pour le Bailliage, le bureau 1 ProcĂšs-verbal de liasse-Normandie, p. -219. 2 Ibid., ibid. 3 Ibid., p. >87. 4 Ibid., p. 302-312. 5 Ibid., p. 229-235. 6 Ibid., p. 220-228. LES prisons, l'agriculture 73 des finances, les prisons civiles et criminelles T. Beaucoup de chefs-lieux judiciaires de la Basse-Normandie, Bayeux, Vire, PĂ©riers, CĂ©rences, Coutances, Saint-Sauveur-le- Vicomte, Tori- gni se plaignaient avec raison du mauvais Ă©tat des prisons, qui menaçaient ruine et qui laissaient trop souvent s'Ă©vader les dĂ©tenus 2. La plus triste de ces geĂŽles Ă©tait celle d'Avran- ches ; le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage d'Avranches, Tes- niĂšre de BrĂ©mesnil, dĂ©peignit Ă  ses collĂšgues de l'AssemblĂ©e provinciale le dĂ©labrement de cette vieille bĂątisse, taillĂ©e dans les fortifications, vĂ©ritable cloaque, oĂč Ă©taient entassĂ©s quarante prisonniers des deux sexes, foyer de toutes les maladies conta- gieuses et de toutes les lĂšpres morales. Son mĂ©moire Ă©mut vivement l'AssemblĂ©e, qui ordonna la reconstruction immĂ©- diate des bĂątiments de justice d'Avranches et affecta une somme annuelle de livres pour les rĂ©parations urgentes des autres juridictions 3. 3° Bien public. — Nombre d'objets, confondus sous cette dĂ©nomination, donnĂšrent lieu Ă  d'intĂ©ressants mĂ©moires, lus pendant les trois derniers jours de la session, et dont la plupart gisent inĂ©dits dans les cartons de la Commission intermĂ©diaire provinciale 4. Leur thĂšme gĂ©nĂ©ral Ă©tait le dĂ©veloppement Ă©cono- mique du pays, l'hygiĂšne et l'assistance publique. Les intĂ©rĂȘts de l'agriculture furent dĂ©fendus par Montfarvillc, qui demanda le dessĂšchement des marais, le dĂ©frichement des landes et terres incultes, trop longtemps abandonnĂ©es Ă  d'indi- gnes concessionnaires, spoliateurs de la rĂ©gion ^5. Pour assurer la mise en valeur rationnelle du sol, il prĂ©conisait le partage des biens communaux, aprĂšs entente entre les seigneurs et les habitants, trop souvent divisĂ©s sur la question de propriĂ©tĂ© 6. L'industrie eut aussi ses protecteurs Flaust exposa la triste 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 1296-1302, 6496, 6755, 6856. — Ces bĂątiments servent encore aujourd'hui de Palais de Justice. 2 Ibid., C 1286-1320, 6753, 6770. 3 ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 237. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7618. 5 Les plus connus de ces spĂ©culateurs en Basse-Normandie avaient Ă©tĂ© Boullon- morange, Polignac et d'Aspect. Ibid., C 4195 et suiv. 6 Les exigences croissantes de nombreux seigneurs, revendiquant la propriĂ©tĂ© exclusive des communaux et enlevant les droits d'usage aux habitants, sont attestĂ©es par les plaintes des cahiers de 1789 notamment du bailliage de Valognes et par les pĂ©titions adressĂ©es au ComitĂ© des droits fĂ©odaux pĂ©titions de Carneville, Haute- ville-sur-Mer, Agon, Bricquebec, etc.. Arch. nat, Dxiv 5. 74 LINDUSTRIE ET LE COMMERCE situation de la manufacture de draps do Vire, alors en complĂšte dĂ©cadence U» Longuet, nĂ©gociant de Gaen et membre de l' Assem- blĂ©e d'Ă©lection de Gaen, fit prĂ©senter Ă  l'AssemblĂ©e provinciale un projet sur la fabrication des toiles façon de Suisse, garats, guinĂ©es, taffetas, etc., et sur l'Ă©tablissement d'une chapellerie Ă©conomique ; il proposa l'introduction du machinisme en Nor- mandie pour lutter avantageusement contre la concurrence anglaise 'l>. Gaugain l'aĂźnĂ©, riche entrepreneur de routes, proposa de substituer la tourbe, comme nouveau combustible, au bois de chauffage, dont la Basse-Normandie s'appauvrissait de plus en plus, ou au charbon de terre, assez difficile Ă  trouver et d'impor- tation fort coĂ»teuse i{. Le commerce de la Basse-Normandie vivait surtout de l'exportation des produits agricoles et des ressources fournies par le voisinage de la mer. Faucon, nĂ©gociant d'Isigny, se plaignit de la faveur qu'on accordait aux beurres de Grournay sur le marchĂ© de Paris, au dĂ©triment des beurres frais de sa rĂ©gion qui Ă©taient cependant de meilleure qualitĂ© 4 ; il demanda l'extension du nombre des jours de fabrication du sel dans les 1 Arc h- . En raison de l'extension croissante de la besogne administra- tive, l'AssemblĂ©e demanda l'adjonction de quatre membres nou- veaux Ă  sa Commission intermĂ©diaire et proposa Ă  l'agrĂ©ment du roi les noms de l'abbĂ© de Cussy, du marquis de Hautefeuille, du maire de Bayeux, Larcher de La Londe, et du lieutenant gĂ©nĂ©ral de Vire, Flaust. Elle sollicita l'exemption de certaines charges, comme la tutelle et la curatelle, en faveur des membres de la Commission et des bureaux intermĂ©diaires, l'exemption tempo- raire de la collecte pour tous les dĂ©putĂ©s taillables des assemblĂ©es provinciale et d'Ă©lection. Enfin, la majoritĂ© de ses suffrages fut favorable Ă  la translation des sĂ©ances de la Commission intermĂ©- l ProcĂšs-verbal de Basse-Normandie, p. 241-259. 2 Ibid., p. 259-274. D'autres instructions lurent rĂ©digĂ©es dans le mĂȘme but sur la rĂ©partition des diverses impositions taille, capilation, corvĂ©e, impĂŽt territorial et des bĂątiments de justice, etc...' Ibid., p. 290. 325 Ă  340. 3 Far exemple Le Telier de Vauville, trĂ©sorier de France, nommĂ© procureur-syn- dic provincial ; Le Tuilier, procureur du roi Ă  l'Ă©lection de Coutances ; Lemon- nier, prĂ©sident de l'Ă©lection de Saint-LĂŽ ; Courtin de la GervaisiĂšre, procureur au mĂȘme siĂšge. 4 Ibid., p. 313, 314. 82 CLÔT! RE DE L'ASSEMBLÉE PROVINCIALE diaire provinciale Ă  Saint-LĂŽ, vrai centre de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. Cette motion, qui Ă©mana il des dĂ©putĂ©s du Cotentin et qui ren- contra de l'opposition chez les dĂ©putĂ©s de Caen, ne devait avoir aucun succĂšs. Elle n'en marquait pas moins le dĂ©sir de l'administration nouvelle de se sĂ©parer manifestement de l'an- cienne, lui proposant l'abandon de Caen, chef-lieu de l'inten- dance, et le choix de Saint-LĂŽ comme capitale, l'AssemblĂ©e pro- vinciale entendait affirmer ses sentiments d'indĂ©pendance absolue vis-Ă -vis de l'intendant, et la raison politique ne l'avait pas moins dĂ©terminĂ©e que la raison gĂ©ographique Ă  proposer cette mesure. Le 6 dĂ©cembre 1787, Cordier de Launay vint faire la clĂŽture de l'AssemblĂ©e avec la mĂȘme solennitĂ© qu'il l'avait ouverte. Il remit Ă  ses membres une instruction relative Ă  l'agriculture et Ă  l'Ă©co- nomie rurale et ajourna l'AssemblĂ©e Ă  une date indĂ©terminĂ©e. Elle ne devait plus se rĂ©unir. Bien que le rĂ©gime administratif nouveau Ă©tabli en Basse-Normandie par l'Ă©dit de juin 1787 ait durĂ© trois annĂ©es, jusqu'Ă  l'expiration des fonctions de la Com- mission intermĂ©diaire provinciale aoĂ»t 1790, il n'y eut d'Assem- blĂ©e provinciale ni en 1788. ni en 1789. Le discrĂ©dit oĂč Ă©tait rapi- dement tombĂ©e cette institution, le mouvement qui s'Ă©tait pro- pagĂ© partout en faveur des Etats provinciaux, la promesse du roi de rĂ©tablir ceux-ci formellement inscrite dans l'arrĂȘt du Conseil du 8 aoĂ»t 1788, la rĂ©union des notables de 1788 firent surseoir cette annĂ©e Ă  la convocation de toutes les AssemblĂ©es provinciales ]\ En 1789, l'AssemblĂ©e nationale constituante abolit, dans la nuit du 4 aoĂ»t, avec la distinction des trois ordres, les privilĂšges des provinces, leur individualitĂ© politique et dĂ©cida la crĂ©ation de nouveaux cadres administratifs on jugea inutile de convoquer des assemblĂ©es dont le ressort allait ĂȘtre dĂ©membrĂ© et dont la composition interne ne correspondait plus au nouvel Ă©tat social du pays 2. Dans sa session unique, l'AssemblĂ©e provinciale de Caen avait fait preuve d'une grande activitĂ©. Elle sembla prendre en main les intĂ©rĂȘts de la Basse-Normandie ; elle essaya de les dĂ©fendre contre l'arbitraire du pouvoir central et la rapacitĂ© du fisc ; mais sa rĂ©sistance fut molle et facilement vaincue. Elle ne manqua pas 1 Lettre de Necker Ă  l'intendant, ,no0 ; — Pontorson, bourg, 12 Ă  1500; — Vire, 6 Ă  7,000; — CondĂ©-sur-\'oireau, bourg, 3,000 environ. Arch. dĂ©p., Calvados, C 1051. 1 Notamment les Ă©dits de 1092, 1733 et 1771. 2 L'Ă©dit visait trois catĂ©gories de villes au-dessus de 4,500; 16 2,0011;! 4,500 ; au-dessous de 2,000. 3 Le nombre des Ă©chevins variait de deux Ă  six ; celui des conseillers de ville, de trois Ă  six ; ces derniers n'apparaissent pas dans toutes les villes de Basse-Nor- mandie, mais seulement Ă  Bayeux, Carentan, Sainl-Lo, Cherhourg. 4 Les notables devaient ĂȘtre, selon les trois catĂ©gories ci-dessus dĂ©signĂ©es, au nombre de quatorze, dix ou six. 5 La nouvelle forme suivie Ă  Carenlan est trĂšs avantageuse et a obviĂ© au trouble qui rĂ©gnait prĂ©cĂ©demment dans les dĂ©libĂ©rations oĂč chaque membre de la commu- nautĂ© avait le droit d'opiner. » Observations du bureau municipal de Carenlan au subdĂ©lĂ©guc de La Hogue, 1778. Arch. dĂ©p., Calvados, C 1156. — A Cherbourg, il semble nĂ©cessaire, dĂšs 1717, de ne plus convoquer Ă  l'avenir la gĂ©nĂ©raĂŻĂźtĂ© >U^ bourgeois, qui occasionne le plus souvent de la confusion dans les dĂ©libĂ©rations, et d'Ă©lire douze bourgeois les plus capables de traiter les affaires avec les officiers municipaux ». Arch. comm., Cherbourg, BB 2. 88 LEDIT DE 1771. SON INSUCCÈS exerçant des arts libĂ©raux, les artisans et les laboureurs » W. Les premiĂšres classes, quoique comprenant la moindre partie de la population urbaine, comptaient le plus grand nombre de dĂ©putĂ©s, ce qui donnai l aux assemblĂ©es de ces villes une consti- tution nettement aristocratique '' . Si l'Ă©dit de 1766 eĂ»t Ă©tĂ© appliquĂ© partout Ă  la lettre, il aurait uniformisĂ© l'organisation municipale des villes de Basse-Nor- mandie. Mais son exĂ©cution ne fut ni prompte, ni rigoureuse. Sur les rĂ©clamations de ses officiers municipaux, des officiers de justice qui y rĂ©sidaient, de ses diffĂ©rents corps de citoyens, plus d'une ville obtint, avec l'avis favorable des intendants, en raison de circonstances particuliĂšres », son rĂšglement particulier. C'est ainsi que des lettres patentes de novembre 1769 donnĂšrent Ă  Caen une organisation spĂ©ciale, avec 28 notables Ă©lus par les 12 paroisses 3. Coutances en eut 25, et demanda leur rĂ©duction Ă  12 pour favoriser leurs dĂ©libĂ©rations » 4. L'Ă©dit fiscal de 1771, qui suspendit le rĂ©gime Ă©lectif et rĂ©tablit en titre d'office les charges municipales, ne fit que compliquer la situation. Pour augmenter la recette, Terray avait dĂ©signĂ© 21 villes et bourgs de l'intendance de Caen comme susceptibles d'ĂȘtre pourvus d'offices municipaux l5 . Mais la plupart de ces villes Ă©taient obĂ©rĂ©es et sans ressources. Vainement Terray rĂ©duisit-il aux deux tiers la finance Ă  payer et menaça-t-il celles qui Ă©taient 1 Corps de*- villes nommant des dĂ©putĂ©s notables. — A Àvranches, six corps clergĂ© 1 dĂ©putĂ©; nobles cl militaires 1 ; bailliage 1 officiers des autres justices, avocats, mĂ©decin-, et bourgeois vivant noblement 1 nĂ©gociants, notaires, procu- reurs, chirurgiens, arts libĂ©raux 1 ; artisans 1. \rch. dĂ©p., Calvados, C 1064. Coutances, dix corps clergĂ© 1 ; noblesse 4 ; bailliage et prĂ©sidial f4 Ă©lection fl; amirautĂ© 1 ; avocats 2 ; procureurs 1 bourgeois vivant noblement 4 ; mar- chand- 2 ; artisans 1 . Ibid., C 1170. - Saint-LĂŽ, huit corps clergĂ© 1 nobles et militaires 2 bailliage il Ă©lection I avocats mĂ©decins, bourgeois vivant noble- ment 2^ ; notaires, procureurs 1 ; nĂ©gociants en gros, marchands, chirurgiens, arts libĂ©raux 2; artisan- el laboureurs 2. Ibid., C 1230. Cherbourg, sept corps clergĂ© 1; noblesse 1 ; magistrature 1 ; avocats, mĂ©decins et gens vivant noble- ment 2 nĂ©gociants en gros et marchands 3 chirurgiens, notaires, greffiers et arts libĂ©raux 1 laboureurs et artisans H , Vrch. comm., Cherbourg, BH r>. i2i Exemples . \ Sainl LĂŽ, sur douze notables, huit sonl pris parmi le clergĂ©, les nobles et les gens vivant noblement, quatre parmi les marchands el les laboureurs. — A Avranches. sur six notables, un seul artisan. ! \ivh. dĂ©p., Calvados, , Ă  Cherbourg en 1777 3>, Ă  Valognes en 1779 4 , Ă  Caen en 1780 5 ; mais en certains endroits, la rĂ©sistance se prolongea ; et Ă  Coutances, en 1787, les officiers municipaux Ă©taient encore nommĂ©s par commission royale e . Plus d'une ville obtint, soit aprĂšs le rachat de ses offices, soit dans l'attente de ce rachat, un nouveau rĂšglement, d'ailleurs provi- soire. Valognes avait eu le sien en 1777 ,7', Ă  l'instar d'un rĂšglertient prĂ©cĂ©demment accordĂ© Ă  Bayeux ; ce fut le tour de Cherbourg en 1778 ', d'Avranches en 1779 0, de Saint-LĂŽ en 1780 do». Caen rentra en possession des statuts que les lettres-patentes de novembre 1769 lui avaient octroyĂ©s Ul. L'intendant Cordier de Launay, songeait Ă  rĂ©gulariser, au mois de mai 1787, l'adminis- tration municipale de Coutances 1?. Ces divers rĂšglements, si l'on excepte celui de Caen, s'Ă©cartaient assez sensiblement de l'esprit qui avait inspirĂ© la lĂ©gislation de 1766. Ils lui Ă©taient infidĂšles sur deux points principaux la composition du collĂšge Ă©lectoral et son mode d'Ă©lection. D'une part, plus d'une ville dont la popu- lation dĂ©passait ou mĂȘme habitants, et Ă  laquelle les articles 27 et 52 de l'Ă©dit de 1766 attribuaient 14 ou tout au moins 10 notables, vit son chiffre rĂ©duit Ă  6, ce qui ravalait son importance Ă  celle d'une des petites bourgades prĂ©vues Ă  l'article 1 Lettre de Turgot du 29 fĂ©vrier 1776. Arch. dĂ©p., Calvados, C 1050. 2 ArrĂȘt du Conseil du 4 aoĂ»t 1775. Ibid., C 1184. 3 Pour 3,000 livres. ArrĂȘt du Conseil du 20 dĂ©cembre 1776. Ibid., C 1241 et Arch. comm. Cherbourg, A A 50, 51. 4 Pour 2,000 livres. Arch. dĂ©p., Calvados, C L255. 5 Pour 12,000 livres. ArrĂȘt du Conseil du 25 juillet 1780. Ibid., C 1092, 1093. 6 Ibid., C 1173. Il en Ă©tait de mĂȘme ;> Vire, si l'on en croit une lettre de Mauduit, maire de cette ville, datĂ©e lu 9 septembre 1789. Ibid., C 2688. 7 21 juin 1-/77. Ibid., C 1254. Pour Bayeux, 18 avril 1777. Ibid., C 1434. 8 Ibid., C 1241, et Arch. comm., Cherbourg, AA 42. 9 Arch. dĂ©p., Calvados, C 1064 et 7649. 10 Ibid., C 1230. 11! Ibid., C 1095. 12 Ibid., C 1173. 90 RESTRICTION DES LIBERTÉS MUNICIPALES 55 du mĂȘme Ă©dit'1-1. Cette diminution de l'effectif du Conseil gĂ©nĂ©ral faisait crier Ă  l'insuffisance de la reprĂ©sentation urbaine W, et privait certains corps de l'exercice de droits dont on les avait tout d'abord investis {. D'autre part, le principe Ă©lectif lui-mĂȘme avait Ă©tĂ© singuliĂšrement entamĂ© par le rĂ©trĂ©cissement de son champ d'application. Pouvait-on appeler libres Ă©lections » cet ensemble d'opĂ©rations qui, semblant tourner clans un cercle vicieux, permettaient aux officiers municipaux, membres du bureau exĂ©cutif de l'HĂŽtel de Ville, de se faire Ă©lire par les notables, leurs collĂšgues du Conseil gĂ©nĂ©ral, c'est-Ă -dire par ceux- lĂ  mĂȘme qu'ils avaient auparavant choisis et soigneusement triĂ©s dans un nombre de corporations dĂ©jĂ  strictement dĂ©terminĂ©es ? Un tel mode de cooptation entre amis, dans le huis-clos propice aux combinaisons et Ă  l'intrigue, n'Ă©tait qu'une parodie du rĂ©gime Ă©lectoral, et la royautĂ© ne pouvait croire que le Tiers Ă©tat urbain en fĂ»t la dupe. Mais elle poussait si loin le mĂ©pris des libertĂ©s municipales, qu'elle aggrava mĂȘme, dans la pratique, la situation humiliĂ©e et amoindrie qu'elle avait imposĂ©e aux villes. AprĂšs s'ĂȘtre rĂ©servĂ©, pour la premiĂšre fois, le choix des officiers municipaux, elle les confirma, par brevet, dans l'exercice de leurs fonctions, Ă  l'expiration des dĂ©lais fixĂ©s par les rĂšgle- ments li, nĂ©gligeant ainsi de recourir, en dĂ©pit des sollicitations rĂ©itĂ©rĂ©es dont elle Ă©tait l'objet, au simulacre d'Ă©lection que ceux-ci autorisaient. A la veille de la RĂ©volution, la vie municipale prĂ©sentait, 1 Par exemple, Valognes, Cherbourg, Avranclies. 2 On ne trouve pas Ă  Valognes, Ă©crivaient le 12 avril 1788 les officiers du bail- liage, un nombre de notables suffisant pour reprĂ©senter une commune si nom- breuse ». Arch. dĂ©p., Calvados, 0507. 3 La rĂ©duction Ă  six notables, au lieu de quatorze ou dix, empĂȘchait parfois la reprĂ©sentation spĂ©ciale des chapitres, prĂ©vue Ă  l'article 30 de ledit de 1766 voir pleintes du chapitre d'Avranches, Ibid., C 1061 ; mais, le plus souvent, elle s'effec- tuait aux dĂ©pens des derniers corps urbains, nĂ©gociants, arts libĂ©raux et artisans, c'est-Ă -dire au dĂ©triment du vĂ©ritable Tiers Ă©tat urbain. 4 A Saint-LĂŽ, sur la proposition de l'intendant de Caen, le roi, Ă©cartant les trois candidatures qui lui Ă©taient soumises en 1781, date du renouvellement de la mairie, prorogea pour quatre ans les fonctions de M. de Bacilly. La situation actuelle durera toute seule, avait Ă©crit le subdĂ©lĂ©guĂ© ; personne ne rompra le silence. » Arch. dĂ©p., Calvados, C 1230. — La prorogation des pouvoirs du comte de Van- dƓuvre, maire de Caen, et du premier Ă©chevin, le comte de Faudoas, par brevet royal du 15 juin 1781, ne laissa pas de soulever des difficultĂ©s. Ibid., C 1095. — Le maintien Ă  la mairie de Valognes d'un homme entreprenant » qui avait substituĂ© Ă  des lois de profonde sagesse un rĂ©gime inconstitutionnel » il s'agit du marquis de Colleville, causa un vif mĂ©contentement qui se traduisit, en 1789, par un vaste pĂ©ti- tionnement en faveur du rĂ©tablissement du rĂ©gime Ă©lectif. Ibid., C 6507. l'oligarchie dans les villes 91 ainsi qu'on vient de le voir, dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, des aspects assez variĂ©s. L'Ă©tude approfondie du rĂ©gime intĂ©rieur de chacun de ces groupements urbains rĂ©vĂ©lerait des diffĂ©rences assez notables. Ces diffĂ©rences n'Ă©taient que superficielles, et le fond Ă©tait partout le mĂȘme, Ă©crit Tocqueville. » l Il y a lĂ  une exagĂ©ration Ă©vidente, dont un historien contemporain a fait justice 2. Toutefois on s'explique que Tocqueville ait pu croire Ă  l'homogĂ©nĂ©itĂ© du rĂ©gime municipal cachĂ©e sous une diversitĂ© trompeuse », parce qu'il y rencontrait partout deux traits dominants une administration oligarchique et une tutelle administrative assez Ă©troite. D'une part, en effet, la direction des affaires communales Ă©tait abandonnĂ©e, non pas aux reprĂ©sentants de tous les habi- tants, mais aux dĂ©putĂ©s des corps, aux Ă©lus de la noblesse et de la bourgeoisie. Le principe de l'Ă©lection n'Ă©tait qu'une belle façade, derriĂšre laquelle se dissimulait une vĂ©ritable oligarchie ayant pour cortĂšge inĂ©vitable le nĂ©potisme et toute une sĂ©rie d'abus »3-'. A Caen, par exemple, le maire VendƓuvre et l'Ă©chevin Faudoas avaient, de 1781 Ă  1787, gouvernĂ© la ville en tyrans. On leur reprochait l'oubli des formes, le mĂ©pris des droits des habitants, la prodigalitĂ© dans les dĂ©penses, la nĂ©gligence dans la convocation des notables, auxquels pendant une pĂ©riode de trois annĂ©es, les officiers municipaux n'avaient pas une fois rendu compte de l'Ă©tat des affaires de la communautĂ©, ni de l'emploi de ses deniers » 4. D'autre part, pour protĂ©ger les villes contre les suites nĂ©fastes d'une telle administration, le pouvoir central intervenait de plus en plus dans la gestion de leurs affaires, et sous le prĂ©texte d'une tutelle consciencieuse de leurs intĂ©rĂȘts, tendait Ă  leur enlever les derniers restes de leur ancienne autonomie. Ce n'Ă©tait pas seulement la prĂ©sence du juge royal, prĂ©sidant les sĂ©ances de l'hĂŽtel de ville, qui attestait l'autoritĂ© du roi, c'Ă©tait surtout l'action continuelle de l'intendant qui rappelait Ă  chaque instant aux villes leur qualitĂ© de mineures. Le maire que le roi leur 1 A. de Tocqueville, L'Ancien rĂ©gime et la RĂ©volution, p. 68. 2 Ardascheff, Pvovintsialnaia administratsia, t. I, chap. VIII Ă©dition russe, p. 498 et suivantes. 3 Ibid., t. I, p. 544. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 1095. Le 23 fĂ©vrier 1782, MeslĂ©, subdĂ©leguĂ© d'Avran- ches, Ă©crit Ă  l'intendant que le maire Lesourd. nommĂ© par le roi lors du RĂšglement municipal du 4 juillet 1779, a complĂštement nĂ©gligĂ© les intĂ©rĂȘts de la ville, et que de longtemps aucun compte n'a Ă©tĂ© rendu. Ibid., C 1064. 92 LA TUTELLE ADMINISTRATIVE DES VILLES donnait n'Ă©tait-il pas le candidat favori de l'intendant, parfois en dĂ©pit de leurs propositions? . '. Cette exclusion presque complĂšte des citoyens lu Tiers Ă©tat de la vie munici- pale, qui Ă©tait une rĂšgle presque gĂ©nĂ©rale pour les villes de Basse-Normandie, a dĂ» contribuer Ă  renforcer la part prise par le peuple des villes au mouvement rĂ©volu- tionnaire de juillet 1789. COMMUNAUTÉS ET PAROISSES RURALES 93 administrative identique, sanctionnĂ©e par la loi des 14-18 dĂ©- cembre 1789, unifia le rĂ©gime municipal de la France. Abstraction faite de ces quelques villes, on peut dire que la presque totalitĂ© des communautĂ©s d'habitants de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, formĂ©es surtout de paroisses rurales, Ă©tait dĂ©pourvue en 1787 d'institutions municipales nettement rĂ©glĂ©es. Leur administration Ă©tait des plus simples ; autonome et plus, dĂ©mo- cratique que celle des villes, elle Ă©tait exercĂ©e, sans le concours d'aucune assemblĂ©e reprĂ©sentative, par l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des habitants. Nous possĂ©dons, pour la Basse-Normandie, un assez grand nombre de registres contenant les dĂ©libĂ©rations prises par ces assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales, au cours des XVIIe et XVIIIe siĂšcles, ce qui nous permet de caractĂ©riser avec exactitude le rĂ©gime municipal de ces communautĂ©s rurales h. Un trait essentiel de ce rĂ©gime, c'est l'union Ă©troite, souvent mĂȘme la fusion complĂšte de la communautĂ© » et de la pa- roisse ». Les mĂȘmes habitants rĂ©unis dans les mĂȘmes assemblĂ©es s'occupent des intĂ©rĂȘts de la paroisse et de la communautĂ©. Au XVIIe siĂšcle la confusion est absolue le titre de certains registres paroissiaux le prouve irrĂ©futablement "2 '. Ces assemblĂ©es se tien- nent soit au porche de l'Ă©glise, dans le parvis, ou dans le cimetiĂšre, soit encore dans la sacristie, quand la saison est rigoureuse ; elles ont lieu d'ordinaire un dimanche, Ă  l'issue de la messe ou des vĂȘpres, Ă  l'heure oĂč se trouvent rĂ©unis les paysans venus de leurs 1 Entre autres documents, j'ai surtout utilisĂ© les registres conservĂ©s aux archives des communes de 1 arrondissement de Caen, et dont M. BĂšnet a fait un inventaire dĂ©taillĂ©. SĂ©rie E supplĂ©ment, tomes 1 et 11. [2 Ces registres s'appellent ordinairement Registres des certificats et audien- ces ». Arch. comin., BeliengrevĂźlle, BB1. - Registres des sertificaz et autres affĂšres publiques de la paroisse. » Ibid., Hubertfolie BB'.j — Celui du Rosel est intitulĂ© Livre des attestations et rĂ©fĂ©rĂ©s de publications et proclamations pour les affaires royales et des tailles. » Ibid., Le Rosel, BB1. — A Secqueville-cn-Bessin, il y a un Registre des baptĂȘmes, mariages, inhumations, certificats, procurations, Ă©lections de la taille et autres affaires dĂ©pendant de l'Eglise ». Ibid., Secqueville-en- Bes-in, GG3. — Le registre qui me parait prouver le mieux cette confusion, est celui de Cairon a Registre commun de la paroisse de Cairon, contenant les certifi- cats faits et passĂ©s devant les curĂ©s dudit lieu, issue de la messe paroissiale, tou- chant les affaires et bien commun de la paroisse... tant Ă  l'Ă©gard de la collection des deniers -qui furent appliquĂ©s Ă  la nourriture des pauvres des Buissons et du Cairon, en la chertĂ© et disette des blĂ©s, par arrĂȘt du Parlement de la province, que tou- chant lĂ©lection des trĂ©soriers qui ont administrĂ© le revenu du TrĂ©sor de Cairon, ainsi que l'Ă©lection du capitaine de la cĂŽte pour Cairon, les bannies du fouage et guet commun de la dite paroisse, de l'herbage du cimetiĂšre, rĂ©parations de l'Ă©glise paroissiale et du presbytĂšre et autres charges de la communautĂ©. » Ibid., Cairon, BB1. \H CONFUSION ORIGINELLE ET SÉPARATION PROGRESSIF fermes ou de leurs hameaux Ă©cartĂ©s. Les questions les plus diverses s'y traitent nomination des collecteurs des tailles, enrĂŽ- lements et dĂ©rĂŽlements pour la taille, Ă©lections de syndics, de collecteurs du sel ; Ă©quipement d'un milicien ou Ă©lection d'un capitaine du guet ; partage des communaux et bruyĂšres, rĂšgle- ment sur les marais, bail d'une carriĂšre ; nomination de messiers, de procureurs pour soutenir un procĂšs au nom de la commu- nautĂ© ; rĂšglement des dĂ©penses communales, rĂ©parations ou constructions d'Ă©glises et de presbytĂšres, adjudication des pommes du cimetiĂšre, du fouage ; bannie des terres de la fabrique, examen des comptes de fabrique, nomination du custos, du trĂ©sorier ou marguillier, de la commission de charitĂ© pour la rĂ©par- tition du pain de PĂąques, etc.. W. Au XVIIIe siĂšcle, cependant, paroisse et communautĂ© tendent Ă  se dĂ©gager l'une de l'autre. Une sorte de dĂ©marcation semble se tracer entre leurs attributions et leurs agents. La paroisse a son trĂ©sorier, la communautĂ© son syndic. Quoique composĂ©es des mĂȘmes membres, les assemblĂ©es sont, Ă  des dates diverses Pf plus particuliĂšrement paroissiales ou communales, et pour- suivent des buts divers les premiĂšres, convoquĂ©es par le mar- guillier au banc d'Ɠuvre, s'occupent des affaires de l'Ă©glise, des revenus de la fabrique, du custos, du maĂźtre d'Ă©cole ; les secondes, convoquĂ©es par le syndic, sont consacrĂ©es Ă  la police et Ă  l'admi- nistration de la communautĂ©, Ă  la gestion de ses intĂ©rĂȘts, et aussi Ă  l'exĂ©cution de ses obligations envers l'Etat. Sous ce dernier point de vue, le syndic prend un aspect nouveau il n'est plus seulement l'organe exĂ©cutif de l'assemblĂ©e communale, mais aussi le dĂ©lĂ©guĂ© du subdĂ©lĂ©guĂ© de l'intendant, et le dernier agent de l'administration provinciale. Cette forme de la tutelle admi- nistrative contribue Ă  Ă©largir le fossĂ© entre la paroisse et la communautĂ©. LĂ©galement, la distinction est faite par les juris- consultes 3 ; en plus d'un endroit, elle saute aux yeux par suite de la juxtaposition de deux communautĂ©s dans une paroisse ou de deux paroisses dans une communautĂ© * ; parfois enfin 1 A. BĂ©net, Inventaire imprimĂ©, sĂ©rie E supplĂ©ment, tomes I et II passim 2 D'une façon gĂ©nĂ©rale, on voil les assemblĂ©es nommer les trĂ©soriers vers PĂąques, les collecteurs de la taille en octobre, les syndics en dĂ©cembre. 3 FrĂ©minville consacre un traitĂ© spĂ©cial aux communautĂ©s, et Jousse aux paroisses. La mĂȘme distinction est faite par Guyot et par Merlin. 4 Les paroisses de Cairon, de Douvres, d'Ifs, de Langrune, de Saint-Denis-le- Gast, de Truttemer, de BeauchĂšne renfermaient ebacune deux communautĂ©s ; dans les villes, l'ensemble de la communautĂ© Ă©tait rĂ©parti entre un nombre de paroisses plus ou moins considĂ©rable 12 paroisses Ăč Caen, par exemple. DOUBLE PORTÉE DE l'ÉDIT DE 1787 95 deux registres distincts de dĂ©libĂ©rations trahissent cette diver- sitĂ© i. Toutefois, la sĂ©paration n'est pas complĂšte. L'Ă©glise est restĂ©e le centre de la vie communale, la maison commune ; les assemblĂ©es se rĂ©unissent Ă  sa porte ou dans son enceinte ; elle renferme le coffre de chĂȘne oĂč l'on dĂ©pose les archives locales. Le curĂ© est officier de F Ă©tat-civil ; il lit toujours au prĂŽne les ordonnances et les mandements dont le texte est ensuite affichĂ© Ă  la porte de l'Ă©glise. L'Ă©dit de 1787 devait assez profondĂ©ment modifier la vie municipale des campagnes. Sa portĂ©e allait ĂȘtre double. D'une part, il allait substituer le systĂšme reprĂ©sentatif Ă  celui des assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales d'habitants, en Ă©tablissant une municipalitĂ© dans chaque communautĂ© ; d'autre part, il devait hĂąter la sĂ©cula- risation de cette administration municipale en consacrant l'exis- tence distincte des bourgs et villages en tant que circonscriptions civiles, calquĂ©es sur les divisions religieuses, mais indĂ©pendantes d'elles. Pour comprendre la rĂ©forme municipale de 1787, il faut la ratta- cher Ă  la grande rĂ©forme administrative dont elle n'est que le corollaire. La communautĂ© Ă©tait le troisiĂšme et dernier Ă©chelon de la hiĂ©rarchie administrative nouvelle ; elle venait aprĂšs la pro- vince », aprĂšs l'Ă©lection ou dĂ©partement 2. Aux AssemblĂ©es pro- vinciales et d'Ă©lection, en vertu d'un systĂšme reprĂ©sentatif uniformĂ©ment appliquĂ©, devaient correspondre, au degrĂ© infĂ©rieur de l'Ă©chelle administrative, des assemblĂ©es municipales, dĂ©lĂ©ga- tion de la communautĂ©. Cette substitution d'assemblĂ©es res- treintes aux anciennes assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales ne causa pas une aussi vive surprise qu'on pourrait le croire. Si, en Basse-Nor- mandie, l'intendant n'avait pas, comme son confrĂšre de Cham- pagne, systĂ©matiquement rĂ©duit les assemblĂ©es des communautĂ©s Ă  une minoritĂ© d'habitants 3>, cette rĂ©duction n'avait pas moins dĂ» s'opĂ©rer en fait dans beaucoup de villages ; dans ce pays de propriĂ©tĂ©s divisĂ©es et de mesnils Ă©pars, plus d'un paysan man- quait aux rĂ©unions 4. Un rĂ©cent arrĂȘt du Parlement de Rouen, 1 Exemple Ă  Amblie Affaires de la communautĂ© d'Amblie Ă  partir de 1778 » Arch. coinm., Amblie, BB1, et DĂ©libĂ©rations touchant la fabrique de la paroisse d'Amblie Ă  partir de 1776 ».Ibid., BB2. 2 L'arrondissement, circonscription Ă©lectorale, n'avait pas reçu d'organisation administrative distincte. 3 Voir Ardascheff, Provintsialnaia administratsia, tome I, p. 512, note 3. 4 Arch. commv Gavrus, BB 1. 96 LES \SSEMBLÉES PAROISSIALES ET MUNICIPALES portant rĂšglement sur ces assemblĂ©es, avait, en 1784, restreint aux propriĂ©taires notables seuls le droit d'y assister l. Une conception vraiment dĂ©mocratique du rĂ©gime municipal n'exis- tait donc dĂ©jĂ  plus dans l'intendance de Gaen lorsqu'y furent publiĂ©s l'Ă©dit de juin 1787 et le RĂšglement du 15 juillet qui l'interprĂ©tait. Ce RĂšglement Ă©tablissait dans chaque communautĂ© rurale deux sortes d'assemblĂ©es une assemblĂ©e paroissiale, survivance de l'ancienne assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, ma;s qui, au lieu de com- prendre comme autrefois tous les habitants, Ă©tait restreinte aux taillables payant au moins 10 livres d'imposition fonciĂšre ou personnelle ; une assemblĂ©e municipale, composĂ©e de trois, six ou neuf dĂ©putĂ©s Ă©lus, selon le nombre des feux, et comprenant en outre un syndic Ă©galement Ă©lu, et deux membres de droit, le seigneur et le curĂ© ; pour faire partie de cette assemblĂ©e, il fallait avoir vingt-cinq ans, un an de domicile et payer au moins 30 livres d'impĂŽts. Une instruction envoyĂ©e par le ministre Villedeuil aux assem- blĂ©es paroissiales, en vue des Ă©lections, leur recommandait de choisir de prĂ©fĂ©rence leurs dĂ©putĂ©s parmi les habitants capables de lire et d'Ă©crire -J. La prĂ©sidence de ces rĂ©unions Ă©lectorales Ă©tait partout dĂ©volue au syndic de la paroisse. Muni des renseignements que ses subdĂ©lĂ©guĂ©s lui avaient fournis sur le nombre de feux et consĂ©quemment de dĂ©putĂ©s Ă  Ă©lire par chaque paroisse, l'intendant de Launay rendit le 5 sep- tembre une ordonnance qui ouvrait la pĂ©riode Ă©lectorale 3 . Les Ă©lections eurent lieu partout au mois d'octobre. L'ordre et le calme y rĂ©gnĂšrent en gĂ©nĂ©ral. Elles donnĂšrent lieu toutefois Ă  une sĂ©rie d'incidents, ce qui Ă©tait inĂ©vitable en prĂ©sence d'un mouvement Ă©lectoral aussi important, vu la nouveautĂ© de l'opĂ©- ration, l'inexpĂ©rience et l'ignorance de la plupart des syndics paroissiaux l4 >. D'assez nombreuses irrĂ©gularitĂ©s furent com- 1 ArrĂȘt du Parlement de Rouen, portant rĂšglement ]>our les assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales des j>aroisses tant dans les villes que dans les campagnes, et dĂ©signant les j>ersonnes qui g seront admises. 1784, Caeu, imp. Le Roy, 4 p. in-4°. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6462. — A Tourville Ă©lection de Caen, on voit convoquer spĂ©cialement les propriĂ©- taires notable^ par billets, Ă  mu- assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du la paroisse. Arch. conim., Tourville, BBb. 2 Instruction du 11 aoĂ»t 1787. Arch dĂ©p., Calvados, CiJ.'Ul. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6344. l La majeure partie des syndics sont d'une ignorance crasse, et il faudrait en la plupart des paroisses un guide pour les faire comprendre et exĂ©cuter cette besogne. » Lettre du subdĂ©lĂ©guĂ© de Mortain Ăč l'intendant, du 22septembre 1787. Ibid. IRRÉGULARITÉS DANS LES ÉLECTIONS MUNICIPALES 97 mises. A Auvers, Cats, Saint-Pellerin, deux frĂšres furent illĂ©gale- ment nommĂ©s membres de l'assemblĂ©e municipale ; Brevands et Saint Georges de Brohon eurent pour syndics municipaux, l'un le frĂšre, l'autre le gendre d'un dĂ©putĂ© municipal ; Ă  Vaudry, ce fut le frĂšre du curĂ© qui devint syndic ; Ă  FerriĂšres, un noble, neveu du seigneur autant de cas d'annulation ] . En d'autres endroits, Ă  Vierville, Ă  Cauquigny, au Buisson, le syndic Ă©lu Ă©tait en mĂȘme temps membre de l'assemblĂ©e munici- pale, ce qui rendait cette derniĂšre incomplĂšte ; Ă  Saint-Sympho- rien, on avait nommĂ© deux syndics, et l'un d'eux devait ĂȘtre Ă©liminĂ© 'lL Parfois encore, on dut Ă©lire, par insuffisance d'autres candidats, des dĂ©putĂ©s qui ne payaient pas le taux d'imposition rĂ©glementaire, comme Ă  Beuzeville-au-Plain, Saint-Aubin-du- Perron, Saint-Christophe d'Aubigny, Doville, Sainte-Suzanne t3. Au Mesnil-FrĂ©mentel, pas un taillable ne rĂ©unissait les conditions voulues pour faire partie de la municipalitĂ© W, A Ducy-Sainte- Marguerite, l'assemblĂ©e Ă©lectorale ne rĂ©unit que cinq personnes -V. A Fierville-en-Bessin, village de 16 feux, elle ne compta que quatre comparants; il y avait moins d'Ă©lecteurs que de places Ă  pourvoir G . Dans d'autres communautĂ©s, les Ă©lections nom- maient plus de dĂ©putĂ©s que de droit, et une rĂ©duction de la municipalitĂ© Ă©tait inĂ©vitable ' . Une autre cause de difficultĂ©s fut la coexistence, dans la mĂȘme paroisse, de communautĂ©s qui, tout en ayant dĂ©jĂ  leur collecte sĂ©parĂ©e, Ă©taient trop petites pour constituer autant de munici- palitĂ©s distinctes ce fut le cas des Buissons, de la Mare, de Bras, de Tailleville, hameaux de Cairon, de Douvres, d'Ifs et de Lan- grune Hl Les mĂȘmes difficultĂ©s sĂ©paraient Isigny de ses hameaux, Gavray bourg de Gavray village, le grand Truttemer du petit Truttemer, Saint-Denis-le-Gast d'Orbeville, GhĂ©rencĂ©-le-HĂ©ron 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7697, 7710, 7621. Au Fresne-Poret, beau-pĂšre et gendre sont Ă©lus dĂ©putĂ©s municipaux. Ibid., C 7707. 2 Ibid., C 7697. 3 Ibid., C7697. 4 Ibid., C 7680. A Fresnay-le-Crotteur, une assemblĂ©e paroissiale de trois Ă©lec- teurs nomma deux dĂ©putĂ©s municipaux, seuls cotisĂ©s Ă  une somme dĂ©passant 30 liv. Ibid., C 7681. 5 Ibid., C 7681. 6 Dans cette communautĂ©, le syndic paroissial n'avait assemblĂ© que quelques mendiants sans fonds d'exploitation et avait Ă©cartĂ© les propriĂ©taires ». Ibid., C 7670. 7 A Fontaine-Eloupefour par exemple, oĂč la communautĂ© ayant moins de cent feux, avait nommĂ© six dĂ©putĂ©s municipaux. Ibid., C 7681. 8 Ibid., C7664, 7670. 7 VJO INTRIGUES ET de Saint-Martin-le-Bouillant, BeauchĂȘne des Guitons Ibid., C 7729. 6 Ibid., C 7723, 6344. RETAHDS DANS FA FORMATION DES MUNICIPALITÉS RURALES 99 et ses dĂ©biteurs, et fit passer la liste des Ă©lus per domos » oĂč on signa sans oser contredire » ,l. A Coudevilie, ce fut une femme qui dirigea les Ă©lections Jacqueline-Perrette Le Chevalier. Elle se prĂ©senta hardiment Ă  l'assemblĂ©e des paysans qui se tenait dans le cimetiĂšre, et Ă  force d'insistance, les emmena chez elle oĂč elle 'dĂ©signa elle-mĂȘme les dĂ©putĂ©s municipaux *, Il arriva, mais le cas a dĂ» ĂȘtre exceptionnel, que l'assemblĂ©e paroissiale refusa de se rĂ©unir, comme Ă  Brectouville W. Pour toutes ces raisons, l'organisation dĂ©finitive des munici- palitĂ©s rurales subit un certain retard, prĂ©judiciable Ă  la bonne marche de l'administration provinciale. Les assemblĂ©es d'Ă©lec- tion, Ă  qui le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral avait confiĂ© le soin de dresser l'Ă©tat de ces municipalitĂ©s pendant leur session d'octobre, n'eu- rent Ă  leur disposition qu'un nombre par trop insuffisant de procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es paroissiales et dĂ©lĂ©guĂšrent leur tĂąche aux bureaux intermĂ©diaires. L'hostilitĂ© des syndics parois- siaux et des subdĂ©lĂ©guĂ©s, qui, forts de l'appui de l'intendant, gardĂšrent assez longtemps les expĂ©ditions de ces procĂšs-verbaux, vint encore reculer l'Ă©poque du dĂ©pouillement 4. A la fin de janvier 1788, le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral se plaignait Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale de la lenteur de cette opĂ©ration. Il est indispensable, Ă©crivait-il, de fixer sur cet objet essentiel toute l'attention des bureaux intermĂ©diaires en leur envoyant copie de ma lettre. Il faut employer tous les moyens lettres aux seigneurs, aux curĂ©s, aux particuliers faisant encore les l; Arcli. dĂ©p.. Calvados. C 7781. RĂ©clamation de Vincent, sieur du LongprĂ©, paroissien de Saint-Pierre-Lauger dĂ©cembre 1787. 2 Ibid., C 7701. 3 Ibid., C 6344. A Saint-Pierre-Oursin, oĂč deux ou trois petits fermiers exploitaient ‱ les parcelles conquises sur le marais des Terriers, on ne put former rassemblĂ©e municipale. Ibid., C 7683. Lettre du curĂ© de Saint-Pierre-Oursin au procureur-syndic du dĂ©parlement de Caen, 21 fĂ©vrier 1788. H en fut de mĂȘme Ă  Alliis. prĂ©s Caen, oĂč il n'y avait qu'une maison, occupĂ©e par un fermier des Ursulines de Caen. Ibid., C 7670. ,4 Ibid., C 6341. L'intendant avail reçu, le 11 aoĂ»t 1787, l'ordre d'envoyer dans chaque paroisse trois exemplaires du modĂšle de procĂšs-verbal Ă  dresser, l'un, dcvanl servir d'original, pour le greffe de la subdĂ©lĂ©gation, et les deux autres, d'expĂ©di- tions, pour l'ancien et le nouveau syndic. Les assemblĂ©es d'Ă©lection n'ayant pas les moyens de dresser l'Ă©tat des municipalitĂ©s, firent demander par la Commission inter- mĂ©diaire l'exemplaire restĂ© aux mains des anciens syndics et qui leur Ă©tait inutile. L'intendant refusa, ne se croyant pas suffisamment autorisĂ© pour priver lout-Ă - coup tous les syndics de sa gĂ©nĂ©ralitĂ© d'un titre qu'ils tenaient privativement des mains de 1 administration ». 11 dut cĂ©der toutefois, le 15 novembre 1787. sur les injonctions du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral. Sa rĂ©sistance avait reculĂ© d'un mois le dĂ©pouille- ment des procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es paroissiales. 100 COMPOSITION DES ASSEMBLÉES MUNICIPALES fonctions de syndics... il faut que les assemblĂ©es municipales soient toutes constituĂ©es, sinon les autres assemblĂ©es, de dĂ©par- tement et provinciales, seraient arrĂȘtĂ©es dans leurs opĂ©rations ultĂ©rieures et il n'y aurait plus de vĂ©ritable organisation. » l Pour accĂ©lĂ©rer cette organisation, Lambert ordonnait de tran- cher par voie d'administration, et non par la voie contentieuse, toutes les difficultĂ©s qui surgissaient dans la formation des assemblĂ©es municipales. Il dessaisissait l'intendant de ce pouvoir pour Ă©viter toute nouvelle cause d'ajournement, et faisait un pressant appel Ă  la vigilance des bureaux intermĂ©diaires et de leurs procureurs syndics 2. Le travail de dĂ©pouillement se pro- longea pendant le premier semestre de l'annĂ©e 1788. Les Ă©lections de Bayeux et de Coutances envoyĂšrent leurs Ă©tats de municipa- litĂ©s au mois d'avril ; celles de Mortain, de Carentan et de Vire en mai3 ; Ă  la fin de juin quinze procĂšs-verbaux manquaient encore pour l'Ă©lection de Caen 4. Dans presque toutes les paroisses de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, les Ă©lections de 1787 investirent des charges municipales les gens que leur fortune ou leur situation sociale mettaient le plus en vue. Les assemblĂ©es municipales furent, comme l'avait rĂȘvĂ© Turgot, les assemblĂ©es des plus haut cotisĂ©s. La condition de 30 livres d'imposition, exigĂ©e par le RĂšglement du 15 juillet pour l'Ă©gibilitĂ©, faisait prĂ©voir ce rĂ©sultat. L'assemblĂ©e munici- pale Ă©tait ouverte Ă  tous les gens aisĂ©s, quel que fĂ»t leur rang social ; le syndicat, par une interprĂ©tation large du rĂšglement, fut aussi accessible aux trois ordres. Les ecclĂ©siastiques, les gentilshommes, les bourgeois des villes, propriĂ©taires Ă  la cam- pagne, les riches fermiers, tous ceux qui remplissaient les condi- 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7733. Lettre du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral Lambert Ă  la Com- mission intermĂ©diaire provinciale de Caen, 30 janvier 1788. 2 Lettre de Lambert Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, 6 mars 1788. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 6344. Les procureurs-syndics provinciaux, en mars, avril et mai, rĂ©clament avec insistance aux bureaux intermĂ©diaires les tableaux de la formation des municipalitĂ©s. 3 Tableaux de formation des assemblĂ©es municipales de 1787, par Ă©lections. Ibid., C 7648 Ă©lection d'Avranches ; 7662 Bayeux ; 7679 Ă  7684 Caen, procĂšs-verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales; 7697 Carentan; 7704 Coutances; 7710 Mortain ; 7717 Saint-LĂŽ ; 7731 Vire; je n'ai pas retrouvĂ© d'Ă©tal pour l'Ă©lection de Valognes. 4 Lettre des procureurs-syndics provinciaux, 24 juin 1788. Ibid., C 7624. Ces tableaux ne fuient envoyĂ©s qu'en septembre. — SupplĂ©ment au tableau des munici- palitĂ©s du dĂ©partement de Caen, annĂ©e 1787, envoyĂ© le 12 septembre 1788. Etats des quinze paroisses retardataires. Ibid., C 7685. SYNDICS MUNICIPAUX. CLERCS ET NOBLES 101 tions de cens exigĂ©es, purent ĂȘtre Ă©lus dĂ©putĂ©s municipaux ou syndics'1 . Le clergĂ©, en dehors des curĂ©s paroissiaux, membres de droit des assemblĂ©es, fournit plus d'un syndic municipal. Colom- belles, Grenteville, Hubertfolie, Mathieu, Vacognes, dans l'Ă©- lection de Caen *2 ; Saint - Germain - d'Ectot , dans celle de Bayeux ,;i ; Anneville, Hauteville, Urville, dans celle de Cou- tances 4 ; Saint-Martin-des-Champs, dans celle de Saint-LĂŽ, Ă©lurent des prĂȘtres pour syndics 5. La noblesse fut aussi reprĂ©sentĂ©e assez largement. Toutes les communautĂ©s n'imitĂšrent pas celle de Fresnes, qui Ă©limina systĂ©matiquement les privilĂ©giĂ©s de la municipalitĂ© Ă©lue, Ă  la grande indignation du seigneur 6. Les Tableaux de formation des municipalitĂ©s » dressĂ©s par les bureaux intermĂ©diaires, signa- lent la nomination de nombreux gentilshommes aux fonctions de syndics. Beaucoup s'intitulent Ă©cuyers, ce qui est un signe certain de noblesse anciens officiers, gardes du corps, chevaliers de Saint-Louis, propriĂ©taires ruraux, contribuant aux vingtiĂš- mes, et comme tels susceptibles de fonctions municipales Ă©lec- tives, Ă  cĂŽtĂ© du seigneur patron que sa seigneurie impose Ă  l'as- semblĂ©e f7. 1 Ce ne fut pas sans une vive opposition de certains paysans contre les propriĂ©- taires fonciers non domiciliĂ©s ou contre les fermiers non propriĂ©taires. La session de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen nous en a laissĂ© l'Ă©cho. ProcĂšs-verbal de Basse- Normandie, p. 166-167. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7670-7684. 3 Ibid., C 7662. 4 Ibid., C 7704. 5 Ibid., C 7717. Les procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es primaires Ă©lectorales de mars 1789 rĂ©vĂšlent deux autres prĂȘtres-syndics Ă  Saint-Remy-des-Landes bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, et Ă  Canteloup bailliage de Valognes. Arch. nat., B m 54, et Bridrey, Cahiers de dolĂ©ances du Cotentin, etc., t. Il, p. 166. 6 Lettre de Banville-Montmorel, seigneur du Rosel, Ă  l'intendant. Arch. dĂ©p.,. Calvados, C 6344. Les Ă©lus sont tous du Tiers Ă©tat et gens vils et incapables, un garde-chasse, la plupart ne sachant Ă©crire et Ă  peine signer ; c'est une cabale du Tiers Ă©tat pour exclure la noblesse de la rĂ©partition des impĂŽts, s'emparer de l'auto- ritĂ©.... et surcharger les propriĂ©tĂ©s des nobles. » ! TrĂšs nombreux exemples de syndics municipaux pris dans la noblesse Ă©lection d'Avranches, Ă  CĂ©aux, Curcy, Dragey, Saint-Aubin et Saint-Laurent-de-Terregatte, Saint-Pierre-Lauger, Sertilly Arch. dĂ©p., Calvados, C 7648 ; — Ă©lection de B,ayeux, Ă  Livry Ibid., C 7662 ; — Ă©lection de Caen, Ă  Audrieu, Boullon, Bretteville-sur-Odon, Epinay-sur-Odon, Gonneville, Missy, Saint-Contest, Sainte-Honorine-du-Fay, Saint- Ursin-d'Epron, Vaux-sur-Seulles Ibid., C 7681, 7683, 7684 ; — Ă©lection de Coutances, Ă  Courcy Ibid., C 7704 ; — Ă©lection de Mortain, Ă  ChĂšvreville, Saint-Jean-du-Corail, Ger, Heussey, Saint-Cyr-du-Bailleul, Ressuvielle, Montigny, Tinchebrai-Saint- Pierre Ibid., C 7710 ; — Ă©lection de Saint-LĂŽ, Ă  Agneaux, Tribehou, Domjean Ibid., C 7717 ; — Ă©lection de Vire, Ă  ChĂ©nedollĂ©, au DĂ©sert, Ă  BrĂ©moy, CampandrĂ©, ClĂ©cy, 102 SYNDICS DU TIERS ÉTAT. LES HOMMES DE LOI Ce fut toutefois du Tiers Ă©tat que sortit la plus grande partie des syndics municipaux de 1787. En plus d'un endroit, dans le voisinage des villes notamment, les magistrats des juridictions royales, les avocats, les professeurs d'UniversitĂ© avaient leur maison de campagne, et ils y avaient fait Ă©lection de domicile. Leur situation sociale, leurs lumiĂšres, leur expĂ©rience de la vie publique faisaient d'eux des candidats sĂ©rieux aux plus hautes charges municipales et les dĂ©signaient aux suffrages des paysans avisĂ©s, soucieux de confier leurs intĂ©rĂȘts en mains sĂ»res \. La liste des gens de robe nommĂ©s syndics dans la Basse-Normandie est trĂšs longue. Le lieutenant criminel du bailliage de Caen est syndic Ă  Noyers ; le lieutenant-gĂ©nĂ©ral du bailliage de Saint- Sauveur-Lendelin est Ă©lu en la mĂȘme qualitĂ© Ă  PĂ©riers ; celui du bailliage de Vire, Ă  Saint-Sever. Des procureurs et conseillers du bailliage obtiennent le syndicat au Rocher, prĂšs Mortain, Ă  Tinchebrai, Ă  Saint-Ouen-de-Beaudre, Saint-Jean-de-Daye, Con- dĂ©-sur-Vire, Coulonces, Sainte-Marie-Laumont, Danvou, Mont- bray, Deux professeurs de droit Ă  l'UniversitĂ© de Caen sont syndics Ă  BiĂ©ville et Ă  Mouen ; un procureur du grenier Ă  sel Ă  Blainville ; un avocat du roi au bureau des finances Ă  Creully ; un conseiller au Grand Conseil Ă  Cerisy. Quelques officiers des justices, seigneuriales, assez rares, des notaires en plus grand nombre, plusieurs huissiers et surtout une grande quantitĂ© d'avocats. Cette participation des hommes de loi Ă  l'administra- tion municipale des campagnes en 1787 est un fait intĂ©ressant Ă  noter elle explique le caractĂšre gĂ©nĂ©ral et l'orientation poli- tique des vƓux contenus dans d'assez nombreux cahiers ruraux de Basse-Normandie en 1789 2>. La Graverie, Mesnil-Ozouf, Landisacq, Saint-Germain-de-Tallevende, Saint-Pierre la-Vieille. Sainte-CĂ©cile, Sainte-Marie-des-Monts, Vaudry Arch. dĂ©p., Calvados, C7731. 1 Certains hommes de loi lurent ainsi Ă©lus syndics dans plusieurs paroisses. Courtin de la BrĂ©audiĂšre, conseiller Ă  l'Ă©lection de Saint-LĂč, fut nommĂ© Ă  Saint- Thomas-de-Saint-LĂŽ, Ă  Saint-Ebremond-de-la-Barre et Ă  Saint-Martin-de-BonfossĂš; Gonfrey, procureur Ă  la mĂȘme Ă©lection, fut Ă©lu syndic Ă  Saint-Gilles et Ă  Villiers- Fossard ; Brenet de Brais, conseiller au bailliage de Vire, Ă  Coulonces et Ă  Mesnil- Bobert. 2 Ces lettrĂ©s et savants des campagnes sont les intellectuels » dont parle M. Onou dans son Ă©lude sur les Ă©lections de 1789 et les cahiers du Tiers Ă©tat. Ce sont ceux dont les paroles rĂ©pondent aux espĂ©rances du paysan, et Ă  qui celui ci donne toute sa confiance. Ce sont les futurs rĂ©dacteurs des cahiers politico-littĂ©- raires » de 1789. Voir Onou, Ă©lections de 1789 et les cahiers . Celle-ci se rĂ©unit le 2 mars pour remplacer l'abbĂ© de Cussy, dĂ©jĂ  prĂ©sident de l'assemblĂ©e d'Ă©lec- tion de Coutances ; aprĂšs le refus de l'abbĂ© Bruzeau, prieur de Tailleville, d'abord Ă©lu 4, le choix tomba sur dom Mesnilgrand, prieur de l'abbaye Saint-Etienne de Caen &h Les membres de la Commission intermĂ©diaire ne durent se trouver que trĂšs rarement au complet. Le duc de Coigny semble n'avoir jamais assistĂ© Ă  ses sĂ©ances ; il ne se dĂ©sintĂ©ressa pourtant pas des affaires de la province et on le voit souvent intervenir au- prĂšs du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral et des autres ministres sur la priĂšre de ses collĂšgues normands, avec qui il resta en continuelle correspon- dance 6. La prĂ©sidence rĂ©elle de la Commission semble avoir appartenu successivement au comte Louis de Vassy 7, puis Ă  l'Ă©- vĂȘque de Coutances 8. Les Ă©lections aux Etats gĂ©nĂ©raux les enle- vĂšrent tous deux Ă  l'Administration provinciale, ainsi que Flaust. La collaboration du maire de Bayeux, Larcher de la Londe, ne fut certainement pas assidue, car son nom ne figure jamais dans les actes de la Commission $h II est trĂšs probable que pendant les annĂ©es 1789 et 1790 les seuls membres assemblĂ©s rĂ©guliĂšrement furent Mesnilgrand, Daigremont et Hervieu de Pont-Louis 10^. 1; Voir ci-dessus, chap. II, p. 37. 2 Ibid., chap. IV, p. 81. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7622. Registre de correspondance de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen. Lettre du 24 fĂ©vrier 1788. 4 Ibid. Lettre du 5 mars 1788. 5 Ibid., C 7627. 6 Traces continuelles de cette correspondance dans les deux registres de corres- pondance de la Commission intermĂ©diaire qui ont Ă©tĂ© conservĂ©s. Ibid., C 7622, 7623. 7 Ibid., C 7622. Lettre du 9 avril 1788. 8 Ibid., C 7623. Lettre du 3 juin 1788. 9 Ibid., C 7622. On fait allusion Ă  sa prĂ©sence le 5 mars 1788, lors de l'Ă©lection de l'abbĂ© Bruzeau. 10 Le compte-rendu de la Commission intermĂ©diaire, imprimĂ© en 1790, ajoute Ă  116 LES PROCUREURS-SYNDICS PROVINCIAUX Administrateur collectif d'un territoire assez Ă©tendu, la Com- mission intermĂ©diaire eut ses bureaux, comme l'intendant. Le nombre des employĂ©s s'Ă©tait accru peu Ă  peu, avec la besogne il Ă©tait montĂ© de deux en octobre 1787, Ă  huit en fĂ©vrier 1790. Leur traitement variait de 400 Ă  1,000 livres. Comme leurs occupations Ă©taient trĂšs absorbantes, on leur avait promis des gratifications annuelles et une augmentation de traitement au bout de trois ans. Cette derniĂšre promesse ne put ĂȘtre tenue, par suite de la suppres- sion antĂ©rieure de l'administration provinciale, mais six de ces employĂ©s devaient ĂȘtre replacĂ©s dans les bureaux de l'adminis- tration dĂ©partementale nouvelle *. A la tĂȘte des bureaux de la province se trouvait le secrĂ©taire provincial ; il avait Ă©tĂ© dĂ©signĂ© au dĂ©but mĂȘme de l'institution, dĂšs le mois d'aoĂ»t 1787, par la premiĂšre moitiĂ© des administra- teurs. Le choix s'Ă©tait portĂ© sur Alexandre, professeur en droit de l'UniversitĂ© et futur Recteur de l'AcadĂ©mie de Caen %. Aux sĂ©ances de la Commission intermĂ©diaire assistaient, mais sans voix dĂ©libĂ©rative, deux autres membres les procureurs-syn- dics provinciaux. C'Ă©taient ses agents d'exĂ©cution, chargĂ©s d'en- tretenir en son nom la correspondance administrative avec les autres pouvoirs Ă©tablis, et de veiller Ă  l'application des dĂ©cisions qu'elle avait prises. Ils Ă©taient deux, au dĂ©but, reprĂ©sentant l'un les deux ordres privilĂ©giĂ©s, l'autre le Tiers Ă©tat. Le syndic du clergĂ© et de la noblesse Ă©tait Charles Auguste de La Cour comte de Balleroy, lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du Roi; Ă©levĂ© par son pĂšre dans l'amour des rĂ©formes, il avait accueilli avec enthou- siasme l'institution des AssemblĂ©es provinciales. Il avait Ă©pousĂ© la veuve de l'intendant de la Rochelle. Sa mauvaise santĂ© et surtout la faiblesse de sa vue le forcĂšrent Ă  donner sa dĂ©mission de syndic en mai 1789^; mais il resta attachĂ© Ă  la Commission intermĂ©diaire jusqu'en aoĂ»t 1790. On jugea inutile de lui donner un successeur et son collĂšgue du Tiers Ă©tat Jacques Le Telier de Vauville, demeura seul syndic. Celui-ci Ă©tait dĂ©jĂ  conseiller au bailliage et trĂ©sorier de France au bureau des finances de Caen l*J . ces noms celui de Texier-IIautefeuille ci-devant marquis de Hautefeuille, marĂ©chal de camp, inspecteur des troupes de la division de Normandie. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, L, non inventoriĂ©. 2 E. ZĂ©vort, Le premier Recteur de l'AcadĂ©mie de Caen, Pierre-Roberi Alexandre, p. 6. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7628. 4 Ibid., L, non inventoriĂ©. COMPOSITION DES BUREAUX INTERMEDIAIRES 11/ Les instructions du 3 novembre 1787 crĂ©aient une incompatibilitĂ© entre ces fonctions et l'administration provinciale ; l'AssemblĂ©e, par ses pressantes instances, obtint le retrait de cette dĂ©fense l. AgĂ© de quarante-cinq ans environ, homme d'une compĂ©tence indiscutable et d'une conscience Ă  toute Ă©preuve, Le Telier de Vauviile devait assumer en trĂšs grande partie la tĂąche d'adminis- trer pendant trois ans le ressort provincial de la Basse-Normandie. Son nom rĂ©sume l'administration provinciale nouvelle en face du reprĂ©sentant de l'ancien rĂ©gime, l'intendant Cordier de Launay. Les bureaux intermĂ©diaires, chargĂ©s d'administrer, sous le contrĂŽle et le direction de la Commission intermĂ©diaire, les neuf Ă©lections ou dĂ©partements de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ©, avaient Ă©tĂ© constituĂ©s par la premiĂšre moitiĂ© des administrateurs de l'Ă©lection au dĂ©but d'octobre 1787 ''. Ils avaient pour prĂ©sident de droit celui de l'assemblĂ©e de dĂ©partement et comprenaient chacun quatre membres, un du clergĂ©, un de la noblesse, deux du Tiers Ă©tat. L'abbĂ© MĂ©ry de Berthenonville, doyen de la collĂ©giale du Saint-SĂ©pulcre de Caen, prĂ©sida le bureau intermĂ©diaire de Caen, dont les membres Ă©taient Duclos Le Goupil, chanoine du Saint- SĂ©pulcre, de CharsignĂ©, seigneur d'HĂ©ritot, Pitet le jeune, prieur juge consul Ă  Caen et Renouard, propriĂ©taire Ă  Sermentot. A Avranches, sous la prĂ©sidence de l'Ă©vĂȘque, le bureau intermĂ©- diaire rĂ©unit un vicaire gĂ©nĂ©ral du diocĂšse, l'abbĂ© de Brigeat, un seigneur des environs, Payen de Chavoy, et deux avocats, Lecourt et Cordoen. Le comte d'Osseville, qui prĂ©sidait Ă  Carentan, eut pour collĂšgues le curĂ© de la ville, l'abbĂ© Desplanques, un ancien capitaine d'infanterie, Duprey-Desisles, et deux avocats, Laurence et Caillemer, ce dernier bailli de Coigny. Au bureau intermĂ©diaire de Bayeux le clergĂ© ne compta comme membre, en l'absence de l'Ă©vĂȘque ;;', qu'un de ses vicaires gĂ©nĂ©raux, l'abbĂ© de Pradelle, auteur d'un ouvrage sur les DĂ©ports en Normandie » ; ce fut un noble, Dufayel de BernĂ©, qui le prĂ©sida ; les deux membres du Tiers Ă©taient le mĂ©decin Dozeville et un avocat, DeJauney. Le bureau de Coutances avait pour prĂ©sident l'abbĂ© de Cussy, qui devait pĂ©rir sur l'Ă©chafaud le 3 thermidor an II ; on lui avait adjoint Bonnier, curĂ© de Muneville-le-Bingard, Leforestier de 1 Arch. dĂ©p., Calvados. C 7667. 2 Voir ci-dessus, chap. III, p. 52. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7655. L'Ă©vĂȘque n'assista qu'Ă  une sĂ©ance du bureau, 1. Les neuf syndics du Tiers Ă©tat appartenaient Ă  la magistrature ou au barreau. L'examen des registres qui nous sont conservĂ©s nous montre l'importance de leurs fonctions. Le Tuilier Ă  Coutances, Costy Ă  Caen, Lemonnier Ă  Saint-LĂŽ, Surbled des Moulins Ă  Vire, Le Reculey de la Huberderie Ă  Carentan, Le Tellier Ă  Bayeux, furent les chevilles ouvriĂšres de la nouvelle administration en face des subdĂ©lĂ©guĂ©s indiffĂ©rents, dĂ©missionnaires ou dĂ©chus. La composition des bureaux intermĂ©diaires varia assez peu celui de Bayeux fut privĂ© des talents de Delauney dĂšs le mois de mai 1789, par suite de son Ă©lection aux Etats gĂ©nĂ©raux. Le prĂ©si- 1 Voir ci-dessus, chap. 111, p. 14-45. IMPUISSANCE DE LA COMMISSION INTERMEDIAIRE 1 19 dent du bureau de Mortain, le comte de Vassy, et Vieillard, greffier du bureau de Saint-LĂŽ, furent appelĂ©s Ă  Versailles Ă  la mĂȘme Ă©poque. Les deux procureurs-syndics de Valognes, de Beaudrap et Besnard Duchesne, Ă©galement dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux, se dĂ©mirent du syndicat l'abbĂ© Roger, de Cherbourg, fut seul choisi pour les remplacer. Quelle fut l'activitĂ© de ces divers organes pendant la pĂ©riode Ă©phĂ©mĂšre de leur administration? La Commission intermĂ©diaire provinciale, bureau permanent de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen, devait exĂ©cuter les dĂ©cisions de celle-ci dans l'intervalle de ses sessions annuelles. Par suite des circonstances politiques cette assemblĂ©e ne fut plus jamais rĂ©unie. Suspendue en 1788 par la convocation des notables et la promesse de prochains Etats gĂ©nĂ©raux, elle n'avait plus de raison d'ĂȘtre en 1789, depuis le jour oĂč la Constituante avait dĂ©cidĂ© la crĂ©ation de nouvelles assemblĂ©es administratives. La Commission intermĂ©diaire se trouva donc seule Ă  la tĂȘte de l'administration provinciale de 1787 Ă  1790. Ce ne fut point une cause de force pour elle. Si, en effet, l'absence d'une assemblĂ©e dĂ©libĂ©rante semblait lui laisser une plus grande indĂ©pendance et l'affranchir de tout contrĂŽle assujettissant, la trop longue durĂ©e d'un mandat dont la confiance populaire ne l'avait pas investie, et que nulle sanc- tion publique ne venait confirmer, fit s'Ă©vanouir peu Ă  peu la puissance qu'elle aurait dĂ» possĂ©der. Quelle que fĂ»t leur valeur personnelle, ses membres n'avaient pas l'autoritĂ© nĂ©cessaire pour tenir vigoureusement la barre au milieu de l'agitation politique naissante, en face d'une administration rivale, inquiĂšte et ombra- geuse, en prĂ©sence de l'opinion publique Ă  peu prĂšs indiffĂ©rente Ă  leur existence. La Commission intermĂ©diaire aborda nĂ©anmoins sa tĂąche avec courage ; elle employa tout son zĂšle Ă  justifier la confiance dont le gouvernement l'honorait, en se consacrant au service de ses concitoyens ». Son activitĂ© est indiscutable. Nous en avons la trace dans le volumineux Compte rendu de son administration qu'elle fit imprimer en 1790 pour justifier sa gestion auprĂšs des administrations dĂ©partementales qui lui succĂ©daient *, et dans l'Ă©norme masse de documents qu'elle dĂ©posa Ă  l'appui de ce 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7619. Comple-rendu par la Commission intermĂ©diaire pro- vinciale de Basse-Normandie de son administration depuis le 7 dĂ©cembre 1787 jusqu'au 4 aoĂ»t 1790. Caen, Le Roy, 1790, in-4°. 120 LES DEUX PHASES DE SON ACTIVITÉ Compte rendu, dans les archives du Calvados 1. Parmi ces docu- ments se trouvaient dix-sept registres deux registres de dĂ©libĂ©- rations, trois d'enregistrement, et douze contenant la copie de sa correspondance et de celle des procureurs-syndics provin- ciaux *. Ces registres ont en grande partie disparu. Nulle trace des dĂ©libĂ©rations, ni de l'enregistrement. La correspondance seule est reprĂ©sentĂ©e par quatre registres, dont un fragmentaire deux de la Commission intermĂ©diaire, du 10 fĂ©vrier au 7 mai 1788, — et du 21 juin au 7 octobre 1788 3Ăź ; deux des procureurs-syndics, le registre I du 29 aoĂ»t 1787 au 4 juillet 1788, — le registre VI du 20 dĂ©cembre 1789 au 3 avril 1790 W. MalgrĂ© ces Ă©normes lacunes, la prĂ©sence dans le fonds de la Commission intermĂ©diaire de nombreuses liasses relatives aux impositions, aux travaux publics, aux objets d'ordre Ă©conomi- que 5, et la conservation des documents contemporains du fonds de l'intendance permettent une apprĂ©ciation suffisamment exacte du mode d'action de la Commission intermĂ©diaire provin- ciale de Caen. Ce ne fut pas une institution purement nominale, mais un conseil d'administration qui siĂ©gea effectivement, dans des rĂ©unions pĂ©riodiques et rĂ©guliĂšres. On la voit s'assembler assez frĂ©- quemment ; en mars 1788, les procureurs syndics Ă©crivaient Ă  Larcher de la Londe, maire de Bayeux La Commission se rĂ©unit deux fois par semaine, le mercredi et le samedi, Ă  5 heures du soir » 6. Ses sĂ©ances se tinrent d'abord chez le prĂ©sident ; celle du 4 juin 1788 eut lieu Ă  l'hĂŽtel de l'Ă©vĂȘque de Coutances W. Quand on eut installĂ© les bureaux de l'administration provinciale dans un local spĂ©cialement louĂ© pour eux, il est probable qu'on affecta une piĂšce de ce logement aux sĂ©ances de la Commission intermĂ©diaire. Il semble bien que deux ou trois membres, en dehors des procureurs-syndics, assistaient Ă  chacune de ses dĂ©li- bĂ©rations. Dans l'histoire de cette Commission, qui comprend moins de trois annĂ©es, on pourrait distinguer deux pĂ©riodes. Avant la rĂ©union des Etats gĂ©nĂ©raux, elle fit preuve, au milieu de nombreux obstacles, d'une assez grande initiative et entretint 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7610-8578. Ces documents forment aujourd'hui le fond trĂšs important dit de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie. 2 Compte-rendu, p. 244. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7622, 7623. 4 Ibid., C 7624, 7625. 5 Ibid., C 7740-8578. 6 Ibid., C 7624. Lettre du 20 mars 1788. 1 Ibid. Lettre des procureurs-syndics Ă  l'ingĂ©nieur en chef Lefehvre, du 3 juin 1788. COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET POUVOIR CENTRAL 121 une correspondance trĂšs suivie avec les ministres, les chefs des divers services rĂ©gionaux et les bureaux intermĂ©diaires de dĂ©par- tement. AprĂšs la rĂ©union des Etats, vers la fin de 1789, sentant que son existence devait ĂȘtre abrĂ©gĂ©e par la grande rĂ©forme administrative de la Constituante, elle borna ses soins Ă  faire exĂ©cuter les dĂ©crets de l'AssemblĂ©e Nationale sanctionnĂ©s par Sa MajestĂ©, Ă  surveiller les travaux publics, et Ă  porter la plus sĂ©vĂšre Ă©conomie dans toutes les dĂ©penses Ă  la charge de la pro- vince ». Elle ne se considĂ©ra plus dĂšs lors comme une vĂ©ritable administration, mais comme un bureau provisoire destinĂ© Ă  soutenir l'Ă©difice chancelant de la chose publique »0 en atten- dant l'arrivĂ©e au pouvoir des nouveaux corps administratifs qui devaient la remplacer. L'exercice des nombreuses attributions qui lui avaient Ă©tĂ© confiĂ©es impĂŽts, travaux publics et bien public, mit la Com- mission en relations suivies avec les diverses administrations placĂ©es au-dessus, Ă  cĂŽtĂ© ou en dessous d'elle le contrĂŽleur gĂ©nĂ©- ral et les autres ministres, les Commissions intermĂ©diaires des autres provinces, les bureaux intermĂ©diaires des neuf dĂ©parte- ments, les municipalitĂ©s des principales villes de Basse-Norman- die, le service des ponts et chaussĂ©es et l'intendance de Caen. Le ministre avec lequel les intendants avaient toujours entre- tenu la correspondance la plus suivie Ă©tait le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral des finances. La Commission intermĂ©diaire continua ces relations avec Lambert accusĂ©s de rĂ©ception d'arrĂȘts relatifs Ă  la levĂ©e des diverses impositions, demandes d'autorisation d'emploi des fonds rĂ©servĂ©s Ă  la province, requĂȘtes relatives Ă  la fixation et au paiement des frais de la nouvelle administration, tels furent les objets essentiels de cette correspondance. Ses attributions en matiĂšre de finances et de travaux publics la mettaient plus spĂ©cialement en rapport direct, au contrĂŽle gĂ©nĂ©ral, avec deux chefs de service, l'un Blondel, intendant au dĂ©partement des impositions, l'autre, Chaumont de la MilliĂšre, intendant au dĂ©par- tement des ponts et chaussĂ©es 2. En dehors de son ressort proprement dit, la Commission inter- mĂ©diaire eut des intelligences avec les autres administrations 1 Compte-rendu, p. 3. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7622, 7623. Nombreuses lettres de la Commission ister- mĂ©diaire Ă  Lambert, Blondel, de la MilliĂšre. Les cinq calepins du dĂ©part des lettres enregistrĂ©s au contrĂŽle gĂ©nĂ©ral et conservĂ©s aux Arch. nat-, H 1603, peuvent don- ner une idĂ©e exacte de l'activitĂ© de cette correspondance. 1*22 COMMISSION ET BUREAUX INTERMÉDIAIRES provinciales du royaume. Le projet d'une sorte de confĂ©dĂ©ration entre ces administrations avait germĂ© dans le cerveau de plus d'un procureur-syndic. La France ne devait plus former qu'une grande famille, dont tous les citoyens, se regardant comme des frĂšres, contribueraient par leur union et leurs dĂ©couvertes Ă  la prospĂ©ritĂ© de l'Empire » ]. En attendant la rĂ©alisation de ce vƓu, on proposait la communication rĂ©ciproque des procĂšs- verbaux des assemblĂ©es, et l'Ă©change de vues sur la meilleure gestion possible des intĂ©rĂȘts publics. Ce sentiment de concorde fraternelle, prĂ©curseur des FĂ©dĂ©rations futures, n'aboutit point Ă  un rĂ©sultat immĂ©diat et la Commission provinciale de Caen n'eut guĂšre de relations suivies qu'avec ses voisines immĂ©diates de Rouen et d'Alençon. C'est surtout dans l'intĂ©rieur de la gĂ©nĂ©ralitĂ© que nous voyons agir la Commission intermĂ©diaire. Elle correspondit presque journellement avec les bureaux intermĂ©diaires, ses subordonnĂ©s immĂ©diats, sur tous les objets soumis Ă  leur commune adminis- tration. Instructions et Ă©claircissements destinĂ©s Ă  interprĂ©ter les arrĂȘts du Conseil sur la taille et la capitation ; envois de rĂŽles d'impositions, rĂ©partition de sommes pour ateliers de charitĂ© ; dĂ©lĂ©gations aux bureaux intermĂ©diaires pour les adjudications de travaux publics ; ordres d'enquĂȘtes et demandes d'avis sur la reconstruction des presbytĂšres, sur les requĂȘtes de moins-imposĂ©, sur la formation irrĂ©guliĂšre des municipalitĂ©s ; exercice quotidien d'une tutelle administrative Ă©troite, substituĂ©e Ă  celle de l'inten- dant, mille objets servirent d'occasion Ă  une correspondance abondante et ininterrompue, dirigĂ©e sur les chefs-lieux des neuf dĂ©partements. C'Ă©tait une source de travail Ă©crasant, et Le Telier de Vauville pouvait, en allĂ©guant son propre exemple, relever avec une pointe d'ironie le courage du procureur-syndic de Bayeux, qui cĂ©dait aux fatigues d'un surmenage prolongĂ© 2i. Les relations de la Commission intermĂ©diaire de C^ten et des bureaux intermĂ©diaires de dĂ©partement furent en gĂ©nĂ©ral assez faciles, faites de bienveillance d'un cĂŽtĂ©, de docilitĂ© empressĂ©e de l'autre ; quelques bureaux cependant firent preuve d'insou- mission. Le bureau de Caen, par exemple, Ă©tait impatient de voir Ă©tendre ses attributions ; la Commission dut Ă  plus d'une reprise refroidir son zĂšle, qui brĂ»lait d'embrasser trop d'objets ». Il 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7628. Lettre des procureurs-syndics provinciaux d'Auch Ă  la Commission intermĂ©diaire de Caen, 31 mars 1788. 2 Ibid., C 7623. Lettre du 23 juin 1788. INSUBORDINATION DE CERTAINS BUREAUX 123 voulait avoir la haute main sur les travaux de redressement de l'Orne, sur la construction des casernes et des bĂątiments de justice l. L'Ă©poque des adjudications pour entretien des routes lui semblait peu heureusement choisie et il reprochait Ă  la Com- mission de n'avoir pas concertĂ© ses opĂ©rations avec lui. L'Ă©ta- blissement des cantonniers prĂ©posĂ©s Ă  cet entretien par la Com mission lui paraissait une institution nuisible 2. Le bureau inter- mĂ©diaire de Valognes exprimait les mĂȘmes apprĂ©hensions n . Celui de Coutances eut voulu avoir la direction de ces employĂ©s il voyait avec peine leur destitution rĂ©servĂ©e Ă  la seule Commis- sion intermĂ©diaire et dĂ©sirait voir s'agrandir le cercle Ă©troit qui circonscrivait sa propre autoritĂ© 4 ». Les bureaux intermĂ©diaires prĂ©tendaient dĂ©libĂ©rer en toute libertĂ© et ne soumettaient pas toujours leurs dĂ©cisions Ă  l'assentiment de la Commission inter- mĂ©diaire. Celle-ci fut obligĂ©e d'adresser une circulaire gĂ©nĂ©rale pour Ă©viter une variĂ©tĂ© de mĂ©thodes nuisible Ă  la bonne marche de l'administration » 5. Ces divergences de vues amenĂšrent parfois une tension dans les relations et, comme consĂ©quence, des retards dans l'exĂ©cution des dĂ©cisions de la Commission intermĂ©diaire. L'importance de la question routiĂšre en Basse-Normandie obligea la Commission intermĂ©diaire, chargĂ©e de la direction des travaux publics, Ă  une correspondance des plus actives avec le service des ponts et chaussĂ©es qui avait Ă©tĂ© placĂ© sous ses ordres. LĂ  encore, les rapports furent loin d'ĂȘtre excellents. La situation que l'ancienne administration avait lĂ©guĂ©e Ă  la nou- velle Ă©tait, nous l'avons vu, dĂ©sastreuse. RĂ©seau routier impar- fait et tracĂ© au hasard, projets coĂ»teux Ă  l'Ă©tude, sans ressources pour y faire face, dettes Ă©normes que des impositions sans cesse accrues ne pouvaient parvenir Ă  Ă©teindre ; abus des entrepreneurs 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7666. Lettre du bureau intermĂ©diaire, 22 juillet 1788. Ibid., C 7667. RĂ©ponse de la Commission intermĂ©diaire, 4 aoĂ»t 1788. 2 Ibid., C 7623. Lettre de la Commission intermĂ©diaire, 13 aoĂ»t 1788. 3 Ibid. Lettre de la Commission intermĂ©diaire, 17 aoĂ»t 1788. 4 Ibid., C 7700. Rapport des procureurs-syndics Ă  l'assemblĂ©e de dĂ©partement de Coutances, 20 octobre 1788. — Le bureau intermĂ©diaire de Carentan fĂźt preuve de plus de soumission. Nous n'avons pu croire, Ă©crit un des procureurs-syndics, que la Commission intermĂ©diaire cherchĂąt Ă  s'attirer trop d'autoritĂ©, pas plus qu'Ă  enchaĂźner nos actions, nos promesses... La Commission intermĂ©diaire provinciale ne cherche point Ă  envahir toute l'autoritĂ©... elle ne rĂ©clame d'autre supĂ©rioritĂ© que cette subordination qui est indispensable dans tous les corps, et sans laquelle l'ordre dont dĂ©pend leur existence cesserait d'y rĂ©gner. » Ibid., Manche, C 176. 5 Ibid., Calvados, C 7622. Lettre de la Commission intermĂ©diaire au bureau inter- mĂ©diaire d'Avranches, 5 mars 1788. l'M COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET PONTS-ET-CHAUSSEES qui s'enrichissaient scandaleusement au dĂ©triment du public ; lĂ©gĂšretĂ© et imprĂ©voyance du personnel des ingĂ©nieurs qui avaient agi sans compter et engagĂ© profondĂ©ment l'avenir tels Ă©taient les maux auxquels la Commission intermĂ©diaire devait porter remĂšde. Elle fit preuve d'une grande vigilance, mais son action fut souvent entravĂ©e par la mauvaise volontĂ© et l'opposition tenace des ingĂ©nieurs. Par un esprit de caste excessif, ceux-ci visaient Ă  une indĂ©pendance presque absolue. Lefebvre, ingĂ©- nieur en chef depuis 1772, l'avait en fait Ă  peu prĂšs conquise. En dĂ©pit des apprĂ©ciations plutĂŽt sĂ©vĂšres des intendants Ă  son Ă©gard, il Ă©chappait au contrĂŽle administratif et, par suite de sa compĂ©tence technique, vivait en maĂźtre dans son service ; les ingĂ©nieurs de dĂ©partement placĂ©s sous ses ordres participaient Ă  cette situation privilĂ©giĂ©e. Le jour oĂč, devant le pĂ©ril financier auquel l'incurie et le gaspillage avaient acculĂ© la province, une administration nouvelle essaya de rĂ©agir, de contrĂŽler et de corriger ces abus, elle trouva en face d'elle un personnel prĂ©venu et hostile. Avant mĂȘme qu'elle existĂąt, l'annonce de sa crĂ©ation avait indisposĂ© les ingĂ©nieurs. La plus grande rĂ©gularitĂ©, les formalitĂ©s les plus scrupuleuses dans les opĂ©rations sont deve- nues d'autant plus essentielles, Ă©crivait Lefebvre Ă  l'ingĂ©nieur de Valognes le 2 juillet 1787, que les assemblĂ©es provinciales et leurs commissions intermĂ©diaires les examineront et scrute- ront peut-ĂȘtre avec le dĂ©sir de nous trouver en faute » l\ La rĂ©siliation des adjudications demandĂ©e par l'AssemblĂ©e provin- ciale et poursuivie par la Commission intermĂ©diaire devait mĂ©- contenter les ingĂ©nieurs qui y voyaient une mesure maladroite et impopulaire. Le zĂšle des nouveaux administrateurs les effraya par la menace d'une surcharge de travail . MalgrĂ© les formules courtoises de l'arrĂȘt, c'Ă©tait un Ă©chec pour l'intendant devant qui ces adjudications avaient Ă©tĂ© passĂ©es. ChargĂ©e de procĂ©der aux adjudications nouvelles, la Commission intermĂ©diaire allait commettre un empiĂ©tement nouveau sur l'autoritĂ© de Launay. Celui-ci, blessĂ© jusqu'au vif, allait prendre bientĂŽt sa revanche en paralysant, au nom de la lĂ©galitĂ©, et pour une pure question de forme, les opĂ©rations de cette Commission relatives au recou- vrement de la corvĂ©e. Un long conflit, qui dura pendant la pre- miĂšre moitiĂ© de l'annĂ©e 1789, allait mettre aux prises les deux 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 4703. Lettre de Cordier de Launay Ă  Necker, 27 fĂ©vrier 1788. Pour vous seul, Monsieur », Ă©crit-il en tĂȘte de cette lettre. Voir F. Mourlot, Rapports d'une AssemblĂ©e provinciale et de sa Commission intermĂ©diaire avec l'intendant. Bulletin des sciences Ă©conomiques et sociales du ComitĂ© des travaux historiques et scientifiques, annĂ©e 1902, p. 276. 2 Voir supra, chap. IV, p. 71. LEURS CONSÉQUENCES FUNESTES 129 autoritĂ©s rivales, amener le dĂ©sarroi dans l'administration, accroĂźtre la misĂšre gĂ©nĂ©rale, causer de graves prĂ©judices aux intĂ©rĂȘts Ă©conomiques de la province 1. Sur un autre point, la Commission intermĂ©diaire avait Ă©tĂ© moins heureuse. Un conflit s'Ă©tant Ă©levĂ© entre les bureaux inter- mĂ©diaires et les officiers d'Ă©lection, relativement Ă  la rĂ©partition des tailles 2\ ces derniers l'avaient emportĂ©. Sans ĂȘtre le complice de ce succĂšs, l'intendant dut le voir d'un Ɠil satisfait, car il lui rendait le dĂ©partement des impositions pour 1789. Une telle mesure excita le vif dĂ©pit de la Commission intermĂ©diaire, dont ce brusque retrait d'attributions ne pouvait que diminuer le prestige aux yeux des populations. Aussi, animĂ©e Ă  son tour de dispositions malveillantes vis-Ă -vis de l'intendant, renonça- t-elle Ă  demander cette annĂ©e l'augmentation du moins imposĂ©, remise accordĂ©e par le roi pour ĂȘtre distribuĂ©e aux taillablçs qui avaient subi des pertes de rĂ©coltes ou de bestiaux. La raison de son mutisme est mesquine et fort peu louable. Comme ces fonds peuvent ĂȘtre diminuĂ©s l'annĂ©e suivante, et comme ils sont desti- nĂ©s Ă  soulager la classe la plus ignorante et la plus prĂ©venue contre les AssemblĂ©es provinciales, celle des habitants des cam- pagnes, la comparaison des secours accordĂ©s par nous avec ceux ' de l'ancien rĂ©gime serait entiĂšrement Ă  notre dĂ©savantage et v nous ferait perdre sous le rapport du crĂ©dit et de la bienfaisance une considĂ©ration qu'il nous est bien important d'acquĂ©rir » 3. En fin de compte, cette conception si Ă©troitement jalouse que les deux administrations avaient de leur autoritĂ©, cette course Ă  la popularitĂ© tournaient au dĂ©triment public et n'avaient que des consĂ©quences funestes. Dans une sphĂšre plus restreinte, les neuf bureaux intermĂ©- diaires de dĂ©partement exercĂšrent les mĂȘmes attributions que la Commission intermĂ©diaire provinciale. Il existe des traces matĂ©rielles de leur activitĂ©. Nous possĂ©dons les registres de dĂ©libĂ©rations de six d'entre eux ceux de Caen, Bayeux, Vire, Avranches, Saint-LĂŽ, Valognes, et les registres de correspondance des bureaux de Bayeux et de Carentan 4. Leurs sĂ©ances se te- 1 Voir plus loin, au chapitre XII, l'exposĂ© succinct de ce conflit. 2 Voir ci-dessous, p. 133. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 4703. 4 Ibid., Registres de dĂ©libĂ©rations de Caen, C 7664 bis ; de Bayeux, C 7655 et de Vire, C 7726 ; deux registres de correspondance de Bayeux, C 7657, 7658. — Arch. dĂ©p. de la Manche, Registres de dĂ©libĂ©rations d'Avranches, C 238 ; de Saint-LĂŽ, C 629 et de Valognes, C 633 ; registre incomplet de correspondance du bureau de Carentan, C 476. 130 BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET PROCUREURS-SYNDICS naient dans des locaux spĂ©cialement louĂ©s pour cet usage ils devaient comprendre au moins une salle pour le greffe et une salle de rĂ©union *. La correspondance administrative Ă©tait lourde, et souvent le secrĂ©taire se faisait assister d'un ou plusieurs commis expĂ©ditionnaires >- . Les procureurs-syndics, qui avaient leur rĂ©sidence au chef-lieu du dĂ©partement, et qui recevaient des appointements pour leur fonction, devaient consacrer Ă  celle-ci une grande partie de leur temps W. Ils veillaient Ă  l'exĂ©- cution des ordres Ă©manĂ©s de la Commission intermĂ©diaire ou dirigeaient la correspondance du bureau sur les divers objets du service; ils Ă©taient, Ă  jours fixes, Ă  la disposition des syndics et des dĂ©putĂ©s municipaux de leurs dĂ©partements ; ils prĂ©sidĂšrent aux ad- judications des travaux de construction ou de rĂ©paration de leurs Ă©glises, de leurs presbytĂšres et de leurs Ă©coles^ ; ils leur deman- dĂšrent des renseignements sur leur Ă©tat fiscal et Ă©conomique^1. Ce furent, en un mot, des agents de transmission entre la Com- mission intermĂ©diaire provinciale et les municipalitĂ©s. Leur tutelle fut en gĂ©nĂ©ral acceptĂ©e sans rĂ©sistance par celles-ci. Tous ces corps administratifs nouvellement organisĂ©s se solidarisĂšrent comme d'instinct, et la hiĂ©rarchie des fonctions fut Ă  peu prĂšs partout respectĂ©e. Toutefois l'autoritĂ© des bureaux intermĂ©- diaires ne fut pas sans rencontrer des rĂ©sistances sur quelques points. Le plus notable exemple d'insubordination fut donnĂ© 1 Provisoirement ils s'adjoignirent quatre nouveaux membres le curĂ© d'Engles- jueville, Wimpfen, Le Bret et Tardif. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 7654. 2 Ibid., C 7624. Lettre des procureurs-syndics provinciaux, 30 mars 1788. 3 Exemples Ă  Fierville-en-Bessin. Fresney-le-Puceux, Juvigny, Secqueville-en- Bessin, Torigni, Couvains, Isigny, Mesnil-Uurand, ClĂ©cy, Vaudry, Le Teileul. Lettre intĂ©ressante dos procureurs-syndics provinciaux de Caen sur le rĂŽle des bureaux intermĂ©diaires en celle matiĂšre, 1" juin 1788. Ibid., C 76-24. 4 Ibid.. Manche. C 629. A Moon-d'Klle, rĂ©forme d'un rĂčle d'imposition en prĂ©sence d'un dĂ©lĂ©guĂ© du bureau intermĂ©diaire de Saint-LĂč. 5 Interventions de ce genre pour les presbytĂšres de Marigny, de-Saint-Germain- d Elle, de Saint-Pierre-de-Cenilly Ă©lection de Saint-LĂŽ, Ibid., Manche, C 629 ; de BoucĂ©, de Champeaux, de DragĂ© Ă©lection d'Avranches, Ibid., C 238; de Vretot, de Montaigu Ă©lection de Valognes, Ibid., C 633 ; de BĂ©ny Ă©lection de Vire, du Mes- nil-Aubert Ă©lection de Coutances, Ibid., Calvados, C 7628; de Fresnes Ă©lection de Mortain, Ibid.. C 7624 ; de Colomby, de Saint-Aubin-d'Arquenay, de Blainville Ă©lec- tion de Caen, ibid. 7664 bis ; pour les Ă©coles de Subligny, Ibid., Manche, C 238 et de Ibid., C 633. ijj Jbid., Calvados, C 7817-8088. Observations gĂ©nĂ©rales sur l'Ă©tat des paroisses des Ă©lections de Caen et de Vire. LES BUREAUX INTERMEDIAIRES ET LES TRIBUNAUX D ELECTION 133 par la municipalitĂ© de Montmartin, dans l'Ă©lection de Carentan. L'homme d'affaires de la duchesse de Montmorency nĂ©e de Matignon, un certain Germain, jouissait d'une grande influence dans cette paroisse. Il n'Ă©tait pas membre de la municipalitĂ©, mais y rĂ©gnait par une coterie de famille. A son instigation la municipalitĂ© refusa de rĂ©former le rĂŽle de la taille qu'elle avait imparfaitement dressĂ©. Dans un libelle injurieux, Germain insulta le syndic municipal, rebelle Ă  son influence, le procureur-syndic du dĂ©partement de Carentan, le bureau intermĂ©diaire et la Com- mission intermĂ©diaire provinciale, et il menaça de faire casser leurs arrĂȘtĂ©s par l'intervention du baron de Breteuil. Le bureau de Carentan fit entendre des plaintes assez vives et se crut oblige de demander la destitution des dĂ©putĂ©s municipaux rĂ©calci- trants '». Les relations des bureaux intermĂ©diaires et des tribunaux d'Ă©lection qui siĂ©geaient au mĂȘme chef-lieu auraient dĂ» ĂȘtre courtoises et mĂȘme cordiales. Plus d'un officier d'Ă©lection Ă©tait en mĂȘme temps administrateur de dĂ©partement tels Le Tuilier, procureur du roi Ă  l'Ă©lection de Coutances, Besnard Duchesne Ă  celle de Valognes, Le Monnier, prĂ©sident et Courtin de la Ger- vaisiĂšre, conseiller Ă  l'Ă©lection de Saint-LĂŽ. Monlien de Perthou, prĂ©sident honoraire d'Ă©lection, Ă©tait membre du bureau de Vire. Bureaux et Ă©lections entrĂšrent pourtant en conflit Ă  propos de la taille. AprĂšs l'Ă©dit de mai 1788, qui abolissait les tribunaux d'exception en France, un arrĂȘt du Conseil du 8 aoĂ»t avait rĂ©glĂ© les formes nouvelles de la rĂ©partition de la taille sans le concours des officiers d'Ă©lection supprimĂ©s. Partout les bureaux intermĂ©- diaires avaient agi seuls '-'. Leur inexpĂ©rience et le refus de com- munication par les greffiers d'Ă©lection des rĂŽles de dĂ©partement nĂ©cessaires Ă  la rĂ©gularitĂ© de l'assiette rendirent leur tĂąche diffi- cile ‱'*. Elle s'accomplissait cependant, quand les tribunaux d'Ă©lection furent rĂ©tablis, par la dĂ©claration du 28 septembre 1788. Le premier acte de ceux-ci fut de protester, au nom de la lĂ©galitĂ©, contre les nouvelles formes de rĂ©partition et de recouvrement 1 Arch. Manche, C 476. Registre de correspondance du dĂ©partement de Carentan. 2 Ibid., Calvados, C 7775. 3 Ces greffiers allĂ©guaient alors comme prĂ©texte de leur refus la fermeture des greffes sur la porte desquels l'intendant avait lui-mĂȘme apposĂ© son sceau ; ainsi Ă  Avranches, lbid., Calvados, C 1398 ; Ă  Mortain, Ibid., 7707, et Ă  Carentan, Ibid., Manche, C 476. 134 CONFLIT AU SUJET DE LA TAILLE des impĂŽts, qu'on avait substituĂ©es Ă  des rĂšgles anciennes, sages et sĂ»res » 1. EncouragĂ©s dans leur rĂ©sistance par la Cour des Aides de Rouen, les officiers d'Ă©lection firent leurs chevauchĂ©es ordinaires 2, dĂ©niĂšrent aux bureaux intermĂ©diaires et aux muni- cipalitĂ©s rurales le droit de rĂ©partir la taille, nommĂšrent des collecteurs d'office suivant l'ancien usage et condamnĂšrent parfois Ă  de fortes amendes les syndics et collecteurs qui se refu- saient Ă  leur obĂ©ir $. Des lettres patentes adressĂ©es Ă  la Cour des Aides de Rouen ne produisirent aucun effet ; celle-ci diffĂ©ra leur enregistrement. Le seul remĂšde que le roi put trouver pour trancher le conflit fut de rendre Ă  l'intendant le dĂ©partement des impositions pour 1789 4-'. L'opiniĂątretĂ© des tribunaux d'Ă©lection avait eu raison de l'autoritĂ© royale. Leur animositĂ© contre les AssemblĂ©es provinciales » ^ avait triomphĂ© et l'ancien ordre de choses Ă©tait rĂ©tabli pour un an, au grand dĂ©pit de la Commission et des bureaux intermĂ©diaires humiliĂ©s 6. En matiĂšre de travaux publics, les bureaux intermĂ©diaires s'Ă©taient vu confier la surveillance et l'inspection des routes, l'adjudication et la rĂ©ception des Ă©difices communaux, Ă©glises, presbytĂšres et Ă©coles. Ils avaient Ă  leurs ordres les ingĂ©nieurs de dĂ©partement, leurs conducteurs et piqueurs et tous les voyers ou cantonniers rĂ©pandus dans leur ressort pour l'entretien des chemins. Les relations entre bureaux et ingĂ©nieurs furent aussi 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7700. 2 Le 11 novembre 1788, le bureau intermĂ©diaire de Caen informe la Commission intermĂ©diaire paroissiale que M. de Chaumotel, syndic de la municipalitĂ© de BrĂ©- ville, vient de lui adresser un billet imprimĂ© qui a Ă©tĂ© remis au curĂ© de la paroisse par un sieur Bisson. Le curĂ© est priĂ© de prĂ©venir ses paroissiens que le dimanche suivant, M. Boulogne, conseiller Ă©lu auquel la sergenterie de Varaville est Ă©chue pour son dĂ©partement des visites et chevauchĂ©es se trouvera en sa maison de Bobe- homme pour s'informer de ceux qui sont dĂ©cĂ©dĂ©s ». Ibid., 7664 bis. 3 Le 29 novembre 1788, le bureau intermĂ©diaire d'Avranches envoie Ă  la Com- mission intermĂ©diaire provinciale copie des ordonnances de condamnations pronon- cĂ©es par le tribunal de l'Ă©lection contre les paroisses dont les habitants n'ont pas comparu aux chevauchĂ©es pour la nomination des collecteurs selon l'ancienne forme. Arch. dĂ©p., Manche, C 238. — A Carentan, plaintes du bureau contre le pro- cureur de l'Ă©lection, qui a fait condamner Ă  50 livres d'amende d'assez nombreux syndics de ce dĂ©partement. Ibid., C 476. 4 Ibid., Calvados, C 4398, 7776. 5 Le mot est du procureur-syndic de Carentan 6 Le bureau intermĂ©diaire de Caen dĂ©plore la dĂ©cision du roi qui va enlever aux populations toute confiance dans les administrations provinciales. Arch dĂ©p., Cal- vados. C 7776. — Le 9 dĂ©cembre 1788, il pria Necker de prendre sous sa protection les habitants de la campagne, afin de les prĂ©server des vexations et discussions continuelles qu'ils Ă©prouvent journellement de la part des juges et procureurs de l'Ă©lection, dont ils dĂ©sirent et sollicitent la suppression. » Ibid., C 7666. LES BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET LES INGÉNIEURS 135 tendues que celles de la Commission provinciale et de l'ingĂ©nieur en chef, et pour les mĂȘmes motifs. Les ingĂ©nieurs se plaignaient de l'ingĂ©rence continuelle de ces avocats et gens de loi dans les questions oĂč leur compĂ©tence technique Ă©tait trĂšs discutable. Celui de Granville exprime Ă  LefĂšvre, son ingĂ©nieur en chef, la mortification qu'il Ă©prouve Ă  prendre l'heure d'un particulier de Granville, que le bureau intermĂ©diaire de Coutances a dĂ©signĂ© pour faire la visite des routes de son district. Vous m'aviez Ă©crit, mon vĂ©nĂ©rable, que les assemblĂ©es d'Ă©lection non plus que leurs bureaux intermĂ©diaires n'auraient aucun ordre Ă  donner, et que tout le service se ferait entre vous et moi. Ne devrais- je pas tomber des nues en recevant une lettre impĂ©rative du bureau intermĂ©diaire de Coutances et en me voyant obligĂ© de prendre les ordres d'un particulier de ma ville? » * Est-il besoin d'ajouter que les ingĂ©nieurs ne rĂ©pondaient pas avec empressement aux appels des bureaux intermĂ©diaires et qu'ils n'y rĂ©pondaient pas toujours sur un ton correct '2>. La corres- pondance Ă©changĂ©e entre les administrateurs de dĂ©partement et les procureurs-syndics provinciaux est remplie de plaintes contre la lenteur et l'insubordination des ingĂ©nieurs, les retards que ceux-ci apportent aux devis des routes, leur mauvais vouloir gĂ©nĂ©ral i. Ceux-ci Ă  leur tour se plaignent de la surcharge qu'on leur impose en les obligeant Ă  dresser les projets de construction ou de rĂ©paration des Ă©glises et presbytĂšres ; ils rappellent leurs appointements impayĂ©s et menacent de dĂ©missionner 4^. La tension des rapports entre les bureaux intermĂ©diaires d'une part, les tribunaux d'Ă©lection et le corps des ponts et chaussĂ©es de l'autre, Ă©tait due Ă  une cause d'ordre gĂ©nĂ©ral. C'Ă©tait la rĂ©sis- tance de l'ancien rĂ©gime contre le nouveau. Cette mĂȘme cause devait influer sur les relations de ces bureaux avec les subdĂ©lĂ©- guĂ©s de l'intendant. Ici, la rivalitĂ© d'attributions Ă©tait encore plus accusĂ©e ; l'antagonisme Ă©tait en quelque sorte plus Ă©troit, 1; Arch. dĂ©p.,C 3088. Lettre de Demontrocher, ingĂ©nieur Ă  Granville, 1? mars 1788. 2 Ibid., C 7G22. Plaintes du bureau de Valognes contre l'ingĂ©nieur DĂ©forme, avril 1788. 3 Registre de correspondance du dĂ©partement de Carentan. Ibid., Manche, C 176. Ibid., Calvados, C 8567, 8570. 4 Ibid., C 7623, 7624. Il y eut cependant des exceptions, et l'on voit Didiet, ingĂ©- nieur du dĂ©partement de Caen, offrir aux membres du bureau intermĂ©diaire de ce dĂ©partement, le 30 juillet 1790, Ă  la veille de la cessation de leurs fonctions, en signe d'hommage et en souvenir de leurs bonnes relations, un exemplaire de son ouvrage sur les poids et mesures. Ibid., 7664 bis. 136 LES BUREAUX INTERMÉDIAIRES ET LES SUBDÉLÉGUÉS et les motifs de froissement rĂ©ciproque plus nombreux. Presque partout, c'Ă©taient les subdĂ©lĂ©guĂ©s qui ouvraient le feu. Le subdĂ©- lĂ©guĂ© de Bayeux, GĂȘnas, avertissait l'intendant qu'il n'Ă©tait disposĂ© Ă  fournir aucun renseignement au bureau intermĂ©diaire pour la formation du rĂŽle de la capitation des non-taillables ; s'il aimait Ă  travailler pour son chef, indulgent et bon, il Ă©tait dĂ©cidĂ© a ne rien faire pour les autres l1. Celui de Vire, Demor- treux, refusait de confier en dĂ©pĂŽt au bureau intermĂ©diaire les procĂšs-verbaux de formation des municipalitĂ©s de son ressort 2. Lavalley de la Hogue, subdĂ©lĂ©guĂ© de Carentan, sembla faire cause commune avec les officiers de l'Ă©lection et, aprĂšs avoir brisĂ© les scellĂ©s apposĂ©s Ă  ce tribunal, se contenta de remettre les clefs du greffe au procureur du Roi, au lieu de faire donner aux procureurs-syndics du dĂ©partement les piĂšces de ce greffe nĂ©cessaires Ă  l'assiette de la taille. Il allĂ©gua que ce n'Ă©tait point sa mission. D'oĂč mĂ©contentement du bureau intermĂ©diaire et de l'assemblĂ©e de dĂ©partement, prĂ©cisĂ©ment rĂ©unie Ă  cette Ă©poque, et contrariĂ©e dans ses opĂ©rations par tous ces retards. La Hogue fut dĂ©noncĂ© par le comte d'Osseville, prĂ©sident du bureau ; l'assemblĂ©e jugea sa conduite insidieuse, portant les caractĂšres marquĂ©s d'une dĂ©sobĂ©issance prĂ©judiciable aux droits du roi, et d'un manque absolu d'Ă©gards et d'honnĂȘtetĂ© envers l'assem- blĂ©e et son chef » 3. C'Ă©tait la rupture, assez grave, entre les reprĂ©sentants des deux administrations, au dĂ©triment de la bonne marche des services administratifs. MĂ©contents des procĂ©dĂ©s des subdĂ©lĂ©guĂ©s, les bureaux inter- mĂ©diaires n'hĂ©sitaient pas Ă  en faire remonter la responsabilitĂ© jusqu'Ă  l'intendant. Tel le bureau de Vire, qui dans sa querelle avec de Mortreux reprochait Ă  Cordier de Launay de mettre sa volontĂ© Ă  la place d'une loi qui n'existait pas » W. Les renseigne- ments demandĂ©s aux bureaux de l'intendance Ă©taient-ils tardifs ou trop peu abondants, les administrateurs de dĂ©partement jetaient les hauts cris Il semble, Ă©crivent ceux de Caen, qu'on cherche Ă  nous tenir dans l'impuissance d'opĂ©rer le bien qu'on doit attendre d'une administration vraiment patriotique » 5. Le bureau de Bayeux fut un de ceux qui s'Ă©levĂšrent avec le plus de 1 Arch. dĂ©p., C 7624. Lettre du 2 dĂ©cembre 1787. 2 Ibid., C 7730. Plaintes du procureur-syndic de Vire, du 25 novembre 1787 3 Ibid., 7690. Ibid., Manche, C 476. 4 Ibid , Calvados, C 7730. 5 Ibid., C 7666. LES BUREAUX INTERMEDIAIRES ET L'INTENDANT 137 fermetĂ© contre l'autoritĂ© de l'intendant. Il reprocha vivement Ă  la Commission provinciale son attitude passive. Nous exami- nons votre position, Messieurs, et nous nous demandons quelle espĂšce de fonction vous remplissez entre Monsieur le Commis- saire dĂ©parti et nous. L'activitĂ©, les voyages, les visites, l'exa- men du dĂ©tail, voilĂ  notre attribution ; celle de M. l'Intendant est de rendre ses ordonnances sur nos opĂ©rations. Nous voyons avec peine que la vĂŽtre Ă  cet Ă©gard est entiĂšrement passive. Ce que nous aurons trouvĂ© Ă  propos, ce que vous aurez confirmĂ©, une opinion contraire de la part de M. l'Intendant peut en suspendre l'exĂ©cution. » Pourquoi laisser Ă  l'intendant le con- trĂŽle supĂ©rieur, la dĂ©cision suprĂȘme? Sa capacitĂ© juridique est invoquĂ©e comme prĂ©texte est-elle suffisante Ă  justifier une telle procĂ©dure? On ne fait pas attention que nos assemblĂ©es sont en partie composĂ©es de jurisconsultes instruits. Quelle que soit la dignitĂ© de M. l'Intendant, ses qualitĂ©s personnelles auxquelles nous ne pouvons qu'applaudir, la composition des assemblĂ©es nous donne lieu d'attendre de leur part une Ă©gale prudence dans les dĂ©cisions. » Aussi le bureau intermĂ©diaire rĂ©clame-t-il hardiment pour la Commission provinciale le monopole de l'autoritĂ© executive » nl RĂ©sumons en quelques lignes les observations de dĂ©tail prĂ©- sentĂ©es dans l'exposĂ© prĂ©cĂ©dent. La Commission intermĂ©diaire provinciale et les bureaux intermĂ©diaires qui fonctionnaient sous son contrĂŽle furent composĂ©s d'hommes compĂ©tents et en gĂ©nĂ©ral zĂ©lĂ©s ; les procureurs-syndics attachĂ©s comme agents d'exĂ©cution Ă  ces corps administratifs Ă©taient tous Ă  la hauteur de leur tĂąche. L'activitĂ© des uns et des autres est un fait indĂ©niable. Mais des obstacles de toutes sortes empĂȘchĂšrent cette activitĂ© d'ĂȘtre efficace. L'administration nouvelle, Ă  ses deux degrĂ©s, dut compter avec de sĂ©rieuses difficultĂ©s. Du cĂŽtĂ© des institutions rĂ©cemment Ă©tablies, comme les municipalitĂ©s, l'inexpĂ©rience et parfois la dĂ©fiance et l'insoumission furent les principales causes d'achoppement. Les institutions anciennes, tribunaux d'Ă©lection et Cour des aides, corps des ponts et chaussĂ©es, subdĂ©lĂ©gations 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 8262. Il ne s'agit plus, ajoute le bureau intermĂ©diaire, d'une simple surveillance sur les opĂ©rations des assemblĂ©es, mais bien d'un partage de l'autoritĂ© executive ; si cette autoritĂ© est mi-partie, si l'exercice en est encbe- vĂȘtrĂ©, si ses diffĂ©rents mobiles ne coĂŻncident pas avec la plus exacte prĂ©cision, il faut renoncer Ă  l'espoir des avantages que la bienfaisance du roi se promettait de notre institution. » 138 l'administration dĂ©sorganisĂ©e et intendance, loin d'apporter leur concours aux nouveaux pou- voirs rĂ©gionaux, les jalousĂšrent, leur firent une guerre tantĂŽt sourde et tantĂŽt ouverte, paralysĂšrent Ă  tout moment leur action. Aussi, dĂšs 1788, des germes de dĂ©cadence apparaissent aux enthousiasmes du dĂ©but succĂšdent trĂšs vite les dĂ©sillusions et le dĂ©couragement. Les ressorts de l'administration se brisent dans un conflit sans issue. Vienne le mouvement rĂ©volutionnaire, nul pouvoir Ă©tabli n'aura assez de vigueur pour le contenir ou le diriger. Le pays est mĂ»r pour l'anarchie administrative. IMPORTANCE DES ASSEMBLÉES DE DEPARTEMENT DE 1788 139 CHAPITRE VII LES ASSEMBLÉES DE DÉPARTEMENT OCTOBRE 1788 Importance des assemblĂ©es de dĂ©partement de 1788. — Leur composition. Leurs bureaux et leur programme de travail. — L'enquĂȘte Ă©conomique de 1788. — VƓux de ces assemblĂ©es en matiĂšre 1° d'impositions taille, capitation non taillable, vingtiĂšmes ; 2° de travaux publics routes, ponts, passage du Vey ; 3° de bien public agriculture et Ă©levage, industrie, commerce, mendicitĂ©, hygiĂšne ; 4° d'administration obser- vations sur le RĂšglement du 15 juillet 1787. — Tendance gĂ©nĂ©rale de ces vƓux et observations, Ɠuvre de privilĂ©giĂ©s. Par ses instructions du 3 novembre 1787, le roi avait fixĂ© au mois d'octobre de chaque annĂ©e la tenue des assemblĂ©es de dĂ©partement dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, et limitĂ© Ă  une quin- zaine de jours la durĂ©e de leur session. Elles devaient prĂ©cĂ©der la tenue de l'AssemblĂ©e provinciale, afin que leurs travaux pussent Ă©clairer les dĂ©cisions de celle-ci. Cette mesure marquait nettement leur caractĂšre de subordination, les plaçait Ă  un rang secondaire dans l'organisation administrative de la province. Or, en 1788, par suite de la convocation des Notables, les AssemblĂ©es provinciales ne se rĂ©unirent point. Cette interruption de leur tenue, que Necker dĂ©clarait momentanĂ©e » a, et qui devait ĂȘtre dĂ©finitive, fit passer au premier plan les assemblĂ©es de dĂ©partement, qui devenaient les plus hautes assemblĂ©es dĂ©li- bĂ©rantes de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. Les procĂšs-verbaux de leurs dĂ©libĂ©- rations devaient ĂȘtre transmis Ă  Necker par la voie des procureurs syndics sans aucun intermĂ©diaire. FiĂšres de ce droit d'adresse que les circonstances leur avaient accordĂ©, les neuf assemblĂ©es de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen profitĂšrent de leur session de 1788, qui devait ĂȘtre aussi la derniĂšre, pour 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7667. Necker la motiva par la prĂ©sence obligatoire d'assez nombreux prĂ©sidents et membres des AssemblĂ©es provinciales Ă  l'AssemblĂ©e des notables, convoquĂ©e pour le 3 novembre 1788. 140 COMPOSITION DES ASSEMBLÉES DE DÉPARTEMENT remplir le vaste programme de travail qu'avaient dressĂ© leurs procureurs-syndics et leurs bureaux intermĂ©diaires, et soumettre Ă  un examen des plus sĂ©rieux les divers objets dont l'administra- tion leur Ă©tait confiĂ©e. La composition de ces assemblĂ©es n'avait pas trĂšs sensiblement variĂ© depuis 1787. Les modifications qui s'y Ă©taient introduites Ă©taient dues Ă  des dĂ©cĂšs, des dĂ©missions ou des incompatibilitĂ©s. A Bayeux, une lettre d'excuses de l'Ă©vĂȘque prĂ©sident, reçue Ă  la derniĂšre heure, força l'assemblĂ©e Ă  se choisir comme prĂ©sident intĂ©rimaire le chevalier de BernĂ© . Trois projets sont prĂ©sentĂ©s Ă  l'assemblĂ©e d'A- vranches pour le tracĂ© . En un mot, une active campagne fut entreprise, et toute la Normandie se crut Ă  la veille de rede- venir une grande province indivisible et indĂ©pendante. La gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen prit une grande part Ă  cette campagne. Ses diffĂ©rents organes administratifs, Commission et bureaux intermĂ©diaires, assemblĂ©es de dĂ©partement, municipalitĂ©s urbai- nes et rurales se firent les interprĂštes du vƓu public. Ils s'y crurent autorisĂ©s par les termes de l'arrĂȘt du Conseil du 5 juillet 1788, invitant les officiers municipaux des villes et des commu- nautĂ©s ainsi que tous les corps constituĂ©s, Ă  rechercher dans leurs archives tout ce qui concernait les anciens Etats gĂ©nĂ©raux du royaume. Leur grande habiletĂ© consista Ă  lier deux questions distinctes, celle des Etats gĂ©nĂ©raux et celle des Etats provinciaux, Ă  subordonner la solution de la premiĂšre Ă  celle de la seconde, Ă  demander que le rĂ©tablissement des Etats particuliers de la Normandie fĂ»t antĂ©rieur Ă  la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux. Nulle part la nĂ©cessitĂ© d'associer ces deux mesures ne fut mieux exposĂ©e que dans le mĂ©moire rĂ©digĂ© aprĂšs la tenue d'une assem- blĂ©e gĂ©nĂ©rale Ă  l'hĂŽtel de ville de Caen, le 30 septembre 1788, par les deux commissaires dĂ©signĂ©s Ă  cet effet Gosset de la Rousserie, conseiller au bailliage, et Costy, avocat, bailli de Courseulles. 1 Un MĂ©moire concernant les anciens Etals de Normandie, manuscrit non datĂ©, mais qui a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© dans le dernier trimestre de 1788, porte la signature du duc d'Harcourt. Il est conservĂ© aux archives du chĂąteau d'Harcourt, liasse 337. — Dans le mĂȘme dossier ligure une note de la main du duc, relative aux Etals gĂ©nĂ©- raux de 1302 Ă  1496. 2 Ibid., liasse 338. Lettre de dom Lenoir au duc d'Harcourt, 30 octobre 1788. 3 Ibid., liasse 338. Lettres Ă©crites au duc d'Harcourt par Duperie de Lisle, lieu- tenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen, les 18 aoĂ»t, 10 novembre et 7 dĂ©cembre 1788, envoi de renseignements extraits des archives du bailliage et de l'hĂŽtel de ville de Caen, et d'une nouvelle Ă©dition de la Charte aux Normands. — Cf. Aperçu des cahiers des Etats gĂ©nĂ©raux de la province de Normandie, tenus vers la fin du XVIe siĂšcle et dans les cinquante-cinq premiĂšres annĂ©es du XVIIe, pour servir de continuation aux Ă©claircissements donnĂ©s par le bailliage d'Orbec, s. 1. 1788, 27 p. 4 Ibid., liasse 338. Lettre du marquis d'HĂ©ricy-Vaussieux Ă  la duchesse d'Har- court, 5 aoĂ»t 1788. SON POINT DE DEPART 159 Si la Normandie, disaient-ils, n'a point, avant l'AssemblĂ©e de la nation, prĂ©sentĂ© ses cahiers, les dolĂ©ances du peuple, les impĂŽts qui dĂ©truisent son commerce, ses manufactures et ses fabriques, ceux qui nuisent au progrĂšs de l'agriculture, et les impĂŽts qu'il serait possible de substituer, les formes les plus c avantageuses de perception, l'abus de quelques privilĂšges particuliers, comment se formerait l'ouvrage important que Votre MajestĂ©, aidĂ©e des lumiĂšres de son peuple, a pour dĂ©sir de conduire Ă  sa perfection ? . . . Il semble donc que chacune des provinces doit, avant l'AssemblĂ©e de la Nation, mĂ©diter et approfondir ses ressources particuliĂšres comme ses besoins, et concourir Ă  la plus grande utilitĂ© du gouvernement. . . L'uti- e litĂ© des Etats provinciaux est trop vivement sentie pour que nous n'ayons pas l'heureux espoir d'en voir la convocation prochaine prĂ©cĂ©der l'AssemblĂ©e de la Nation » W. Il semble que le point de dĂ©part de la campagne des Etats provinciaux dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen fut un mĂ©moire du bureau intermĂ©diaire de Bayeux. En accusant le 10 septembre 1788, Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen rĂ©ception de l'arrĂȘt du Conseil du 8 aoĂ»t qui venait de lui parvenir, ce bureau lui tĂ©moignait toute sa joie d'une si heureuse nouvelle et affirmait sa foi dans le prochain rĂ©tablissement des Etats normands, qui Ă©taient un droit pour la province. Il adressait quelques jours plus tard, le 15 septembre, un mĂ©moire sur cet objet au comte de Balleroy, procureur -syndic provincial ; Ă©mettant d'assez curieuses considĂ©rations sur les Etats gĂ©nĂ©raux dont on se lasse- rait avant cinquante ans, il demandait des Etats provinciaux superposĂ©s aux trois AssemblĂ©es provinciales, et s'applaudissait de la soliditĂ© de la rĂ©clamation, jointe Ă  la grandeur de l'exem- pie » $. Les autres dĂ©partements de la Basse-Normandie acquiescĂšrent vite Ă  ce projet. En Ă©crivant aux municipalitĂ©s de leur ressort pour demander leur vƓu sur la forme de la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, les procureurs-syndics de Coutances leur annoncĂšrent que la future assemblĂ©e de dĂ©partement s'occuperait des Etats provinciaux de la Normandie et qu'elle dĂ©libĂ©rerait sur les avantages qui peuvent rĂ©sulter de leur rĂ©tablissement ou de la continuation des AssemblĂ©es provinciales, ou enfin du concours 1 Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7641. 160 PARTICIPATION DES MUNICIPALITES RURALES ET URBAINES des deux administrations » * ; ils les invitĂšrent Ă  fournir leurs observations sur cet objet important. Dans plus d'une paroisse des dĂ©partements de wSaint-LĂŽ, de Coutances, de Valognes, des dĂ©libĂ©rations furent prises en faveur du rĂ©tablissement des Etats particuliers '2. Toutes les paroisses du dĂ©partement de Caen furent appelĂ©es Ă  se prononcer sur cette question, et les procu- reurs syndics de Caen, leur envoyĂšrent mĂȘme des modĂšles impri- mĂ©s de dĂ©libĂ©rations. Les AssemblĂ©es paroissiales se tinrent pour la plupart le dimanche 5 octobre ; quelques-unes le 12 octobre. Il y eut lĂ  comme un rĂ©fĂ©rendum provoquĂ© parles administra- tions locales, et dont les traces nous ont Ă©tĂ© conservĂ©es i. Il est certain que le mouvement n'a pas Ă©tĂ© spontanĂ©, mais que l'on a obĂ©i Ă  un mot d'ordre. 'Quelques paroisses refusĂšrent mĂȘme de dĂ©libĂ©rer et ajournĂšrent leur dĂ©cision Ă  l'Ă©poque oĂč l'on saurait la forme de ces anciens Etats pour voir s'il y avait vraiment utilitĂ© Ă  les rĂ©tablir » *\ Dans les villes, l'initiative fut plus grande. DĂšs le 30 septembre, on l'a vu plus haut, une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des notables rĂ©unie Ă  l'hĂŽtel de ville de Caen dĂ©cidait Ă  l'unanimitĂ© de solliciter du Roi la convocation des Etats de la province de Nor- mandie, pour prĂ©parer le grand ouvrage des Etats gĂ©nĂ©raux » ; le 22 octobre, la mĂȘme ville dĂ©putait deux Ă©chevins Ă  Versailles pour obtenir cette convocation immĂ©diate !7il Le 15 octobre, dans une requĂȘte oĂč ils rĂ©sumaient l'histoire des anciens Etats nor mands, les officiers municipaux d'Avranches rĂ©clamaient le bĂ©- fice immĂ©diat de l'arrĂȘt du 8 aoĂ»t °. Le 17 octobre c'Ă©tait le tour 1 Arch. comm., Granville, registre Iter. DĂ©libĂ©ration du 17 octobre 1788. 2 Exemples Ă  Dampierre, Sainte-Suzanne-sur- Vire, Saint-Jean-de-Uaye dĂ©par- tement de Saint-Lo ; Ă  Valcanville, Saint-Pierre-Eglise dĂ©partement de Valognes; Muneville-sur-Mer, Orval dĂ©partement de Coutances. Arch. communales de ces diverses communes registres des dĂ©libĂ©rations octobre 1788. Pour Daye, Arch. dĂ©p., Calvados non inventoriĂ©. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7632-7635. 4 Ibid.. C 7675. — Le curĂ© de Maisoncelles Ă©crit le 13 octobre que les savants du pays disent que les Etats n'auront rien d'utile, et pie d'ailleurs les AssemblĂ©es provinciales sont absolument supprimĂ©es de jeudi dernier. » Tbid., C 7675. — Les officiers municipaux de Granville pensent que la plupart des communautĂ©s de campagne ne formeront pas de vƓu » comme l'espĂ©raient le^ procureurs-syndics de Coutances. Arch. comm., Granville, registre lier, dĂ©libĂ©ration du 17 octobre 1788. — Toutefois celles-ci semblent avoir adhĂ©rĂ© au projet, si l'on en croit le rapport du bureau du Bien public de Coutances. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7699. 5 Arch. comm., Caen. Registre des dĂ©libĂ©rations BB 96, 30 septembre 1788 et 22 oc- tobre. Cf. 6 Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. Lettre des officiers municipaux d'Avran- ches au duc d'Harcourt, 15 octobre 1788. PARTICIPATION DES ASSEMBLEES DE DEPARTEMENT lfl du Conseil gĂ©nĂ©ral de Granville1; le 26 octobre, des officiers municipaux et des notables de Saint -LĂŽ 2 ; le 2 novembre de l'hĂŽtel de ville de Carentan ; le 7, de l'hĂŽtel de ville de Cou- tances W. Le 19 novembre, le maire et les Ă©chevins de Cherbourg croient au retour trĂšs prochain des Etats, et tout en y rĂ©clamant pour leur ville une dĂ©putation particuliĂšre, remercient le roi d'un si grand bienfait . Le 18, un mĂ©moire remarquable du comte de Faudoas, un des procureurs syndics du dĂ©partement de Caen, servait de base Ă  la rĂ©daction d'un arrĂȘtĂ© en dix articles sur la formation et le fonctionnement des Etats de Normandie 1,. Le 20 octobre, six jours avant la dĂ©libĂ©ration de l'hĂŽtel de ville, l'assemblĂ©e de Saint-LĂŽ prenait un arrĂȘtĂ© relatif au mĂȘme objet 1]. Celui de l'assemblĂ©e d'Avranches, au contraire, datĂ© du 21 octobre, suivit de six jours la dĂ©libĂ©ration de la municipalitĂ© 1 Arch. comm., Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations 1 1er, dĂ©libĂ©ration du 17 oc- tobre 1788. Cf. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6354, extrait imprimĂ© des registres des dĂ©li- bĂ©rations, 6 p. in-4°, et leltre d'envoi des officiers municipaux, 21 octobre 1788. 2 Arch. chĂąteau d'Hareourt, liasse 338, avec lettre d'envoi du 30 octobre 1788. 3 Arch. comm., Carentan, Registre de dĂ©libĂ©rations, 2 novembre 1788. 4 Arch. dĂ©p.. Calvados, C 6353. Extrait imprimĂ© du registre de dĂ©libĂ©rations. 12 p. in-8°, et lettre d'envoi du 15 novembre 1788. 5 Arch. comm., Cherbourg, BBS et AA64. Cf. Arch. chĂąteau d'Hareourt, liasse 338. G Ibid., Bayeux. Registre de dĂ©libĂ©rations n° 13, dĂ©libĂ©ration du 8 dĂ©cembre Hss 7 Une circulaire des procureurs-syndics provinciaux, envoyĂ©e le "21 septembre 1788 a leurs collĂšgues des neuf dĂ©partements, aurait contribuĂ© Ă  grouper les volon- tĂ©s en ce sens. Les procureurs-syndics de Vire y t'ont allusion. Arch. dĂ©p.. Calva- dos, C 7725. 8 Ibid., C 7707. 9 Ibid., C 7690. 10 Arch. chĂąteau d'Hareourt, liasse 338. llj Arch. dĂ©p., Calvados. C 7714. 11 12 l'appui du duc d'harcourt de cette ville l. A Bayeux, l'abbĂ© de Pradelle, qui avait Ă©tĂ© un des initiateurs de toute la campagne par ses Recherches histo- riques sur les Etats gĂ©nĂ©raux et provinciaux, eut des imitateurs. Deux membres de l'assemblĂ©e, le baron d'Ecrammeville et l'avo- cat Bunouville lurent le 18 et le 22 octobre des mĂ©moires qui servirent de base au projet du bureau du Bien public, ratifiĂ© le 25 octobre 2. Le mĂȘme jour, l'assemblĂ©e de Vire prenait la mĂȘme rĂ©solution 4 DIVERGENCES SUR LE MODE D'ORGANISATION DES ÉTATS la plupart des membres y siĂ©geaient avec voix dĂ©libĂ©rative, en vertu de leurs titres et qualitĂ©s. Ce droit hĂ©rĂ©ditaire de sĂ©ance Ă©tait incompatible avec les mƓurs du temps ; le principe Ă©lectif devait lui ĂȘtre substituĂ©. On y tenait d'autant plus que les Assem- blĂ©es provinciales ne tiraient pas leur origine de libres Ă©lections ». Sur ce point il n'y avait qu'un cri W. Quelle devait ĂȘtre la circonscription Ă©lectorale? Conserverait-on le bailliage comme dans l'ancien systĂšme? Les quarante-huit districts judiciaires de la Normandie, bailliages, vicomtes ou hautes justices assimilĂ©es auraient envoyĂ© chacun un nombre dĂ©terminĂ© de dĂ©putĂ©s des trois ordres aux Etats provinciaux. Tel Ă©tait l'avis de l'assemblĂ©e de Bayeux. Les autres assemblĂ©es proposĂšrent la circonscription financiĂšre ou administrative exis- tante l'Ă©lection ou dĂ©partement ces deux termes dĂ©signant le mĂȘme ressort dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Ces espĂšces d'arron- u dissements, en gĂ©nĂ©ral assez bien faits, disaient les dĂ©putĂ©s de Saint-LĂŽ, semblent concentrer plus particuliĂšrement les intĂ©rĂȘts de chaque district par la distribution individuelle d'une masse d'impĂŽts ordonnĂ©s par le Conseil. La rĂ©union des intĂ©rĂȘts rapproche plus les individus, ils se connaissent mieux, et sont plus Ă  portĂ©e de connaĂźtre les qualitĂ©s personnelles des membres qu'ils doivent choisir » 'lK MĂȘme fluctuation d'avis sur le nombre de dĂ©putĂ©s que devaient contenir les Etats provinciaux. L'assemblĂ©e de Coutances, qui sollicitait des Etats particuliers pour la seule gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, fixait ce nombre Ă  108 douze par Ă©lection ; l'assemblĂ©e de Bayeux en adoptant le bailliage comme base Ă©lectorale, demandait 195 dĂ©putĂ©s pour la province entiĂšre {i\ La municipalitĂ© de Granville, considĂ©rant la grande population de la Normandie, la somme Ă©norme d'impĂŽts qu'elle acquittait, demandait qu'on accordĂąt Ă  cette province un nombre de reprĂ©sentants propor- tionnĂ© Ă  son influence politique, et proposait le chiffre de 576 4>. 1 Il n'y aura plus d'autre droit de sĂ©ance que celui rĂ©sultant d'une Ă©lection libre », dĂ©cide l'assemblĂ©e de Saint-LĂŽ. Arch. dĂ©p., Manche, »-i 628. — - nĂ©gociants pour Rouen, Caen et Le Havre. 4 Arch. comm., Granville. Reg. des dĂ©libĂ©rations, 17 octobre 1788. Cf. Arch. chĂą- teau d'Harcourt, liasse 338. VOEU GÉNÉRAL FAVORABLE AU VOTE PAR TETE 165 Quelle devait ĂȘtre dans l'ensemble de cette reprĂ©sentation la part proportionnelle de chaque ordre? S'appuyant de l'exemple du Roi, qui avait dĂ©cidĂ© le doublement du Tiers dans la forma- tion des AssemblĂ©es provinciales, l'opinion rĂ©clama la mĂȘme organisation pour les futurs Etats provinciaux. En gĂ©nĂ©ral on dĂ©sirait les voir composĂ©s Ă  l'instar de ceux du DauphinĂ©, c'est-Ă - dire pour un sixiĂšme du clergĂ©, pour un tiers de la noblesse et pour la moitiĂ© du Tiers Ă©tat. Le clergĂ©, abonnĂ©, payait moins que la noblesse et avait droit Ă  une reprĂ©sentation moins forte ; quant au Tiers, qui payait la majeure partie des impĂŽts, et dont les intĂ©rĂȘts Ă©taient souvent en opposition avec ceux des ordres privilĂ©giĂ©s, il Ă©tait juste de l'appeler aux Etats en nombre Ă©gal Ă  celui des ecclĂ©siastiques et des seigneurs rĂ©unis. Si la composition des Etats n'avait point Ă©tĂ© calquĂ©e sur celle des AssemblĂ©es provinciales, la province aurait perdu au change. Le Tiers Ă©tat, aprĂšs avoir Ă©tĂ©, comme le rappelait la municipalitĂ© d'Avranches, le marchepied, le sommier qui porte tout le faix », avait grandi en importance et tenait Ă  ce que l'influence des divers ordres fĂ»t suffisamment balancĂ©e » l. Aussi faisait-il de sa double reprĂ©sentation une condition essentielle du rĂ©tablisse- ment des Etats provinciaux. Au cas oĂč le roi refuserait de la lui accorder, il le suppliait de laisser les choses dans l'Ă©tat oĂč elles Ă©taient actuellement dans la province de Normandie » 2. Ce doublement du Tiers, si Ă©nergiquement rĂ©clamĂ©, ne pouvait produire tous ses effets que s'il Ă©tait accompagnĂ© de son corollaire logique, la fusion des trois ordres en une assemblĂ©e unique au sein des Etats provinciaux. Ainsi se posait la grave question du vote par ordre ou par tĂȘte. Elle Ă©tait dĂ©jĂ  rĂ©solue pour la tenue des AssemblĂ©es provinciales, dont les bureaux avaient Ă©tĂ© formĂ©s par les membres des ordres confondus et dont les suffrages avaient Ă©tĂ© cueillis au scrutin individuel. La plupart des munici- palitĂ©s et des assemblĂ©es de dĂ©partement demandĂšrent l'adoption de la mĂȘme forme pour les Etats provinciaux, cette maniĂšre Ă©tant propre Ă  accĂ©lĂ©rer infiniment les affaires. . . » 3. Des vƓux d'allure aussi dĂ©mocratique devaient rencontrer plus d'un adversaire. A l'assemblĂ©e de Vire, le procureur syndic 1 Lettre des officiers municipaux d'Avranches au duc d'Harcourt, 15 octobre 1788. Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. 2 RequĂȘte de l'assemblĂ©e de dĂ©partement de Caen au Roi, 25 octobre 1788. Ibid., liasse 338. 3 VƓu de l'assemblĂ©e de Saint-LĂŽ. Arch. dĂ©p., Manche, C 628. MĂȘme vƓu des assemblĂ©es de Coutances, de Valognes ; des villes de Caen, Rayeux, Granville. 166 LES PARTISANS DU VOTE PAR ORDRE noble protesta, au nom de ses collĂšgues de la noblesse, presque tous absents, contre le doublement du Tiers et le vote par tĂȘteW. Dans un dĂ©partement voisin, celui de Falaise, dont les voix allaient se mĂȘler Ă  celles des Ă©lecteurs de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen pendant les opĂ©rations de la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, le mĂȘme esprit d'opposition se manifesta. Le procureur-syndic du clergĂ© et de la noblesse, le marquis de SĂ©grie, se fit, dans une lettre au duc d'Harcourt, l'interprĂšte assez violent des craintes que la prĂ©pondĂ©rance future » du Tiers Ă©tat inspirait aux ordres privilĂ©giĂ©s. Cet ordre, dit-il, Ă©tant composĂ© en majeure partie de rustres sans Ă©ducation, usant de leurs avantages sans aucune retenue, quand un paysan aura pris son seigneur en aide de taille, quand il le verra inscrit Ă  cĂŽtĂ© de lui sur le rĂŽle de la corvĂ©e, quel respect pourra lui inspirer l'eau bĂ©nite et la prĂ©sĂ©ance dans le chƓur ? Cette vaine distinction ne sera plus qu'un objet de dĂ©rision. Il est Ă©vident que le but de cette politique est d'affaiblir l'ordre de la noblesse par le Tiers Ă©tat. N'est-il pas Ă  craindre que M. Necker, rĂ©publicain, ne favorise ce systĂšme? Il est grand temps de protester contre la nouvelle formation, qui renverse absolument l'ancienne constitution. Il est Ă  craindre qu'on ne veuille l'introduire dans la composition des Etats provinciaux »?. En dĂ©pit de quelques voix discordantes et de tendances rĂ©tro- grades isolĂ©es, la cause du Tiers Ă©tat Ă©tait gagnĂ©e dans l'opinion publique. Celle-ci se prononçait pour le retour des Etats provin- ciaux bien conformes et bien organisĂ©s » 3>, c'est-Ă -dire adaptĂ©s aux besoins nouveaux du pays. Elle se montrait favorable au maintien du rĂ©gime administratif nouvellement Ă©tabli, au sys- tĂšme des commissions intermĂ©diaires permanentes, des assem- blĂ©es de dĂ©partement, des municipalitĂ©s rurales. Elle rĂ©clamait le doublement du Tiers, le vote par tĂȘte et le principe de la libre Ă©lection substituĂ© Ă  celui de la dĂ©signation par le roi ou du recru- tement par cooptation. A y regarder de prĂšs, ses desiderata Ă©taient ou rĂ©alisĂ©s ou Ă  la veille de l'ĂȘtre. L'Ă©dit de 1787 y avait satisfait ou y promettait prompte satisfaction. Au premier cri de la croisade entreprise pour le rĂ©tablissement Cl Arch. dĂ©p., Calvados, C 7725. 2 Lettre du marquis de SĂ©grie, 31 octobre 1788. Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. — Lettre du comte de VendƓuvre, prĂ©sident de l'assemblĂ©e de Falaise, au duc d'Harcourt, 1er novembre 1788 Si l'on vote par ordre, le nombre des dĂ©putĂ©s de chaque ordre sera indiffĂ©rent, mais si au contraire on se dĂ©termine Ă  compter les voix, alors le Tiers Ă©tat aurait trop d'avantage. » Ibid., liasse 338. 3 Lettre du comte de Balleroy au duc d'Harcourt, 23 octobre 1788. Ibid., liasse 338. DÉBATS SUR LE CHOIX DU CHEF-LIEU 167 des Etats provinciaux, les partisans du passĂ© avaient Ă©voquĂ© l'image de la Normandie fĂ©odale, du duchĂ© souverain avec ses antiques privilĂšges, les prĂ©rogatives de ses premiers ordres. Quand il s'agit d'organiser pratiquement ce rĂȘve, les rĂ©dacteurs de projets reconnurent la nĂ©cessitĂ© d'introduire des change- ments dans les formes anciennes », et ils ne trouvĂšrent rien de mieux que l'organisation administrative existante. Que le but poursuivi fĂ»t la constitution d'Etats gĂ©nĂ©raux de la province ou d'Etats particuliers Ă  chaque gĂ©nĂ©ralitĂ©, ces Etats devaient ĂȘtre la continuation des AssemblĂ©es provinciales. Plus d'une assem- blĂ©e de dĂ©partement, en 1788, fit le rapprochement i. Selon le mot des procureurs syndics de Coutances, ce que la Basse-Nor- mandie demandait ressemblait si fort Ă  l'AssemblĂ©e provinciale, qu'elle ne paraissait demander qu'un changement de nom » 3. Une autre question agitait les esprits dans quelle ville se rĂ©u- nirait l'assemblĂ©e des futurs Etats provinciaux? Le dĂ©bat Ă©tait circonscrit entre deux villes Rouen, capitale de la province, importante par sa population, son commerce, sa richesse, et Caen, la principale ville de la Basse-Normandie, situĂ©e dans une position plus centrale. Tous les regards se tournĂšrent vers le duc d'Harcourt les partisans de l'une et l'autre ville sollicitĂšrent sa puissante intervention en leur faveur. L'intendant de Rouen plaida chaleureusement la cause de cette ville ; il fit craindre au gouvernement les suites fĂącheuses qu'entraĂźnerait l'opposition du Parlement et de la Chambre des Comptes, il lui signala l'es- prit d'insurrection » qui commençait dĂ©jĂ  Ă  gagner Rouen, Le Havre, Dieppe, Honfleur et les environs. De son cĂŽtĂ©, le comte de Balleroy, procureur syndic noble de la Basse-Normandie, priait le duc d'Harcourt de faire Ă©tablir les Etats au centre de la province et surtout hors de portĂ©e des influences contraires, qui pourraient occasionner des choses toujours dommageables Ă  1 Avch- dĂ©p., Calvados, C 7699. La suppression de l'AssemblĂ©e provinciale sera une suite nĂ©cessaire de notre projet », dit le bureau du Bien public de Coutances. Nous avons pensĂ©, dit le dĂ©partement de Caen en soumettant son projet au duc d'Harcourt, que la composition actuelle des AssemblĂ©es provinciales en Normandie paraissait prĂ©senter la maniĂšre la plus avantageuse de former une bonne adminis- tration, Ă  cause de l'activitĂ© de sa correspondance et de la quantitĂ© des personnes des trois ordres qui, participant tous Ă©galement aux diffĂ©rents dĂ©tails de l'adminis- tration, veillent Ă  l'intĂ©rĂȘt commun... nous avons prĂ©fĂ©rĂ© d'assimiler le genre d'ad- ministration de la province au rĂ©gime nouveau que nous dĂ©sirons que Votre MajestĂ© daigne adopter pour la formation des Etats de Normandie. » 2 Ibid., C 7641. 168 AJOURNEMENT DE LA RESTAURATION DES ÉTATS la chose publique » U. Les prĂ©fĂ©rences du duc d'Harcourt Ă©taient connues on savait que, pour Ă©loigner des Etats l'influence toujours redoutable des cours souveraines de Normandie, il proposerait au roi le choix de Caen comme siĂšge des futurs Etats provinciaux. Cette rĂ©solution avait suscitĂ© des enthousiasmes en Basse-Normandie ' 'l\ de graves mĂ©contentements dans la Haute. Ainsi au moment mĂȘme oĂč la province, qui semblait aspirer au rĂ©tablissement de son unitĂ©, allait toucher au but de ses dĂ©sirs, des germes de division Ă©clataient et sous cette trompeuse harmo- nie perçait un antagonisme rĂ©el. La Normandie, dĂ©jĂ  dĂ©sarticulĂ©e, dĂ©jĂ  sectionnĂ©e au point de vue administratif, l'Ă©tait Ă©galement au point de vue moral. L'unitĂ© normande Ă©tait alors une chimĂšre. Les circonstances s'opposĂšrent d'ailleurs Ă  la rĂ©alisation immĂ©- diate de ce projet. Ce fut en vain que, le 21 janvier 1789, le duc d'Harcourt envoya Ă  Laurent de Villedeuil, ministre de la pro- vince, une invitation trĂšs pressante en vue de l'Ă©tablissement d'une assemblĂ©e consultative, Ă©lue en mĂȘme temps que les dĂ©pu- tĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux, et qui se joindrait Ă  ceux-ci Ă  Caen au mois de mars, pour travailler en commun au plan de formation des Etats particuliers ». Ce fut vainement qu'il menaça la Cour d'une insurrection de la Normandie 3. Necker, pour expliquer son retard, prĂ©texta un travail de dĂ©pouillement considĂ©rable, occa- sionnĂ© par la multitude des requĂȘtes arrivĂ©es de tous les points du royaume. Il consentit Ă  la rĂ©union consultative dĂ©sirĂ©e par d'Harcourt sans pouvoir rien dire de positif sur le lieu, la forme et l'Ă©poque de cette assemblĂ©e prĂ©alable ». Il l'autorisa Ă  faire connaĂźtre Ă  la Normandie, en envoyant les lettres de convocation pour les Etats gĂ©nĂ©raux, qu'elles seraient prochainement suivies 1 Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. Lettre de Maussion, intendant de Rouen, au duc d'Harcourt, 31 dĂ©cembre 1788. — Ibid., lettre du comte de Balleroy au mĂȘme, 23 octobre 1788. ? Traces d'une campagne entreprise par le bureau intermĂ©diaire de Caen, qui provoque prĂšs des huit autres bureaux de la gĂ©nĂ©ralitĂ© une pĂ©tition en faveur de Caen. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7668. — La Basse-Normandie crut, d'aprĂšs un bruit qui courut alors, que les Etats Ă©taient rendus Ă  la province. Des lettres adressĂ©es au duc d'Harcourt les 7, 15 et 18 janvier 1789, par les dĂ©putĂ©s des dĂ©partements de Caen, de Saint-LĂŽ et de Vire, pour lui demander sa protection en faveur de Caen comme siĂšge des Etats provinciaux, regardent le rĂ©tablissement de ceux-ci comme un acte consommĂ© ». Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 339. 3 Arch. nat, Bm 132. Lettre du duc d'Harcourt Ă  Villedeuil, 21 janvier 1789. Je ne vous cacherai pas que si son vƓu n'Ă©tait pas Ă©coutĂ©, qu'elle fĂ»t trompĂ©e dans cet espoir qu'elle a attendu de son silence et de sa soumission, il serait fort possible que la fermentation qui ne s'est que trop Ă©tendue dans d'autres provinces, se communi- PROMESSE D'ORGANISATION PROCHAINE 169 d'un rĂšglement particulier concernant les Etats provinciaux l!. Quelques jours plus tard, pour simplifier l'opĂ©ration, il fut dĂ©cidĂ© que cette assemblĂ©e consultative pouvait ĂȘtre exclusive- ment formĂ©e par les dĂ©putĂ©s librement Ă©lus pour reprĂ©senter la province et stipuler ses plus chers intĂ©rĂȘts aux Etats gĂ©nĂ©raux, sans qu'on leur en adjoignit d'autres ». Les dĂ©putĂ©s des bailliages pourraient se rĂ©unir si le temps le leur permettait, soit en tel lieu de la province qui leur serait indiquĂ©, soit de prĂ©fĂ©rence dans le lieu mĂȘme de la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux », pour aviser Ă  l'organisation future de la Normandie 2. Par cette mesure habile, on Ă©vitait de trancher la question de prĂ©sĂ©ance entre Rouen et Caen et l'on ajournait les difficultĂ©s inhĂ©rentes au rĂ©tablissement des Etats. Toutefois, pour donner satisfaction aux aspirations de la province, on prescrivait aux sujets des trois ordres de donner Ă  leurs dĂ©putĂ©s une mission particuliĂšre pour dresser un plan de formation des Etats pro- vinciaux ». Cette question restait donc entiĂšre en mars 1789. Le bruit qu'elle avait soulevĂ© n'Ă©tait pas encore Ă©teint. Nous en retrouverons l'Ă©cho dans la plupart des cahiers de dolĂ©- ances. 1 Arch. nat., B m 132. Lettre de tfecker au duc d'Harcourt, 25 janvier 17* 2 Ibid. Lettre de Villedeuil Ă  Necker, 29 janvier 1789. 170 l'arrĂȘt du conseil du 5 juillet 1788 CHAPITRE IX LA CONVOCATION DES ÉTATS GÉNÉRAUX. ,E MOUVEMENT ÉLECTORAL DANS LES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Influence successivement exercĂ©e sur l'opinion publique par l'arrĂȘt du Conseil du 5 juillet 1788, les avis des Notables et le RĂ©sultat du Conseil du 27 dĂ©cembre 1788. — Malaise Ă©conomique et agitation populaire. L'Ă©meute de Caen, 5 janvier 1789. Le RĂšglement du 24 janvier 1789. RĂ©clamations qu'il soulĂšve. — MĂ©ca- nisme des opĂ©rations Ă©lectorales des trois ordres. Effacement des agents du pouvoir central et libertĂ© relative des Ă©lections. Le mouvement Ă©lectoral du clergĂ©. InquiĂ©tude du haut clergĂ© ; attitude hostile du bas clergĂ©. — Le mouvement Ă©lectoral de la noblesse ; conservateurs et libĂ©raux. — Le mouvement Ă©lectoral du Tiers Ă©tat. 1° AssemblĂ©es primaires des campagnes. La comparution individuelle. Condition sociale des dĂ©putĂ©s ruraux envoyĂ©s aux assemblĂ©es prĂ©li- minaires des bailliages rĂŽle actif des hommes de loi. — Dans les villes, assemblĂ©es prĂ©paratoires des corps et corporations Ă©limina- tion du prolĂ©tariat industriel ; prĂ©pondĂ©rance des corps judiciaires. AssemblĂ©es des citoyens non incorporĂ©s. — AssemblĂ©es plĂ©niĂšres urbaines. — 2° AssemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages. La compa- rution des paroisses. L'Ă©lection des commissaires rĂ©dacteurs du quart rĂ©duit. Effacement des dĂ©putĂ©s ruraux au profit de la bourgeoi- sie et de la robe. Depuis le 19 novembre 1787, jour oĂč le roi avait promis la convocation assez prochaine des Etats gĂ©nĂ©raux, l'attention de tous les esprits Ă©clairĂ©s, et ils Ă©taient nombreux en Normandie, avait Ă©tĂ© attirĂ©e sur cet important objet. Aussi, lorsque l'arrĂȘt du 5 juillet 1788 eut prescrit de rechercher dans les greffes des villes et des juridictions les documents relatifs Ă  cette convo- cation, lorsque l'arrĂȘt du 8 aoĂ»t suivant eut fixĂ© la date de leur rĂ©union au 1er mai 1789 V, un immense mouvement d'opinion 1 ArrĂȘt du Conseil d'Etat, concernant la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux du royaume, 5 juillet 1788. A. Brette, Recueil de documents, I, p. 19-23. — ArrĂȘt du Con- seil d Etat qui fixe au 1er mai prochain la tenue des Etats gĂ©nĂ©raux du royaume, etc. Ibid., p. 23-25. LES AVIS DE LASSEMBLÉE DES NOTABLES 171 se dĂ©chaĂźna dans cette province. La Normandie n'eut pas besoin de se recueillir longtemps elle Ă©tait toute prĂȘte Ă  rĂ©pondre. Elle se hĂąta d'autant plus qu'elle avait liĂ© Ă  la question des Etats gĂ©nĂ©raux celle du rĂ©tablissement des anciens Etats provinciaux, et qu'elle attachait un grand prix Ă  la possession immĂ©diate de ces derniers 1. Un autre stimulant fut l'annonce, pour le 3 no- vembre 1788, d'une nouvelle assemblĂ©e de Notables destinĂ©e Ă  Ă©clairer le gouvernement sur la meilleure forme des futurs Etats gĂ©nĂ©raux. La Normandie, qui devait y compter trois dĂ©putĂ©s 2>, s'empressa de formuler, Ă  titre d'indication et de conseil, ses prĂ©fĂ©rences sur le mode de la convocation. Dans la Basse-Nor- mandie, dĂšs le dĂ©but d'octobre 1788, municipalitĂ©s de villes et de campagnes, Commission et bureaux intermĂ©diaires, assem- blĂ©es de dĂ©partement prirent des dĂ©libĂ©rations, rĂ©digĂšrent des arrĂȘtĂ©s, des mĂ©moires, des pĂ©titions sur cet objets. Il n'y eut pour ainsi dire qu'un seul cri pour rĂ©pudier la forme surannĂ©e de 1614. Aussi, quand arriva la nouvelle des avis rĂ©trogrades donnĂ©s au roi par les Notables, des protestations s'Ă©levĂšrent de tous les coins de la Normandie. Dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, ce fut Vire qui donna l'exemple. Une pĂ©tition circula en novembre dans toutes les maisons ; couverte de plus de deux cents signa- tures et arrĂȘtĂ©e le 30 novembre, elle fut apportĂ©e le 6 dĂ©cembre sur le bureau de l'hĂŽtel de ville -lK Les officiers municipaux l'adres- Une dĂ©claration royale du 23 septembre avait annoncĂ© l'ouverture des Etats gĂ©nĂ©raux pour le mois de janvier 1789. — A. Brette, ouv. citĂ©, l, p. 25-27. Le rĂ©sultat du Conseil du 27 dĂ©cembre la fixa dĂ©finitivement au 27 avril. Ibid., p. 37. Elle n'eut lieu, en rĂ©alitĂ©, que le 4 mai 1789. 1 Voir chap. VIII, p. 158 et suivantes. 2 Le duc d'Harcourt, le duc de Coigny et MĂ©nage de Cagny, maire de Caen. 3 DĂ©libĂ©rations des municipalitĂ©s rurales dans le dĂ©partement de Saint-LĂŽ, Sainte-Suzanne-sur-Vire 12 octobre; Dampierre et Saint-Jean-de-Daye 19 octobre, Arch. dĂ©p. Calvados, non inventoriĂ© ; dans le dĂ©partement de Coutances, Muneville- sur-Mer 12 octobre, Arch. comm. Muneville ; Orval 19 octobre, Ibid., Orval ; men- tion des dĂ©libĂ©rations d'Agon. BrĂ©ville, Arch. dĂ©p. Calvados, C 7699. — DĂ©libĂ©rations des municipalitĂ©s de villes Granville 17 octobre, Arch. comm., registre de dĂ©libĂ©- rations lier; Saint-LĂč 26 octobre; Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338; Carentan 2 novembre, Arch. comm., registre des dĂ©libĂ©rations. — ArrĂȘtĂ©s des assemblĂ©es de dĂ©partement Mortain 14 octobre 1788, Arch. dĂ©p. Calvados, C 7707 ; Carentan 16 octobre, Ibid., C 7690 ; Vire 20 octobre, Ibid., C 7725 ; Saint-LĂŽ 20 octobre, lbid., Manche, C 628 ; Baveux 25 octobre, Ibid., Calvados, C 7654 ; Coutances et Valognes 29 octobre, Ibid., C 7699, 7720. 4 MĂ©moire que prĂ©sentent Ă  MM. les maire et Ă©chevins de la ville de Vire les gardes jurĂ©s de la manufacture de draps, nĂ©gociants, marchands, fabriquons et autres citoyens de Vordre du Tiers Ă©tat de la dite ville. ArrĂȘtĂ© le 30 novembre 178H. Arch. nat., Ba 27, liasse 45. 172 PROTESTATION GÉNÉRALE DU TIERS ÉTAT sĂšrent au roi, en y joignant une dĂ©libĂ©ration qui l'approuvait entiĂšrement '0t Le mĂ©moire des communautĂ©s et corporations du Tiers Ă©tat de Rouen, que la municipalitĂ© de cette ville adopta Ă  la mĂȘme Ă©poque, et qu'elle envoya Ă  toutes les municipalitĂ©s du royaume, devait avoir plus de retentissement encore W. Cette adresse de Rouen encouragea les revendications de la Basse-Normandie et leur servit de guide. Pendant tout le mois de dĂ©cembre, le Tiers Ă©tat des villes manifesta sa surprise et son mĂ©contentement Ă  l'Ă©gard des dĂ©cisions des Notables et pria le roi de passer outre ; communautĂ©s et corporations, avocats des bailliages envoyĂšrent au garde des sceaux ou Ă  Necker, soit directement, soit par l'intermĂ©diaire des assemblĂ©es de villes, qui les accompagnaient d'une dĂ©libĂ©ration spĂ©ciale, de respec- tueuses mais fermes pĂ©titions. Tour Ă  tour, l'on voit entrer en scĂšne Avranches 3, Granville 4, Saint-LĂŽ 5, Bayeux 6, Caen y, Barfleur et son arrondissement ^8, Cherbourg °, Bricquebec et 1 DĂ©libĂ©ration du 6 dĂ©cembre 1788. Arch. comm. Vire, registre de dĂ©libĂ©rations. 2 MĂ©moire des communautĂ©s el corporations du Tiers Ă©tat de Rouen, approuvĂ© par ÏHĂŽtel de ville de Rouen, le 30 novembre 1788 ; publiĂ© par Hippeau, Le gouvernement de Normandie, tome VJ, p. 171-178. 3 Arch. dĂ©p. Calvados, C 6348. MĂ©moire prĂ©sentĂ© au roi par les maire et Ăšchevins de la ville d' Avranches 1er dĂ©cembre 1788. Avranches, Lecourt, 18 p. 11 reproduisait les vƓux exprimĂ©s par le MĂ©moire des avocats du bailliage d' Avranches, 17 p., imprimĂ© ;i la mĂȘme date. Ce dernier mĂ©moire fut adressĂ©, le 31 dĂ©cembre 1788, Ă  la chancellerie par le barreau d'Avranches. Arch. nat., Ba 35, liasse 70. 4 Arch. comm. Granville, Registre de dĂ©libĂ©rations, 1 1er, 5 dĂ©cembre 1788. 5 MĂ©moire des citoyens du Tiers Ă©tat de Saint-LĂŽ, du 5 dĂ©cembre 1788, suivi de la dĂ©libĂ©ration du 7 dĂ©cembre 1788, avec lettre d'envoi des officiers municipaux au garde des sceaux, du mĂȘme jour. Arch. nat., Ba 35, Le 16 dĂ©cembre, Le Menuet en- voyait Ă  Necker un MĂ©moire des avocats du bailliage de Saint-LĂŽ, rĂ©digĂ© le jour mĂȘme. Ibid. 6 RĂ© vint donner satisfaction partielle aux demandes des Bas-Normands. Il annon- çait que le nombre total des dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux serait formĂ© autant que possible en raison composĂ©e de la population et des contributions de chaque bailliage, que le nombre des dĂ©pu- tĂ©s du Tiers Ă©tat serait Ă©gal Ă  celui des deux autres ordres rĂ©unis et que les prochaines lettres de convocation Ă©tabliraient cette proportion. Le roi avait donc repoussĂ© l'avis des notables. Bien plus, adoptant les vues de Necker, il traçait tout un programme de rĂ©formes et comme un cahier gĂ©nĂ©ral modĂšle de dolĂ©ances ; il y promettait la pĂ©riodicitĂ© des Etats gĂ©nĂ©raux, le rĂ©tablissement immĂ©diat des Etats provinciaux 2, le consentement de l'impĂŽt par la nation, des lois sur la libertĂ© individuelle et la libertĂ© de la presse, le compte exact des dĂ©penses annuelles. En un mot, au seuil mĂȘme des Ă©lections, le roi dĂ©crĂ©tait une rĂ©volution pacifique et rĂ©glĂ©e fi. 1 RĂ©sultai du Conseil d'Etal tenu Ă  Versailles devant le roi 27 dĂ©cembre 1788. A. Brette, ouv. citĂ©. I, p. 37. 2 On crut mĂȘme alors que ce rĂ©tablissement Ă©tait un acte consommĂ© ». Voir chapitre VIII. p. 108. 3 Aulard. Histoire de lu RĂ©volution française, p. 32, et le Programme royal aux Ă©lections de 17B% dans Etudes et leçons sur la RĂ©volution française, lrt sĂ©rie, p. 41-54. LACUNES DES CONCESSIONS ROYALES 175 Le RĂ©sultat du Conseil fut accueilli en Basse-Normandie avec une respectueuse reconnaissance ». Plusieurs villes exprimĂšrent au roi par des Adresses de remercĂźments » la douce Ă©motion » qu'elles avaient ressentie Ă  sa lecture. On a conservĂ© celles de Vire *, de Saint-LĂŽ % de Valognes 3>, et deBayeux 4. Toutefois il y avait des lacunes dans les concessions royales. La Normandie n'avait reçu aucune rĂ©ponse Ă  deux de ses deman- des les plus pressantes l'interdiction Ă  la noblesse du droit de reprĂ©senter le Tiers Ă©tat et la promesse du vote par tĂȘte dans une assemblĂ©e unique. La rĂ©cente dĂ©claration du gouvernement Ă©tait muette sur ces deux points. Les villes de Basse-Normandie, tout en s'avouant satisfaites des rĂ©sultats obtenus, rĂ©solurent de ne pas s'endormir sur une demi-victoire. Elles pensĂšrent, avec la commune de Rouen, que sur le premier point les justes motifs de la pĂ©tition du Tiers n'avaient pas cessĂ© d'exister » et elles se promirent d'user de circonspection clans leur choix. Elles persĂ©- vĂ©rĂšrent dans leur projet d'unification de la future assemblĂ©e, et pĂ©nĂ©trĂ©es du mĂȘme esprit de concorde et de rĂ©signation que Rouen, elles attendirent de l'Ă©vidence des principes, du doux empire de la persuasion et du dĂ©sir commun du bien public, que les trois ordres, cessant de se regarder comme trois frac- tions de la nation et de s'isoler comme des partis contraires, consentissent Ă  s'y rĂ©unir pour former par des dĂ©libĂ©rations communes cette unitĂ© dĂ©sirable sans laquelle on concevrait difficilement une vraie et utile reprĂ©sentation nationale ». L'union fraternelle des trois ordres en vue de soulager les charges du peuple aurait Ă©tĂ© plus que jamais nĂ©cessaire Ă  ce mo- ment, oĂč l'agitation provoquĂ©e par la misĂšre et les souffrances publiques menaçait la sĂ©curitĂ© et pouvait susciter de graves embarras au gouvernement. L'hiver de 1789 avait Ă©tĂ© long et rigoureux. EpuisĂ© par une sĂ©rie d'annĂ©es mauvaises 5, le peuple 1 17 janvier 1789. Arch. comm. Vire. Registre des dĂ©libĂ©rations, BB1. 2 Adresse de remercĂźments au roi par les officiers municipaux de Saint-LĂč 19 jan- vier 1789. Arch. nat., Ba 35, 1. 70. 3 Adresse de remercĂźments des officiers municipaux au garde des sceaux Barentin. 20 janvier 1789. lbid., Ba 35, 1. 70. 4 Adresse de remercĂźments au roi par les officiers municipaux. 21 janvier 1789. Ibid., Ba 27, 1. 45. A Caen, lorsqu'on annonça Ă  l'audience du bailliage la nouvelle de la double reprĂ©sentation du Tiers, des applaudissements unanimes Ă©clatĂšrent dans la salle ». On fut toutefois surpris que le roi y eĂ»t consenti. Esnault, MĂ©moires de la ville de Caefi, p. 1.. 5 Etat de la rĂ©colte de 1788 adressĂ© par l'intendant, 31 octobre 1788. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2638 et 2711. — On trouve la trace de l'inquiĂ©tude des campagnes dans 170 MALAISE ÉCONOMIQUE. L'ÉMEUTE DE CAEN des campagnes Ă©tait rĂ©duit Ă  la plus grande dĂ©tresse le froment, le sarrasin, nourriture principale du paysan bas-normand, le cidre manquaient. Des Ă©pizooties avaient dĂ©cimĂ© le bĂ©tail ; la raretĂ© du bois rendait le combustible trĂšs cher. Ce profond malaise Ă©conomique, supportĂ© avec rĂ©signation dans les villages, amena des dĂ©sordres dans les villes, oĂč les souffrances s'exaspĂ©- raient par le contact. La moindre occasion y Ă©tait propice Ă  l'Ă©meute. A Caen, le 5 janvier 1789, veille de l'Epiphanie, les boulangers, avec l'autorisation du lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, avaient supprimĂ© la distribution traditionnelle du gĂąteau des Rois » al La foule irritĂ©e força et pilla leurs boutiques ; elle se rua ensuite Ă  l'hĂŽtel du lieutenant gĂ©nĂ©ral qu'elle envahit. Elle en brisa les portes et les fenĂȘtres, vola tous les meubles de la cuisine, les nipes de la domestique, tenta de mettre le feu Ă  la maison, brisa les bois et les volets des fenĂȘtres et les jeta dans la rue W. Les troupes de la garnison et la milice bourgeoise purent contenir l'Ă©meute, mais la situation Ă©tait grave et il fallut prendre des mesures urgentes pour secourir les indigents et faire cesser les troubles. On chercha des ressources de tous cĂŽtĂ©s. Le nouveau directeur du théùtre de Caen donna une reprĂ©sentation au bĂ©nĂ©- fice des pauvres T!; les grenadiers du rĂ©giment d'Artois, qui Ă©taient de garde aux reprĂ©sentations, abandonnĂšrent au profit de ceux-ci la solde attachĂ©e Ă  leur service. Les prieur et juges- consuls versĂšrent la dĂ©pense de leur repas de corps annuel, soit livres, entre les mains des curĂ©s de la ville qui prĂ©paraient les Onservations gĂ©nĂ©rales annexĂ©es aux Ă©tats d'imposition de 1788 conservĂ©s pour les les Ă©lections de Caen et de Vire ; voir les paroisses suivantes 1° dans l'Ă©lection de Caen Benouville, Arch. dĂ©p., Calvados, C 7835 ; Billy, C 7841 ; BissiĂšres, C 7812 ; Blainville, C 7843 ; Cheux, C 7865 ; Colle ville-sur- Orne, C 7871 ; Colombelles, C 787-2 ; Espins, C 7887 ; Grainville-sur-Odon, C 7906 ; Grcntheville, C 7907 Juvi- gny, C 7919; Le Locheur, C 7926; Longvillers, C 7927; Montigny, C 7942 ; Monts, C7943; les Moutiers, C 7947; MutrĂ©cy, C 7948; Parfouru, C 7953; Bocquancourl. C 7963 ; Saint-Aubin-d'Arquenay, C 7969 ; Saint-Ouen-du-Mesnil-Oger, C 7979 ; Saint-Pair, C 7980; Saint-Pierre-du-Jonquet, C 7981 ; Sannerville, C 7987 ; Touffre- ville, C 7996 ; Troarn, C 8000 ; Troismonts, C 8001 ; Vacognes, C 8002 ; Valineray. C 8004 Vieux, C 8009; — 2° dans l'Ă©lection de Vire Champ-du-Boult, C 8026 ; La Lande-Vaumont, C8041; Le Mesnil-BenoĂźt, C 8046 ; Ondefontainc, C 8053 ; Perrigny, C 8054 ; Saint-Sever, C 8078. 1 Esnault, MĂ©moires de Caen, t. I, p. 2. Cf. Dufour, MĂ©moire et Remarques, t. I, p. 29. 2 Lettre de Le Harivel de Gonneville, lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, Ă  l'intendant Cordier de Launay. 6 janvier 1789. — Lettre le celui-ci Ă  Necker mĂȘme dalej. Arch. dĂ©p., Calvados, 26?5 ; Journal de la Basse-Normandie, 1789, n°3. Ou donna en spectacle l'Amant jaloux el la Dut.. 18 janvier 1789. LA FERMENTATION POPULAIRE 177 des soupes Ă©conomiques et veillaient aux distributions de riz C1. La municipalitĂ© enrĂŽla les travailleurs ĂągĂ©s de plus de dix ans pour balayer la neige des rues 2. Un arrĂȘtĂ© du bailliage autorisa une quĂȘte par paroisse ; les magistrats la firent eux-mĂȘmes et elle rapporta, en quatre jours, la somme de livres, aussitĂŽt distribuĂ©e aux curĂ©s pour les pauvres 9t Dans toute l'Ă©tendue de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, mĂȘmes souf- frances, mĂȘme inquiĂ©tude, mĂȘme agitation. Aubin, maire de CondĂ©-sur-Noireau, signale Ă  Necker l'Ă©tat alarmant des orphe- lins, infirmes et indigents, prĂȘts Ă  mourir de faim et de froid » aprĂšs de longs mois de privations 4. La municipalitĂ© de Gran- ville organise des soupes populaires et un magasin de blĂ© 5; celle de Vire, des ateliers de charitĂ© 6; Ă  Carentan, des distri- butions d'argent ont lieu ?. Sur une requĂȘte pressante de la Com- mission intermĂ©diaire provinciale de Caen, Necker autorise celle-ci Ă  prĂ©lever, en faveur des pauvres de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, une somme de livres sur les fonds libres de la capitation 8. L'inten- dant Cordier de Launay obtient du ministre une somme de livres, destinĂ©e Ă  payer l'approvisionnement en grains qu'un nĂ©gociant de Caen a fournis 9. Ces dons insuffisants, rapidement engouffrĂ©s, font courte trĂȘve Ă  la misĂšre et n'em- pĂȘchent ni les grondements ni les troubles populaires. L'arrĂȘt du Conseil du 23 novembre 1788, laissant libre cours Ă  la circulation des grains dans l'intĂ©rieur du royaume, inquiĂšte et agite le peuple dans presque toutes les Ă©lections de la gĂ©nĂ©ralitĂ© , Ă©crit l'intendant ; les murmures et la fermentation sont Ă  leur com- ble »10. Une sĂ©dition Ă©clate Ă  Carentan Ă  l'occasion d'un enlĂšve- 1 Journal de la Basse-Normandie. 1789, n° 2, 11 janvier 1789. — Desbordeaux, curĂ© de Saint-Julien de Caen, envoie au rĂ©dacteur de ce journal la recette d'une soupe Ă©conomique qu'il fait pour ses pauvres 30 pots par jour, taisant plus de 100 portions, le tout ne lui coĂ»tant que 6 1. 13 s.. Elle est faite de pommes de terre, graisse, oignons. sel, poivre et pain. Ibid . n° 3, supplĂ©ment. 2 Arch. comm., Caen, BBℱ. 3 Journal de la Basse-Normandie, 1789, n° 3, supplĂ©ment. 4 Lettre d'Aubin, bailli et maire de CondĂ©-sur-Noireau, Ă  Necker, du Ier avril 1789. Arch. comm., CondĂ©-sur-Noireau, BBS. 5 Ibid., Granville, Registre des dĂ©libĂ©rations, 10 et 19 dĂ©cembre 1788. 6 Ibid., Vire, Registre des dĂ©libĂ©rations. 7 Ibid., Carentan, Registre de dĂ©libĂ©rations, 3 janvier 1789. 8 Lettre de la Commission intermĂ©diaire provinciale, 12 janvier 1789, et rĂ©ponse de Necker, 29 janvier 1789. Arch. nat., H1 1420. 9 Lettre de Cordier de Launay Ă  Necker, 29 janvier 1789, et rĂ©ponse de Necker, 7 fĂ©vrier 1789. Arch. nat.. II1 1420. 10 Lettre de Cordier de Launay, du 28 mars 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2688. 12 178 LE RÈGLEMENT DU 24 JANVIER 1789 ment de grains et se propage jusqu'Ă  Saint-LĂŽ ll. Le duc de Beuvron envoie des troupes Ă  Valognes afin que les Ă©meutes ne s'y renouvellent pas » 2. Ce fut au milieu de cette fermen- tation que tomba le RĂšglement du 24 janvier 1789, qui traçait les rĂšgles pour la convocation et l'Ă©lection aux Etats gĂ©nĂ©raux W. La convocation, Ă©tant un acte de l'autoritĂ© judiciaire, se fit par bailliages, selon les anciennes formes, et non par dĂ©parte- ments, comme le demandait l'opinion publique. L'article 2 du RĂšglement divisait les bailliages en principaux et secondaires. Cette division n'avait pas pour but de rabaisser au-dessous des bailliages principaux ceux de la deuxiĂšme classe la qualification de secondaire n'avait rien d'humiliant pour ces derniers ; le garde des sceaux s'empressa de l'Ă©crire aux officiers de ces juridictions, pour Ă©viter tout froissement 4. Une telle distinction n'Ă©tait applicable que dans cette circonstance et en matiĂšre Ă©lectorale seulement on l'avait imaginĂ©e pour ramener les opĂ©rations de la convocation aux formes de 1614. Les bailliages principaux devaient dĂ©puter directement aux Etats gĂ©nĂ©raux, les bailliages secondaires indirectement et au second degrĂ©. Le territoire de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen comprit, approximativement, deux bailliages principaux, ceux de Caen et de Coutances. Au ressort Ă©lectoral de Caen furent rattachĂ©s les bailliages secondaires de Bayeux, Torigni, Vire et Falaise ; Ă  celui de Coutances les bailliages secon- daires de Saint-LĂŽ, Avranches, Valognes, Saint-Sauveur-Lende- lin sĂ©ant Ă  PĂ©riers, Saint-Sauveur-le-Vicomte, CĂ©rences, Mor- tain et Tinchebrai 5. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2675. 2 Ibid., C 1970. 3 RĂšglement fait par le Roi pour l'exĂ©cution des lettres de convocation, publiĂ© par Brette, ouvr. citĂ©, 1, p. 77. 4 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6345. 5 M. Brette a publiĂ©, dans son Atlas des bailliages ou juridictions assimilĂ©es ayant formĂ© unitĂ© Ă©lectorale en 17H9, une carte trĂšs prĂ©cise reproduisant la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen dans ses rapports avec les bailliages ou juridictions assimilĂ©es qui servirent alors de circonscriptions Ă©lectorales. Elle montre de façon saisissante l'enchevĂȘtre- ment des diverses juridictions dont les contours sont souvent bizarres, et qui, sous le nom d'extensions, comptent de nombreuses enclaves dans les ressorts parfois trĂšs Ă©loignĂ©s. Le bailliage de Tinchebrai a trois enclaves dans celui de Caen 1° CoudĂ©, Athis et environs; 2° Aunay et Bauquay ; 3° Coulvains. Falaise a une enclave dans Caen Saint-Ouen-du-Mesnil-Oger. Le bailliage de Torigni envoie dans le bailliage restreint de Saint-LĂč une protubĂ©rance en forme de trompe. d'Aire! Ă  Rampan. Coutances a deux extensions dans Saint-Sauveur-Lendelin Le Pirou et Gouville. Saint-Sauveur-Lendelin a une enclave dans Coutances Agon, et deux dans Saint- Sauveur-le-Vicomte 1° Saint-Nicolas, Donville ; 2° Besneville. Huit extensions du RÉCLAMATIONS DES BAILLIAGES 179 La situation Ă©tait moins nette que ne semblait le supposer le RĂšglement du 24 janvier. A peine connut-on les termes de celui-ci que des rĂ©clamations nombreuses se produisirent 0. Si les bail- liages secondaires de Caen acceptĂšrent la situation provisoire qui leur Ă©tait faite, plusieurs de ceux du Cotentin protestĂšrent. Angot, bailli de robe longue du siĂšge de Saint-Sauveur-le-Vicomtc Ă©crivit au garde des sceaux qu'il fermerait les yeux sur le droit de son bailliage Ă  dĂ©puter directement aux Etats gĂ©nĂ©raux 2. Les officiers du bailliage de Valognes rappelĂšrent Ă  Necker l'Ă©tendue, la population, les charges fiscales de leur ressort et la considĂ©ration toute spĂ©ciale dont il aurait dĂ» ĂȘtre l'objet 3. Ce fut Ă  Mortain que les rĂ©criminations furent les plus vives. AprĂšs le comte de Sourdeval, prĂ©sident de l'assemblĂ©e de dĂ©partement W, Vaufleury de Saint-Cyr, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, et le comte de GĂ©raldin, grand bailli d'Ă©pĂ©e, firent valoir avec insis- tance les droits anciens du bailliage Ă  la reprĂ©sentation directe 5. Le collĂšge des avocats, le syndic militaire, les citoyens des trois ordres joignirent leurs revendications Ă  celle des officiers de cette juridiction dans une assemblĂ©e tenue le 21 fĂ©vrier 1789. Le 9 mars, en dĂ©pit du RĂšglement du 24 janvier, une assemblĂ©e bailliage de Saint-Sauveur-le-Yicomte bigarrent celui de Valognes. Le bailliage de Carentan, qui a une extension dans Valognes, Barneville-sur-Mer, possĂšde non loin de sa frontiĂšre une enclave de ce dernier bailliage, Montgardon, et en plein cƓur une enclave de Saint-Sauvetir-le-Vicomle, Liesville, Houesville, Angoville-au-Plain. Le bailliage de CĂ©rennes, aux formes dĂ©chiquetĂ©es, s'enfonce dans celui de Cou- tances, et y dĂ©tache deux enclaves Lingrevillc et Yquelin. Une extension d'Ar gentan occupe le centre du bailliage de Mortain. Il est Ă  remarquer que le bailliage de Falaise, Ă  part une douzaine de paroisses de l'Ă©lection de Vire, n'appartient pas au cadre territorial de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. 1 De toutes les provinces, la Normandie avait dĂ» recevoir la premiĂšre ce rĂšgle- ment. La Normandie sera mise la premiĂšre en mouvement sur cette grande affaire, afin qu'elle continue de servir d'exemple et de modĂšle... » Lettre de Necker au duc d Harcourt. 25 janvier 1789. Arch. nat., BUI 132. 2 Lettre d'Angot au garde des sceaux, 17 fĂ©vrier 1789. Ibid., Ba 35, 1. 70. 3 Lettre des officiers du bailliage de Valognes au directeur gĂ©nĂ©ral des finances, 19 fĂ©vrier 1789. Ibid. 4 Le comte de Sourdeval avait, par l'entremise de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, transmis sa requĂȘte Ă  Necker le 20 janvier 1789. Ibid., Ba 35, 1. 70. — La rĂ©clamation d'une reprĂ©sentation directe du bailliage de Mortain aux Etats gĂ©nĂ©- raux se trouve au registre de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Mortain tenue en octo- bre 1788. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7707. 5 Lettres de Vaufieury de Saint-Cyr Ă  Necker, 11 et 15 fĂ©vrier 1789. Lettres du comte de GĂ©raldin Ă  Necker et au garde des sceaux, 18 fĂ©vrier 1789. Arch. nat., Ba 35, 1. 70. Sur ce diffĂ©rend, voir abbĂ© Pigeon, Le grand Bailliage de Mortain en 1789 MĂ©m. de la SociĂ©tĂ© acadĂ©mique du Cotentin, 1880, III, et Un Episode de la convocation des Etals gĂ©nĂ©raux le conflit de deux Bailliages RĂ©vol. française, t. XXXIV, 14 jan- vier 1898. 180 RÉCLAMATIONS DES VILLES ET COUPS des trois ordres fut rĂ©unie Ă  Mortain sous la prĂ©sidence de GĂ©ral- din elle se contenta d'ailleurs d'une vaine protestation et ne prolongea pas autrement sa rĂ©sistance. A l'instar du bailliage de Mortain, plusieurs villes de Basse- Normandie aspiraient Ă  une reprĂ©sentation directe. Vire exposa qu'elle avait eu ses dĂ©putĂ©s particuliers aux Etats de 1467 1. Saint-LĂŽ, tout en faisant au bien gĂ©nĂ©ral le sacrifice de ses droits, tint Ă  les faire constater, Ă  dĂ©faut de ses registres perdus, par des citations extraites de la Chronologie des Etats de 1467 » "2. Cherbourg fit valoir l'importance de sa situation comme clef et forteresse de la province », sa population accrue par suite des travaux immenses que le roi y avait ordonnĂ©s et se glorifiant d'avoir Ă©tĂ© l'objet du premier voyage » de Louis XVI, lui demanda une dĂ©putation spĂ©ciale aux Etats gĂ©nĂ©raux *. L'UniversitĂ© de Caen, par la voix de son recteur Tirard Deslongchamps, pria le garde des sceaux de lui marquer si elle aurait ses reprĂ©sentants aux Etats gĂ©nĂ©raux, surtout lorsqu'on y traiterait de l'Ă©ducation publique » ' 4 . Le Bureau des finances de Caen avait eu soin d'Ă©tablir par les extraits de ses registres, relatifs aux Etats de 1484, de 1576 et de 1614, le droit qu'elle avait d'y dĂ©puter un trĂ©sorier de France 5. Le gouvernement rejeta toutes ces prĂ©tentions et dĂ©clara vouloir s'en tenir, sans dĂ©roger, aux principes gĂ©nĂ©raux qui avaient inspirĂ© la convocation. Il ne s'arrĂȘta pas davantage aux rĂ©clamations des villes qui, comme Granville, se dĂ©claraient lĂ©sĂ©es par la concession d'un trop petit nombre de dĂ©putĂ©s Ă  l'assemblĂ©e bailliagĂšre 6 ; ni Ă  celles des chapitres qui, mĂ©con- i\u Conseil chargĂ©s de rĂ©gler la convocation n'a- vaient rien trouvĂ© Ăč changer. Ibid., B1" Ă»'A. MÉCANISME DES OPERATIONS ÉLECTORALES 181 tents, comme celui de Bayeux, de n'avoir qu'un dĂ©lĂ©guĂ© par dix chanoines, demandaient la reprĂ©sentation individuelle de leurs membres Ă  l'assemblĂ©e du clergĂ© l ; ni Ă  celles des corporations, qui redoutaient l'influence prĂ©pondĂ©rante des magistrats dans les collĂšges Ă©lectoraux des villes 2l En ce qui concerne la Basse- Normandie, il appliqua Ă  la lettre les dispositions du RĂšglement du 24 janvier 1789. D'aprĂšs ce RĂšglement, les deux premiers ordres ne devaient tenir qu'une seule rĂ©union Ă©lectorale, au chef-lieu des deux bailliages principaux, c'est-Ă -dire Ă  Caen et Ă  Coutances. Tous les nobles, en personne ou par procureur, Ă©taient convoquĂ©s Ă  l'assemblĂ©e de la noblesse. Les ecclĂ©siastiques bĂ©nĂ©ficiers avaient voix individuelle dans celle du clergĂ© ; les non-bĂ©nĂ©ficiers ainsi que les membres des communautĂ©s sĂ©culiĂšres et rĂ©guliĂšres, n'avaient droit d'y ĂȘtre reprĂ©sentĂ©s que par dĂ©putĂ©s. Ces assem- blĂ©es devaient nommer directement leurs dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux le clergĂ© et la noblesse avaient droit, dans le bailliage de Cotentin, chacun Ă  quatre dĂ©putĂ©s ; dans celui de Caen, chacun Ă  trois. Le mĂ©canisme Ă©tait plus compliquĂ© pour l'Ă©lection du Tiers Ă©tat. Les assemblĂ©es primaires des campagnes devaient choisir un certain nombre de dĂ©putĂ©s en raison de leur population 3 ; celles des villes oĂč les dĂ©lĂ©guĂ©s des corps et corporations, groupe dĂ©jĂ  rĂ©duit, venaient se joindre aux autres citoyens indĂ©pendants du Tiers Ă©tat, avaient droit Ă  quatre dĂ©putĂ©s. Un Ă©tat particulier, annexĂ© au RĂšglement, dĂ©signait nominativement les villes les plus importantes auxquelles on accordait une dĂ©putation plus nombreuse ; six villes se trouvaient ainsi dĂ©signĂ©es dans l'Ă©tednue des deux bailliages de Caen et de Cotentin. C'Ă©taient Caen, avec 30 Ă©lecteurs ; Cherbourg, avec 10 ; Granville, avec 8 ; Bayeux, 1 Lettre du lieutenant-gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen au garde des sceaux, 19 fĂ©- vrier 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. La protestation du chapitre de Bayeux aura sa rĂ©per- cussion dans l'assemblĂ©e du clergĂ© de Caen. — Cf. la lettre d'un chapelain de Cou- tances, Desplanques de Ventigny, Ă  Necker, 25 fĂ©vrier 1789. Ibid., B111 53. 2 Lettre de Le Fauconnier, syndic des maĂźtres en pharmacie de Caen, Ă  Necker 22 fĂ©vrier 1789 ; demande d'explication sur l'article 26 du rĂšglement crainte que les juges des bailliages, eaux et forcis, bureau des finances, Ă©lection, grenier Ă  sel, .juges aux dĂ©pĂŽts, cours des monnaies, amirautĂ©s, hautes justices, etc., si on les con- sidĂšre comme corps autorisĂ©s, n'aient la prĂ©pondĂ©rance sur les dĂ©putĂ©s des arts mĂ©caniques et la majoritĂ© dans l'Ă©lection des trente dĂ©putĂ©s de la ville de Caen. Ibid., Ba 27, 1. 45. 3 Elles devaient nommer deux dĂ©putĂ©s en raison de 200 feux et au-dessous ; trois, au-dessus de 200 feux ; quatre, au-dessus de 300 feux, et ainsi de suite. 182 LIBERTÉ DES ÉLECTIONS. GOUVERNEUR ET COMMANDANT EN CHEF Coutances et Valognes, avec 6. Les dĂ©lĂ©guĂ©s des paysans et ceux du Tiers Ă©tat des villes devaient se rĂ©unir pour former l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage. Les quinze assemblĂ©es prĂ©liminaires qui se tiendraient dans le ressort des deux bailliages principaux devaient se rĂ©duire alors au quart d'entre elles ; ces nouveaux Ă©lus devenaient Ă  leur tour les Ă©lecteurs du Tiers Ă©tat dans les deux assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales de Caen et de Coutances. La premiĂšre avait droit Ă  six dĂ©putĂ©s, la seconde Ă  huit. La pĂ©riode Ă©lectorale, ouverte dĂšs le dĂ©but de fĂ©vrier dans les ressorts judiciaires de Basse-Normandie, y fut close par la rĂ©u- nion plĂ©niĂšre des trois ordres, qui eut lieu Ă  Caen et Ă  Coutances le 16 mars 1789. Le gouvernement se fit une rĂšgle de la neutralitĂ© la plus absolue. Tous ceux qui, Ă  un titre quelconque, le reprĂ©- sentĂšrent reçurent l'ordre de se tenir en dehors du mouvement Ă©lectoral, de n'exercer aucune pression sur la rĂ©daction des vƓux et le choix des dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux. Le duc d'Har- court, gouverneur de la province, retenu Ă  Meudon auprĂšs du jeune Dauphin dont il Ă©tait le gouverneur, resta Ă©tranger aux Ă©vĂ©nements et se contenta de prendre des informations sur eux au fur et Ă  mesure qu'ils se dĂ©roulaient W. Son frĂšre, le duc de Beuvron, commandant en chef 2, eut pour unique mission de maintenir, de concert avec l'intendant, le bon ordre et la tran- quillitĂ© publique. On lui recommanda d'user de prudence et de modĂ©ration, d'Ă©viter soigneusement tout ce qui pourrait avoir l'apparence de la contrainte, et faire craindre l'influence de l'autoritĂ© » 3. Il tomba d'ailleurs malade au mois de mars pen- dant un sĂ©jour Ă  Rouen 4. Vers la fin de fĂ©vrier 1789, l'intendant avait attirĂ© son attention sur les troubles qu'essayaient de fomen- ter Ă  Caen des jeunes gens venus de Rennes, sur leurs assemblĂ©es 1 Lettres Ă©crites au duc par le marquis de Blangy et le duc de Coigny. Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 339. Minute autographe de rĂ©ponse du duc d'Harcourt au duc de Coigny, 18 mars 1789 Je vous remercie, mon cher, duc, de votre attention Ă  me mander la marche de votre assemblĂ©e... Je reçois jusqu'Ă  prĂ©sent des nouvelles Ă©galement tranquillisantes des divers bailliages de la province... J'en rends un compte exact au roi, qui prend un vĂ©ritable intĂ©rĂȘt Ă  la province... » — François- Henri, duc d'Harcourt, alors ĂągĂ© de 63 ans, Ă©tait gouverneur de la Normandie depuis 1783. — VoirBrette, ouv. cilĂ©,, t. I, p. 391. 2 Anne-François d'Harcourt, duc de Beuvron, alors ĂągĂ© de 61 ans, aprĂšs avoir Ă©tĂ© commandant en second, Ă©tait devenu commandant en chef en Normandie. A. Brette, Ibid., t. I, p. 437. 3 Lettre de Villedeuil au duc de Beuvron, 12 fĂ©vrier 1789, publiĂ©e par Hippeau, ouv. citĂ©, t. Vf, p. 27. 4 Lettre de Maussion, intendant de Bouen, au duc d'Harcourt, 27 mars 1789. Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 339. RÔLE PASSIF DE L'INTENDANT 183 en plein ailleurs scĂšnes tapageuses au théùtre *. Ce ne fut qu'une vaine alarme ; tout se borna Ă  quelques bruyantes manifesta- tions d'Ă©tudiants et l'autoritĂ© militaire n'eut pas Ă  intervenir 2. ; L'intendant de Caen, Cordier de Launay, avait reçu des mi- nistres Villedeuil et Barentin des ordres encore plus prĂ©cis que le duc de Beuvron. On le priait de s'employer Ă  faciliter l'exĂ©cu- tion des rĂšglements, et Ă  procurer, autant que possible, la cĂ©lĂ©ritĂ© et l'uniformitĂ©, tout en s'abstenant avec le plus grand soin rela- tivement aux Ă©lections de tout ce qui pourrait prĂ©senter l'appa- rence de la contrainte, de la gĂȘne ou mĂȘme de l'influence, l'in- tention du roi Ă©tant d'y faire rĂ©gner une entiĂšre libertĂ© » 3. Etait-il besoin d'ailleurs de lui faire de telles recommandations? A quelle influence pouvait prĂ©tendre un magistrat dessaisi de son ancienne autoritĂ©, et dont la disparition Ă©tait souhaitĂ©e par tous? Cordier de Launay resta par principe Ă©tranger aux dĂ©libĂ©- rations des diverses assemblĂ©es Ă©lectorales de la gĂ©nĂ©ralitĂ© et se borna Ă  transmettre au pouvoir central les renseignements que lui adressĂšrent ses subdĂ©lĂ©guĂ©s W. Il n'avait plus d'ailleurs une grande confiance dans le concours effectif de ces derniers. Sa lettre du 15 janvier 1789 au garde des sceaux est trĂšs significative sur ce point Je ne vous dissimulerai pas, Monseigneur, lui Ă©crivait-il, que depuis les changements mĂ©ditĂ©s ou survenus, mes subdĂ©- lĂ©guĂ©s ont perdu beaucoup de leur influence sur les communau- tĂ©s, de leur crĂ©dit et de leur considĂ©ration mĂȘme dans l'opinion publique, quoiqu'il n'aient point dĂ©mĂ©ritĂ© aux yeux de l'admi- nistration. Je l'ai prĂ©venu, il y a dĂ©jĂ  quelque temps, de leur dĂ©couragement et de l'intention oĂč plusieurs Ă©taient de cesser les rapports qu'ils avaient avec le Conseil pour se procurer 1 Minute de lettre Ă©crite le 22 fĂ©vrier 1789 de la main de l'intendant. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6346. Monsieur le duc, je crois de la prudence de vous prĂ©venir sur le sujet de mes apprĂ©hensions. Plusieurs jeunes gens de Rennes sont arrivĂ©s dans cette ville. Grand nombre de personnes du Tiers, presque tous d'un Ăąge incompĂ©tent, s'as- semblent irrĂ©guliĂšrement au buffet du cours et y tiennent des sĂ©ances politiques. On avait commencĂ© Ă  arborer des cocardes et Ă  se parer de boucles et de boutons caractĂ©ristiques des distinctions adoptĂ©es par le Tiers Ă©tat. Il y a eu avant-hier grand tapage Ă  la ComĂ©die, et l'Ă©tat de faiblesse militaire oĂč nous sommes rĂ©duits, a contraint de cĂ©der au parterre... » 2 Lettre du duc de Coigny, 10 mars 1789. Arch. chĂąteau d'Harcourt, liasse 338. 3 Lettres de Villedeuil, 1er fĂ©vrier 1789, et de Barentin. 10 fĂ©vrier 1789, Ă  l'inten- dant de Caen. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6345. 4 Comme je me suis abstenu d'avoir ni directement ni indirectement la moin- dre influence sur les dĂ©libĂ©rations qui ont Ă©tĂ© prises, Ă©crivait-il le 8 avril 1789, et que je n'en ai de connaissance que par des informations particuliĂšres et par la voie publique, je ne tenterai point de vous en oflrir l'analyse ni le rĂ©sultat. » Ibid. 184 EFFACEMENT DES SUBDÉLÉGUÉS dans le systĂšme actuel une existence politique plus conforme Ă  leurs vues. Je les ai retenus jusqu'Ă  prĂ©sent par les liens de la confiance et de l'attachement ; mais il est Ă  craindre que l'im- pulsion de l'intĂ©rĂȘt personnel, et l'espoir fondĂ© de figurer d'une maniĂšre plus intĂ©ressante mĂȘme aux yeux de leurs conci- a toyens ne leur fasse adopter d'autres principes et d'autres rĂšgles de conduite. Il est d'observation que la plupart de nos subdĂ©lĂ©guĂ©s sont lieutenants gĂ©nĂ©raux de bailliage, et il faut convenir que dans ce moment leur rĂŽle est trĂšs embarras- sant » f*. Ainsi, d'aprĂšs les prĂ©visions de l'intendant, deux sortes de raisons devaient empĂȘcher ses subdĂ©lĂ©guĂ©s de la secon- der utilement chez les uns l'effacement rĂ©sultant du dĂ©clin de leur popularitĂ© ; chez les autres le dĂ©sir de reconquĂ©rir cette popularitĂ© par l'abandon de leurs fonctions. Ces prĂ©visions Ă©taient assez justes. Le Harivel de Gonneville, qui avait succĂ©dĂ© dans la subdĂ©lĂ©gation de Caen Ă  Le Paulmier dĂ©cĂ©dĂ© en 1788, Ă©tait impopu- laire, surtout comme lieutenant de police le pillage de sa maison dans l'Ă©meute du 5 janvier en Ă©tait une preuve. De Mortreux, subdĂ©lĂ©guĂ© de Vire, fut Ă©cartĂ© dĂšs le premier vote et ne comparut pas Ă  l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage. Il en fut de mĂȘme pour GĂȘnas Ă  Bayeux et pour MombriĂšre Ă  Coutances. Le grief le plus sĂ©rieux qu'on leur fit Ă©tait leur attachement Ă  l'inten- dant '2. Couraye du Parc, maire et subdĂ©lĂ©guĂ© de Granville, ne fut pas Ă©lu dĂ©putĂ© de sa ville Ă  Coutances ; la lettre dĂ©couragĂ©e qu'il avait Ă©crite Ă  Launay fit un instant craindre Ă  celui-ci qu'il ne voulĂ»t dĂ©serter son poste f3. Garantot fut un des dix dĂ©lĂ©guĂ©s de Cherbourg Ă  l'assemblĂ©e prĂ©liminaire de Valognes, mais il n'alla pas plus loin. Ni Robillard, subdĂ©lĂ©guĂ© de Saint-LĂŽ, ni Sivard de Beaulieu, subdĂ©lĂ©guĂ© de Valognes, ni Lavalley de la Hogue Ă  Carentan, malgrĂ© leur qualitĂ© de lieutenant gĂ©nĂ©ral, qui leur donnait la prĂ©sidence des assemblĂ©es Ă©lectorales de leur bailliage, ne furent choisis au nombre des dĂ©putĂ©s dĂ©signĂ©s par celles-ci. Leur passĂ© d'administrateur avait sans doute amassĂ© contre eux des rancunes tenaces, qui trouvaient en ce jour l'oc- 1 Trois d'entre eux occupaient cette fonction. Robillard Ă  Saint-LĂŽ, Sivard de Beaulieu Ă  Valognes, Lavalley de la Hogue Ă  Carentan. 2 Le subdĂȘlĂ©guĂ© de Vire se trouva Ă  la premiĂšre assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale oĂč tout le inonde Ă©tait invitĂ© ». Il n'assista pas aux autres et ne sait ce qui s'y est passĂ©. Je n'en ai rien vu, Ă©crit-il, car, comme on sait que je vous suis trĂšs attachĂ©, on ne m'a nommĂ© ni appelĂ© en chose quelconque ». Lettre de Mortreux Ă  l'intendant. 12 avril 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6359. 3 Lettre de Couraye-Duparc Ă  l'intendant, 18 fĂ©vrier 1789. Ibid., C 635L LES MEMBRES DE L' ADMINISTRATION PROVINCIALE 185 casion de se manifester. Sur les onze subdĂ©lĂ©guĂ©s de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, un seul assista Ă  l'assemblĂ©e des trois ordres d'un grand bailliage ce fut de Montitier, subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranches et lieute- nant particulier de l'Ă©lection l. Encore son Ă©lection avait-elle soulevĂ© des objections de principe et ne dut-il son succĂšs qu'aux sympathies des Ă©lecteurs pour sa personne *. Si l'ancienne administration, systĂ©matiquement tenue Ă  l'Ă©cart des assemblĂ©es dĂ©libĂ©rantes, et s'en dĂ©fendant elle-mĂȘme l'accĂšs, n'y joua aucun rĂŽle et n'influa en rien sur leurs dĂ©cisions, la nouvelle administration provinciale, au contraire, envoya aux assemblĂ©es du Tiers un grand nombre de ses membres. Beaucoup de ceux-ci avaient dĂ©jĂ  dit leur mot pendant les prĂ©- ludes de la convocation, soit comme officiers municipaux des villes, soit comme juges ou avocats des bailliages et des Ă©lections. Us avaient Ă  ce titre, en plus d'un endroit, formulĂ© les vƓux du Tiers Ă©tat, rĂ©digĂ© les protestations ou les adresses de reconnais- sance au roi. Ils Ă©taient tout prĂȘts Ă  consigner Ă  nouveau dans les cahiers les aspirations de leur ordre. Aussi les retrouverons- nous bientĂŽt en possession d'un rĂŽle actif et d'une influence prĂ©pondĂ©rante, d'abord comme dĂ©putĂ©s de leurs paroisses rurales ou de leurs villes, puis en qualitĂ© de commissaires-rĂ©dacteurs dans les assemblĂ©es prĂ©liminaires, et quelques-uns enfin comme dĂ©putĂ©s de leur bailliage aux Etats gĂ©nĂ©raux 3. Ajoutons toutefois qu'ils durent cette influence Ă  leur valeur personnelle, 1 A une lettre oĂč Montitier semble lui demander des directions, lintendant rĂ©pond le 10 mars 1789. Cordier de Launay voit avec plaisir que malgrĂ© l'empire des prĂ©jugĂ©s son mĂ©rite et son patriotisme l'ont placĂ© au rang des dĂ©putĂ©s. Il ne voit pas d inconvĂ©nient Ă  ce que Montitier se conforme aux vƓux de ceux dont il a fixĂ© le choix ; il le laisse fort libre Ă  cet Ă©gard et ne veut influer en rien dans sa dĂ©termi- nation, » Arch. dĂ©p., Calvados. C 6348. — Montitier devait mourir Ă  Coulances, le 1er avril 1789, des suites d'un abcĂšs occasionnĂ© par la chute d'une trappe sur sa tĂšte, dans une de ses visites au Mont-Saint-Michel. Ihid., C 6354. 2 Dans la premiĂšre assemblĂ©e du bailliage d'Avranches, on avait donnĂ© publique- ment lecture d'une lettre anonyme, imprimĂ©e, adressĂ©e Ă  l'hĂŽtel de ville, pour exclure des suffrages les anoblis, les; subdĂ©lĂ©guĂ©s, etc.. » Lettre de Montitier Ă  l'in- tendant, 7 mars 1789. Ibid., C 6348. 3 Voir ci-dessous, Ă  propos du mouvement Ă©lectoral du Tiers Ă©tat. Les membres de l'administration provinciale de Basse -Normandie appartenant au Tiers, qui furent dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux; sont Delauney, membre du bureau intermĂ©- diaire de Bayeux; Besnard-Duchesne, procureur-syndic du dĂ©partement de Valognes ; Vieillard, secrĂ©taire de l'assemblĂ©e de dĂ©partement de Saint-LĂč ; de Cussy, Flaust, Desplanques-Dumesnil et Burdelot, membres de l'AssemblĂ©e provinciale. — Dans l'ordre du clergĂ©, l'administration provinciale de Basse-Normandie envoya aux Etats gĂ©nĂ©raux Levesque, curĂ© de Tracy ; dans celui de la noblesse le duc de Coigny. le comte de Vassy, le baron de Wimpfen, Beaudrap de Solteville. 186 EVÊQUES, BAILLIS D'ÉPÉE, LIEUTENANTS GENERAUX Ă  leur situation depuis longtemps en vue, Ă  la considĂ©ration sociale dont ils jouissaient anciennement, et non au titre d'admi- nistrateur qui leur avait Ă©tĂ© tout rĂ©cemment confiĂ©. Dans ses divers choix, le peuple visait, non pas Ă  rĂ©compenser le membre zĂ©lĂ© du bureau intermĂ©diaire ou le procureur-syndic qui gĂ©rait avec vigilance les affaires publiques, mais Ă  s'assurer l'appui de l'homme de loi expert, de l'avocat renommĂ©, Ă  confier en mains sĂ»res la dĂ©fense de ses intĂ©rĂȘts. Ce fut donc une action surtout individuelle qu'exercĂšrent ces divers administrateurs ; et celle-ci ne fut empreinte d'aucun caractĂšre officiel aux yeux de ceux qui la subirent. Les trois Ă©vĂȘques de Basse-Normandie ne devaient avoir aucune influence sur l'ordre du clergĂ©. A l'assemblĂ©e de Cou- tances, l'Ă©vĂȘque de cette ville, Talaru, n'exerça guĂšre qu'une prĂ©sidence nominale ; il ne fut Ă©lu que le dernier des quatre dĂ©putĂ©s du clergĂ©, aprĂšs trois curĂ©s de campagne. Godard de BelbƓuf, Ă©vĂȘque d'Avranches, humiliĂ©, n'attendit pas la fin des sĂ©ances pour regagner son diocĂšse. A l'assemblĂ©e de Caen, de Cheylus, Ă©vĂȘque de Bayeux, vaincu par une opposition presque unanime de son clergĂ©, avait opĂ©rĂ© une bruyante retraite dĂšs la premiĂšre sĂ©ance et laissĂ© Ă  d'autres le soin de prĂ©sider les opĂ©ra- tions Ă©lectorales. S'il y eut un mot d'ordre donnĂ©, ce fut du clergĂ© rural qu'il partit ; s'il y eut pression dans les dĂ©libĂ©rations, ce fut de bas en haut qu'elle s'exerça M. Dans l'ordre de la noblesse, mĂȘme indĂ©pendance probable. Le grand bailli d'Ă©pĂ©e du Cotentin, le septuagĂ©naire marquis de Blangy, Ă©tait mourant et ne put venir prĂ©sider l'assemblĂ©e de Coutances W. Le duc de Coigny, grand bailli d'Ă©pĂ©e de Caen, prĂ©sident de l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie, homme considĂ©rable dans la province et persona grata Ă  la Cour, vint diriger les dĂ©libĂ©rations de l'assemblĂ©e de Caen, qui devait l'Ă©lire pour son premier dĂ©putĂ©. Aux deux assemblĂ©es dĂ©finitives du Tiers Ă©tat de Caen et de Coutances, les deux lieutenants gĂ©nĂ©raux qui prĂ©sidĂšrent les sĂ©ances jouĂšrent le rĂŽle assez effacĂ© et discret d'arbitres et de conciliateurs, et non celui de chefs de parti. Aussi, ni DuperrĂ© de Lisle, Ă  Caen, ni Desmarets de Monchaton, Ă  Coutances, 1 Pour les dĂ©lails, voir plus loin, p. 191, 192. 2 Il mourut Ă  Fontaine-Ktoupefour, prĂšs Caen, et y fut inhumĂ© le 25 aoĂ»t 1' Arch. comm., Fontaine-Etoupefour, GG 5. LE MOUVEMENT ÉLECTORAL DU CLERGÉ 187 n'exercĂšrent d'action marquante sur ces assemblĂ©es. Leur rĂŽle se borna Ă  ouvrir et Ă  clore les sĂ©ances, Ă  coter et parapher les procĂšs-verbaux et les cahiers. Ainsi, un gouverneur absent, un commandant en chef malade, un bailli d'Ă©pĂ©e mourant, trois Ă©vĂȘques sans prestige et sans autoritĂ© dans leurs diocĂšses, un intendant conscient de sa dĂ©- chĂ©ance et circonspect par systĂšme, des subdĂ©lĂ©guĂ©s impopu- laires et dĂ©couragĂ©s, des lieutenants gĂ©nĂ©raux de baillages assez effacĂ©s, tels Ă©taient en Basse-Normandie, en fĂ©vrier 1789, les reprĂ©sentants d'un gouvernement qui entendait lui-mĂȘme laisser aux Ă©lecteurs une entiĂšre libertĂ© pour l'expression de leurs vƓux et la dĂ©signation de leurs mandataires. Dans de pareilles condi- tions, le mouvement Ă©lectoral put se dĂ©velopper sans contrainte dans l'Ă©tendue des deux bailliages de Caen et de Coutances. Toutes les opinions purent s'y manifester, toutes les audaces s'y produire. Ce fut l'ordre du clergĂ© qui se montra le plus audacieux. Ses assemblĂ©es furent les plus agitĂ©es et les plus tumultueuses ; ses Ă©lections, dans le bailliage de Caen, furent les seules marquĂ©es d'un caractĂšre vraiment dĂ©mocratique. DĂšs le dĂ©but de la pĂ©riode Ă©lectorale, le haut clergĂ© conçut des inquiĂ©tudes sur l'issue des opĂ©rations futures. Il entrevit les pĂ©rils dont le menaçait le RĂšglement du 24 janvier 1789 en bouleversant la composition antique de son ordre aux Etats gĂ©nĂ©raux ». Les chapitres des cathĂ©drales surtout, rĂ©duits Ă  un dĂ©putĂ© par dix chanoines, protestĂšrent contre ce qu'ils appelaient une lĂ©sion de leurs droits. On sent nettement percer dans leur requĂȘte la peur des desservants ruraux, qui, au jour du vote, seront le nombre et la force. D'aprĂšs le RĂšglement, dit le cha- pitre de Bayeux, il est possible que nul Ă©vĂȘque ne soit dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux. Il est Ă  craindre que le nombre prodigieux de jeunes ecclĂ©siastiques sans bĂ©nĂ©fices appelĂ©s aux assemblĂ©es Ă©lectorales ne puisse guĂšre accroĂźtre la masse des lumiĂšres de l'assemblĂ©e particuliĂšre de l'ordre du clergĂ©, et qu'il n'ajoute infiniment Ă  l'embarras de ses dĂ©libĂ©rations. Leur nombre est tel, surtout en Normandie, que, par cet avantage seul, ils pourraient concentrer en eux-mĂȘmes la dĂ©putation de l'ordre du clergĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux. Du moins ils influeront trĂšs puissamment, s'ils le veulent, sur le choix des dĂ©putĂ©s » *. 1 Protestation faite par le chapitre rie Bayeux, le 14 mars 1789. Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen. Cf. Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 188 INQUIÉTUDE DU HAUT CLERGÉ Ce que les chanoines de Bayeux Ă©crivaient, tout le haut clergĂ© des trois diocĂšses d'Avranches, de Bayeux et de Coutances le pensait. Il en voulait au roi d'avoir, dans ses lettres de convo- cation, trop fait l'Ă©loge des curĂ©s et laissĂ© dĂ©grader les Ă©vĂȘques et les chapitres . Il pensait, avec l 'Ă©voque de Bayeux, qu'il y avait deux ordres distincts dans le clergĂ©, l'un qui gouvernait, l'autre qui Ă©tait gouvernĂ© , et il considĂ©rait comme mal fait et inconstitutionnel un RĂšglement qui allait permettre aux vicaires et curĂ©s aigris d'humilier leur Ă©vĂȘque ». Tout en se rĂ©ser- vant d'en imposer par une protestation solennelle au prolĂ©tariat ecclĂ©siastique rĂ©uni dans les prochaines assemblĂ©es Ă©lectorales, les grands dignitaires du clergĂ© bas-normand n'en suivaient pas moins d'un Ɠil inquiet la campagne menĂ©e par les prĂȘtres ruraux pour la conquĂȘte de la dĂ©putation. Si les chefs de la hiĂ©rarchie ecclĂ©siastique, les aristocrates de Tordre, avaient des raisons intĂ©ressĂ©es pour demander le main- tien de leur situation, la plĂ©nitude de l'autoritĂ© Ă©piscopale et la subordination du clergĂ©, les curĂ©s au contraire dĂ©siraient ardem- ment la cessation des nombreux abus dont ils souffraient et sai- sirent avec enthousiasme l'occasion d'exposer leurs lĂ©gitimes griefs. La lettre du roi, enivrante pour eux, exalta leur effer- vescence » W. Leurs Ă©vĂȘques ne pouvaient exercer une forte action sur eux. Ils ne rĂ©sidaient pas, n'avaient pas pris avec eux le contact qui dĂ©cide et affermit les sympathies. Le clergĂ© de Coutances s'Ă©tait plaint Ă  maintes reprises des frĂ©quentes absences de son vieil Ă©vĂȘque Talaru,[trop assidu au chĂąteau des Matignon 2. L'Ă©vĂȘque de Bayeux, du Cheylus, homme de maniĂšres distinguĂ©es, aumĂŽ- nier de la comtesse d'Artois, Ă©tait un prĂ©lat de cour, aimant la belle sociĂ©tĂ©, mondain, joueur, trop au-dessus de son clergĂ© pour s'intĂ©resser Ă  lui 3. Godard de BelbƓuf, Ă©vĂȘque d'Avran- ches, d'une vieille famille noble de Normandie, passait pour autoritaire, s'Ă©tait fait des ennemis dans son clergĂ©, et l'un de ses prĂȘtres, BĂ©cherel, venait de gagner contre lui au Parlement de Rouen un procĂšs engagĂ© Ă  propos d'un trait de dĂźme 4. I Protestation faite le 20 niais 17N9 par les dĂ©putĂ©s du chapitre de Baveux, prĂšs de Villedeuil. Arch. nat., Ba 27, 1. 15. 2 Desdevises du DĂ©sert, Le Cotentin en 1789, p. 36. 3 Depuis que M. de Cheylus Ă©tait Ă  Baveux, Ă©crit un de ses successeurs, il s'Ă©- tait endormi dans la mollesse et les plaisirs, au milieu de quelques flatteurs qui le berçaient. ‱ Bisspn, MĂ©moires, fol. 77. \ AbbĂ© Pigeon, Le grand Bailliage de Mortaih en 1789. MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© aca- dĂ©mique du Cotentin, t. III, p. 52G. ATTITUDE HOSTILE DU BAS CLERGÉ 189 Dans les cahiers particuliers qu'ils rĂ©digĂšrent pendant la pĂ©riode Ă©lectorale, les curĂ©s manifestent nettement leur Ă©tat d'esprit, hostile aux Ă©vĂȘques, aux grands vicaires, aux chapitres, aux abbayes. Ils opposent la condition de l'utile pasteur, du desservant Ă  la portion congrue, exposĂ©s Ă  voler Ă  toute heure au secours des malades et des malheureux, Ă  celle du riche prĂ©lat qui possĂšde livres de rente, sans faire la moindre aumĂŽne, ou du chanoine qui jouit de trois ou quatre mille livres de revenu annuel, moyennant l'assistance au chƓur pendant trois heures par jour et seulement neuf mois de l'annĂ©e *. Les uns sont trop riches, et, vivant au sein des dĂ©lices et de l'opulence, scanda- lisent les peuples par l'usage qu'ils font des biens de l'Eglise, tandis que les autres, ceux qui forment la partie utile et labo- rieuse, rĂ©duits Ă  la pauvretĂ©, sont forcĂ©s de s'avilir pour se pro- curer le simple nĂ©cessaire» *. Ils demandent l'amĂ©lioration de leur sort, l'augmentation des portions congrues, l'abolition des dĂ©ports, charge odieuse particuliĂšre Ă  la Normandie, qui ruinent les paroisses au profit des vicaires gĂ©nĂ©raux 3. Suppres- sion des abbayes rurales d'hommes comme inutiles, suppression des seigneuries attachĂ©es aux abbayes et aux canonicats, obli- gation des bĂ©nĂ©ficiers Ă  la rĂ©sidence, des dĂ©cimateurs Ă  la cha- ritĂ© *, tels sont leurs vƓux Ă  peu prĂšs unanimes. Les curĂ©s ad- 1 Cahier rĂ©digĂ© par le ctirĂ© de Cartigny et autres curĂ©s du diocĂšse de Baveux, publiĂ© par llippeau, ouv. citĂ©, I. VII, p. 199-206. 2 Cahier de Jacques Seigle, curĂ© de Monceaux, dans Hippeau, ouv. citĂ©, t. VII, p. 206-209. 3 En vertu de ce droit, les Ă©voques et archidiacres normands jouissaient, les pre- miers pour deux tiers, les autres polir un tiers, de tous les revenus appartenant Ă  une cure, pendant le premiĂšre annĂ©e Ă  chaque mutation de titulaire. Par contre ils Ă©taient obligĂ©s Ă  assurer la desserte de la paroisse pendant cet intervalle. Dans la rĂ©alitĂ©, ils louaient les revenus Ă  l'encan et leur fermier livrait l'administration de la paroisse au plus bas prix possible Ă  un desservant de passage, trop pauvre lui- mĂȘme pour soulager les autres. — Sur les abus du dĂ©port, vĂ©ritable droit d'annates local, voir' abbĂ© Bernier. Essai sur le Tiers Ă©tal rural de Basse-Normandie, p. 110. 4 Cahier de plaintes, griefs et dolĂ©ances, rĂ©digĂ© par huit curĂ©s du diocĂšse de Bayeux Isigny et autres paroisses, publiĂ© par Hippeau, ouv. cilĂȘ. t. VII, p. 178-182. Cahier des observations qui peuvent concerner le bien de l'Etat et de la religion, prĂ©sentĂ© par Bense, curĂ© du Manoir, publiĂ© par Hippeau, ibid., p. 187-191. I se plaint des dĂ©tenteurs de dĂźmes, qui ont des entrailles de fer ». Cette annĂ©e, dit-il, ils n'ont pas daignĂ© rĂ©pondre Ă  une lettre pie je leur ai Ă©crite en faveur de mes pauvres; et, depuis que je suis curĂ© dans la paroisse, je n'ai jamais reçu un sol de leur part. » — Le clergĂ© rural est d'accord sur ce point avec les paysans. Quelle part, Ă©vĂšipie de Coutances, avez-vous faite aux pauvres des paroisses dont vous avez rĂ©coltĂ© les dĂźmes ? Vous avez tout enlevĂ©, tout consommĂ© ! » Cahier de Saint- Vaast-la-Hougue. Voir les cahiers du Tiers Ă©tal des bailliages de Coutances et Valognes Bridrey, Cahier du Cotentin, tomes I et II, passim. 1. DEMANDES DE REFORMES DES CURÉS mettent fort bien l'idĂ©e de leur contribution collective aux impĂŽts, mais la plupart voudraient garder lĂ© privilĂšge de s'im- poser eux-mĂȘmes aux dĂ©cimes. Cette rĂ©partition continuerait Ă  ĂȘtre faite par la chambre ecclĂ©siastique de chaque diocĂšse, dont la composition serait modifiĂ©e. Les dĂ©putĂ©s des curĂ©s, qui forment la masse des ecclĂ©siastiques du diocĂšse, y sont toujours l'infinie minoritĂ© ; il faut augmenter leur nombre et leur donner une part plus grande Ă  une rĂ©partition qui intĂ©resse la majoritĂ© du clergĂ© 1. Il faut se garder aussi contre les abus d'autoritĂ© des Ă©vĂȘques. Des synodes annuels ou triennaux, composĂ©s de tous les ecclĂ©- siastiques du diocĂšse, Ă©liraient un conseil permanent chargĂ© de siĂ©ger avec l'official et d'assister l'Ă©vĂȘque dans l'administration de la justice -. Pour opĂ©rer ces rĂ©formes et rĂ©aliser ces amĂ©liorations, les curĂ©s comptent sur l'AssemblĂ©e nationale. Ils s'en remettent Ă  elle du soin de dĂ©truire les abus de l'Eglise, ils provoquent son inter- vention dans un domaine dont plus tard ils lui interdiront l'accĂšs, dans le rĂšglement de questions vitales comme celles des rapports avec Rome, de la distribution des pouvoirs ecclĂ©siastiques ou du sort des biens d'Eglise. L'on trouve dĂ©jĂ  en germe, dans ces cahiers particuliers, la future Constitution civile du clergĂ©. Les curĂ©s bas-normands avaient eu tout le temps de dresser leur programme de revendications. Pendant un mois et demi, il leur avait Ă©tĂ© donnĂ© d'assister au mouvement Ă©lectoral du Tiers Ă©tat ; ils en avaient Ă©tĂ© partout les tĂ©moins ; quelquefois ils y avaient jouĂ© le rĂŽle d'acteurs. Partout ils avaient annoncĂ© au prĂŽne la date de l'assemblĂ©e Ă©lectorale de leur paroisse ; en plus d'un endroit ils avaient, directement ou indirectement participĂ© Ă  ses dĂ©libĂ©rations ; sur quelques points mĂȘme ils l'avaient prĂ©- sidĂ©e 3. La communautĂ© de leurs intĂ©rĂȘts ne les avait-elle pas rapprochĂ©s souvent des paysans? N'avaient-ils pas Ă  se plaindre du haut clergĂ© comme le Tiers se plaignait de la noblesse, et pour les mĂȘmes raisons? Ils suivirent donc avec une complai- 1; Souhait et dolĂ©ances pour une rĂ©forme clans la chambre ecclĂ©siastique chargĂ©e de la rĂ©partition des dĂ©cimes, que fait Jean-Jacques Bouffey, prĂȘtre, curĂ© de Saint -Aiynan-le- Malherbe. diocĂšse de Bai/eux, dans Hippeau, ouv. citĂ©, t. VU, p. 191-199. 2i VƓu de Jacques Seigle, curĂ© de la paroisse de Monceaux. VƓux du clergĂ© de Saint-Pierre-de-Caen, dans Hippeau, ouv. citĂ©, t. VII, p. 206 et 159. 3 Exemples Ă  Mondeville bailliage de Caen ; Aubusson, La Chapelle-Cesselin, Roucamp, Saint-Pierrc-du-Tronchet bailliage de Vire ; Saint-Martin-le-Vieux bail- liage de Coulances ; Maupertuis. Omonville-la-Petile, Sideville, Sortosville prĂšs Valognes, Saint-Martin-le-GrĂ©ard. Sa4nte-GeneviĂšve bailliage de Valognes. LA COALITION DES CURES 191 santĂ© attention les dolĂ©ances de leurs paroissiens. Il arriva mĂȘme qu'ils en inspirĂšrent plus d'une. Maint d'entre eux fut directe- ment incitĂ© Ă  se mĂȘler au mouvement. Un prince du sang, le duc d'OrlĂ©ans, apanagiste du comtĂ© de Mortain, ne fit-il pas adresser Ă  tous les curĂ©s du Mortainais par son agent, le marquis de Limon, une circulaire les invitant Ă  donner de bons conseils Ă  leurs paroissiens »?*. Plus d'un cahier rural, en tout cas, contient des traces Ă©videntes de leur influence. Quand les diverses assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages secondaires rĂ©digĂšrent leurs cahiers, les curĂ©s virent avec joie que les vƓux Ă©mis sur la religion leur Ă©taient favorables. Le Tiers Ă©tat, d'une façon gĂ©nĂ©rale, s'y montrait ennemi des moines et des grands dignitaires, ami des desservants ruraux. Les dolĂ©ances du bailliage de Caen, quand elles furent connues, firent la plus grande sensation dans le clergĂ©. On les rĂ©imprima jusqu'Ă  trois fois de suite 2. Une campagne ouverte fut-elle entreprise dans les deux grands bailliages de Caen et de Coutances en vue des Ă©lections du clergĂ©? Aucun document ne le prouve. Un arrĂȘt du Conseil du 25 fĂ©vrier 1789 avait interdit les rĂ©unions en corps de cet ordre. Il semble toutefois que, dans ces deux ressorts, l'exclusion des hauts digni- taires du clergĂ© Ă©tait chose tacitement convenue et que l'entente s'Ă©tait dĂ©jĂ  faite sur plusieurs noms. L'abbĂ© Soulavie, qui joignait Ă  ses fonctions de vicaire gĂ©nĂ©ral de l'Ă©vĂȘque de ChĂąlons celles de curĂ© de Septvents dans le Bocage, et qui dut ĂȘtre un des plus ardents agitateurs du clergĂ© bayeusain, nous a laissĂ© des Ă©lec- tions du bailliage de Caen un journal assez intĂ©ressant 3. DĂšs le 6 mars 1789, dix jours avant la rĂ©union de l'assemblĂ©e Ă©lecto- rale, il Ă©crivait Ă  Necker L'ordre des curĂ©s ne veut que des curĂ©s pour dĂ©putĂ©s et leur choix paraĂźt dĂ©terminĂ© ». La veille de l'Ă©lection il lui Ă©crivait Ă  nouveau L'assemblĂ©e Ă©lira trois curĂ©s pour Paris ; depuis plusieurs mois le parti qui Ă©tait pris avait nommĂ© d'avance trois Ă  quatre sujets qui rĂ©unissent les voix » 4. MĂȘmes pronostics pour l'assemblĂ©e de Coutances. 1 Journal de la Basse-Normandie, annĂ©e 1789, n° 12, supplĂ©ment. 2 Journal des Ă©lections du bailliage de Caen, par Soulavie. Arch. nat. , Ba 27. 3 Sur Soulavie, voir le travail de A. Mazon, Histoire de Soulavie, naturaliste, diplo- mate, historien, 2 vol.. Paris, 1893. —A. Brette a publiĂ© les sept bulletins de Soulavie dans La RĂ©volution française, 1894, p. 162 sqq., sous ce titre Les Elections du ClergĂ© du Bailliage de Caen en 1789. 4 Le 14 mars, Le Tuai, curĂ© de Saint-Viger-le-Grand, diocĂšse de Baveux, adressa Ă  Necker une plainte contre son Ă©vĂȘque, qui lui avait refusĂ© l'autorisation de se 192 LES CURÉS A L*ASSAUT DK LA DEPUTATION o L'ordre ecclĂ©siastique, Ă©crit Ă  l'intendant dĂšs le 16 mars le subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranches, Montitier, composĂ© pour la plupart de curĂ©s, malgrĂ© la politesse et la prĂ©venance affectueuse des deux prĂ©lats ], paraĂźt dĂ©cidĂ© Ă  ne pas leur accorder son suf- frage. . . Ils veulent que les prĂ©lats les traitent avec plus d'Ă©gards, et soient enfin convaincus que les curĂ©s et les autres ecclĂ©siastiques forment la portion la plus essentielle du clergĂ© . . . Il est probable que leurs dĂ©putĂ©s pour Versailles seront Ă©lus dans la classe des curĂ©s » 2. Ainsi, Ă  la veille des Ă©lections, le clergĂ© des trois diocĂšses de Bayeux, d'Avranches et de Coutances Ă©tait apparemment divisĂ© en deux partis d'inĂ©gale force les Ă©piscopaux et leurs adver- saires, ceux-ci beaucoup plus nombreux. Le clergĂ© dĂ©mocratique, recrutĂ© parmi les fils de laboureurs et de paysans, et dĂ©sireux de se soustraire au joug oppressif du clergĂ© aristocratique, issu de la noblesse, allait prendre dĂšs le premier jour une vigoureuse offensive, et marcher avec une hardiesse parfois brutale Ă  l'assaut de la dĂ©putation. Avant toute rĂ©union, sa victoire Ă©tait assurĂ©e. Comme le clergĂ©, la noblesse ne formait pas un ordre unifiĂ© et compact en Basse-Normandie. A cĂŽtĂ© de la grande noblesse, Ă©trangĂšre au pays par son origine, et qui y possĂ©dait les plus riches terres, le duc d'OrlĂ©ans, comte de Mortain, les Grimaldi- Matignon comtes de Torigni et barons de Saint-LĂŽ, les Mont- morency, les Sully, les Brancas, les Soubise, les JuignĂ©, etc., il y avait une noblesse locale, d'illustration plus ou moins ancienne faire remplacer par un vicaire, sans doute pour rendre impossible son voyage Ă  l'as- semblĂ©e Ă©lectorale de Caen. Le but de la conduite de Monseigneur, Ă©crivait Le Tuai, est d'empĂȘcher que ce ne soit trois curĂ©s d'ĂȘtre dĂ©putĂ©s aux Etats de Ver- sailles, et d'y en faire parvenir selon son vƓu ». Arch. nat., Ba 27, 1. 45. Il Les deux Ă©voques de Coutances et d'Avranches. 2 Lettre de Montitier Ă  l'intendant, 10 mars 1789, Arch. dĂ©p., Calvados, G 0353.— Cette entente prĂ©alable entre les curĂ©s du Cotentin est attestĂ©e par un autre docu- ment significatif. Le 20 fĂ©vrier 1789, Lelubois, curĂ© de Fontenay, celui-lĂ  mĂȘme qui devait ĂȘtre Ă©lu premier dĂ©putĂ© du clergĂ© Ă  l'assemblĂ©e le Coutances, Ă©crivait Ă  Neckef au nom de ses confrĂšres, auxquels des arrĂȘts dĂ©fendent de s'assembler eu corps, sans quoi ils auraient pris la libertĂ© de lui adresser cette supplique ». Il lui reprĂ©sente que, pour rĂ©pondre Ă  ses vues, il est de la plus grande importance que „ e clergĂ© du second ordre, qui peut s'assimiler au Tiers Ă©tat comme le peuple rela- tivement Ă  la noblesse, se trouve en grand nombre Ă  l'assemblĂ©e qui nommera les dĂ©putĂ©s pour les Etats gĂ©nĂ©raux ». Pour loger tant de monde, les sĂ©minaires lui paraissent indispensables; il prie Necker de les faire Ă©vacuer pendant la durĂ©e de l'assemblĂ©e Ă©lectorale pour que les logements soient libres. — Cette dĂ©marche directe auprĂšs du ministĂšre, par dessus la tĂȘte de rĂ©vĂȘque, faite au nom des curĂ©s par leur futur dĂ©putĂ©, est l'indice d'une ligue occulte du bas clergĂ©, dont Lelubois Ă©tait un des meneurs. Arch. nat., B"1 53. MOUVEMENT ÉLECTORAL DE LA NOBLESSE. LES LIBERAUX 193 et de fortune variable, mais qui avait conservĂ© un pied dans la contrĂ©e tels les Coigny, les Vassy, les Faudoas, les Balleroy, les Cussy, les Auxais, les Bricqueville, les VendƓuvre, les Osse- ville, les Rotours, les Carbonnel, les Bonvouloir, et tant d'au- tres 1]. AttachĂ©s Ă  leur pays, ces gentilshommes Ă©taient prĂȘts Ă  en dĂ©fendre les intĂ©rĂȘts la plupart d'entre eux Ă©taient associĂ©s Ă  l'administration provinciale depuis la rĂ©forme de 1787. A la session de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen, la dĂ©putation de la noblesse, jointe Ă  celle du clergĂ©, avait offert une contribution volontaire annuelle de livres jusqu'Ă  complĂšte extinction des dettes que la gĂ©nĂ©ralitĂ© avait contractĂ©es envers les paysans expropriĂ©s pour les travaux des routes 2. D'Auxais de Monfar- ville, prĂ©sident de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Saint-LĂŽ, y avait pris la dĂ©fense des petits propriĂ©taires ruraux dans son mĂ©moire sur les bordiers r. Le comte Louis de Vassy avait prĂ©conisĂ© la crĂ©ation de cours d'accouchements dans les villes et la construction de maisons salubres pour les paysans . Cette large accession des gens de robe Ă  la dĂ©putation rurale s'explique encore par une autre considĂ©ration. Si l'on excepte les six villes nominativement dĂ©signĂ©es dans F Etat annexĂ© au RĂšglement du 24 janvier 1789 » f4, toutes les autres villes des deux grands bailliages de Caen et de Coutances n'avaient droit qu'Ă  quatre dĂ©putĂ©s. Il y avait mĂȘme lĂ  une inĂ©galitĂ© assez cho- quante. Tandis qu'en vertu de l'article 31 du RĂšglement, des bourgs sans organisation municipale eurent droit Ă  une reprĂ©- sentation plus nombreuse par exemple Bricquebec Ă  10 dĂ©putĂ©s, Saint-Sauveur-Lendelin Ă  8, Vassy Ă  7, PĂ©riers, Brix, Saint- Vaast Ă  6, etc . . . , des villes chefs-lieux d'Ă©lection, comme Avranches, Carentan, Saint-LĂŽ, Vire furent rĂ©duites Ă  Ă©lire quatre dĂ©putĂ©s. C'Ă©tait un trop maigre enjeu pour l'ambition 1 Voir ci-dessus, chap. V, p. 2 Le Garpentier Ă  Vire et Amette Ă  FerriĂšres, sont deux Ă©tudiants en droit; Tail- lebrocq Ă  Baron, Mattingley Ă  Gavrus, Dumanoir Ă  MonlsurvenL Duchesne au DĂ©sert, TĂ©trel Ă  La TrinitĂ©, ThĂ©auit des Orgeries Ă  Saint-Aubin-de-Terregate, sont LicenciĂ©s Ăšs-lois. 3 et Debled, procureurs au bailliage de Caen, sont '-lus Ă  Canteloup et Ă  Ainayr-sur-Orne — Huissiers dĂ©putĂ©s ruraux Mette, Ă  Courson ; Lemarchant, Ă  Lesnault ; FillĂątre, Ă  BrĂ©eey ; et LefrĂ hc-BouillonniĂšre, Ă  Hambye. 1' Etal par ordre alphabĂ©tique, contenant les noms des villes des pays d'Ă©lection qui doivent envoyer plus de quatre dĂ©putĂ©s, publiĂ© par A. Bivtle, ouv. rilĂ©, I. p. 101. SUCCÈS ÉLECTORAUX QU'ILS Y OBTIENNENT 203 des nombreux officiers de justice et hommes de loi qui habi- taient ces villes. Perdus dans la foule des Ă©lecteurs urbains, ils Ă©taient, au contraire, des personnages de premier plan dans les assemblĂ©es rurales. Ils s'y firent Ă©lire et vinrent tenir leur place, comme dĂ©putĂ©s des campagnes, aux assemblĂ©es bailliagĂšres ]>. On en trouve une preuve Ă©clatante dans les opĂ©rations Ă©lectorales du bailliage de Vire. Au procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©limi- naire du bailliage tenue Ă  Vire le 5 mars 1789, figurent comme dĂ©putĂ©s ruraux une vingtaine de citoyens dĂ©signĂ©s en qualitĂ© d'Ă©lecteurs sur le procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e urbaine du 26 fĂ©- vrier 2!. Entre ces deux dates, la paroisse de Coulonces avait Ă©lu deux conseillers au bailliage, Brenet de Brais et Mauduit de la GroudiĂšre. Saint-Germain de Tallevende, placĂ© aux portes de la ville, avait dĂ©putĂ© un autre conseiller au bailliage, Faucon de Saint-Germain et un procureur honoraire Ă  1'Ă©iection, Surbled de la MahĂšre. De Sainte-Marie-Laumont vinrent le conseiller Vivien et l'avocat Cotelle ; du Theil, le doyen des conseillers, du bailliage Saillofest de la Tigerie, qui en Ă©tait lieutenant parti- culier. Cahours, maĂźtre des eaux et forĂȘts Ă  Vire, fut dĂ©putĂ© de Pontfarcy. Des avocats, des notaires, des huissiers virois vinrent reprĂ©senter Beaumesnil, Courson, Campagnolles, Saint-Pierre- Tarentaine et d'autres paroisses du Bocage. Une telle consta- tation est importante. Elle permet de suivre l'action continue exercĂ©e par la bourgeoisie de robe dans la sĂ©rie des assemblĂ©es Ă©lectorales du Tiers Ă©tat. Elle sert Ă  Ă©clairer d'un jour nouveau l'Ă©tude critique de la rĂ©daction des cahiers. 1 Le fait de ces Ă©lections rurales a Ă©tĂ© gĂ©nĂ©ral en Basse-Normandie. Cf. une lettre de Montitier, subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranclies Ă  l'intendant, 27 fĂ©vrier 1789 Les offi- ciers du bailliage de Coutances ne se sont pas trouvĂ©s aux assemblĂ©es des villes tenues par les officiers municipaux ; on dit qu'ils se proposent d'aller dans les paroisses oĂč, sont situĂ©s leurs biens et les maisons de campagne qu'ils habitent pen- dant les vacances, pour y concourir Ă  la nomination des dĂ©putĂ©s ». Arch. dĂ©p., Cal- vados, C 6353. — Dans d'autres bailliages, l'Ă©lection des juges royaux et hommes de loi par les paroisses rurales avait prĂ©cĂ©dĂ© la tenue des assemblĂ©es urbaines. A Caen, par exemple, les dĂ©putĂ©s urbains furent Ă©lus le 4 mars Costy, un des trente dĂ©putĂ©s de Caen, avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dĂ©putĂ© par la paroisse de Maisoncelles-sur-Ajon. Daigremont, lieutenant particulier, Ă©tait, dĂ©s le 1er mars, dĂ©putĂ© de Fontenai-le-Pes- nel ; Roussin, conseiller au bailliage, dĂ©putĂ© de Vieux, etc. L'abbĂ© Soulavie fait allusion, dans son journal manuscrit, Ă  ces Ă©lections des hommes de loi dans les paroisses rurales du bailliage de Caen. Le 1er mars, Ă©crit-il, les paroisses de cam- pagne nomment leurs dĂ©putĂ©s, et plusieurs privilĂ©giĂ©s, qui avaient Ă©tĂ© Ă©loignĂ©s de l'assemblĂ©e de la ville, accoururent Ă  leurs propriĂ©tĂ©s des campagnes oĂč ils se firent Ă©lire. »> Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 2 Cf. F. Mourlot, La conuoeation des Etats gĂ©nĂ©raux de 17H9 dans le Bailliage de Vire. La RĂ©volution française, t. XXXI, 1896, p. 380-346 et 414-420. 204 LES ÉLUS DE L'INDUSTRIE, DU COMMERCE ET DE L'AGRICULTURE En dehors des juges et des hommes de loi, les dĂ©putĂ©s ruraux se recrutĂšrent, en assez petite quantitĂ©, parmi les gens exerçant des professions libĂ©rales professeurs d'UniversitĂ© l\ mĂ©decins '2> chirurgiens 3, arpenteurs-gĂ©omĂštres *. L'industrie et le com- merce, sans ĂȘtre systĂ©matiquement Ă©liminĂ©s de la dĂ©putation rurale, n'ont fourni qu'un nombre insignifiant d'Ă©lus. Dans une rĂ©gion oĂč le littoral est si dĂ©veloppĂ©, oĂč la population presque entiĂšre vit de la mer, on s'attendrait Ă  voir reprĂ©senter les indus- tries maritimes, Ă  trouver des noms d'armateurs, de construc- teurs de navires, de capitaines et de matelots. Seuls quelques officiers gardes-cĂŽtes, quelques officiers d'amirautĂ© rappellent le voisinage marin 5. Un bourg industriel, comme Villedieu, ne compte qu'un seul marchand sur huit dĂ©putĂ©s. Les industries locales, dans certaines rĂ©gions, fournissent çà et lĂ  quelques reprĂ©sentants l'Avranchin dĂ©lĂšgue des sauniers 6, le Bocage, des papetiers et des tanneurs 7. La grande majoritĂ© des Ă©lus appartient Ă  l'Ă©lĂ©ment rural laboureurs » dans les pays de culture, herbageurs » dans les pays d'Ă©levage fS . La plupart d'entre eux Ă©taient syndics muni- 1 Lecoq de Bu-ville, professeur Ă  la FacultĂ© de droit de Caen, Ă©lu Ă  BiĂ©ville ' Moysant, bibliothĂ©caire de l'UniversitĂ© de Caen, Ă  Verson. 2 MĂ©decins Briard, Ă  Cheux ; Cauvet, Ă  Mondeville ; Havard, Ă  Villedieu ; Couil- lard, Ă  BrĂ©ville ; BĂ©cherel el Laroche, Ă  Saint-Hilaire-du-HarcouĂ«t ; Poirier, Ă  BrĂ©cey ; Roussel, aux Loges ; Roullier et Durand, Ă  Saint-Cornier-des-Landes ; Denis, Ă  Saint-Sauveur-le-Vicomte ; Sarouve, Ă  PĂ©riers ; Questin, Ă  Barfleur ; Lehurey, Ă  Saint-James. 3 Chirurgiens Osmond, Ă  Argences ; MĂ»rie, Ă  BĂ©ny Vigeon, Ă  SeptfrĂšres ; Hastey, Ă  Bricqueville-sur-Mer ; De la Cour, Ă  Coudeville ; Hamelin, Ă  Roncey ; Rabasse, Ă  Saint-Martin-le-Vieux ; Surget, Ă  Saint- Romphaire ; Anfray, Ă  Sourde- val ; Boutry, Ă  Barenton ; Haye-LadiviĂšre, Ă  Saint-Georges-de-RouellĂ© ; Lemarchand, Ă  Mesnil-ThĂ©baut ; Lair, ;'i Saint-Hilaire-du-HarcouĂ«t ; Roussel, Ă  BrĂ©cey. 4 GĂ©omĂštres Dupoul de la MorliĂšre, au Petit-Truttemer ; Boursin, Ă  Tirpied. 5 A Anneville-en-CĂšres, Barfleur, Dinneville, Port-Bail, Tourville, Le Vretot, Valcanville. — Sur la reprĂ©sentation des diverses professions aux assemblĂ©es Ă©lectorales du Cotenlin, voir un mĂ©moire de M. Bridrey publiĂ© dans les Comptes-rendus de l'As- sociation française pour l'avancement des Sciences. Cherbourg, 1905, p. 1079 et suiv. 6 Coupard et BouffarĂ©, sauniers, Ă  Courtils ; Lebiguet et LampĂ©riĂšre. Ă  Vains ; Bienvenu, Ă  Genest ; Lechevalier, Ă  Saint-Jean-le-Thomas. 7 Papetiers Nougeot et ChapliĂšre, Ă  Brouains ; GastĂ©, Ă  ChĂ©rencey ; Homo les VallĂ©es, Ă  Vengeons. — Tanneurs Queslier, Ă  ChĂšvreville ; Poulain, au Neufbourg. — Ajoutons, parmi les autres genres de commerce un teinturier Ă  Ver; un boulan- ger Ă  Monlhuchon ; des nĂ©gociants Ă  Ducey et au Fresne-Poret ; des marchands Ă  Saint-James et Saint-Nicolas-des-Bois, Ă  Fontenay et Ă  Parigny. 8 Les professions Ă©trangĂšres Ă  l'agriculture Ă©tant mentionnĂ©es aux procĂšs-ver- vaux des assemblĂ©es, il est permis de croire, lorsque ces derniers sont muets, que les Ă©lus non qualifiĂ©s sont des paysans, propriĂ©taires ou fermiers, adonnĂ©s Ă  la vie rurale assez souvent, d'ailleurs, apparaĂźt la mention de laboureur. ÉLIMINATION DU PROLÉTARIAT RURAL 205 cipaux et prĂ©sidaient l'assemblĂ©e Ă©lectorale de leurs paroissiens 0 Qn'ils fussent propriĂ©taires, ou fermiers, ou tenanciers Ă  un titre quelconque, ils Ă©taient probablement tous rangĂ©s dans la catĂ©- gorie des possĂ©dant-fonds. Il semble que les prolĂ©taires ruraux, manƓuvres, journaliers, travailleurs mercenaires, les futurs citoyens passifs de la Constituante, aient Ă©tĂ© partout Ă©cartĂ©s. Je n'en trouve mentionnĂ©s que deux, dans la paroisse de Gri- mesnil bailliage de Coutances et Ă  Cagny bailliage de Caen. Dans les six villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen auxquelles le RĂšgle- ment royal accordait une reprĂ©sentation exceptionnelle 2, c'est- Ă -dire Ă  Caen, Bayeux, Cherbourg, Coutances, Granville et Valognes, les opĂ©rations Ă©lectorales furent un peu plus compli- quĂ©es. Les assemblĂ©es urbaines du Tiers Ă©tat y furent formĂ©es par les dĂ©lĂ©guĂ©s des communautĂ©s d'arts et mĂ©tiers, les reprĂ©sen- tants des divers corps et ceux des citoyens non incorporĂ©s. Chacune des communautĂ©s d'arts et mĂ©tiers se rĂ©unit au siĂšge de la corporation pour nommer ses dĂ©putĂ©s et leur donner des instructions. Ces assemblĂ©es prĂ©liminaires n'ont laissĂ© aucune trace Ă  Coutances et Ă  Valognes ;J. Le procĂšs-verbal de l'assem- blĂ©e du Tiers Ă©tat de Granville, tenue le 27 fĂ©vrier 1789, men- tionne la prĂ©sence des dĂ©putĂ©s des corporations 4. Les archives 1 Voir ci-dessus, chap. V. p. 104. 2 Les autres villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen comprises dans les deux ressorts judiciaires de Caen et de Coutances, n'eurent droit qu'Ă  quatre dĂ©putĂ©s en vertu de l'article 31 du RĂšglement du 21 janvier 1789. On n'a conservĂ© les procĂšs-verbaux d'assemblĂ©e Ă©lectorale que pour trois d'entre elles Carentan, Saint-LĂŽ et Vire. A Carentan, l'assemblĂ©e des Ă©lecteurs, forte de 106 membres, rĂ©unie le 1er mars dans une salle de l'hĂŽpital, Ă©lut pour dĂ©putĂ©s Desplanques-Dumesnil, maire de la ville ; Hervieu de Pontlouis, lieutenant particulier du bailliage, et deux avocats, Lereculley de la Huberderie et Caillemer. Bridrey. Cahiers de dolĂ©ances, t. I. p. 712. — A Saint- LĂŽ, deux assemblĂ©es successives celle du 27 fĂ©vrier, oĂč l'on Ă©lut six commissaires pour la rĂ©daction du cahier, et celle du 6 mars, oĂč l'on Ă©lut quatre dĂ©putĂ©s, tous avocats Vieillard fds. de Boismartin, Lemenuel de la JuganniĂšre, et Bernard. Arch. nat., B1" 54. — A Vire, le 26 fĂ©vrier, 171 assistante rĂ©unis dans la chapelle de Saint-Thomas, Ă©lurent Flaust, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage ; Mauduit, maire de la ville ; Monlien de Perthou, prĂ©sident de l'Ă©lection, et Surirey, premier juge-con- sul et Ă©chevin. F. Mourlot, La Convocation dans le bailliage de Vire, article citĂ©, p. 309. 3 Le procĂšs-verbal d'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat de Valognes du 5 mars 1789 men- tionne en bloc les cinquante et un comparants reprĂ©sentants des diffĂ©rentes cor- porations, corps et communautĂ©s de cette ville, des bourgeois et habitants ». Nulle indication plus prĂ©cise. Arch. greffe du Tribunal civil de Coutances. Voir Bridrey, , ouv. citĂ©, t. II, p. 7. 4 Arch. coram. Granville, Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ance du 27 fĂ©vrier 1789. Bridrey, oau. citĂ©, t. I, p. 111-114 NĂ©gociants et armateurs, capitaines de na- vires, chirurgiens, procureurs, apothicaires, marchands, huissiers, perruquiers, 206 ASSEMBLÉES DES CORPS ET CORPORATIONS DANS LES VILLES municipales de Cherbourg conservent, avec la liste complĂšte des membres des diverses corporations de la ville, celle des dĂ©putĂ©s que ces corporations envoyĂšrent le 4 mars 1789 Ă  l'assemblĂ©e urbaine du Tiers Ă©tat ]. Ces documents ne nous renseigneraient pas de façon suffisante sur les premiĂšres opĂ©rations Ă©lectorales des villes des bailliages de Caen et de Coutances ; deux d'entre elles heureusement, et non des moins importantes, Caen et Bayeux, offrent des informations plus prĂ©cises. Leurs archives munici- pales ont conservĂ© les procĂšs-verbaux de la plupart des rĂ©unions corporatives prĂ©paratoires qui ont Ă©tĂ© tenues du 21 au 28 fĂ©vrier 1789 celles de Caen contiennent 31 procĂšs-verbaux et 29 cahiers de corporations '2 ; celles de Bayeux, 32 procĂšs-verbaux, 11 ca- cordonniers, cabaretiers, menuisiers, charpentiers, marins, boulangers, tonneliers tailleurs et tisserands ». 1 Arch. corn m., Cherbourg, AA G4. Voici, dans l'ordre du procĂšs-verbal de l'as- semblĂ©e du 4 mars 1789, 1 Ă©numĂ©ration des groupements corporatifs adonnĂ©s au com- merce ou Ă  l'industrie Porteurs de commission de la marine ; entrepreneurs de travaux du roi ; nĂ©gociants, fabricants de draps et marchands merciers, de fer et de vin ; tanneurs, teinturiers, selliers, bourreliers ; capitaines de long cours ; maĂźtres au cabotage ; constructeurs de navires; maĂźtres charpentiers, voiliers et cordiers marchands Ă©piciers graissiers ; maĂźtres perruquiers; maĂźtres tailleurs; aubergistes; tonneliers; cafetiers; traiteurs; pilotes lamaneurs ; bouchers; boulangers; cabare- tiers chapeliers ; menuisiers ; forgerons, armuriers, ferblantiers ; cordonniers ; maçons ; meuniers. > Voir BrĂźdrey, oui', citĂ©, t. 11, p. 43-4G. 2 Arch. connu., Caen, AA 47. ProcĂšs-verbaux d'assemblĂ©es Ă©lectorales de 31 com- munautĂ©s d'arts et mĂ©tiers, rĂ©unies du 21 au 25 fĂ©vrier 1789 au bureau de la c. Par suite d'un tel empressement, les assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages furent partout au complet. Si dans les ressorts judi- ciaires de petite Ă©tendue, le nombre des dĂ©putĂ©s prĂ©sents ne forme 1 Un certain nombre de paroisses se trouvent dans ce cas particulier Isigny, Anctoville, Banville, Fresnay-sur-Mer, LouviĂšres, Saint-Loup-Hors bailliage de Bayeux; Anctoville bailliage de Coutances; Gouberville. Neuville-au-Plain, Vras- ville bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte. — RĂ©ville, au bailliage de Valognes, envoya deux dĂ©putĂ©s sur quaire. 2 Sur les dĂ©fauts de paroisses dans les deux ressorts de Caen et Coutances, voir Onou, La Comparution des paroisses en 1789, dans La RĂ©volution française, t. XXXII, 1897, p. 339. Sa liste prĂ©sente quelques erreurs. Cf. Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, p. 9, 10. 214 TRANQUILLITÉ DES ASSEMBLÉES pas un total trĂšs Ă©levĂ©, comme Ă  CĂ©rences 26 dĂ©putĂ©s, Ă  Tinchebrai 79, ou Ă  Saint-LĂŽ 80, l'effectif fut plus considĂ©rable Ă  Saint- Sauveur-Lendelin, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Carentan, Torigni, oĂč il dĂ©passa la centaine ]\ L'assemblĂ©e de Mortain atteignit presque deux cents membres 191 ; celle d'Avranches rĂ©unit 217 dĂ©putĂ©s et celle de Vire 259. Dans les trois bailliages de Valognes, Bayeux et Caen, qui comprenaient un grand nombre de paroisses rurales, les procĂšs-verbaux mentionnent la prĂ©sence de 324, 311 et 488 dĂ©putĂ©s. MalgrĂ© leur importance numĂ©rique, ces rĂ©unions furent des plus pacifiques, au tĂ©moignage des con- temporains. Les assemblĂ©es se sont passĂ©es dans le plus grand ordre et la plus grande harmonie, Ă©crit Robillard subdĂ©lĂ©guĂ© et lieutenant gĂ©nĂ©ral Ă  Saint-LĂŽ, tout esprit de parti a Ă©tĂ© Ă©loigné»^2. Desmarets de Montchaton, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Coutances, en Ă©crit autant au garde des sceaux sur les opĂ©rations Ă©lectorales de son bailliage J'ai joui de la satisfaction de voir rĂ©gner dans cette assemblĂ©e la concorde et l'esprit de patrio- tisme si dĂ©sirables dans la circonstance. Chacun s'est empressĂ© de donner des preuves de son zĂšle » 3. A Avranches, l'harmonie, la concorde et la libertĂ© des suffrages ont passablement rĂ©gnĂ© dans les diffĂ©rentes assemblĂ©es » [\ L'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat de Valognes s'est passĂ©e assez tranquillement, car on ne peut appeler troubles quelques clameurs indispensables Ă  la rĂ©union d'une multitude un peu tumultueuse » 5. Cette tranquillitĂ© est due en grande partie au procĂ©dĂ© de tra- vail qu'adoptĂšrent la plupart de ces assemblĂ©es. Comme il fallait un certain temps pour fondre les cahiers particuliers des villes et des campagnes en un cahier unique, elles confiĂšrent cette tĂąche, dĂšs leur sĂ©ance d'ouverture, Ă  un certain nombre de com- missaires ^6. Le mode d'Ă©lection des rĂ©dacteurs varia selon les 1 A Carentan, 111 membres; Ă  Saint-Sauveur-Lendelin, 118; Ă  Saint-Sauveur-le- Vicomte, 131 ; Ă  Torigni, 136. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6356. Lettre du subdĂ©lĂ©guĂ© Robillard Ă  l'intendant. 3 Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Lettre du lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Cou- tances au garde des sceaux, 16 mars 1789. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6318. Lettre du subdĂ©lĂ©guĂ© de Montitier Ă  l'intendant 7 mars 1789. 5 Ibid., C 6358. Lettre du subdĂ©lĂ©guĂ© Sivurd de Beaulieu Ă  l'intendant, 16 mars 1789. 6 Dans deux assemblĂ©es prĂ©liminaires de bailliage le cahier fut rĂ©digĂ© en com- mun Ă  CĂ©rences, oĂč l'assemblĂ©e, qui comptait 26 membres, Ă©lut 7 dĂ©putĂ©s le 2 mars 1789 Bridrev, ouv. cilr, t. II, p. 787, et Ă  Vire, oĂč les dĂ©putĂ©s demandĂšrent Ă  vaquer tous » Ă  la rĂ©daction du cahier. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Vue. Arch. dĂ©p., Calvados, non inventoriĂ©. ÉLECTION DES COMMISSAIRES REDACTEURS 215 bailliages. A Coutances, l'assemblĂ©e divisa les paroisses com- parantes en cinq districts et chacun d'eux nomma deux commis- saires M. Celle de Bayeux les Ă©lut en faisant l'appel des sergen- teries. À Caen, l'on discuta pour savoir si on les nommerait par arrondissement ou successivement ». Les paroisses de campagne dĂ©siraient l'Ă©lection par arrondissement ; mais une ordonnance du bailliage dĂ©clara cette forme contraire au rĂšglement et aprĂšs avoir choisi les six commissaires de Caen, l'assemblĂ©e se mit Ă  procĂ©der isolĂ©ment Ă  la nomination des dix-huit commissaires ruraux, Ă  haute voix et par ordre alphabĂ©tique des villages. Cette opĂ©ration menaçait de traĂźner en longueur et malgrĂ© des protes- tations, on se vit obligĂ© d'Ă©lire en bloc les huit derniers commis- saires 2\ Ces commissions comprirent en gĂ©nĂ©ral un nombre assez res- treint de membres vingt-huit Ă  Bayeux, vingt-quatre Ă  Caen, vingt Ă  Saint-LĂŽ, quinze Ă  Torigni, douze Ă  Carentan, Mortain, Valognes, onze Ă  Coutances et Ă  Avranches, dix Ă  Saint-Sauveur- le-Vicomte, sept Ă  PĂ©riers, six Ă  Tinchebrai W. Pendant que s'accomplissait sans bruit leur travail, les assemblĂ©es s'Ă©taient sĂ©parĂ©es. Quelques-unes d'entre elles se rĂ©unirent Ă  nouveau pour entendre la lecture du cahier bailliager, lui donner leur appro- bation et Ă©lire le quart de leurs membres comme dĂ©putĂ©s au bailliage principal ; cette seconde rĂ©union Ă©tait forcĂ©ment incom- plĂšte, plus d'un dĂ©lĂ©guĂ© rural n'y revint pas, ou ne fit qu'y apparaĂźtre. A Caen, Ă©crit Soulavie, le lieutenant gĂ©nĂ©ral proposa Ă  l'assemblĂ©e d'Ă©lire en bloc les 122 dĂ©putĂ©s du bailliage. Le parti de la robe et de la municipalitĂ© soutint cet avis et les dĂ©pu- te tĂ©s de la campagne y consentirent, dĂ©posant entre les mains du lieutenant gĂ©nĂ©ral et du procureur du roi une liste de 122 dĂ©putĂ©s et se retirĂšrent » 4. Dans maint bailliage les assemblĂ©es n'exercĂšrent mĂȘme pas ce contrĂŽle de forme sur la rĂ©daction du cahier. Pour Ă©viter aux Cl Arcli. nat., B 35, liasse 7n, et Àrch. du greffe du Tribunal civil de Cou lancĂ©s. Dans ce dĂ©pĂŽt est conservĂ© le procĂšs-verbal d'Ă©lection des deux commissaires d'un de ces cinq districts, celui de Villedieu. Les autres Ă©taient Coutances, Granville, Gavray, Tessy. 2 Arch. nat., Ba 27, liasse 15. Bulletins de l'abbĂ© Soulavie. 3 ProcĂšs-verbaux des assemblĂ©es prĂ©liminaires du Tiers Ă©tat de ces divers bail- liages; tous ceux du bailliage de Cotentin, au greffe de Coutances, sauf celui du ressort propre de Coutances Arch. nat., Ba 35, 1. 70 ; ceux de Bayeux et Torigni, au greffe de la Cour d'appel de Caen, et celui de Caen aux Arch. nat., BH 27, I. 4~>. 4 Arch. nat., Ba 27, liasse 45. 216 ÉLECTION DES DEPUTES DU QUART RÉDUIT trois quarts des dĂ©putĂ©s ruraux les frais onĂ©reux d'un retour Ă  la ville 0>, elles procĂ©dĂšrent Ă  la fois Ă  la nomination des rĂ©dacteurs et des dĂ©putĂ©s au bailliage principal et s'en remirent Ă  ces der- niers du soin de tout rĂ©gler. Celle d'Avranches, composĂ©e de 217 dĂ©libĂ©rants, donna le 5 mars 1789 Ă  ses 54 dĂ©putĂ©s plein pouvoir d'arrĂȘter et signer le cahier gĂ©nĂ©ral des plaintes, deman- des et dolĂ©ances tel et en l'Ă©tat qu'il aurait Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par les dits sieurs commissaires et qu'il leur serait reprĂ©sentĂ© le vendredi 13 de ce mois » ; elle se sĂ©para ensuite dĂ©finitivement 2. Les 301 dĂ©putĂ©s rangĂ©s dans les cinq districts Ă©lectoraux du bailliage de Coutances, en mĂȘme temps qu'ils choisissaient les commissaires rĂ©dacteurs du cahier unique, dĂ©signĂšrent le quart d'entre eux afin de l'examiner et d'y faire pour le bien commun telles obser- vations qu'ils aviseraient ». Ils dĂ©clarĂšrent s'en rapporter en tout Ă  la prudence et Ă  la dĂ©cision de ceux-ci » 3. A Saint-LĂŽ, les 20 commissaires rĂ©dacteurs Ă©lus dĂšs le premier jour se trou- vĂšrent former juste le quart de l'assemblĂ©e 4. L'assemblĂ©e du bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, rĂ©unie Ă  PĂ©riers le 9 mars, forte de 128 dĂ©putĂ©s, se rĂ©duisit au quart le lendemain et donna Ă  ses 31 dĂ©lĂ©guĂ©s mission d'approuver le travail que les sept com- missaires devaient leur prĂ©senter le 13 mars 5. Cette hĂąte des paysans Ă  retourner Ă  leurs champs favorisa le succĂšs Ă©lectoral des magistrats et des hommes de loi. Plus d'un d'entre ceux-ci, aprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă©liminĂ© par les suffrages urbains, rentrait le front haut Ă  l'assemblĂ©e bailliagĂšre, comme Ă©lu d'une paroisse rurale. Ils n'Ă©taient, Ă  vrai dire, qu'une minoritĂ© plus ou moins importante selon les ressorts Ă  Coutances, oĂč ils Ă©taient 54 en face de 216 laboureurs, ils formaient Ă  peine le sixiĂšme de la reprĂ©sentation du bailliage ; Ă  Mortain, ils Ă©taient moins de 30 sur 191 dĂ©putĂ©s ; Ă  Tinchebrai, moins de 10 sur 97 prĂ©sents. Dans les autres assemblĂ©es prĂ©liminaires du Cotentin et dans celles du ressort de Caen, ils Ă©taient aussi, sans qu'on puisse en prĂ©ciser la proportion, en infĂ©rioritĂ© numĂ©rique par rapport aux dĂ©lĂ©guĂ©s paysans, dĂ©signĂ©s sous le terme de laboureurs ou de propriĂ©taires ; ils partageaient cette infĂ©rioritĂ© avec les reprĂ©sentants urbains 1 Beaucoup d'entre eux Ă©taient pressĂ©s de rentrer dans leurs fermes pour faire les mars ». Voir Bridrey, oiw. citĂ©, t. 1, p. 14. 2 Arch. greffe du Tribunal eivil de Coutances. ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©- liminaire du Tiers Ă©tat du bailliage d'Avranches, 5 mars 1789. 3 Ibid., Etat des dĂ©putĂ©s du district de Villedieu, 3 mars 1789. 4 Ibid., ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tal du bailliage de Saint-LĂŽ, 10 mars 1789. 5 Arch. nat., Bm 54. EFFACEMENT DES DEPUTES RURAUX 217 de l'industrie et du commerce, assez clairsemĂ©s dans la masse des Ă©lecteurs. Et cependant, par un acte de vĂ©ritable abdication, les laboureurs, qui avaient la prĂ©pondĂ©rance numĂ©rique dans les assemblĂ©es et qui pouvaient la conserver dans les commis- sions et les dĂ©putations, s'effacĂšrent presque partout devant une minoritĂ© plus Ă©clairĂ©e et plus audacieuse. La nĂ©cessitĂ© d'un sĂ©jour plus ou moins prolongĂ© Ă  la ville pour la rĂ©daction et la ratification des articles du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire donna l'avantage aux habitants des villes, Ă  ceux qui y avaient leur rĂ©si- dence et leurs occupations. Par une habile tactique, issue des cir- constances, l'Ă©lĂ©ment urbain, dans la plupart des assemblĂ©es, prit le pas sur l'Ă©lĂ©ment rural; dans ces rĂ©unions, tenues par autoritĂ© de justice, les gens de robe parvinrent Ă  Ă©liminer la masse des paysans, Ă  substituer Ă  la force incohĂ©rente du nombre l'influence victorieuse de leur fortune, de leur situation sociale et de leurs lumiĂšres. On vit cette influence se manifester Ă  deux reprises, d'abord dans le choix des commissaires rĂ©dacteurs du cahier, puis dans l'Ă©lection des dĂ©putĂ©s du quart rĂ©duit » ' . A Coutances, malgrĂ© la division en districts qui eĂ»t dĂ» ĂȘtre favorable au recrutement rural, on compte, sur 11 commissaires, un conseiller et un procureur en Ă©lection, cinq avocats, deux mĂ©decins, un nĂ©gociant et un seul laboureur. A Saint-LĂŽ, douze hommes de loi, un mĂ©decin, un nĂ©gociant l'emportent, dans une commission de 20 membres, sur trois laboureurs et trois sieurs propriĂ©taires ». A Tinchebrai, en plein Bocage, aucun des six rĂ©dacteurs n'est un paysan les Ă©lus sont le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage et le procureur du roi, trois avocats et un mĂ©decin. A Mortain, oĂč 31 paroisses sur 70 n'ont envoyĂ© que des labou- reurs comme dĂ©putĂ©s, et oĂč ceux-ci comptent 113 voix sur 191 prĂ©sences, les douze rĂ©dacteurs du cahier sont huit avocats, deux mĂ©decins, un conseiller au baillage, un nĂ©gociant. A Avran- ches, la commission de onze membres comprend huit hommes de loi et trois laboureurs. A Valognes, sur onze membres, la commission de rĂ©daction ne compte que cinq laboureurs ; les sept membres, qui forment la majoritĂ©, sont le lieutenant parti- culier du bailliage, le procureur du roi de l'amirautĂ© de Saint- Vast, le bailli de Bricquebec, le vicomte de Barfleur, un conseiller honoraire au Conseil supĂ©rieur de Corse et deux avocats. Sans avoir une majoritĂ© aussi Ă©crasante dans les autres bailliages, Ă  1 Voir, pour les bailliages du Cotentin, Bridrey, La ReprĂ©sentation des Profes- sions, etc. 218 PRÉPONDÉRANCE DE LA BOURGEOISIE URBAINE Caen, Bayeux, Torigni, Ă  Saint-Sauveur-le-Vicomte, les hommes de loi contrebalancĂšrent tout au moins dans les commissions l'influence des laboureurs. La mĂȘme Ă©limination des laboureurs s'accomplit dans l'Ă©lection des dĂ©putĂ©s du quart rĂ©duit ». Elle fut moins accusĂ©e toutefois. Le nombre de ces dĂ©putĂ©s Ă©tant beaucoup plus Ă©levĂ© que celui des rĂ©dacteurs, force fut aux assemblĂ©es d'adjoindre Ă  ceux-ci, pour complĂ©ter la dĂ©lĂ©gation, une escorte parfois assez considĂ©- rable de ruraux. Dans certains bailliages, comme Valognes, Saint-Sauveur-le-Vicomte, Tinchebrai, les paysans l'emportĂšrent sur les hommes de loi W ; dans ceux de Carentan, de CĂ©rences, de Saint-Sauveur-Lendelin, d'Avranches, les deux catĂ©gories de dĂ©putĂ©s se firent Ă  peu prĂšs Ă©quilibre *. Il en fut de mĂȘme dans le bailliage de Vire, oĂč la balance se tint Ă©gale entre urbains et ruraux l8, tandis qu'elle pencha sensiblement en faveur de l'in- fluence urbaine dans le bailliage de Caen *. Dans trois bailliages, le triomphe de la bourgeoisie de robe fut significatif. A Mortain, sur 48 dĂ©putĂ©s, le quart seulement est composĂ© de laboureurs 12; le reste est formĂ© par des avocats 14, des mĂ©decins et chirur- giens 8, des notaires 2, un conseiller au bailliage, cinq bour- geois vivant noblement et quelques nĂ©gociants. A Coutances, les hommes de loi formaient le dixiĂšme de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire ; ils furent la moitiĂ© de la dĂ©putation sur 80 dĂ©putĂ©s, 29 seulement Ă©l nient laboureurs. Saint-LĂŽ surtout offrit le spectacle d'une annihilation presque totale des campagnes au profit de la ville ; les commissaires rĂ©dacteurs, au nombre de 20, composĂšrent la dĂ©putation du bailliage. Trois laboureurs y furent admis, ainsi qu'un nĂ©gociant. Les 16 autres dĂ©putĂ©s Ă©taient des juges, des avocats, des procureurs ou des mĂ©decins, c'est-Ă -dire des bourgeois. fl Le quarl rĂ©duit comprit, Ă  Valognes, 42 laboureurs contre 23 hommes de lui et 7 nĂ©gociants ; Ă  Saint-Sauveur-le-Vicomte, 24 laboureurs et 3 herbageurs contre H gens le robe Ă  Tinchebrai, sur 23 dĂ©putĂ©s, il n'y eut que 5 avocats ; le reste des Ă©lus lui formĂ© de propriĂ©taires, laboureurs ou gens non qualifiĂ©s. 2 Le quarl rĂ©duit compta, Ă  Carentan. sur 32 dĂ©putĂ©s, 10 ruraux contre 13 geas de loi; Ă  CĂ©rences, 1 laboureurs contre Ăź hommes de robe ; Ă  Saint-Sauveur-Lende- lin, 15 hommes de loi contre 11 laboureurs el ;{ nĂ©gociants ; Ă  lÀvranches, 23 gens de oi contre 20 laboureurs et 10 marchands. 3 Sur les 06 dĂ©putĂ©s que compta le quart rĂ©duit du bailliage de Vire, une tren- aine de gens de loi et quelques nĂ©gociants faisaient Ă©quilibre aux propriĂ©taires et laboureurs formant l'autre moitiĂ© de la dĂ©putation. 4 Sur les 122 dĂ©putĂ©s formant le quart rĂ©duit du bailliage de Caen, on compte, outre les dĂ©putĂ©s urbains, i hommes de robe parmi les 18 commissaires ruraux, dont plusieurs rĂ©sidaient Ă  Caen, et une quarantaine de gens de loi et nĂ©gociants de Caen parmi les 74 dĂ©putĂ©s dits de la campagne ; au total, environ 80 dĂ©putĂ©s urbains. VICTOIRE DES GENS DE ROBE 219 L'Ă©volution de la campagne Ă©lectorale du Tiers-Ă©tat, dans les deux bailliages principaux de Caen et de Coutances, avait Ă©tĂ© trĂšs favorable aux villes. La majoritĂ© rurale, si Ă©crasante au dĂ©but, allait se fondant peu Ă  peu dans les assemblĂ©es Ă©lectorales graduelles. Les gens des villes en avaient imposĂ© aux paysans, s'Ă©taient attribuĂ© la meilleure part dans les commissions et une place notable au sein des dĂ©lĂ©gations. Et c'est la robe, plus encore que le nĂ©goce ou l'industrie, qui avait profitĂ© de cette Ă©volution . Outre le procĂšs-verbal au l lien tique de l'assemblĂ©e du clergĂ© de Caen et la correspondance de Coigny, nous possĂ©dons sur cette rĂ©union d'autres renseignements fort intĂ©ressants les protes- tations successives adressĂ©es par l'Ă©vĂȘque de Bayeux et son chapitre au ministre de la province, Villedeuil 3 ; une lettre Ă©crite de Caen le 21 mars 1789 Ă  M. B. . . » et que j'attribuerais Ă  Revel de Bretteville, procureur du roi au bailliage W; le Journal de Soulavie. CurĂ© de Septvents au bailliage de Torigni depuis 1787, l'abbĂ© Soulavie, qui Ă©tait en mĂȘme temps vicaire gĂ©nĂ©ral de l'Ă©vĂȘque de ChĂąlons, s'associa avec passion au mouve- ment Ă©lectoral de 1789 et joua un rĂŽle des plus actifs dans l'as- semblĂ©e du clergĂ© de Caen, oĂč il chercha vainement Ă  se faire Ă©lire. Ses bulletins manuscrits, adressĂ©s au jour le jour Ă  Necker, contiennent une relation fort curieuse des Ă©vĂ©nements l5. En rapprochant ces documents divers, et en tenant compte des exagĂ©rations inspirĂ©es Ă  leurs auteurs par l'esprit de parti, on peut reconstituer assez exactement les scĂšnes vraiment drama- tiques auxquelles donna lieu l'Ă©lection des dĂ©putĂ©s du clergĂ©. Dans le diocĂšse de Bayeux, comme dans ceux de Coutances et d'Avranches, cet ordre Ă©tait divisĂ© en deux camps l'Ă©vĂȘque et les gros commendataires d'une part, les curĂ©s et les petits bĂ©nĂ©ficiers de l'autre. L'Ă©vĂȘque de Bayeux, du Cheylus, qui passait pour avoir plus de livres de revenu annuel, n'Ă©tait pas des plus populaires. Les curĂ©s lui en voulaient parce que quelques-uns d'entre eux avaient plaidĂ© contre lui pour avoir une augmentation de traitement qu'il leur refusait malgrĂ© 1 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, t. I, p. 4. 2 Lettres du duc de Coigny Ă  Necker et Villedeuil. Arcli. nat, Ba 27, 1. 45. Ct Arch. chĂąteau d'Harcourt, 1. 338. Lettre du mĂȘme au duc d'Harcourt. Le rĂ©dacteur du catalogue manuscrit de ces archives attribue Ă  tort ces Ici lies au marquis d'IIĂ©- ricy. 3 Arch. nat., Ba 27, 1. 45. Ibid., C 17, 1. 38. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. Registre n° 4. 4 Copie d'une lettre Ă©crite de Caen le 21 mars 1789; pas de signature. Arch. nat., Ba27, 1. 45. 5 Journal des Ă©lections du bailliage de Caen ; 7 piĂšces. Ibid., publiĂ©es par A. Brette dans La RĂ©volution française, t. XXVII, p. 162-169. Cf. A. Mazon, Histoire de Soulavie,. naturaliste, diplomate, historien, t. II. p. 85-90. MALVEILLANCE RECIPROQUE DES DEUX PARTIS 227 ses revenus considĂ©rables ». On lui reprochait aussi d'avoir rĂ©cemment interdit les Capucins de Caen, trĂšs respectĂ©s dans la ville l. On l'accusait enfin d'avoir voulu enlever les pouvoirs Ă  tous les vicaires des paroisses pour empĂȘcher l'absence des curĂ©s et les Ă©carter des Ă©lections 2. Le bas clergĂ© Ă©tait en grande majoritĂ© hostile, non seulement Ă  l'Ă©vĂȘque, mais au chapitre de la cathĂ©drale de Bayeux. DĂšs la veille de l'assemblĂ©e les curĂ©s avaient tenu, en dehors de l'abbaye Saint-Etienne qui leur avait Ă©tĂ© assignĂ©e pour leur rĂ©union, des confĂ©rences particuliĂšres, convoquĂ©es par billets anonymes, Ă  l'Ă©glise voisine de Saint-Nicolas. Ces confĂ©rences clandestines et illĂ©gales », tenues malgrĂ© l'arrĂȘt du 25 fĂ©vrier 1789 et la dĂ©fense de l'Ă©vĂȘque, avaient excitĂ© chez celui-ci une vive indignation. Elles avaient eu pour but de prĂ©parer les opinions et les Ă©lec- tions » i>. On y avait tenu des propos sĂ©ditieux, on y avait arrĂȘtĂ© les listes des commissaires et des dĂ©putĂ©s. On semblait tout y avoir rĂ©glĂ© d'avance. DĂ©jĂ  fort mĂ©content du RĂšglement du 24 janvier, qui dĂ©cimait son chapitre et donnait la prĂ©pondĂ©rance au clergĂ© du second ordre, l'Ă©vĂȘque du Cheylus Ă©tait arrivĂ© Ă  Caen avec des vues hostiles ». La manifestation de Saint-Nicolas accrut son dĂ©pit. D'accord avec son chapitre, il rĂ©solut de faire un Ă©clat, de procĂ©der par l'intimidation, et de rompre l'assemblĂ©e ». Il dĂ©buta par un discours incendiaire oĂč il fronda de la maniĂšre la plus indĂ©- cente le RĂšglement du Roi ». Le lieutenant de police trouva ce discours si affreux » qu'il en interdit l'impression 4. Avec des dispositions si malveillantes de part et d'autre, la lutte ne devait pas tarder Ă  s'engager 5. La premiĂšre journĂ©e 17 mars, assez paisible, fut consacrĂ©e Ă  l'Ă©lection du secrĂ©taire de l'assemblĂ©e, au scrutin individuel. Lefrançois, curĂ© de MutrĂ©cy, 1 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, p. 4. 2 Lettre de Le Tuai, curĂ© de Saint- Vigor-Ie- Grand, citĂ©e ci-dessus, ch. IX, p. 191, note 4. Arch. nat., Ba 27, I. 45. Bisson adresse Ă  du Cheylus le mĂȘme reproche Il lit tous ses efforts, Ă©crit-il, pour Ă©carter de l'assemblĂ©e quelques curĂ©s remuants dont il redoutait les principes austĂšres. » MĂ©moires, fol. 78. 3 Lettre de l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  Villedeuil, 22 mars 1789. Arch. nat., Ba27, 1. 45. 4 Lettre Ă©crite Ă  M. B... auteur anonyme le 21 mars 1789. Ibid. J'ai retrouvĂ© ce discours prononcĂ© par l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  l'ouverture de l'assemblĂ©e de l'ordre du clergĂ© le 17 mars 1789, aux Arch. comm. Caen, ancien carton 20. 5 Ce discours dĂ©placĂ©, Ă©crit Bisson, produisit tout son effet. Il acheva de soule- ver tous les esprits contre M. l'Ă©vĂȘque et contre le chapitre de sa cathĂ©drale et devint le signal du scandaleux combat qui eut lieu contre le prĂ©lat, ses grands vicaires et chanoines et le reste du clergĂ©. » MĂ©moires, fol. 78. 228 TUMULTE ET CONFUSION DE L'ASSEMBLÉE recueillit la plupart des suffrages. Le 18 mars, le tumulte com- mença, lorsque le chapitre de Bayeux demanda Ă  prĂ©senter ses observations. Il contestait la validitĂ© du RĂšglement du 24 jan- vier, proposait de dĂ©clarer l'assemblĂ©e inconstitutionnelle et demandait la nomination de commissaires pour dĂ©libĂ©rer sur cette proposition. Ses membres se retirĂšrent ensuite pour ne pas gĂȘner les dĂ©cisions de l'assemblĂ©e. AprĂšs leur dĂ©pari, la discussion s'Ă©leva et prit bientĂŽt un caractĂšre aigu. Pendant plus d'une demi-heure, au milieu d'un vacarme indescriptible, les partisans et les ennemis de l'Ă©vĂȘque et du chapitre furent aux prises. La trĂšs grande majoritĂ© refusa de mettre en dĂ©libĂ©ration le RĂšglement royal. Quand Soulavie, montĂ© sur une table au milieu de cette confusion, demanda le vote par mains levĂ©es sur ce point, cin- quante tĂȘtes pelĂ©es se dressĂšrent pour juger le rĂšglement, et mille mains se levĂšrent contre le jugement » i1. Les Ă©piscopaux furent impuissants Ă  se faire Ă©couter, et quand le chapitre rentra, on lui signifia le refus de ses propositions. Il dĂ©posa alors sur le bureau de l'assemblĂ©e une protestation passĂ©e devant notaire Ă  Bayeux le 13 mars, et se retira. L'Ă©vĂȘque sentit sa situation absolument compromise 2. Il perdit la tĂȘte et s'Ă©cria Ă  haute voix que le RĂšglement royal n'Ă©tait qu'un maussade chiffon et une mĂ©pri- sable besogne, un chiffon dĂ©testable auquel il n'obĂ©irait jamais »3. Faisant cause commune avec son chapitre, il se retira aussi en prĂ©textant le peu de tranquillitĂ© qui rĂ©gnait dans l'assemblĂ©e et l'indĂ©cence des clameurs qui troublaient les opĂ©rations et les suf- frages 4. Le chapitre de SĂ©es, l'abbĂ© de Troarn par son procureui, 1 Mazen, Histoire de Soulavie, t. I, p. 85 sqq. — AprĂšs une demi-heure, Ă©crit l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  Yilledeuil. on fit rentrer les membres du chapitre pour leur annoncer le rejet de leur proposition. Quelqu'un Mesnilgrand reprĂ©senta qu'on n'avait pas Ă©tĂ© aux voix, qu'il ne pouvait y avoir dĂ©libĂ©ration. AussitĂŽt bruit affreux et le refus se trouva tumuĂŻtuairement consommĂ©. » Lettre de du Cheylus Ă  Ville- denil. 22 mars 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. 2 Il y eut, Ă©crit Bisson, une sorte d'Ă©mulation parmi les curĂ©s Ă  qui le moleste- rait davantage. » MĂ©moires, fol. 78. 3 Lettre Ă©crite Ă  M. B., 21 mars 1789. Arch. nat., Ba 27, 1. 45. 4 Lettre de l'Ă©vĂȘque de Bayeux Ă  Villedeuil, 22 mars 1789. Ibid. Du Cheylus y pro- teste auprĂšs du ministre contre l'inexactitude du procĂšs-verbal de sa retraite, tel qu'il a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage pie le tumulte de l'assem- blĂ©e avait forcĂ© d'intervenir. — Vous verrez par ce procĂšs-verbal, Ă©crit le procu- reur du roi au bailliage de Caen, que lors des discussions de l'Ă©vĂȘque et de son clergĂ© nous tĂ»mes appelĂ©s, M. Delisle et moi, pour y mettre la paix dans l'assem- blĂ©e , que le bon Ă©vĂȘque n'avait pas mĂȘme un secrĂ©taire pour rĂ©diger un procĂšs-ver- bal, que celui que l'on va recevoir fut rĂ©digĂ© sous notre dictĂ©e, et qu'actuellement Monseigneur bonde contre nous pour l'avoir fait. » Lettre du 21 mars 1789. Ibid. RIVALITÉ DE SOULAVIE ET DE MESNILGRAND 229 de Cairon, abbĂ© de Barbery, MĂ©ry de Berthenonville, doyen du SĂ©pulcre, et quelques autres adhĂ©rĂšrent Ă  la protestation du chapitre. Mesnilgrand, prieur de l'abbaye Saint-Etienne, un des membres les plus actifs de la Commission intermĂ©diaire provinciale, trĂšs ambitieux et dĂ©sireux de capter les suffrages en mĂ©nageant les deux partis, y adhĂ©ra aussi, mais en formulant des rĂ©serves ; il dĂ©clara respecter le RĂšglement royal » et se contenta d'une protestation platonique pour l'avenir. Une partie del'Univer- sitĂ© de Caen se rangea Ă  son avis. Ces diverses protestations restĂš- rent d'ailleurs sans effet l'immense majoritĂ© de l'assemblĂ©e se rallia Ă  la voix du prĂȘtre Jarry qui en faisait justice, et sans se prĂ©occu- per davantage du dĂ©part du chapitre et de l'Ă©vĂȘque, auquel, par courtoisie, elle avait envoyĂ© une dĂ©lĂ©gation pour le prier de revenir sur sa dĂ©termination, elle continua Ă  dĂ©libĂ©rer sous la prĂ©sidence de l'abbĂ© de Barbery tt. Sur la proposition de Sou- lavie, vingt-cinq commissaires cinq par bailliage furent Ă©lus pour la fusion des cahiers particuliers $. Soulavie fut l'un des commissaires du bailliage de Torigni et le rĂ©dacteur gĂ©nĂ©ral du cahier. Il avait dĂ©jĂ  exposĂ© son programme de rĂ©formes dans une brochure intitulĂ©e V Aristocratie enchainĂ©e 3. II y demandait la soumission des biens du clergĂ© Ă  l'impĂŽt, la fusion du clergĂ© et des autres ordres, le retour des dĂźmes au curĂ© aprĂšs la mort des commendataires. Il espĂ©rait faire accepter ce programme aux curĂ©s, en grande majoritĂ© dans la commission, oĂč il n'Ă©tait entrĂ© que cinq religieux. Mais le chef de cette minoritĂ©, le bĂ©nĂ©- dictin Mesnilgrand, jeune, vigoureux et beau parleur » fut assez habile pour effrayer les autres commissaires, et bientĂŽt Soulavie se trouva isolĂ©. ObligĂ© de modifier contre son grĂ© les 1 Un vieillard moribond s'est saisi du fauteuil et s'est nommĂ© prĂ©sident... » Journal des Ă©lections, etc., 22 mars 1789. Arch. nat, Ba 27, 1. 45. 2 Commissaires-rĂ©dacteurs Ă©lus Pour le bailliage de Bayeux Le Tuai, curĂ© de Saint- Vigor-le-Grand ; Liot, curĂ© de Catilly ; Scelles, curĂ© de Houtteville ; Delleville, curĂ© de CrĂ©piu, et le prieur de Saint-Vigor. Pour le bailliage de Caen LevĂȘque, curĂ© de Tracy ; les curĂ©s de Hamars, de Saint-Sauveur et de Saint-Nicolas de Caen et dom Mesnilgrand, prieur de Saint-Etienne de Caen. Pour le bailliage de Falaise Le Tellier, curĂ© de BonnƓil ; les curĂ©s de Saint-Germain de Falaise, de MĂ©zidon, de Sainte-Opporlune et de Pont, prĂšs Jores. Pour le bailliage de Torigni Soulaville ainsi Ă©crit le procĂšs-verbal original, curĂ© de Septvents ; les curĂ©s de Sallen, La Chapelle-IIeuzebrocq, Saint-Clair et le prieur de Guilberville. Pour le bailliage de Vire les prieurs de Carville et de Roullours ; les curĂ©s de Saint-Martin-de-Talle- vende, Saint-Germain-du-Crioult et Cerisy-Belle-Etoile. 3 La deuxiĂšme partie de cette brochure Ă©tait intitulĂ©e Les dolĂ©ances des curĂ©s de Normandie prĂ©sentĂ©es par le sieur Soulavie, curĂ© de Septuents, au bailliage de Caen 16 pages. 230 ÉLECTION DE TROIS CURÉS RURAUX articles du cahier gĂ©nĂ©ral, puis mortifiĂ© par l'accueil plutĂŽt froid que sa lecture avait trouvĂ© parmi ses auditeurs, Soulavie donna avec Ă©clat sa dĂ©mission de rĂ©dacteur. Il distribua une protesta- tion imprimĂ©e contre la dĂ©loyautĂ© des commissaires, demanda Ă  prouver par tĂ©moins que plusieurs de ceux-ci avaient essayĂ© de le corrompre par des prĂ©sents, accusa les Ă©piscopaux de faire boire les curĂ©s dans l'abbaye ». La faction des commendataires tenta de le perdre. Une sentence du bailliage lui interdit l'assis- tance aux assemblĂ©es ; Mesnilgrand lui en fit fermer l'accĂšs et le sĂ©questra mĂȘme pendant plusieurs heures dans une salle de son abbaye. A la priĂšre des curĂ©s, et aprĂšs rĂ©tractation publique de ses accusations, Soulavie rentra dans la chambre du clergĂ© et put assister aux derniĂšres sĂ©ances. Mais il n'y joua dĂ©sormais aucun rĂŽle et ne fut pas Ă©lu aux Etats gĂ©nĂ©raux, pas plus d'ail- leurs que son rival Mesnilgrand. Ce furent trois curĂ©s ruraux qui ralliĂšrent la majoritĂ© des suffrages *. Le secrĂ©taire de l'assemblĂ©e, Lefrançois, curĂ© de MutrĂ©cy, fut le premier des trois dĂ©putĂ©s. Le mĂȘme jour 26 mars fut Ă©lu le premier commissaire du bailliage de Caen, LevĂȘque, curĂ© de Tracy. Le Tellier, curĂ© de BonnƓil et premier commissaire du bailliage de Falaise, fut nommĂ© le 27 mars. La- rancune des curĂ©s contre l'Ă©vĂȘque, son chapitre et les moines avait persistĂ© jusqu'Ă  la fin des Ă©lections. C'Ă©tait la victoire du bas clergĂ© et sa revanche contre les humiliations et les vexations qu'il avait endurĂ©es. Ces Ă©lections avaient un caractĂšre dĂ©mocratique indĂ©niable le premier ordre, celui des gouvernants », Ă©tait battu par le second, celui des gouvernĂ©s ». Vainement l'Ă©vĂȘque et le chapitre protes- tĂšrent-ils contre les dĂ©cisions de l'assemblĂ©e Ă©lectorale et refu- 1 Les curĂ©s avaient leur siĂšge fait avant l'ouverture de l'assemblĂ©e Ă©lectorale, tĂ©moin les lettres de Soulavie, curĂ© de Septvents, et de Le Tuai, curĂ© de Saint- Vigor- le-Grand, Ă  Necker, 6 mars et 14 mars 1789 voir ci-dessus, chapitre IX, p. 191-192. Leur entente persista pendant la durĂ©e de l'assemblĂ©e. Bisson, dans ses MĂ©moires, raconte, sur leurs manƓuvres, des dĂ©tails assez intĂ©ressants Les curĂ©s, dit-il, ne voulurent que des curĂ©s pour les remplacer. 11 en fallait trois pour le bailliage de Caen, et ceux qui furent dĂ©signĂ©s et qui rĂ©unirent la majoritĂ© des suffrages furent le sieur Lefrançois, curĂ© de MutrĂ©cy, LĂ©vĂšque, curĂ© de Tracy-Bocage, et Letellier, curĂ© de BonnƓil. En prenant les trois lettres initiales de ces trois paroisses, ils en firent une espĂšce de mot d'ordre ou de guet assez singulier, au moyen duquel les curĂ©s s'assuraient mutuellement qu'ils Ă©taient dans la mĂȘme opinion sur le choix des dĂ©putĂ©s Ă  nommer. Le premier disait Ă  l'autre M'aimes-lu bien ? et l'autre devait rĂ©pondre Ma toute belle. Quand on s'Ă©tait parlĂ© ainsi de part et d'autre, on se ser- rait la main l'un Ă  l'autre en signe d'union de cƓur et de sentiment. » MĂ©moires, fol. 79 V. l'assemblĂ©e de la noblesse a coutances 231 sĂšrent-ils de reconnaĂźtre les dĂ©putĂ©s du clergĂ©. Leur attitude fut blĂąmĂ©e par tous, mĂȘme par le roi 1>. Les deux assemblĂ©es de la noblesse, celle de Coutances comme celle de Caen, furent plus paisibles. A Coutances, l'ordre de la noblesse se rĂ©unit le 20 mars dans l'Ă©glise des Capucins, sous la prĂ©sidence du doyen d'Ăąge, Plessard de Servigny 2. Le marquis de Caillebot la Salle, lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es du roi, dirigea bientĂŽt les sĂ©ances, en l'absence du grand bailli d'Ă©pĂ©e, le marquis de Blangy, vieillard qui s'Ă©teignait alors dans un chĂąteau des environs de Caen 3. L'assemblĂ©e Ă©lut pour secrĂ©taire FrĂ©min de Beaumont, procureur syndic noble du dĂ©partement de Coutances. Elle procĂ©da le 21 mars Ă  l'Ă©lection de onze commissaires chargĂ©s de la rĂ©daction de son cahier. Chacun des dix bailliages secon- daires devait fournir un rĂ©dacteur, et le onziĂšme devait ĂȘtre Ă©lu par l'assemblĂ©e. Les suffrages tombĂšrent sur des hommes dĂ©jĂ  initiĂ©s Ă  l'administration et qui avaient tous jouĂ© un rĂŽle plus ou moins actif comme prĂ©sidents ou dĂ©putĂ©s des assemblĂ©es de dĂ©partement ou comme procureurs syndics *Ăź. C'est parmi eux qu'allait ĂȘtre choisie la plus grande partie de la dĂ©putation. AprĂšs trois jours de travail, ces commissaires, qui avaient eu Ă  leur disposition de nombreux mĂ©moires particuliers, soumirent Ă  la discussion de l'assemblĂ©e les articles de leur cahier. L'Ă©lection des quatre dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux prit quatre jours et fut des plus calmes. Pas la moindre querelle ne s'y Ă©leva. Mais la majoritĂ© fut difficile Ă  atteindre, les suffrages s'Ă©garant sur une vingtaine de candidats 5. Sur quatre dĂ©putĂ©s, deux seulement 1 Lettre de Delessart, du 1er avril 1789, sur la surprise indignĂ©e du roi Ă  cette occasion. Arcb. nat, Ba 27, 1. 45. L'Ă©vĂȘque de Bayeux, en juin 1789, refusa de recon- naĂźtre l'ordre du clergĂ© au sein des Etats gĂ©nĂ©raux et d'adhĂ©rer Ă  ses dĂ©libĂ©rations. Ibid. 2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la noblesse du bailliage de Coutances. Arch. nat., C 18, 1. 62. Ibid., B"1 53. 3 Voir ci-dessus, chap. IX, p. 186, note 2. 4 Commissaires-rĂ©dacteurs de la noblesse pour le bailliage de Cotentin. Cou- tances Le Forestier de Mobecq ; CĂ©rences Le Forestier de MunevĂźlle ; Saint-LĂŽ d'Auxais de Montfarville ; Avranches Artur de la Villarmois ; Mortain de Vau- fleury de Saint-Cyr ; Carentan Le Maignan ; Valognes Beaudrap de Sotteville ; Saint-Sauveur- le- Vicomte d'Anneville du Vaast ; Saint-Sauveur-Lendelin Achard de Bonvouloir ; Tinchebrai de GassĂ©, du bailliage de Valognes Ă©lu par l'assemblĂ©e Ă  la pluralitĂ© des voix, vu l'abstention en bloc de la noblesse de celui de Tinche- brai ; le onziĂšme commissaire, Ă©lu aussi par toute l'assemblĂ©e, fut Michel de Cham- bert. 5 Lettre du comte de Vassy, 31 mars 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie E, famille Vassy. 232 LES DÉPUTÉS NOBLES DU COTENTIN furent Ă©lus au premier tour de scrutin ; il fallut deux tours pour l'Ă©lection du troisiĂšme, et trois tours pour celle du dernier. Le premier Ă©lu fut Achard de Bonvouloir, seigneur patron du DĂ©sert, prĂšs Saint-LĂŽ, ancien capitaine de cavalerie. C'Ă©tait un des plus fougueux aristocrates de l'assemblĂ©e, un des partisans les plus opiniĂątres de l'Ancien rĂ©gime, un des plus ardents dĂ©fenseurs des privilĂšges nobiliaires. Il avait exprimĂ© avec vĂ©hĂ©mence ses opinions dans son Tribut d'un gentilhomme normand Ă  V Assem- blĂ©e des notables. Il passa au premier tour de scrutin, le 28 mars. Son Ă©lection Ă©tait caractĂ©ristique et dĂ©voilait les tendances rĂ©trogrades de l'assemblĂ©e. Le second siĂšge fut attribuĂ©, le 29 mars au soir, Ă  Beaudrap de Sotteville, ancien officier au corps royal de l'artillerie, procureur syndic noble du dĂ©partement de Valognes. On se rappelle les motifs de son triomphe sur Colleville Ă  l'occasion de l'Ă©lection au syndicat en 1788 l\ et la signification de cette nouvelle victoire Ă©lectorale n'Ă©tait douteuse pour per- sonne. Le 30 mars, un noble de l'Avranchin, Artur de la Villar- mois, fut nommĂ© au premier tour. Le quatriĂšme siĂšge fut disputĂ© entre Leclerc de JuignĂ©, comte de Courtomer, seigneur de Sainte- MĂšre-Eglise, marĂ©chal de camp des armĂ©es du roi, parent de l'archevĂȘque de Paris, et FrĂ©min de Beaumont, secrĂ©taire de l'assemblĂ©e. Au scrutin de ballottage ce fut le premier qui l'em- porta. La noblesse du Cotentin n'avait pas Ă©lu un seul noble de robe c'est dans l'aristocratie militaire et fonciĂšre qu'elle avait Ă  dessein choisi ses reprĂ©sentants. L'assemblĂ©e de la noblesse du bailliage de Caen, rĂ©unie Ă  l'abbaye Saint-Etienne, tint douze sĂ©ances du 17 au 28 mars 1789. Le grand bailli d'Ă©pĂ©e, le duc de Coigny, la prĂ©sida *. Les huit plus anciens gentilshommes de chacun des cinq bailliages rĂ©unis formĂšrent une commission de quarante membres, qui Ă©lut pour secrĂ©taire Grandin de la GaillonniĂšre. On procĂ©da ensuite Ă  l'Ă©lection de vingt-cinq commissaires cinq par bailliage pour la rĂ©daction du cahier de dolĂ©ances. Beaucoup d'entre eux Ă©taient aussi des membres de l'AssemblĂ©e provinciale ou des assemblĂ©es de dĂ©partement, tels pour le bailliage de Caen, le comte d'Osse- 1 Voir ci-dessus chap. III, p. 14, noie 2. f-2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la noblesse du bailliage de Caen. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre n° 3. Cf. Arcb. nat, C 17, 1..88etBm 40. Le mar- quis de Than, lieutenant-gĂ©nĂ©ral d'Ă©pĂ©e au bailliage de Caen, qui avait rĂ©clamĂ© la prĂ©sidence de la noblesse, fit, au dĂ©but de l'assemblĂ©e, une protestation purement formelle vu lu prĂ©sence du grand bailli. l'assemblĂ©e de la noblesse a caen. ses dĂ©putĂ©s 233 ville, le marquis de Cagny et le marquis d'HĂ©ricy de Vaussieux ; pour celui de Bayeux, le comte de Faudoas, de BernĂ©, de Wimp- fen ; pour Falaise, le comte de Vendceuvre ; pour Vire, le comte de Vassy, le marquis de Canisy, des Rotours baron de Chaulieu et Brouard de Clermont. Du 18 au 23 mars, ces commissaires travaillĂšrent en commun pour fondre en un seul les diffĂ©rents cahiers particuliers qui leur avaient Ă©tĂ© remis. Le 23, le comte d'Osseville en commença la lecture devant l'assemblĂ©e ; elle dura trois jours. DĂšs les premiĂšres sĂ©ances, sur la proposition du duc de Coigny, la noblesse avait fait abandon de ses privilĂšges pĂ©cu- niaires, tout en exprimant le dĂ©sir du maintien de ses autres privilĂšges *. Le 26 mars, le baron de Wimpfen lut un long mĂ©- moire, demandant une marque distinctive pour la noblesse des deux sexes, en dĂ©dommagement des sacrifices qu'on exigeait d'elle 2. Ăźl fut acclamĂ© et ce succĂšs opportun le mit en vue pour la dĂ©putation. L'assemblĂ©e avait Ă  nommer trois dĂ©putĂ©s ; l'attri- bution de ces trois siĂšges nĂ©cessita, pour chacun, deux tours de scrutin. Le duc de Coigny, prĂ©sident, fut le premier Ă©lu ; le comte Louis de Vassy obtint le second rang. Tous deux Ă©taient de vieille noblesse normande, comptaient parmi les grands propriĂ©- taires fonciers du pays et avaient jouĂ© pendant ces derniĂšres annĂ©es un rĂŽle considĂ©rable dans l'administration de la province. Un autre gentilhomme, d'origine, normande, le rapporteur des dolĂ©ances de la noblesse, le comte d'Osseville, dont le zĂšle gĂ©nĂ©- reux avait eu dĂ©jĂ  tant d'occasions de se manifester, recueillit un nombre assez grand de suffrages pour le troisiĂšme siĂšge. Mais il trouva un concurrent plus heureux dans la personne du baron FĂ©lix de Wimpfen, dont le mĂ©moire sur un nouvel ordre de che- valerie venait de sĂ©duire l'assemblĂ©e. Wimpfen n'Ă©tait normand que d'adoption nĂ© dans une petite ville de la Basse-Alsace, il avait servi dans des rĂ©giments Ă©trangers Ă  la solde de la France, pris part Ă  la guerre de Sept Ans, Ă  l'expĂ©dition de Corse, Ă  la guerre de l'indĂ©pendance amĂ©ricaine. Pendant son sĂ©jour au 1 Une lettre du 23 mars 1789, Ă©crite par un membre de la noblesse, NĂ©el de Ton- tuit, faisait un pressant appel Ă  l'union. Songeons au bien public, Ă©crit-il,... Que la parfaite Ă©quitĂ© serve de base Ă  la dĂ©marcation des privilĂšges de cbaque ordre. Sacrifions-nous au bien-ĂȘtre de la patrie, chacun dans la mesure oĂč nous pouvons la servir... Accordons Ă  nos dĂ©putĂ©s] la libertĂ© de sacrifier nos droits. » Cette lettre nous est connue par une copie transcrite Ă  la suite du cahier des armuriers, fourbis- seurs et couteliers de Caen. Arch. comm., Caen, ancien carton 20. 2 Arch. nat., Ba 27, 1. 15, dossier 6, et Bm -10. p. 352 publiĂ© par Hippeau, t. Vil, p. 231. Cf. ci-dessus, chap. IX, p. 194. 234 l'assemblĂ©e du tiers Ă©tat A CAEN camp de Vaussieux 1778-1780, il avait Ă©pousĂ© une chĂątelaine du Bessin, et il Ă©tait devenu seigneur de Saint-Germain-la-Lieue, prĂšs Bayeux. La paix de Versailles l'y avait ramenĂ© comme marĂ©chal de camp en 1784. Il y vivait depuis cinq ans ; membre de l'acadĂ©mie locale, il occupait ses loisirs Ă  des travaux sur l'art militaire, et Ă  des Ă©tudes philosophiques et littĂ©raires 1. En 1788, il avait Ă©tĂ© choisi comme dĂ©putĂ© de la noblesse Ă  l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Bayeux. Le rĂŽle actif qu'il joua dans l'assemblĂ©e Ă©lectorale de Caen le fit prĂ©fĂ©rer au comte d'Osseville et le scrutin de ballottage lui attribua la troisiĂšme dĂ©putation *. Les Ă©lections de la noblesse du bailliage de Caen avaient eu un caractĂšre aristocratique, autant que celles du Cotentin. Pas un noble d'office n'Ă©tait dĂ©putĂ© de cet ordre. La noblesse de race l'avait emportĂ© 3. Les assemblĂ©es gĂ©nĂ©rales du Tiers Ă©tat commencĂšrent Ă  des dates diffĂ©rentes Ă  Caen et Ă  Coutances. Dans la premiĂšre de ces villes, 455 dĂ©lĂ©guĂ©s des bailliages se rĂ©unirent le 17 mars Ă  l'abbaye Saint-Etienne, sous la prĂ©sidence du lieutenant gĂ©nĂ©ral DuperrĂ© de Lisle 4. Trois commissaires furent dĂ©signĂ©s par bailliage pour fondre les cinq cahiers bailliagers en un seul ; ces quinze rĂ©dac- teurs Ă©taient des magistrats, des avocats ou des nĂ©gociants 5. Delauney, dĂ©putĂ© de Bayeux, semble avoir Ă©tĂ© le plus actif d'entre eux et comme le rapporteur gĂ©nĂ©ral. Leur besogne Ă©tant achevĂ©e le 21 mars, le cahier gĂ©nĂ©ral fut lu en assemblĂ©e publique et plusieurs changements y furent faits. Des observations prĂ©- sentĂ©es le 23 mars par deux dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen, Le Canu et Laurent, et une protestation de Le Tellier, avocat de Bayeux, qui rallia 68 signatures, dĂ©posĂ©e le 26 mars sur le. bureau de l'AssemblĂ©e, ajournĂšrent jusqu'Ă  cette date la rĂ©daction dĂ©fi- nitive du cahier. Delauney dut prendre la parole pour dĂ©fendre 1 Voir Pezet, Bayeux au XVIIIe siĂšcle, p. 60 et suivantes. 2 On fut surpris, dit un contemporain, de la nomination de Wimpfen, comme si dans la noblesse du pays on n'eut pu trouver un homme capable et digne de cet honneur ». Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, t. I, p. 4. 3 Voir Pezet, ouv. citĂ©, p. 105. 4 Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. Registre n° 2 intitulĂ© ProcĂšs-verbal de l'ordre du Tiers Ă©tat 1789. Cf. Arch. nat., C 17, 1. 38 et B1" 10. 5 Commissaires-rĂ©dacteurs du Tiers Ă©tat. Pour le bailliage de Caen de la Rue, Costy, Lamy ; pour celui de Bayeux Delleville, Delauney et de la Londe Sainte- Croix ; pour celui de Falaise Bertrand l'IIodiesniĂšre, de l'Epine et Poulain de Reau- chesne ; pour celui de Torigni Ileudeline, Pain, Fleury ; pour celui de Vire Flaust, Lecourt et Brenet de Rrais. LES DÉPUTÉS DU TIERS ETAT DU BAILLIAGE DE CAEN 235 l'Ɠuvre des commissaires *, et rĂ©ussit Ă  faire accepter le cahier par une majoritĂ© de paysans pressĂ©s de retourner aux travaux des champs 2. Les opĂ©rations Ă©lectorales commencĂšrent le 22 mars et durĂšrent trois jours. Douze tours de scrutin furent nĂ©cessaires pour nom- mer six dĂ©putĂ©s. Le premier dĂ©putĂ© fut l'avocat bayeusain Delau- ney, un des commissaires et celui qui avait pris la part la plus active Ă  la rĂ©daction des dolĂ©ances membre de l'AcadĂ©mie des lettres de Bayeux, poĂšte Ă  ses heures, c'Ă©tait un esprit distinguĂ© et un administrateur consciencieux qui avait donnĂ© de grandes preuves de compĂ©tence, surtout en matiĂšre de travaux publics, comme dĂ©putĂ© du bureau intermĂ©diaire de Bayeux. Il fut Ă©lu au second tour le 23 mars. Le mĂȘme jour, le bailliage de Falaise fournit le second dĂ©putĂ© les suffrages s'Ă©tant partagĂ©s entre deux de ses commissaires, Bertrand de l'HodiesniĂšre, procureur du roi, et Poulain de Beauchesne, propriĂ©taire Ă  Saint-Martin- l'Aiguillon, le scrutin de ballottage donna l'avantage Ă  ce der- nier. Le troisiĂšme dĂ©putĂ© fut plus difficilement Ă©lu. On annula le premier scrutin parce qu'un Ă©lecteur du bailliage de Falaise, Lebailli des Loges, avait dĂ©posĂ© deux bulletins dans l'urne ; le second et le troisiĂšme tour ne donnĂšrent aucun rĂ©sultat les voix se partageaient entre le lieutenant gĂ©nĂ©ral qui prĂ©sidait l'assem- blĂ©e, DuperrĂ© de Lisle, et un nĂ©gociant protestant de Caen, commissaire du bailliage, Lamy. Celui-ci l'emporta au quatriĂšme tour. Restaient trois siĂšges Ă  attribuer les deux bailliages de Vire et de Torigni en obtinrent un. Le lieutenant gĂ©nĂ©ral de Vire, Flaust, et le conseiller assesseur de Torigni, Pain, furent tous deux Ă©lus au premier tour, le 25 mars. A ce moment, un des dĂ©putĂ©s de la ville de Caen, de Cussy, ancien directeur de la Monnaie, se leva et lut Ă  l'assemblĂ©e un long mĂ©moire apologĂ©- tique pour rĂ©futer des Ă©crits injurieux dirigĂ©s contre sa personne ; la lecture finie, il annonça son intention de quitter l'assemblĂ©e. il Le discours de Delauney figure parmi les piĂšces annexĂ©es au procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e. Arch. greffe de la Cour d'appel de Caen. On y trouve Ă©galement la pro- testation rĂ©trograde de Letellier, avocat de Bayeux, et des observations de Lecanu et Laurent, dont l'Ă©tude sera plus opportune dans le chapitre suivant consacrĂ© aux cahiers. 2 Toutefois, on trouve d'assez nombreuses protestations Ă  la suite du cahier, Ă©manant de rĂ©dacteurs eux-mĂȘmes. Flaust, lieutenant-gĂ©nĂ©ral du bailliage de Vire, l'un des quinze commissaires, qui fut mĂȘme un des dĂ©putĂ©s du Tiers aux Etats gĂ©nĂ©raux, signe le cahier comme rĂ©dacteur et sans l'approuver ». Brenet et Louis Lamy, deux autres commissaires, sont aussi parmi les protestataires. Voir ci-dessous, chap. XI, p. 290. 236 l'assemblĂ©e du tiers Ă©tat a coutancĂȘs Cette diversion habile le servit les assistants le priĂšrent de demeurer au milieu d'eux, et pour rendre hommage Ă  sa droi- ture », lui confiĂšrent le sixiĂšme mandat de dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux. Trois officiers des juridictions royales, un avocat, un nĂ©gociant et un grand propriĂ©taire rural, tel fut le bilan des Ă©lections du Tiers Ă©tat pour le bailliage de Caen. Celui du Cotentin avait droit Ă  huit dĂ©putations. L'assemblĂ©e Ă©lectorale, rĂ©unie le 20 mars dans la grande salle du prĂ©sidial de CoutancĂȘs, y tint ses sĂ©ances jusqu'au 30 mars *. Elle fut nom- breuse jusqu'au bout et le procĂšs-verbal des derniĂšres rĂ©unions nous rĂ©vĂšle 367 votants. Comme il y avait dix bailliages, c'est-Ă - dire dix cahiers Ă  fondre en un seul, on dĂ©cida de confier ce travail Ă  dix-neuf commissaires, deux pour chacun des bailliages de CoutancĂȘs, Saint-LĂŽ, Avranches, Carentan, Mortain, PĂ©riers, Saint-Sauveur-le-Vicomte et Tinchebrai, et un pour le petit bailliage de CĂ©rences. Le choix fut significatif 11 avocats, 6 baillis, lieutenants gĂ©nĂ©raux ou particuliers, 2 procureurs au bailliage ou Ă  l'Ă©lection 2. Desplanques Dumesnil, maire de Carentan, fut, comme doyen d'Ăąge, le prĂ©sident de la commission ; mais le rĂŽle le plus actif dut appartenir Ă  un avocat de Mortain, Le Sacher de la PalliĂšre, qui fit passer Ă  peu prĂšs tous les articles du cahier de son bailliage dans le cahier gĂ©nĂ©ral. AprĂšs la lecture et la discussion de ce cahier, qui furent des plus minutieuses et prirent trois jours entiers, on ouvrit le scrutin pour l'Ă©lection des huit dĂ©putĂ©s. Il avait Ă©tĂ© convenu que chacune des six Ă©lections nommerait un dĂ©putĂ© et que celles de Valognes et de CoutancĂȘs fourniraient deux reprĂ©sentants » 3. C'Ă©tait une protestation de fait contre la division bailliagĂšre et une reconnaissance anticipĂ©e 1 ProcĂšs-verbal de rassemblĂ©e du Tiers Ă©tat du grand bailliage de CoutancĂȘs. Arch. nat., C 18, 1. 32. Cf. Bm 53. 2 Commissaires-rĂ©dacteurs du Tiers Ă©tat. Pour le bailliage de CoutancĂȘs Duha- mel, lieutenant gĂ©nĂ©ral de police et Letullier, avocat, procureur du roi Ă  l'Ă©lection ; pour Saint-LĂŽ Lemenuet de la JiiganniĂšre et Vieillard fils, avocats; pour Avran- cbes TesniĂšre de BrĂ©mesnil, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage et Morin, avocat ; pour Carentan Desplanques-Dumesnil, maire de la ville et Caillemer, avocat pour CĂ©rences Broban, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage ; pour Mortain Le Sacher de la l'alliĂšre et Le Bebours de la PigeonniĂšre, avocats pour Saint-Sauveur-Lemh lin sĂ©ant Ă  PĂ©riers Pouret-Boquerie, procureur du roi au bailliage et Euvremer, avo- cat pour Valognes Besnard-Duchesne, lieutenant particulier au bailliage et Cour- taut-Desfontaines, avocat ; pour Saint-Sauveur-le-Vicomte Angot, bailli de robe longue et Glatigny, avocat pour Tinchebrai LeliĂšvre de la ProvĂŽtiĂšre et LaĂźnĂ©- Deshayes, avocats. 3 Lettre de Monlitier, subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranches, Ă  l'intendant Cordier de Launay 16 mars 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 6353. LES DÉPUTÉS DU TIERS ÉTAT DU COTENTIN 237 du dĂ©partement comme vĂ©ritable circonscription Ă©lectorale. Sur un autre point encore, l'assemblĂ©e rĂ©alisa les vƓux exprimĂ©s en 1788 par le Tiers Ă©tat bas-normand elle convint verbalement, Ă©crit un tĂ©moin, de ne choisir aucun reprĂ©sentant dans la classe des privilĂ©giĂ©s » *. Vu la pluralitĂ© des opinions, ces der- niers, malgrĂ© l'injustice de cette rĂ©clamation », ajoute Ferey de Montitier, furent obligĂ©s de garder le silence. Le premier dĂ©putĂ© Ă©lu fut Le Sacher de la PalliĂšre, du dĂ©parte- ment de Mortain. La part prĂ©pondĂ©rante qu'il avait prise Ă  la rĂ©daction du cahier le dĂ©signait Ă  tous les suffrages et il passa au premier tour. Il ne fallut pas moins de douze scrutins pour nommer les sept autres dĂ©putĂ©s. Chaque dĂ©partement devant fournir d'abord un reprĂ©sentant, le deuxiĂšme siĂšge fut attribuĂ© Ă  Avranches par l'Ă©lection de Burdelot, vicomte et maire de Pontorson, membre de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen. Saint-LĂŽ fournit le troisiĂšme dĂ©putĂ© dans la personne d'un avocat, Vieil- lard fils, secrĂ©taire de l'assemblĂ©e du dĂ©partement. Valognes obtint le quatriĂšme siĂšge, avec Besnard Duchesne, lieutenant particulier du bailliage. Le cinquiĂšme dĂ©putĂ©, du dĂ©partement de Coutances, fut un armateur de Granville, PerrĂ©e Duhamel. On choisit le sixiĂšme dans le dĂ©partement de Carentan ce fut Desplanques Dumesnil, maire de cette ville. Pour complĂ©ter la dĂ©putation, il restait deux membres Ă  Ă©lire dans les dĂ©partements de Valognes et de Coutances. Pouret Roquerie, procureur du Roi au bailliage de Saint-Sauveur-Lendelin, sĂ©ant Ă  PĂ©riers, fut Ă©lu septiĂšme dĂ©putĂ©, au premier tour. Ce ne fut qu'au troisiĂšme tour qu'on parvint Ă  nommer le huitiĂšme dĂ©putĂ© la chance, bientĂŽt circonscrite entre Drogy, avocat Ă  Coutances et Angot, bailli de robe longue Ă  Saint-Sauveur-le-Vicomte, tourna en faveur de ce dernier. Des administrateurs, des magistrats, des avocats, un gros nĂ©gociant, tels sont les Ă©lus du Cotentin. A Coutances comme Ă  Caen, c'est le triomphe de la robe et de la bourgeoisie. 1 Lettre de Montitier, subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranches, Ă  l'intendant Cordier de Launay^ 1G mars 1789. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 6353. ' LES CAHIERS DES TROIS ORDRES CHAPITRE XI LES CAHIERS DES TROIS ORDRES DANS LES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Prestation de serment des dĂ©putĂ©s et remise des cahiers gĂ©nĂ©raux. — Les cahiers du clergĂ© incidents provoquĂ©s par leur rĂ©daction, Ă  Coutances et Ă  Caen. Leurs tendances communes. Leurs vues diver- gentes. Les revendications du bas clergĂ© relatives Ă  son organisa- tion ; son ardent dĂ©sir d'Ă©mancipation. — Les cahiers de la noblesse. Plus d'Ă©troitesse et d'Ă©goĂŻsme dans les vƓux du bailliage de Cou- tances ; plus d'ampleur et de gĂ©nĂ©rositĂ© dans ceux du bailliage de Caen. — Les cahiers du Tiers Ă©tat, produits de rĂ©ductions successives opĂ©rĂ©es Ă  plusieurs degrĂ©s. Lacunes de la documentation qui les concerne. — I. Cahiers primaires. 1° Cahiers des paroisses rurales a dolĂ©ances d'intĂ©rĂȘt local, ayant trait surtout Ă  la question agraire plaintes, non du prolĂ©tariat rural, mais des dĂ©tenteurs du sol. Leur sincĂ©ritĂ©. Leurs prĂ©cĂ©dents requĂȘtes Ă  l'intendance et Observations gĂ©nĂ©rales de 1788. Leur vĂ©racitĂ© relative. — b dolĂ©ances d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Influence des Ă©crits publics et des modĂšles gĂ©nĂ©raux, d'une part, des hommes de loi, d'autre part, sur la rĂ©daction des cahiers ruraux. Questions d'ordre gĂ©nĂ©ral traitĂ©es par ceux-ci. Le style des cahiers ruraux les cahiers incorrects ou naĂŻfs ; les cahiers politico- littĂ©raires. Groupements de cahiers et cahiers-types. — 2° Cahiers des villes, tantĂŽt produit direct d'une assemblĂ©e unique, tantĂŽt fusion des dolĂ©ances d'assemblĂ©es prĂ©paratoires pour six villes de la gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Caen. PrĂ©pondĂ©rance des bourgeois et gens de robe dans les commissions de rĂ©daction Ă©limination du prolĂ©tariat urbain, industriel et ouvrier. PrĂ©dominance des vƓux d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral au dĂ©triment des vƓux d'intĂ©rĂȘt rĂ©gional et local d'ordre Ă©conomique, et notamment des vƓux agraires. — II. Cahiers des assemblĂ©es prĂ©- liminaires de quinze ressorts bailliagers. PrĂ©pondĂ©rance de l'Ă©lĂ©ment urbain au sein des commissions de rĂ©daction, et influence trĂšs mar- quĂ©e du cahier du chef-lieu dont la substance est souvent presque intĂ©gralement adoptĂ©e. Exemples prĂ©cis. Motifs invoquĂ©s par les rĂ©dacteurs pour justifier l'Ă©limination de nombreux vƓux locaux plaintes que celle-ci soulĂšve. Envois directs de cahiers primaires Ă  Versailles. — III. Cahiers gĂ©nĂ©raux du Tiers Ă©tat Ă  Caen et Ă  Cou- tances. A Coutances, influence dominante de Sacher de la PalliĂšre et du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire de Mortain. A Caen, incidents et protestation contre le cahier dĂ©finitif, oĂč perce visiblement l'in- fluence des commissaires de Caen et de Baveux. PRESTATION DE SERMENT. REMISE DES CAHIERS 239 VƓux des cahiers bas-normands relatifs Ă  l'administration provinciale IndiffĂ©rence presque absolue Ă  l'Ă©gard des intendants et des subdĂ©- lĂ©guĂ©s. DĂ©sir du maintien des AssemblĂ©es provinciales formulĂ© çà et lĂ . Presque unanimitĂ© des vƓux en faveur du rĂ©tablissement des Etats provinciaux. Sur ce dernier objet, aspirations Ă©levĂ©es du Tiers Ă©tat, qui, en prĂ©voyant le sacrifice nĂ©cessaire de l'autonomie provin- ciale, prĂ©pare l'unitĂ© nationale. Le 30 mars 1789, en l'Ă©glise Saint-Etienne de Caen, dans une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres, le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen, DuperrĂ© de Lisle, recevait la prestation de serment des dĂ©putĂ©s de ce bailliage aux Etats gĂ©nĂ©raux tf. La mĂȘme cĂ©rĂ©monie eut lieu clans la cathĂ©drale de Coutances le 1er avril, sous la prĂ©sidence du lieutenant gĂ©nĂ©ral Desmarets de Montchaton, pour les dĂ©putĂ©s du bailliage de Cotentin 2>. La prestation de serment fut accompagnĂ©e, Ă  Coutances, par la remise aux dĂ©putĂ©s des trois ordres des trois cahiers oĂč se trou- vaient dĂ©finitivement arrĂȘtĂ©es les dolĂ©ances et remontrances du bailliage. A Caen, les cahiers gĂ©nĂ©raux du clergĂ© et de la noblesse furent probablement emportĂ©s par les dĂ©putĂ©s de ces deux ordres ; quant Ă  celui du Tiers Ă©tat, il ne fut adressĂ© que le 17 avril 1789 Ă  Lamy, l'un des six dĂ©putĂ©s du Tiers, par le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen. Les six cahiers des deux bailliages de Caen et de Cotentin ‱', forment un volume si mince que cinquante pages imprimĂ©es suffiraient Ă  les contenir, et sont d'un poids si lĂ©ger que la main d'un enfant les soutiendrait sans peine. Ils avaient pourtant l'ampleur d'une importante manifestation sociale ; ils Ă©taient lourds des revendications de nombreux milliers de citoyens. 1 ProcĂšs-verbal de prestation de serment des dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen, nom- mĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux. Arch. nat., C 17, 1. 381. — Cf. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7636, et Journal de la Basse-Normandie, du 5 avril 1789. 54 Lettre du lieutenant gĂ©nĂ©ral de Montchaton au garde des sceaux, 2 avril 1780. Arch. nat.. Ba 35, 1. 70. — ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e des trois ordres du bailliage Ă  la suite duquel est celui de prestation du serment des seize dĂ©putĂ©s du bailliage. Ibid., C 18, — Cf. abbĂ© Pigeon, Le grand bailliage de Morlain en 1789, t. 111, ]. 531. Cinq dĂ©putĂ©s manquaient Ă  cette derniĂšre rĂ©union l'Ă©vĂšque de Coutances, malade, Le Sacher de la PalliĂšre, Burdelot, Bernard Duchesne et Angot, partis la veille pour affaires urgentes. 3 On possĂšde la sĂ©rie presque complĂšte des cahiers originaux des trois ordres, aux greffes de la Cour d'appel de Caen pour le bailliage de Caen et du tribunal de premiĂšre instance de Coutances pour le bailliage de Cotentin ; les fonds des Archives nationales renferment aussi d'autres exemplaires de ces cahiers, piĂšces originales ou expĂ©ditions authentiquĂ©es, sĂ©ries Ba 27 et 35, C 17 et 18, ou simples transcriptions de la collection improprement dite collection Camus, B 40, 53 et 54. 240 COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CLERC. É A COUTANCES RĂ©digĂ©s dans des milieux diffĂ©rents, inspirĂ©s par des prĂ©occu- pations souvent contradictoires, ils allaient offrir, avec le spec- tacle d'un zĂšle enthousiaste universel pour le bien public, la trace de divergences nombreuses entre les trois ordres sur les moyens de le rĂ©aliser. Pour s'en convaincre, il suffit d'en examiner les dispositions essentielles, d'en analyser sommairement le contenu, de dĂ©gager la portĂ©e, l'esprit et autant qu'il sera possible l'origine premiĂšre des vƓux qu'ils contiennent. Les cahiers du clergĂ©, Ă  Coutances lJ comme Ă  Caen 2, furent en grande partie l'Ɠuvre des curĂ©s Ă  qui leur nombre assura la prĂ©pondĂ©rance dans les assemblĂ©es et dans les commissions. Toutefois l'influence du haut clergĂ© n'y fut pas complĂštement annihilĂ©e, comme la violence du mouvement Ă©lectoral aurait pu le faire pressentir. L'assemblĂ©e ecclĂ©siastique du Cotentin, moins houleuse que celle de Caen, tout en relĂ©guant au quatriĂšme rang de ses Ă©lus l'Ă©vĂȘque de Coutances, lui avait cependant confiĂ© le mandat de dĂ©putĂ©. Parmi les douze membres de la sous-commis- sion chargĂ©e de la rĂ©daction dĂ©finitive du cahier figuraient l'abbĂ© de Cussy, archidiacre du Cotentin, l'abbĂ© rĂ©gulier de la Luzerne, Gautier de l'Espagnerie, le curĂ© de la collĂ©giale de Mortain, Lebel, et un chanoine du chapitre de Coutances, l'abbĂ© Dubois. Il est fort probable que la majoritĂ© des commissaires, choisis dans le clergĂ© des paroisses, subit l'ascendant de la minoritĂ©, formĂ©e des hau»ts dignitaires. Les cahiers particuliers des vingt-huit doyennĂ©s, qui n'ont pas Ă©tĂ© retrouvĂ©s, durent servir de base Ă  la confection du cahier gĂ©nĂ©ral ; les rĂ©dacteurs furent accusĂ©s d'avoir systĂ©matiquement Ă©liminĂ© certains de ces cahiers, comme suspects de tendances trop hardies, et cette accusation amena mĂȘme des dissensions dans l'assemblĂ©e 3. A Caen, aprĂšs le 1 Cahier de Coutances original au greffe du tribunal de premiĂšre instance de Coutances ; copie dans la sĂ©rie Bm 53; publiĂ© par Ilippeau, ouv. cilĂš, t. VIII, p. 1 Ă  G. 2 Cahier de Caen original au greffe de la Cour d'appel de Caen Registre n° 4 inti- tulĂ© ProcĂšs-verbal de l'ordre du clergĂ©... avec les piĂšces et pouvoirs y Ă©tablis, piĂšce 1; copies collationnĂ©es aux Arch. nat., C 17, liasse 1, dossier 382, piĂšce 11 ; B1 27, liasse 45, dossier 3, piĂšce 2 ; transcription dans le B"1 40, piĂšce 40 ; publiĂ© par Hippeau, ouv. cilĂš, t. VII, p. 151 Ă  159. 3 Protestation imprimĂ©e s. 1. n. d. de la minoritĂ© du clergĂ© du bailliage de Cou- tances, rĂ©digĂ©e par trente-six prĂȘtres ; lettre d'envoi du 27 mars nu garde des sceaux, signĂ©e par Tristan Brission, curĂ© de Saint-Sauveur-Lendelin, et Le Jardinier des Landes, curĂ© de La Feuillie. Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Cette protestation a Ă©tĂ© publiĂ©e par Ilippeau, ouv. cilĂš, t. VIII, p. 6. — Pour plus de dĂ©tails sur l'attitude du clergĂ© du Cotentin lors de la rĂ©daction de son cahier gĂ©nĂ©ral, voir Bridrey, L'Assem- blĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres Ă  Coutances Revue de Cherbourg el de la Basse-Nor- mandie, 15 fĂ©vrier 1907, p. 121-125. COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CLERGÉ A CAEN 241 tumulte de la premiĂšre heure, aprĂšs le dĂ©part bruyant de l'Ă©vĂȘque de Bayeux et de son chapitre, les curĂ©s avaient Ă©lu vingt-cinq commissaires pour la rĂ©daction de leur cahier les quatre cin- quiĂšmes d'entre eux Ă©taient membres du clergĂ© paroissial ; cinq seulement appartenaient au clergĂ© rĂ©gulier. La victoire du clergĂ© du second ordre » semblait assurĂ©e par le choix de son ardent dĂ©- fenseur, le curĂ© de Sept vents, Soulavie, comme rĂ©dacteur gĂ©nĂ©ral du cahier. Il emporta les cahiers particuliers, dont la masse formait une imposante collection1;, et passa quatre nuits sans dormir», plongĂ© dans cette analyse laborieuse. Il y cueillit les vƓux les plus agressifs contre les moines et les gros dĂ©cimateurs ; il rĂ©clama la fusion des ordres et l'inscription du clergĂ© au rĂŽle commun de l'impĂŽt. Ce fougueux champion effraya vite ses partisans par son ambition, son esprit novateur et l'audace de ses vues. Les cinq commissaires du clergĂ© rĂ©gulier, et Ă  leur tĂȘte le bĂ©nĂ©dictin Mesnilgrand, prieur de l'abbaye de Saint-Etienne, auquel sa situation et son caractĂšre assuraient une grande influence dans la Commission, n'eurent pas de peine Ă  retourner l'opinion de leurs collĂšgues. RestĂ© seul de son avis, Soulavie se retira en fermant la porte avec bruit . A l'entendre, ce fut la moinaille qui fit l'enfant ». Le propos est exagĂ©rĂ©; toutefois la disparition de Soulavie assura le triomphe des modĂ©rĂ©s iiK Les deux cahiers du clergĂ© ne sont pas de mĂȘme Ă©tendue celui de Caen est presque deux fois plus long que celui de Coutances. Et pourtant celui-ci, sous sa forme concise, est plus riche de fond et louche Ă  plus d'objets 4l. En tĂȘte de leurs revendications li Outre le cahier gĂ©nĂ©ral du clergĂ©, on ne connaĂźt Ă  l'heure actuelle, pour le grand bailliage rie Caen, jue fie s" cahiers particuliers suivants ceux du clergĂ© de Saint-Pierre de Caen, Notre-Dame Us ont, Ă©crit-il, arbitrai- rement l'ait tout ce qu'ils ont voulu. » Lettre du 12 avril 1789. Ibid., Ba 27, liasse ir,. {A Le cahier du clergĂ© du bailliage de Caen est divisĂ© en sept chapitres de la religion et des mƓurs; constitution française ; constitution particuliĂšre de la Nor- mandie ; constitution du clergĂ© ; finances ; lĂ©gislation ; procuration et pouvoirs. 11 16 342 CAHIERS \H CLERGÉ A CAEN ET V COUTANTES communes, ils placĂšrent l'obligation pour le gouvernement de protĂ©ger la religion catholique. Si l'on montra, Ă  Coulances, une certaine tolĂ©rance en faveur des protestants, on fut intraitable Ă  Caen contre tous les dissidents V. Des deux cĂŽtĂ©s, on exigea le res- pect dĂ» aux choses, aux jours, aux lieux et aux personnes de la religion », la destruction des mauvais livres ». Caen proposa l'adoption d'un plan d'Ă©ducation nationale, catholique et monar- chique. Dans les deux bailliages, le clergĂ© Ă©mit son avis sur la Consti- tution. Il rĂ©clama la pĂ©riodicitĂ© des Etats gĂ©nĂ©raux, la rĂ©daction d'une charte constitutionnelle prĂ©cĂ©dĂ©e d'une DĂ©claration des droits du citoyen. Il sembla prĂ©occupĂ© surtout de mettre un frein au despotisme royal, de prendre ses prĂ©cautions contre l'arbi- traire ministĂ©riel. Dans cette monarchie ainsi restaurĂ©e il reven- diqua la premiĂšre place W. Si, par une extrĂȘme prudence, il n'effleura d'aucune allusion la question alors brĂ»lante du vote par ordre ou par tĂȘte, sa conception gĂ©nĂ©rale de l'Etat ne laisse aucun doute sur ses prĂ©fĂ©rences Ă  cet Ă©gard. En face de l'impĂŽt, le clergĂ© des deux bailliages n'eut pas la mĂȘme attitude. A Cou- tances, la majoritĂ© demanda Ă  conserver ses formes » d'assiette et de rĂ©partition, se dĂ©clarant prĂȘte aux sacrifices pĂ©cuniaires » que les circonstances exigeraient $. Le clergĂ© de Caen, gagnĂ© an* idĂ©es de Soulavie, demanda Ă  rentrer au regard de l'impĂŽt dans la classe commune des citoyens » et renonça Ă  toute espĂšce de distinction pĂ©cuniaire, Ă  la condition que l'Etat se chargeĂąt de ses dettes. Les nombreuses rĂ©formes que, dans l'ordre social, judiciaire, Ă©conomique l'opinion publique signalait aux futurs est plus verbeux que le cahier de Coutances, divisĂ© en quatre parties religion ; lĂ©gislation ; impĂŽts et finances ; clergĂ©, el comprenant en tout soixante et un articles trĂšs briĂšvement formulĂ©s. 1 One la religion catholique soit la seule religion reçue el dominante dans loul le royaume... que tout autre culte -.il absolument dĂ©fendu et prohibĂ©. » ClergĂ© du bailliage de . intitulĂ© ; ProcĂšs-verbal de l'AssemblĂ©e de la noblesse... avec les piĂšces et pouvoirs \ relatifs, piĂšce . ci au* Arch. nat., Ba 27, liasse 15, dossier j ; Arch. dĂ©p., Calva" dos, sĂ©rie l>> non inventoriĂ©e, copie certifiĂ©e conforme par le duc Ăźle Coigny trans- cription dans la sĂ©rie I'."' in publiĂ© par Hippeau, uuv. citĂ©, t. Nil, p. 220 231. 2 Cahier de la noblesse de Coutances. Original au greffe du Tribunal le pre- miĂšre instance de Coutances ci aux Vrch. nat., I." r». liasse 70, dossier i; transcrip lion dans la sĂ©rie B"' 53 ; publiĂ© par Hippeau. ouv. citĂ©, t. VIII. p. 7 12. LE CAHIER DE LA NOBLESSE DU COTENTIN 245 chique et le vote par ordre au sein des Etats gĂ©nĂ©raux. Mais ils reflĂštent, sur beaucoup d'autres points, des sentiments et des prĂ©occupations assez dissemblables chez les membres des deux assemblĂ©es. La noblesse du Cotentin, dont le cahier ne compte que vingt-quatre articles, se renferme dans un horizon trĂšs res- treint. Elle proteste d'abord contre le RĂšglement du 24 janvier, parce qu'il a doublĂ© la dĂ©puta Lion du Tiers Ă©tat et elle dĂ©clare ne lui accorder qu'une obĂ©issance provisoire V. Elle est hypno- tisĂ©e par une idĂ©e fixe le maintien de ses privilĂšges honorifiques et pĂ©cuniaires sous un roi constitutionnel. Et ce qu'elle entend par rĂ©gime constitutionnel, c'est le retour de l'ancienne monar- chie tempĂ©rĂ©e par des Etats gĂ©nĂ©raux pĂ©riodiques, et de l'an- cienne autonomie provinciale, incarnĂ©e dans les Etats provin- ciaux ; elle compte exercer, au sein des uns et des autres, une action prĂ©pondĂ©rante. Si elle offre un don gratuit » pour parer aux besoins du moment, elle refuse d'ĂȘtre assujettie Ă  la taille, impĂŽt contraire aux droits et aux franchises de la noblesse » {2\ Nul regard sur la situation des deux autres ordres pas un mot des droits fĂ©odaux, des vices de l'organisation judiciaire, des souffrances du peuple, des questions sociales et Ă©conomiques agitĂ©es par l'opinion. ConfinĂ©e et comme emmurĂ©e dans son Ă©goĂŻsme de caste, la noblesse du Cotentin s'isole du reste de la nation ; l'intransigeance de ses commissaires, des Bonvouloir et des Sotteville, s'est retranchĂ©e dans cette hautaine dĂ©claration comme dans une Bastille. Le cahier de la noblesse du bailliage de Caen a Ă  la fois plus d'ampleur et de gĂ©nĂ©rositĂ©. Sans doute celle-ci rĂ©clame, en s'appuyant sur des prĂ©cĂ©dents historiques, le maintien des trois ordres et celui du vote par ordre. Sans doute elle sollicite, sur la proposition d'un de ses membres, la crĂ©ation d'une dĂ©coration spĂ©ciale, d'une sorte de LĂ©gion d'honneur Ă  son usage exclusif 3 ; sans doute, elle glisse Ă  la fin de son cahier, Ă  l'adresse des futurs Etats gĂ©nĂ©raux, une timide priĂšre pour la conservation d'une 1 L'assemblĂ©e... a arrĂȘtĂ© unanimement que l'obĂ©issance provisoire qu'elle rend dans ce moment aux ordres du roi ne pouvait prĂ©judiciel1 dans les rĂ©clamations et protestations qu'elle charge ses dĂ©putĂ©s de faire aux Etats gĂ©nĂ©raux sur l'at- teinte qu'on a portĂ©e au droit inaltĂ©rable d'une reprĂ©sentation Ă©gale et lĂ©gale de chaque ordre. » Noblesse du bailliage de Cotentin, art. 2. 2 Ibid., art. 17. 3 Instructions relatives au Bien public, art. 18. Voir ci-dessus, chap. IX, p. 194, la proposition du baron de Wimpfen. 246 CE CAHIER DE LA NOBLESSE DE CÀEN franchisa quelconque » ''. Kllc veut qu'on la distingue, et croit indispensable au salul de l'Etat l'existence d'un ordre respec- table, intermĂ©diaire entre le peuple et le souverain » rll Mais elle se glorifie d'ĂȘtre une noblesse citoyenne ». Elle jette les yeux hors de sa sphĂšre ; elle s'intĂ©resse aux graves problĂšmes du temps, rĂ©clame la libertĂ© de la presse, la libertĂ© des croyances, l'abolition de la vĂ©nalitĂ© des charges, la rĂ©forme des abus judi- ciaires. Parmi les commissaires rĂ©dacteurs ! , plus d'un apparte- nait Ă  l'administration provinciale nouvellement créée, soit comme membre de l'AssemblĂ©e provinciale, soit comme admi- nistrateur de dĂ©partement ; plus d'un avait jouĂ© un rĂŽle actif, fait montre de sentiments gĂ©nĂ©reux et d'idĂ©es libĂ©rales dans les sĂ©ances de ces commissions qui portaient le beau nom de Bu- reaux du Bien public » W. Sous cette rubrique, ils introduisirent pĂȘle-mĂȘle dans leur cahier une sĂ©rie de demandes trĂšs diverses, mais inspirĂ©es par un visible souci de l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Fondations de dĂ©pĂŽts de mendicitĂ©, Ă©coles de religion, de bonnes nncurs et de travail » 5 ; primes et encouragements Ă  l'agriculture et sur tout Ă  l'Ă©levage, ressource essentielle du pays ,i^ ; rĂ©glementation delĂ  question des biens communaux au grĂ© des communautĂ©s '7 ; suppression des maisons religieuses inutiles et emploi de leurs richesses Ă  la crĂ©ation d'hĂŽpitaux et d'Ă©coles gratuites pour les pauvres 8 ; en un mot, amĂ©lioration matĂ©rielle, intellectuelle et morale du peuple, tels Ă©taient les principaux vƓux formulĂ©s par la noblesse de Caen. Maint article de son cahier, qui n'eĂ»t pas Ă©tĂ© dĂ©savouĂ© par le Tiers Ă©tat, tĂ©moignait des tendances philan- thropiques de plusieurs de ses membres, et notamment de son rapporteur gĂ©nĂ©ral, le comte d'Osseville. Les deux cahiers gĂ©nĂ©raux du Tiers Ă©tat pour les bailliages de Caen'J' et de Coufances1° sont le rĂ©sultat d'une sĂ©rie de rĂ©duc- '1 Instructions relative- au Hini public, art. §5. 2 MĂ©moire de Wimpfen, lu Ă  l'AssemblĂ©e de la noblesse, 26 mars 1789. 3 Voir ci-dessus, chap. X, p. 231, note 4. I Ibid., chap. IV, p. 73-7t cahiers sont conservĂ©s aux Archives dĂ©partementales de la Manche i sĂ©rie B non classĂ©e huit cahiers ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans les Archives communales au registre des dĂ©libĂ©rations, soit comme transcriptions contemporaines de l'original, Ă  la date de fĂ©vrier ou mars 1789, soil comme copies exĂ©cutĂ©es en 1S89 sur l'ordre du PrĂ©fet de la Manche, Ă  l'occasion du centenaire de la RĂ©volution française cahiers de Carne ville, Montebourg, ."Mont gardon, Ouetletot, Saint-Floxeh Sainte-GeneviĂšve, Urville-prĂšs Valognes, Videcos ville; onze cahiers sonl empruntas Ă  diverses publications, savoir cinq Ă  Hippeau. oav. citĂ©, t. VIII, p. 389. 414, 452 et 459 cahiers de Canteloup, Morsalines, Octeville- la- Venelle, Pierreville, RĂ©ville ; cinq dans Lecacheux, Documents pour servir Ă  l'his- loirede Montebourg cahiers d'HĂ©mevez, Ozeville, Saint Cyr, Saint Mailin-d'Andou- ville. Sainte-Marie-d'Andouville ; un dans Lecanelier, MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© archĂ©ologique de Valognes, t. VI, p. 'il cahier le Carteret. Pour le bailliage le Carentan, 3 cahiers pour 47 paroisses Carentan-ville et Cauquigny. Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie B non classĂ©e ; La Haye-du-Puits, Arch. nal., IIV ,,is 10,231. Pour le bailliage de Saint-LĂč, un projet de cahier, celui de Saint-LĂŽ-ville imprimĂ©, 1781» et un cahier, celui de Saint-Jean -d'Ai>neaux, Arch. nat., Ba 35, liasse 70. Pour le bail- liage de Saint-Sauveur-le-Viconite, 3 extraits des cahiers de Turqueville, Le Vastel NĂ©ville, \rch. nat., B1" 54. p. 70. Pour le bailliage de Saint-Sauveur Lendelin, 2 ca- hiers, Agon et Saint-Germain do la Campagne pour 19 paroisses ; pour celui de Tin chebrai, 4 cahiers de paroisses mixtes, Le DĂ©troit, Durcet, Espins, Les Tourailles, pour !ti paroisses pour ceux d'Avranches. CĂ©rences et Morlain, pas un muI cahier paroissial. — 4'ous les cahiers du bailliage de Cotentin l'ont l'objet d'une publication de M. Bridrey, en trois volumes. Deux volumes ont dĂ©jĂ  paru c'est une Ă©dition excellente et dĂ©finitive. 2 Voir ci-dessous, Appendice III. 3 Les 125 cahiers urbains ou paroissiaux du bailliage de Valognes. publiĂ©s par E. Bridrey, ouv. cilĂ©, t. Il, proviennenl en trĂšs grande partie des Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie B non classĂ©e 106 cahiers. La provenance des 19 autres cahiers 8 extraits de registres de dĂ©libĂ©rations communales, 5 transmis par Hippeau, 5 par Lecacheux et 1 par Le Canelier a Ă©tĂ© indiquĂ©e dans la note prĂ©cĂ©dente. DISPARITION DE NOMBREUX CAHIERS PRIMAIRES 249 Coutances l, de Falaise 2, oĂč les cahiers paroissiaux abondent, de Torigni W et de Vire 4, oĂč il en existe un groupe assez notable. Or, par une coĂŻncidence regrettable, les cahiers de ces cinq bail- liages n'ont influĂ© que fort peu sur la rĂ©daction du cahier gĂ©nĂ©ral, soit Ă  Caen, soit Ă  Coutances. Au contraire, les bailliages parti- culiers dont les vƓux ont passĂ© presque en entier dans le cahier gĂ©nĂ©ral, tels ceux de Caen 5 et de Bayeux pour le cahier de Caen, celui de Mortain 7 pour le cahier du Cotentin, n'offrent Ă  nos recherches, les deux premiers qu'un nombre trĂšs insignifiant de cahiers primaires, et le troisiĂšme, pas un seul. Essayons cependant, dans la limite des moyens dont nous disposons, de refaire le trajet que les cahiers du Tiers Ă©tat de li Les 117 cahiers primaires du bailliage de Coutances, publiĂ©s par Bridrey, ouv. citĂ©, l. 1, p. 133-644, sont conservĂ©s aux archives du greffe lu tribunal de premiĂšre instance de Coutances. Voir ci-dessus, p. 248, note 1. 2 Les 240 cahiers primaires du bailliage . MalgrĂ© le libĂ©ralisme de la lĂ©gislation Ă©lectorale, qui permettait aux plus petits cotisĂ©s de l'aire entendre leur voix, il n'est pas prouvĂ© que le prolĂ©tariat rural y ait assistĂ© en masse. On le voit encore moins figurer dans les dĂ©puta lions des paroisses 1 Sur 306 cahiers paroissiaux Ă©tudiĂ©s, j'en ai trouvĂ© 185 ne prĂ©sentant qu'une des lieux catĂ©gories de vƓux, soit d'intĂ©rĂȘt local 57, soil d'inlĂ©rĂšl gĂ©nĂ©ral 128 ; les 121 autres cahiers renferment chacun les vƓux des deux catĂ©gories, tantĂŽt faisant l'objet de dĂ©veloppements distincts, tantĂŽt, et le plus souvent, exposĂ©s pĂȘle-mĂȘle. 2 Toutefois, quelques cahiers ruraux ont Ă©mis des vƓux relatifs Ă  l'industrie et au commerce. Le cahier de Villedieu esl rempli de dĂ©tails typiques sur l'industrie du cuivre et sĂ»r la fahrication des poĂȘles et autres ustensiles de cuisine. Plusieurs paroisses du bailliage de Vire nous font connaĂźtre les industries locales les plus diverses toi lier S d'Aubusson, hacherons et charbonniers de la forĂȘt de Ilalouze. ouvriers des forges de Saint-Clair cl de Danvou, etc.. La libertĂ© du commerce est rĂ©clamĂ©e par une quinzaine de communautĂ©s des bailliages de Coutances et de Valo- gftĂ©s la suppression des maĂźtrises et jurandes esl demandĂ©e dans les cahiers de Camhernon, Brainville, llauteville-sur-Mer et Nicorps. ! Voir ci-dessus, chap. IX, p. 196-197. Cf. JaurĂšs, Histoire socialiste. I. I. p. 223-224 An lard, Histoire de la RĂȘvolitlion, p. 29 et suivantes. ENTRAVES A LA PROPRIÉTÉ RURALE 251 aux assemblĂ©es prĂ©liminaires de bailliages. Je n'ai trouvĂ© que deux journaliers mentionnĂ©s comme dĂ©putĂ©s ruraux, l'un Ă  Grimesnil, dans le bailliage de Goutances, l'autre Ă  Cagny, dans le bailliage de Caen. M. Bridrey croit qu'il s'est opĂ©rĂ©, en contradiction du RĂšglement royal, une sĂ©lection spontanĂ©e, et qu'il y a en abdica- tion ou exclusion de toute nue partie de la population agricole la population ouvriĂšre » r. Ge qui tendrait Ă  lui donner raison, c'est le caractĂšre mĂȘme des revendications locales contenues dans ces cahiers elles rĂ©vĂšlent des gens intĂ©ressĂ©s Ă  dĂ©fendre le sol, dont ils sont propriĂ©taires ou fermiers, contre les charges nombreuses qui pĂšsent sur lui. Kmanciper la terre, l'affranchir de toutes les entraves qui l'asservissent, de foules les redevances qui absor- bent la plus grande partie de son rendement, voilĂ  ce que veulent les paysans de Basse-Normandie, des grĂšves du Gouesnon aux falaises de la llague, et des marais de la Dives aux croupes gra- nitiques du Bocage. Ils se plaignent, tout d'abord, de n'en point possĂ©der assez. La plus grande partie du sol, et la meilleure, appartient aux seigneurs et aux privilĂ©giĂ©s de tout ordre, cj ni possĂšdent, tant en fonds qu'en revenus, la moitiĂ©, les deux tiers, parfois les trois quarts des paroisses. Le reste est divisĂ©, par petites parcelles, entre les taillables i2. Encore ceux-ci n'en sont-ils, le plus souvent, que fieffataires ; leur propriĂ©tĂ© n'est pas franche, mais maculĂ©e » de lourdes rentes g. La paroisse possĂšde-t-elle, de temps immĂ©- morial, des biens communaux, landages ou bruyĂšres, oĂč va paĂźtre la vache du pauvre, oĂč celui-ci va, l'hiver, ramasser un 1 Bridrey. La ReprĂ©senlalion des Professions, p. 1070 et suivantes. 2 Cahiers d'Acque ville, Gatteville, Herqueville, Montfarville, Saint-Pierre-cTAl- lone, Surtainville, Tonneville et Vasteville bailliage de VĂ lognes ; cahiers de La BesliĂšre, de Coudeville, Chantelou, Courcy, Sainl-Martin-le-Vieux, Qucttreville, Dra- gueville, La Haye-Comtesse, Herenguerville, L'Orbehaye, Montaigu, Saint-Jean-des- Champs, Saint-Louet-sur-Sienne, Sainl-Martin-le-Vieux, Saint-Ursin bailliage de Coutances ; cahiers de BiĂ©ville, Clouai, Guilberville, SepLvents bailliage de Tori- gni ; cahier de Landelles-et-Coupigny bailliage de Vire. Voir Appendice IL n° 1. Je laisse systĂ©matiquement de cĂŽtĂ© les cahiers du bailliage de Falaise, la. presque totalitĂ© des paroisses de ce bailliage Ă©tant hors des limites de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. 11 n'entre pas davantage dans mon plan d'analyser tous les cahiers ruraux conservĂ©s pour les paroisses de cette gĂ©nĂ©ralitĂ©, mais de signaler en note ceux qui contiennent les dolĂ©ances les plus caractĂ©ristiques sur chacun des objets traitĂ©s. 3 Cahiers de Picauville, Surtainville, Saint-LĂŽ-d'Ourville VĂ lognes ; BrĂ©hal. Hugucville, Montaigu-les-Bois, Saint-Martin-le-Vieux, Tourville Coutances ; Mont- bertrand, Saint-Ebremond-de-Ia-Barre Torigni ; Landelles-el-Coupigny, Vaudi y Vire. Voir Appendice II, n° 2. 252 ENTRAVES AUX PROGRÈS DE L* AGRICULTURE peu de bois mort, le seigneur en dispute la propriĂ©tĂ© aux habi- tants et leur en interdit l'usage l. Pour devenir plus productif, ce sol sur l'infertilitĂ© duquel gĂ©missent tant de communautĂ©s 2, aurait besoin d'ĂȘtre amendĂ© ; mais les engrais sont trĂšs coĂ»teux par suite de leur Ă©loignement et des lourds frais de transport 3. Qu'il aille chercher la charrĂ©e Ă  l'intĂ©rieur du pays, ou la tangue et le varech sur le rivage marin, le laboureur doit Ă©quiper de forts attelages et parcourir un long trajet. Et, Ă  supposer qu'en dĂ©pit des ordonnances qui interdisent l'enlĂšvement de ces engrais de men'4, il ait pu s'en approvision- ner, combien le retour est pĂ©nible par ces chemins bourbeux et impraticables, oĂč la charrette s'enlise dans les orniĂšres profondes, oĂč le chargement risque de verser Ă  chaque pas ! L'agriculture ne manque pas seulement d'engrais et de routes ; elle manque de bras. La raretĂ© et la chertĂ© de la main-d'Ɠuvre font l'objet de plaintes frĂ©quentes les travaux de Cherbourg dĂ©peuplent le Cotentin d'ouvriers agricoles, qui vont grossir la plĂšbe urbaine ^K La milice cause un double ravage elle enlĂšve Ă  la charrue de nombreux fils de laboureurs W ; d'autres, pour se il Cahiers d'Acqueville, Brix, Vasleville, etc. Le roi lui-mĂȘme revendique la pro- priĂ©tĂ© des biens communaux pour son Domaine, et lĂšve sur eux une redevance annuelle cahier du Ham. Voir Appendice 11. d° >. 2 Cahiers de Champrepus, La Colombe, La Baleine, Hyenville. Montagu, Saint Malo-de-la Lande, Montcuit, Sourdeval, Saint-Ursin, etc. Coutances ; Carneville, Fontena} en-Cotentin, Montgardon, Morsalines, Notre-Dame-d'Allonne, Banville la- Bigot, Senoville, Surtainville, Saint-Pierre-d'Allonne, etc. Valognes; Aubusson, Landelles-et-Coupigny, La Lande-Vaumont, Sainte-Marie-des-Monts, Saint-Maur- des-Bois Vire; Septvents, Montberlrand, Saint-Pierre-de-Semilly, etc. Torigni. Ibid., n° L 3 Cahiers de Lengronne, Trelly, La Colombe, Percy, Mesnil-Bonant, La llaye- Bellefond, etc. Coutancesj ; d'Acqueville, Aumeville-l'Estre, Pierreville, Quettetot, Rauville-la-Bigol Valognes ; Beuvrigny, Sallen, La F erri Ăšre-Hareng Torigni ; Saint-Maur-des-Bois Vire. Ibid., u" 5. I Cahiers de Brainville, Caillebot-la-Salle, Monthuchon, Saint-Malo-de-la-Lande, etc. Coutances ; de Canville, Gonneville, Sainte-GeneviĂšve, Le Vicel, etc. Valo- gnes de Rampan Torigni ; de SĂąint-Denis-Maisoncelles, Saint-Martin-de-Chaulieu Vire. Ibid., n° 6. .r> Cahiers de La Colombe, Le Loreur, Mesnil-Aidierl, RĂ©gneville, Saint-Denis-le- Casl, Saint-Bomphaire, Trelly, Sourdeval, etc. Coutances de Fierville, Fontenaj cn-Cotentin, HautmoitiĂ©, Les Perques, Saint-Pierre-d'Allonne, Le Theil, etc. Valo- gnes ; de Saint-Pierre-de-Semilly Torigni. Ibid.. n" 7. 6 Cahiers de Gatte ville, La Pernelle, Saint-Germain-le-Gaillard, Valcanville, Varouville, Montfarville, Carneville, Theurteville-au-Bocage, Ozeville. Saint Mar- tin-d'Audouville, Brettevi lie Valognes. Ibid., n" 8. 7 Cahiers d'Englesqueville-l'Estre, Alleaume, Anneville-en-CĂšres, Breuville, Bricquebec, Helle ville, Montfarville. Notre-Dame-d Allonne, Ozeville, La Pernelle, RĂ©ville, etc. Valognes. Les cahiers du bailliage; de Coutances contiennent surtout LES IMPOSITIONS ROYALES 253 soustraire Ă  son joug, Ă©migrent en masse vers les villes, recher- chant, au service des privilĂ©giĂ©s, les emplois de domesticitĂ© qui les exempteront de cette charge 1. La grosse question, Ă©crit M. Bridrey, celle sur laquelle revien- nent Ă  tout instant les cahiers du Cotentin, ce sont les charges de la production » -. AcquittĂ©es en argent ou en nature, envers le roi ou les privilĂ©giĂ©s, elles constituent un fardeau trĂšs onĂ©reux pour la propriĂ©tĂ© roturiĂšre. La taille, tout d'abord, atteignait en Basse-Normandie la propriĂ©tĂ©, l'exploitation et l'industrie ; arbitrairement rĂ©partie, en l'absence d'un cadastre rĂ©gulier 3, elle frappait en aveugle les fonds les moins fertiles et se dĂ©tour- nait des meilleures cultures l>. La perception en Ă©tait rigoureuse, vexatoire et vraiment ruineuse 5. La capitation, modelĂ©e sur la taille, en doublait le poids. L'imposition des vingtiĂšmes, Ă©qui- table dans son principe, puis qu'elle atteignait tous les biens- fonds, ne l'Ă©tait plus dans son application, en raison des Ă©valua- tions arbitraires des contrĂŽleurs et des complaisances coupables du fisc Ă  l'Ă©gard des privilĂ©giĂ©s ,r,. Ajoutez-y la prestation de la corvĂ©e, cette taille des chemins, dont trop de paroisses ne profi- taient jamais 7, l'imposition territoriale et celle des bĂątiments des dolĂ©ances sur la milice de terre ; ceux du bailliage de Valognes., rĂ©gion pĂ©nin- sulaire, mit la milice de mer ou garde-cĂŽte. Voir Appendice II, n° 9. I Cahiers d'Acqueyille, du Ham, Pierreville, Surtainville, Vasteville, Tonneville, Sauxemesnil, HĂ©mevez, Saint-Germain-de-Tournebul Valognes Ibid., n° In. ‱> Bridrey, Recueil citĂ©, t. I, Introduction, i». t;7. 3 Cahier d'Urville-prĂšs- Valognes, arl. 4. U Parmi les nombreux cahiers paroissiaux se plaignant de l'injuste rĂ©partition de la taille, citons ceux de Digosville, Surtainville. Acqueville, Flottemanville, Magneville, Biville, Gatteville, Saint-Martin-le-GrĂ©ard, Theurteville-au-Bocage Valognes; ; Gailiebot-la-Salle, Carantilly, Quettreville Coutances ; Landelles-et- Coupignv Vire. Voir Appendice II, n° 11. 5 Cahiers de Clitourps, Fresville, Gonneville, Mesnil-au-Val, La Pernelle, Saint- Christophe du-Foc, Saint-LĂŽ-d'Ourville, Le Vretot Valognes ; de la BloutiĂšre, Percy Coutances. Ibid., n° 12. 6 Les dolĂ©ances relatives aux vingtiĂšmes sont, dans la plupart des cahiers, associĂ©es Ă  celles concernant la taille, capitation el accessoires; elles sont cepen- dant l'objet d'un dĂ©veloppement spĂ©cial dans certains cahiers, notamment ceux de Digosville, Ilenneville, Pierreville, Saint-Denis-le-VĂȘtu, Saint-Martin-du-Mesnil, Yvelol Valognes. Ibid., n° 13. 7 Cahiers de Breuville, Digosville, Emondcville, Rauville-la-Bigot, Saint-Chris- tophe-du-Foc, Theurteville-au-Bocage, HĂ©mevez, Urville-prĂšs- Valognes Valognes ; de Beaucoudray, Belval, Chantelou, Gavray-bourg et Gavray-village, Le Loreur, Mesnil-Aubert, Monlchalon, Ouville, Percy, Saint-Denis-le-VĂȘtu, Saint-Louet-sur- sieune Coutances ; Gouvets, MontĂźlly, Saint-Manvieu, Sainte-Marie-Outreleau \ ire ; Bures. Cuilherville, Rampan, Sallen, Septvents Torigni. Ibid., n° 14. '?."> 1 u;s \iii;s i;t gabelles de justice, surcharges Ă©crasantes, dont le chef-lieu seul profitait W, Aussi n'y a-t-il qu'un cri parmi les populations rurales pour demander l'abolition de tous ces impĂŽts, et leur remplacement par une taxe unique, indistinctement assise sur tous les possĂ©dant- fonds. Abolition de tous les privilĂšges pĂ©cuniaires, Ă©galitĂ© et proportionnalitĂ© de l'impĂŽt dans tous les ordres, simplification de son assiette et de sa perception, tels sont les vƓux essentiels du Tiers Ă©tat rural en matiĂšre fiscale 2, Les paysans Ă©taient encore plus prĂ©venus contre les impĂŽts indirects qui frappaient les objets de consommation et les denrĂ©es de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, comme les aides et les gabelles. La multi- plicitĂ© des droits, qui mettaient les commis en contact incessant avec les populations, la duretĂ© que ceux-ci apportaient dans leur mode de perception, la rigueur des chĂątiments infligĂ©s Ă  la moin- dre faute rendaient ces impositions haĂŻssables. Aussi la majoritĂ© des cahiers en demandaient-ils, non pas la rĂ©duction, mais la suppression totale et sans compensation, comme une des servi- tudes les plus vexatoires et les plus odieuses 3. Quand le laboureur avait payĂ© sa dette au roi, il n'Ă©tait point quitte envers l'homme d'Ă©glise et le seigneur. Au premier, il devait d'abord le logement. La question de l'entretien et de la reconstruction des presbytĂšres tient une grande place dans les dolĂ©ances rurales ; toutes les paroisses demandent Ă  ĂȘtre dĂ©char- gĂ©es des lourdes dĂ©penses qu'ils entraĂźnent 4. Il lui devait surtout la dĂźme, sous ses diverses espĂšces grosses et menues dĂźmes, 1 Cahiers de La BloutiĂšre, Brainville. Chantelou Coutances ;-Ă e Flotteraanville- prĂšs -Valognes Valognes ; de Rampas Toifigo,i. Voir Appendice II. n" 15. ‱2 Il faudrait, citer Ă  peu prĂšs tous les cahiers paroissiaux. La plupart deman- dent un seul impĂŽt, l'impĂŽt foncier, ; c'esl une infinie minoritĂ© qui se prononce en laveur de deux impĂŽts la subvention territoriale ou impĂŽt rĂ©el, et la eapitation ou impĂŽl personnel tels les cahiers de La BloutiĂšre,, Bricipieville-la Blouette, Belval. 3 Sur ce point encore, les cahiers abondent; aussi, je n'en cite que Le Rozel, Saint-Martin-le-GrĂ©ard, Surtainvftle, Theur- teville-au-Bocage, etc. Valognes ; Aunoville-Tournoville, La Baleine, Briqueville- la-Blouette, ContriĂšres, CoudeviHe, Courcy, La Haye-Bellefond, Mesnil-Aubert, Mcsnil-Villeinanl, Montinartin, Ouetlreville, Tourville, l rville Coutances ; Claire- fougĂšre, Le DĂ©serÉ, SainteMarie-OutrĂ©leau Vire. Voir Appendice 11, n° 18. 3 Les rentes seigneuriales Ă©taient souvent fort lourdes. J'en ai donnĂ© quelques exemples Ă  l'Appendice 11, n" 2. Il semble qu'Ă  la fin de l'ancien rĂ©gime le poids en avait augmentĂ© par suite du renouvellement des terriers. Ces seigneurs aggravaient leurs exigences et doublaient parfois les redevances cahiers de Moyon, de Fourneaux, de Montbertrand. Ibid., n°I9. D'aprĂšs la coutume de Normandie, les seigneurs bas- justiciers pouvaient rĂ©clamer jusqu'Ă  trois annĂ©es d'arrĂ©rages de rentes seigneu- riales, et les hauts-justiciers jusqu'Ă  vingt-neuf annĂ©es, ce qui rendait la situation des paysans incertaine et prĂ©caire cahiers de La BesliĂšre, Montaigu-ĂŻes-Bois, La Colombe. thM.\ n° 20. Enfin, les seigneurs refusaient de faire Ă  leurs vassaux la dĂ©duction des vingtiĂšmes sur ces rentes, ce qui provoqua de nombreuses plaintes cahiers de La BesKĂšre, Suint Nicolas -de-Coutances, ContriĂšres, Bangy, CarentiHy, Camprond, Le Loremr, Mroyon, etc., bairliage {. 3 Cahiers de Belval, Blainville, Bricqueville, Gratot, La Baleine, La Haye-Com- tesse, Lorbehaye, Muneville, Ouvillc, Savigny, Saint Malo-de-la-Lande, Saint- Pierre Ăźle Coutances, Saultchevreuil, Saint-Romphaire, Tourville Coutances ; de llelleville, Su rtai n ville . Le Vi'etol, Saint-Marcouf Valognes ; de Clinchamps, Gou- vets, La Çhapelle-aux-Moines Vire ; de Sallen, La PerriĂšre-Hareng, Montbertrand, Fourneaux, Litteau, Saint Martin de la Besace Torigni. Yoii Appendice II, n° 2&. 4 Cahiers trĂšs nombreux, dont voici les plus typiques Brainville, Caillebot-la Salle, Camprond, Dangy, Longueville, Montcarville, Saussey, Saint-Aubin-des- PrĂ©aux, Saint-Planchers, Tourville Coutances ; Crasville, Biville, Equeurdreville, Joganville, Le Bozel, Martinvast, Sainl Germain-le-Gaillard, Pierreyille, Surtain- ville, Saint-Floxel, Sainte-Marie-d'Audouville, Saint-Germain-de-Tournebut, Saint- Vaast-la Hougue Valognes; Clouai, Litteau Torigni; Boucamp, Sainte Marie Outreleau Vire. Ibid., n° 2G. 5 Cahiers trĂšs nombreux, parmi lesquels ceux de Saint-Jean-des-Champs, Saint- Malo-de la-Lande, Tourville- Coutances ; d'Alleaume, Biville, Martinvast, Saint-LĂŽ- d'Urville, Le VretoL, HĂ©mevez, Saint-Marconi', Saint- Vaast-la-Hougue Valognes ; de La Lhapelle-aux-Moines, Daiivou, Montilly, La Selle, Saint-Clair-de-Ilalouze Aire. Dans de nombreuses paroisses du Bocage, les paysans, obligĂ©s de veiller la nuit sur leurs rĂ©coltes, demandent l'autorisation du port d'armes interdit en Nor- mandie depuis 17GG, pour tuer les animaux malfaisants qui, sortant des garennes el des forĂȘts, dĂ©vastent leurs champs. Ibid., n" 27, et F. Mourlot, Lu Convocation des Etals gĂ©nĂ©raux dans h- bailliage de Vire {Lu RĂ©volution française. 1896, t. XXXI, p. 337339. tĂźj Voir le cahier de HĂ©auville. Bridrey, ouv. citĂ©, I. II, p. 32J. PROLÉTAIRES ET MENDIANTS RURAUX 257 prĂ©lĂšvements successifs sur les produits de la terre » !, nous renseignent-ils avec autant de prĂ©cision sur les malheurs d'une classe plus misĂ©rable encore? En effet, au-dessous de ces labou- reurs possĂ©dant-fonds, petits propriĂ©taires, fieffataires ou fer- miers, il y avait, dans les campagnes, des individus de condition plus prĂ©caire encore journaliers, manƓuvres mercenaires, n'ayant que leur pelle et leur pioche, artisans de petits mĂ©tiers, fileurs de coton, tisserands, colporteurs, etc..., tout un prolĂ©- tariat rural, sans avoir et sans espĂ©rance 2. Au premier chĂŽmage, maladie ou vieillesse, ces malheureux allaient grossir l'armĂ©e des indigents pauvres domiciliĂ©s ou mendiants vagabonds. Toute cette plĂšbe rustique, qui devait composer bientĂŽt la classe des citoyens passifs, put-elle faire entendre sa voix dans le concert des revendications paysannes? Probablement non, ou excep- tionnellement. Sans doute, plus d'un cahier rural renferme des vƓux sur le soulagement des pauvres et sur l'extinction de la mendicitĂ© ; mais ces vƓux ne peuvent-ils s'expliquer sans l'inter- vention directe de ceux qu'ils concernent? N'est-il pas naturel qu'ils aient Ă©tĂ© inspirĂ©s Ă  ceux qui possĂ©daient quelque chose par le souci de leur propre intĂ©rĂȘt et par la crainte de dangers prochains? C'est, ne l'oublions pas, une minoritĂ© de cahiers qui pose les deux questions du paupĂ©risme et de la mendicitĂ© 3. Si les paysans signalent, çà et lĂ , le nombre des pauvres, des veuves et des orphelins, c'est peut-ĂȘtre moins pour s'apitoyer sur le dĂ©nuement de ces malheureux que pour faire ressortir le taux excessif des impositions dont on frappe leur paroisse W ; c'est pour flĂ©trir l'avarice des gros dĂ©cimateurs et la pratique abusive des dĂ©ports, pour constater la charitĂ© impuissante des curĂ©s ; c'est pour dĂ©plorer la lourdeur de la charge qui retombe sur les pa- roisses rurales 5 ; c'est aussi pour rĂ©clamer l'admission, jusque-lĂ  1 Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, p. 67. 2 Sur l'existence de ce prolĂ©tariat rural, voir Appendice II, n° 28, et Kowalewsky, La France Ă©conomique et sociale Ă  la veille de la RĂ©volution les Campagnes, p. 190. — Voir surtout les Etats d'impositions de 1788, dressĂ©s par les municipalitĂ©s des dĂ©partements de Caen et de Vire. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7817-8088, passim. 3 Dans le bailliage de Coutances, 25 cahiers, et dans celui de Valognes, 27 ca- hiers, c'est-Ă -dire moins du quart, s'occupent des pauvres, et presque tous Ă  l'occa- sion de la mendicitĂ©, qu'on redoutait. 4 Cahiers de Blainville, BrĂ©hal, Bricqueville-prĂšs-la-Mer, Saint-Malo-de-la- Lande, Les Planchers, etc. 5 Cahiers de Percy, Questreville, La Haye-Bellefond, Chantelou Coutances ; du Mesnil-au-Val, Biville, Emondeville, Le Rozel, Saint-Pierre-d'Allonne, Le Theil, Saulxemesnil Valognes. Voir Appendice II, n° 29. 17 "258 CAHIERS UURAUX, 1NTEHPRETES DES DETENTEURS DU SOL refusĂ©e, de leurs indigents malades ou infirmes jJansÂles hĂŽpitaux des villes l. Quant Ă  l'extinction de la mendicitĂ©, elle les prĂ©oc- cupe davantage ; les mendiants, en effet, qui promĂšnent la terreur dans les campagnes, constituent Ă  leurs yeux un danger public^. Ce que les cahiers demandent, ce n'est pas tant l'amĂ©lioration du sort des mendiants que des mesures de rĂ©pression sĂ©vĂšre et l'ap- plication rigoureuse des lois draconiennes que l'ancien rĂ©gime a Ă©dictĂ©es {'SK Le partage des biens communaux, que l'on trouve demandĂ© par plusieurs cahiers primaires, ne doit pas ĂȘtre envisagĂ© comme une mesure philanthropique en faveur des prolĂ©taires ruraux ce partage tendait plutĂŽt Ă  arrondir la possession du paysan dĂ©jĂ  propriĂ©taire qu'Ă  crĂ©er celle de l'indigent 4. On peut, en somme, considĂ©rer les dolĂ©ances locales du Tiers Ă©tat rural de Basse-Normandie comme une dĂ©nonciation collec- tive des conditions Ă©conomiques fĂącheuses imposĂ©es Ă  la propriĂ©tĂ© paysanne, dĂ©nonciation faite par des gens intĂ©ressĂ©s Ă  voir celle-ci dĂ©livrĂ©e ou grandement allĂ©gĂ©e de toutes les charges qui pĂšsent sur elle. C'est un appel Ă  l'Ă©mancipation de la terre, poussĂ© par ceux qui la dĂ©tiennent et l'exploitent, et Doniol trouvait la for- mule juste lorsqu'il Ă©crivait, il y a plus de quarante ans ta Tous ceux Ă  qui la possession du sol, sa culture, une participation quelconque Ă  la production agricole donnaient un motif d'espĂ©- rer un avantage dans les rĂ©formes qu'on entrevoyait, dressĂšrent le tableau de leur condition et de leurs griefs, l'exposĂ© des obli- gations et de l'Ă©tat Ă©conomique que le rĂ©gime de la fĂ©odalitĂ© leur faisait » 5. Ces dolĂ©ances sont en gĂ©nĂ©ral sincĂšres et spontanĂ©es. Elles sont l'Ɠuvre de paysans avisĂ©s, trĂšs clairvoyants sur leurs propres intĂ©rĂȘts ; ils n'ont besoin ni de guide ni de modĂšle pour dĂ©crire lj Cahiers de Saussoy, d'Orval, de Saint-Ebremond-de-la-Barre. 2 Cahiers d'Annoville, Tourneville, Hocquigny Coutances ; Saint-Pierre-du- Fresne, Notre-Dame-du-Bois-d'Elles Torigni. Voir Appendice II, n° 30. 3 Cahiers de Gavray, Hocquigny, Saint-AndrĂ©-de-Valjouais, Rideauviille. lbid., n° 81. Voir F. Mourlot, La question de la MendicitĂ© en Normandie au XVIIIe siĂšcle, p. 16 et 38-41. 4 Cahiers de Blainville. Bricqueville-la-Blouette, La Haye-Bellefoud, Saint- Martin-le-Vieux, Saint-Pierre-de-Coutances Coutances ; de Fresville, Gonneville, Mesnil-au-Val, Valcanville, Varouville Valognes. Voir Appendice II, n° 32. — D'a- prĂšs la jurisprudence constante du Parlement de Bouen, le partage des communaux devait se faire non par feux, mais uniquement entre les possĂ©dant-fonds, et propor- tionnellement Ă  leurs propriĂ©tĂ©s. Les prolĂ©taires n'avaient, par consĂ©quent, rien Ă  y gagner ; aussi certains cahiers demandent-ils qu'on ait Ă©gard, dans le partage, aux pauvres habitants cahier du Vretot. 5 Doniol, Histoire des Classes rurales en France, p. 492. LEURS PRÉCÉDENTS. REQUÊTES A L'INTENDANCE 259 la rapacitĂ© des commis du fisc, l'aviditĂ© et la duretĂ© des dĂ©cima- teurs, les ravages des bĂȘtes de la forĂȘt voisine ou le pitoyable Ă©tat de leurs routes. C'est leur angoisse et leur souffrance qui parlent tout haut, depuis qu'elles en ont le droit ll Aussi, pour toute cette partie des cahiers qui traite des questions rurales, ne faut-il chercher d'autre source d'inspiration que la situation des plai- gnants. Assez souvent, ceux-ci n'ont fait que reproduire des rĂ©cla- mations anciennes, que renouveler des protestations demeurĂ©es sans effet. En feuilletant les dossiers cle l'Intendance et de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, on peut retrouver maintes requĂȘtes qui dormaient dans les cartons et dont les cahiers nous apportent l'Ă©cho 2. L'administration provinciale de Basse-Normandie avait elle-mĂȘme indirectement facilitĂ© la rĂ©daction de ces dolĂ©ances locales en provoquant, l'annĂ©e prĂ©cĂ©- dente, une vaste enquĂȘte, dans tous les dĂ©partements de son ressort, sur l'Ă©tat Ă©conomique des paroisses rurales. Cette enquĂȘte devait aboutir Ă  une plus Ă©quitable rĂ©partition de la taille. Chaque 1 Le pauvre oublie sa misĂšre en franchissant l'intervalle immense entre la cabane et le trĂŽne. » Cahier de Gratot. — C'est le cri que le peuple pousse vers le roi du fond de sa misĂšre. » Cahier de Saint-Jean- des-Champs. — Vive le Roi ! le pĂšre de la nation française, qui appelle ses enfants de toutes les classes auprĂšs de lui pour entendre leurs voix plaintives et subvenir Ă  leurs besoins. » Cahier de Rampan. 2 Le cahier de Pierreville dĂ©clare reproduire, Ă  propos de la surcharge des ving- tiĂšmes dans cette paroisse, des rĂ©clamations dont les bureaux de l'Intendance de Caen sont remplis et garnis ». En effet, l'on trouve, au fonds de l'Intendance, de nombreuses requĂȘtes de Pierreville sur cet objet entre les annĂ©es 1782 et 1788. Arch. dĂ©p., Calvados, C 5910. — Le cahier de la section de Montceaux, paroisse de ^uet- treville, reproduit une plainte adressĂ©e en mars 1788 au Rureau intermĂ©diaire de Coutances, par 18 paroisses qui demandent le rĂ©tablissement d'un ancien pont sur la Sienne. Voir le procĂšs-verbal de l'AssemblĂ©e du dĂ©partement, d'octobre 1788 Arch. dĂ©p , Calvados, C 7700, et ci-dessus, chap. VII, p. 146, note 1. — La recons- truction du pont de La Rocque, Ă©galement sur la Sienne, a dĂ©jĂ  fait l'objet de requĂȘtes Ă  l'intendant Ibid., C 4011, et d'un vƓu Ă  l'AssemblĂ©e de Coutances Ibid., C 7000, avant d'ĂȘtre rĂ©clamĂ©e par les cahiers de Montchaton, Hauteville, Heugue- ville, RegnĂ©ville et Urville. — Les vƓux relatifs aux routes reproduisent trĂšs sou- vent d'anciennes requĂȘtes Ă  l'Intendance ou Ă  l'AssemblĂ©e provinciale, comme Ă  Nicorps mĂ©moire de 5 paroisses Ă  l'AssemblĂ©e de Coutances, Ibid., C 7000; Ă  Saint- Romphaire mĂ©moire de Montaure, signĂ© par 30 municipalitĂ©s et adressĂ© Ă  l'Assem- blĂ©e de Saint-LĂš, Ibid., C 7712 ; Ă  Moon requĂȘte de 13 paroisses au Rureau inter- mĂ©diaire de Rayeux, 18 mai 1788, Hippeau, ouv. citĂ©, t. VIII, p. 358. — 11 en est de mĂȘme pour les plaintes relatives aux reconstructions de presbytĂšres ex. Ă  Relval, Ă  Montchaton, Arch. dĂ©p., Calvados, C 1340 ; aux retards du paiement des indemni- tĂ©s pour terrains expropriĂ©s ex. Ă  Equeurdreville, Ibid., C 1711 ; Ă  l'augmentation des jours de fabrication du sel ex. Ă  Muneville, Ibid., C 7700. — Un article du cahier de Carantilly, relatif Ă  la ruine des fabricants de toile, est inspirĂ© par le rĂ©cent krach d'une maison de Saint-LĂŽ, qui a fait subir de grosses pertes Ă  de nom- breux habitants Ibid., C 1477. 260 LES OBSERVATIONS GÉNÉRALES DES MUNICIPALITÉS assemblĂ©e municipale Ă©tait invitĂ©e Ă  dresser un Ă©tat mentionnant le chiffre total des impositions levĂ©es sur la paroisse, taille, en principal et accessoires, vingtiĂšmes et sols pour livre, capitation, taxe reprĂ©sentative de la corvĂ©e, impĂŽt territorial et impĂŽt des bĂątiments de justice. Chaque Ă©tat devait contenir le nom des taillables, avec le montant et la nature de leur taille de propriĂ©tĂ©, d'exploitation et d'industrie, le nom des privilĂ©giĂ©s et taxĂ©s d'of- fice ; une large colonne y Ă©tait rĂ©servĂ©e Ă  des Observations gĂ©nĂ©rales » relatives aux ressources agricoles ou industrielles de la paroisse, aux charges qui pesaient sur elle, aux remĂšdes dont l'emploi semblerait nĂ©cessaire. L'AssemblĂ©e provinciale de Caen avait voulu, comme celle dont parle Tocqueville, apprendre des paysans eux-mĂȘmes, dans le dĂ©tail, tous les griefs dont ils pouvaient avoir Ă  se plaindre » *>. Partout oĂč elle fut obĂ©ie, dans les dĂ©partements de Caen et de Vire notamment, les municipa- litĂ©s dressĂšrent le bilan de la vie Ă©conomique des campagnes. Leurs Observations gĂ©nĂ©rales », rĂ©digĂ©es en juillet-aoĂ»t 1788, dĂ©passĂšrent souvent en longueur et en abondance d'information les cahiers de l'annĂ©e suivante 2. Moins de six mois plus tard, lorsque ces paysans furent Ă  nouveau consultĂ©s, ils n'eurent qu'Ă  reproduire, in-extenso ou en abrĂ©gĂ©, des plaintes qui rĂ©sonnaient encore Ă  leur oreille et dont le texte Ă©tait peut-ĂȘtre restĂ© sous leurs yeux. Il est permis de conclure que la valeur documentaire de ces cahiers, au point de vue Ă©conomique et local, est Ă  peu prĂšs incontestable 3. La preuve en a Ă©tĂ© faite dans certaines rĂ©gions de la Basse-Normandie oĂč l'on possĂ©dait les Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires au contrĂŽle de leurs allĂ©gations. M. Bridrey, aprĂšs avoir rappro- chĂ© les cahiers primaires du bailliage de Cotentin de leurs Ă©lĂ©ments de contrĂŽle essentiels rĂŽles de 1789, journaux de rentes, dĂ©cla- rations de bĂ©nĂ©fices, etc . . . , a pu dĂ©clarer, avec pleine assurance pour ceux du bailliage de Coutances, avec plus de rĂ©serve pour ceux du bailliage de Valognes, que leur vĂ©racitĂ© lui Ă©tait 1 Tocqueville, L'Ancien rĂ©gime el la RĂ©volution, p. 272. 2 L'importance de ces Etats d'impositions Arch. dĂ©p., Calvados, C 7817-8088, dĂ©jĂ  signalĂ©e par M. A. BĂ©net, qui les appelle la prĂ©face des cahiers de 1789 » et en forçant un peu la note, les cahiers de 1788 », n'a pas Ă©chappĂ© Ă  M. Aulard. Voir La RĂ©volution française, t. XXXVIII, p. 81. 3 C'est la conclusion Ă  laquelle sont arrivĂ©s M. Onou La valeur des Cahiers au point de vue Ă©conomique et social, La RĂ©volution française, t. XLIX, 1905, p. 409-416 et M. Sagnac Les Cahiers de 1789 et leur valeur, Revue d'Histoire moderne, t. VUI, 1907, p. 346. INFLUENCE DES MODÈLES GENERAUX DE CAHIERS 261 apparue Ă©clatante et indĂ©niable » et que l'ensemble Ă©tait franc et loyal » W. Les vƓux d'intĂ©rĂȘt local ne forment qu'une partie des cahiers paroissiaux ; un trĂšs grand nombre de ceux-ci font, en outre, une place, parfois assez large, aux considĂ©rations d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. Il n'y a rien d'Ă©tonnant Ă  cela. Le mouvement d'opinion qui remuait le Tiers Ă©tat des villes ne s'Ă©tait pas arrĂȘtĂ© au seuil de celles-ci il avait pĂ©nĂ©trĂ© dans les campagnes. Les idĂ©es de rĂ©for- mes y circulaient librement, colportĂ©es de village en village par des pamphlets, des brochures, des factums aux titres les plus variĂ©s. En mĂȘme temps que la fameuse brochure de SieyĂšs inti- tulĂ©e Qu'est-ce que le Tiers Ă©tat ? i2, beaucoup d'autres publi- cations, aujourd'hui oubliĂ©es, parurent Ă  la fin de 1788 et au commencement de 1789 3. Dans ce concert de revendications, la Normandie ne resta pas muette, et l'on y vit Ă©clore une sĂ©rie de manifestes politiques, avant-coureurs des cahiers de dolĂ©ances Le Tiers Ă©tat de Normandie Ă©clairĂ© ou ses droits justifiĂ©s M ; Prenez-y garde, ou avis Ă  toutes les assemblĂ©es d'Ă©lection qui seront convoquĂ©es pour nommer les reprĂ©sentants des trois ordres aux Etats gĂ©nĂ©raux 5 ; RĂ©flexions toutes simples et toutes naturelles d'un Normand 6 ; Projet d'un cahier gĂ©nĂ©ral par un gentilhomme de Normandie ami de la Nation ? ; Le seul intĂ©rĂȘt de tous, par un gentilhomme de Normandie 8, et autres Ă©crits de mĂȘme nature s'Ă©vertuaient Ă  Ă©clairer l'opinion et Ă  orienter les vƓux du Tiers Ă©tat. Deux de ces Ă©crits surtout, dus Ă  la plume de l'avocat Thouret, le futur dĂ©putĂ© du bailliage de Rouen aux Etats gĂ©nĂ©raux, dĂ©passĂšrent tous les autres en reten- tissement et en influence. Ce sont L'Avis des bons Normands Ă  leurs frĂšres tous les bons Français de toutes les provinces sur 1 E. Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, Introduction, p. 70. Il constate, en d'assez nom- breux passages des cahiers du bailliage de Valognes, que les observations Ă©mises par ceux-ci sont localement sans portĂ©e » et sont les reproductions irraisonnĂ©es de dolĂ©ances Ă©trangĂšres ». 2 Bibl. nat., Lb 39, n° 1086. 3 Sur les nombreux opuscules parus avant ou pendant la convocation dĂšs Etats gĂ©nĂ©raux, voir Ă  la BibliothĂšque nationale, sĂ©rie Lb 39, nos 493 Ă  908 annĂ©e 1788 ; 909-2750 annĂ©e 1789. J'y ai spĂ©cialement consultĂ© les n°s 607, 675, 676, 677, 678, 681, 682, 706, 755, 758, 788, 792, 1086, 1187, 1249, 1250, 1378, 1379, 1387. 4 PubliĂ© par Hippeau, ouv. citĂ©, etc., t. VI, p. 297-307. 5 Ioid., p. 307-316. 6 Ibid., p. 371-382. 7 Ibid., p. 382-402. 8 Ibid., p. 402-417. 262 INFLUENCE DES HOMMES DE LOI Venvoi des Lettres de convocation aux Etats gĂ©nĂ©raux 0>, et sur- tout La suite de l'Avis des bons Normands, dĂ©diĂ©e aux assem- blĂ©es des bailliages, sur la rĂ©daction des cahiers des pouvoirs et instructions W; Thouret recommandait aux Ă©lecteurs de sacrifier l'amas indigeste des dolĂ©ances locales futiles et intĂ©- ressĂ©es », Ă  la perspective de l'intĂ©rĂȘt universel », afin d'Ă©par- gner Ă  la future AssemblĂ©e nationale les embarras d'une docu- mentation trop touffue et trop confuse, oĂč son activitĂ© rĂ©forma- trice risquerait de s'enliser. RĂ©digĂ©s Ă  l'adresse des assemblĂ©es bailliagĂšres, ces mĂ©moires influĂšrent certainement sur la tenue des assemblĂ©es paroissiales ; ils dictĂšrent l'esprit et parfois la lettre de maints cahiers ruraux 3. A cette influence des Ă©crits, il convient d'ajouter celle des personnes. J'ai montrĂ© plus haut, en Ă©tudiant la composition des assemblĂ©es municipales Ă©lues dans les campagnes en 1787-1788, de quelle considĂ©ration y jouissaient les hommes de robe, magis- trats des diverses juridictions royales, avocats et notaires. J'ai relevĂ© une liste trĂšs longue de syndics municipaux Ă©lus parmi eux 4. N'est-il pas naturel qu'ils aient jouĂ© un rĂŽle prĂ©pondĂ©rant lors de la tenue des assemblĂ©es Ă©lectorales de 1789, qu'ils aient occupĂ©, dans leur paroisse, un des premiers rangs et parfois le premier, et que leur autoritĂ© se soit imposĂ©e en beaucoup d'en- droits sans rencontrer de rĂ©sistance ? L'examen des procĂšs- verbaux d'assemblĂ©es rurales confirme cette hypothĂšse 5. Dans de nombreuses localitĂ©s, les hommes de loi sont les comparants les plus en vue ; souvent mĂȘme ils prĂ©sident les sĂ©ances. Ils y 1 Bibl. nat., L b 39, 1249 ; publiĂ© par Hippeau, ouv. citĂ©, etc., t. VI, p. 265-285. 2 Ibid.% Lb 39, 1250; Hippeau, ouv. citĂ©, p. 285-297. — Thouret avait joint Ă  sa brochure un Essai d'un cahier de pouvoirs et instructions projetĂ© pour une des assemblĂ©es dans l'ordre du Tiers Ă©tat » le cahier de Thouret, qu'Hippeau n'a pas publiĂ© et que l'on trouve dans le Recueil des rapports et opinions de Thouret » Ă  la Bibl. comm. de Rouen, U 3047 a. Cf. Le Parquier, Les Cahiers du bailliage de Colentin, Revue d'EludĂ©s normandes, 1909, p. 401. 3 Les articles 2 Ă  8 du cahier de Dangy sont directement inspirĂ©s par le Projet d'un Cahier gĂ©nĂ©ral dĂ» au gentilhomme de Normandie ami de la nation ». Voir Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, p. 294, note, 1. On retrouve aussi, dans ce cahier, l'influence de Thouret, ainsi que dans ceux de Marigny et Tessy. Voir Le Parquier, Le Bailliage de Coulances en 17X9, Revue de Cherbourg et de la Basse-Normandie, 1905, p. 27. — Le long prĂ©ambule qui prĂ©cĂšde chacun des cahiers du groupe du Mesnil-Opac a dĂ» ĂȘtre empruntĂ© Ă  quelque factum de la rĂ©gion. Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, p. 147. 4 Voir ci-dessus, chap. V, p. 102-103. 5 Voir au chap. IX, p. 200 Ă  202 et notes y correspondant, l'Ă©numĂ©ration des gens de loi qui furent mĂȘlĂ©s aux assemblĂ©es primaires rurales, comme prĂ©sidents ou dĂ©putĂ©s EXEMPLES PRÉCIS DE CETTE INFLUENCE '263 sont les conseillers les plus Ă©coutĂ©s, les guides les plus influents ; ce sont eux qui suggĂšrent aux paysans les dolĂ©ances d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral, qui en prĂ©cisent la portĂ©e, qui en dĂ©terminent l'ordre, qui en rĂ©digent la formule. Le cahier est en grande partie leur Ɠuvre il est le reflet de leur culture juridico-politique W. Parfois, ils l'apportent tout fait, soit qu'ils en aient empruntĂ© la teneur au cahier de la ville voisine, prĂ©alablement rĂ©digĂ©, tels les robins de Vire aux assemblĂ©es de Clinchamps et de Courson W, soit qu'ils l'aient tirĂ© de leur propre cru. Le mĂȘme personnage a pu influer sur la rĂ©daction de plusieurs cahiers ruraux, parfois mĂȘme d'un grand nombre. Un notaire de Caumont, Aveline, envoyant Ă  Necker, le 7 fĂ©vrier 1789, son MĂ©moire relatif au Bocage, l'in- forme qu'il l'a Ă©crit dans l'esprit de son pays » et qu'il a un pouvoir signĂ© de 18 municipalitĂ©s de paroisses voisines pour les objets d'utilitĂ© publique qui peuvent les intĂ©resser W. N'est-il pas probable qu'Ă  la fin du mĂȘme mois le texte de ce mĂ©moire a circulĂ© dans les assemblĂ©es de ces paroisses et servi de modĂšle Ă  leurs revendications ? Il est arrivĂ© parfois qu'un mĂȘme homme, en sa qualitĂ© de juge, a prĂ©sidĂ© plusieurs assemblĂ©es. Heurtevent de la Haule guida, le 5 mars, les dĂ©libĂ©rations des habitants du Vicel et, le lendemain, celle des paroissiens de Valcanville, et nous avons la preuve qu'il abusa de sa situation dans la premiĂšre de ces paroisses, pour dicter et rĂ©diger lui-mĂȘme, contre le consentement de l'assemblĂ©e », un premier cahier de dolĂ©ances, annulĂ© trois jours plus tard par cette mĂȘme assemblĂ©e *. Housset de Janville, conseiller au bailliage de Caen, prĂ©sida, dans la semaine du 22 fĂ©vrier au 1er mars, cinq assemblĂ©es de paroisses 5. 1 Les exemples abondent dans le Cotentin. Le cahier de Bricqueville-la-Blouette a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par Lescaudey, substitut au bailliage de Contances ; celui de Montcha- ton a dĂ» ĂȘtre inspirĂ© par Desmarets de Montchaton. lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, prĂ©sident de l'assemblĂ©e paroissiale ; celui de Gavray est l'Ɠuvre probable de Gui- chard, avocat au Parlement. Le Tuilier, procureur du roi Ă  l'Ă©lection de Coutances, est le rĂ©dacteur prĂ©sumĂ© du cahier de Hambye ; Estur, avocat, celui du cahier com- mun de La Haye-Bellefond et Maupertuis. C'est au notaire Chauvel qu'est dĂ» vrai- semblablement le cahier de La Lande-d'Airou, et on attribue Ă  Lhermitte, conseiller au bailliage de Coutances, la paternitĂ© du cahier d'Ouville. Voir Le Parquier, Le Cahier du bailliage de Cotentin, Revue d'Etudes normandes, 1909, p. 328 et suivantes. 2 Voir F. Mourlot, La Convocation des Etats gĂ©nĂ©raux dans le bailliage de Vire La RĂ©vol. française, t. XXXI, p. 315. 3 Lettre d'Aveline Ă  Necker, 7 fĂ©vrier 1789, Arch. nat., Ba 27, 1. 15. Cl Voir Bridrey. oiw. citĂ©, t. IL p. 691 et 712. 5 Celles des paroisses de Troarn, Janville. Bavent, BerniĂšres et Courseulles. Il fut Ă©lu dĂ©putĂ© de Janville. Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre des procĂšs-verbaux des assemblĂ©es primaires du bailliage de Caen. 264 PRÉPONDÉRANCE DES QUESTIONS D'ORDRE GÉNÉRAL C'est Vincent Mariage, bailli de la haute justice de Bricquebec, qui semble tenir le record des prĂ©sidences d'assemblĂ©es Ă©lecto- rales. Son nom figure dans les procĂšs-verbaux de 15 communau- tĂ©s du bailliage de Valognes 0-\ Sans doute, il ne put imposer Ă  toutes sa façon de voir celle de Pierreville, notamment, opposa une vive rĂ©sistance Ă  ses procĂ©dĂ©s autoritaires et s'assembla, aprĂšs son dĂ©part, pour rĂ©diger de nouvelles dolĂ©ances 2. Mais le bailli prĂ©sident dut se faire mieux Ă©couter dans les autres paroisses, et l'air de parentĂ© que leurs cahiers prĂ©sentent atteste la part active que Mariage a prise Ă  leur confection. Ainsi, influence des modĂšles gĂ©nĂ©raux ou particuliers, qui offraient aux rĂ©dacteurs de cahiers primaires une matiĂšre dĂ©jĂ  Ă©laborĂ©e, et ingĂ©rence des hommes de loi dans la rĂ©daction de ces cahiers, voilĂ  deux raisons qui expliquent la place trĂšs large faite aux vƓux d'ordre gĂ©nĂ©ral dans les dolĂ©ances des campagnes. En examinant la masse des cahiers ruraux conservĂ©s par les quatre bailliages particuliers de Coutances, Valognes, Torigni et Vire, c'est-Ă -dire plus de trois cents cahiers, voici quelles consta- tations j'ai pu faire. 56 cahiers seulement formulent exclusive- ment des griefs locaux 3 ; parmi les 250 autres, 122 mĂȘlent Ă  leurs plaintes particuliĂšres des vƓux ayant trait Ă  des questions d'ordre gĂ©nĂ©ral 4; ; 128 ne font aucune place aux vƓux locaux, 1 Celles de Bricquebec. Baubigny, Breuville, Magneville, Les Perques, Pierre- ville, Quettetot, Le Rozel, SĂ©noville, Sotteville, Surlainville, Saint-Germain-le-Gail- lard, Saint-Martin-le-HĂ©bert, Saint-Paul des-Sablons, Le VretĂŽt. Voir Bridrey, ouĂŽ. citĂ©, t. II, p. 129, note 2. 2 Les dolĂ©ances [de la communautĂ©] ne furent ni Ă©coutĂ©es ni suivies par le dit sieur bailli ; il en dicta lui-mĂȘme, de son autoritĂ© particuliĂšre et prĂ©pondĂ©rante, sans permettre aucune observation... C'est pourquoi la dite communautĂ© s'est assem- blĂ©e de nouveau pour procĂ©der Ă  la juste rĂ©daction de ses dolĂ©ances... » Bridrey, ouv. citĂ©, t. II, p. 450. 3 Cahiers de La Baleine, La BesliĂšre, Bourey, BrĂ©hal, Bricqueville-sur-Mer, Champrepus, Herenguerville, Hugueville, La Lande-d'Àirou, Montaigu-les-Bois, Moncuit, Quettreville, Saint Denis-le-VĂȘtu, Saint-LĂ©ger, Saint Louet-sur-Sienne, Saint-Malo-de-la-Lande, Saint-Martin-le-Vieux, Tourville, en totalitĂ© ; Hycnville, Saint-Ursin, Trelly, en grande partie b. de Coutances. — Brix, Crasville, Denneville, Haineville, La Haie-d'Ectot, Montfarville, Nouainville, Omonville-la-Bogue, Pierreville, Sideville, Sortosville-en-Beaumont, Saint-Georges- de-la-RiviĂšre, Saint-LĂŽ-d'Ouville, Saint-Pierre-d'Allonne, en totalitĂ© ; Carteret, Fon- tenay-en-Cotentin, Notre-Dame-d'Allonne, Saint-Germain-de-Tournebut, en grande partie b. de Valognes. — BiĂ©ville, Clouai, Guilberville, La FerriĂšre-Hareng, La Vaquerie, Montaigu, Montbertrand, Sallen, Sept- Vents, Sainl-Ebremond-de-la-Barre, Saint-Pierre-du-Fresne, Saint-Pierre-de-Semilly b. de Torigni. — Aubusson, Sainte- Marie-des-Monts, Saint-Maur-des-Bois, Saint-Pierre-du-Troncbet b. de Vire. 4 Dans quelques-uns de ces cahiers, les deux catĂ©gories de dolĂ©ances, au lieu d'ĂȘtre exposĂ©es pĂȘle-mĂȘle, sont nettement sĂ©parĂ©es. Ex. Ă  Blainville, Carantilly vƓux d'ordre politique, administratif, judiciaire 265 ies assemblĂ©es ayant cru devoir mettre Ă  l'Ă©cart toutes les plaintes et dolĂ©ances personnelles qu'elles pourraient faire, pour ne s'occuper que des grands intĂ©rĂȘts nationaux » ]. Ces 250 ca- hiers passent en revue les importantes questions d'ordre politique et administratif qui prĂ©occupaient alors l'opinion publique Constitution 2, pĂ©riodicitĂ©, composition et attributions des Etats gĂ©nĂ©raux 3, dette nationale W, pensions 5, responsabilitĂ© minis- tĂ©rielle 6, Etats provinciaux et AssemblĂ©es provinciales ? ; ils traitent aussi, et avec une certaine complaisance, qu'explique la compĂ©tence spĂ©ciale de la plupart de leurs rĂ©dacteurs, des ques- tions d'ordre juridique '8^ ; ils dĂ©noncent les abus des tribunaux 9, b. de Coutances ; Quettetot, RĂ©ville, Le Rozel b. de Valognes ; Pierres, Roucamp b. dĂ© Vire. 1 Cahiers de Rures, Rrectouville, Lamberville, Rousseville, Saint-Georges-d*Elle, Saint-Jean-des-Raisants b. de Torigni. — Le cahier de La RloutiĂšre contient des remontrances, plaintes, dolĂ©ances et avis sur l'administration et les affaires gĂ©nĂ©- rales du royaume ». — Les habitants de Gratot, simples matelots et pauvres labou- reurs, n'ont que des idĂ©es gĂ©nĂ©rales, qu'ils croient justes. — Clitourp consacre son cahier aux vices et abus des lois dn gouvernement actuel de la France dans plu- sieurs de ses parties ». 2 Les vƓux multiples sur cet objet se ramĂšnent Ă  l'octroi, avant tout vote de subsides, d'une Constitution stable et appuyĂ©e sur des principes invariables ; ils contiennent en germe le serment du Jeu de Paume et la DĂ©claration des droits de l'homme. 3 La pĂ©riodicitĂ© est fixĂ©e en gĂ©nĂ©ral Ă  cinq ans; quelques cahiers allongent le dĂ©lai, dix ans Ă  La RloutiĂšre, douze ans Ă  Cauville, quinze ans Ă  firicqueville-la- Blouette, vingt ans Ă  Rlainville ; d'autres le rĂ©duisent Ă  trois ans Montaigu, Le Theil, Saint-Cyr. — Le vƓu relatif au doublement du tiers et au vote par tĂȘte est unanime. — On demande, pour les Etats gĂ©nĂ©raux, l'exercice du pouvoir lĂ©gislatif et, au premier rang, le vote de l'impĂŽt. 4 Les cahiers en demandent la fixation et l'acquittement au prix des sacrifices jugĂ©s nĂ©cessaires ; quelques-uns indiquent, pour combler le dĂ©ficit, la vente des biens du clergĂ© rĂ©gulier. 5 VƓu Ă  peu prĂšs unanime pour la rĂ©duction des pensions actuelles et pour la concession des pensions futures au mĂ©rite seul. 6 On demande qu'ils rendent leurs comptes, soit Ă  chaque tenue d'Etats gĂ©nĂ©- raux Anneville-en-CĂšres, Le Vretot, soit par la presse NĂ©greville. 7 Les vƓux relatifs Ă  l'administration provinciale demandes de suppression des intendants et des subdĂ©lĂ©guĂ©s, du maintien Ă©ventuel des AssemblĂ©es provinciales, et surtout du rĂ©tablissement des Etats provinciaux font l'objet d'un dĂ©veloppement spĂ©cial. Voir ci-dessous, chap. XI, p. 293-299. 8 Certains cahiers ressemblent Ă  de vĂ©ritables traitĂ©s sur la rĂ©forme judiciaire, tels ceux de Rricqueville-la-Rlouette, de La RloutiĂšre, de Montchaton, de Dangy. de Hambye, ceux du groupe de Mesnil-Opac, dans le bailliage de Coutances, et celui de Rricquebec, dans le bailliage de Valognes. La plupart des vƓux qu'ils expri- ment s'inspirent des projets de rĂ©forme judiciaire de mai 1788. Sur l'importance des vƓux d'ordre judiciaire dans les cahiers primaires du bailliage de Cotentin, voir Le Parquier, art. citĂ©, Revue d'Etudes normandes, 1909, p. 329-334. 9 Tels les privilĂšges judiciaires, comme les committimus et autres droits d'Ă©vo- cation au civil et au criminel. ?'' voeux d'ordre social et Ă©conomique la multiplicitĂ© des juridictions l, la vĂ©nalitĂ© des charges '2\ les formalitĂ©s tortueuses de la procĂ©dure 3; ; dans l'ordre social et Ă©conomique, ils abandonnent le point de vue Ă©troit des intĂ©rĂȘts de clocher pour s'Ă©lever Ă  une conception plus large des intĂ©rĂȘts rĂ©gionaux et nationaux suppression de tous les privilĂšges . Parmi toutes leurs dolĂ©an- 1 Cahier de Caen, 3." partie ReprĂ©sentations particuliĂšres el dolĂ©ances de lu ville de Caen, art. I Ă  27. 2 Cahier de Valognes, art. 27 et 20. 3 Cahier de Cherbourg, art. 58, 59 el Go. 4 Sur les cahiers des corporations de Bayeux, voir ci-dessus, chap. IX, p. 207, noie 1. 5 Vuhix des cafetiers et des tailleurs. 6 Cahier de Bayeux, au chapitre Commerce. 7 La formation du cahier de dolĂ©ances de la ville de Caen, et la sĂ©rie des opĂ©- rations qui aboutirent Ă  ce rĂ©sultat, ont donnĂ© lieu Ă  une Ă©lude spĂ©ciale et dĂ©taillĂ©e de ma part, et font l'objet de ma thĂšse complĂ©mentaire, intitulĂ©e Le Cahier de dolĂ©ances du Tiers Ă©tal de Caen en 17X9. 8 Cahiers des tanneurs, des serrurriers, des perruquiers, des cartiers-papetiers, des bouchers., des bonnetiers has-Ă©tamiers, des fabricants d'Ă©loffes de soie. 18 274 ADOPTION DE CERTAINS VOEUX CORPORATIFS A CAEN ces, un nombre restreint seulement a pu se glisser dans le texte du cahier de Gaen. Les rĂ©dacteurs ont fait place Ă  la requĂȘte des tanneurs sur la suppression de la marque des cuirs *, parce qu'elle Ă©tait appuyĂ©e par les selliers, Jes cordonniers, les libraires, les parfumeurs, les chaudronniers, parce que le corps des nĂ©go- ciants s'y intĂ©ressait et parce que les juges-consuls la rĂ©clamaient avec insistance. Pour des raisons analogues, ils admettent les vƓux des cartiers relatifs Ă  la suppression des droits sur le pa- pier *2, ceux des Ă©piciers, cuisiniers et brasseurs relatifs Ă  la sup- pression du trop-bu 3, et, d'une façon gĂ©nĂ©rale, tous ceux que la juridiction consulaire, qui comptait trois de ses membres au sein de la commission de rĂ©daction, avait pris sous son patronage. Ils empruntent h certains cahiers particuliers l'idĂ©e de rĂ©formes utiles Ă  la citĂ© a celui de l'amirautĂ©, le projet d'un canal entre l'Orne et la Sarthe, destinĂ© Ă  faire de Caen l'entrepĂŽt d'une vaste rĂ©gion agricole i} ; Ă  celui des vinaigriers, une sĂ©vĂšre critique du corps des ingĂ©nieurs, qui s'entĂȘtaient Ă  construire des ponts de bois dans un pays oĂč les carriĂšres abondaient, et qui, au lieu de faire aboutir le pont tournant du canal de l'Orne Ă  la rue des Garnies, pour l'embellissement de la ville, l'avaient maladroite- ment placĂ© en face du clocher d'une Ă©glise voisine $ ; Ă  celui des maçons, l'heureuse idĂ©e d'une Ă©cole gratuite de dessin, capable de former de bons ouvriers W. Le cahier urbain est loin de reflĂ©ter avec exactitude la pensĂ©e intime des corporations en ce qui concerne leur rĂ©gime ; alors que presque toutes en demandent l'amĂ©lioration par la suppression de l'Ă©dit fiscal de 1779 C'\ il suppose la prolongation de ce rĂ©gime, et se contente d'insĂ©rer deux vƓux relatifs Ă  l'hĂ©rĂ©ditĂ© des maĂźtrises pour les enfants des maĂźtres dĂ©cĂ©dĂ©s, et Ă  la survivance des droits de ceux-ci en faveur de leurs veuves S ; mais il omet les demandes de suppression des droits de marque et de visite, si impatiemment supportĂ©s par les artisans des divers mĂ©tiers 9. 1 Cahier de Cacn, 3 partie, art. 18. 2 Ibid., art. 19. Ibid., art. 18. I Ibid., art. 5. 5 Ibid., art. 4. 6 Ibid., art. 13. 7 Cahiers des passementiers, des fabricants d'Ă©toffes de soie, des tailleurs, des tapissiers, des merciers-drapiers, des Ă©piciers, des cordonniers, des chaudronniers, des chapeliers., des bonnetiers bas-Ă©tamiers, des boulangers, des bouchers. 8 Cahier de Caen, 3 partie, art. 7. 9 Cahiers des fabricants d'Ă©toffes de soie, des tailleurs-fripiers, des tapissiers, il» > serruriers, les selliers, des cartiers-papetiers, des maçons, des brasseurs de biĂšre. RARETÉ DES VOEUX D'ORDRE AGRICOLE 275 De mĂȘme que les vƓux relatifs Ă  l'industrie se rencontrent Ă  l'Ă©tat exceptionnel dans les cahiers ruraux, les vƓux d'ordre agricole n'apparaissent que rarement et sous une forme concise dans les cahiers urbains ; ils s'y trouvent sacrifiĂ©s Ă  d'autres intĂ©rĂȘts. Çà et lĂ , quelques plaintes sur les dommages que la milice cause Ă  l'agriculture l ; quelques considĂ©rations sur les avantages que celle-ci retirerait du libre enlĂšvement des engrais de mer 2i ; quel- ques demandes d'ateliers de charitĂ© 3, de partage de marais et communes À> ; tout cela briĂšvement exposĂ©, avec une rĂ©serve voisine de l'indiffĂ©rence. Si le cahier de Bayeux consacre d'assez longs dĂ©veloppements Ă  la demande d'abrogation de nombreuses redevances et servitudes fĂ©odales rj, celui de Caen, qui compte cent articles, n'a pas trouvĂ© de place pour les droits fĂ©odaux, alors que douze cahiers de corps et corporations en rĂ©clamaient l'abo- lition ou le rachat, en peignant avec vivacitĂ© les abus des banalitĂ©s de fours, moulins et pressoirs, et les dĂ©gĂąts des colombiers 6l Les droits fĂ©odaux, a-t-on Ă©crit, gĂȘnaient assez peu les habitants des villes pour qu'on ne crĂ»t pas utile d'adopter des articles en vue de leur disparition {7K On peut croire aussi que leur existence n'Ă©tait pas pour dĂ©plaire Ă  de riches roturiers, seigneurs de fiefs nobles, possesseurs de colombiers, de moulins et de pressoirs banaux. Ce qui est certain, c'est que les rĂ©dacteurs bourgeois du cahier de Caen restĂšrent sourds Ă  l'appel des artisans, qui leur signalaient les maux des paysans et qu'une foule de questions intĂ©ressant le rĂ©gime foncier furent systĂ©matiquement Ă©cartĂ©es. En somme, les cahiers urbains furent, en Basse-Normandie, l'expression des sentiments et des aspirations de l'Ă©lite du Tiers Ă©tat des villes, magistrats, nĂ©gociants, bourgeois, et exception- nellement des maĂźtres des corporations les plus importantes. Il ne paraĂźt pas que le prolĂ©tariat urbain compagnons des commu- nautĂ©s ou travailleurs libres y ait participĂ© ; ses dolĂ©ances, s'il en exprima, n'eurent aucun Ă©cho. 1 Cahiers de Vire ait. 13, de Granville art. 21, de Carentan art 2i 2 Cahiers de Vire art. 15, de Coutances art. 53. 3 Cahier de Vire art. 9. 4 Cahiers de Carentan art. 31, de Valognes art. 35. 5 Cahier de Bayeux, au chapitre Droits fĂ©odaux, neuf alinĂ©as 6 Cahiers des pharmaciens, des officiers du dĂ©pĂŽt des sels art. 5, 6, 12, des nĂ©gociants et armateurs art. 21 Ă  23, des couteliers art. 36 Ă  39, des chapeliers art. 14;, des vinaigriers art. 9. des marĂ©chaux art. 7, des parfumeurs art. 9, des Ă©piciers. 7 E. Champion, La France d'aprĂšs les Cahiers de 17S9, p. 95. 27b CAHIERS D ASSEMBLEES PRELIMINAIRES A COUTANCES Quand les dĂ©putĂ©s des paroisses urbaines et rurales eurent dĂ©posĂ© aux quinze siĂšges d'assemblĂ©es prĂ©liminaires du Tiers Ă©tat, rĂ©unies dans les deux ressorts judiciaires de Caen et de Coutances, les cahiers dont ils Ă©taient porteurs, ceux-ci furent soumis Ă  une opĂ©ration nouvelle. Chacune de ces assemblĂ©es prĂ©liminaires devait rĂ©diger un seul cahier ; ce travail fut confiĂ© Ă  des commis- sions restreintes, Ă©lues dans leur sein ; Ă  en juger d'aprĂšs les procĂšs-verbaux, les membres de ces commissions Ă©taient, en majoritĂ©, des citadins. Aussi ne doit-on pas s'Ă©tonner que, d'une façon gĂ©nĂ©rale, la prĂ©pondĂ©rance ait Ă©tĂ© assurĂ©e aux vƓux expri- mĂ©s par les villes. Pour six cahiers d'assemblĂ©es prĂ©liminaires du Cotentin, ceux d'Avranches, de CĂ©rences, de Mortain, de PĂ©ri ers, de wSaint- Sauveur-le-Vicomte et de Tinchebrai, on ne peut rien affirmer de certain ; en l'absence des cahiers de ces six villes, nulle compa- raison, nulle conclusion n'est permise. Mais pour les quatre autres assemblĂ©es prĂ©liminaires rĂ©unies dans le mĂȘme ressort, il est de toute Ă©vidence que le cahier de la ville chef-lieu a Ă©tĂ© pris pour base de la discussion et que son texte, peu sensiblement modifiĂ©, et augmentĂ© de quelques articles empruntĂ©s aux cahiers ruraux, est devenu la formule des revendications de l'assemblĂ©e. Le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat du ressort propre du bailliage de Coutances, qui comprend 60 articlesn, est, en trĂšs grande partie, formĂ© par les apports des deux villes principa- les du ressort Coutances et Granviller2\ BontĂ© reprĂ©sentait la pre- miĂšre et PerrĂ©e-Duhamel la seconde au sein de la commission ; un autre commissaire, l'avocat Havin, du Mesnil-Opac, dut inspirer le prĂ©ambule. Les commissaires firent, en outre, quelques em- prunts aux importants cahiers de Bricqueville-la-Blouette et de Montchaton , et, Ă©mus par la prĂ©cision poignante des dolĂ©ances de Villedieu sur la ruine de son industrie ouvriĂšre, donnĂšrent Ă  celles-ci une place particuliĂšre dans le cahier 4 . 'Il PubliĂ© par Bridrey, ouv. citĂ©, t. I, p. G61-67S. 2 Le caliicr le Coutances a inspirĂ©, en trĂšs grande partie, les articles 1, % 3, 4, relatifs Ă  la Constitution, aux impositions, Ă  l'administration et Ă  la justice. — Celui de Granville, les alinĂ©as 7 Ă  lu de l'article l,r, quelques vƓux judiciaires alinĂ©as l et 1S de l'article 4, et presque tout l'article G, relatif au commerce alinĂ©as 1 Ă  4. \ oir Bridrey, ouv. cilc. t. I, p. 664, note 2. 3 BricquevillĂš-la-Blouette parait avoir fourni les alinĂ©as 5 et 6 de l'art. 2 et l'ali- nĂ©a l!i de l'art. 4 Montchaton. le vomi relatif aux non-catholiques alinĂ©a 13 de l'art. 1. 4 L'alinĂ©a 5 de l'art. 4 rĂ©sume briĂšvement les vƓux de Villedieu relatifs aux droits sur les cuivres. Les vaux relatifs aux pailles des dĂźmes, aux colombiers et A VALOGNES, CARENTAN, SAINT-LÔ 277 A Valognes, sur douze commissaires rĂ©dacteurs, quatre habi- taient la ville l ; c'est Ă  leur influence qu'est due l'insertion de 38 articles du cahier urbain au cahier de l'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat du bailliage, qui n'en compte que 45 2. Les six derniers vƓux, d'un caractĂšre rural, rĂ©sument trop briĂšvement les plaintes des nombreuses communautĂ©s agricoles, dont les commissaires laboureurs purent obtenir l'adjonction \ La ville de Cherbourg avait formulĂ© des exigences inadmissibles, en prĂ©tendant imposer, par un mandat impĂ©ratif donnĂ© Ă  ses dĂ©putĂ©s, l'insertion intĂ©grale de ses dolĂ©ances particuliĂšres dans le cahier de l'assem- blĂ©e prĂ©liminaire du bailliage. La commission, dans laquelle ne figurait aucun habitant de Cherbourg, exclut systĂ©matiquement ces vƓux ; elle essaya de donner de mauvaises raisons de cet ostracisme rigoureux r, dont le vĂ©ritable motif Ă©tait la vieille jalousie qui divisait les deux villes. A Carentan, oĂč, sur les douze rĂ©dacteurs, il y avait quatre commissaires urbains, le cahier de la ville inspira plus ou moins directement la plupart des cinquante-six articles du cahier soumis Ă  l'acceptation de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire 5 ; celle-ci se contenta d'y ajouter quelques vƓux relatifs Ă  l'Ă©levage des che- vaux et des moutons, principale source de richesse de la contrĂ©e. A Saint-LĂŽ, la commission de rĂ©daction comprenait vingt membres ; elle se confondait avec la dĂ©putation du quart rĂ©duit. Sur ce nombre, il y avait douze hommes de loi, dont six habitants de Saint-LĂŽ, ceux-lĂ  mĂȘme qui avaient rĂ©digĂ© le projet de cahier sou- mis Ă  l'assemblĂ©e de la villef6. Le cahier urbain, qui Ă©tait leur Ɠuvre, banalitĂ©s diverses et Ă  la pĂšche du lançon, semblent inspirĂ©s par les cahiers de cer- taines paroisses rurales ou cĂŽtiereS, notamment Belval, Ouville et Hauteville-sur-Mer. 1 Besnard-Duchesne, Courtaux, Lambert et Baudoin. 2 Les articles 1 Ă  38 du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat du bail- liage de Valognes sont la reproduction textuelle du cahier de la ville ; le prĂ©ambule a Ă©tĂ© abrĂ©gĂ©, les articles 17 Ă  19 ont Ă©tĂ© un peu remaniĂ©s. Voir Bridrey, ouv. cilĂ©, t. Il, p. 757, note 1. 3 L'un de ces vƓux, relatif Ă  l'interdiction de brĂ»ler le varech sur les cĂŽtes art. 41, a trĂšs probablement Ă©tĂ© ajoutĂ© en sĂ©ance, sur la rĂ©clamation des paroisses maritimes. Voir Bridrey, Ibid., I. II, p. 777, note 1. 11 semble bien pie cette addition des vƓux ruraux soil comme une concession tardive arrachĂ©e aux rĂ©dacteurs, et il est utile de remarquer que la question des banalitĂ©s et des rentes seigneuriales, si sou veut abordĂ©e par les cahiers ruraux, n'a pas mĂȘme Ă©tĂ© effleurĂ©e par le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire. 4 Voir l'art. 45 du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire et la note de M. Bridrey y relative, ouv. citĂ©, t. IL p. 778, note 1. 5 Voir Bridrey, ouv. cilĂ©. I. I, p. 765, note 1. 6 Voir ci-dessus, p. -270. noie 2, et 271, note 4. Ces six commis-aires Ă©taient Le Menuet de la .luiianniĂšre, Vieillard lils, Lemonnier, Bernard, Vieillard de Buismartiu el Vieillard pĂšre. 278 cahiers d'assemblĂ©es prĂ©liminaires a vire et bayeux fut, grĂące Ă  leur influence, adoptĂ© en entier par l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage. Les commissaires ruraux se bornĂšrent trĂšs probablement Ă  demander l'intercalation de vƓux d'ordre agricole part des pauvres dans le partage des biens com- munaux, mesures contre la disette des bois, rachat des bana- litĂ©s et corvĂ©es, rĂ©forme de la jurisprudence des dĂźmes insolites 1. MĂȘmes constatations pour les cahiers des assemblĂ©es prĂ©limi- naires des bailliages du ressort de Caen, oĂč le contrĂŽle est pos- sible, c'est-Ă -dire pour Vire, Bayeux et Caen . Dans ce dernier article, on entassa pĂȘle-mĂȘle des dolĂ©ances d'un caractĂšre agri- cole, dont la plupart figuraient dĂ©jĂ  au cahier de Vire demandes relatives Ă  la libertĂ© d'usage des engrais de mer, Ă  la destruction des bĂȘtes fauves, Ă  une meilleure rĂ©partition des ateliers de cha- ritĂ©. Une seule, concernant l'obligation de la vente des pailles Ă  un prix modĂ©rĂ©, par les curĂ©s dĂ©cimateurs Ă  leurs paroissiens, apparaĂźt comme Ă©tant d'une origine exclusivement rurale W. A Bayeux, le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire fut l'Ɠuvre de vingt-huit commissaires, parmi lesquels figurent une douzaine au moins d'hommes de loi domiciliĂ©s dans cette ville 5. 11 s'ins- 1 Article 6, paragraphes 4 el > ; art. 8, paragraphe 1 ; art. 9, paragraphe 4 du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat. Il est impossible de dire, en l'ab- sence lu cahier original de la ville de Saint-LĂŽ, si ces vƓux d'ordre agricole ont Ă©tĂ© ajoutĂ©s sur la demande des habitants de dans l'assemblĂ©e du Tiers Ă©tat de la ville, du mars 1789. 2 Le cahier de la ville de Torigni n'a pas Ă©tĂ© retrouvĂ©. Hippeau a commis une grave erreur en publiant, parmi les paroisses du bailliage de Yalogne? ouv. citĂ©, t. V1I1, p. 502, un cahier de la paroisse de Torigni, qui n'est autre pic le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de ce nom, dĂ©jĂ  publiĂ© par le mĂȘme Ă©diteur au commencemenl du mĂȘme tome {Ibid., p. 82. 3 F. Mourlot, La Convocation des Etais gĂ©nĂ©raux dans le bailliage de Vire, La RĂ©volution française, 189G, t. 31, p. 318. I C'est la reproduction de l'art. 5 du cahier de Lamlelles et-Coupigny. Sur la question des pailles dans le Bocage normand, voir F. Mourlot, Ibid., p. 420-122. 5 L'avocat Tanqueray, Ă  qui l'on attribue la paternitĂ© du cahier de la ville de LE CAHIER DE l\\SSEMBLÉE PRELIMINAIRE DE CAEN 279 pire du cahier urbain en ce qui concerne l'ordre et les titres des chapitres successivement traitĂ©s. Dans chacun d'eux, il est vrai, la matiĂšre a Ă©tĂ© remaniĂ©e. Des dĂ©veloppements prolixes, oĂč les considĂ©rants s'Ă©talent avec trop de complaisance, ont Ă©tĂ© rame- nĂ©s Ă  de courts alinĂ©as, qui en ont condensĂ© la substance ; en sens contraire, des lacunes du cahier urbain ont Ă©tĂ© comblĂ©es par des apports Ă©trangers Ă  la ville, dont l'origine ne peut ĂȘtre Ă©tablie, vu la disparition presque totale des cahiers primaires du bailliage. Sur quelques points mĂȘme, on saisit une contradiction flagrante entre le vƓu de la ville et celui de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire par exemple, sur la question de l'existence d'une Commission inter- mĂ©diaire au sein des Etats gĂ©nĂ©raux et sur celle du maintien des privilĂšges de la Normandie CD. Toutefois, Ă  le considĂ©rer dans l'ensemble, le cahier de l'assemblĂ©e a recueilli, sous une forme plus brĂšve et plus chĂątiĂ©e, la plupart des dolĂ©ances bayeusaines et la contribution que les campagnes lui ont apportĂ©e paraĂźt presque insignifiante. Le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen fut arrĂȘtĂ©, le 11 mars 1789, par vingt-deux des vingt- quatre commissaires que l'assemblĂ©e du 6 mars avait Ă©lus ; six d'entre eux Ă©taient des dĂ©putĂ©s de Caen, trois autres, bien que dĂ©putĂ©s ruraux, Ă©taient des hommes de loi qui rĂ©sidaient dans cette ville {'2 '. LĂ  encore, l'influence urbaine prĂ©domina. Des 123 articles que contient ce cahier, 100 articles sont la reproduction Ă  peu prĂšs littĂ©rale du cahier de Caen. Tous deux comprennent trois parties dĂ©signĂ©es sous les mĂȘmes rubriques. La premiĂšre partie est consacrĂ©e aux Articles prĂ©liminaires Ă  arrĂȘter aux Etats gĂ©nĂ©raux » ; les 12 articles du cahier urbain se retrouvent dans celui de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage, avec deux articles nouveaux a. La seconde partie, intitulĂ©e Propositions gĂ©nĂ©rales Ă  faire aux Etats gĂ©nĂ©raux », comprend, dans le cahier issu de l'assemblĂ©e du 4 mars, 61 articles le cahier de l'assemblĂ©e Bayeux ; l'avocat Delauney, procureur-syndic du dĂ©partement ; LareherdelĂ  LondĂ«, maire de Bayeux ; Delleville, lieutenanl gĂ©nĂ©ral de l'amirautĂ©, Ă©taient parmi le> plus notables. 1 Les art. 9 et 21 du chap. I du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage renferment, sur ces deux questions, des vues entiĂšrement opposĂ©es Ă  celles qu'ex- prime le cahier urbain. 2 Les six commissaires de la ville de Caen Ă©taient ; Delarue, Delafosse-Çhatry l'aĂźnĂ©, de PrĂ©bois, Saffray, Chibourg et de Cussy parmi les commissaires dĂ©putĂ©s des paroisses rurales, Moisant, Daigremont et Signard d'OuffiĂšres rĂ©sidaient, Ă  Caen. 3 Sur les 14 articles de ce chapitre, ces additions forment les numĂ©ros 2 et 11. 280 ÉLIMINATION l RÉDUCTION DES VOEUX RURAUX des 12-14 mars les reproduit et y mĂȘle 33 articles nouveaux. Cet apport considĂ©rable, qui enfle le cahier jusqu'au chiffre de 94 ar- ticles, provient de deux sources 12 articles, qui, bien qu'em- pruntĂ©s aux dolĂ©ances particuliĂšres de Caen, ont pu ĂȘtre rangĂ©s parmi ceux qui traitaient de questions d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral lj ; 21 autres, relatifs Ă  des questions rurales, et fort probablement inspirĂ©s par les cahiers des assemblĂ©es paroissiales de la cam- pagne 2J ; il est impossible, en l'absence de textes, d'en prĂ©ci- ser l'origine. Quant Ă  la troisiĂšme partie, elle se compose, au cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire, des 15 articles des ReprĂ©sen- tations particuliĂšres de la ville de Caen», qui n'avaient pu trouver place dans la section prĂ©cĂ©dente, en raison du caractĂšre stricte- ment local de leurs vƓux. Exclusion, ou tout au moins condensation des vƓux ruraux au profit des dolĂ©ances urbaines, telle avait Ă©tĂ© la rĂšgle Ă  peu prĂšs gĂ©nĂ©ralement suivie par les commissaires rĂ©dacteurs. En plus d'un endroit, ceux-ci se crurent obligĂ©s de justifier un tel ostra- cisme. Si quelques articles particuliers n'ont pas Ă©tĂ© employĂ©s dans le cahier, les commissaires rĂ©dacteurs Ide Valognes] observent qu'en suivant les mouvements de leur conscience dans l'honorable commission qui leur a Ă©tĂ© confiĂ©e, et considĂ©- rant que le but de ces remontrances est de faire connaĂźtre au prince les maux communs qui nous affligent et les remĂšdes qu'il convient d'y apporter, ils n'ont pas cru devoir y com- prendre certaines demandes dĂ©terminĂ©es par un intĂ©rĂȘt parti- culier des premiĂšres assemblĂ©es de ce ressort et contredites par les autres, les objets controversĂ©s ou litigieux ne pouvant trouver place dans un ouvrage fait pour rĂ©unir les vƓux parti- culiers en un seul. Il en est de mĂȘme, pour quelques autres demandes, qui sont du ressort des Etats provinciaux ou des divers dĂ©partements » 3. Les commissaires de Coutances tinrent Ă  dĂ©clarer que leur tĂąche avait prĂ©sentĂ© un travail pĂ©nible et des difficultĂ©s frĂ©quentes, et que, malgrĂ© leur attention et leur 1 Ces douze vƓux, qui formaient les art. 16 Ă  Ti de [a troisiĂšme partie du cahier urbain, oui, Ă©tĂ© rangĂ©s Ă  la lin de la deuxiĂšme partie du cahier le l'assemblĂ©e prĂ©li- minaire art. 82 Ă  94. 2 Ce sonl les art. s. 17, 23, 32, 33, 34, 15. 16, 57, 58, 72, 73. 71. 75, 7,. Pour la plupart de ces trente-quatre Ă©lus, ce n'Ă©tait pas une fonction nouvelle, mais la prorogation, sur une nouvelle scĂšne, d'un mandat Ă  l'exercice duquel ils Ă©taient dĂ©jĂ  accoutumĂ©s. Tous venaient en effet, Ă  l'exception de deux !^, de jouer un rĂŽle actif dans la rĂ©daction du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire de leur bailliage, aprĂšs avoir participĂ© Ă  la confection du cahier de leur citĂ©. Fiers d'avoir pu assigner aux dolĂ©ances de celle-ci une place prĂ©pondĂ©rante dans les revendications du bailliage parti- culier, ils allaient tenter, en vue du triomphe dĂ©finitif de ces dolĂ©ances, le dernier assaut qui leur permĂźt de forcer l'entrĂ©e du cahier gĂ©nĂ©ral. Mis en prĂ©sence les uns des autres par la rĂ©union des commissaires qui les avaient apportĂ©s de leurs circonscrip- tions respectives, les cahiers des assemblĂ©es prĂ©liminaires devaient se trouver, non pas en conflit, car ils Ă©taient animĂ©s d'un mĂȘme souffle rĂ©formateur, mais en rivalitĂ© d'influences, t. 'Ă©lĂ©ment rural Ă©tant depuis longtemps Ă©liminĂ©, ce furent les villes qui, par l'in- termĂ©diaire de leurs plus notables reprĂ©sentants, se disputĂšrent l'honneur d'exprimer, sous leur formule derniĂšre, les aspirations et les volontĂ©s du Tiers Ă©tat. A Cou tances, Desplanques-Dumesnil fut, en raison de son Ăąge, le prĂ©sident de la commission; mais le plus actif des quinze commis- saires semble avoir Ă©tĂ© un avocat de Mortain, LeSacher de la Pal- liĂšre. 11 Ă©tait le plus en vue de ses collĂšgues, puisqu'il fut le premier Ă©lu comme dĂ©putĂ© du Tiers Ă©tat du bailliage 4. Il eut surtout l'habiletĂ© de faire adopter en bloc le cahier du bailliage de Mortain, dont il Ă©tait porteur. En effet, sur les 106 articles du cahier gĂ©nĂ©- ral du bailliage de Cotentin, le cahier du bailliage de Mortain en a inspirĂ© 53 littĂ©ralement et 12 en trĂšs grande partie, soit plus de la moitiĂ© r,. C'est Ă  la concision de sa teneur qu'il dut d'ĂȘtre prĂ©fĂ©rĂ© aux cahiers prolixes des autres bailliages particuliers. Ces der- niers ont cependant influĂ©, mais Ă  un moindre degrĂ©, sur la con- fection des dolĂ©ances gĂ©nĂ©rales, en contribuant Ă  la rĂ©daction de 1 Voir ci-dessus, chap. X, p. 234. 2 Ibid., p. 236. '' Duhamel, lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, pour le bailliage de Coutances, et LaĂźnĂ©-Deshayes, avocat; pour celui de Tin-chebrai, Ă©taient, ru qualitĂ© de commis- saires rĂ©dacteurs, deux hommes nouveaux. l l Voir ci-dessus, chap. X, p. 237. 5 Voir Appendice III. LEURS APPORTS RESPECTIFS PRÉPONDÉRANCE DE MORTAIN 285 39 articles relatifs Ă  des objets nĂ©gligĂ©s par le cahier du bailliage de Mortain. Celui-ci avait, dans un style lapidaire, traitĂ© les ques- tions qui concernaient la Constitution, l'organisation des Etats gĂ©nĂ©raux et provinciaux, l'Ă©galitĂ© des impĂŽts et charges publi- ques, la suppression et la rĂ©forme des impĂŽts vicieux et arbi- traires, l'administration de la justice, les matiĂšres ecclĂ©siastiques ». Les commissaires de CoĂ»tĂąmes, Duhamel et Le Tuilier, ont pu y ajouter 12 articles de leur cahier, qui touchaient aux objets suivants remĂšdes contre l'abus des pensions et suppression des charges inutiles ; libertĂ© des Ă©lections municipales ; lĂ©gislation des biens des non-catholiques ; rĂ©duction des droits de sceau et de greffe ; obligation de rĂ©sidence imposĂ©e aux bĂ©nĂ©ficiers ; rĂ©gle- mentation gĂ©nĂ©rale des dĂźmes ; augmentation des portions congrues des curĂ©s ; suppression des maĂźtrises d'arts et mĂ©tiers ; rĂ©vocation des privilĂšges de Bayonne en matiĂšre d'entrĂ©e des morues et huĂźtres de pĂȘches Ă©trangĂšres ; suppression des droits sur le poisson ; modĂ©ration des droits sur les cuivres bruts ; libertĂ© de l'usage des engrais de mer fl!. Ces additions reprĂ©sentent la part de Cou tances, de Gran ville, de Villedieu et de quelques paroisses cĂŽtiĂšres dans la formation du cahier gĂ©nĂ©ral. Des- planques-Dumesnil et Caillemer, commissaires de Carentan, firent adopter quatre articles de leur cahier, relatifs Ă  la suppres- sion de la mainmorte, Ă  l'unitĂ© des poids et mesures, au partage des landes, marais et biens communaux, Ă  la suppression des colombiers et garennes '-'. Lemenuet de la JuganniĂšre et Vieillard, commissaires de Saint-LĂŽ, purent introduire les vƓux de leur bailliage qui concernaient l'aliĂ©nation des domaines, Ă  l'exception des forĂȘts, la suppression des abbayes en commande, des corvĂ©es et des banalitĂ©s, la rĂ©vision du traitĂ© de commerce avec l'Angle- terre et P abrogation de l'arrĂȘt du Conseil de 1784 sur le commerce des colonies !. Pouret-Koquerie et Euvremer, commissaires de PĂ©riers,, demandĂšrent un rĂšglement qui autorisĂąt le prĂȘt Ă  intĂ©rĂȘt et obtinrent l'insertion de ce vƓu l. Les commissaires d'Avran- ches, TesniĂšre deBrĂ©mesnil et Morin, se bornĂšrent Ă  faire ajouter Ă  l'article de la gabelle la demande d'une indemnitĂ© pour les pays de quart-bouillon, dans le cas d'abolition de cet impĂŽt ^ ; ils 1 Articles 17, 38, 4o. ru, 81, 85, 87 cm partie, 89, 92, 93, 91. 98 lu cahier gĂ©nĂ©ral. 2 Cahier gĂ©nĂ©ral du Tiers Ă©tat du bailliage de Coutances. ail. 77, 90, 97 el 99. 3J Ibid., art. 41,82, 91. 4 Ibid., art. 96. 5 Ibid., art. 51. 28 LE CAHIER Dl BAILLIAGE ni COUTANCES VUE D'ENSEMBLE joignirent aussi leurs efforts Ă  ceux de leurs collĂšgues de Valognes pour faire insĂ©rer la rĂ©clamation d'un dĂ©putĂ© par district lors des prochaines Ă©lections aux Etats gĂ©nĂ©raux *. LeliĂšvre de la ProvĂŽtiĂšre et LaĂźnĂ©-Deshayes, dĂ©lĂ©guĂ©s du bailliage de Tinchebrai, suggĂ©rĂšrent Ă  l'assemblĂ©e la rĂ©daction d'un vƓu contre le cĂ©rĂ©- monial humiliant imposĂ© jusque lĂ  au Tiers Ă©tat Ă  l'occasion delĂ  prĂ©sentation du cahier et de la harangue faite au roi, et celle d'un autre vƓu sur la nĂ©cessitĂ© d'une rupture complĂšte avec la chan- cellerie romaine en matiĂšre de dispenses, grĂąces et provisions. Ils introduisirent, en mĂȘme temps, une rĂ©clamation d'ordre moins gĂ©nĂ©ral, mais d'un intĂ©rĂȘt tout aussi considĂ©rable pour les paysans de Basse-Normandie, en demandant que l'entretien et la rĂ©pa- ration des chemins vicinaux fussent dĂ©sonnais Ă  la charge des paroisses lK Ce furent Ango et Glatigny, au nom du bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte, qui dotĂšrent le cahier gĂ©nĂ©ral de son dernier article, en prĂ©conisant l'adoption de mesures favo- rables au dĂ©veloppement des Ă©coles de charitĂ© 3. AprĂšs trois jours et demi de laborieuses sĂ©ances, les commis- saires s'Ă©tant mis d'accord sur le texte du cahier, le soumirent Ă  l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, qui le discuta trĂšs sĂ©rieusement, article par article, et consacra trois jours pleins et quatre sĂ©ances entiĂšres Ă  son examen. C'est un document des plus importants, par la variĂ©tĂ© des objets qu'il embrasse, l'ordonnance logique des ma- tiĂšres et la substantielle concision de sa teneur. Bien que ses 106 articles n'aient point Ă©tĂ© affectĂ©s d'une numĂ©rotation spĂ©ciale, on peut le diviser en sept parties distinctes, ce qui permet d'en saisir d'un coup d'Ɠil tout le contenu. I. DolĂ©ances relatives Ă  la Constitution, aux Etats gĂ©nĂ©raux, Ă  l'administration des provinces et des villes article 1 Ă  38. IL Ă  des questions d'ordre social disci- pline militaire, non catholiques, Ă©ga- litĂ© civique article 39 Ă  44. III. — aux impositions article 44 Ă  54. IV. — Ă  la justice article 55 Ă  72. V. — aux libertĂ©s privĂ©es et publiques ar- ticle 73 Ă  77. 1 Cahier gĂ©nĂ©ral, ait. S fin. 2 Ibid., art. 5, 7S et lui. 3 Ibid., art. 106. COMMISSAIRES RÉDACTEURS DU CAHIER GENERAL, A CAEN 287 VI. DolĂ©ances relatives aux affaires ecclĂ©siastiques article 78 Ă  88. VIL Ă  des objets divers vƓux d'ordre Ă©co- nomique agriculture, industrie, com- merce ou d'ordre moral rĂ©forme des mƓurs et Ă©ducation publique, ar- ticle 89 Ă  106. Dans le bailliage de Cotentin, le cahier gĂ©nĂ©ral du Tiers Ă©tat nous apparaĂźt comme le fruit d'une entente raisonnable et de concessions rĂ©ciproques entre les mandataires des divers ressorts Ă©lectoraux. Nul incident fĂącheux ne se produisit au cours des opĂ©rations, s'il faut en croire le procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e, et nulle protestation ne les suivit. Il n'en fut pas de mĂȘme dans le bailliage de Caen, oĂč d'assez vives discussions Ă©clatĂšrent entre les dĂ©putĂ©s Ă  l'occasion de la rĂ©daction du cahier gĂ©nĂ©ral. Cette rĂ©daction avait Ă©tĂ© confiĂ©e Ă  quinze commissaires, Ă©lus, Ă  raison de cinq par bailliage secondaire, dans une assemblĂ©e tenue le 17 mars, Ă  l'Ă©glise Saint-Etienne, sous la prĂ©sidence de DuperrĂ© de Lisle, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage. Ceux-ci y tra- vaillĂšrent du 17 au 21, jour oĂč l'on commença, en prĂ©sence de tous les dĂ©putĂ©s, la lecture du projet de cahier dĂ©finitif. Il fut, semble-t-il, arrĂȘtĂ© et signĂ© » sĂ©ance tenante l. Quelques jours plus tard, il devenait l'objet d'assez vives attaques. Le procĂšs- verbal officiel n'y fait qu'une trĂšs discrĂšte allusion ; on y trouve, Ă  la date du 21 mars, la mention suivante, d'une obscure briĂšvetĂ© aprĂšs diffĂ©rents changements faits au dit cahier » 2 ; il signale aussi, le 26 mars, plusieurs dĂ©clarations et protestations de divers membres contre le cahier gĂ©nĂ©ral » ainsi que l'intervention conciliante de Delauney, rĂ©cemment Ă©lu dĂ©putĂ© du bailliage. D'autres documents, qui complĂštent ces renseignements par trop 1 Le procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du 21 mars, dans laquelle fut arrĂȘtĂ© le cahier gĂ©nĂ©ral, est suivi de 233 signatures. Arch. nat., C 17, 38, et Arcb. greffe de la Cour d'appel de Caen, Reg. n° 2. 2 Ces changements furent soit des additions au texte proposĂ©, art. 15, 19, 23, 28, 41, 48, 55, soit l'intercalation d'un article nouveau, art. 61, et assez rarement des remaniements profonds du texte primitif, art. 20, 61 et 62. A la fin du cahier furent ajoutĂ©s deux vƓux, sur l'opposition de l'assemblĂ©e Ă  toute crĂ©ation de commission intermĂ©diaire au sein des Etats gĂ©nĂ©raux, et sur la suppression de tous les tribunaux d'exception. — Un dĂ©putĂ© du Tiers Ă©tat caennais, Gouy le jeune, crut devoir accompa- gner sa signature d'une rĂ©serve au sujet du mutisme observĂ© par le cahier Ă  l'Ă©gard de l'anĂ©antissement des fabriques ». 288 PROTESTATIONS LE CANU ET LAURENT sommaires, rĂ©vĂšlent la trace de divergences profondes au sein de l'assemblĂ©e ce son! les Observations de Le Garni et Laurent, formulĂ©es Ă  la sĂ©ance du 23 mars, et la protestation de Michel LeTellier, qui se produisit Ă  celle du 26 mars. Ces deux documents figurent comme piĂšces annexes au procĂšs-verbal. Le Canu, mĂ©decin, professeur Ă  l'UniversitĂ© de Caen, avait prĂ©sentĂ©, le 1er mars 1789, des RĂ©flexions relatives aux cahiers de dolĂ©ances arrĂȘtĂ©s par MM. les Maire et Echevins de la ville de Caen cl lus dans rassemblĂ©e du 28 fĂ©vrier 1k Ce mĂ©moire Ă©tait divisĂ© en six chapitres. L'auteur y approuvait les vƓux urbains relatifs a la levĂ©e d'un double impĂŽt, rĂ©el et personnel, Ă  la crĂ©ation de juges de paix, Ă  la mise Ă  la charge des propriĂ©taires des chemins ruraux ; mais il y protestait contre le vƓu relatif Ă  la suppression des cinq grosses fermes, le considĂ©rant comme prĂ©ma- turĂ©, dangereux et gros de consĂ©quences funestes. L'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Caen ayant Ă©cartĂ© sa protestation, Le Canu la renouvela dans l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du bailliage prin- cipal, oĂč il assistait comme dĂ©putĂ© de Caen ; un avocat caennais, Laurent, dĂ©putĂ© de la paroisse de Cheux, s'associa Ă  ses vues et leurs Observations furent lues dans la sĂ©ance du 23 mars 2. Tout en convenant qu'il existait des abus innombrables dans toutes les parties de l'administration », Le Canu et Laurent dĂ©claraient qu'il serait mal avisĂ© et dangereux de tenter, sur le champ, une rĂ©forme gĂ©nĂ©rale». Ils prĂ©sentaient un projet de cahier en douze articles bornĂ©s aux principes de la Constitution et aux moyens de vĂ©rifier et d'acquitter la dette nationale ». AllĂ©guant que le bien doit se faire lentement, qu'on doit se garder de le prĂ©cipiter, que le temps n'avait pas permis Ă  l'assemblĂ©e de mĂ»rir ses idĂ©es, et qu'il Ă©tait impossible, en quinze jours, de dresser un plan gĂ©nĂ©ral de lĂ©gislation, ils invitaient le Tiers Ă©tat du bailliage de Caen Ă  Ă©carter de son cahier tout ce qui ne touchait pas au grand objet de la Constitution, le seul qu'il fĂ»t urgent de fixer, et Ă  ajourner Ă  une seconde session d'Etats gĂ©nĂ©raux, demandĂ©e pour 1791, le soin de remanie- plus profondĂ©ment l'Ă©tat politique lj L'original manuscrit de ces RĂ©flexions esl conservĂ© aux Arch. connu., Caen, ancien carton 20. {2 Arch. du greffe delĂ  Cour d'appel de Caen, Registre. Ces Observations ont Ă©tĂ© publiĂ©es par Hippeau, aiw. citĂ©, l. Y] II. p. 160-17i. Il n'est pas question de cette lecture dans le procĂšs verbal de rassemblĂ©e Ă  la date du 23 mars, mais le mĂ©moire de Le Canu et Laurent contient, en souscription; l'indication suivante, qui est for- melle- Lu et, dĂ©posĂ© m rassemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du Tiers Ă©tat des cinq bailliages rĂ©u- nis, etc.. par les soussignĂ©s, ce 23 mars 1789. » PROTESTATION LE TELLIER 289 et administratif du pays. Ils traitaient de mesure inopportune et malfaisante, non seulement l'abolition des cinq grosses fermes, mais celle de la vĂ©nalitĂ© des charges et ils dĂ©savouaient formelle- ment l'article du cahier relatif au vote par tĂȘte dans le sein de la fui ure assemblĂ©e nationale, cette forme nouvelle Ă©tant absolu- ment contraire aux anciennes lois ». L'assemblĂ©e prit acte de ces observations et ordonna leur annexion Ă  la suite de son procĂšs- verbal, mais elie n'en tint aucun compte. Une autre protestation, qui eut des consĂ©quences plus sĂ©rieuses, fut dĂ©posĂ©e, le 26 mars, sur le bureau de l'assemblĂ©e par Le Tellier, avocat de Bayeux, un des soixante-quatorze dĂ©putĂ©s ruraux du quart rĂ©duit envoyĂ© par le bailliage de Bayeux l]l Le Tellier demandait Ă  ses collĂšgues de rĂ©viser l'Ɠuvre des commissaires. Il reprochait Ă  ceux-ci d'avoir nĂ©gligĂ© une foule de particula- ritĂ©s » et rĂ©clamait la suppression de certains articles qu'il croyait propres Ă  semer la division entre les ordres. En tĂȘte de ceux-lĂ , il plaçait l'article 6 du cahier, qui, conformĂ©ment au vƓu le plus gĂ©nĂ©ral », sollicitait le vote par tĂȘte. Imbu des mĂȘmes craintes que Le Canu et Laurent, Le Tellier pensait qu'un tel mode de dĂ©libĂ©- ration, avantageux aux administrations provinciales, offrirait les plus grands dangers aux Etats gĂ©nĂ©raux. Il eĂ»t voulu qu'on le proscrivĂźt comme contraire Ă  la Constitution nationale, dont la forme antique de dĂ©libĂ©rer par ordre garantissait la libertĂ© de toute atteinte du pouvoir arbitraire, de l'obsession et de la subor- dination ». Le Tellier conjurait aussi l'assemblĂ©e d'approfondir la question dĂ©licate de l'impĂŽt avant de prendre une rĂ©solution radicale Ă  son endroit. Il combattait le vƓu relatif Ă  l'aliĂ©nation des grands domaines et dĂ©fendait Ă  nouveau la motion qu'il avait probablement fait triompher Ă  l'assemblĂ©e prĂ©liminaire de Bayeux en faveur de leur conservation et de l'amĂ©lioration de leur rĂ©gie. Enfin, il s'Ă©levait contre la rĂ©daction du dernier paragraphe, par lequel on dĂ©clarait approuver tacitement les cinq cahiers particuliers, quoique plusieurs positions d'entre eux ayant rĂ©voltĂ© l'assemblĂ©e Ă  la simple lecture ». Delauney, de Bayeux, le premier Ă©lu des six dĂ©putĂ©s du bailliage aux Etats gĂ©nĂ©raux, et l'un des commissaires rĂ©dacteurs les plus influents, dĂ©fendit habilement son Ɠuvre et celle de ses collĂšgues. Il rendit hommage Ă  leur zĂšle, montra les difficultĂ©s de leur tĂąche, la nĂ©cessitĂ© oĂč ils 1 Le Tellier Ă©lait dĂ©putĂ© de l'assemblĂ©e primaire de Saint-Laurent- sur-Mer. Sa protestation es! conservĂ©e aux Arch. du greffe de la Cour d'appel de Caen, Registre 2, el aux Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie B, non inventoriĂ©e. 19 290 DÉFENSE Dl CAHIER PAU DELAUNEY s'Ă©taient trouvĂ©s, aprĂšs avoir tout mĂ»rement pesĂ©, d'Ă©laguer l'ac- cessoire pour ne formuler que le vƓu gĂ©nĂ©rale . Il invita l'assemblĂ©e Ă  accepter le cahier tel quel, en lui adjoignant les cinq cahiers des bailliages particuliers, et il lui donna l'assurance que les dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat porteraient Ă©galement » aux Etats gĂ©nĂ©raux les sages rĂ©flexions des villes comme les dolĂ©ances des campagnes vexĂ©es et sensibles ». Ses explications furent acceptĂ©es par une grande partie de l'assemblĂ©e, formĂ©e de dĂ©putĂ©s de la campagne, pressĂ©s de retourner Ă  leurs travaux. Mais de nombreux mĂ©con- tents, refusant d'approuver le cahier, s'Ă©taient inscrits Ă  la suite de In protestation de Le Tellier. Celle-ci ne compte pas moins de quatre-vingt-neuf signataires, parmi lesquels figurent cinquante dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen, et dix du bailliage de Vire. Deux des commissaires virois, Brenet et Flaust, ce dernier Ă©lu dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux, dĂ©clarent n'avoir signĂ© le cahier gĂ©nĂ©ral, quoique rĂ©dacteurs, que par respect pour l'assemblĂ©e et sans approuver le dit cahier ». Louis Lamy, commissaire de Caen, et Pain, commissaire de Torigni, tous deux aussi dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux, adhĂ©rĂšrent Ă  leur tour aux protestations dirigĂ©es contre ce cahier dont ils avaient reçu mission de dĂ©fendre les vƓux Ă  l'AssemblĂ©e nationale. Une telle constatation ne manque pas de piquant 2. Le cahier gĂ©nĂ©ral du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen contient 90 articles, rĂ©partis en huit chapitres ainsi intitulĂ©s I. Constitution article 1 Ă  27 ; IL Subsides et perception article 28 Ă  33 ; III. Domaines article 34 Ă  39 ; IV. Droits fĂ©odaux et polices de chasse article 40 Ă  45 ; V. Commerce article 46 Ă  56 ; VI. Affaires bĂ©nĂ©ficiais article 57 Ă  70 ; VIL Justice article 71 Ă  84 ; VIII. Ouvrages publics article 85 Ă  89. 1 Chaque classe, disait Delauney, a ses intĂ©rĂȘts particuliers... Les municipali- tĂ©s Mit Ă©tĂ© exigeantes, les villes ne l'ont pas moins Ă©tĂ© et de lĂ  ces Ă©normes suppres- sions demandĂ©es et dont l'imagination s'effraie. Ce qui a paru fort simple dans un village et successivement grossi du vomi d'une demi-douzaine de villes et de huit cents paroisses, a, Ă  la derniĂšre analyse, offert un rĂ©sultat dont les commissaires eux-mĂȘmes ont Ă©tĂ© mĂŽriifiĂ©s d'ĂȘtre obligĂ©s de dĂ©velopper toute l'Ă©tendue. » 2 Le procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du 21 mars 1789, portait 233 signatures ; la pro- testation de Le Tellier se couvrit, dĂšs le 23 mars, de 89 signature*; le procĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du 26 mars contient 109 signatures. APPORTS DES DIVERS BAILLIAGES AU CAHIER GÉNÉRAL 291 Ce cahier est le produit de la fusion des cinq cahiers des assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages de Caen, Bayeux, Falaise, Torigni et Vire 1;. Au premier coup d'Ɠil, il est Ă©vident que ceux- ci n'ont pas Ă©galement influĂ© sur sa composition. C'est au cahier de Bayeux que la disposition des matiĂšres et la plupart des titres eux-mĂȘmes semblent avoir Ă©tĂ© empruntĂ©s. Des formules littĂ©rale- ment extraites des cahiers de Caen et de Bayeux alternent en groupes sensiblement Ă©gaux dans les chapitres relatifs Ă  la Consti- tution, aux subsides, Ă  la justice. Le cahier de Caen a prĂȘtĂ© davan- tage au chapitre des droits fĂ©odaux -' ; le cahier de Bayeux, Ă  celui des ouvrages publics ft. En matiĂšre commerciale et ecclĂ©- siastique, Caen est presque seul porte-parole ''.. L'influence des rĂ©dacteurs caennais et bayeusains, trĂšs visiblement, a Ă©tĂ© prĂ©pon- dĂ©rante au sein de la commission. Ceux des autres bailliages, moins audacieux ou moins heureux, ont marquĂ© moins fortement leur empreinte. Les commissaires virois ont pu cependant faire adopter les dolĂ©ances de leur cahier sur la libertĂ© des Ă©lections aux Etats gĂ©nĂ©raux, la suppression des dĂ©ports et de la vĂ©nalitĂ© des charges, la gratuitĂ© de la justice, l'aliĂ©nation des domaines r> . C'est Ă  l'instigation de Falaise que le cahier gĂ©nĂ©ral condamne les abus de la caisse de Poissy, demande la suppression des droits de roulage et de messageries et l'Ă©tablissement d'une tutelle vraiment protectrice pour les pauvres des campagnes G>. Torigni ne fournit guĂšre en propre, au mĂȘme cahier, qu'un vƓu sur la gratuitĂ© des dispenses ecclĂ©siastiques ~, et se contente d'insinuer discrĂštement, çà et lĂ , quelques tournures plus heureuses dans la rĂ©daction d'un bailliage voisin. Un examen plus dĂ©taillĂ© du cahier, article par article, amĂšne aux conclusions suivantes. Le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Caen a donnĂ© 38 articles et contribuĂ© Ă  la rĂ©daction de 6 autres il a donc inspirĂ© Ă  peu prĂšs la moitiĂ© du cahier gĂ©nĂ©ral. Le cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire de Bayeux a fait adopter 19 articles et influĂ© sur la formation de 10 autres ; il entre donc pour un tiers environ dans la confection de l'ensemble. Reste un sixiĂšme d'influence Ă  rĂ©par- l Voir Appendice III. ‱> 4 articles sur 6 art. 40, 41, 44 et 45. 3 3 articles sur 5 art. 85, 80, 87. 4 9 articles sur 11 en matiĂšre commerciale art. 40 Ă  53 et art. T>0 8 articles sur 14 en matiĂšre ecclĂ©siastique art. 58, 03 Ă  OS, et 70. 5 Art. 4, 0, 24, 25, 35, 57, 00 et 71. 0 Art. 54, 55, 09 et 83. 7 Art. 59. 292 MISE \l POINT DE LEURS VOEUX tir entre les autres cahiers d'assemblĂ©es prĂ©liminaires, et qu'il faudrait attribuer, dans un ordre dĂ©croissant, Ă  Vire, Falaise et Torigni. De telles conclusions, dans leur rigueur mathĂ©matique, ne rendraient pas un compte exact de l'influence rĂ©ellement exercĂ©e par chaque bailliage. Tous les vƓux, en effet, n'ont pas mĂȘme importance, et la contribution d'un bailliage, pour n'ĂȘtre pas trĂšs Ă©tendue, peut avoir Ă©tĂ© riche de consĂ©quences h. 11 est aussi arrivĂ© souvent que, sans ĂȘtre directement manifeste, l'in- fluence d'un cahier particulier ne s'en est pas moins exercĂ©e sur le cahier gĂ©nĂ©ral. Tel vƓu ne peut point ĂȘtre considĂ©rĂ© Ă  priori comme Ă©liminĂ© parce qu'on ne le retrouve pas au cahier dĂ©finitif avec une physionomie rigoureusement semblable Ă  celle qu'il avait dans le cahier originel. Si la lettre s'est Ă©vanouie, l'esprit demeure. ObligĂ©s, par la briĂšvetĂ© du temps » et par l'exiguĂŻtĂ© du cadre dont ils disposaient, Ă  faire Ɠuvre Ă  la fois prompte et concise, les commissaires rĂ©dacteurs du bailliage principal de Caen ont tentĂ© la mise au point loyale des diverses opinions en prĂ©sence. Pour 70 articles environ sur les 90 articles du cahier gĂ©nĂ©ral, ils ont adoptĂ© intĂ©gralement, en l'empruntant aux divers cahiers particuliers, la formule qu'ils jugeaient la plus heureuse et la plus adĂ©quate Ă  la pensĂ©e gĂ©nĂ©rale. Les autres articles sont le rĂ©sultat d'un patient travail de marqueterie, qui a consistĂ© Ă  dĂ©tacher des divers cahiers particuliers, non plus le texte entier de leurs vƓux, mais leurs fragments les plus expres- sifs pour les fondre en une formule gĂ©nĂ©rale qui demeurĂąt l'inter- prĂšte des aspirations communes. Ce cahier contenait d'ailleurs, dans son dernier alinĂ©a, sa propre justification &. Les dĂ©putĂ©s Ă©taient invitĂ©s Ă  complĂ©ter ses indications gĂ©nĂ©rales par les indi- cations plus prĂ©cises et plus dĂ©taillĂ©es renfermĂ©es clans les cinq cahiers des bailliages particuliers, sur tous les points qui ne lui seraient pas contraires ». Il apparaissait ainsi comme une construc- tion lĂ©gĂšre, aux voĂ»tes Ă©lancĂ©es, aux frĂȘles colonnes, mais flan- quĂ©e d'arc-boutants qui en assuraient la soliditĂ© sans en masquer l'Ă©lĂ©gante simplicitĂ©. \u premier rang des objets que le pouvoir central avait spĂ©cia- lement signalĂ©s Ă  l'attention des populations consultĂ©es, figurait la question de la rĂ©forme administrative du royaume. Necker, 1 Telle a Ă©tĂ©, par exemple, la contribution du cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Vire, en raison de l'importance Ă©conomique et sociale des vƓux qu'il a suggĂ©rĂ©s. 2 Article 90. VOEUX RELATIFS A L'ADMINISTRATION PROVINCIALE 293 on l'a vu plus haut1, avait prescrit aux sujets des trois ordres de donner Ă  leurs dĂ©putĂ©s une mission particuliĂšre pour dresser un plan de formation des Etats provinciaux ». Ce plan devait ĂȘtre discutĂ© et dĂ©battu entre les dĂ©putĂ©s intĂ©ressĂ©s, avant l'ouverture de l'AssemblĂ©e nationale. La Normandie, et en particulier la Basse-Normandie, ne resta pas sourde aux demandes du ministre. La question l'intĂ©ressait au plus haut point, et elle avait dĂ©jĂ  fait l'objet d'une ardente campagne 2. Aussi assigne-t-elle une assez large place, parmi ses revendications si diverses, Ă  celles qui concernent la future orga- nisation administrative de la province. Des 306 cahiers primaires que j'ai consultĂ©s pour les deux res- sorts judiciaires de Caen et de Coutances, 127 n'expriment aucun avis sur la forme d'administration prĂ©fĂ©rĂ©e par leurs auteurs c'est un peu plus du tiers. Les deux autres tiers prennent assez nettement position, soit en faveur du maintien du rĂ©gime créé par l'Ă©dit de 1787, c'est-Ă -dire des AssemblĂ©es provinciales, soit en faveur du rĂ©tablissement des Etats provinciaux. En gĂ©nĂ©ral, il n'est guĂšre fait mention des anciens administra- teurs, intendants et subdĂ©lĂ©guĂ©s. L'institution est depuis long- temps impopulaire ; toutefois le discrĂ©dit oĂč elle est tombĂ©e n'a plus sa source dans la crainte, mais dans le mĂ©pris. La rĂ©forme de 1787 a dessaisi et dĂ©sarmĂ© les intendants ; elle les a blessĂ©s Ă  mort, et c'est au milieu de l'indiffĂ©rence publique qu'ils vont disparaĂźtre. Presque tous les cahiers sont muets Ă  leur Ă©gard. Quelques-uns rappellent leurs anciens mĂ©faits, les dangers de leur pouvoir d'autrefois, comme La Llaye-Bellefond 3 et Saint- Waast-la-Hougue 4, mais c'est leur inutilitĂ© bien plutĂŽt que leur malfaisance qui se trouve mise en cause. On leur reproche d'ĂȘtre en surnombre et de faire double emploi {y>. Je n'ai trouvĂ© qu'un exemple de cahier supposant que leur existence sera prolongĂ©e 1 Voir ci-dessus, chap. VIII, p. 168-169. 2 Ibid., chap. VIII, La Campagne en faveur des Etals provinciaux, p. 155-169. 3 Le despotisme des commissaires dĂ©partis, auxquels l'administration de la gĂ©nĂ©ralitĂ© a Ă©tĂ© confiĂ©e ci-devant, les dĂ©sordres l Celui de Carentan les annihile sans les mentionner, en demandant le transfert Ă  d'autres pouvoirs de leurs derniĂšres attributions en matiĂšre de contentieux financier et de tutelle administra- tive 4. Mortain, par le mĂȘme procĂ©dĂ© indirect, Ă©teint leur com- pĂ©tence judiciaire ; Coutances 5', PĂ©ri ers 6 et Bayeux 7 envi- sagent formellement leur suppression comme une simplification des rouages administratifs et comme une mesure d'Ă©conomie. Les deux cahiers gĂ©nĂ©raux des bailliages de Caen et de Coutances enfin, usent de la mĂȘme discrĂ©tion et les exĂ©cutent par prĂ©te- ntion 8. Les AssemblĂ©es provinciales comptent encore des partisans en Basse-Normandie. Dans une trentaine de cahiers primaires envi- ron, on voit demander leur continuation ». Les uns dĂ©sirent leur fl Le cahier de La BloutiĂšre, dans son art. 6, mentionne l'intervention future des subdĂ©lĂ©guĂ©s de l'intendant » dans les opĂ©rations du tirage de la milice. Bri- drey, Ibid., t. 1, p. 177. 2 Voir C. Bloch, La RĂ©volution française, t. LVI, 1909, p. 557. Les tonneliers de Caen, les perruquiers et les selliers de Bayeux ont toutefois demandĂ© la suppression des intendants, de leurs secrĂ©taires et subdĂ©lĂ©guĂ©s. 3 Art. 11 Interdire aux commissaires dĂ©partis, s'ils subsistent, la compĂ©tence des matiĂšres contentieuses de finances, et rĂ©duire leurs appointements. » 4 Art. 16 et 29. 5 Art. 1, paragraphe 8. Au prĂ©cieux avantage de rĂ©gĂ©nĂ©rer les provinces, les Etats particuliers joindront celui de faciliter la suppression des bureaux des inten- dants. » 6 Au chapitre des Etats provinciaux Inutile d'observer rpie chaque province, soumise Ă  son rĂ©gime particulier, n'aura plus besoin des ministres qui, sous le nom d'intendants ou commissaires dĂ©partis, entraĂźnent des dĂ©penses que la nouvelle constitution rendra superflues. >i . 1 Cahier de l'assemblĂ©e prĂ©liminaire du bailliage de Saint-Sauveur-le-Yicomte, chap. VĂ©nalitĂ©. 2 Voir ci dessus, chapr. VIII, La Campagne en faveur des Etats provinciaux. 3 Cahiers des assemblĂ©es prĂ©liminaires de Baveux art. 13. el, de Caienlan art. 6. 1 Exemples parmi les cahiers paroissiaux, Gantelou, Villedieu et quatorze paroisses bocagĂšres du bailliage de Vire parmi les cahiers d'assemblĂ©es prĂ©limi- ‱MAINTIEN DES ASSEMBLÉES MUNICIPALES 297 forme des futurs Etats ; aucun d'eux ne songe au rĂ©tablissement de la forme ancienne et dĂ©suĂšte des Etats du moyen-Ăąge ou du XVIIe siĂšcle. Pour exprimer leurs exigences nouvelles, ils em- ploient une formule, qui, sous ses variantes lĂ©gĂšres, enferme un mĂȘme dĂ©sir. Les uns demandent le retour des Etats particuliers de Normandie dans la proportion adoptĂ©e au RĂ©sultat du Conseil » li, ou encore, dans la forme et proportion qui vient d'ĂȘtre adoptĂ©e pour les Etats gĂ©nĂ©raux » '-. Les autres, plus nom- breux, rĂ©clament la restaura lion de ces mĂȘmes Etats dans la forme du DauphinĂ© », Ă  l'instar du DauphinĂ© » 3. Pour tous, cela signifiĂ© doublement du Tiers Ă©tat et vote par tĂȘte au sein des Etats provinciaux. Un trĂšs petit nombre de cahiers s'attardent Ă  l'Ă©tude dĂ©taillĂ©e de la future organisation administrative, comme celui de La Haye-Bellefond liK Quelques-uns prĂ©voient l'existence d'une Commission intermĂ©diaire provinciale unique ; d'autres pro- posent le maintien des trois Commissions intermĂ©diaires dĂ©jĂ  Ă©tablies au chef-lieu de chacune des rois gĂ©nĂ©ralitĂ©s normandes. Les assemblĂ©es de dĂ©partement, qui ont tenu deux sessions, en 1787 et en 1788, et qui, composĂ©es d'hommes intĂ©ressĂ©s Ă  la prospĂ©ritĂ© du pays, ont pu faire apprĂ©cier leurs services, trouvent grĂące devant l'opinion ; plus d\\n projet les encadre, dans l'Ă©bau- che du nouveau rĂ©gime administratif l5, entre les Etats provin- ciaux et les assemblĂ©es municipales /i, dont les bienfaits sont naires de bailliages, Carentan, Torigny, Vire. Toutefois, quelques paroisses du Cotentin hĂ©sitent entre Caeu et Lisieux Gonneville, Varouville, Le Mesnil-au-Val. Bretteville se prononce catĂ©goriquement en faveur de Lisieux. 1 Cahier d'Acqueville. 2 Cahiers de Picauville, Montagu-la-Brisette, ClĂŻtourps, Tonneville, Vasteville. 3 Quinze cahiers paroissiaux dans le bailliage de Valognes ceux de Fervaches, Saint-Romphaire. Mesnil-Rault, Troisgots, au bailliage de Coutances ; de CarvillĂ©, au bailliage de Vire de Bures et de La FerriĂšre-au-Doyen, au bailliage de Torigni. I Sur le plan trĂšs dĂ©taillĂ© de rĂ©organisation des AssemblĂ©es provinciales, tel qu'il est exposĂ© au cahier de La Haye-Bellefond, voir Bridrey, ouo. citĂ©. t. I, p. 356- 358, et la note 1 de la page 356. 5 Cahiers de Montchaton, Chantelou, Tessy, Danvou, Gouvets, Herqueville. Le cahier d'IIerqueville caractĂ©rise ainsi leurs membres Ces messieurs, dit-il, n'Ă©- tant ni de la classe des ingĂ©nieurs, ni de celle des adjudicataires, mais tous du lieu, distinguĂ©s par leurs mĂ©rites, n'ayant d'autres motifs que l'amour de la justice el le bien de la pairie. » Bridrey, ouv. citĂ©, t. Il, p. 344. G Cahiers de BĂ©aucoudray, Caillebot-la-Salle, Chantelou, Le Chefresne, Gratot, Hudimesnil, Mesnil-Garnier. Mesnil-Villeman, Montchaton. Montabot, Montcuit, Nicorps, Saint-Louet-sur-Sienne, Sourdeval-les-Bois, Tessy b. de Coutances; de Breuville, Galteville, Gouberville, Rau ville, Saint-Christophe-du-Foc, Saint-Ger- main-le-Gaillard, Saint-Martin-le-Gaillard b de Valognes; de Gouvets, de Mantilly ?.S ASPIRATIONS PROPRES A CHACUN DES TROIS ORDRES vantĂ©s en maints cahiers, et dont le maintien et l'affermisse- ment » sont gĂ©nĂ©ralement demandĂ©s. Les vƓux de la Basse-Normandie offraient, en somme, aux dĂ©libĂ©rations de la future AssemblĂ©e nationale un plan d'admi- nistration provinciale assez nettement ordonnĂ©. Les cahiers gĂ©nĂ©raux des trois ordres, dans les deux bailliages de Caen et de Coutances, exprimaient clairement les sentiments et les aspi- rations propres Ă  chacun de ces ordres. Ce que rĂ©clamait avant tout la noblesse, c'Ă©tait le retour de son antique constitution, dans la province restaurĂ©e par la confirmation solennelle de ses privilĂšges, sous l'empire de la charte normande, intĂ©gralement exĂ©cutĂ©e lK Les deux cahiers du clergĂ©, oĂč la prĂ©pondĂ©rance des curĂ©s avait introduit un esprit moins exclusif, demandaient aussi le retour des Etats de Normandie, mais avec une organisation perfectionnĂ©e », et dans la forme des Etats gĂ©nĂ©raux » 2\ Mais les vƓux du clergĂ©, pas plus que ceux de la noblesse, ne dĂ©pas- saient l'horizon normand. Le Tiers Ă©tat vit plus loin et de plus haut. A Caen, il sollicita le rĂ©tablissement des Etats provin- ciaux dans les provinces qui en avaient et leur Ă©tablissement dans celles qui n'en avaient pas » {^K Plus sobrement, mais avec autant de nettetĂ©, il demanda Ă  Coutances, que l'ensemble de la Consti- tution nationale fĂ»t complĂ©tĂ© par l'Ă©tablissement d'Etats pro- vinciaux dans toutes les provinces du royaume » f4\ Ce sentiment de fraternelle gĂ©nĂ©rositĂ©, tout Ă  l'honneur du Tiers Ă©tat normand, et qui le guidait au-delĂ  de sa frontiĂšre provinciale pour le hausser Ă  la conception de la Nation française, corrigeait ce qu'il y avait eu d'Ă©troit et d'Ă©goĂŻste dans les revendications antĂ©rieures de la Normandie en faveur de ses Etats particuliers. Au lieu d'un entĂȘtement irraisonnĂ© Ă  la poursuite de chimĂšres mortes, il annonçait une sagesse politique d'heureux augure. Tout en expri- mant leurs prĂ©fĂ©rences pour leurs Etats, suspendus et non anĂ©an- b. rie Vire. Le cahier d'Hudimesnil s'exprime ainsi Rien ne paraĂźt plus juste el plus avantageux pour le peuple que l'institution des assemblĂ©es municipales, Ă  cause du bon ordre qui nous y parait Ă©tabli ». Bridrey, ouv cilĂ©, t. 1. p. 378. 1 Cahier de la noblesse du bailliage de Coutances, art. 18 Ă  20 de Caen, Contrat art. 10, 18. 19;, Magistrature art. 3, Bien public art. 5 et 22. 2 Cahier du clergĂ© du bailliage de Coutances, LĂ©gislation, art. 3; de Caen, cha- pitre Constitution particuliĂšre de la Normandie. Le clergĂ© de Caen dĂ©sirait que toutes les classes de son ordre, et notamment celle des curĂ©s, fussent davantage intĂ©ressĂ©s Ă  la formation de ces Etats. M Cahier gĂ©nĂ©ral du Tiers Ă©tal du bailliage de Caen, art. 7. 1 ahier gĂ©nĂ©ral du Tiers Ă©tal du bailliage de Coutances, alinĂ©a -27. HAUTEUR DES VUES DU TIERS ETAT 299 tis, sur lesquels ils avaient soin de rĂ©server tous leurs droits, les citoyens du Tiers Ă©tat de Basse-Normandie laissaient Ă  leurs mandataires la libertĂ© de se concerter avec les autres dĂ©putĂ©s de la France sur les moyens de s'assortir au rĂ©gime d'adminis- tration gĂ©nĂ©rale qui serait jugĂ© par l'AssemblĂ©e Nationale comme plus convenable au bien commun de tout le royaume » tl. Ils consentaient Ă  lier les intĂ©rĂȘts de la province Ă  ceux du reste du royaume », afin de faciliter la rĂ©gĂ©nĂ©ration gĂ©nĂ©rale par l'uni- formitĂ© de principes et de gouvernement ». En un mot, ils don- naient leur consentement anticipĂ© Ă  la fusion de l'individualitĂ© normande dans la Nation française. L'unitĂ© nationale de la France Ă©tait en germe dans les cahiers du Tiers Ă©tat de Basse-Normandie. il Cotte heureuse formule, ainsi que celles qui suivent, Ă©tait due Ă  la plume des commissaires de Saint-LĂŽ, dont l'un. Vieillard fils, fillait reprĂ©senter, comme dĂ©putĂ© du Tiers Ă©tat, le bailliage de Cotentin aux Etats gĂ©nĂ©raux. 300 PAROLES D'ESPÉRANCE CHAPITRE XII les troubles publics et l'anarchie administrative mars-juillet 1789 RĂŽle jouĂ© par les dĂ©putĂ©s des trois ordres des bailliages de GaBĂŻi et de Goutances au dĂ©but de la session des Etals gĂ©nĂ©raux*. AdhĂ©sions pro- gressives du clergĂ©, puis de la noblesse aux vues du Tiers Ă©tat. Enthousiasme causĂ© en Basse-Normandie par la rĂ©union des ordres et la prise de la Bastille. Les adresses des villes. La fermentation gĂ©nĂ©rale ses causes Ă©conomiques et sociales. La disette des grains les Ă©meutes de Saint-LĂŽ, Caen, Cherbourg. Les retards dans la perception des impositions rĂ©sistances et rĂ©voltes dans les villes, Ă  Caen, Cherbourg, Vire. SoulĂšvement des campagnes contre les droits fĂ©odaux destruction des colombiers el chartriers ; actes de renonciation des seigneurs. La Grande Peur en Basse-Normandie Ă  Vire, Carentan, Cherbourg, Caen, Torigni, Bayeux. Arrestation du duc de Coigny et de Delleville. ConsĂ©quences de la Grande Peur. Impuissance de la Commission intermĂ©diaire provinciale et de l'inten- dant, accrue par leur antagonisme. Conflit relatif Ă  la prestation de la corvĂ©e. Tentative d'indĂ©pendance des pouvoirs locaux. ImpopularitĂ© et dĂ©couragement des subdĂ©lĂ©guĂ©s. DĂ©part de l'intendant anarchie administrative. Annulation, Ă  la veille du 4 aoĂ»t 1789, par les nobles du Cotent in et du bailliage de Caen. des mandats impĂ©ratifs donnĂ©s Ă  leurs dĂ©putĂ©s. — Organisation spontanĂ©e des pouvoirs rĂ©volution- naires nouveaux pour la dĂ©fense de l'ordre public. Le 1er avril 1789, dans la sĂ©ance de clĂŽture de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des trois ordres du bailliage de Cotentin, le lieutenant gĂ©nĂ©ral, Desmarets de Montchaton, fĂ©licitait les nouveaux Ă©lus en ces termes C'est Ă  vous qui par la rĂ©union des qualitĂ©s les plus estimables et les plus prĂ©cieuses avez si justement mĂ©ritĂ© Mes suffrages de vos concitoyens, c'est Ă  vous de remplir leur attente et de consommer le grand Ɠuvre de la fĂ©licitĂ© nationale. Puissent tous les membres qui composeront avec vous l'Assem- blĂ©e y porter comme vous un zĂšle ardent pour le bien public et l'esprit de paix et de conciliation » 0. L'avant-veille, Ă  Caen, 1 AbbĂ© Pigeon, Le grand bailliage de MoHain en 1789. MĂ©moires de In SociĂ©tĂ© -aca- dĂ©mique du Cotentin} t. III, p. 532. ‱‱ ATTITUDE DES DÉPUTÉS DES TROIS ORDRES AUX ETATS GÉNÉRAUX 301 le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, DuperrĂ© de Lisle, avait adressĂ© les mĂȘmes Ă©loges aux dĂ©putĂ©s des trois ordres du bailliage princi- pal de Caen, et avait exprimĂ© les mĂȘmes espĂ©rances {X. Tous deux se faisaient illusion. Sans doute tous les dĂ©putĂ©s bas-normands avaient reçu de leurs commettants des instructions communes sur plus d'un point. Ils avaient reçu le pouvoir gĂ©nĂ©ral de proposer, rĂ©montrer, aviser et consentir tout ce qui concer- nait les besoins de l'Etat, la prospĂ©ritĂ© du royaume et le bonheur, tant commun que particulier, de tous les citoyens ». On leur prescrivait, avant tout vote de subsides, l'Ă©tablissement d'une Constitution, et tout spĂ©cialement la restauration des Etats provinciaux de Normandie. Mais sur d'autres objets essentiels il y avait entre les mandats respectifs dont ils Ă©taient porteurs des divergences trop profondes pour que l'accord fĂ»t possible dĂšs le dĂ©but. La question du vote par ordre ou par tĂȘte, que le gouvernement n'avait pas tranchĂ©e, allait surtout les mettre en opposition. La reprĂ©sentation des deux bailliages de Caen et de Coutances fut, comme celle des autres bailliages du royaume, divisĂ©e en deux groupes. Les quatorze dĂ©putĂ©s du Tiers Ă©tat rĂ©pondirent le 12 juin 1789 Ă  l'appel des dĂ©putations fait au sein de l'assemblĂ©e des communes et y remirent leurs pouvoirs W ; on les voit figurer dans la sĂ©ance du 20 juin et prĂȘter le serment du Jeu de Paume l3Ăź. Des sept dĂ©putĂ©s du clergĂ©, trois seulement firent partie de la majoritĂ© qui consentit Ă  la vĂ©rification des pouvoirs' en commun le 22 juin, et qui fit le 24 juin son entrĂ©e dans l'AssemblĂ©e nationale ce furent Talaru de Chalmazel, Ă©vĂȘque de Coutances, Lefrançois, curĂ© de MutrĂ©cy, et LĂ©vĂȘque, curĂ© de Tracy ; les quatre autres ne s'y ralliĂšrent que le 27 juin, aprĂšs les injonctions du roi *. Les sept dĂ©putĂ©s de la noblesse appartinrent Ă  la pluralitĂ© » des gentilshommes qui s'entĂȘtĂšrent Ă  rĂ©clamer la distinction des ordres et ne cĂ©dĂšrent qu'aux ordres royaux. DĂšs le 1er juin, Achard de Bonvouloir avait protestĂ© au nom de la noblesse du Cotentin contre le doublement du Tiers et l'atteinte illĂ©gale portĂ©e aux droits des deux premiers ordres. ] Journal de la Basse-Normandie, n° 14, 5 avril 1789. 2' ProcĂšs-verbal des sĂ©ancesde l'AssemblĂ©e nationale.. Arcli. nat., AD xvm 1, p. 11-15. 3 A. Brette, Le Serinent du Jeu de Paume, p. 9, 11 et 12. Ango, dĂ©putĂ© de Saint- Sanveur-le Vicomte, absent lors de cette sĂ©ance, signa le 23 juin. i ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e nationale. Arch. nat., AD xvm 1, p. 12-16. Lefrançois, atteint de sciatique. donna le 12 octobre sa dĂ©mission, acceptĂ©e le 22. Arch. nat., B'1' 40. Voir A. Brette, Les Constituants, chap. III 3, p. 280. 302 LÀ FUSION DKS ORDRES Quelques jours plus tard, un des dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen, le baron de Wimpfen, fit preuve d'une attitude moins intransi- geante. Le 19 juin, la chambre de la noblesse, effrayĂ©e par les hardiesses du Tiers qui, l'avant-veille, venait de se dĂ©clarer AssemblĂ©e nationale, avait rĂ©digĂ© une adresse au Roi pour pro- tester contre l'esprit d'innovation » qui menaçait la Constitution; invoquant les vrais principes, lois et usages de la monarchie »; elle s'Ă©levait contre les prĂ©tentions du Tiers qui voulait s'attri- buer les droits rĂ©unis du Roi et des trois ordres ». Pour faire Ă©chec Ă  cette adresse, votĂ©e par la majoritĂ©, le baron de Wimpfen en proposa une autre Ă  la minoritĂ©. Cette protestation signĂ©e de quarante-trois membres dĂ©plorait l'inanitĂ© des efforts faits pour dĂ©terminer la chambre de la noblesse Ă  se renfermer dans l'ex- pression de ses sentiments pour le Roi, et Ă  Ă©carter de ce discours tout ce qui pouvait rappeler l'idĂ©e d'une funeste division entre les ordres, prĂ©senter sur l'Ă©galitĂ© des impĂŽts des principes inad- missibles, et indiquer une dĂ©nonciation des dĂ©marches de l'un des ordres » f1'. Le 25 juin la plupart de ces signataires s'agrĂ©geaient au Tiers Ă©tat. Wimpfen ne fut pas de ce nombre. Il Ă©tait liĂ© comme ses collĂšgues de Basse-Normandie par son mandat impĂ©ratif, et le 27 juin, Ă  son entrĂ©e dans la salle des sĂ©ances, il dĂ©posa comme eux, sur le bureau de l'AssemblĂ©e, un acte de rĂ©serve et de pro- testation ?. A cette date, la fusion des trois ordres Ă©tait consom- mĂ©e. Lorsque l'intendant de Caen, Cordier de Launay, reçut le 8 juillet des ministres Barentin et Villedeuil la DĂ©claration royale du 23 juin, celle-ci Ă©tait dĂ©jĂ  lettre morte et la volontĂ© du roi Ă©tait frappĂ©e d'impuissance »3. Un mois plus tard, Villedeuil et Barentin envoyaient Ă  l'intendant le rĂ©cit de la sĂ©ance du 15 juillet et un nouveau discours du roi, de ton tout diffĂ©rent. Louis XVI, comme chef de la nation » venait tĂ©moigner sa confiance aux reprĂ©sentants de la nation », et implorer leur assistance pour 1 MĂ©moires, de Bailly, t. 1, p. 451. — Causes inconnues de la RĂ©volution, par Robert, t. I, p. 313. Cf. Pezet, Bayeux Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle, p. 110-111. 2 Les dĂ©putĂ©s nobles de la Basse- Normandie, rĂ©fractaires Ă  la fusion des ordres, devaient adhĂ©rer, Ă  la lin de juillet 1789, sur l'invitation de leurs commettants, aux dĂ©libĂ©rations antĂ©rieures de l'AssemblĂ©e nationale et prendre ensuite une part effec- tive Ă  ses travaux. Voir ci-dessous, chap. XII, p. 331. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6317. A Granville, Quinette de Cloisel, homme ardent et trĂšs dĂ©mocrate », va le 14 juillet a la principale porte de la ville arracher le compte-rendu imprimĂ© de la sĂ©ance royale du 23 juin, affichĂ© par le subdĂ©lĂ©guĂ© Couraye sur les ordres de l'intendant. Ibid., C 6354. Cf. Arch. nat., D xxix, 8. l'enthousiasme a la prise de la bastille 303 assurer le salut de l'Etat lK Du 23 juin au 15 juillet, le pouvoir royal avait franchi une grande Ă©tape dans la voie de sa dĂ©chĂ©ance. Le 14 juillet la Bastille Ă©tait tombĂ©e. La chute de cette forte- resse, qui symbolisait le despotisme de l'ancien RĂ©gime, causa une profonde impression de joie dans la Basse Normandie. La ville de Bayeux, prĂ©venue par un de ses dĂ©putĂ©s, le baron de Wimpfen, envoya, le 23 juillet, deux adresses enthousiastes Ă  l'AssemblĂ©e nationale et Ă  l'hĂŽtel de ville de Paris '2/. Elle fĂ©licitait la premiĂšre de ses lumiĂšres et de ses vertus patriotiques, des arrĂȘts que la sagesse et l'honneur dictaient Ă  cette rĂ©union de hĂ©ros citoyens, et qui Ă©taient de sĂ»rs garants Ă  la libertĂ© fran- çaise ». Elle remerciait les chefs de la municipalitĂ© parisienne, pĂšres et libĂ©rateurs de la France, qui, au prix des plus grands pĂ©rils, avaient scellĂ© de leur sang la libertĂ© du pays ». A Caen, des jeunes gens dĂ©barquent le 18 juillet par la diligence. Ils se disent dĂ©putĂ©s de Rouen et portent au chapeau la cocarde natio- nale. Ils la font arborer Ă  la jeunesse caennaise ; on va l'offrir ensuite aux Ă©chevins, au comte de Faudoas qui est trĂšs populaire, au duc d'Harcourt. Officiers et soldats du rĂ©giment d'Aunis s'en parent Ă  leur tour ; une procession de gens dĂ©corĂ©s parcourt la ville musique en tĂȘte \ La cocarde devient un passe-port obli- gatoire, sans lequel on est insultĂ© dans la rue *'. A Cherbourg, mĂȘme fermentation. Le 21 juillet, les officiers municipaux, auxquels se joignent Dumouriez, marĂ©chal de camp, comman- dant du Roi, le vicomte de la BretonniĂšre, brigadier, commandant en chef de la marine, et Deshayes, commissaire gĂ©nĂ©ral des ports et arsenaux, se rĂ©unissent Ă  l'hĂŽtel de ville pour dĂ©libĂ©rer sur les moyens de rendre plus Ă©clatante et plus authentique la joie que vient de verser dans tous les cƓurs l'heureuse nouvelle du jour ». Une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des citoyens, tenue le 21 juillet dans l'Ă©glise Notre-Dame, dĂ©cide qu'une grand'messe sera cĂ©lĂ©- brĂ©e le lendemain, qu'un Te Deum sera chantĂ© le soir, qu'un feu de joie et des illuminations suivront. Une dĂ©puta tion est envoyĂ©e Ă  l'hĂŽtel du gouvernement, oĂč rĂ©side le duc de Beuvron ; elle lui 1 Arch. dĂ©p.. Calvados, C 6317. 2 Arch. comm., Bayeux. Registre de dĂ©libĂ©rations D i 13, et Arch. nat., C 88, 3 La musique du rĂ©giment de Bourbon a accompagnĂ© le peuple par compagnie malgrĂ© les officiers du rĂ©giment. » Dufour, MĂ©moires et remarques, t. I, p. 31. 4 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen. 1. 1. p. 7. — Cf. Arch. comm., Caen, carton 56. Lettre de Levallois, commis de l'intendance, Ă  Levallois, entrepreneur Ă  Cherbourg, 20 juillet 1789. , '! LES ADRESSES DES VILLES apporte La cocarde nationale rouge et bleue telle que le roi l'a reçue de AI. Bailly, prĂ©vĂŽt des marchands, lors de son entrĂ©e Ă  Paris ». Le duc l'arbore Ă  son chapeau, ton les les personnes de sa suite l'imitent ; l'aprĂšs-midi on la voit aux coiffures de tous les militaires et de tons les bourgeois 'l >. A Granville, sur l'initiative de la Chambre littĂ©raire, des rĂ©jouissances publiques turent organisĂ©es. Les Ă©difices publics furent illuminĂ©s, une garde d'honneur fut placĂ©e Ă  la porte de PerrĂ©e Duhamel, dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux ; on distribua du froment et du riz aux pauvres. Deux adresses de remercĂźments furent envoyĂ©es, l'une Ă  l'Assem- blĂ©e nationale et l'autre Ă  la municipalitĂ© de Paris. Si nous avions tremblĂ© pour nos pĂšres adoptifs, disait la premiĂšre, si nous avons frĂ©mi en apprenant que les enfants de la patrie Ă©taient massacrĂ©s par des cohortes Ă©trangĂšres, si nous versons des pleurs sur nos o frĂšres de Paris qui ont cimentĂ© de leur sang la libertĂ©, leurs mĂąnes s'indignent de nos larmes. L'Ă©tendard de la victoire u flotte sur les ruines du gouffre du despotisme ». — Vous avez sauvĂ© le royaume de l'anarchie », Ă©crivait-on aux Parisiens 2. Ces manifestations Ă©taient absolument spontanĂ©es ; nul mot d'ordre officiel n'avait prĂ©sidĂ© Ă  leur organisation, tĂ©moin cette lettre du subdĂ©lĂ©guĂ© de Granville Ă  l'intendant! Je n'ai jamais vu une plus belle joie, on cĂ©lĂ©bra la paix et la libertĂ©. Vous me direz sans doute paon aurait dĂ» attendre des ordres pour se livrer aux fĂȘtes et pour en faire la dĂ©pense ; mais il est des cir- constances impĂ©ratives et pour ne pas voir commencer des mouvements de sĂ©dition, il faut avoir l'air d'aller au devant des vƓux qu'il serait dangereux de contrarier » 3. Ces explosions fiĂ©vreuses de l'enthousiasme populaire n'Ă©taient pas sans danger ; elles rĂ©vĂ©laient une agitation profonde des 1 Arch. comm., Cherbourg. Registre les dĂ©libĂ©rations, BB5, sĂ©ance du 21 juillet 179. A Carentarij un Te Deum est chantĂ© If -20 juillet pour cĂ©lĂ©brer la rĂ©union le tous les ordres de lu nation ». AĂŻch. comm., Carenlan, Registre des dĂ©libĂ©rations. 2 Arch. comm., Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations. 3 Arch. dĂ©., Calvados, C 6351. Lettre de Couraye-Duparc Ă  l'intendant, 21 juillet 1789. D'autres adresses, destinĂ©es Ă  cĂ©lĂ©brer l'heureuse rĂ©union des trois ordres, furent envoyĂ©es Ă  l'AssemblĂ©e nationale, par le bailliage le CĂ©renees le G juillet, par les officiers municipaux de Coutances le 27 juillet, par les communes rĂ©unies du bailliage de Morlain sans date, par le bailliage el prĂ©sidial de Coutances le 28 juil- let. Arch. nat., C 88, 89 et 90. — Le retour de Necker, le ministre-citoyen », le Sully du XVIIIe siĂšcle », fut aussi l'objet d'adresses de fĂ©licitations de Saint-Sau- veur-lĂ©- Vicomte 29 juillet, ĂŻbĂźd., C K9. et des officiers municipaux d'Avranches 28 juillet, Ibid., C 9J. MISÈRE PUBLIQUE ET FERMENTATION GENERALE 365 classes pauvres, en proie Ă  une grande misĂšre, et pouvaient se changer brusquement en explosions de rĂ©volte. En plus d'un endroit l'affolement succĂ©da Ă  l'allĂ©gresse publique et les Ă©meutes aux fĂȘtes ; dans plus d'une ville les feux de joie dĂ©gĂ©nĂ©rĂšrent en incendies et les rĂ©jouissances en pillages. Le manque de travail Ă©tait une des premiĂšres causes de la misĂšre publique. Par esprit d'Ă©conomie, l'AssemblĂ©e provinciale de Caen avait suspendu la construction coĂ»teuse des grandes routes et parcimonieusement rĂ©glĂ© la distribution des ateliers de charitĂ©. La lenteur du recouvrement de la corvĂ©e ne permettait pas la rĂ©gularitĂ© des paiements. Les travaux du port de Cher- bourg, qui avaient attirĂ© dans cette ville une plĂšbe remuante et dĂ©peuplĂ© le Cotentin de ses ouvriers agricoles, avaient Ă©tĂ© inter- rompus. Cet arrĂȘt dans la vie Ă©conomique du pays constituait un pĂ©ril social. Il engendrait l'oisivetĂ©, la mendicitĂ© ; il avivait les plus violentes passions au cƓur des malheureux. Ouvriers sans travail, qui formaient des clubs en plein air sur leur ancien chan- tier, voyers aigris par les retards apportĂ©s Ă  leur paiement aug- mentaient chaque jour la troupe d'oisifs et de mĂ©contents, qui pouvait devenir un gibier d'Ă©meute. La faim, mauvaise conseillĂšre, sĂ©vissait alors cruellement. La rĂ©colte de 1788 avait Ă©tĂ© insuffisante. La duretĂ© de la saison, une grĂȘle dĂ©sastreuse, la difficultĂ© des charrois, l'inaction forcĂ©e des moulins avaient mis le comble Ă  la misĂšre sur les divers points de la gĂ©nĂ©ralitĂ©. Une terrible Ă©meute avait Ă©clatĂ© Ă  Caen le 5 janvier 1789, la veille du jour des Rois. La foule avait enfoncĂ© les portes des boulangeries, pris le pain, brisĂ© les tailles et dĂ©chirĂ© les registres. La maison du lieutenant de police, tout naturelle- ment dĂ©signĂ©e Ă  la fureur des mauvais sujets, avait Ă©tĂ© pillĂ©e de fond en comble *. A mesure qu'on avançait dans l'annĂ©e, les effets de la mau- vaise rĂ©colte de 1788 se faisaient davantage sentir. Le prix des grains allait croissant de mois en mois sur tous les marchĂ©s ; un sac de blĂ© se vendait Ă  la halle de Caen 26 livres 16 sols 7 deniers en janvier, 40 livres 4 sols 10 deniers en juin. A la fin de ce mois, il monta jusqu'Ă  68 et mĂȘme 72 livres 2. Ce renchĂ©rissement continu Ă©tait dĂ» aussi en grande partie Ă  l'indĂ©cision des mesures 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2665. On y vola un gigot de mouton Ă  la broche, raconte Dufour dans ses MĂ©moires et remarques, t. I, p. 29. 2 Ibid., C 2756. 20 306 MESURES POUR L APPROVISIONNEMENT DES VILLES prises par le gouvernement pour l'approvisionnement des villes. Les ordres les plus contradictoires se succĂ©daient depuis deux ans. La dĂ©claration royale du 17 juin 1787 relative Ă  la libre cir- culation des grains avait Ă©tĂ© abrogĂ©e par un arrĂȘt du Conseil du 7 septembre 1788. Inquiet de la rĂ©colte insuffisante, le gouverne- ment suspendait l'exportation des grains Ă  l'Ă©tranger, tout en maintenant le libre transit dans le royaume. Une restriction nouvelle fut apportĂ©e Ă  cette libertĂ© de circulation par l'arrĂȘt du 23 novembre 1788. Cet arrĂȘt interdisait les spĂ©culations achats ou accaparements entreprises uniquement en vue de profiter de la hausse des prix. Il n'Ă©tait permis de vendre ou d'acheter grains et farines que dans les halles et marchĂ©s ; les approvisionnements journaliers des consommateurs locaux devaient avoir lieu avant toute autre transaction. Des arrĂȘts ultĂ©rieurs accordĂšrent des primes d'encouragement Ă  l'impor- tation des blĂ©s d'AmĂ©rique ou d'Europe, de l'orge et des autres grains. Pour rassurer les esprits inquiets de la chertĂ© croissante, le roi prit des mesures plus sĂ©vĂšres encore. Par arrĂȘt du 23 avril 1789, il autorisa les commissaires dĂ©partis et les magistrats de police Ă  user de leur pouvoir pour faire approvisionner les mar- chĂ©s Ă  prix modĂ©rĂ©s par les possesseurs de grains, Ă  s'informer de la contenance de leurs dĂ©pĂŽts, et Ă  s'assurer Ă  cet effet du concours des municipalitĂ©s ;l\ Necker essaie de justifier par les circonstances critiques la rigueur d'une telle mesure. La tran- quillitĂ© publique, Ă©crit-il Ă  Cordier de Launay, et la nĂ©cessitĂ© de procurer Ă  chacun sa subsistance exigent que l'on s'Ă©carte de l'application de tous les grands principes de libertĂ© qui peuvent ĂȘtre trĂšs bons dans des temps de calme et d'abon- dance » $. Il Ă©tait imprudent de confier aux intendants une aussi lourde mission. On leur prescrivait des recherches inquisitoriales dans les greniers des particuliers ; on les invitait Ă  contraindre ceux-ci, au besoin manu militari Ă  garnir les halles publiques. Mais Ă©tait-on sĂ»r qu'ils rĂ©ussiraient? Pour appliquer avec succĂšs une lĂ©gislation aussi draconienne, il eĂ»t fallu un gouvernement fort, 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2692. Le texte des arrĂȘts des 23 novembre 1788 et 23 avril 1789 a Ă©tĂ© publiĂ© par M. Caron, Commission de recherche et de publication des documents relatifs Ă  la vie Ă©conomique de la RĂ©volution. Bulletin trimestriel, annĂ©e 1906, tomes 2 et 3, piĂšces n° 2 et n° 3. 2 Lettre de Necker Ă  l'intendant Cordier de Launay, 4 avril 1789. Arch. dĂ©p., Cal- vados, C 2675. SOUPÇONS INJUSTIFIÉS CONTRE r/lNTENDANT 307 servi par une administration toute puissante. De quelle efficacitĂ© pouvait ĂȘtre, en avril 1789, le concours de ces administrateurs dessaisis, dĂ©savouĂ©s par le gouvernement lui-mĂȘme depuis l'insti- tution des AssemblĂ©es provinciales, discrĂ©ditĂ©s dans l'opinion, et dont plus d'un cahier de dolĂ©ances avait demandĂ© la suppres- sion? Depuis que l'emploi des fonds libres de la capitation, les distributions de secours et les remises ou exemptions d'impĂŽts Ă©taient du domaine de la Commission intermĂ©diaire provinciale, l'intendant n'Ă©tait plus le dispensateur de la bienfaisance royale. Les fonctions charitables, qui lui attiraient la reconnaissance publique, lui avaient Ă©tĂ© dĂ©robĂ©es ; celles qu'il- gardait, celles de haute police, n'Ă©taient pas de nature Ă  raviver sa popularitĂ© dĂ©chue. Dans ces temps troublĂ©s, l'opinion publique en efferves- cence faisait crĂ©dit aux pires soupçons. N'alla-t-on pas jusqu'Ă  accuser Cordier de Launay et son secrĂ©taire Guyard de spĂ©culer sur les primes d'importation des grains et d'Ă©difier leur fortune privĂ©e sur la famine?/1 Ils faisaient enlever, disait-on, les blĂ©s des marchĂ©s de la Basse-Normandie pour les faire expĂ©dier Ă  nouveau de ports trĂšs Ă©loignĂ©s et les ramener dans les ports normands >. C'Ă©tait lĂ  pure calomnie. La correspondance trĂšs active que Cordier de Launay entretenait avec Necker, avec Montaran, l'intendant des finances, tĂ©moigne au contraire de sa vive solli- citude pour la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen 3>. Il rĂ©clame avec insistance 1 Lettres de Lambert au ComitĂ© national de Caen 18 septembre 1789, et de Necker aux officiers municipaux de Caen 26 septembre 1789 pour recommander Guyard Ă  toute leur protection. Arch. comm. de Caen, carton 56. 2 On trouve un Ă©cho de ces assertions dans les MĂ©moires de la ville de Caen, par Esnault, t. I, p. 5. — Perrot, secrĂ©taire du duc de Beuvron, accuse l'intendant de Caen d'ĂȘtre un accapareur de grains ». Lettre Ă  ClĂ©risse, concierge du chĂąteau d'Harcourt, 1er mai 1789. Dans une autre lettre au mĂȘme, du 23 juin 1789, il lui dit v. Des blatiers revenant du marchĂ© d'Isigny sont surpris Ă  Osmanville par des Ă©meutiers accompa- gnĂ©s de soldats qui pactisent avec eux. On les ramĂšne de force au bourg. Le siĂšge de police reste indiffĂ©rent ; sans jugement, un blatier est emprisonnĂ© et doit payer une forte amende au profit de la troupe 6 juillet 6. 1 Lettre de Chantereyne Ă  l'intendant, 28 mars 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2679. Garantot et Chantereyne, Ă©galement traitĂ©s d'accapareurs, devaient voir leurs mai- sons incendiĂ©es et leurs vies menacĂ©es dans l'Ă©meute du 21 juillet 1789. Voir ci-des- sous, chap. XII, p. 31^-314. 2 Lettre de Launay Ă  Necker, 20 juin 1789. Arch dĂ©p., Calvados, C 2641. 3 Arch. comm., Carentan, Registre des dĂ©libĂ©rations de l'hĂŽtel de ville, 24 juin 1789. 4 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, p. 6. 5 Bibl. comm. de Vire, ms. SĂ©guin, p. 8. 6 Lettre du duc de Beuvron au lieutenant de police d'Isigny, 6 juillet 1789. Arch. dĂ©p., Eure, E suppl. Chartrier du Champ de bataille marquisat du Neubourg non inventoriĂ©. — A Carentan, une populace sĂ©ditieuse a mis lundi dernier un tonneau de cidre sur le grand chemin avec cette inscription C'est pour tous les bons enfants 310 TROUBLES A SAINT-LÔ, MAI 1789 L'agitation est entretenue et propagĂ©e, les souffrances aug- mentent, les passions s'exaspĂšrent, le moindre incident provoque une Ă©meute. D'avril Ă  juillet 1789, trois villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen sont le théùtre de soulĂšvements populaires qui prĂ©sentent une certaine gravitĂ© Saint-LĂŽ, Caen et Cherbourg. A Saint-LĂŽ, l'effervescence commença le 26 mars ; le peuple excitĂ© par les enlĂšvements considĂ©rables de grains, pilla les voitures des blatiers. Un mois plus tard, deux mĂ©gĂšres firent un nouvel appel Ă  la rĂ©volte ; l'intendant les fit enlever de nuit et transfĂ©rer Ă  la maison de force de Beaulieu, prĂšs Caen. Le 2 mai, la halle est vide ; les bourgeois et les pauvres » souffrent de la mĂȘme disette ; un attroupement de 400 personnes va demander au subdĂ©lĂ©guĂ© Robillard, qui est en mĂȘme temps lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, du grain ou la permission d'aller en chercher dans les campagnes voisines. La semaine suivante, mĂȘmes pri- vations ; murmures du peuple, qui menace de faire un mauvais sort Ă  un nĂ©gociant, Fontaine, possesseur d'un magasin d'orge et de froment dans un des faubourgs de la ville '. L'impunitĂ© enhardit les sĂ©ditieux. Robillard attend des ordres pour informer contre eux W, les juges sont Ă  leur maison de campagne et la milice bourgeoise, divisĂ©e et sans chef, ne peut prendre les armes 3. Pour maintenir l'ordre, le duc de Beuvron envoie Ă  Saint-LĂŽ des troupes de renfort ; Dumouriez accourt avec un dĂ©tachement de Cherbourg le 13 mai, rĂ©unit les officiers municipaux et ceux du bailliage, organise un comitĂ© d'approvisionnement et de sĂ»retĂ© publique *. Le calme semble rĂ©tabli, mais de nouvelles secousses se font sentir en juin, et la marĂ©chaussĂ©e doit procĂ©der Ă  des arrestations 5. A Caen, l'insurrection fut plus violente et fit plus de ravages , Boutrais i'2, voient leurs maisons envahies, leurs vies menacĂ©es. Les hommes et les femmes des faubourgs et des campagnes voisines pĂ©nĂštrent, sans rencontrer aucune rĂ©sistance de la part des troupes, dans les dĂ©pĂŽts des grainetiers, dans les boutiques des boulangers, Ă  l'abbaye aux Dames oĂč se trouvent de fortes provisions. Le lendemain et le surlendemain le dĂ©sordre augmente. Les grains sont semĂ©s dans les rues on en suit les traces depuis la rue Neuve jusqu'Ă  l'abreuvoir de la rue de BerniĂšres '3. Vainement Cordier de Launay remontre-t-il Ă  une femme que ce gaspillage va priver les pauvres de subsistance. Tant mieux, lui rĂ©pond la mĂ©gĂšre ; plĂ»t Ă  Dieu qu'il n'y eĂ»t ni marchĂ© ni magasin nulle part alors on s' entretuerait et il y aurait moins de monde Ă  nourrir » 4. La fermentation devient telle que le duc de Beuvron, regrettant sa faiblesse des premiers jours, veut prendre de sĂ©vĂšres mesures et fait dresser des potences. La foule s'en moque, y attache des chats avec des vases remplis de farine dĂ©trempĂ©e et un Ă©criteau lettres de l'intendant de Launay au ministre, des 23, 24, 25 et 26 avril 1789, Arch. dĂ©p., Calvados, C 2G65 ; — une lettre de Perrot, secrĂ©taire du duc de Beuvron, Ă  ClĂ©risse, concierge du chĂąteau d'Harcourt, du 1er mai 1789, Arch. chĂąteau d'Har- court, liasse 106 ; — les MĂ©moires de la ville de Caen, d'Esnault, t. 1, p. 6, et les MĂ©moires et remarques de Dufour, t. I, p. 30. 1 Bellissent, nĂ©gociant de Caen, rĂ©clama Ă  l'AssemblĂ©e nationale et obtint de celle-ci une indemnitĂ© de 12,494 livres pour le pillage de ses grains, effectuĂ© dans la journĂ©e du 23 avril 1789. Un dossier de dix-huit piĂšces, relatif Ă  cette requĂȘte, est conservĂ© dans le fonds du ComitĂ© de Liquidation, aux Arch. nat., D xi 2, 1. 9. — Cf. la lettre du Directoire du Calvados au ministre de Lessart, du 24 juillet 1791, sur le mĂȘme objet, dans le fonds du ComitĂ© des Rapports, Arch. nat., D xxix 29, 1. 5 et 6. 2 Le 16 fĂ©vrier 1791, Boutrais, marchand grainetier Ă  Caen, adresse au ComitĂ© des finances de l'AssemblĂ©e nationale une requĂȘte tendant Ă  obtenir une indemnitĂ© de 6,731 1. 14 s. pour compenser la perte de 10 Ă  12,000 livres de grains subie lors du pillage de ses greniers Ă  Caen, dans l'Ă©meute d'avril 1789. Arch. nat., D vi 24, 1. 317. 3 DĂ©claration de la femme Hunouf, 29 avril 1789. Arch. comm., Caen. Registre des dĂ©libĂ©rations, BB 93. 4 Lettre de Cordier de Launay Ă  Necker, 23 avril, 10 heures du soir Ă©crite pen- dant le pillage nocturne. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2665. 312 NOUVELLE ÉMEUTE A CAEN, JUILLET 1789 couvert de cette inscription Bouillie pour les chats » 0. Toute- fois, quand l'Ă©meute s'attaque aux magasins du roi, les troupes offrent une vive rĂ©sistance. Gentilshommes et bourgeois s'arment aussi et forment une garde qui arrĂȘte Ă  l'entrĂ©e de la ville les paysans prĂȘts Ă  l'envahir. La fureur de ceux-ci se retourne contre les fermiers de la banlieue qu'on soupçonne d'avoir conservĂ© des grains. Dans une ville aussi frĂ©missante, il Ă©tait fatal que les Ă©vĂ©ne- ments de Paris eussent leur rĂ©percussion. La prise de la Bastille Ă  peine connue, le peuple s'assemble impatient de courage et d'amour pour la chose publique ». Le 20 juillet, il se rend Ă  la halle aux blĂ©s et y fait abaisser le prix des grains *2. Il veut des armes a et se porte vers le chĂąteau, oĂč il est assurĂ© d'en trouver. Les ponts sont levĂ©s ; le gouverneur, Saint Maclou, est sommĂ© d'ouvrir sous peine de mort. AprĂšs un essai de rĂ©sistance, il capi- tule pour Ă©viter un assaut. La foule entre et pille les armes, em- porte fusils et cartouches, chasse du chĂąteau le rĂ©giment de la Reine et y installe une forte garde. Comme le peuple parisien, le peuple caennais s'est armĂ© par le force et a pris sa Bastille, mais sans effusion de sang. Pour complĂ©ter sa victoire, il se dirige vers les prisons, Ă©largit six dĂ©tenus et les escorte triomphalement ; il force les magasins de la gabelle, il enfonce les portes du bureau des aides >4, dont le directeur s'enfuit Ă  grand peine, et enlĂšve les registres. Pendant trois jours, la ville est le théùtre d'une vĂ©ri- table rĂ©volution populaire 5. 1 Le dimanche 26 avril, le duc de Beuvron a fait planter quatre gibets en potence dans la ville de Caen, savoir une Ă  Saint-Sauveur, une Ă  Saint-Pierre, une Ă  Saint-Nicolas, et la quatriĂšme proche le pont de Vauchelles. On a pendu deux chats Ă  celle de Saint-Sauveur, un blanc et un noir, et une affiche entre les deux chats. » Dufour, MĂ©moires et remarques, t. I, p. 30. 2 Le lundi 20 juillet, la populace a Ă©tĂ© Ă  la halle et a pris du blĂ© Ă  40 livres le sac qui coĂ»tait 54 livres. » Dufour, MĂ©moires et remarques, t. I, p. 31. 3 D'aprĂšs Dufour, le peuple, Ă  l'issue d'une messe du Saint-Esprit cĂ©lĂ©brĂ©e le 21 juillet sur le Cours-la-Reine, serait allĂ© demander des armes au comte de Faudoas. Celui-ci ayant voulu ajourner cette remise, un jeune homme lui aurait rĂ©pondu Monseigneur, il y a assez longtemps qu'on nous engueuse ; aussi nous en voulons tous. » Faudoas adressa les rĂ©clamants Ă  Dubus, distributeur des poudres et salpĂȘ- tres du roi, qui leur dĂ©livra des munitions. Dufour, MĂ©moires et remarques, t. I, p. 31. 4 Arch. comm., Caen, Registre BB 103 ; Esnault, MĂ©moires de la ville ae Caen, t. I, p. 7, 8. Dufour, MĂ©moires ei remarques, t. I, p. 31. — Dans une letlre au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, du 31 juillet 17S9, Boyer, directeur des aides et octrois de Caen, raconte cette Ă©meute du 20 juillet. La foule se prĂ©cipita dans ses bureaux, enleva et dispersa ses registres, pilla ses effets et ses meubles. Arch. nal., D xxix 29, 1. 5 et 6. 5 RĂ©volutions de Caen, capitale de la Basse-Normandie, ou rĂ©cit exact de ce qui s'est passĂ© dans cette capitale et particuliĂšrement de la prise de la forteresse, juillet 1789. PiĂšce imprimĂ©e, in-12. L'ÉMEUTE DU 21 JUILLET 1789 A CHERBOURG 313 A Cherbourg, l'Ă©meute fut terrible. Cette ville Ă©tait plus que toute autre un foyer d'insurrection. Depuis longtemps, le subdĂ©- lĂ©guĂ© avait signalĂ© le danger Ă  l'intendant. Le nombre infini de misĂ©rables que tous nos travaux ont attirĂ©s dans notre ville, dans ses environs et tout le long de la cĂŽte, et le dĂ©faut de res- sources oĂč l'interruption de la plupart des travaux plonge tous ces individus, nous fait apprĂ©hender... » l\ D'avril Ă  juillet, Necker avait pu envoyer Ă  Cherbourg plusieurs cargaisons de blĂ© f2 ; mais, Ă  cette Ă©poque, hypnotisĂ© par la question du ravi- taillement de Paris, il dut cesser ses envois. Dans la soirĂ©e du 21 juillet, Ă  l'issue de l'assemblĂ©e tumultueuse qui s'est tenue dans l'Ă©glise Notre-Dame pour l'organisation des rĂ©jouissances pu- bliques, un grand concours de peuple se porte vers l'hĂŽtel de ville oĂč se trouve Garantot, maire et subdĂ©lĂ©guĂ©. On rĂ©clame l'ouverture du magasin Ă  blĂ© de l'Etat, la distribution de ce blĂ© Ă  4 livres le boisseau au lieu de 6 livres 4 sols, et l'abaissement du prix du pain de 3 sols 5 deniers Ă  2 sols la livre. Garantot parlemente, traverse la place d'armes pour se rendre Ă  l'hĂŽtel de Caux oĂč Beuvron et Dumouriez se sont dĂ©jĂ  rĂ©unis. AprĂšs une courte dĂ©libĂ©ration, le duc de Beuvron annonce la diminution du prix du blĂ© et du pain. Il est trop tard la foule impatiente n'a pas attendu cette rĂ©ponse et s'est dĂ©jĂ  livrĂ©e Ă  des excĂšs 3; Depuis longtemps elle hait Garantot, qui doit la mairie Ă  la nomination royale et non Ă  l'Ă©lection populaire, et qui joint Ă  cette charge les deux titres dĂ©testĂ©s de subdĂ©lĂ©guĂ© et de lieutenant gĂ©nĂ©ral de 1 Lettre de Garantot Ă  Cordier de Launay, 25 avril 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2679. 2 Dans le fonds du ComitĂ© des Rapports, aux Archives nationales, se trouve un dossier de lettres de l'intendant Cordier de Launay et du subdĂ©lĂ©guĂ© et maire de Cherbourg, Garantot, relatives Ă  l'approvisionnement de cette ville de mars Ă  juillet 1789. Arch. nat, D xxix 32. 3 Pour l'Ă©meute de Cherbourg, j'ai consultĂ© aux Arch. comm. de Cherbourg, le registre BB5 dĂ©libĂ©rations municipales, f°157Ă  160 ; le registre BB 11 de correspon- dance, f° 26 Ă  30 ; la liasse FF 22, relative au jugement prĂ©votal du 31 juillet el au rĂŽle de Dumouriez dans cette affaire ; en outre, Ă  la BibliothĂšque communale de Cherbourg, le ms. 321 intitulĂ© PrĂ©cis de ce qui s'est passĂ© Ă  Cherbourg depuis le 21 juil- let jusqu'au 2 aoĂ»t 17S0, avec le procĂšs et le jugement des brigands sĂ©ditieux qui ont portĂ© la dĂ©solation et la terreur dans celte ville Cf. Arch. nat., D xxix 32 ; aux Arch. dĂ©p. de l'Eure chartrier du Champ de Bataille, une Relation de ce qui s'est passĂ© Ă  Cherbourg les 21 et 22 juillet, malheureusement incomplĂšte; aux Arch. dĂ©p. du Calva- dos, C 6370, le rapport de l'intendant de Caen proposant Ă  l'intendant des finances, Montaran, une indemnitĂ© en faveur de Chantereyne 28 mars 1790 ; enfin, aux Arch. du chĂąteau d'Harcourt. liasse 106, une lettre de Perrot, secrĂ©taire du duc de Beu- vron, Ă  ClĂ©risse, concierge du chĂąteau d'Harcourt, Ă©crite de Cherbourg et datĂ©e du 24 juillet 1789. 314 PILLAGE DES MAISONS DE GARANTOT ET GIIANTEREYNE police. Il a eu l'imprudence de consentir Ă  la vente des grains du roi, et il est traitĂ© d'accapareur. Accapareur aussi, l'armateur Chantereyne, dont le seul crime a Ă©tĂ© de prĂȘter ses magasins et son nom Ă  cette entreprise. AveuglĂ©e par la colĂšre, la populace se rue d'abord Ă  l'hĂŽtel de Garantot elle enfonce les portes, brise les meubles, en jette les dĂ©bris dans la cour, comble le puits, prĂ©cipite la voiture dans le port. Le malheureux subdĂ©lĂ©guĂ©, dont les jours sont menacĂ©s, a de la peine h quitter Cherbourg et Ă  gagner Valognes, cachĂ© sous une botte de paille dans une mau- vaise charrette de paysan. La bande des pillards, enivrĂ©e de vin et enhardie par l'absence d'obstacles, va saccager ensuite la maison de Chantereyne bijoux, papiers, argenterie, livres d'argent monnayĂ©, tout disparaĂźt dans la bagarre. Chantereyne lui-mĂȘme ne dut son salut qu'Ă  la fuite, et il mourut peu de temps aprĂšs, des suites de sa frayeur. La nuit tombĂ©e, c'est Ă  la lueur des torches que les pillages continuent les bureaux de Boulabert, entrepreneur des travaux du roi, sont menacĂ©s, ainsi que ceux des aides ; celui de la Romaine est envahi et les papiers sont jetĂ©s dans le bassin. Les sĂ©ditieux se dirigent ensuite vers la maison d'un nĂ©gociant, Mauger, qu'ils dĂ©vastent de fond en comble. Surprise par la rapiditĂ© de l'Ă©meute, la force armĂ©e n'avait pu lui opposer aussitĂŽt une rĂ©sistance victorieuse. La dispersion des dĂ©tachements essaimes dans les casernes Ă©loignĂ©es de la rade rĂ©duisait considĂ©rablement les troupes de la garnison ; les piquets de soldats, qu'on avait jugĂ©s suffisants au maintien de l'ordre dans une fĂȘte populaire, ne l'Ă©taient plus pour contenir une rĂ©volte. La milice citoyenne, formĂ©e par acclamation le jour mĂȘme, n'avait ni armes ni organisation, et Dumouriez, le chef qu'elle s'Ă©tait donnĂ©, n'Ă©tait plus malgrĂ© toute sa popularitĂ© le maĂźtre des circonstances f*. Lorsque, las de piller et gĂȘnĂ©s par la pointe du jour », les forcenĂ©s commencĂšrent Ă  se dĂ©bander, les patrouilles militaires, aidĂ©es des citoyens amis de l'ordre, leur firent la chasse dans les rues. 219 individus furent arrĂȘtĂ©s 180 hommes et 39 femmes. On les emprisonna dans les Ă©curies de Dumouriez, dans les caves d'un particulier, dans les cales de deux vaisseaux mouillĂ©s en rade. Leur procĂšs fut rapidement fait. La cour prĂ©vĂŽtale, composĂ©e du prĂ©vĂŽt gĂ©nĂ©ral de la marĂ©- 1 Dumouriez fut accusĂ© d'avoir Ă©tĂ© l'instigateur secret des troubles de Cherbourg. Sur ces accusations, voir de volumineux dossiers aux Arch. nat., F7 4688, 4689. — Quelques piĂšces en ont Ă©tĂ© publiĂ©es par Amiot, en supplĂ©ment Ă  son Inventaire des Archives de Cherbourg, p. 316-320. MESURES DE REPRESSION 315 chaussĂ©e auquel on avait adjoint douze avocats, prononça le 31 juillet la peine de mort contre deux des mutins, Nicolas Pic- quenot, du Vretot, et Bon Mesnil, de Valcanville. Ils furent pendus dans la soirĂ©e, sur la place de la Fontaine. Dix autres meneurs furent condamnĂ©s Ă  des peines variables trois aux galĂšres perpĂ©tuelles ; cinq, fouettĂ©s, marquĂ©s au fer rouge, subirent la peine du bannissement perpĂ©tuel ; un autre fut enfermĂ© Ă  perpĂ©tuitĂ© ; le dixiĂšme fut puni de dix ans de galĂšres. Cinq fem- mes furent marquĂ©es sur l'Ă©paule droite des lettres S. D., battues de verges par l'exĂ©cuteur des sentences criminelles, puis dirigĂ©es sur la maison de force deBeaulieu pour y tenir prison perpĂ©tuelle. MalgrĂ© la rigueur de cette rĂ©pression, l'agitation avait Ă©tĂ© trop forte pour espĂ©rer de faire rentrer de sitĂŽt dans les bornes de la raison un peuple qui ne l'entendait plus ». Pendant plus d'une semaine, la ville de Cherbourg fut en Ă©tat de siĂšge. Elle se vit aussi appliquer un rĂ©gime onĂ©reux qui greva les finances muni- cipales. ObligĂ©e d'ouvrir ses magasins et de livrer le blĂ© Ă  4 livres le boisseau, la municipalitĂ© prit ses prĂ©cautions pour que ces mesures ne profitassent qu'aux malheureux et pour Ă©viter des abus. Elle crĂ©a un bureau oĂč furent enregistrĂ©s les mĂ©nages indigents, donna des bons Ă  raison d'une livre et demie de pain par jour et par individu ; sur ces bons, remis aux boulangers, il Ă©tait fourni du pain Ă  2 sols la livre, et le boulanger qui les reprĂ©- sentait Ă  l'hĂŽtel de ville recevait le supplĂ©ment de la taxe. RĂ©so- lue Ă  prĂ©venir toute rumeur et Ă  empĂȘcher le retour de l'insur- rection, la municipalitĂ© fut contrainte Ă  des dĂ©penses Ă©normes pour assurer la subsistance du peuple. Il fallut faire participer Ă  la diminution du pain toute la population flottante qui s'Ă©tait accrue dans les derniers temps matelots des chasse-marĂ©es employĂ©s au transport des pierres de la digue, soldats dĂ©tachĂ©s pour les carriĂšres, troupes de la garnison. Un tel effort devait Ă©puiser pour longtemps les ressources de la ville. Quant au malheureux subdĂ©lĂ©guĂ©, il dut rester exilĂ© pendant plus d'une annĂ©e de Cherbourg oĂč se trouvaient ses affections et ses intĂ©rĂȘts. Son impopularitĂ© n'avait pas diminuĂ© et sa prĂ©sence dans cette ville y eĂ»t Ă©tĂ© une cause permanente de troubles l>. Les soulĂšvements populaires ne sont point dĂ»s uniquement Ă  l Lettre de Garantot Ă  Lamy-DesvallĂ©es, 30 octobre 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2679. Garantot avait essayĂ© de revenir Ă  Cherbourg, mais il dut s'enfuir devant l'excitation populaire les tĂštes Ă©tant Ă©chauffĂ©es par les dĂźners que les capitaines de la milice nationale donnaient Ă  leurs soldats ». 316 RÉSISTANCE OPPOSÉE A LA LEVÉE DES IMPOSITIONS la disette des grains. La duretĂ© du fisc en a provoquĂ© plus d'une. L'hostilitĂ© du paysan contre les impĂŽts ne se traduit plus seule- ment en plaintes et en gĂ©missements. Des dolĂ©ances on passe aux actes, de la rĂ©signation aux violences. La perception des impĂŽts directs Ă©prouve de sĂ©rieux obstacles aprĂšs juillet 1789. Les recettes diminuent de mois en mois dans une proportion effrayante. Le bruit a couru dans les campagnes que les impositions sont illĂ©gales, que le roi en a fait la remise ; les naĂŻfs y croient et les malveillants accrĂ©ditent ce bruit. On refuse de payer la taille et les collecteurs sont repoussĂ©s Ă  coups de fourches ; un huissier des tailles manque d'ĂȘtre assommĂ© ]. CondĂ©, ville tarifiĂ©e, est divisĂ©e en deux partis l'un qui veut conserver le tarif et l'autre y substituer la taille. Cette division cause des troubles et en juillet 1789, dans une Ă©meute, les registres du tarif sont incendiĂ©s P. Les impĂŽts indirects surtout sont l'objet de l'exĂ©cration gĂ©nĂ©- rale. Tous les cahiers en ont demandĂ© la suppression. En atten- dant que l'AssemblĂ©e nationale la vote, le peuple se fait justice. Il s'attaque aux commis des fermes, aux gabelous qu'il accuse de tous ses maux. Le 9 mai 1789, la brigade de Villers-Bocage est assaillie Ă  Tournay-sur-Odon par une bande de paysans qui la poursuit Ă  coups de bĂątons et de faucilles H>. A Caen, les insur- gĂ©s du 18 juillet, aprĂšs la dĂ©livrance de six contrebandiers, courent au magasin de la gabelle, en enfoncent les portes et font crier le sel Ă  6 sols la livre. Ils vont aussi au bureau des aides, forçant le directeur gĂ©nĂ©ral, Boyer, Ă  prendre la fuite ; ils s'emparent des registres qu'ils portent chez Faudoas 4. A Cherbourg, le 21 juil- let, les Ă©meutiers n'oublient pas les bureaux de la Romaine ; ils s'emparent des papiers qu'ils y trouvent et en jettent une partie dans le bassin. La prĂ©sence d'esprit et la conduite prudente de Mme Maudry, femme du receveur des aides les empĂȘchent d'y commettre de plus graves excĂšs &. A Vire, le 20 juillet, une dizaine d'individus vont proclamant dans les rues, au son du tambour, l'abolition des aides et de la gabelle. Il se forme des 1 Lettre du receveur des finances de Vire Ă  la Commission intermĂ©diaire provin- ciale, 10 mars 1790, rappelant les Ă©vĂ©nements de juillet 1789. Arch. dĂ©p. Calvados, C 7788. 2 Arch. comm., CondĂ©-sur-Noireau, BB 1 et BB 7. 3 Arch. dĂ©p.. Calvados; sĂ©rie B, grenier Ă  sel non inventoriĂ©. 4 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, t. I, p. 8. RĂ©volutions de Caen, p. G. Voir ci-dessus, p. 31?. 5 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Begistre de correspondance, 21 .juillet 1789. SOULÈVEMENT DES CAMPAGNES CONTRE LES DROITS FÉODAUX 317 attroupements tumultueux aux cris de Ă  bas les aides ». Quatre jours plus tard, le 24, l'insurrection Ă©clate. Un nombreux rassem- blement se forme sur les deux heures de l'aprĂšs-midi et se porte rue du Neubourg, oĂč sont les bureaux du receveur des aides Lecoq. Les exaltĂ©s menacent de le chauffer », et dĂ©posent une gerbe de genĂȘts Ă  sa porte. Un peloton de troupes, envoyĂ© pour les disperser, fraternise avec eux. Lecoq, pressentant l'Ă©meute, a eu le temps de s'enfuir et la journĂ©e s'achĂšve sans d'autre incident que le bris de nombreuses vitres ft. De tels dĂ©sordres ne sont pas particuliers aux villes. Les habi- tants des campagnes se croient affranchis par la RĂ©volution des rentes et redevances seigneuriales. Ils se refusent Ă  acquitter les droits fĂ©odaux tout comme l'impĂŽt royal. Pour en opĂ©rer plus vite la liquidation, ils courent aux chĂąteaux de leurs seigneurs, coupent les arbres des avenues, tuent les pigeons, dĂ©molissent les colombiers, brĂ»lent les chartriers qui contiennent les titres de leur servitude ?. La duchesse d'Harcourt abandonne son chĂąteau pour venir Ă  Caen ; aprĂšs son dĂ©part, la foule l'envahit et brise dans le vestibule une statue colossale en marbre blanc qui reprĂ©- sente Louis XIV terrassant l'hĂ©rĂ©sie C3. Dans les environs de Bayeux, le seigneur de Vidouville est en butte aux violences de ses vassaux. L'un d'eux, Robert Guillemette, vient attaquer son chĂąteau Ă  la tĂȘte d'une bande de charbonniers et sabotiers du bois de la Bigne. Pour les exciter au pillage, il leur a distribuĂ© 200 livres de pain, 100 livres de lard et un tonneau de cidre. Le 4 aoĂ»t au point du jour, cette bande embusquĂ©e dans les bosquets voisins envahit le chĂąteau. Le seigneur, en robe de chambre, est entourĂ© d'hommes armĂ©s de fusils, de sabres, de pioches, de haches et de cordes. Guillemette lui met le pistolet sur la gorge en le sommant de lui remettre la clef de son colombier pour le dĂ©truire, celle de son chartrier pour brĂ»ler ses titres, et de son argent pour se rembourser des rentes seigneuriales qu'ils payaient 1 Bibl. comm., Vire. ras. SĂ©guin, p. 9. 2 Le subdĂ©lĂ©guĂ© de Vire fait allusion Ă  ces pillages dans une lettre Ă  l'intendant, du 16 aoĂ»t, oĂč, lui accusant rĂ©ception de l'ordonnance du roi sur les troubles, il ajoute Il eĂ»t Ă©tĂ© Ă  dĂ©sirer qu'elle fut venue un mois plus tĂŽt. On aurait Ă©vitĂ© bien des Ă©vĂ©nements et des arebives conservĂ©es sic. » Arch. dĂ©p., Calvados, C 2688. 3 Esnault, MĂ©moires de la ville de Caen, t. I, p. 9. — J'ai pu voir, au chĂąteau d'Harcourt. les traces des coups de pique qui ont crevĂ© les tableaux de la salle des MarĂ©chaux, les couronnes ducales qui ornaient la rampe du grand escalier en fer forgĂ© sont tordues ou arrachĂ©es ; quant Ă  la statue du vestibule, elle a Ă©tĂ© réédifiĂ©e, mais en pierre. 318 DESTRUCTION DES COLOMBIERS ET CHARTRIERS SER1NEURIAUX depuis si longtemps injustement ». Je n'ai pas mes clefs sur moi, rĂ©pond Durel de Vidouville. Laissez -moi rentrer et je vais vous satisfaire. » Pendant que la bande tue poules, pigeons et ca- nards et se rue Ă  la destruction du colombier, le seigneur envoie ses domestiques pour sonner le tocsin dans la chapelle du chĂąteau; le curĂ© de Vidouville le fait sonner dans la paroisse. Des villageois se rassemblent, mais les insurgĂ©s rĂ©sistent. Durel peut s'Ă©chapper Ă  grand peine, en sautant par une fenĂȘtre dans son jardin. A la nouvelle de sa fuite, les forcenĂ©s se retirent, l'injure et la menace Ă  la bouche l]l. Les chĂąteaux de Tilly, d'AmayĂ©, d'Ecrammeville, de Hottot sont le théùtre de semblables dĂ©vastations C2'. Dans le Bocage, les seigneurs tremblent pour leurs propriĂ©tĂ©s et pour leur vie. Le marquis de SĂ©grie, qui par la rigueur de ses exactions a soulevĂ© trop de haines, chassĂ© de son chĂąteau, doit se rĂ©fugier dans une caverne des rochers d'OĂźtre. RentrĂ© Ă  Falaise, oĂč la noblesse du pays est plus en sĂ»retĂ©, il renonce par acte notariĂ©, le 22 juillet 1789, Ă  ses droits fĂ©odaux sur les cinq pa- roisses de SĂ©grie-Fontaine, La Lande-Saint-SimĂ©on, Rouvrou, Mesnil-Hubert et Mesnil-Villement 3. Deux jours plus tard, le marquis d'Oilliamson voyait ses vassaux des paroisses de Caligny, Montilly, La Bazoque et Athis s'attrouper au nombre de trois Ă  quatre cents, auxquels se joi- gnirent une infinitĂ© de brigands. Cette troupe de furieux, Ă©crit-il, aprĂšs avoir sonnĂ© le tocsin dans plusieurs paroisses des environs, a fondu sur ma maison de Caligny, a foncĂ© les portes, vidĂ© les caves et brĂ»lĂ© en entier mon chartrier » 4. La colĂšre des foules Ă©tait dĂ©chaĂźnĂ©e et frappait parfois en aveugle. Une lettre du comte de Vassy, adressĂ©e au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, fait saisir sur le vif, avec l'ĂąpretĂ© des revendications paysannes, l'impopularitĂ© dont furent victimes les seigneurs jusqu'alors les plus respectĂ©s 5. Vassy Ă©tait un des gentilshommes les mieux estimĂ©s de la Basse-Normandie. Il avait jouĂ©, on l'a vu plus haut, un rĂŽle considĂ©rable dans l'administration provinciale et s'y Ă©tait 1 Arcli. coinm., Bayeux, Di 12, Registre des dĂ©libĂ©rations de l'HĂŽtel de ville. 2 Pezet, Bayeux Ă  lĂ  fin du XVI II" siĂšcle, p. 129. 3 La SicotiĂšre, LĂ©on de FrottĂ©, 1. I, p. 149. — LeliĂšvre, Abandon de droits fĂ©odaux avant la nuit du 4 aoĂ»t, dans La RĂ©volution française, 1905, p. 419-420. 41 Lettre du marquis d'Oilliamson au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 4 aoĂ»t 1789. Arch. nat., D xxix 29. 5 Lettre du comte de Vassy au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale. 27 juillet 1789. Ibid. PILLAGE DES CHATEAUX DU COMTE DE VASSY 319 rĂ©vĂ©lĂ© comme l'un des organisateurs du Bien public » *. La noblesse du bailliage de Caen l'avait Ă©lu comme second dĂ©putĂ© de son ordre aux Etats gĂ©nĂ©raux 2. Vassy possĂ©dait, en Norman- die, des fiefs assez importants il Ă©tait seigneur patron de BrĂ©cĂ©, de la ForĂȘt-Auvray ^ prĂšs Falaise et de La Landelle-en-ClĂ©cy dans le Bocage virois [\ Le 16 juillet au soir, son homme d'af- faires l'avertit que, depuis cinq Ă  six jours, une grande fermen- tation existe dans les campagnes des environs de Falaise et de CondĂ©-sur-Noireau », oĂč est situĂ©e une grande partie de ses biens. Beaucoup d'habitants y annoncent que des ordres d'en haut leur enjoignent de brĂ»ler tous. les titres et papiers des seigneurs, l'AssemblĂ©e nationale ayant aboli tous cens, rentes seigneuriales, redevances et banalitĂ©s des moulins. AlarmĂ© par cette nouvelle, Vassy quitte Versailles et se rend, en toute hĂąte en Normandie 5. Le 19 juillet, il se trouve, non loin de Falaise, dans une de ses terres, qu'il vient de vendre ; il est Ă  table, lorsque plus de trois cents personnes, les unes armĂ©es, les autres avec des bĂątons, arrivent pour brĂ»ler les papiers et mettre, en cas de refus, le feu au chĂąteau ». N'ayant aucun droit pour leur remettre des titres qui ne lui appartiennent plus, Vassy se sauve Ă  pied, avec sa femme et ses enfants, tandis que les paysans, parvenus aux portes du chĂąteau, les enfoncent Ă  coups de haches et, aprĂšs avoir vidĂ© le chartrier, font dans la cour un autodafĂ© d'archives seigneuriales. RĂ©fugiĂ© dans sa terre de La Landelle, paroisse de ClĂ©cy, Vassy y subit d'autres assauts. Le mercredi 22 juillet au soir, cent Ă  cent cinquante habitants de ClĂ©cy viennent le sommer de leur remettre ses titres. Ils s'excusent de lui faire de la peine, n'ayant jamais reçu, depuis dix-neuf ans qu'il possĂšde cette terre, que de bons traitements de sa part; mais ils sont obligĂ©s d'exĂ©cuter des 1 Voir ci-dessus, chap. IV, p. 75. 2 Ibid., chap. X, p. 266. 3 Le comte de Vassy, seigneur de La ForĂȘt-Auvray, ligure, Ă  ce titre, dans le rĂŽle des impositions de cetle paroisse, en 1790, pour 55S livres. L. Du val. La petite Pro- priĂ©tĂ© dans l'Orne en 1789, p. 15. 4 La terre de La Landelle produisait 120 livres de rentes seigneuriales, plus 80 livres de lods et ventes, 75 et 50 livres pour les foires et les marchĂ©s de ClĂ©cy, d'aprĂšs la dĂ©claration faite en 1781, au contrĂŽle des vingtiĂšmes, par le comte Louis de Vassy. Arch. dĂ©p., Calvados, C 5801. 5 Vassy justifie en ces termes l'intĂ©rĂȘt qu'il avait Ă  se dĂ©placer d'urgence Dans le pays oĂč est situĂ© mon bien, le sol Ă©tant gĂ©nĂ©ralement mauvais et d'une culture difficile, les seigneurs propriĂ©taires de terres ont, de tous temps, infĂ©odĂ© des por- tions plus ou moins considĂ©rables pour des redevances en grains, soit en froment, seigle ou avoine, et c'est le principal revenu d'une partie de ces terres. » Arch. nat., D xxix 29. 320 RENONCIATION DE VASSY A SES DROITS FÉODAUX ordres venus d'en haut, des ordres du roi ». Vassy leur promet un acte d'affranchissement de tous droits seigneuriaux, Ă  condi- tion de garder ses titres et, aprĂšs quatre heures de discussion, les plaignants, qui paraissent satisfaits, se retirent. Le lende- main, dans la matinĂ©e, nouvelle irruption d'une troupe plus nombreuse, composĂ©e de trois Ă  quatre cents personnes, armĂ©es de fusils, haches et bĂątons, menaçant de mettre le feu au chĂąteau, si le comte ne leur livre pas ses papiers. Je leur remis les clefs, ajoute ce dernier ; ils pillĂšrent tout, mais voulant avoir chacun ce qui les intĂ©ressait, le plus grand nombre ne sachant pas lire et toutes les Ă©tiquettes ayant Ă©tĂ© confondues par eux, ils m'ac- cusĂšrent alors de les avoir soustraits ; Ă  chaque instant, il en arrivait d'autres, presque tous ivres et armĂ©s, tous menaçant de brĂ»ler ma maison et de se porter aux derniĂšres extrĂ©mitĂ©s si je ne retrouvais pas leurs papiers, dont ils avaient Ă  mesure brĂ»lĂ© la plus grande partie. » Vassy passa une fort vilaine jour- nĂ©e et assista, impuissant, au pillage de sa maison, qui dura jusqu'Ă  la nuit tombante. Sa personne fut toutefois respectĂ©e et il dut son salut au souvenir des bienfaits qu'il avait rĂ©pandus dans ce canton, soulevĂ© par la haine de longs siĂšcles de tyrannie fĂ©odale l. Il fut d'ailleurs obligĂ©, comme SĂ©grie, Oilliamson et d'autres seigneurs normands, de renoncer Ă  ses droits, le 25 juillet, par acte notariĂ©, dont lecture publique fut donnĂ©e Ă  l'audience de sa haute justice et dont des expĂ©ditions furent dĂ©livrĂ©es, Ă  ses frais, aux cinq paroisses dĂ©pendant de la seigneurie '2. C'Ă©tait une perte de cent mille livres et la menace d'une ruine prochaine^1. Pendant la seconde moitiĂ© de juillet et la premiĂšre quinzaine d'aoĂ»t, la crainte d'une nouvelle Jacquerie terrorise la Basse- Normandie. L'affolement gagne villes et campagnes. Des bruits sinistres y circulent. Une troupe de brigands approche, dit-on, et va tout saccager. L'opinion accueille sans contrĂŽle les nou- 1 Je n'ai peut-ĂȘtre dĂ» la vie, Ă©crit-il, qu'Ă  ce qu'au milieu de leur fureur, rap- pelant aux moins emportĂ©s ce que j'avais toujours t'ait pour eux, ils rĂ©pĂ©taient Oui, nous ne vous ferons pas de mal, car vous avez toujours secouru les pauvres, vous nous avez toujours fait soigner dans nos maladies et jamais vous ne nous avez fait de procĂšs. » Arch. nat., D xxix 29. 2 Ces cinq paroisses Ă©taient Saint-Lambert, La Villette, Saint-Marc-d'Ouilly, Sallen et Saint-BĂ©nin. 3 Lettre du comte de Vassy au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, D xxix 29. — A Balleroy, le ebartrier du chĂąteau fut aussi brĂ»lĂ© sur la place publique. On avait joint au monceau de papiers entassĂ©s, tous les titres de droits seigneuriaux qu'on avait trouvĂ©s chez le notaire de la localitĂ©, Jean Dezert. Bidot, Histoire de Balleroy, p. 295. LA GRANDE PEUR DANS LE BESSIN ET LE GOTENTIN 321 velles les plus fantaisistes et une Ă©trange panique, la peur des brigands, la Grande peur » se dĂ©chaĂźne sur le pays. Nous pouvons en suivre les traces sur les divers points de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Le 24 juillet, un habitant de Bayeux, LĂ©onard de Rampan, apporte Ă  Caen la nouvelle que des vagabonds affligent les campagnes et brĂ»lent les chartriers ». On dĂ©cide d'organiser une troupe de volontaires nationaux pour les combattre et d'inviter les villes de Bayeux et de Saint-LĂŽ Ă  suivre cet exemple, afin de former une chaĂźne qui puisse servir de barriĂšre Ă  l'insurrection de ces hommes dangereux » lK Le mĂȘme jour, les nobles du bailliage de Vire, rĂ©unis dans cette ville, parlent des alarmes rĂ©pandues dans le pays par les incursions dont leurs propriĂ©tĂ©s et leurs personnes sont menacĂ©es » 2. Le 26 juillet, le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen, DuperrĂ© de Lisle, Ă©crit Ă  M. de LiancourL Les maux dont nous sommes menacĂ©s sont affreux ; des bandits se rĂ©pandent de toutes parts ; on brĂ»le, on pille et on enlĂšve les papiers dans tous les chartriers ; on arrĂȘte et on suspend la perception des dĂźmes du roi » 3. A Carentan, l'in- quiĂ©tude rĂšgne du 26 au 30 juillet, Le 26, le corps municipal annonce Ă  la bourgeoisie assemblĂ©e sur les remparts qu'il existe dans la province une troupe de bandits qui, profitant des trou- bles et des malheurs des temps, se portent dans les chĂąteaux et autres maisons rĂ©putĂ©es riches et y commettent les excĂšs les plus terribles ». Le mĂȘme jour, il reçoit de Dumouriez, qui est Ă  Cherbourg, une lettre sur le mĂȘme objet On m'a fait entendre, Ă©crit Dumouriez, qu'il y a une troupe de bandits qui rĂŽdent autour de Bayeux. Je vous prie, s'il se prĂ©sentait une troupe quelconque soit par les Veys, soit par la route de Saint-LĂŽ, de m'en avertir sur le champ et de prendre garde Ă  votre ville. Concertez-vous pour les moyens de votre sĂ»retĂ© avec M. de Versamy et amalgamez votre milice avec la troupe militaire comme cela se fait Ă  Cherbourg et Ă  Valognes. . . Il faut qu'au moins nous assurions la tranquillitĂ© de la presqu'Ăźle. » Suivant ces conseils, Carentan organise sa milice. Le 27 juillet une com- pagnie va au chĂąteau de Franquetot et en ramĂšne huit piĂšces de canon, appartenant au duc de Coigny. Le 29, le corps municipal ! Arch. comm., Caen, Bli 93. Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ance du 24 juillet. 2 Arch. connu., Vire, ms. Seguin. 3 Lettre de DuperrĂ© de Lisle Ă  M. de Liancourt, 26 juillet 1789. Arch. nat.. Ba27, 1. 45. 21 3Î2 LA '-MANDE PEU'R DANS LE BOCAGE ET LA CAMPAGNE DE CAEN confirme ses renseignements prĂ©cĂ©dents, annonce qu'il existe aux environs d'Aunay et dans le canton appelĂ© Bocage une troupe de bandits que quelques-uns font monter Ă  12 Ă  1,500 hom- mes, qui attaquent les chĂąteaux, brisent les meubles, brĂ»lent les char tri ers et se portent aux excĂšs les plus terribles », et il prend de sĂ©vĂšres mesures pour assurer l'ordre dans la ville l. Le 27 juil- let, sur les dix heures du matin, une fausse alerte se produit Ă  Cherbourg. Le bruit court qu'une troupe de bandits se dirige vers la ville pour la piller. On bat la gĂ©nĂ©rale. La milice nationale en armes se porte sur la route de Tourlaville pour guetter l'arrivĂ©e de l'ennemi qui, dit-on, doit venir de Valognes. Elle en est quitte pour la peur et, par des nouvelles rassurantes, revient dissiper une alarme sans objet comme sans vraisem- blance » W. A Cairon, village voisin de Caen, les paysans orga- nisent des patrouilles de nuit pour voir si contre toute attente les brigands viendront du Bocage dans la plaine » >>. A Caen, on parle d'attroupements qui se forment dans le voisinage, de gens malintentionnĂ©s qui veulent dĂ©molir la petite boucherie sise au bourg l'AbbĂ© l. Le directeur de la mine de Littry Ă©crit Ă  la date du 4 aoĂ»t La forĂȘt de Cerisy et les bois des environs sont farcis de brigands auxquels on fait la chasse nuit et jour. Des dĂ©taehe- ments de gens armĂ©s Ă  cheval, tant de Bayeux que de Balleroy, font des rondes et battent la forĂȘt. » Une semaine plus tard il ajoute Depuis les patrouilles qui se font ici on n'a plus entendu parler des brigands. On n'en a pas encore vu et tant mieux, car nos paysans se fatiguent » i7>. Le pĂ©ril est imaginaire, tout au moins fort exagĂ©rĂ© par la rumeur publique. Le moindre inci- dent a une rĂ©percussion intense. Apprend-on Ă  Caen qu'une troupe de sĂ©ditieux vient de dĂ©truire le colombier de la ferme d'Ajon, le 7 aoĂ»t, vite on croit Ă  une nouvelle invasion de bri- gands °. Un homme est arrĂȘtĂ© aux landes de Montbrocq, prĂšs de Villers-Bocage ; on le trouve armĂ© de pistolets. Il raconte que 1 Arch. eoram., Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ances des 26. 27 et 29 juil- let. A la suite de celle 1 1 1 26, transcription de la lettre de Dumouriez. 2 Arch. connu., Cherbourg, BB5, loi. 152. Registre des dĂ©libĂ©rations, 27 juillet 1789. Sur cette fausse alarme, voir une lettre de Dumouriez au prĂ©sident de l'Assem- blĂ©e nationale, du lĂ  octobre 1790. Arch nal., V 4691. 3 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des dĂ©libĂ©rations, 28 juillet 1789. 4 Ibid., 30 juillet 17». 5 dĂ©p., Calvados, Registre non inventoriĂ©. Copie Ăźle lettres du directeur de la mine de 1786 an II. 6} \rch. connu, Caen, Registre des dĂ©libĂ©rations, 7 aoĂ»t 1789. l'arrestation du duc de coigny 323 hommes le suivent, prĂȘts Ă  mettre le pays Ă  feu et Ă  sang. La nouvelle se propage, amplifiĂ©e par les commentaires; elle arrive Ă  Torigni qui envoie des messagers Ă  la recherche d'informations plus prĂ©cises et qui, dans la crainte d'un pillage, organise des pa- trouilles et fait allumer la nuit des chandelles Ă  toutes les croi- sĂ©es». f1 Un des Ă©pisodes les plus dramatiques de la Grande peur» en Basse-Normandie fut l'arrestation du duc de Coigny 2. Le 24 juil- let 1789, pendant que les citoyens de Bayeux procĂ©daient Ă  la formation de leur garde nationale, une Ă©trange nouvelle tomba Ă  l'improviste dans la ville. Des gardes-pĂȘche de Ver venaient d'arrĂȘter deux individus sans passeports, qui demandaient Ă  ĂȘtre embarquĂ©s pour les Ăźles anglaises et offraient aux matelots une bourse pleine d'or longue d'une aune ». InquiĂ©tude et dĂ©fiance immĂ©diates, vive Ă©motion populaire il faut s'assurer de la personne des fugitifs, qui sont de prime abord suspects. Le lieutenant gĂ©nĂ©ral de l'amirautĂ©, Philippe Delleville, magistrat trĂšs populaire Ă  Bayeux, et commandant provisoire de la milice en formation, part en voiture de poste vers la mer. ArrivĂ© Ă  la descente de Pierre-Solain, Ă  deux heures de Bayeux, il rencontre une voiture attelĂ©e de quatre chevaux, entourĂ©e d'une escorte de paysans armĂ©s. Il reconnaĂźt aussitĂŽt les deux voyageurs qu'elle renferme ce sont le duc de Coigny, dĂ©putĂ© de la noblesse de Caen aux Etats gĂ©nĂ©raux, et son secrĂ©taire. Le duc explique sa situation. Parti de Versailles quelques jours auparavant pour rĂ©gler des affaires personnelles Ă  son chĂąteau de Franquetot, dans le Cotentin, il a pris le chemin du retour vers l'AssemblĂ©e nationale. A son passage par Bayeux, il a Ă©tĂ© informĂ© des troubles de Caen et des menaces profĂ©rĂ©es contre sa personne. DĂ©sireux d'Ă©viter la traversĂ©e de cette ville, il a cru prudent de gagner la cĂŽte, de frĂ©ter une embarcation qui le mĂšnerait Ă  Honfleur ou au Havre, et lui permettrait de regagner Versailles. ArrĂȘtĂ© par des pĂȘcheurs, il demande Ă  ĂȘtre menĂ© chez le maire de Bayeux pour s'y justifier de toute accusation. Delleville use de son autoritĂ© de magistrat pour renvoyer l'escorte, en lui promettant de garder les prisonniers. Mais, ] Arch. comm., Torigni, D 36. Registre des dĂ©libĂ©rations, 6, 12 et 15 aoĂ»t 1789. 2 Sur l'arrestation du duc de Coigny, voir Arch. comm., Bayeux, D 12. Registre des dĂ©libĂ©rations, 21 juillet 1789 et jours suivants. Ce document a Ă©tĂ© utilisĂ© succes- sivement par Pezet, Essais sur l 'Administration de la Justice dans le Bessin,p. 184 sqq., et Bayeux Ă  lu fin du XVIIIe siĂšcle, p. 118 sqq., et par Anquetil, Une Page d'Histoire bayeusaine, Philippe Delleville. Bayeux, 1877. 3?4 consĂ©quences de la grande peur convaincu de la sincĂ©ritĂ© des dĂ©clarations du duc et craignant que son arrivĂ©e Ă  Bayeux n'y soit le prĂ©texte d'une insurrection, il lui fait reprendre la route de Ver et protĂšge son embarquement. De retour Ă  Bayeux, Delleville devient l'objet des pires soupçons. Les exaltĂ©s l'accusent d'avoir favorisĂ© l'Ă©migration d'un prince. Sur le rapport de deux avocats, Duhamel de Vailly et Gandin de Villers, qui lui reprochent d'avoir violĂ© ses engagements et sur les dĂ©nonciations d'un domestique de Chouains, il est arrĂȘtĂ© et emprisonnĂ©. Un ComitĂ© gĂ©nĂ©ral improvisĂ© dans ces circonstances critiques nomme une commission spĂ©ciale, qui fait subir au prisonnier de longs interrogatoires. Son procĂšs dure depuis quatre jours. L'Ă©motion populaire croissant, Delleville est menacĂ© d'un vilain parti, lorsqu'arrive dans la riuit du 30 juillet un courrier de cabinet extraordinairement envoyĂ© de Versailles. Necker annonce aux officiers municipaux le retour de Coigny aux Etats gĂ©nĂ©raux et les invite Ă  contribuer efficacement Ă  faire rendre la libertĂ© Ă  Delleville ». De son cĂŽtĂ© le duc de Coigny expose au maire de Bayeux, dans une lettre attristĂ©e, son Ă©tonne- ment et ses regrets. J'avoue, dit-il, que je me croyais fort Ă  l'abri que mes dĂ©marches, en aucun pays et surtout en Nor- mandie, pussent ĂȘtre suspectes, ne m'Ă©tant jamais mĂȘlĂ© d'in- trigues, ni mĂȘme de tracasseries, faisant le bien quand je l'ai pu ; j'ai toujours vĂ©cu, du moins je le croyais, avec une rĂ©pu- tation intacte. Jugez avec quel chagrin j'ai appris que j'avais compromis aussi cruellement M. Delleville. Il me connaissait bien et savait que, sans avoir l'honneur mĂȘme d'ĂȘtre dĂ©putĂ©, j'Ă©tais incapable d'abandonner mon pays. Il faut ĂȘtre ou cou- pable ou bien faible. Ce n'est pas Ă  cinquante-sept ans qu'on devient ni l'un ni l'autre. . . » Pour calmer l'effervescence populaire, la municipalitĂ© lait imprimer et afficher ces lettres. Delleville est mis en libertĂ©. Un arrĂȘtĂ© du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral proclame son innocence et dĂ©clare qu'il a toujours Ă©tĂ© un citoyen sans reproche. La tranquillitĂ© renaĂźt subitement, la dĂ©fiance fait place Ă  un enthousiasme sans bornes. Les sentiments les plus extrĂȘmes se succĂšdent dans l'affolement gĂ©nĂ©ral de tout un peuple. Cette terreur contagieuse, nĂ©e de pĂ©rils imaginaires, eut de graves consĂ©quences. Elle rendit le peuple inquiet et soupçonneux. Il serait excessif de dire avec Beugnot que la peur des brigands enfanta le brigandage » *. Elle devait au contraire faire surgir 1 Beugnot, MĂ©moires, t 1, p. 47?. Kropotkiue me parait avoir mieux compris le RIVALITÉ DE LA COMMISSION INTERMÉDIAIRE ET DE L INTENDANT 325 les mesures d'ordre, les milices citoyennes et les ComitĂ©s natio- naux. Mais comme elle avait profondĂ©ment remuĂ© les masses, comme elle les avait armĂ©es avant toute organisation, comme elle avait entretenu chez elles la dĂ©fiance et souvent la haine, elle crĂ©a un malaise politique et social d'une certaine durĂ©e, qui accrut l'anarchie dans le pays. En face de cette anarchie, que pouvait le gouvernement et que pouvait l'administration? Quand l'intendant de Caen reçut l'ordonnance du 9 aoĂ»t sur la prĂ©vention et la rĂ©pression des troubles d\ possĂ©dait-il l'autoritĂ© nĂ©cessaire pour l'exĂ©cuter? Il n'avait plus, dans sa gĂ©nĂ©ralitĂ©, qu'une part restreinte de pouvoir ; l'autre Ă©tait possĂ©dĂ©e par la Commission intermĂ©diaire provinciale. Or la rivalitĂ© continue de ces deux administrations paralysait leur action respective. Pendant cette pĂ©riode, la Commission intermĂ©diaire, secondĂ©e par les bureaux intermĂ©diaires de dĂ©partement, se borna Ă  rĂ©par- tir l'impĂŽt et Ă  surveiller les travaux des routes. wSa gestion administrative entravĂ©e, comme nous l'avons vu, par de nom- breux obstacles 2, n'eut pas de trĂšs heureux rĂ©sultats. PrĂ©occu- pĂ©e surtout de rĂ©aliser des Ă©conomies, acculĂ©e Ă  une situation financiĂšre plutĂŽt dĂ©sastreuse, elle contribua indirectement Ă  la misĂšre publique en supprimant des travaux qu'elle considĂ©rait comme ruineux. Elle augmenta la classe des indigents sans pou- voir leur donner aucune compensation. Bien que le souci du Bien public » fĂ»t au premier rang de ses devoirs, elle sembla nĂ©gliger la question des approvisionnements. Necker tĂ©moigne Ă  l'intendant, le 15 janvier 1789, sa surprise de ce que la Commission intermĂ©diaire ne lui ait pas Ă©crit un mot sur la grande Ă©meute de Caen, du 5 janvier 3. Cordier de Launay, dans sa rĂ©ponse, lui rĂ©itĂšre ses plaintes contre l'indiffĂ©rence de caractĂšre de ce mouvement lorsqu'il Ă©crit Ce qu'on nomma alors la grande peur o saisi! en effet un bon nombre le villes dans les rĂ©gionr. de soulĂšvements. » Les Ă©vĂ©nements de Carentan, de Cherbourg et de Baveux racontĂ©s dans ce chapitre viennent donner raison Ă  sa thĂšse. Mais Kropotkine pousse celle-ci 1res loin quand il affirme que la bourgeoisie, non contente de s'armer pour repousser les brigands, inverto quelquefois ceux-ci pour trouver prĂ©texte Ă  s'armer. Kropotkine, La Grande RĂ©volution, p. 152-153. 1 Ordonnance du roi, enjoignant de prĂ©venir les dĂ©lits commis par des troupes de brigands rĂ©pandues dans le royaume, qui s'attachent Ă  tromper les habitants de plusieurs communautĂ©s, etc. 9 aoĂ»t 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2685. 2 Voir ci-dessus, chap. VI, p. 122-129. 3 Lettre de Necker Ă  l'intendant Cordier de Launay. 15 janvier 1789. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 2665. 326 CONFLIT Al SUJET Dj; LA CORVÉE cette Commission. Il n'y a, dit-il, que le lieutenant de police, les officiers du bailliage et moi qui, agissant de concert, aient pris des mesures relatives Ă  l'approvisionnement de la ville et au rĂ©tablissement de l'ordre ». MĂȘmes rĂ©criminations quelques mois plus tard J'ai enfin dĂ©terminĂ©, Ă©crit-il Ă  l'intendant Montaran, l'AssemblĂ©e provinciale, qui consomme presque tous les fonds ci-devant employĂ©s en bienfaisance et en au- mĂŽnes, Ă  venir un peu au secours d'une dĂ©tresse que la nature a dĂ©veloppĂ©e plus tĂŽt qu'on ne pouvait s'y attendre, mais qui vient en partie dans notre gĂ©nĂ©ralitĂ© des suites de l'Ă©tablisse- ment des AssemblĂ©es provinciales et de la suppression de la Compagnie des vivres. Le dĂ©faut des aumĂŽnes, en effet, a coĂ»tĂ© la vie cet hiver Ă  des milliers de citoyens ; la suppression de presque tous les travaux publics et le dĂ©faut de paiement a des entrepreneurs et par suite de leurs ouvriers produisent partout des essaims d'oisifs et de pauvres. J'en ai cinquante sur les bras depuis cinq mois. Chacun s'Ă©puise. . . La misĂšre tient plus Ă  la dĂ©sorganisation de l'administration . . . qu'au manque d'espĂšces » *. L'intendant se dĂ©courage. Son activitĂ© se dĂ©pense vainement en ordres discutĂ©s et mal obĂ©is. Son administration est une lutte de tous les instants contre les pouvoirs officiels ou spontanĂ©s, qui *o nt surgi auprĂšs du sien. Ses relations avec la Commission intermĂ©diaire sont toujours tendues ; un vĂ©ritable conflit, qui Ă©clate Ă  propos de la corvĂ©e, retarde pendant plus de six mois le recouvrement de cet impĂŽt et aggrave une situation dĂ©jĂ  trĂšs compromise *; Les rĂŽles de la taxe reprĂ©sentative de la corvĂ©e avaient Ă©tĂ© dressĂ©s dans le courant d'octobre 1788 par les assem- blĂ©es municipales. L'intendant devait les rendre exĂ©cutoires ; il s'appuya, pour ajourner son visa, sur deux arrĂȘts du Parlement et de la Cour des Aides de Rouen. A la demande de la Commis- sion intermĂ©diaire, le roi avait, par ses lettres patentes du 27 jan- vier 1789,ÂŁlevĂ© l'opposition des deux cours normandes. Ces lettres 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2639. — La Commission intermĂ©diaire, sur laquelle l'intendant rejetait ainsi une partie de la responsabilitĂ©, avait cependant distribuĂ©, en 1789, 35,000 livres environ en secours aux indigents, sinistres, aveugles, pĂšres de nombreuses familles, etc., comme le prouve le Compte-rendu de sa gestion publiĂ© en 1790, p. 87 et 97. 2 Ibid., C 8256. — Cf. F. Mourlot, Rapports d'une AssemblĂ©e provinciale et de sa Commission intermĂ©diaire avec l'Intendant, 1787-1790, p. 17-18. Extrait du Bulletin des Sciences Ă©conomiques et sociales du ComitĂ© des Travaux historiques et scientifiques, annĂ©e 1902. RÉSISTANCE PROLONGÉE UE L INTENDANT 327 furent enregistrĂ©es, mais avec des modifications qui permirent Ă  Cordier de Launay de faire de nouvelles objections au sujet du visa des rĂŽles. Par ses dĂ©marches personnelles et rĂ©itĂ©rĂ©es, le prĂ©sident de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen, le duc de Coigny, obtint un arrĂȘt du Conseil le 7 mai 1789, qui, sans tenir compte des modifications insĂ©rĂ©es par le Parlement et la Cour des Aides de Rouen dans leur arrĂȘt, ordonnait l'exĂ©cution immĂ©diate des ordres du 24 janvier. Necker invitait l'intendant Ă  faire mettre au plus tĂŽt en recouvrement les rĂŽles de la corvĂ©e. Enfin, Ă©crvit Coigny Ă  la Commission intermĂ©diaire, nous pourrons bientĂŽt faire honnneur aux engagements de l'administration provin- ce ciale ». Il avait comptĂ© sans la rĂ©sistance de Cordier de Launay. Celui-ci exigea la rĂ©daction par la Commission intermĂ©diaire d'un arrĂȘtĂ© nouveau qui fĂ»t conforme aux dispositions de l'arrĂȘt du 7 mai. La loi qui m'est imposĂ©e, Ă©crit-il, Ă©mane de la volontĂ© du Roi ; il ne m'appartient pas d'y porter atteinte, ni d'auto- riser de mon chef aucun acte qui y dĂ©roge. Il m'est impossible pour cette raison de rendre exĂ©cutoires ces rĂŽles. J'ai prĂ©sentĂ© cette difficultĂ© au ministre et j'attendrai ses ordres. Si sa dĂ©ci- sion porte que la somme entiĂšre mentionnĂ©e dans chaque rĂŽle sera acquittĂ©e par les contribuables, je citerai son ordre en tĂȘte de mon ordonnance, et je ne paraĂźtrai pas aux yeux des habi- tants de la province le seul agent immĂ©diat d'un surcroĂźt d'im- pĂŽt dont vous leur avez donnĂ© l'espoir d'ĂȘtre soulagĂ©s ». Sa rĂ©sistance dura jusqu'au mois d'aoĂ»t, oĂč Necker, revenu au pouvoir, lui donna de façon ferme l'ordre de rendre immĂ©diate- ment exĂ©cutoires les rĂŽles de la prestation des chemins. Ce trop long dĂ©bat, qui avait retardĂ© la levĂ©e des deniers nĂ©cessaires aux travaux des routes et jetĂ© le plus grand dĂ©sarroi dans la vie des entrepreneurs et ouvriers employĂ©s Ă  ces travaux, s'Ă©tait en somme terminĂ© Ă  la confusion de l'intendant. De jour en jour, Cordier de Launay se rendait compte davan- tage du peu d'importance que le gouvernement attachait Ă  son concours. Il en avait dĂ©jĂ  manifestĂ© sa surprise, non sans amer- tume. Vous conviendrez sans doute, Ă©crivait-il Ă  Montaran, le 18 avril 1789, qu'il est bien singulier qu'un intendant de pro- vince soit le dernier instruit de ce qui intĂ©resse si essentielle- ment les sujets du Roi et qu'il se trouve rĂ©duit Ă  apprendre d'un simple nĂ©gociant quelles ont Ă©tĂ© les dĂ©cisions du Conseil sur un objet confiĂ© Ă  son administration immĂ©diate et qu'il est de son devoir de surveiller. » Il se plaint de ce qu' on affecte de ne plus avoir de correspondance avec lui... Ce 328 DÉCOURAGEMENT DE L'INTENDANT dĂ©faut d'Ă©gards est dĂ©courageant et fait perdre dans l'esprit public la considĂ©ration nĂ©cessaire pour le bien du Roi » {lK DĂ©jĂ  entamĂ©e par la rivalitĂ© de la Commission intermĂ©diaire provinciale, l'autoritĂ© de l'intendant va souffrir davantage encore des empiĂ©tements des pouvoirs rĂ©volutionnaires nouvellement surgis. Dumouriez, qui joue un rĂŽle des plus actifs, comme commandant du port de Cherbourg, fait partir trois cents sacs de blĂ© pour Saint-LĂŽ et Isigny et charge de cet envoi le subdĂ©- lĂ©guĂ© Garantot Ă  l'insu de Cordier de Launay, qui proteste contre de tels ordres '-l A Saint-LĂŽ, un comitĂ© d'approvisionnement, Ă©tabli dans la ville, en juin 1789, par le duc de Beuvron, discute et arrĂȘte en toute souverainetĂ©, sans avoir Ă©gard aux instructions ministĂ©rielles, tout ce qui a trait Ă  la police des grains ?. Cordier de Launay mĂ©connaĂźt ces tentatives d'Ă©mancipation locale. Il veut les ignorer, au moment mĂȘme oĂč il les condamne. On s'isole, on contrevient aux rĂšglements, Ă©crit-il Ă  son subdĂȘ- lĂ©guĂ© de Saint-LĂŽ. . . Je ne sais ce que c'est que le comitĂ© dont vous me parlez. Tout ce que je sais, c'est que le pouvoir judi- claire, c'est-Ă -dire le bailliage et la police qui en fait partie, doivent s'occuper de la police du marchĂ©, de la proportion du pain avec le blĂ© et du jugement des coupables ; que le pouvoir '-militaire doit prĂȘter main forte pour l'exĂ©cution des rĂšglements et lois et non autrement ; qu'enfin le pouvoir d'administration civile, dont vous ĂȘtes membre en qualitĂ© de subdĂ©lĂ©guĂ©, doit agir pour ce qui le concerne. Tous ces pouvoirs se meuvent sĂ©parĂ©ment et ne se concertent que pour concourir au mĂȘme but. Tout le reste est chaos et incompĂ©tence » W. Il est obligĂ© de constater que sa puissance s'affaiblit de jour en jour. Ses subordonnĂ©s immĂ©diats, les subdĂ©lĂ©guĂ©s, ne sont plus que des collaborateurs impuissants, dĂ©couragĂ©s. Ils sont, Ă©crit-il dĂšs le 9 avril, sans appointements et n'ont pour l'exercice de leurs fonctions pĂ©nibles aucun traitement particulier. On leur a enlevĂ© leur crĂ©dit et la considĂ©ration dont ils jouissaient. . . Ils n'ont ni un homme ni un Ă©cu Ă  leur disposition pour envoyer 1 Lettre de l'intendant Cordier de Launay Ă  Monta ran, 18 avril 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2639. 2 Lettre du mĂȘme Ă  Garanlot, 22 juin 1789. Ibid., C 2679. . 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2639. 2 Lettre de Robillard, 11 mai 1789. ĂŻbid., C 2675. 3 Lettre de Launay Ă  son secrĂ©taire, 22 aoĂ»t 1789. -Arch. dĂ©p., Calvados, C 2610. Il lui envoie la circulaire que celui-ci doit adresser aux subdĂ©lĂ©guĂ©s pour demander les renseignements d'usage sur le produit des rĂ©coltes. Il ajoute en post- scriptum Ă  la lettre destinĂ©e au subdĂ©lĂ©guĂ© de Coutances M. Duparc m'ayanl l'ait la remise de sa commission, vous voudrez bien vous occuper des dĂ©tails relatifs aux paroisses de sa subdĂ©lĂ©gation. Couraye avait dĂ©missionnĂ© le 10 aoĂ»t. 4 Arch. comrn., Granville, Registre des dĂ©libĂ©rations de l'hĂŽtel de ville, sĂ©ance du 10 aoĂ»t 1789. 5 Lettre de Necker Ă  Launay, 14 janvier 1789. Arch. dĂ©p., Calvados. C 2665. 6 Lettre de Garantot Ă  Lamy- DesvallĂ©es. 30 octobre 1789. Ibid., C 2679. 7 Cordier de Launay, Ă©crivant, de Versailles le 2 aoĂ»t 1789 au ComitĂ© national de 330 l'anarchie Le secrĂ©taire de L'intendance dirige les bureaux et expĂ©die les affaires courantes, en attendant l'heure prochaine de la liqui- dation tt. La desorganisation administrative est complĂšte et le lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Caen peut Ă©crire Chaque jour est tĂ©moin d'actes de violence multipliĂ©s. La force a pris la place de la loi. Le pouvoir exĂ©cutif est sans activitĂ© et le pouvoir judiciaire ne peut s'exercer. Daigne l'AssemblĂ©e nationale mettre fin Ă  une anarchie qui tend Ă  bouleverser tout le royaume » 3. Tous les a citoyens honnĂȘtes, de quelque ordre que ce soit, ajoutait-il, se rĂ©unissent pour conjurer l'AssemblĂ©e de s'occuper sans dĂ©lai, de concert avec le Roi, des moyens de rĂ©tablir l'ordre et la tran- quillitĂ©. » Pour rĂ©aliser ce vƓu il fallait permettre Ă  tous les dĂ©putĂ©s de prendre une part effective aux sĂ©ances de l' AssemblĂ©e. Or les dĂ©putĂ©s nobles des deux bailliages de Caen et de Cotentin, liĂ©s par leurs mandats impĂ©ratifs, avaient dĂ» se tenir Ă  l'Ă©cart des dĂ©libĂ©rations importantes. Une telle abstention ne pouvait qu'aggraver le malentendu entre les paysans et la noblesse, et augmenter les suspicions contre celle-ci. EffrayĂ©s par la Jacquerie naissante, les gentilshommes du bailliage de Caen rĂ©solurent de se rassembler pour prendre une dĂ©libĂ©ration convenable aux circonstances et faire accorder Ă  leurs dĂ©putĂ©s des pouvoirs gĂ©nĂ©raux et sans limitation ». La rĂ©union, fixĂ©e au 25 juillet, ne put avoir lieu Ă  cause des troubles qui agitaient Caen Ă  cette Ă©poque 3. Mais le duc de Coigny, pendant le court voyage de Normandie qui s'Ă©tait terminĂ© par l'incident dramatique de Bayeux, avait pu voir nombre de ses commettants. Ils lui expri- mĂšrent leur intention de voir annuler tout pouvoir impĂ©ratif et Caen, annonce que Necker . Le duc de Coigny put dĂ©clarer le 27 juillet Ă  l'AssemblĂ©e nationale que les dĂ©putĂ©s nobles de Caen Ă©taient autorisĂ©s Ă  concourir au bien qu'elle opĂ©rerait, qu'ils prenaient donc voix dĂ©libĂ©rative et adhĂ©raient Ă  tout ce qui pouvait avoir Ă©tĂ© fait en leur absence » 2. La noblesse du Cotentin, poussĂ©e par les mĂȘmes mobiles, s'Ă©tait rĂ©unie Ă  Coutances autour d'Achard de Bonvouloir. La majoritĂ©, dĂ©sireuse du bien gĂ©nĂ©ral, consentit sans aucune restric- tion Ă  l'Ă©galitĂ© des impĂŽts sans distinction d'ordres \t->. Le ComitĂ© de Granville naquit d'une situation des plus trou- blĂ©es. Couraye-Duparc, que ses triples fonctions de subdĂ©lĂ©guĂ©, de vicomte et de maire par brevet royal prĂ©disposaient Ă  l'impo- pularitĂ©, avait Ă©tĂ© chargĂ© par l'administration de la vente de sacs de blĂ© destinĂ©s Ă  l'approvisionnement de Granville. Un envoi de 575 sacs, pris sur cette masse, Ă  la municipalitĂ© de Saint-Servan, le fit accuser de malversations. Un mĂ©content, Quinette de Cloizel, le dĂ©nonça dans les cabarets et au bas de Mauduit, ancien maire de Vire et conseiller au bailliage, Ă  l'intendant. 9 sep- tembre; 1789, Arch. dĂ©p., Calvados, C 2688. I Arcb. comm., Tinchebrai. Registre les dĂ©libĂ©rations, 30 juillet 1789. i-2 Ihid., Torigni, D 36. Registre des arrĂȘtĂ©s et des dĂ©libĂ©rations du ComitĂ© natio- nal de Torigni, 4 aoĂ»t 1789. — Dans une dĂ©libĂ©ration de dĂ©cembre 1789, il est l'ait mention de la lecture des dĂ©libĂ©rations constitutionnelles en comitĂ© des mois de juillet et aoĂ»t derniers ». 3 Arch. comm., PĂ©riers, Registre des dĂ©libĂ©rations, 23 aoĂ»t 1789. — Cf. Lerosay, Histoire de PĂ©riers, p. 109-110. LE COMITÉ DE GRANVILLE 339 peuple » euninie un accapareur de grains qu'il serait bon de pendre ». On accusa aussi Couraye-Duparc de tramer un complot avec le commandant de la place pour le massacre des habitants. Dans la nuit du 1er aoĂ»t, un placard incendiaire fut affichĂ© Ă  sa porte. Le lendemain, deux citoyens dĂ©posent une pĂ©tition des notables demandant la rĂ©union d'une assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des habitants, afin d'aviser Ă  la sĂ»retĂ© publique. Cette assemblĂ©e se tient le soir mĂȘme, Ă  5 heures, dans l'auditoire de la ville. Qui- nette y dĂ©nonce les frĂ©quentes absences du maire, l'infirmitĂ© d'un officier municipal, et demande l'adjonction de quatre conseillers au corps municipal, avec droit de participation aux sĂ©ances et aux dĂ©libĂ©rations. Sa motion est repoussĂ©e *;. Quelques jours plus tard, le 6 aoĂ»t, Ă©clate une Ă©meute amenĂ©e par la chertĂ© du pain. La foule va briser les vitres d'un apothicaire. La muni- cipalitĂ© est obligĂ©e d'abaisser la taxe du pain et de voter une indemnitĂ© aux boulangers. Le commandant du roi Ă  Granville, de PrĂ©fort, s'est rendu suspect par ses tendances aristocrates. Ses vexations et ses abus de pouvoir le dĂ©signent Ă  la vindicte publique ; on lui reproche surtout de se prĂȘter avec indiffĂ©rence Ă  la dĂ©fense de la ville. Le Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune arrĂȘte sa dĂ©chĂ©ance le 10 aoĂ»t et lui redemande les clefs de Granville. Saisi de crainte, PrĂ©fort les abandonne et demande un passe- port. Le jour mĂȘme oĂč le dĂ©part du commandant rompt les liens d'obĂ©issance qui attachaient Granville au reprĂ©sentant militaire du pouvoir central, Couraye-Duparc donne au Conseil gĂ©nĂ©ral sa dĂ©mission de subdĂ©lĂ©guĂ© il cesse d'ĂȘtre un agent du roi pour rester maire de Granville et se consacrer tout entier au service de ses concitoyens. Le lendemain 11 aoĂ»t, dans une nouvelle sĂ©ance du Conseil gĂ©nĂ©ral, il expose la gravitĂ© de la situation. Dans presque toutes les villes, ajoute-t-il, la libertĂ© des citoyens et la sĂ»retĂ© publique sont remises- aux soins des habitants par les officiers qu'ils se sont choisis, et qu'ils ont formĂ©s en ComitĂ© national ; il pourrait y avoir lieu d'en Ă©tablir un Ă  Granville, afin d'assurer l'activitĂ© du service public. Le Conseil gĂ©nĂ©ral dĂ©cide la formation d'un ComitĂ© de vingt-cinq membres et procĂšde Ă  sa constitution immĂ©diate. Il comprend en premier lieu les cinq membres du Conseil municipal, dĂ©putĂ©-nĂ© du ComitĂ© national ». I Arch. coinm., Granville, Registre des dĂ©libĂ©rations, 2 aoĂ»t 178'J. Cf. une lettre de Couraye-Duparc Ă  l'AssemblĂ©e nationale, du 7 septembre 1789. Ou fiL. Ă©crit Duparc, la motion de donner des conseillers au conseil municipal. » Arch. nat., D xxix 40. 340 LES COMITÉS DEHANCHES ET DE MORTAIN Restent vingt membres Ă  nommer ; l'assemblĂ©e en dĂ©signe {lia Ire par acclamation, le chevalier de LĂ©glize, commandant de la garnison, de Massely, chef des classes, Manduit, commis- saire aux classes de la marine, de Belprey, chef du corps royal du gĂ©nie, et Ă©lit les seize autres au scrutin. Le nouveau ComitĂ© est spĂ©cialement investi de l'autoritĂ© nĂ©cessaie pour assurer la libertĂ© des citoyens, la sĂ»retĂ© et la tranquillitĂ© publiques fl. A Avranches, le ComitĂ© gĂ©nĂ©ral et national met trois jours Ă  se constituer, du 22 au 25 aoĂ»t 1789. Les neuf compagnies de volontaires Avranchins, assemblĂ©es au bois des Capucins, nom- ment quarante-cinq Ă©lecteurs, six par compagnie, qui le 24 aoĂ»t dĂ©signent les vingt-cinq membres du ComitĂ©. On y relĂšve les noms des principaux notables TesniĂšre de BrĂ©mesnil, Bacilly, maire, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, Payen de Chavoy, Vivien, membres du bureau intermĂ©diaire de dĂ©partement, Blondel, procureur-syndic. Ces vingt-cinq dĂ©putĂ©s Ă©lisent BrĂ©mesnil comme prĂ©sident et se divisent en six bureaux de quatre mem- bres. Le ComitĂ© national d'Avranches se dĂ©clare en permanence, s'adjoint le commandant et le major de la milice nationale. Il se donne pour mission de correspondre avec les dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux, de veiller Ă  la sĂ©curitĂ© publique, aux subsistances ; il prĂ©tend au droit de rĂ©quisition sur tous les dĂ©positaires de la puissance judiciaire 2l MĂȘme rĂ©volution municipale Ă  Mortain, qui, formĂ©e de trois communautĂ©s sĂ©parĂ©es, avait trois municipalitĂ©s en vertu de l'Ă©dit de 1787, et qui y substitua une municipalitĂ© unique, vĂ©ri- table ComitĂ© national, en arrĂȘtant les bases d'une administration nouvelle 3. A Coutances, Saint-LĂŽ, Valognes, mĂȘmes formations sponta- nĂ©es que nous pouvons constater malgrĂ© les lacunes de l'histoire municipale 4J. Des villes de moindre importance, comme CondĂ©- 1 Arch. comm., Granville, Registre des dĂ©libĂ©rations, 10 et 11 aoĂ»t 1789. 2 Jhi41 sur-Noireau l , Isigny 2, Sain t-Sauveur-le- Vicomte I3, Saint- Sauveur-Lendelin 4, des bourgs comme Villedieu 5, Monte- bourg es membres, le citoyen de la Rue, ancien premier capi- taine de la garde nationale. 18 frimaire an XI Bibl. nat.. nouv. acq. fr. ms. 4401 ; de la Rue raconte le rĂŽle qu'il joua dans l'affaire Belzunce ; — 3° Les journaux de l'Ă©poque Le Journal des RĂ©volutions de Paris. n° du 22 aoĂ»t ; Le Moniteur, annĂ©e 1789, n° 30 ; Le Mercure de France, n0' des 22 aoĂ»t et 12 septembre 1789. — Voir aussi Dumouriez. MĂ©moires, Ă©d. Berville. t. II, p. 52-51; Chateaubriand, MĂ©moires d outre- tombe Ă©d. BirĂ©i, t. II, p. 17 F. Vaultier. Souvenirs de l'Insurrection normande. Appendice, p. 299-303 ; et E. de Beaurepaire. L'Assassinat du major de Belzunce. Revue de la RĂ©vo- lution. 1884, I. III, p. 109-129, et t. IV. p. 26-17. 1 Sur cite fĂȘte du 29 juin 1789 et les inscriptions qui ornaient la pyramide, voir d'intĂ©ressants dĂ©tails dans le ms, de Dufour, MĂ©moires el Remarques, I. I, p. 30. l'Ă©meute du 11 aoĂ»t 1789 345 allant jusqu'Ă  tirer sur un citoyen un coup de pistolet dont heu- reusement l'amorce ne partit pas. Cette aventure lui avait valu plusieurs jours d'arrĂȘt et le redoublement de la haine publique. Il ne pouvait souffrir que la garde nationale se fĂ»t emparĂ©e du chĂąteau et se vantait de le reprendre bientĂŽt. Des bruits Ă©tranges couraient sur ses projets son insistance Ă  coucher Ă  la caserne depuis plusieurs nuits, le sens Ă©nigmatique d'un serment qu'il avait fait prĂȘter Ă  ses troupes, le rassemblement prĂ©sumĂ© de cartouches et de munitions de guerre, tout le rendait suspect au peuple l. De telles imprudences avaient dĂ©terminĂ© le ComitĂ© national Ă  solliciter du duc d'Harcourt l'Ă©loignement deBelzunce ; il refusa de partir. Le moindre incident pouvait dĂ©chaĂźner l'Ă©- meute. Le 11 aoĂ»t, deux soldats du rĂ©giment d'Artois, se trouvant de passage Ă  Caen, s'attablaient au cabaret avec deux soldats du rĂ©giment de Bourbon. Ils portaient Ă  la boutonniĂšre une mĂ©- daille Ă  l'effigie de Necker dont la municipalitĂ© de Rennes les avait dĂ©corĂ©s. Une rixe Ă©clata bientĂŽt, leurs dĂ©corations furent arrachĂ©es. Ils allĂšrent se plaindre au ComitĂ© gĂ©nĂ©ral, qui en rĂ©fĂ©ra au duc d'Harcourt. On leur rendit leurs mĂ©dailles et leurs agres- seurs furent punis. L'affaire paraissait rĂ©glĂ©e. Il Ă©tait une heure de l'aprĂšs-midi. Sur les trois heures, un autre soldat du rĂ©giment d'Artois, cachĂ© Ă  Vaucelles, se plaint d'avoir Ă©tĂ© menacĂ© et maltraitĂ© par le major du rĂ©giment de Bourbon. La fermentation augmente. La foule s'assemble rue Saint-Jean et place Saint-Pierre ; elle demande Ă  grands cris le dĂ©part deBelzunce. A dix heures du soir, un coup de fusil donne le signal de l'Ă©meute. Une sentinelle de la garde bourgeoise l'a tirĂ© au pont de Vaucelles sur un officier du rĂ©giment de Bourbon qui s'obstine Ă  passer malgrĂ© la consigne et qui joint les menaces Ă  la rĂ©sistance. Cet officier est tuĂ©. Le tocsin sonne aussitĂŽt, l'alarme se rĂ©pand. Le peuple court Ă  la citadelle, y enlĂšve de force des armes, des munitions, en dĂ©loge les canons. Il envahit la salle du ComitĂ© 1 Peu aprĂšs la mort de Belzunce, parut un libelle intitulĂ© Les nouveaux pro jets de la cabale dĂ©voilĂ©s, ou Lettre du prince de Lambesc au marquis de Belzunce. interceptĂ©e trois jours aprĂšs la mort de ce dernier, piĂšce imprimĂ©e, in-16, 15 p., de l'imprimerie de la municipalitĂ© de Caen, Bibl. nat., Lb 39 2280. Cette lettre, censĂ©e Ă©crite de Vienne le 30 juillet par Lambesc, mettait Belzunce au courant des efforts des alliĂ©s pour envahir la France et chauffer les culottes aux impudents qui les ont contraints de reculer ». L'origine de ce document, surpris au chef d'une troupe ambulante de chanteurs Ă©trangers », me paraĂźt trĂšs suspecte. o46 LE MEURTRE DE BELZUNCE national, alors en sĂ©ance de nuit. BientĂŽt arrive Belzunce qu'on vient d'arrĂȘter aux casernes, et qu'escorte un dĂ©tachement de la garde nationale. On le met en accusation pins de cent voix le somment de mettre bas ses armes. 11 tombe sur une chaise, la tĂȘte clans les deux mains, comme un homme affaissĂ© de fatigue ». Dans le vestibule, dans la cour de l'hĂŽtel de ville, au dehors le peuple impatient gronde il veut briser portes et fenĂȘ- tres, envahir la salle des sĂ©ances, arracher Belzunce au ComitĂ© qu'il accuse de trahison. La rĂ©sistance vigoureuse des volon- taires nationaux l'Ă©cartĂ© et la refoule sur la place Saint-Pierre. Le ComitĂ© dĂ©cide que Belzunce, gardĂ© comme otage, sera conduit au chĂąteau sous bonne escorte ; il arrĂȘte aussi le dĂ©part du rĂ©gi- ment de Bourbon, par trop impopulaire. Le matin du 12 aoĂ»t celui-ci quitte la ville, ne laissant aux casernes de Vaucelles que les deux soldats enfermĂ©s pour l'affaire des mĂ©dailles. Une bande de furieux les en arrache pour les amener au chĂąteau, oĂč on les confronte avec Belzunce l. On s'empare de sa personne, malgrĂ© la rĂ©sistance de la garde 2>, on le traĂźne jusqu'Ă  la place Saint-Pierre. Il y est bientĂŽt massacrĂ© par une foule en dĂ©lire, qui le lapide Ă  coups de crosse de fusils et tire Ă  bout portant de nombreuses balles, dont plusieurs blessent les spectateurs. Ses assassins s'acharnent sur son cadavre et dĂ©chargent sur celui-ci plus de cent cinquante coups de fusil. Sa tĂȘte est sĂ©parĂ©e du tronc et promenĂ©e en triomphe au bout d'une pique ** ; on le mutile et on se dispute ses dĂ©pouilles sanglantes {]\ 1 Belzunce Hait accusĂ© par la rumeur publique d'avoir donnĂ© l'ordre Ă  ses sol- dats d'arracher ces mĂ©dailles. 2 Dans son rapport du 12 aoĂ»t, Etienne, commandant du poste, dĂ©clare qu'il n'a cĂ©dĂ© que devant la force et sous la menace de la foule armĂ©e qui voulait massacrer la garde entiĂšre au cas de plus longue rĂ©sistance. 3 Mon bataillon, Ă©crit RenĂ©e, arrivait dans ce moment-lĂ  mĂȘme sur la place Saint-Pierre. Il me semble voir encore les pieds et les mains de M. de Belzunce pro- menĂ©s au bout des baĂŻonnettes de fusils, surtout cette belle et jeune tĂšte, aux che- veux poudrĂ©s, dont les traits conservaient encore, malgrĂ© la mort, un air de noblesse et de fiertĂ©. » Pour prĂ©ciser ses souvenirs, il ajoute J'ai vu, de mes deux yeux vu, le cƓur de M. de Belzunce entre les mains d'un jeune homme de 18 ans environ, nommĂ© D..., plĂątrier de son Ă©tat. Ce jeune homme, d'un teint blĂȘme, les cheveux et les sourcils d'un blond filasse, Ă©tait en chemise, la tĂȘte et le cou nus ; il avait les bras retroussĂ©s, ensanglantĂ©s jusqu'au coude, et faisait sauter le cƓur dans ses mains comme une balle, avec une joie fĂ©roce. » Mes Souvenirs, p. 8 et 9. 4 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des dĂ©libĂ©rations, 12 aoĂ»t 1789. — On lit dans les MĂ©moires d'Oulre-tombe, de Chateaubriand, t. II, p. 17 A Caen, on se rassasia de massacres et l'on mangea le cƓur de M. de Belzunce. » On a prĂ©tendu que 'tic accusation Ă©tait fausse. Il est certain que des atrocitĂ©s sans nom furent commises sur le cadavre de Belzunce. Une sage-femme de Caen, JosĂ©phine Sosson, DEMISSION DU COMITE DE CAEN 347 Le crime est consommĂ© sans que le ComitĂ© national, trop tardivement informĂ©, ait pu s'opposer Ă  son exĂ©cution. ConsternĂ©, il rend l'arrĂȘtĂ© suivant ConsidĂ©rant que l'attentat portĂ© Ă  la vie de M. de Belzunce est une violation de la sĂ»retĂ© publique, sous laquelle il avait Ă©tĂ© confiĂ© Ă  la garde du poste du chĂąteau, qu'un pareil attentat est aux yeux de tous les citoyens un acte de fĂ©rocitĂ© qui emporte l'exĂ©cration publique envers tous ceux qui en seraient coupables, a arrĂȘtĂ© de faire faire les informations qui seront Ă  sa disposition sur tous les faits qui ont prĂ©cĂ©dĂ©, accompagnĂ© et suivi cette fatale journĂ©e » M. Cette protestation, la seule que les circonstances permet- taient au ComitĂ© d'Ă©lever contre un pareil forfait, fut suivie le lendemain par la dĂ©mission de tous ses membres. Abandonnant volontiers toute espĂšce d'autoritĂ© qu'on leur avait confiĂ©e », ceux-ci laissaient les citoyens libres de procĂ©der Ă  une nouvelle nomination et se bornaient Ă  faire des vƓux pour l'union, le calme et la tranquillitĂ© publique ». Un nouveau ComitĂ©, Ă©lu le 14 aoĂ»t par les dĂ©putĂ©s des paroisses *, nomma Chatry-Lafosse l'aĂźnĂ© comme prĂ©sident et Costy comme vice-prĂ©sident ; il com- prit, outre les officiers municipaux, 24 dĂ©putĂ©s choisis par les paroisses. Le 15 aoĂ»t, il adopta un rĂšglement de police intĂ©rieure en 22 articles, qui dictait les prĂ©cautions les plus minutieuses pour assurer le calme des sĂ©ances, le bon ordre et la tranquillitĂ© des discussions. Le ComitĂ© du 14 aoĂ»t ne vĂ©cut pas deux mois le 6 octobre, Chatry-Lafosse dĂ©missionnait ; on dĂ©cida de soumettre la prĂ©si- dence et la vice-prĂ©sidence Ă  une Ă©lection bimensuelle. On se lassait de voir constamment les mĂȘmes personnes au pouvoir l'inquiĂ©tude publique exigeait de frĂ©quentes consultations Ă©lec- mit en bocal un dĂ©bris pantelant, de ce cadavre. Un maçon ivre, HĂ©bert, de Maltot, dĂ©coupa un quarteron » de chair sur la cuisse du malheureux officier, le lit griller et le mangea dans une auberge de la rue de Baveux en buvant une chopine de cidre. — Ces faits sont racontĂ©s tout au long dans un dossier de procĂ©dure contenant 23 piĂšces, alors adressĂ©es au garde des sceaux et conservĂ©es aujourd'hui dans le fonds du ComitĂ© des recherches, aux Arch. nat, D \xixbis 4, — Le jardinier caennais Dufour ajoute un dĂ©tail horrible Ă  cette sĂ©rie dĂ©jĂ  longue d'atrocitĂ©s On lui a coupĂ© la tĂȘte, Ă©crit-il, et on a promenĂ© sa tĂšte par toute la ville au bout d'une fourche. Quand ils ont Ă©tĂ© Ă  Vaucelles, on l'a fait entrer chez un perruquier pour la faire friser et arranger proprement. » Dufour, MĂ©moires et Remarques, t. I, p. 36. 1 Arch. comm., Caen BB93, fol. 72-73. Begistre des dĂ©libĂ©rations, 12 aoĂ»t 1789.— Cf. ms. PĂ©pin. Bibl. nat. nouv. acq. françaises, 4401. 2 Les 180 dĂ©putĂ©s Ă©lus par les 12 paroisses de Caen 15 par paroisse n'avaient pu se rĂ©unir le 13 aoĂ»t Ă  l'hĂŽtel de ville, Ă  cause du tumulte de la place Saint- Pierre. 348 INSTABILITÉ DES COMITÉS PERMANENTS fondes. D'autre pari, les membres des ComitĂ©s et des bureaux trouvaient trop lourdes les obligations qu'entraĂźnait la perma- nence de ceux-ci ; les uns s'absentaient de Caen, d'autres s'ac- quittaient nĂ©gligemment de leurs fonctions. Le bureau des subsistances, un instant dĂ©sertĂ©, faillit suspendre ses sĂ©ances. Le 12 octobre, le ComitĂ© national donna sa dĂ©mission collective. Il y eut de nouvelles Ă©lections le lendemain et d'autres encore le 3 novembre". Dans un espace de temps trĂšs court, l'autoritĂ© s'Ă©tait quatre fois dĂ©placĂ©e. N'Ă©tait-il pas fatal qu'Ă  chacune de ses transmissions elle perdĂźt de sa force et qu'on la vĂźt fondre, pour ainsi dire, entre les mains des Ă©lecteurs ? i2. Dans les autres villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, mĂȘmes fluctua- tions de la vie municipale. A Carentan, aprĂšs la dĂ©mission du ComitĂ©, de nouvelles Ă©lections ont lieu le 13 septembre 1789 »3. A Tinchebrai, le ComitĂ© du 19 juillet, discutĂ© par plusieurs mĂ©contents et réélu une premiĂšre fois le 11 aoĂ»t, dĂ©cide sa sup- pression le 27 septembre ; le lendemain, l'assemblĂ©e des habitants rĂ©tablit une municipalitĂ© de neuf membres un maire et huit Ă©chevins et y fait entrer les neuf dĂ©missionnaires 4. A PĂ©riers, oĂč le nombre trop Ă©levĂ© des dĂ©putĂ©s menace de rendre les dĂ©libĂ©- rations tumultueuses, le ComitĂ© est rĂ©duit de 30 Ă  16 membres 5. 1 Aux Ă©lections du 13 octobre, Duclos le Goupil l'ut prĂ©sident du ComitĂ©, et Pil- le!, le jeune, vice-prĂ©sident; quinze jours plus tard, le 28 octobre, Signard d 'Ouf fi Ăšres succĂ©da au premier et Bougon-Longrais au second ; au renouvellement gĂ©nĂ©ral du ComitĂ© du .'Ăź novembre, de la Rue fut Ă©lu prĂ©sident ; sur son refus, la prĂ©sidence fut donnĂ©e Ă  l'abbĂ© de Jumilly qui la conserva jusqu'en fĂ©vrier 1790. Arcb. comm., Caen BB93, Registre des dĂ©libĂ©rations. 2 Le 13 octobre 1789, DuperrĂ© de Lisle Ă©crivait au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e natio- nale Un nouveau ComitĂ© qui a Ă©lĂ© ordonnĂ© pour Caen a pensĂ© Ă  se former... Ce ComitĂ© est sans force. » Arch. nat., D xxix 29. — Dans une brochure spirituelle et mordante, publiĂ©e sous le voile de l'anonyme par un royaliste militant, Midy, l'au- toritĂ© du ComitĂ© caennais est bafouĂ©e en ces termes Tu sais ce qu'on entend par ce mot ComitĂ© » ? C'est un las de gens pris de tous cĂŽtĂ©s, qui se sont assemblĂ©s je ne r-ais comment, qui jugent je ne sais quoi, et qu'on obĂ©it je ne sais quand. Le plus comique des ComitĂ©s est bien celui de GĂȘna [Caen]. Ce ComitĂ© est une girouette donl nous sommes les vents. » Lettre de l'honorable .Jean Rablu. maĂźtre croebeteur et, caporal-major de la milice de CĂ©na, Ă  l'honorable Pierre Tulxeuf, garçon bouclier de Poissy. 17», in-8°. 3 \rch. comm., Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, 13 septembre 1789. L'Ă©lec- tion des 28 membres eut lieu sur les remparts. 1 Hii'l.. Tinchebrai, Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ances des 11, 12. 14 aoiU, 27 et 28 septembre 1789. Le 14 aoĂ»t, condamnation de trois perturbateurs du repos des citoyens, qui les excitent au renversement du ComitĂ© l'un d'eux, de la FilanchĂšre, est expulsĂ© de la ville. 5 Ibid., PĂ©riers, Registre des dĂ©libĂ©rations. 8 novembre 17S9 Ă©lection dans l'Ă©glise de la ville. Lecaudey de Manneval resta prĂ©sident. DISSENSIONS A CHERBOURG 349 A Avranches, oĂč il se renouvelle par tiers chaque mois, les Ă©lec- tions d'octobre en ouvrent l'accĂšs aux ecclĂ©siastiques qui en Ă©taient jusqu'alors exclus M. Cherbourg ne fut pas exempt des agitations intĂ©rieures que provoquait l'Ă©tat anarchique du royaume. Le corps municipal et national » de cette ville, organisĂ© au lendemain de l'Ă©meute du 21 juillet, ne tarda pas Ă  voir battre en brĂšche son autoritĂ©. Dans sa sĂ©ance du 4 septembre, il se plaignait des rĂ©clamations particuliĂšres de plusieurs habitants, trop rĂ©pĂ©tĂ©es et trop nom- breuses pour ne pas blesser sa dĂ©licatesse et exciter Ăź^es inquiĂ©- tudes » - . On lui reprochait d'ĂȘtre inconstitutionnel » et de n'avoir ni le crĂ©dit ni la confiance nĂ©cessaires pour conduire efficacement les affaires de la ville ». On faisait grief au maire et aux deux Ă©chevins d'avoir Ă©tĂ© maintenus dans leurs charges par l'autoritĂ© de l'intendant, contre le vƓu gĂ©nĂ©ral et la rĂ©clama lion lĂ©gale de la ville, qui avait autrefois achetĂ© ces charges munici- pales pour s'assurer de libres Ă©lections triennales. La nomination de ces magistrats par arrĂȘt du Conseil Ă©tait qualifiĂ©e d'abusive et d'illĂ©gale, contraire a la libertĂ© des suffrages ». L'incorporation des Ă©lecteurs que le corps municipal s'Ă©tait adjoints par mesure de prudence n'avait pas dĂ©sarmĂ© l'opposition. Ces derniers n'avaient Ă©tĂ© dĂ©signĂ©s qu'en vue d'un objet spĂ©cial, l'Ă©lection des dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux ; leur mandat Ă©tait expirĂ© et on leur niait toute compĂ©tence aux fonctions administratives. L'Ă©lection du chevalier de GassĂ© comme maire en comitĂ© secret, bien qu'elle fĂ»t provisoire, avait soulevĂ© de nombreuses cri- tiques CI'. En prĂ©sence de la fermentation rĂ©gnante, le corps municipal rĂ©solut de se soumettre cĂ  une consultation gĂ©nĂ©rale la question de sa lĂ©gitimitĂ©. Il convoqua pour le 26 septembre une assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s de tous les corps et corporations. Du 7 au 25 septembre, chaque jour fut marquĂ© par la rĂ©union particuliĂšre de l'un ou l'autre de ces groupements 4'. Si la no- blesse, les diverses juridictions, bailliage, amirautĂ©, traites foraines et quart bouillon, si l'ancienne milice bourgeoise convo- 1 Arch. conim., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations, 24 octobre 1789. 2 Ibid., Cherbourg, BB 5. Registre des dĂ©libĂ©rations, 4 septembre 1789. 3 MĂ©moire sur la reconstitution du corps municipal de Cherbourg, imprimĂ©, 10 p. s. d. n. 1.. Bibl. co-mm., Cherbourg. 4 Arch. comm., Cherbourg, AA 43. DĂ©libĂ©rations des communautĂ©s, corps et cor- porations de la ville de Cherbourg, pour la nomination de dĂ©putĂ©s chargĂ©s de dĂ©li- bĂ©rer sur le projet de rĂšglement concernant la municipalitĂ© 34 dĂ©libĂ©rations, Ă©che- lonnĂ©es du 7 au 2r> septembre L789. 350 RÉORGANISATION DU COMITÉ DE CHERBOURG juĂ©e pour la 'derniĂšre fois, si les avocats, les greffiers, les notaires royaux, les herbageurs se prononcĂšrent pour la continuation pure et simple de la municipalitĂ© en attendant le rĂšglement municipal promis par l'AssemblĂ©e nationale ; si le clergĂ© et quelques corporations, manufacturiers en laines, apothicaires, chapeliers, tonneliers, aubergistes, maçons consentirent au main- tien du statu quo, avec l'adjonction de six ou douze membres Ă©lus, la plus grande partie des corporations se dĂ©clara pour la reconstitution, pour la rĂ©gĂ©nĂ©ration immĂ©diate du corps muni- cipal et national. Aussi l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des 26 et 27 sep- tembre, oĂč se produisirent plusieurs motions nettement rĂ©volu- tionnaires, se montra-t-elle absolument favorable Ă  une organi- sation nouvelle de la municipalitĂ© et Ă  la nomination de nou- veaux membres. Elle dĂ©clara par 41 voix contre une que le rĂšgle- ment de 1778 n'avait plus d'objet, que les circonstances actuelles nĂ©cessitaient quelques changements relatifs Ă  la libertĂ© indivi- duelle, spĂ©cialement en ce que la nomination des officiers devait ĂȘtre faite par tous les dĂ©putĂ©s qui composaient la commune » *>. Six commissaires Ă©lus pour rĂ©diger un projet de rĂšglement le firent adopter Ă  une nouvelle assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale, tenue le 6 octo- bre. L'administration de Cherbourg fut confiĂ©e Ă  un ComitĂ© national permanent placĂ© sous le contrĂŽle d'un corps municipal de 20 membres. Ce dernier, qui comprenait un maire, quatre Ă©chevins, un procureur-syndic, un greffier et quatorze notables renouvelĂ©s chaque dimanche dans l'ordre du tableau, siĂ©geait tous les jours pour la gestion des affaires courantes. Pour certains actes de la vie publique, comme l'Ă©lection des officiers supĂ©rieurs de la milice, les dĂ©putĂ©s des corporations devaient ĂȘtre appelĂ©s Ă  l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale. Ce rĂ©gime nouveau, basĂ© sur l'Ă©lection et qui intĂ©ressait un plus grand nombre de citoyens Ă  l'administra- tion municipale, devait durer jusqu'en fĂ©vrier 1790. Une assez grande variĂ©tĂ© existait, on le voit, dans l'organi- sation intĂ©rieure des ComitĂ©s locaux le mode de leur recrutement put diffĂ©rer d'une ville Ă  l'autre ; l'exercice de leur mandat ne fut point partout d'Ă©gale durĂ©e. Et cependant tous eurent un air de ressemblance et comme de parentĂ© dĂ» Ă  la communautĂ© de leur origine, Ă  l'identitĂ© absolue des besoins qui leur donnĂšrent naissance, de la mission qu'ils s'imposĂšrent et des attributions qu'ils se confĂ©rĂšrent. Ce furent partout des ComitĂ©s d'approvi- sionnement et de dĂ©fense. 1 Àrcb. comm., Cherbourg, BB 5. Registre des dĂ©libĂ©rations, 26 et 27 sept. 1789. LES COMITÉS ET L'APPROVISIONNEMENT DES VILLES o51 En premiĂšre ligne des ComitĂ©s d'approvisionnement. C'est leur raison d'ĂȘtre originelle. Ils sont nĂ©s presque partout de la nĂ©ces- sitĂ© de procurer du pain Ă  bon marchĂ© aux habitants des villes. Leurs actes de fondation l'indiquent en termes exprĂšs. L'orga- nisation mĂȘme de leurs bureaux en est une preuve manifeste. A Caen, le premier bureau s'intitule bureau des subsistances ; il est chargĂ© de ce qui concerne les boulangers, des distributions de grains et de farines, de la fixation du prix du pain, de la recherche des magasins et dĂ©pĂŽts de blĂ© pour en connaĂźtre la contenance ». Il a aussi pour mission d'expĂ©dier les permis et congĂ©s aux armes de la ville pour le transport au moulin des blĂ©s des boulangers destinĂ©s Ă  rentrer en farine, et de surveiller les cinq bacs d'Athis, de Colombelles, de Fontenay, du Pont, du Coudray et les autres passages suspects ». Bayeux, Avranches Vire possĂšdent des bureaux investis d'attributions analogues. On voit le ComitĂ© de Caen prĂ©sider aux achats et aux ventes de farines, prendre des arrangements avec les boulangers, fixer la taxe du pain et de la viande 0. Le 23 juillet, il arrĂȘte la fabri- cation du pain Ă  2 sols 6 deniers la livre pour les pauvres. Le 24 juillet, il fait vĂ©rifier les farines chez les boulangers ; le 28, il interdit la sortie de 800 sacs de seigle qui sont dans les magasins de Caen et que des blatiers voudraient emporter Ă  la campagne. PrĂ©occupĂ© avant tout d'Ă©viter des Ă©meutes, il ne songe qu'Ă  l'alimentation de la population urbaine. Il se montre dur Ă  l'Ă©gard des voisins. Ses dĂ©fenses d'exportation des grains se renouvellent le 6 et le 25 aoĂ»t, le 17 octobre, le 25 octobre. Au lieu de fournir des grains aux paysans, il leur en demande Ă  maintes reprises. Il permet aux volontaires de la milice des perquisitions chez les fermiers et les propriĂ©taires Ă  Tilly-la- Campagne, Ă  Saint-Aignan, Ă  Bellengreville, Ă  Cagny ; il ordonne Ă  ces fermiers d'apporter leurs grains Ă  la halle s, Il n'agit pas en tout ceci autrement que l'intendant, Comme lui 1 L'Ă©tude des mesures d'approvisionnement prises par le ComitĂ© permanent de Caen, a Ă©tĂ© faite d'aprĂšs le registre des dĂ©libĂ©rations BB 93, conservĂ© aux Arch. comm. de cette ville. 2 LeliĂšvre, fermier de Cagny, est condamnĂ© Ă  un mois de prison pour rĂ©sistance aux ordres du ComitĂ©, et malgrĂ© l'intervention de MĂ©nage de Cagny, maire de Caen, dont il est le fermier, 27 aoĂ»t 1789. Arch. comm., Caen, Begistre des dĂ©libĂ©rations, BB93. 3 J'ai retrouvĂ© deux piĂšces relatives au fonctionnement du bureau des subsis- tances du ComitĂ© de Caen 1° Tableau des Halles de Caen le lundi 10 aoĂ»t 17X9, placard imprimĂ© arrĂȘtĂ© au bureau des subsistances; 2° ProcĂšs des apprĂ©cies a la Halle de Caen, du 20 novembre 1789. Arch. comm., Caen ancien carton 9. 352 MESURES D'APPROVISIONNEMENT A CAEN encore, il demande directement des secours en nature au ministre. Le 18 aoĂ»t, peu de jours aprĂšs le massacre de Belzunce, il rĂ©clame avec insistance sacs de blĂ© et Necker effrayĂ© les lui accorde. Le 4 octobre il dĂ©pute Ă  Versailles deux de ses membres, Saffrey et Charfier, pour obtenir de nouveaux secours. Il surveille rigoureusement les boulangers, les marchands de grains, les amidonniers et rĂ©prime avec sĂ©vĂ©ritĂ© les moindres infractions. Pour avoir refusĂ© de cuire du pain, un boulanger est condamnĂ©, le 26 aoĂ»t, Ă  huit jours de prison ; un autre, Ă  12 livres d'amende pour avoir vendu du pain Ă  36 sols la tourte de 12 livres au lieu de 30 sols. Il rĂ©primande par voie d'ordonnance les boulangers qui ont cessĂ© leur mĂ©tier si utile Ă  l'humanitĂ© pour cuire galettes de pain au lait, torquettes et brioches Ă  l'usage des riches » et leur enjoint de fabriquer du pain sous peine de 50 livres d'amende et d'emprisonnement. Un marchand amidonnier de Caen, Bel- lissent, a commis aux yeux du ComitĂ© le crime d'employer Ă  la fabrication de son amidon du blĂ© et d'autres grains propres Ă  faire du pain ; avec les rĂ©sidus de ces grains, il engraisse quatorze porcs. Par arrĂȘtĂ© du 3 aoĂ»t, le ComitĂ© le condamne Ă  600 livres d'amende et Ă  un mois de prison l'amidon de ses magasins, ses quatorze porcs sont vendus et le produit de la vente est versĂ© aux pauvres. Deux jours plus tard, on nomme des commissaires pour surveiller la fabrication des amidons. Le bureau des subsis- tances prĂ©pare le projet d'une boulangerie nationale, qui compte- rait trois dĂ©pĂŽts Ă  Caen et qui vendrait Ă  prix fixe toute l'annĂ©e le pain bis Ă  2 sols 6 deniers la livre, le pain mĂ©langĂ© d'orge et de seigle Ă  2 sols seulement ih. Les ComitĂ©s nationaux permanents des autres villes de Basse- Normandie veillent avec autant de soin que celui de Caen Ă  l'approvisionnement des citoyens. A Avranches, pour dĂ©charger les membres du ComitĂ© national d'un service trĂšs lourd, un comitĂ© spĂ©cial des subsistances se forme Ă  l'instigation du lieute- nant gĂ©nĂ©ral de police Bacilly ; il a pour mission de veiller au prix des divers comestibles, surtout au prix du pain et de la viande, et de surveiller la fraude commise par les bouchers de 1 Arch. comm., Caen, Registre des dĂ©libĂ©rations, passim. A Saint-LĂŽ, c'est le bailliage qui, sur la dĂ©nonciation du ComitĂ©, condamne Ă  G00 livres d'amende un amidonneur, de Çmibou, accusĂ© de convertir chaque annĂ©e; plus de 5,000 boisseaux de blĂ© en amidon. Mais le ComitĂ©, prenant en main les intĂ©rĂȘts de la ville, qui doit recueillir les deux tiers de l'amende au profit de ses pauvres, adresse une re-juĂȘte Ă  l'AssemblĂ©e nationale pour obtenir que toute libertĂ© soit laissĂ©e aux juges des con- traventions de grains. Arch. nat.. D xxix 29. MESURES D'APPROVISIONNEMENT A CHERBOURG 353 campagne qui apportent leurs viandes en ville sans acquitter les droits » {>. Le ComitĂ© de Cherbourg, Ă  peine formĂ©, met au premier rang de ses prĂ©occupations la question des subsistances de cette ville 2, L'ancienne municipalitĂ©, d'ailleurs, en avait eu un Ă©gal souci. Lors de l'Ă©meute du 21 juillet, elle avait ouvert au peuple les magasins Ă  blĂ© de l'Etat, Ă©tabli un bureau des pauvres qui fournissait Ă  chaque indigent un bon d'une livre et demie de pain par jour et promis aux boulangers, qui dĂ©livraient ce pain Ă  un prix trĂšs rĂ©duit, de leur rembourser leurs pertes rA>. Elle avait pris une sĂ©rie de mesures relatives Ă  l'approvisionnement des halles, envoyĂ© par deux fois un dĂ©putĂ© au Havre pour y acheter du blĂ© et, Ă  dĂ©faut de celui-ci, une cargaison de boisseaux d'orge Ă  4 livres le boisseau, revendus Ă  3 livres *. AprĂšs sa rĂ©or- ganisation, elle redouble d'activitĂ©. Les dĂ©crets » et les mani- festes » du ComitĂ© permanent se succĂšdent assez nombreux et accusent ses efforts incessants pour dĂ©concerter dans les marchĂ©s de la ville, par une surveillance active, toutes les manƓuvres illicites, frauduleuses, ou propres Ă  exciter l'inquiĂ©tude du peu- ple » 5. Il interdit aux paysans d'accrocher au passage les blĂ©s destinĂ©s Ă  l'approvisionnement de Cherbourg, et par contre autorise les perquisitions dans les campagnes. Il fait fouiller les greniers du meunier de Sideville, soupçonnĂ© de tenir un dĂ©pĂŽt clandestin de grains fi ; il ordonne l'arrestation de ceux qui en font un transport frauduleux 7. Il essaie surtout d'empĂȘcher le commerce criminel », qui, faisant passer les blĂ©s du Cotentin dans les Ăźles anglaises voisines d'Aurigny, Guernesey et Jersey, augmente la chertĂ© des grains au lendemain d'une riche rĂ©colte. Le ComitĂ© de Tinchebrai procĂšde, lui aussi, Ă  des perquisitions dans les paroisses voisines, recense les grains des propriĂ©taires, fermiers, ou dĂ©cimĂąt eurs et leur enjoint d'en amener une partie a 1 Arch. comm., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations, 27 octobre 1789. 2 DĂ©cret du 13 octobre 1789 sur l'approvisionnement des marchĂ©s Le corps municipal cl national, considĂ©rant tpie de tous les objets d'administration qui lui sont confiĂ©s il n'en est point qui mĂ©rite plus d'attention que ce qui a trait Ă  la sub- sistance de cette ville, etc. » Ibid., Cherbourg, BB5, Registre des dĂ©libĂ©rations. 3 Ibid. Avis aux citoyens de Cherbourg de l'ouverture d'un bureau de bienfai- sance, 4 aoĂ»t 1789. 1 Ibid. Envoi de Morqueron au Havre, 27 juillet 1789. 5. Ibid. DĂ©cret du 13 octobre 1789. G Ibid., BB 11. Registre de correspondance, 17 octobre 1789. 7 Ibid. Arrestalion de La Grandie, paysan de Benoitville, 10 octobre 1789. 23 354 ENTENTE DES COMITÉS Al' SUJET DES SUBSISTANCES la halle de la ville. Il menace d'emprisonnement le curĂ© de Pier- niĂšres-le-Patry, qui rĂ©siste Ă  son arrĂȘtĂ©'1. A Torigni, le ComitĂ© dĂ©fend aux boulangers de faire gĂąteaux, moulinets et autres pains amendĂ©s 2, envoie ses dĂ©lĂ©guĂ©s pour visiter leurs boutiques, fait forcer par un serrurier la porte des rĂ©calcitrants W. Au len- demain de l'Ă©meute du 6 aoĂ»t 1789, le Co'mitĂ© de Granville abaisse le prix du pain et dĂ©cide que des gratifications seront accordĂ©es aux boulangers pour les indemniser des pertes qu'ils vont subir le montant s'en Ă©lĂšve Ă  livres4'. Le ComitĂ© de Bayeux, dans une sĂ©rie de dĂ©libĂ©rations prises du 5 au 12 aoĂ»t 1789, s'occupe sans relĂąche du salut du peuple » et arrĂȘte les mesures relatives aux approvisionnements. Il rĂšgle Ă  maintes reprises la taxe du pain . AprĂšs la Commission intermĂ©- diaire provinciale de Rouen $, celle de Caen signalait la gravitĂ© du mal et, dans son impuissance Ă  faire rentrer l'impĂŽt, adjurait les municipalitĂ©s, en leur transmettant le dĂ©cret du 26 septembre relatif a cet objet, de lui prĂȘter main-forte 10. Bien avant cette date, les ComitĂ©s locaux s'Ă©taient prĂ©occupĂ©s de ce soin. DĂšs le 30 juillet, le ComitĂ© de Caen rappelait les citoyens de la ville au respect des anciennes lois fiscales, dont plusieurs voulaient se 1 Arch. comm., Caen. Registre des dĂ©libĂ©rations, BB 93, 16 aoĂ»t 1789. 2 Ibid., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations, 17 octobre 1789. 3 Delleville Ă  Bayeux, Belzunce Ă  Caen furent traduits Ă  la barre des ComitĂ©s nationaux de ces deux villes. Ceux-ci devaient correspondre avec le ComitĂ© des rap- ports de l'AssemblĂ©e nationale pour toutes les affaires de ce genre, d'aprĂšs une lettre du secrĂ©taire d'Etat de la guerre d/u 14 aoĂ»t 1789. Ibid., Caen, carton 56. 4 Le duc d'Harcourt, appelĂ© Ă  Paris pour le service du roi, demande un passe- port au ComitĂ© de Caen le 20 aoĂ»t 1789. Ibid., Caen, carton 56. — Celui-ci fait impri- mer et afficher Tordre du roi qui rappelle le duc, afin que le peuple connaisse les causes de son dĂ©part. Ibid., BB 93. 5 Les tĂštes sont tellement fermentĂ©es qu'on se refuse mĂȘme au paiement des impĂŽts les plus lĂ©gitimes, sous prĂ©texte qu'ils sont tous illĂ©galement Ă©tablis. » Lettre du bureau intermĂ©diaire de Mortain Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, 2 septembre 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 8267. 6 Comple-rendu de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, p. 14-15. 7 Lettres de Crespin, receveur des finances de l'Ă©lection de Vire. 8 En septembre 1789, des paroisses des Ă©lections de Saint-LĂŽ et de Bayeux refu- sent de payer la prestation de la corvĂ©e aux collecteurs, parce que les rĂŽles ne por- tent pas la signature du roi. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7743. 9 Lettre de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Bouen Ă  celle de Caen, 3 septembre 1789. Ibid,, C 7628. Nous croyons, Ă©crivait-elle, que vous Ă©prouvez des malheurs pareils aux nĂŽtres, et que vous voyez avec regret que de toutes parts la chaĂźne de l'administration se brise. » 10 Instruction de la Commission intermĂ©diaire aux municipalitĂ©s, 17 octobre 1789. ibid., C 7775. 358 PROTECTION DE LA PERCEPTION DES IMPOTS INDIRECTS dispenser sous le prĂ©texte des rĂ©formes projetĂ©es i. Le 31 aoĂ»t, le prĂ©sident du ComitĂ© d'Avranches, BrĂ©mesnil, exhortait ses concitoyens Ă  acquitter comme par le passĂ© tous les droits et impĂŽts sous quelque dĂ©nomination qu'ils soient perçus et jusqu'Ă  nouvel ordre ; le mĂȘme ComitĂ© promettait secours et protection Ă  tous les prĂ©posĂ©s et enjoignait aux municipalitĂ©s des villes et campagnes de l'Avranchin de leur prĂȘter main-forte 2. Le 13 sep- tembre, les officiers municipaux de Mortain prenaient de concert la rĂ©solution de maintenir et protĂ©ger par les mesures les plus fermes la perception des impositions, droits et taxes publics 3>. En dĂ©pit de tous ces efforts, les impĂŽts directs rentraient trop lentement et Ă  la fin de 1789, sur les livres que devait la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, le TrĂ©sor avait encore Ă  percevoir une somme de livres, c'est-Ă -dire la moitiĂ© *4. Si le peuple ne consentait Ă  acquitter qu'avec peine les impĂŽts directs, il se refusait au paiement des impĂŽts indirects. Ceux-ci Ă©taient impopulaires au dernier point ; la plainte unanime des cahiers les avait condamnĂ©s en mars 1789. Pendant les Ă©meutes de juillet dont Caen, CondĂ©, Cherbourg et Vire avaient Ă©tĂ© le théù- tre, les bureaux des aides, les greniers Ă  sel avaient Ă©tĂ© envahis et pillĂ©s, les registres brĂ»lĂ©s, dĂ©chirĂ©s ou jetĂ©s Ă  l'eau 5. De juillet 1789 Ă  janvier 1790, la perception de ces impĂŽts rencontra des rĂ©sistances de plus en plus vives. Les ComitĂ©s locaux tentĂšrent, le plus souvent en vain, d'y mettre fin. Celui de Caen, dĂšs le dĂ©but d'aoĂ»t, Ă©tait obligĂ© d'approuver la suspension des droits de quatriĂšme que l'inspecteur de la rĂ©gie avait cru devoir cesser de lever sur les traiteurs, cabaretiers, aubergistes dans la crainte d'une insurrection 6>. Le ComitĂ© national et municipal de Cher- bourg, en septembre et en novembre, publia des manifestes » pour engager le public Ă  acquitter les droits aux divers bureaux des fermes il gourmanda l'inertie et la lĂąchetĂ© des prĂ©posĂ©s aux recouvrements, que la terreur paralysait et rendait trop accom- modants 7. Des troubles avaient Ă©clatĂ© dans la paroisse des 1 Arch. comm, Caen, BR 93, 30 juillet 1789. 2 Ibid., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations. — Cf. Arch. nul., C 92, 78. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, C 2688. 4 Ibid., C 7778. 5 Voir ci-dessus, chap. XII, p. 312, 314 et 316. 6 Arch. comm., Caen, RB 93. 7 Manifeste pour la protection des droits lus aux bureaux des finances, 2 sep- tembre 1789. Ibid., Cherbourg, BB 5. — Manifeste pour assurer la perception de tous droits Ă©tablis, 6 novembre 1789. Ibid. — Cf. Arch. nat., C 111. MESURES CONTRE LA CONTREBANDE 359 Loges-Marchis, prĂšs d'Avranclies, dont les habitants exercĂšrent des voies de fait contre les employĂ©s des fermes. Le ComitĂ© d'A- vranclies prit le 1er octobre un arrĂȘtĂ© contre les sĂ©ditieux, plaça les employĂ©s sous la sauvegarde des lois, et dĂ©lĂ©gua trois de ses membres pour rĂ©tablir l'ordre dans cette paroisse. Deux mois plus tard, deux commis de la brigade de Courtils se virent insultĂ©s et menacĂ©s de violence nouvelle intervention du ComitĂ©, nou- velle enquĂȘte * MalgrĂ© l'abaissement du prix du sel, la contre- bande se pratiquait sur une grande Ă©chelle, sous les yeux des gardes impuissants et dĂ©couragĂ©s, et avec la complicitĂ© des populations. Les mesures d'ordre prises par un ComitĂ© Ă©taient compromises par l'inertie du ComitĂ© voisin. Celui de Cherbourg demandait instamment la crĂ©ation de corvettes armĂ©es pour empĂȘcher la fraude qui s'exerçait sur les cĂŽtes de la Hague, et d'un tribunal pour juger les coupables. Dans la nuit du 7 dĂ©cem- bre 1789, neuf contrebandiers avaient Ă©tĂ© saisis dĂ©chargeant du faux sel dans le port de commerce. On les conduisait Ă  Valo- gnes pour y ĂȘtre jugĂ©s, quand une Ă©meute populaire les dĂ©livra aux portes de cette ville sous les yeux du ComitĂ© impassible 2. A Bayeux, le peuple excitĂ© contre Fleury, directeur des aides, se rua sur sa maison, l'en arracha et faillit lui faire un mauvais sort. Il eut grand peine Ă  s'Ă©chapper de la ville en promettant de n'y rentrer jamais. Les paroisses furent convoquĂ©es par le ComitĂ© pour aviser au rĂ©tablissement des droits d'aides ; leurs assemblĂ©es s'opposĂšrent au retour des commis et demandĂšrent que les droits, perçus aux portes de la ville par le receveur du tarif, fussent dorĂ©navant versĂ©s dans la caisse municipale W. Les droits de coutume que les villes percevaient dans les halles et marchĂ©s avaient le mĂȘme sort que les impĂŽts royaux ; depuis le 4 aoĂ»t, les paysans n'en voulaient plus entendre parler. A la foire Sainte-Catherine, Ă  Vire, en novembre 1789, des marchands de bƓufs des environs de CondĂ© refusĂšrent le terrage » ou droit de coutume pour les bestiaux qu'ils exposaient au marchĂ©. Une rixe violente s'engagea entre eux et les prĂ©posĂ©s Ă  la recette. La marĂ©chaussĂ©e intervint, mais fut obligĂ©e de dĂ©guerpir devant la force numĂ©rique des rĂ©calcitrants, qui restĂšrent les maĂźtres du 1 Arcli. cornm., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations, 1er octobre 1789. i Ibid., Cherbourg, BB 11. Registre de correspondance. Cf. Arch. nat., D xxix 81. » Ibid., Baveux, D i13 ,ls. Registre des opĂ©rations du comitĂ© national, 30 novembre au 3 dĂ©cembre 1789. — DĂ©libĂ©rations des paroisses de Bayeux, 3 dĂ©cembre 1789. Ibid. non inventoriĂ©. 360 PROTECTION DES DROITS FÉODAUX champ de bataille 1. A la foire de Mortain, le 5 dĂ©cembre, des individus de Romagny et de ChĂ©rencĂ©-le-Roussel essayĂšrent aussi d'entraver la perception des droits de coutume. La garde nationale les saisit et les incarcĂ©ra dans la prison du bailliage . Le 24 juillet, les Ă©chevins et notables de Caren- tan s'assemblent pour Ă©tablir sur une nouvelle constitution une milice volontaire, sous le nom de milice nationale ». Cette troupe nouvelle, diffĂ©rente de l'ancienne milice bourgeoise, n'aura que des chefs Ă  son grĂ© que la bourgeoisie est appelĂ©e Ă  Ă©lire *. A Vire, la milice bourgeoise refuse le 25 juillet, malgrĂ© les ordres rĂ©itĂ©rĂ©s de la municipalitĂ©, d'assurer le service de la ville. Une Ă©meute populaire, qui Ă©clate le 28 juillet, dĂ©termine les bourgeois Ă  envoyer des dĂ©putĂ©s Ă  Caen pour rĂ©clamer des armes et des munitions ; ceux-ci reviennent avec des fusils, un baril de poudre et un poste de garde est aussitĂŽt Ă©tabli 5. A Granville, la milice bourgeoise apparaĂźt aux rĂ©jouissances cĂ©lĂ©brĂ©es en l'honneur 1 Arch. connu. . Cherbourg, BB 5. Registre des dĂ©libĂ©rations. 2 Ihid.. Caen, BB 9* Registre des dĂ©libĂ©rations. 3 ibid., Baveux, Dl12. Registre des dĂ©libĂ©rations. 1 Ibid., Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, 24 juillet 1789. 5J Ibid., Vire. Registre des dĂ©libĂ©rations, 24 juillet 1789. — Cf. ins. SĂ©guin, p. H>. VARIÉTÉ DE LEUR ORGANISATION 363 du 14 juillet ; elle s'organise en corps subsistant » le 2 aoĂ»t, pour assurer le service de garde au port, au faubourg et dans la ville, et veiller Ă  la sĂ»retĂ© publique . Registre des dĂ©libĂ©rations, 7 et 9 aoĂ»t 1789. Ce fut peut- ĂȘtre un moyen d'enrĂŽler dans une organisation bien disciplinĂ©e les nombreux Ă©tran- gers employĂ©s aux travaux du port. Boulabert et NoĂ«l, entrepreneurs des travaux du roi, y enrĂ©gimentent leurs ouvriers. 6 Ibid., Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations, 23 fĂ©vrier 1790. 7 Ce ne fut qu'en juillet 1790 que les volontaires nationaux de Granville firent la remise solennelle de leur drapeau, et repassĂšrent dans les rangs de la garde nationale. 8 Ibid., Caen, BB 93, Registre des dĂ©libĂ©rations. Le 26 aoĂ»t 1789. le ComitĂ©, pour apaiser les plaintes des paroissiens de Notre-Dame contre cette conscription, leur rappelle qu'elle est une nĂ©cessitĂ©, que les circonslances l'imposent et qu'elle cessera avec les causes qui l'ont fait naĂźtre. ARMEMENT ET ÉQUIPEMENT DES GARDES NATIONALES 365 toutefois des exceptions. A Caen, on exempte de la garde les membres du ComitĂ© national et de ses bureaux, ceux des comitĂ©s particuliers des paroisses ', les officiers des troupes royales, les ecclĂ©siastiques, les indigents 2>. La milice de Carentan n'enrĂŽle que les citoyens actifs domiciliĂ©s depuis un an ' ; celle de Cher- bourg exclut les ouvriers du port, qui forment une population flottante W. Les milices nationales furent armĂ©es de fusils, de baĂŻonnettes et de piques. Les magasins d'artillerie de Caen, Carentan, Saint - LĂŽ, Cherbourg Ă©taient remplis d'armes que les commissaires des guerres n'avaient point vendues. On avait craint de les voir tomber entre les mains des vagabonds et des braconniers et de contribuer Ă  la renaissance du brigandage qui avait dĂ©solĂ© la Normandie avant son dĂ©sarmement r>l. Sur la demande des ComitĂ©s locaux, les ducs d'Harcourt et de Beuvron firent expĂ©- dier aux milices urbaines des armes tirĂ©es de ces divers dĂ©pĂŽts G'. En peu de temps, toute la Normandie, dĂ©sarmĂ©e depuis 1766, se retrouva en armes. Dans les villes comme Caen, Cherbourg, les miliciens eurent des fusils, des baĂŻonnettes et des piques. On rĂ©para les vieilles armes qui Ă©taient dĂ©posĂ©es au chĂąteau de Caen avant de les donner aux gardes nationaux. Ceux de Cherbourg, trouvant leurs fusils trop lourds, en firent raccourcir les canons de quatre pouces. Les officiers portaient l'Ă©pĂ©e ; les sergents le mousqueton et le sabre en beaudrier. Dans les campagnes, les gardes nationales s'armaient comme elles le pouvaient ; les fourches se mĂȘlaient aux fusils dans leurs rangs et leur donnaient parfois le caractĂšre de bandes farouches > A la tĂȘte des compagnies et de leurs officiers, l'Ă©tat-major Ă©tait investi du commandement suprĂȘme. Celui de Caen compre- nait un colonel, un colonel en second, un major, deux aides- majors, deux sous-aides-majors et trois porte-drapeau, quatre adjudants, un tambour-major, un chirurgien-major et un aumĂŽ- nier. Partout ailleurs, il Ă©tait Ă  peu prĂšs composĂ© de la mĂȘme façon. Carentan eut un secrĂ©taire de l'Ă©tat-major ; PĂ©ri ers un trĂ©sorier quartier-maĂźtre. Les officiers d'Ă©tat-major, au lieu d'ĂȘtre nommĂ©s par le roi ou les officiers municipaux, comme l'Ă©taient les officiers supĂ©rieurs des anciennes milices bourgeoises, durent leur pouvoir Ă  l'Ă©lection. Le corps municipal de Carentan abdiqua son droit de nomination pour soumettre la composition de l'Ă©tat-major au choix de la bourgeoisie ;Ăź. A Cherbourg, tandis que les officiers des compagnies Ă©taient Ă©lus au scrutin par les gardes nationaux de leur quartier, en prĂ©sence des offi- ciersmunicipaux qui leur dĂ©livraient un brevet spĂ©cial M, ceux de l'Ă©tat-major furent Ă©lus dans la mĂȘme forme que les officiers municipaux, par l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des dĂ©putĂ©s des corps et corporations 5. fourches Ă  gerbes > et demande quelques armes Ă  feu pour ceux qui sauront s'en servir le plus habilement. 1 RĂšglement concernant la milice nationale, titre IV, 1 novembre 17S1*. Arch. comm., Cherbourg, BBf>. 2 Etat constitutionnel de la milice nationale, 7 aoĂ»t 1781. Ibi> 5 RĂšglement du 4 novembre 1789, titre II. Ibid., BBS. — A Baveux, en tolĂ©rant LES GRANDS CHEFS DE CET ÉTAT-MAJOR 367 Partout le choix des Ă©lecteurs se porta sur des gens en vue, anciens officiers et chevaliers de Saint-Louis, magistrats des juridictions royales, gens de loi. Granville conserva l'ancien colonel de la milice bourgeoise, Destouches ; CondĂ©-sur-Noireau dĂ©fĂ©ra le commandement des quatre compagnies Ă  Bourdon de Pierreville ; Torigni Ă  Le Chartier de la VariniĂšre. Deux anciens capitaines d'infanterie, Bouquet de Granval et Duprey-DĂ©silles celui-ci dĂ©jĂ  membre du bureau intermĂ©diaire de dĂ©partement, furent colonel et major de la garde nationale de Carentan. A PĂ©riers, le chef de la garde nationale fut un Ă©cuyer, Leclerc de Beauvais, chevalier de Saint-Louis, brigadier des gardes du corps du roi ; le major fut un conseiller honoraire au bailliage. Ce fut un noble qui commanda la milice nationale de Mortain, La Chambre de Vauborel. A Vire, les citoyens choisirent pour colonel Drudes de Campagnolles, qui devait ĂȘtre un des chefs de la chouannerie normande. Les Ă©lecteurs de Caen avaient nommĂ©, par acclamation, pour colonel le comte de Faudoas et pour lieute- nant-colonel le comte d'Osseville, tous deux anciens officiers. Plusieurs villes créÚrent des commandements gĂ©nĂ©raux de leur garde nationale en faveur de concitoyens illustres. Le ComitĂ© permanent deBayeux, pour dĂ©fĂ©rer au vƓu unanime des citoyens, avait proclamĂ© colonel gĂ©nĂ©ral des volontaires nationaux de cette ville le baron de Wimpfen, marĂ©chal de camp et dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux, en raison de ses hautes qualitĂ©s morales, de sa grande capacitĂ© pour le service militaire, de son affection pour tout ce qui concernait le bonheur et la gloire de la nation, du Roi et de la ville» *. L'assemblĂ©e des citoyens de Cherbourg, tout en maintenant comme colonel Frigoult de la Croix, l'ancien chef de la milice bourgeoise, avait dĂ©cernĂ© Ă  Dumouriez, marĂ©- chal de camp et commandant de la place le titre de commandant gĂ©nĂ©ral de la milice nationale 2>. Ces titres furent d'ailleurs pure- ment honorifiques Wimpfen Ă©tait retenu Ă  Paris par son mandat et Dumouriez quitta Cherbourg en novembre 1789. Il en fut de mĂȘme des grades que les citoyens de Tinchebrai confĂ©rĂšrent Ă  de puissants princes et Ă  leurs agents, pour se concilier leur pro- tection. Le 9 novembre 1789, la milice en armes proclama le duc que les citoyens qui s'Ă©taient volontairement armĂ©s choisissent leurs officiers, la municipalitĂ© se rĂ©serva la libre Ă©lection de l'Ă©tat-major », d'oĂč un conflil ultĂ©rieur avec la garde nationale. Voir ci-dessous, p. 369. 1 Areh. ciiimii., Bayeux, Di . Registre des dĂ©libĂ©rations, 16 aoĂ»t 1789. 2 Ibid., Cherbourg. EE70 et BB 5. 9 aoĂ»t 1789. 368 PRESTATION DE SERMENT DES GARDES NATIONALES d'OrlĂ©ans gĂ©nĂ©ralissime, le comte de Beaujolais, son jeune fils, gĂ©nĂ©ral, le comte de La Touche, son chancelier et surintendant, premier colonel d'honneur et de Limon, son contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral, colonel d'honneur en second ' . FormĂ©es par le seul effet de la bonne volontĂ© des citoyens », les gardes nationales s'Ă©taient 'donnĂ© pour mission de veiller au maintien de la constitution, Ă  la perception des impĂŽts et Ă  la sĂ»retĂ© publique et individuelle. Elles furent le bras du nouveau corps politique dont les ComitĂ©s permanents Ă©taient la tĂȘte. ConformĂ©ment au dĂ©cret du 10 aoĂ»t, elles avaient prĂȘtĂ©, avec les troupes de garnison et la marĂ©chaussĂ©e, le serment d'obĂ©issance aux lois, de fidĂ©litĂ© Ă  la nation et au roi. Le 23 aoĂ»t, Ă  Vire, la place du ChĂąteau avait Ă©tĂ© le rendez-vous des troupes. Le mĂȘme jour, Ă  Cherbourg, dans la plaine situĂ©e entre l'arriĂšre-bassin et le Cauchin, avait Ă©tĂ© dressĂ© un autel de la Patrie. A Caen, la place Royale avait servi de cadre Ă  la cĂ©rĂ©monie. Carentan le 6 septem- bre, Avranehes le 11 octobre, PĂ©riers le 22 novembre avaient rempli avec le mĂȘme Ă©clat les mĂȘmes formalitĂ©s. Partout la prestation de serment avait Ă©tĂ© solennelle et avait donnĂ© lieu Ă  des fĂȘtes civiles et militaires, vĂ©ritables prĂ©mices des fĂȘtes de la FĂ©dĂ©ration. Le serment Ă©tait prĂȘtĂ© par ces troupes en prĂ©sence des oificiers municipaux et des ComitĂ©s locaux c'Ă©tait comme un hommage lige des dĂ©fenseurs armĂ©s du pays aux autoritĂ©s civiles. Ce furent en gĂ©nĂ©ral des rapports de subordination qui unirent les gardes nationales aux ComitĂ©s ; les chefs des premiĂšres Ă©taient presque partout membres des seconds et associĂ©s Ă  l'administration muni- cipale. Deux villes cependant furent le théùtre d'assez graves dissentiments entre milices et ComitĂ©s. A Cherbourg, oĂč le ComitĂ© municipal et national voulait exclure de son sein les officiers de la garde nationale, la milice exhala son mĂ©contentement dans un mĂ©moire d'allure rĂ©volutionnaire ; elle y revendiqua le droit de prendre part Ă  la gestion des affaires, se dĂ©clara le seul corps constitutionnellement Ă©tabli » dans la ville et profĂ©ra des menaces Ă  l'adresse du ComitĂ© f. Le rĂšglement du 6 octobre 1789 ne lui 1 Arch. comm., Tinchchrai. Registre des dĂ©libĂ©rations, 8 et 9 novembre 1789. 2 MĂ©moire sur la reconstitution du Corps municipal de Cherbourg, imprimĂ©, 10 p., s. 1. n. d. Bibl. comm., Cherbourg. La milice nationale, qui est la nation, ne peut ĂȘtre exclue d'un corps municipal... Elle se confond dans les corporations et c'est le seul motif qui la dispense de demander une reprĂ©senlation particuliĂšre. Mais s'il arrivait, un jour que, par la difficultĂ© d'assembler les corporations, l'aristocratie menaçai de s'Ă©tablir dans le corps municipal, alors, comme elle veille sans cesse ACTES D'INSUBORDINATION DES GARDES NATIONALES 369 donna satisfaction qu'en partie, en appelant Ă  l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©- rale de l'hĂŽtel de ville, dans les circonstances graves, les citoyens de toutes les corporations encadrĂ©s dans les compagnies de la garde D. A Bayeux, le conflit fut plus sĂ©rieux. Le ComitĂ© repro- chait Ă  la milice nationale d'empiĂ©ter sur ses pouvoirs 2 ; un bureau militaire, formĂ© sans son assentiment, multipliait ses exigences. Sans convocation, les compagnies s'Ă©taient assem- blĂ©es pour nommer un colonel, au mĂ©pris des droits que le ComitĂ© prĂ©tendait avoir Ă  cette dĂ©signation. BlessĂ© d'un tel manque d'Ă©gards, celui-ci refusa de ratifier l'Ă©lection et, par esprit de conciliation, proposa d'appliquer Ă  Bayeux l'acte constitutionnel de la garde nationale de Rouen, approuvĂ© par dĂ©cret du 21 octo- bre. Le bureau militaire, passant outre Ă  ce refus, installa ses officiers le 15 novembre. Quelques jours aprĂšs devait avoir lieu, dans la cathĂ©drale, la bĂ©nĂ©diction des drapeaux de la garde nationale. Le ComitĂ© dĂ©cida qu'il assisterait Ă  la cĂ©rĂ©monie sans vouloir reconnaĂźtre, par cette dĂ©marche fraternelle, l'Etat-ma- jor » illĂ©galement formĂ©. Le 22 novembre, quand ses membres se prĂ©sentĂšrent Ă  la porte principale de l'Ă©glise, ils la trouvĂšrent barrĂ©e par le corps des volontaires nationaux, qui les avaient prĂ©cĂ©dĂ©s. Ils durent entrer par la porte latĂ©rale et, arrivĂ©s prĂšs du chƓur, ne trouvĂšrent pas de chaises pour s'asseoir. IndignĂ©s du procĂ©dĂ©, ils se retirĂšrent sans attendre la cĂ©rĂ©monie et, de retour Ă  l'hĂŽtel de ville, rĂ©digĂšrent un procĂšs-verbal de protes- tation, suivi d'une adresse Ă  leurs concitoyens, oĂč ils offraient leur dĂ©mission 3. L'intervention de Wimpfen et Delauney fut sur l'intĂ©rĂȘt public, comme elle est seule lĂ©galement constituĂ©e et que c'est d'elle que dĂ©rivent tous les autres pouvoirs constituĂ©s, elle ressaisirait ses droits parce que c'est en elle que rĂ©side la sĂ»retĂ© publique, tant administrative qu'executive.» 1 RĂšglement pour la composition et l 'organisation de la municipalitĂ© de Cherbourg* arrĂȘtĂ© par les reprĂ©sentants de la commune Ă  l'hĂŽtel de ville, le 6 octobre 1789. Gkt'i'- bourg, imp. Clamorgan, 1789. — Le 25 octobre 1789, un officier des volontaires itS^o- naux de Cherbourg Ă©crivait qu'il faudrait mettre le corps municipal au beurre roux ». Arch. comm., Cherbourg, BB 11. 2 Arch. comm., Bayeux, Diu s. Registre des opĂ©rations du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral, etc' Avranches, avec Burdelot. 3 Voir ci-dessous, chap, XV, le dĂ©tail de ces nĂ©gociations. 374 LES COMITÉS PERMANENTS ET LES MUNICIPALITÉS D'une façon gĂ©nĂ©rale l'accord rĂšgne entre les municipalitĂ©s et les ComitĂ©s urbains. Celui deCaen admet dans son sein les officiers municipaux en exercice, les anciens maire et Ă©chevins. A Gran- ville, oĂč le conseil gĂ©nĂ©ral garde son existence indĂ©pendante, le ComitĂ© national ne se rĂ©unit Ă  lui qu'exceptionnellement pour dĂ©libĂ©rer sur les mesures de dĂ©fense et les officiers municipaux y sont dĂ©putĂ©s-nĂ©s ». A Carentan, Bayeux, Avranches, la fusion est complĂšte ComitĂ©s et municipalitĂ© ne forment plus qu'un seul corps. Le maire de Bayeux reste le prĂ©sident perpĂ©tuel du ComitĂ© bayeusain ; celui d' Avranches l'est alternativement avec un membre Ă©lu du ComitĂ©. Le corps municipal et national » de Cherbourg n'est qu'une municipalitĂ© Ă©largie, dans des circons- tances critiques, par l'adjonction des dĂ©putĂ©s des corporations. La rĂšgle n'est pas toutefois sans exceptions. Dans certaines villes, on voit apparaĂźtre un rĂ©el antagonisme entre les deux corps, par exemple Ă  Torigni T et surtout Ă  Vire. Le ComitĂ© permanent de Vire, qui a refusĂ© d'admettre les ecclĂ©siastiques et les nobles, frappe du mĂȘme ostracisme les officiers municipaux. Ses qua- rante-huit membres, qui tiennent leur pouvoir de l'investiture populaire, estiment que la dĂ©signation par brevet royal du maire et des Ă©chevins est entachĂ©e d'un caractĂšre de rĂ©probation » 8>. Ils se considĂšrent comme les seuls dĂ©positaires de l'autoritĂ©, reçoivent seuls le serment de la milice nationale et du dĂ©tache- ment du rĂ©giment d'AngoulĂȘme en garnison Ă  Vire et menacent d'annihiler l'action de la municipalitĂ© v3. 1 Arch. comm., Torigni, D 36. Registre des arrĂȘtĂ©s et dĂ©libĂ©rations du ComitĂ© national. 6 octobre et 1er dĂ©cembre 1789. Protestation contre la formation de ce ComitĂ© par le syndic de la municipalitĂ©. — Parlant des troubles qui divisent la municipalitĂ© et la commune » de Torigni, les procureurs-syndics du dĂ©partement de Saint-LĂŽ s'expriment ainsi, dans une lettre du 18 aoĂ»t 1789 Ce dernier corps a anĂ©anti la municipalitĂ© lĂ©galement Ă©tablie, pour former un comitĂ© auquel elle a attribuĂ© toutes les fonctions de la municipalitĂ©. » Arch. dĂ©p., Calvados, C 7715. 2 Lettre de Mauduit, maire de Vire, et des Ă©chevins Ă  l'intendant, 9 septembre 1789. Ibid., C 2688. 3 Nos fonctions, Ă©crit Mauduit, ont dĂ» naturellement devenir trĂšs circonscrites mais nous avons considĂ©rĂ© comme une trahison Ă  la foi du serment que nous avons prĂȘtĂ© de les remettre dans un moment d'agitation Ă  S. M. de qui nous les tenons, et nous nous sommes fait un devoir sacrĂ© de conserver jusqu'Ă  un nouvel ordre de choses celles qui ne pouvaient se faire que par nous-mĂȘmes sans prĂ©judice de la chose publique. Cette circonstance nous fait cependant naĂźtre des doutes et nous vous supplions, Monseigneur, de bien vouloir les mettre sous les yeux du ministre de la province. Ce comitĂ© a dĂ©jĂ  piĂ©tendu devoir ĂȘtre exclusivement prĂ©sent Ă  la prestation du serment des troupes qui sont ici en garnison, et nous nous sommes bien gardĂ©s de vouloir nous y opposer. Nous n'avons pas mĂȘme voulu y paraĂźtre alors, dans la crainte d'exciter quelque trouble ou de faire naĂźtre une division LES COMITÉS, LA MAGISTRATURE ET L'ARMEE 375 Les jugĂ©s royaux des diverses juridictions ne sont point tenus Ă  l'Ă©cart par les ComitĂ©s permanents, ils siĂšgent Ă  leurs assem- blĂ©es avec les avocats, les gens de loi et l'Ă©lite de la bourgeoisie. On y voit des lieutenants gĂ©nĂ©raux de bailliage, comme Robillard Ă  Saint-LĂŽ, Lavalley de la Hogue Ă  Carentan ; BrĂ©mesnil est prĂ©sident du ComitĂ© d'Avranches et Lescaudey de Manneval prĂ©sident de celui de PĂ©riers. Delleville, lieutenant gĂ©nĂ©ral de l'amirautĂ© de Bayeux, prend place le jour mĂȘme de sa rĂ©habili- tation dans le ComitĂ© de cette ville. Celui de Cherbourg s'associe Groult, procureur du roi de l'amirautĂ©. Les circonstances cri- tiques, dans plus d'un chef-lieu de bailliage, amĂšnent les officiers Ă  partager de leur agrĂ©ment », le droit de juridiction avec les ComitĂ©s, parfois mĂȘme Ă  leur en laisser entiĂšrement l'exercice. A Bayeux, par exemple, en prĂ©sence de la dĂ©claration des volon- taires nationaux, qui ne veulent accorder leur confiance qu'Ă  un corps judiciaire issu de leurs suffrages, et pour dĂ©fĂ©rer aux vƓux exprĂšs des officiers du bailliage, le ComitĂ© permanent consent Ă  ne se dĂ©mettre des fonctions de justice qu'aprĂšs le rĂ©tablisse- ment le plus complet de l'ordre *. Presque partout, les ComitĂ©s entretiennent d'excellents rap- ports avec les officiers commandant les troupes royales ils ont d'ailleurs tout intĂ©rĂȘt Ă  rechercher l'appui de ceux qui sont sincĂšrement dĂ©vouĂ©s Ă  la Nation. Le meurtre deBelzunce, victime d'une foule en dĂ©lire, n'est point imputable au ComitĂ© de Caen si le rĂ©giment de Bourbon est exĂ©crĂ© dans cette ville, celui d'Ar- tois y compte les plus chaudes sympathies. Le ComitĂ© de Bayeux compte parmi ses membres le chevalier de Praslin et le chevalier de Buffon, colonel et lieutenant-colonel du rĂ©giment de Lorraine. De Versamy, chef du dĂ©tachement du rĂ©giment d'AngoulĂȘme, en garnison Ă  Carentan, est le premier Ă©lu des vingt-huit mem- bres du ComitĂ© aux Ă©lections du 13 septembre. Dumouriez, marĂ©chal de camp et commandant pour le roi et la nation » Ă  Cherbourg, est un des membres les plus actifs, peut-ĂȘtre mĂȘme funeste. Cependant, Monseigneur, s'il allait dĂ©sormais vouloir porter ses prĂ©tentions plus loin et sur des objets qui intĂ©resseraient le service ou la gloire de S. M., quel parti devrions-nous prendre ?...» Arch. dĂ©p., Calvados, C 2688. Cf. Arch. comra., Vire. Registre des dĂ©libĂ©rations, 22 aoĂ»t 1789. La municipalitĂ© dĂ©cide de ne pas se prĂ©senter le lendemain sur la place du chĂąteau Ă  la prestation du serment, pour Ă©viter tout conflit. 1 Arch. comm., Bayeux, Di13biS. Registre des opĂ©rations du ComitĂ© [national, 18, 19 et 21 septembre 1789. — Le 2 septembre, le ComitĂ© de Caen, snr la motion du comte de VendƓuvre, prend un arrĂȘtĂ© eu cinq articles, relatif Ă  la protection des juges. IbitL, Caen, BB 93. 376 LES COMITÉS ET LE GOUVERNEUR DE NORMANDIE l'instigateur du ComitĂ©. Si le ComitĂ© de Granville chasse le com- mandant du roi, qu'il juge incapable de dĂ©fendre la ville, il n'en offre pas moins un siĂšge aux autres chefs de corps des troupes d'infanterie et d'artillerie. A plus forte raison, les ComitĂ©s permanents n'essaient-ils point de dresser leur autoritĂ© contre celle du gouverneur de la province ou du commandant en chef de la Basse-Normandie. C'est le duc d'Harcourt qui a provoquĂ© la crĂ©ation du ComitĂ© de Caen ; le 22 juillet, son hĂŽtel a Ă©tĂ© le berceau de l'institution nouvelle ; le 23, il a reçu avec sensibilitĂ© » la cocarde nationale que lui prĂ©- sentaient les dĂ©lĂ©guĂ©s du ComitĂ©. Pendant les graves dĂ©sordres qui suivent, on le conjure de demeurer Ă  Caen, de continuer Ă  se dĂ©vouer au salut de la ville». Quand le ComitĂ© s'est dĂ©finitivement organisĂ©, il invite le duc Ă  venir le plus souvent possible partager ses travaux. Le 6 aoĂ»t, celui-ci vient y goĂ»ter le pain destinĂ© aux indigents. Le 19 aoĂ»t, pour calmer l'effervescence excitĂ©e par l'Ă©meute qui a coĂ»tĂ© la vie Ă  Belzunce, il vient, par une dĂ©marche personnelle, consolider publiquement la confiance qui doit toujours rĂ©gner entre le gouvernement et le Comité» et pour donner une preuve Ă©clatante de cette harmonie il invite solennellement et de la maniĂšre la plus pressante le ComitĂ© Ă  envoyer chaque jour six de ses membres pour dĂźner Ă  sa table » W. AprĂšs son dĂ©part pour Versailles, oĂč il est rappelĂ© par le service du roi, il correspond avec le ComitĂ© de Caen et lui continue ses bons offices 2. Son frĂšre, le duc de Beuvron, vit dans les mĂȘmes termes de sympathie avec le ComitĂ© de Cherbourg. Lui aussi arbore la cocarde Ă  son chapeau, le 21 juillet. Le jour oĂč la garde nationale s'organise, il offre Ă  l'hĂŽtel du gouvernement un grand dĂźner aux membres du corps municipal et national et aux officiers de la milice. Le duc et la duchesse reconduisent ensuite leurs invitĂ©s jusqu'Ă  l'hĂŽtel de ville, au milieu des acclamations popu- laires 3. Pendant que les ComitĂ©s permanents dĂ©ployaient une grande activitĂ©, l'administration provinciale créée par l'Ă©dit de 1787 1 Arch. comm., Caen, BB93, 19 aoĂ»t 1789. 2 Lettre de rappel au duc d'Harcourt par le comte de Saint-Priest, 17 aoĂ»t 1789, et lettres postĂ©rieures du duc d'Harcourt au ComitĂ© de Caen, 20 et 31 aoĂ»t 1789. Ibid., carton 56. 3 Ibid., Cherbourg, BB 5. Registre des dĂ©libĂ©rations, 18 aoĂ»t 1789. Le duc de Beuvron retient Ă  sa table un dĂ©putĂ© du ComitĂ© permanent de Saint-Sauveur-le- Vicomte, qui est venu demander des munitions pour la milice nationale de cette ville. Ibid., BB 11, 15 octobre 1789. LES COMITÉS ET L'ADMINISTRATION PROVINCIALE 377 jouait un rĂŽle de plus en plus effacĂ©. Les assemblĂ©es de dĂ©parte- ment avaient Ă©tĂ© rĂ©unies pour la derniĂšre fois en 1788 ; la Com- mission intermĂ©diaire provinciale de Caen et les neuf bureaux intermĂ©diaires qui lui Ă©taient subordonnĂ©s se bornaient Ă  soute- nir, dans les parties d'administration qui leur Ă©taient confiĂ©es, l'Ă©difice chancelant de la chose publique ». Leurs opĂ©rations, assez restreintes, consistaient dans la confection des rĂŽles, l'en- tretien des routes, la distribution des ateliers de charitĂ© ; encore furent-elles paralysĂ©es sur plus d'un point par la rĂ©volution municipale de juillet-aoĂ»t 1789. Les bureaux intermĂ©diaires, obligĂ©s d'envoyer les mandements aux municipalitĂ©s pour le dĂ©partement des impositions, ne savaient comment procĂ©der dans les quelques villes oĂč le ComitĂ© permanent n'avait pas liĂ© son action Ă  celle du corps municipal et oĂč la jeune institution d'origine populaire disputait la gestion des intĂ©rĂȘts locaux Ă  l'ancienne administration municipale. Ce fut le cas pour Mortain^ et pour Torigni 2. Dans les autres villes de Basse-Normandie, oĂč cet antagonisme n'existait pas, les bureaux intermĂ©diaires vĂ©curent en bons termes avec les ComitĂ©s permanents, et plus d'un de leurs membres occupa une place prĂ©pondĂ©rante au sein de ces derniers 3l Quant Ă  l'intendant et aux subdĂ©lĂ©guĂ©s, dont l'influence Ă©tait agonisante, ils ne pouvaient reprocher aux ComitĂ©s nationaux de leur avoir portĂ© le coup mortel. Ceux-ci, en recueillant le 1 MĂ©moire de la ville de Mortain, 2 dĂ©cembre 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7707. PlacĂ© entre la nouvelle municipalitĂ© organisĂ©e par la volontĂ© du peuple » et les anciennes municipalitĂ©s créées en 1787 dans les trois paroisses de cette ville, le bureau intermĂ©diaire, aprĂšs de longues hĂ©sitations, adresse les mandements des impositions aux trois syndics municipaux, d'oĂč protestation du ComitĂ© qui envoie Ă  la Commission intermĂ©diaire une copie de son rĂšglement et nomination pour prou- ver la publicitĂ© de son institution et de ses fonctions non interrompues, non par- tagĂ©es, non disputĂ©es par aucuns soi-disant municipaux ». 2 Lettre des procureurs-syndics de Saint-LĂŽ aux procureurs-syndics provinciaux, relative Ă  Torigni, 18 aoĂ»t 1789. Ibid., C 7715. La commune de Torigni a anĂ©anti la municipalitĂ© lĂ©galement Ă©tablie pour former son comitĂ© auquel elle a attribuĂ© toutes les fonctions de la municipalitĂ©. Il rĂ©sulte de ces troubles que nous croyons ne devoir communiquer officiellement avec aucun de ces corps jusques aprĂšs votre dĂ©cision, que nous vous demandons trĂšs promptement, d'autant plus que le bien du service l'exige ». La Commission intermĂ©diaire provinciale rĂ©pondit le 19 dĂ©cembre 1789, quand la question fut rĂ©glĂ©e par le dĂ©cret de l'AssemblĂ©e uationale sur les municipalitĂ©s. 3 Par exemple, Faudoas, Cagny et Costy Ă  Caen ; Le Bret, Dozeville Ă  Bayeux ; Hervieu de Pont-Louis, Lemaignen, Duprey-DĂ©silles, Le Reculey de la Huberderie Ă  Carentan ; Groult, de Cherbourg, Ă  Valognes ; Fremin de Beaumont Ă  Coutances ; BrĂ©mesnil Ă  Avranches. 378 LES COMITÉS PERMANENTS ET L'INTENDANT pouvoir de leurs mains dĂ©faillantes, n'avaient fait qu'hĂ©riter d'une succession dĂ©jĂ  ouverte. Parti de Caen au mois de juillet, Cordier de Launay entretint de la Cour, oĂč il se tenait Ă  portĂ©e de Necker l, puis de Paris une correspondance courtoise avec le ComitĂ© de cette ville. Conscient de son impuissance absolue, affaibli par la maladie ,2, il laissa libre carriĂšre Ă  l'activitĂ© des ComitĂ©s locaux, nĂ©gligea de pourvoir au remplacement des subdĂ©lĂ©guĂ©s dĂ©missionnaires W et rejeta la responsabilitĂ© de son inertie sur l'anarchie W. Une remarque intĂ©ressante Ă  signaler, en guise de conclusion, c'est le parti pris d'ignorance systĂ©matique du pouvoir central Ă  l'Ă©gard des ComitĂ©s permanents. La dĂ©claration royale du 14 aoĂ»t 1789, sur la rĂ©pression des troubles publics, est adressĂ©e aux municipalitĂ©s seules. Il en est de mĂȘme de la loi martiale, et cependant les ComitĂ©s fonctionnent et sont en pleine activitĂ©. C'est aux municipalitĂ©s seules qu'est accordĂ© le droit de rĂ©qui- sition sur les milices nationales, en vue de ramener tous les ci- toyens Ă  l'obĂ©issance due aux autoritĂ©s lĂ©gitimes 5. Dans la pensĂ©e du roi, Ă©taient-ils lĂ©gitimes ces groupements spontanĂ©ment 1 Lettre de Cordier de Launay Ă  MM. du ComitĂ© national, 2 aoiU 1789. Arch. comm., Caen, carton 5P. M. Necker m'a ordonnĂ© de rester Ă  portĂ©e de lui et d'at- tendre les ordres que les circonstances le mettraient dans le cas de m'adresser ». 2 Les douleurs que me cause une incommoditĂ© que depuis trois mois je n'ai pu guĂ©rir... » Ibid. 3 Garantot, Ă  Cherbourg, a laissĂ© la charge de la subdĂ©lĂ©gation Ă  son secrĂ©taire Cabart ; celui-ci, dĂ©jĂ  secrĂ©taire du ComitĂ© permanent, se dĂ©clare accablĂ© de tra- vail. L'intendant prie son secrĂ©taire, Lamy-DesvallĂ©es, d'adresser dorĂ©navant la correspondance administrative aux officiers municipaux de Cherbourg ; les commis- saires des guerres feront le surplus de la besogne. Lettre de Garantot Ă  Lamy, 30 octobre 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C 2679. — A Granville, dĂšs le 10 aoĂ»t 1789, aprĂšs la dĂ©mission de Couraye-Duparc, c'est le corps municipal qui se charge de dĂ©pouiller le courrier de la subdĂ©lĂ©gation. Arch. comm. Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations, 10 aoĂ»t 1789. 4 Lettre de l'intendant Ă  Montaran, octobre 1789. Arch. dĂ©p., Calvados, C2644. Vous savez, lui Ă©crit-il, quel est actuellement le caractĂšre des commissaires dĂ©par- tis et combien leur influence a diminuĂ©. La formation des comitĂ©s et les arrĂȘtĂ©s qu'ils publient sont souvent en contradiction avec les dĂ©crets de l'AssemblĂ©e natio- nale. En vain les personnes qui avaient autrefois quelque autoritĂ© font-elles des efforts pour maintenir le respect dĂ» Ă  la loi. L'impulsion actuellement reçue s'op- pose Ă  son exĂ©cution, et il sera long et difficile de rĂ©tablir l'ordre. » 5 Un dĂ©cret du 15 oclobre 1789, qui fixait les attributions provisoires des ComitĂ©s civils et de police Ă©tablis dans les villes, et qui semblait donner Ă  ces organisations spontanĂ©es un caractĂšre officiel, se heurta au refus de sanction du roi. Il ne fut sanctionnĂ© que le 20 aoĂ»t 179'J, cinq mois aprĂšs la disparition des ComitĂ©s nationaux, Ă  un moment oĂč il n'avait plus guĂšre sa raison d'ĂȘtre, les bureaux administratifs de poliee des villes Ă©tant des commissions formĂ©es d'officiers municipaux rĂ©guliĂšrement Ă©lus. Coll. Rondonneau, t. L p. 37. LES COMITÉS PERMANENTS ET LE KOI 379 surgis en dehors de toute loi et de toute intervention gouverne- mentale, issus, au milieu des malheurs publics, de l'Ă©lection populaire et qui avaient imposĂ© leur collaboration et leur appui aux reprĂ©sentants de son pouvoir affaibli ? C'est le 3 dĂ©cembre 1789 qu'apparaĂźt pour la premiĂšre fois la reconnaissance officielle des ComitĂ©s permanents, dans les lettres patentes accordant aux corps, bureaux et ComitĂ©s qui ont Ă©tĂ© Ă©tablis par les com- munes ou municipalitĂ©s, pour administrer seuls ou conjointe- ment avec les officiers municipaux, le droit de continuer Ă  exercer les fonctions dont ils sont en possession » *. Reconnaissance tardive et concession temporaire, car l'Assem- blĂ©e nationale allait dĂ©cider leur suppression, en votant la loi municipale du 14 dĂ©cembre 1789, 1 Lettres-patentes du 3 dĂ©cembre 1789 sur dĂ©cret du 2 dĂ©cembre. Arch. dĂ©p., Calvados, C 10t9. Un dĂ©cret postĂ©rieur, du 3 fĂ©vrier 1790, invitait encore les Comi- tĂ©s librement Ă©lus par les communes Ă  se joindre aux officiers municipaux dans les lieux oĂč ils remplissaient les fonctions municipales conjointement avec les anciennes municipalitĂ©s » art. 4 ; mais l'article 5 du mĂȘme dĂ©cret interdisait la continuation des fonctioas municipales Ă  ces mĂȘmes ComitĂ©s aprĂšs la formation des munici- palitĂ©s. 380 ESPOIRS FONDÉS SUR RASSEMBLÉE NATIONALE CHAPITRE XIV l'organisation municipale des villes et des campagnes dĂ©cembre 1789 -fĂ©vrier 1790 Adresses des villes de Basse-Normandie demandant une Constitution Ă  l'AssemblĂ©e nationale. — DĂ©cret du 14 dĂ©cembre 1789 sur l'organisa- tion municipale du royaume. La rĂ©volution municipale de juillet 1789 endiguĂ©e suffrage censitaire et citoyens passifs. — Les Ă©lections dans les campagnes et dans les villes. Condition sociale des nou- veaux administrateurs municipaux ; Ă©lection de nombreux curĂ©s. Installation des municipalitĂ©s et rĂ©jouissances locales. Adresses des municipalitĂ©s nouvelles Ă  l'AssemblĂ©e nationale. Au milieu de l'anarchie que n'avaient pu enrayer les pouvoirs rĂ©volutionnaires Ă©levĂ©s sur les dĂ©bris de l'ancien rĂ©gime, l'Assem- blĂ©e nationale apparaissait Ă  tous les citoyens comme le seul rĂ©gulateur capable d'en corriger les excĂšs ; dans la nuit profonde oĂč sommeillaient les lois, elle demeurait le phare vers lequel se tournaient toutes les espĂ©rances. C'est d'elle qu'on attendait le remĂšde et le salut. Chaque jour lui apportait la rumeur inquiĂšte des citĂ©s avides de repos, impatientes d'une Constitution qui viendrait fonder l'ordre dans la libertĂ©. Deux adresses, parties de la Basse-Normandie traduisent fidĂšlement, entre beaucoup d'autres, les dĂ©sirs de ses habitants. Les dĂ©putĂ©s de l'ancienne assemblĂ©e municipale de Torigni, Ă©vincĂ©s par le ComitĂ© de juil- let 1789, Ă©crivaient Ă  l'AssemblĂ©e nationale TrĂšs affligĂ©s du dĂ©sordre qui rĂšgne dans le royaume et particuliĂšrement dans notre ville et ses environs, oĂč le tribunal ordinaire de la justice est devenu sans fonctions, oĂč les deniers de l'Etat ne se per- çoivent presque plus, oĂč le vertige, la force, l'injustice prennent la place de l'ordre, trĂšs vivement alarmĂ©s des malheurs qui peuvent rĂ©sulter de ce dĂ©sordre, nous avons, Messeigneurs, recours Ă  vos hautes puissances pour apporter secours et remĂšde Ă  ces maux. La Constitution du royaume, l'organisation, le rĂ©gime, les fonctions et pouvoirs des assemblĂ©es municipales sont des REQUÊTES DES VILLES A L'ASSEMBLEE NATIONALE 381 objets dont vous vous occupez sans relĂąche, nous le savons, Messeigneurs ; mais le mal est si grand et l'anarchie fait de tels progrĂšs que, si une loi consolatrice ne rĂ©tablit pas bientĂŽt l'ordre public, les sollicitudes paternelles du roi, les rĂ©sultats de vos augustes fonctions auront peine Ă  se faire respecter de la classe la plus pauvre de la sociĂ©tĂ© qui a pris et prend Ă  chaque instant un ascendant si funeste que les meilleurs citoyens voient leurs propriĂ©tĂ©s et leurs vies mĂȘme en danger » *. Si cette plainte Ă©tait unique, on pourrait y voir l'amĂšre boutade de gens maltraitĂ©s par les circonstances et que leur brusque dĂ©chĂ©ance incline au pessimisme ; mais elle se fait entendre de toutes parts; elle est l'indice certain d'un malaise gĂ©nĂ©ral. On la retrouve dans l'adresse que le ComitĂ© permanent de Caen rĂ©digea le 31 aoĂ»t 1789, dans la plĂ©nitude de ses fonctions, entourĂ© des membres de tous les ordres et des Ă©lecteurs de la ville aux fins d'avoir les avis sans distinction » 2. Il y montrait tous les liens de la sociĂ©tĂ© rompus, les lois et leurs ministres sans force », les tribunaux dĂ©serts et les juges exposĂ©s Ă  la vindicte populaire, la libertĂ© dĂ©fiant tout frein et toute rĂšgle, la mendicitĂ© croissant et avec elle l'esprit de brigandage ; il dĂ©plorait la dĂ©cadence de l'industrie, la cessation des travaux publics, les difficultĂ©s de perception de l'impĂŽt et l'accroissement du dĂ©ficit. Il invitait l'AssemblĂ©e nationale Ă  s'occuper sans interruption de la Consti- tution du royaume et particuliĂšrement de l'organisation, du rĂ©gime, des fonctions et pouvoirs des assemblĂ©es municipales et Etats provinciaux». C'est, ajoutait-il, la sanction seule de l'As- semblĂ©e nationale et du roi qui peut imprimer Ă  ces diffĂ©rents corps le respect, la permanence et l'autoritĂ© nĂ©cessaire pour rĂ©tablir l'ordre». L'AssemblĂ©e nationale, de son cĂŽtĂ©, sentait l'urgence de cette rĂ©forme. Par la voix de Gaultier de Biauzat, elle avait proclamĂ©, le 14 octobre 1789, la nĂ©cessitĂ© d'organiser au plus tĂŽt le rĂ©gime municipal pour assurer la perception de l'impĂŽt et l'obĂ©issance Ă  la loi 3. Le 12 novembre, elle dĂ©cida qu'il y aurait une munici- 1 TrĂšs humble adresse de la municipalitĂ© de la ville et bailliage de Toriyni en la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, Ă  nos seigneurs les dĂ©putĂ©s de la nation aux Etats gĂ©nĂ©raux Ă  Ver- sailles, 9 septembre 1789. Arch. nat., D ivbls 5. 2 Arch. comm., Caen, BB 93, 31 aoĂ»t 1789. — EnvoyĂ©e aux dĂ©putĂ©s du bailliage de Caen, cette adresse fut lue Ă  l'AssemblĂ©e le 24 septembre. Arcb. nat., C92. Le ComitĂ© la fit imprimer et envoyer aux diffĂ©rentes villes de la province et aux ComitĂ©s des principales villes du royaume. 3 ProcĂšs verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e nationale, 14 octobre 1789. Arch. nat., 382 LE DÉCHET DU 14 DÉCEMBRE 1789 palitĂ© dans chaque ville, bourg, paroisse et communautĂ© de campagne v>. Le 24 novembre, elle votait la suppression Ă©ven- tuelle des municipalitĂ©s existantes 2. Enfin un dĂ©cret du 14 dĂ©- cembre, en 62 articles, accompagnĂ© d'une instruction dĂ©taillĂ©e, rĂ©gla le mode Ă©lectoral, la composition et les fonctions des muni- cipalitĂ©s nouvelles 3. Tous les habitants de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, Français ou natu- ralisĂ©s, majeurs de 25 ans, domiciliĂ©s de fait depuis un an dans la commune, qui payaient une contribution directe de la valeur locale de trois journĂ©es de travail, qui n'Ă©taient ni domestiques, ni banqueroutiers, faillis ou dĂ©biteurs insolvables, formaient la classe des citoyens actifs et devaient concourir, dans les assem- blĂ©es primaires, Ă  l'Ă©lection des administrateurs municipaux. Pour ĂȘtre Ă©ligible, il fallait payer une contribution directe de la valeur locale de dix journĂ©es de travail. Le corps municipal se composait des officiers municipaux en nombre variable, de trois Ă  vingt et un, prĂ©sidĂ©s par le maire Ă©lu directement comme eux, chargĂ©s des dĂ©tails de l'administration, et d'un procureur de la commune sans voix dĂ©libĂ©rative, sorte d'avocat d'office de la communautĂ© ; dans les villes importantes, comme Caen et Cher- bourg, ce procureur Ă©tait assistĂ© d'un substitut. Des notables, Ă©lus en nombre double des officiers municipaux, venaient s'ad- joindre au corps municipal pour former le Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune. Celui-ci avait seul autoritĂ© pour dĂ©libĂ©rer sur les acquisitions ou aliĂ©nations d'immeubles, sur les impositions extraordinaires pour dĂ©penses locales, sur les emprunts, les travaux Ă  entreprendre, les procĂšs Ă  intenter, etc . . . et ne se rĂ©unissait que fort rarement. Le corps municipal comprenait un Conseil, siĂ©geant une fois par mois et un bureau permanent. Ses fonctions Ă©taient doubles les unes propres au pouvoir muni- cipal, comme la rĂ©gie des biens et revenus communaux, le rĂšgle- ment et l'acquit des dĂ©penses locales payĂ©es des deniers communs, la direction des travaux publics mis Ă  la charge de la communautĂ©, l'administration des Ă©tablissements publics entretenus aux frais ADxvih B11, n° 100. Volncy dĂšs le 14 aoĂ»t, Bouche et Bureaux de Pu/y le 28 aoĂ»t, ftahaud-Saint-Etienne le -21 septembre, avaient dĂ©jĂ  soulevĂ© la question, mais la discussion suivie sur la formation des municipalitĂ©s ne commença ; que 10 livres au lieu de 30 livres, pour l'Ă©ligibilitĂ©. Ce flĂ©chissement du cens ouvrait l'accĂšs des futures assemblĂ©es primaires Ă  de nombreux citoyens que l'insuffisance de leurs ressources avait exclus des assemblĂ©es paroissiales de 1787. En effet, le chiffre des Ă©lecteurs ruraux mentionnĂ©s aux procĂšs-verbaux de formation des municipalitĂ©s de 1787 est sensiblement infĂ©rieur Ă  celui des citoyens actifs qui fut Ă©tabli pour chaque commune en avril 1790, sur la demande des commissaires du roi 2. Mais ce dernier chiffre, Ă  son tour, est notablement infĂ©rieur Ă  l'ensemble des citoyens. Beaucoup de contribuables taxĂ©s Ă  des cotes trĂšs modestes, que le RĂšglement du 24 janvier 1789 avait rangĂ©s parmi les Ă©lecteurs des assemblĂ©es primaires de fĂ©vrier-mars 1789, se virent retirer le droit de vote par la lĂ©gislation nouvelle. Au lendemain d'un suffrage presque universel, celle-ci organisait un suffrage restreint. De tous ces journaliers de9 campagnes, fileurs de coton ou manouvriers, pauvres masuriers », pĂȘcheurs et matelots des paroisses mari- times, infimes artisans des villes, dont l'imposition s'Ă©chelonnait presque partout de 5 Ă  20 sols, elle forma une classe assez nom- breuse de prolĂ©taires sans action lĂ©gale sur la vie publique 3. i La journĂ©e de travail fut parfois Ă©valuĂ©e Ă  18 sols, comme Ă  Carentan et mĂȘme Ă  15 s., comme Ă  Mortain, ce qui abaissait le cens Ă©lectoral Ă  54 et 45 s. d'impositions. 2 J'ai fait ce travail de comparaison pour l'Ă©lection de Caen. Voici quelques dĂ©tails significatifs le premier chiffre indique le nombre des feux, le second le nombre d'Ă©lecteurs prĂ©sents Ă  l'assemblĂ©e de 1787, le troisiĂšme le nombre de citoyens actifs en 1790. AmayĂ©-sur-Orne 106, 16, 57 ; — Cagny 62, 9, 33 ; — Cambes, 60, 10, 41 ; - Carpiquet 180, 16, 96 ; — Cheux 220, 19, 121 ; — Cinq-Autels 19, 3, 12 ; — Collevillc 124, 15, 75 ; — Colombelles 52, 14, 31 ; — Courseulles 240, 14, 122 ; - Cuverville 32, 6, 25 ; — EmiĂ©ville 40, 12, 29; — Escoville 56, 12, 33 ; — Esquay 61, 9, 31 ; — Eterville 69, 10, 59 ; — Fontaine-Henry 89, 9, 47 ; — FrĂ©nouville 70, 12, 51 ; — Grainville-sur-Odon 95, 19, 44 ; — Lion 160, 23, 117 ; — Luc 280. 24, 227 ; — Mouen 70, 16, 48 ; — Ouistreham 150, 12, 102 ; — Ranville 120, 24, 77 ; etc. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7680 Ă  7685 et sĂ©rie Lm non inventoriĂ©e. MĂȘme en admettant des abstentions aux assemblĂ©es de 1787, l'Ă©cart reste considĂ©rable. 3 Quelques exemples tirĂ©s de l'Ă©lection de Caen. A Beuville 110 cotes, 26 ci- toyens actifs, 47 journaliers taxĂ©s de 10 Ă  15 sols pour exploitation ; Ă  BiĂ©ville 106 cotes, 52 citoyens actifs, une trentaine de journaliers Ă  5, 10 et 15 sols ; Ă  Bures 73 cotes, 32 citoyens actifs, 19 journaliers sans propriĂ©tĂ©, dont 15 taxĂ©s Ă  10 sols et 4 portĂ©s Ă  nĂ©ant » ; Ă  Cagny 63 cotes, 33 citoyens actifs, 20 contribuables au-des- sous de 15 sols ; Ă  Canteloup 38 cotes, 28 journaliers sont taxĂ©s au-dessous d'une livre ; Ă  BcrniĂšres, paroisse maritime 254 cotes, 138 citoyens actifs, 99 taxĂ©s au-des- sous de 3 livres charpentiers de marine, poissonniers, matelots, Ă©caleurs, etc.. Etats d'impositions de ces diverses paroisses en 1788, Arch. dĂ©p., Calvados, C 7837, 7838, 7840, 7854, 7856, 7861 sqq., et Ibid., sĂ©rie Lm non inventoriĂ©e. Liste des citoyens actifs et ĂȘligibles, dressĂ©e par ces municipalitĂ©s en 1790. LES ÉLECTIONS MUNICIPALES DANS LES CAMPAGNES 385 En rejetant hors de la citĂ©, sous le titre humiliant de citoyens passifs » tous ces individus pour qui la DĂ©claration des droits restait une suprĂȘme ironie, elle enraya la marche de la RĂ©vo- lution. ConsidĂ©rĂ©e Ă  ce point de vue, la loi d'organisation muni- cipale de 1789 a pu ĂȘtre prise pour une loi de rĂ©action bourgeoise, et M. Aulard a pu Ă©crire qu'elle avait Ă©tĂ© votĂ©e contre le peu- ple » i. Le 6 janvier 1790, des lettres patentes sanctionnant le dĂ©cret du 29 dĂ©cembre 1789 prescrivirent la convocation sous huit jours des assemblĂ©es Ă©lectorales pour la composition des municipa- litĂ©s 2. Dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, ces Ă©lections eurent lieu fin janvier et pendant le mois de fĂ©vrier 1790. Une consultation aussi vaste ne pouvait ĂȘtre Ă  l'abri de surprises et d'incidents ; elle fut toutefois exempte de violences et de dĂ©sordres graves. Une des causes les plus frĂ©quentes d'erreurs fut l'ignorance des paysans. A Monts, vingt-six des votants ne savaient ni lire ni Ă©crire et ne purent rĂ©diger leur billet sĂ©ance tenante les opĂ©ra- tions furent ajournĂ©es du 7 fĂ©vrier au 14 et ce jour lĂ , les Ă©lecteurs apportĂšrent leurs bulletins de vote remplis Ă  l'avance 3. A Ver- nix, l'Ă©lection se fit Ă  haute voix dans l'Ă©glise paroissiale, parce que la grande majoritĂ© des Ă©lecteurs ne savait pas Ă©crire 4. L'inexpĂ©rience des Ă©lecteurs dans une matiĂšre assez neuve pour eux vicia plus d'une opĂ©ration ; les formalitĂ©s lĂ©gales ne furent pointfpartout respectĂ©es ici, des parents Ă  un degrĂ© prohibĂ© Ă©taient Ă©lus, l'un maire et l'autre officier municipal 5>, lĂ , un citoyen actif, mais non Ă©ligible, fut nommĂ© procureur de la com- mune ° ; ailleurs, comme Ă  GiĂ©ville et Ă  Mesnil-Raoult, l'assem- blĂ©e Ă©lectorale n'avait pas Ă©lu son prĂ©sident, les Ă©lecteurs n'a- vaient pas prĂȘtĂ© le serment obligatoire, les officiers municipaux 1 Aulard, Histoire de la RĂ©volution française, p. 59. — JaurĂšs, Histoire socialiste, t. I, p. 396-398, explique L'attitude de la Constituante Ă  l'Ă©gard des prolĂ©taires par les rois raisons suivantes 1° elle redoutait que le prolĂ©tariat anarchique Ă©branlĂąt la propriĂ©tĂ© ; 2° elle redoutait que le prolĂ©tariat servile compromĂźt la RĂ©volution ; 3° elle refusait d'associer la partie ignorante du peuple Ă  la RĂ©volution, prĂ©parĂ©e par le progrĂšs des lumiĂšres. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, C 1019. 3 Arch. comm., Monts, RR 1. Registre des dĂ©libĂ©rations, 7 et 14 fĂ©vrier 1790. 4 Ibid., Vernix. Registre des dĂ©libĂ©rations, 8 fĂ©vrier 1790. — Chouains est si pauvre en gens lettrĂ©s, Ă©crit le curĂ© de cette paroisse, qu'elle ne peut mĂŽme trouver un gref- fier qui sache Ă©crire passablemcut. » Lettre du 6 mars 1790. Arch. dĂ©p., C 7631. 5 Arch. comm., Cretteville. Registre des dĂ©libĂ©rations, 24 janvier et 14 fĂ©vrier 1790. 6 Ibid., Hudimesnil. Registre des dĂ©libĂ©rations, 1er et 2 fĂ©vrier 1790. 25 386 IRRÉGULARITÉS DES OPERATIONS ÉLECTORALES n'avaient pas Ă©tĂ© Ă©lus au scrutin ou n'avaient pas obtenu la majo- ritĂ© absolue W. Ces divers cas se produisirent Ă  Bures 2, Che- vry,\\ y eut des protestations contre la formation du bureau le prĂ©sident et les scrutateurs dĂ©plaisaient Ă  une fraction notable de ces deux assemblĂ©es. A Ducey, le prĂ©sident de l'assemblĂ©e Ă©lectorale, le futur conventionnel SauvĂ©, se crut obligĂ© de protester contre les attaques d'adversaires qui le reprĂ©sentaient comme un fauteur de troubles publics11. A Verson, la cabale et l'intrigue introdui- sirent dans la municipalitĂ© nouvelle plusieurs membres de l'an- cienne, accoutumĂ©s depuis longtemps Ă  tyranniser les paroissiens en foulant aux pieds le rĂšglement, et en ne travaillant que dans les tĂ©nĂšbres » 12. A Arromanches, on voit une femme se mĂȘler aux opĂ©rations du scrutin, et rĂ©diger des bulletins mĂȘme pour ceux qui savent lire ». Des matelots qui ne paient pas d'impĂŽt ont formĂ© la municipalitĂ©, Ă©crit avec indignation le syndic municipal, et ont mis Ă  la tĂȘte de celle-ci un fermier non domiciliĂ© 13. Ailleurs, la fraude se pratique avec un audacieux cynisme Ă  Couvers, par exemple, oĂč un seul Ă©lecteur donne dix fois son suffrage pour 1 Arch. dĂŽp., Manche, C 629. Registre des dĂ©libĂ©rations du bureau intermĂ©diaire de Saint-LĂŽ, arrclĂ© du 27 fĂ©vrier 1790. Cf. une lettre des procureurs-syndics provin- ciaux aux procureurs-syndics du dĂ©partement de Saint-LO, 24 fĂ©vrier 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, Ç 7625. 2 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du dĂ©parte- ment de Moriain, 23 janvier 1790. Ibid., C 7625. 3 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du dĂ©parte- ment de Saint-LĂŽ, 18 fĂ©vrier 1790. Ibid., C 7625. 4 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du dĂ©parte- ment de Saint-LĂŽ, 16 mais 1700. Ibid., C 7625 et 7702 Voir les plaintes des ofliciers municipaux nommĂ©s dans l'assemblĂ©e Ă©lectorale du 2 fĂ©vrier, contre Brohon, lieute- nant gĂ©nĂ©ral du bailliage, qui a Ă©tĂ© Ă©lu maire dans une assemblĂ©e scissionnairc du 11 lĂ©vrier. Arch. Bat., D iv 11. 5 Arch. comm., Amfreville. Registre des dĂ©libĂ©rations. in Arch. dĂ©p., Calvados, G 7672. 7 Ibid., 17672. s, Aich. nal., I iv 41. 9 Arch. comm.. Bricqueville. Regislrc des dĂ©libĂ©rations. 3 et 4 fĂ©vrier 1790. 10 Ibid.. Montchaton. Registre des dĂ©libĂ©rations, 11 fĂ©vrier 1790. 11 Ibid., Ducey. Registre des dĂ©libĂ©rations, 17 janvier 1790. 12 Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie Lin non inventoriĂ©e. 13 Ibid., C 7881. ET CABALKS 387 l'Ă©lection du maire il. Il y eut quelque tumulte Ă  Tourlaville '2 et Ă  la Haye-Pesnel, oĂč les citoyens actifs, en dĂ©pit des rĂšglements, s'obstinĂšrent Ă  dĂ©clarer inĂ©ligibles le curĂ©, le vicaire et les rece- veurs des impositions 3. A Bricqueville, au contraire, le curĂ© de la seconde portion fut Ă©levĂ© Ă  la mairie par une fraude scanda- leuse, au dire des plus notables et des plus imposĂ©s de la com- mune ». Il s'Ă©tait fait remarquer en mars 1789, Ă  l'assemblĂ©e du clergĂ© tenue Ă  Coutances, par son antipatriotisme », par son refus de se solidariser avec la minoritĂ© libĂ©rale des curĂ©s qui de- mandaient la cessation des privilĂšges pĂ©cuniaires de leur ordre. Il fut Ă©lu cependant, grĂące Ă  la cabale affreuse d'un corps de sauniers qui n'ont pour toute fortune que le commerce de sel et qui sont le nombre dans toutes les assemblĂ©es ». Pour donner plus de poids Ă  leur requĂȘte, les plaignants dĂ©crivent les menus incidents des opĂ©rations Ă©lectorales et montrent le curĂ© fumant sa pipe dans le cimetiĂšre au milieu des sauniers et allant boire en leur compagnie dans un cabaret voisin ». Ils allĂšguent surtout, comme argument dĂ©cisif, que le curĂ© a eu un tiers de voix de plus qu'il n'y a de votants {AK Tous ces cas d'irrĂ©gularitĂ© dans la for- mation des municipalitĂ©s furent soumis, en l'absence d'instruc- tions prĂ©cises, au jugement de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen, qui, aprĂšs avis des bureaux intermĂ©diaires intĂ©ressĂ©s, validait l'Ă©lection ou prescrivait la tenue d'assem- blĂ©es Ă©lectorales nouvelles 5. Ces fonctions d'arbitre devaient passer, en avril 1790, aux commissaires dĂ©signĂ©s par le roi pour la formation des assemblĂ©es administratives des dĂ©partements et des districts °. Ceux-ci n'eurent que trĂšs rarement l'occasion de les exercer, car dĂšs le mois de mars presque toutes les municipa- litĂ©s Ă©taient constituĂ©es dans le ressort de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen7. 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 7631. 2 Arch. comm., Tourlaville. Registre des dĂ©libĂ©rations, du 10 au 13 fĂ©vrier 1790. Cf. Arch. nat., D iv 11. 3 Arch. comm., La Haye-Pcsnel. Registre des dĂ©libĂ©rations, 21 janvier 1790. 11 en fut de mĂȘme Ă  CondĂ©-sur-Seulles, d'aprĂšs une lettre du curĂ© au procureur-syndic du dĂ©parlement de Bayeux. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7631. 1 Lettre des habitants les plus notables et les plus imposĂ©s de Bricqueville Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 19 fĂ©vrier 1790. Arch. nat., D vi 21. ' Lettre de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen au bureau intermĂ© diaire de Caen, i mars 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7672. 6 Lettre du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral Ă  la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen. 13 avril 1790. Ibid., C 7733. 7 Lettre des procureurs-syndics provinciaux aux procureurs-syndics du dĂ©parte- ment de Saint-LĂč, 4 mars 1790. Ibid., C 7625. 388 LES OPÉRATIONS ÉLECTORALES DANS LES VILLES '^ Les Ă©lections municipales des villes, dont la police Ă©tait assurĂ©e par les gardes nationales, furent aussi peu troublĂ©es que celles des campagnes ; mais les opĂ©rations Ă©lectorales, plus compliquĂ©es, exigĂšrent une plus longue durĂ©e. D'aprĂšs le dĂ©cret du 14 dĂ©cem- bre, il devait y avoir dans les villes une seule assemblĂ©e jusqu'Ă  4,000 habitants, deux de 4,000 Ă  8,000, trois de 8,000 Ă  12,000 et ainsi de suite. Caen se partagea en dix sections le Bon-Sauveur, Saint-Louis, les Carmes, le Saint-SĂ©pulcre, l'Horloge, les Corde- liers, la Place Royale, l'UniversitĂ©, l'AcadĂ©mie et Saint-BenoĂźt *. La constitution des dix bureaux de vote et les scrutins pour la nomination d'un maire, un procureur et un substitut, quatorze officiers municipaux et vingt-huit notables ne prirent pas moins de douze jours. NommĂ©s successivement, du 1er au 12 fĂ©vrier, les membres de la municipalitĂ© nouvelle ne furent installĂ©s que le 18 fĂ©vrier 2. Bayeux forma trois arrondissements Ă©lectoraux, ceux des Cordeliers, des Augustins et des Capucins. Le premier scrutin eut lieu le dimanche 27 janvier, l'installation de la muni- cipalitĂ© le 3 fĂ©vrier 3>. A Vire, oĂč la population dĂ©passait 8,000 habitants, il y eut trois assemblĂ©es Ă  l'hĂŽpital gĂ©nĂ©ral, aux Cordeliers et Ă  l'Ă©glise Saint-Thomas ; plusieurs scrutins de ballottage prolongĂšrent leur durĂ©e du 2 au 9 fĂ©vrier 4. A CondĂ©- sur-Noireau, qui comptait prĂšs de 3,800 Ăąmes, tous les habitants qui acquittaient une contribution directe de 54 sols, soit 18 sols par journĂ©e de travail, furent invitĂ©s Ă  se rĂ©unir le vendredi 5 fĂ©vrier Ă  l'Ă©glise Saint-Sauveur pour procĂ©der Ă  l'Ă©lection de la municipalitĂ© nouvelle 5. Carentan, ville peuplĂ©e de 3,200 habi- tants, n'eut qu'une seule assemblĂ©e, rĂ©unie le 24 janvier Ă  l'Ă©glise Notre-Dame, sous la prĂ©sidence du premier Ă©chevin les citoyens actifs, qui payaient 3 livres d'impositions directes y Ă©lurent un maire, huit officiers municipaux et dix-huit notables 6. A Cher- bourg, forte de plus de 11,000 habitants, le ComitĂ© municipal et national fixa au mardi 9 fĂ©vrier les assemblĂ©es qui devaient se tenir dans les trois sections de la Juridiction, de la rue Grande- VallĂ©e et de la Poudrerie neuve. La valeur de la contribution 1 Arch. comm.. Caen, BB 97, f° 14-16. Registre du ComitĂ© gĂ©nĂ©ral municipal et permanent. Coupe de la commune en 10 sections. 2 Ibid., BB 96. DĂ©libĂ©rations du l" au 12 fĂ©vrier 1790, et Dl, DĂ©libĂ©ration du 18 fĂ©vrier 1790. 3 Ibid., Bayeux, Di12. Registre des dĂ©libĂ©rations, 27 janvier et 3 fĂ©vrier 1790. 4 Ibid., Vire. Registre des dĂ©libĂ©rations, 2-9 fĂ©vrier 1790. 5 Ibid., CondĂ©, BB1. Registre des dĂ©libĂ©rations, 20 janvier 1790. Ibid,, Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, 24 janvier 1790. LES OPÉRATIONS ÉLECTORALES DANS LES VILLES 389 directe avait Ă©tĂ© fixĂ©e Ă  3 livres pour les citoyens actifs et Ă  10 li- vres pour les Ă©ligibles. L'Ă©lection du maire, du procureur de la commune et de son substitut, de douze officiers municipaux et de vingt-quatre notables demanda onze jours, du 9 au 20 fĂ©- vrier . Les Ă©lecteurs Granvillais procĂ©- dĂšrent le 1er fĂ©vrier et les quatre jours suivants au choix d'un maire, d'un procureur, de huit officiers municipaux et de seize notables. Un seul incident vint troubler leurs opĂ©rations l'offi- cier du gĂ©nie qui commandait Ă  la caserne refusa les clefs de la salle du scrutin et l'intervention de la garde nationale fut nĂ©ces- saire pour vaincre sa rĂ©sistance 3. Avranches comptait plus de 4,000 habitants ; le ComitĂ© permanent, aprĂšs avoir fixĂ© Ă  20 sols la valeur de la journĂ©e de travail, avait dĂ©cidĂ© que les Ă©lections auraient lieu le 20 janvier dans les deux sections de Notre-Dame- des-Champs et de Saint-Gervais. Mais une lettre du dĂ©putĂ© du bailliage, Burdelot, lui ayant annoncĂ© que de nouvelles instruc- tions allaient paraĂźtre sur la formation des municipalitĂ©s, il se ravisa pour ne point s'exposer Ă  faire des opĂ©rations illĂ©gales » et en ajourna la date au 3 fĂ©vrier. Du 3 au 11 fĂ©vrier, furent nommĂ©s le maire et le procureur, huit officiers et seize notables W. Mortain, avait deux paroisses, Saint-Guillaume et le Rocher, et comptait une population de 2,554 habitants. La journĂ©e de tra- vail n'y fut Ă©valuĂ©e qu'Ă  15 sols. L'assemblĂ©e Ă©lectorale, qui se tint dans l'auditoire du bailliage, sous la prĂ©sidence du lieutenant gĂ©nĂ©ral Vaufleury de Saint-Cyr et qui dura trois jours, nomma un maire, un procureur, cinq officiers municipaux et douze notables 5. Pour Ă©lire les dix-huit membres du Conseil gĂ©nĂ©ral et le procureur de la commune, les citoyens actifs de Tinchebrai se rĂ©unirent du 17 au 21 fĂ©vrier 1790 6. 1 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Registre des dĂ©libĂ©rations, 9-20 fĂ©vrier 1790. 2 Il en fut de mĂȘme Ă  Tailleville, hameau de Langrune qui, ayant une collecte propre, s'Ă©rigea en municipalitĂ© sous l'influence du prieur Bruzeau Arch. dĂ©p., CaJ- vados, sĂ©rie Lm non inventoriĂ©e, et Ă  Isigny, dont les deux communautĂ©s, urbaine et rurale, perpĂ©tuellement en conflit, formĂšrent deux municipalitĂ©s particuliĂšres Arch. nat., D ivbis 10, 231. — Un phĂ©nomĂšne inverse se produisit pour les communautĂ©s d'Ifs et de son hameau Bras, qui se fondirent en une seule municipalitĂ©. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7672. 3 Arch. comm., Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations, 1-5 fĂ©vrier 1790. 4 Ibid., Avranches. Registre des dĂ©libĂ©rations n° 2, 3-11 fĂ©vrier 1790. 5 Ibid., Mortain. Registre des dĂ©libĂ©rations, 27-29 janvier 1790. 6 Ibid., Tinchebrai. Registre des dĂ©libĂ©rations, 17-21 fĂ©vrier 1790. tX COMPARUTION DES KLECTKURS URBAINS En limitant au chiffre de 650 le maximum des Ă©lecteurs que devait contenir chaque assemblĂ©e primaire, le dĂ©cret du 14 dĂ©- cembre avait voulu prĂ©venir les dĂ©sordres et la confusion insĂ©pa- rables des rĂ©unions trop nombreuses. Ce danger n'Ă©tait pas Ă  redouter en Basse-Normandie, oĂč l'indiffĂ©rence Ă©carta plus d'un citoyen actif des salles du scrutin. Les dix sections de Caen ne rĂ©unirent jamais, Ă  elles toutes, plus de 1,142 suffrages. Les trois sections de Bayeux comptĂšrent au plus 145, 132 et 110 votants, au total 387. Les Ă©lecteurs de Granville, au nombre de 198, se partagĂšrent entre deux bureaux de vote ; les deux assemblĂ©es primaires d'Avranches ne recueillirent respectivement que 142 et 133 voix. 117 votants Ă  Mortain, 56 Ă  Carentan ne pouvaient former des groupes fort tumultueux. Une Ă©tude mĂ©thodique de la comparution individuelle aux assemblĂ©es primaires de fĂ©vrier 1790 fournirait sans doute la preuve que d'assez nombreuses abstentions durent s'y produire. Ceux-lĂ  mĂȘme qui avaient fait acte de prĂ©sence le premier jour se lassĂšrent de voir traĂźner les opĂ©rations Ă©lectorales, ou attribuĂšrent moins d'importance Ă  la nomination des notables qu'Ă  celle du maire et des officiers muni- cipaux et, dans certaines villes, les assemblĂ©es primaires allĂšrent se dĂ©cimant chaque jour jusqu'Ă  tomber Ă  un chiffre insignifiant V. Le maire de Mortain avait obtenu 73 suffrages sur 117 le dernier des notables fut Ă©lu par vingt voix ! Le choix des Ă©lecteurs, dans les villes, se porta sur des person- nages dĂ©jĂ  fort en vue, que leur situation sociale, leurs bienfaits, leur popularitĂ© dĂšs longtemps acquise dĂ©signaient Ă  la plupart des suffrages. Les municipalitĂ©s urbaines ne continrent pas beaucoup d'hommes nouveaux. A Vire, oĂč l'Ă©ducation rĂ©volu- tionnaire semble avoir Ă©tĂ© plus avancĂ©e qu'ailleurs 2, par 246 voix sur 397, le chef du parti des novateurs, Richard Castel, fut Ă©lu maire au second tour de scrutin. A Bayeux, au contraire, 233 voix sur 387 votants confiĂšrent l'administration de la ville Ă  l'Ă©vĂȘque, de Cheylus, malgrĂ© son attitude assez nettement antirĂ©volu- tionnaire. Les autres villes choisirent, d'une façon gĂ©nĂ©rale, leurs 1 Le ComitĂ© de Caen avait dĂ» reculer de; deux jours l'ouverture du scrutin, par suite de l'abstention presque complĂšte des citoyens actifs. Arch. comm., Caen, BB97, f°21. — Le nombre des votants, qui Ă©tait de 1,142 le 3 fĂ©vrier, Ă©tait dĂ©jĂ  tombĂ© Ă  1,000 le lendemain, lbhl, BB . Un des plus curieux tĂ©moignages de sympathie et d'admira- tion que l'AssemblĂ©e nationale ait alors reçus est celui d'une petite paroisse voisine de Cherbourg, celle de GrĂ©ville. Les paysans de ce village perdu Ă  l'extrĂ©mitĂ© du Cotentin, au seuil des vastes et mĂ©lancoliques landes de la Hague, traduisirent leur enthou- siasme dans une langue agreste, d'une savoureuse naĂŻvetĂ©. AppuyĂ©s sur nos bĂȘches, nous avons jurĂ©, par nos charrues, de faire tous nos efforts corporels et intellectuels pour fertiliser nos champs et rendre nos moissons abondantes W, . . VoilĂ  pour vous, s'Ă©crient-ils, aristocrates Ă  baĂŻonnettes, . . . pour vous qui proj etez des pactes de famine ». Leur reconnaissance prend un tour original. Ils rĂȘvent d'associer Ă  leurs travaux rustiques, pour le rendre plus durable, le souvenir des grands hommes Ă  qui ils 1 Voici la liste des adresses des villes et bourgs de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ayant notifiĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale la formation de leurs municipalitĂ©s Granville, 8 fĂ©- vrier 1790; paroisses de l'Ă©lection de Mortain, 17 fĂ©vrier ; Creully, 19 fĂ©vrier ; Cher- bourg, 21 fĂ©vrier ; Tourlaville, 21 fĂ©vrier ; Saint-Lo, 15 fĂ©vrier ; Caen, 28 fĂ©vrier ; Montebourg, 22 fĂ©vrier ; GrĂ©ville-Hague, 1er mars ; Isigny, 2 mars. — Arch. nat., C 104, 105, 108, 109 et 110. 2 Arch. comra, Cherbourg, BB 5, fol. 211-243. 3 Ibid., Granville. Registre de correspondance 1, 8 fĂ©vrier 1790. Ce mĂȘme jour, la municipalitĂ© envoie six lettres pour notifier sa formation, au comte de Saint- Priest, ministre de la province, Ă  Couraye-Duparc, son dĂ©putĂ© extraordinaire Ă  Paris, Ă  l'intendant de Caen, Ă  PerrĂ©e-Duharnel, son dĂ©putĂ© aux Etats gĂ©nĂ©raux, Ă  Necker et Ă  l'AssemblĂ©e nationale. 4 Arch. nat., C 108. 5 Arch. comm., Caen. Registre de correspondance 1. Lettre de la municipalitĂ© de Caen Ă  Cussy, 28 fĂ©vrier 1790. 6 Adresse des citoyens de la commune de GrĂ©ville Ă  la Hague, Basse-Normandie, Ă  l'AssemblĂ©e nationale, lor mars 179'L Arch. nat., C 110, 211. 396 UNE ADRESSE RUSTIQUE A L-ASSEMBLÉE NATIONALE doivent cette RĂ©volution qui leur a donnĂ© la libertĂ© *. Leurs enfants apprennent Ă  graver, sur les outils ruraux, bĂȘches, rĂąteaux, houlettes, Ă  tracer le long des chemins les noms des prĂ©sidents de l'AssemblĂ©e nationale ; celui du Roi sera gravĂ© sur les charrues » 2. L'organisation municipale des communes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen Ă©tait Ă  peine achevĂ©e, lorsqu'au dĂ©but d'avril 1790, celle-ci vit commencer les opĂ©rations qui devaient aboutir Ă  son dĂ©mem- brement et Ă  sa disparition. Dans la pensĂ©e de l'AssemblĂ©e natio- nale, la loi qui rĂ©gularisait les institutions municipales Ă©tait la prĂ©face d'une rĂ©forme gĂ©nĂ©rale, qui devait modifier profondĂ©- ment la carte administrative du royaume. En condamnant les intendants et leurs suppĂŽts, la Constituante voulut effacer jus- qu'au souvenir des circonscriptions que ceux-ci avaient rĂ©gies ; elle abolit les divisions administratives existantes arrondisse- ment, Ă©lection ou dĂ©partement, intendance ou gĂ©nĂ©ralitĂ© ; elle les remplaça par d'autres divisions, plus nombreuses et mieux Ă©quilibrĂ©es cantons, districts et dĂ©partements. La rĂ©alisation de cette rĂ©forme, qui demanda de longs mois, devait comprendre deux phases successives la phase lĂ©gislative qui, de novem- bre 1789 Ă  mars 1790, fut consacrĂ©e Ă  la dĂ©limitation et Ă  la division des dĂ©partements ; la phase executive, pendant laquelle s'Ă©labora, d'avril Ă  juillet 1790, sous la haute direc- tion de commissaires royaux, l'organisation du rĂ©gime adminis- tratif nouveau. 1 Cette conquĂȘte leur paraĂźt la plus prĂ©cieuse de toutes. Ils jurent de vivre et mourir en hommes libres et d'Ă©tendre cette libertĂ© jusqu'aux limites sacrĂ©es que prescrit la loi ». Cette adresse, d'un caractĂšre nettement rĂ©volutionnaire, se termine par une formule que l'usage rĂ©pandra La libertĂ© ou la mort ! » 2 Au premier rang des nombreuses signatures qui terminent cette adresse, j'ai relevĂ© le nom de N. Millet. C'est, Ăč n'en pas douter, l'aĂŻeul du grand peintre de l'AngĂ©lus » et des Glaneuses ». François Millet, enfant de GrĂ©ville, ne devait-il pas, dans son Ɠuvre pacifique, immortaliser les descendants de ces robustes et cou- rageux travailleurs, qui demandaient Ă  leur bĂȘche et Ă  leur charrue la rĂ©gĂ©nĂ©ration du payi‱>. LE PLAN DU COMITÉ DE CONSTITUTION ÂŁ99 L'AssemblĂ©e nationale consacra prĂšs de cinq mois Ă  cette Ɠuvre. Ce ne fut qu'Ă  partir de septembre 1789 qu'elle s'y employa avec mĂ©thode et esprit de suite W, Le 29 septembre, le ComitĂ© de constitution, par la voix de son rapporteur Thouret, lui prĂ©senta un projet de division qui partageait le royaume en quatre vingts dĂ©partements de 324 lieues carrĂ©es chacun, 720 dis- tricts de trente-six lieues carrĂ©es et 5,780 cantons de quatre lieues carrĂ©es 2. Cette conception trop rigoureusement gĂ©omĂ©- trique trouva un adversaire rĂ©solu dans Mirabeau. Rebelle Ă  ce qu'il croyait une innovation tĂ©mĂ©raire, Mirabeau demandait qu'on composĂąt avec les prĂ©jugĂ©s, que la division fĂ»t fondĂ©e sur des rapports dĂ©jĂ  connus, qu'on ne tranchĂąt point, en prĂ©sence d'une opinion publique non prĂ©parĂ©e pour un tel dĂ©membrement, tous les liens qui resserraient depuis si longtemps les mƓurs, les habitudes et les coutumes. Le projet qu'il dĂ©posa maintenait les provinces Ă  la base du partage et taillait dans leur ressort cent vingt dĂ©partements 3. Thouret sut faire Ă  Mirabeau d'habiles concessions, tout en dĂ©fendant le principe d'une division pure- ment gĂ©ographique. La nouvelle division, dit-il, dont le ComitĂ© n'a jamais entendu que l'exĂ©cution serait rigoureusement gĂ©o- mĂ©trique, peut se faire presque partout en observant les conve- nances locales et surtout en respectant les limites des provinces. Aucune province n'est dĂ©truite ni vĂ©ritablement dĂ©membrĂ©e, elle ne cesse pas d'ĂȘtre province, et la province du mĂȘme nom qu'auparavant pour avoir des districts nouveaux ». Et Thouret, avocat de Rouen, pouvait citer l'exemple de la Normandie, qui, dĂ©membrĂ©e depuis deux siĂšcles en trois intendances, avait con- servĂ© si vivace la conscience de son individualitĂ© provinciale W. 1 La dĂ©claration des Droits de l'homme et les grandes lignes de la Constitution avaient occupĂ© les sĂ©ances d'aoĂ»t et de septembre ; malgrĂ© l'intervention successive de plusieurs dĂ©putĂ©s, Volney le 18 aoĂ»t, Bouche et Bureaux de Puzy le 28 aoĂ»t, Camus le 19 septembre, Babaud Saint-Etienne le 20, la rĂ©forme administrative avait dĂ» ĂȘtre ajournĂ©e. 2 Arch. nat., AD xvin B10. ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e nationale, n° 87. SĂ©ance du 29 septembre 1789. - Arch. dĂ©p., Orne, L 76. Bapport du nouveau ComitĂ© de constitution fait Ă  l'AssemblĂ©e nationale le 29 septembre 1789, sur l'Ă©ta- blissement des bases de la reprĂ©sentation proportionnelle. Paris, Beaudoin, 1789, 24 p. 3 ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e nationale, n° 115, sĂ©ance du 3 novem- bre 1789. Arch. nat., AD xvin B11 . — Plan de division du royaume et rĂšylement pour son organisation, prĂ©sentĂ© par M. le comte de Mirabeau Ă  l'AssemblĂ©e nationale. Arch. nat., ADi 60. 1 Discours de M. Thouret, membre du ComitĂ© de Constitution, ail Ă  l'AssemblĂ©e nationale sur la nouvelle division territoriale du royaume, 3 novembre 1789. Paris, Beaii'loin, 1789, 20 p. Ibid.. ADi On. 400 LE DÉCRET DU 1. NOVEMBRE 1789 Le 19 novembre 1789, l'AssemblĂ©e dĂ©crĂ©ta la division du royaume en dĂ©partements dont le nombre pouvait varier entre 75 et 85, et chargea son ComitĂ© de constitution d'en Ă©tablir le plan. Un ComitĂ© de division, sous-commission nommĂ©e par ce dernier, se mit aussitĂŽt Ă  l'Ɠuvre. Une conception erronĂ©e semble avoir prĂ©sidĂ© Ă  ses travaux, celle du respect dĂ» aux droits des anciennes provinces. Ses membres crurent devoir adopter, comme base de la formation des nouvelles circonscriptions administra- tives, un ressort fictif, qui ne correspondait Ă  rien de prĂ©cis dans la rĂ©alitĂ© la province t%\ Leur procĂ©dĂ© de travail consista Ă  crĂ©er, pour les besoins du moment, des divisions au territoire assez nettement dĂ©terminĂ©, capables de se prĂȘter Ă  un partage, et de faciliter ainsi le mode de constitution des dĂ©partements 2. Par suite de cet artifice, deux opĂ©rations successives Ă©taient nĂ©cessaires la dĂ©limitation des provinces entre elles, puis la division intĂ©rieure de chacune d'elle en dĂ©partements. Les dĂ©pu- tĂ©s des provinces limitrophes devaient se concerter pour la pre- miĂšre opĂ©ration et ceux de chaque province particuliĂšre, pour la seconde. La Normandie fut donc dĂ©limitĂ©e avant d'ĂȘtre divisĂ©e. Les dĂ©putĂ©s normands tinrent, avec ceux des pays voisins, une sĂ©rie de confĂ©rences ; ils eurent d'assez nombreuses difficultĂ©s Ă  vaincre. Cette province, — pour employer l'expression imprĂ©cise dont ils se servaient, — n'avait ni une surface rigoureusement dĂ©terminĂ©e, ni des contours nettement arrĂȘtĂ©s. Sans doute, les quatre-vingt-douze lieues de cĂŽte qui la bordaient au nord et Ă  1 L'opinion, si fortement ancrĂ©e dans l'esprit public, que la France Ă©tait, avant 17slt, divisĂ©e en provinces ayant des limites exactes et prĂ©cises, et que les dĂ©parte- ments se sont comme encastrĂ©s dans ces anciennes provinces, a Ă©tĂ© battue en brĂšche par M. Brette. Elle est sortie, d'aprĂšs lui, de l'ignorance oĂč le roi, l'adminis- I ni lion et la plupart des Constituants se trouvaient du nombre, de l'Ă©tendue et des limites des divers ressorts du royaume. Les Constituants ont commis une erreur en parlant du respect dĂ» aux anciennes limites des prĂ©tendues provinces. En rĂ©alitĂ©, la province n'avait pas d'existence rĂ©elle dans la France de 1789 la preuve en esl fournie par le Rapport du ComitĂ© de Constitution, du 29 septembre 1789, qui s'ex- prime ainsi Le royaume est divisĂ© en autant de division- diffĂ©rentes qu'il y a de diverses espĂšces de rĂ©gimes et de pouvoirs en diocĂšses sous le rapport ecclĂ©sias- tique; en gouvernements sous le rapport militaire en gĂ©nĂ©ralitĂ©s sous le rapport administratif, et en bailliages sous le rapport judiciaire. » 11 n'y est pas l'ait mention de la province. A. Brette, La RĂ©forme des dĂ©parlements Revue politique et parlemen- taire, 1909, t. LXII, p. 258-281. 2 On se prĂ©occupa surtout dans cette Ɠuvre hĂątive, tout en faisant des conces- sions Ă  l'opinion qui voulait conserver les anciennes provinces, de dĂ©couper des cir- conscription- d'Ă©tendue Ă  peu prĂšs comparable, destinĂ©es Ă  servir de cadres Ă  toute l'organisation administrative. » Gallois, RĂ©gions naturelles et Xoms de pai/s, p. 11. DÉLIMITATION DE LA NORMANDIE ET DES PAYS VOISINS 401 l'ouest lui formaient une frontiĂšre naturelle ; mais les limites de terre, qui, de l'embouchure du Couesnon Ă  celle de la Bresle, la sĂ©paraient de la Bretagne, du Maine, du Perche, de l'Ile-de- France et de la Picardie, Ă©taient conventionnelles et indĂ©cises. S'il y avait, en 1789, un gouvernement de Normandie, des dio- cĂšses, des gĂ©nĂ©ralitĂ©s et des bailliages normands *, ces divisions militaires, ecclĂ©siastiques, administratives et judiciaires, ne prĂ©sentaient, vu leur diversitĂ© d'origine, aucune coĂŻncidence entre leurs territoires respectifs. Il eut Ă©tĂ© impossible d'assigner un cadre dĂ©terminĂ© au gouvernement militaire, dont le titulaire ne possĂ©dait qu'une fonction honorifique sans autoritĂ© rĂ©elle 2. Les ressorts des bailliages, essentiellement variables selon les circonstances, ne se prĂȘtaient pas davantage Ă  une exacte dĂ©limi- tation !3'K La province ecclĂ©siastique de Rouen, avec ses sept diocĂšses, dĂ©bordait sur l'Ile-de-France et confinait Ă  l'Oise W. Des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s normandes, deux empiĂ©taient sur des pays qui n'Ă©taient pas normands celle d'Alençon, sur le Thimerais et le Perche 5, celle de Rouen, sur le Vexin français 6. Un principe guida les dĂ©putĂ©s dans leurs travaux ; ils dĂ©ci- dĂšrent de conserver, autant que possible, sous la mĂȘme adminis- tration les pays qui avaient pris la longue habitude de payer ensemble leurs impĂŽts, de voter en commun la confection de leurs routes. Des procĂšs-verbaux de dĂ©marcation, signĂ©s par les divers commissaires, tracĂšrent une nouvelle ligne de partage entre la Normandie d'une part, la Picardie, l'Ile-de-France, le Maine et la Bretagne d'autre part 7\ La superficie de la province, lj Sur ces circonscriptions diverses, voir A. Brette, Documents relatifs Ă  la Convo- cation, etc., t. I. p. 39 les gouvernements ; p. 460-461 les gĂ©nĂ©ralitĂ©s ; p. 510-511 les diocĂšses. — Cf. Brette, Les Limites et les Divisions territoriales de la France en 1789. A la fin de cet ouvrage, l'auteur a dressĂ© des caries sommaires, non pour indiquer les bornes exactes de ces divisions territoriales, mais pour montrer les rapports que celles-ci avaient entre elles et leur ensemble Ă  une date prĂ©cise. 2 A. Brette, Les Limites et les Divisions, etc., p. 103. 3 Ibid., p. 117. Dans son Atlas des bailliages, l'auteur dĂ©limite ceux-ci en tant que circonscriptions Ă©lectorales, Ă  la date de 1789. 4 DiocĂšses de Bouen, Bayeux, Avrancbes, Evreux, SĂ©es, Lisieux et Coutances. 5 Elections de Verneuil subdĂ©lĂ©gations de Verneuil et de ChĂ teauneuf-en-Thime- rais\ et de Mortagne subdĂ©lĂ©gations de Mortagne, BellĂšme et Nogent-le-Botrou. 6 Elections de Magny et de Chaumont-en-Vexin. 7 ProcĂšs-verbaux de dĂ©marcation, faits au ComitĂ© de Constitution et conservĂ©s aux Archives nationales limites entre le dĂ©partement de Beauvoisis et celui de Normandie », arrĂȘtĂ©es le 1er fĂ©vrier 1790 par les ducs de Liancourt et de Verdonne, commissaires du Beauvoisis ; le marquis de Mortemart, Cherfils et Bourdon, com- missaires du dĂ©partement de Normandie ». Arch. nat., D ivbisl, CettedĂ©limita- 26 4Q'l . LE PARTAGE DU VEXIN ET DU PEKCI1E telle qu'on la reconstitua provisoirement en vue de son dĂ©mem- brement immĂ©diat Ă©tait infĂ©rieure au ressort des trois gĂ©nĂ©rĂą- mes administratives rĂ©unies. La Normandie des intendants perdait, au profit de l'Ile-de-France, la partie du Vexin situĂ©e sur la rive gauche de l'Epte fl, qui formait dans l'ancienne gĂ©nĂ©- ralitĂ© de Rouen les Ă©lections de Chaumont et Magny. Vers le sud-est, le Thimerais et le Perche, autrefois englobĂ©s dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© d'Alençon, furent dĂ©pecĂ©s une ligne conventionnelle, traversant les Ă©lections de Verneuil et de Mortagne, rejoignit l'Avre Ă  l'Huisne, laissant Ă  la Normandie Mortagne et BellĂȘme, lui enlevant ChĂąteauneuf et Nogent-le-Rotrou ; en restreignant la province, elle arrondissait ses contours, lui arrachait ses bizarres protubĂ©rances 2. De l'Huisne au Couesnon, les anciennes limites qui sĂ©paraient les gĂ©nĂ©ralitĂ©s d'Alençon et de Caen de celles de Tours et de Rennes furent respectĂ©es 3. La seule ques- tion souleva quelques difficultĂ©s Ă  propos des communes de Bothois, Frettencourt et Lannoy-CuillĂšre, qui, malgrĂ© leur situation sur la rive gauche de la Bresle, en pays normand, furent rattachĂ©es au Beauvaisis ; celle de Boisgeloup, au contraire, situĂ©e sur la rive gauche de l'Epte, dans le Vexin français, fut attrihuĂ©e dĂ©finitivement Ă  la Normandie. Baumont, La formation du dĂ©parlement de l'Oise, Bulletin de la SociĂ©tĂ© d'Etudes historiques et scientifiques de l'Oise, t. Ier, 1905, p. 59-62. — Limites entre les dĂ©partements d'Evreux et de Chartres, arrĂȘtĂ©es le 2 janvier 1790, par Bouvet, corn missaire de ChĂ teauneuf-en-Thimerais, Buzot, d'Evreux, et PhĂ©lines, de Chartres Arch. nat, D iv 1, 1. 23. — Limites du Perche entre les dĂ©partements d'Alençon et du Mans, fixĂ©es le 25 janvier 1790 par Belzais de Courmesnil, commissaire de la pro- vince de Normandie; LivrĂ©, du dĂ©partement du Mans Bailleul. du dĂ©partement d'Alençon pour le Perche. Ibid., D ivlm 2, 1. 45. — Mention des procĂšs-verbaux de bornement signĂ©s le 2 janvier entre les dĂ©partements d'Evreux et d'Alençon et, d'autre part, de Chartres. Ibid., D iv 2, 1. 25. — Mention de la dĂ©marcation faite par les dĂ©putĂ©s de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Tours, entre cette gĂ©nĂ©ralitĂ© et la Normandie 1 Sauf la commune de Boisgeloup, aujourd'hui rĂ©unie Ă  Gisors Eure. 2 Le territoire de CĂ©ton fut disputĂ© entre la Normandie et le Maine. Le procĂšs- verbal gĂ©nĂ©ral de la province de Normandie arrĂȘte qu'il resterait au Perche du dĂ©partement d'Alençon », ce qui explique la protubĂ©rance actuelle. Arch. nat., Divbis2, 3j Du cĂŽtĂ© de la province du Maine, le district d'Alençon comprend tout le ter- ritoire normand sans exception, sans que, sous prĂ©texte d'extension ou autrement, la province du Maine puisse prĂ©tendre au-delĂ  des limites ordinaires du territoire qui eu a dĂ©pendu jusqu'Ă  ce jour. » Ibid.; D ivbls 2, 1. 45. — Le dĂ©partement du Coten- tin a pour Limites au midi les anciennes frontiĂšres des provinces de Bretagne et du Maine, qui demeurent les mĂȘmes ». ProcĂšs-verbal de dĂ©marcation et de division du dĂ©partement du Cotentin, 26 fĂ©vrier 1790. Arch. nat., NN*12. — Pour Ă©tablir la limite sud-ouest prĂ©cise entre la Bretagne et la Normandie, consulter en outre les cartes de formation des dĂ©partements de Cotentin et d'Ille-et-Vilaine en 1790 {Ibid., N99 et 112. Le dĂ©partement du Cotentin y a pour limite le Couesnon, qui coulait fort Ă  l'ouest de son lit actuel rectifiĂ©, et qui cĂŽtoyait, jusqu'au village des Quatre-Sali- nes, le pied de la digue" des marais de Dol, baignant aussi le bourg de Bos-sur- Couesnon, aujourd'hui trĂšs distant de cette riviĂšre. DIVISION DE LA iNOliMAMMK. PREMIER PROJET 403 tion difficile fut celle des paroisses mixtes disputĂ©es entre la Normandie et le Maine et qui, rĂ©unies sous le mĂȘme clocher, formaient des collectes et des municipalitĂ©s distinctes. En raison de la diffĂ©rence trop prononcĂ©e qui existait entre les coutumes des deux provinces, les commissaires arrĂȘtĂšrent de respecter l'irrĂ©gularitĂ© actuelle de la dĂ©marcation et d'attendre, avant toute rectification prĂ©maturĂ©e, que le temps eĂ»t fait son Ɠuvre et affaibli l'esprit de ces coutumes » *. Ce fut, on le voit, avec la plus grande prudence que les Constituants opĂ©rĂšrent la dĂ©limi- tation des provinces ils eurent au plus haut point la notion des convenances locales, le sens du pratique ; ils apportĂšrent les prĂ©cautions les plus minutieuses Ă  ne point troubler les habi- tudes acquises, ils mirent tout leur soin Ă  mĂ©nager le passĂ© pour ne point compromettre l'avenir. La mĂȘme prudence prĂ©sida Ă  la division intĂ©rieure de la Nor- mandie en dĂ©partements. Ce fut vers la fin de novembre que les dĂ©putĂ©s des bailliages normands commencĂšrent Ă  se concerter sur cet objet. Combien y aurait-il de divisions et de sous-divi- sions et quelles villes en seraient les chefs-lieux? » telles furent les premiĂšres questions Ă  rĂ©soudre. Le 29 septembre 1789, lors- que fut dĂ©posĂ© Ă  la tribune de l'AssemblĂ©e le projet de division Ă©manant du ComitĂ© de Constitution, un membre demanda la distribution Ă  tous les dĂ©putĂ©s d'une carte destinĂ©e Ă  Ă©clairer ce projet W. La carte dressĂ©e Ă  cette Ă©poque est introuvable aux Archives nationales ; elle existe dans une collection privĂ©e, dont le possesseur m'est inconnu. Par un heureux hasard, j'ai pu en obtenir une reproduction, qui comprend la portion du territoire français correspondant Ă  la Normandie 3. Cette province y apparaĂźt avec les limites prĂ©sumĂ©es de son gouvernement, Vexin français et Perche exclus ; elle est divisĂ©e en quatre dĂ©parte- ments rĂ©partis de telle sorte que tous quatre ont vue sur la mer. 1 ProcĂšs-verbal de dĂ©marcation et de division du dĂ©partement de Laval, dressĂ© au ComitĂ© de Constitution de l'AssemblĂ©e constituante, en prĂ©sence des dĂ©putĂ©s de Ce dĂ©partement, avec les dĂ©partements limitrophes, 27 fĂ©vrier 1710. Arch. dĂ©p. Orne, sĂ©rie N non inventoriĂ©e. 2 ProcĂšs-verbal des sĂ©ances de l'AssemblĂ©e nationale, n° 87, 29 septembre 178'J. Arch. nat., ADxvm F. Le Point du Jour, n° 94, cite le nom de ce dĂ©putĂ© de RicĂ»ier, dĂ©putĂ© de la noblesse de Saintes. 3 Le croquis ci-joint m'a Ă©tĂ© donnĂ© autrefois par feu l'abbĂ© Lebel, professeur de gĂ©ographie Ă  l'Institut catholique de Paris, sous ce titre Extrait de la Carte de France divisĂ©e suivant le plan proposĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale par le ComitĂ© de Constitution, le 29 septembre 1789. » Il avait eu Ă  sa disposition cette carte qu'i avait entiĂšrement copiĂ©e ; il ne m'a jamais rĂ©vĂ©lĂ© le nom de son possesseur. 404 LA NORMANDIE DIVISEE EN CINQ DEPARTEMENTS Les lignes d'eau y jouent un grand rĂŽle. Le dĂ©partement oriental a pour limites la mer, la Seine, l'Andelle, l'Epte supĂ©rieure et la Bresle. Le dĂ©partement voisin est bornĂ© par la mer, la Seine et l'Andelle au nord ; Ă  l'est par l'Epte infĂ©rieure et une ligne parallĂšle Ă  l'Eure, menĂ©e du confluent de l'Epte Ă  celui de l'Avre ; au sud par l'Avre ; Ă  l'ouest par la Dives * c'est le dĂ©partement de l'Eure actuel un peu Ă©largi. Pour former les deux derniers dĂ©partements, une ligne Ă  peu prĂšs horizontale partageait le reste de la Normandie, quittant la Dives au confluent de l'Ante, passant au sud de Falaise et de CondĂ©, au nord de Vire et se confondant avec le cours infĂ©rieur de la Sienne jusqu'Ă  son embouchure 2. Cette premiĂšre division de la Normandie, qui n'exista qu'Ă  l'Ă©tat de projet, offre un intĂ©rĂȘt purement historique. Dans le courant de novembre, un autre projet sembla prendre consis- tance. Il est vraisemblable, Ă©crivait le 23 novembre un dĂ©putĂ© du bailliage d'Evreux aux officiers municipaux de Bernay, qu'il y aura six dĂ©partements » 3. Les intĂ©rĂȘts particuliers de certaines villes semblaient exiger ce nombre 4 ; l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral l'emporta. Le 12 dĂ©cembre, les dĂ©putĂ©s de Normandie se rĂ©u- nirent Ă  Paris au couvent des Capucins, sous la prĂ©sidence du duc de Coigny. AprĂšs examen de divers projets, soumis par le comte de la Chapelle, Thomas Lindet et Lecouteulx de Canteleu, l'AssemblĂ©e se dĂ©cida par trente-sept voix contre dix-sept Ă  adopter le plan de ce dernier, qui divisait la Normandie en cinq dĂ©partements 5. Les cinq jours qui suivirent furent employĂ©s 1 Il semblerait, d'aprĂšs le tracĂ© du croquis, que la Dives n'a pas Ă©tĂ©, jusqu'Ă  son embouchure, une limite interdĂ©partementale ; quelques communes du canton actuel de DozulĂ© Saint-Samson, Bassenevillc, Brueourt et Dives, auraient appartenu au dĂ©partement occidental bien que situĂ©es sur la rive orientale de la Dives. 2 La Normandie des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s comprenait, au dire de Necker, 1635 lieues carrĂ©es. En retranchant les 240 lieues carrĂ©es que reprĂ©sentent le Vexin français, le Thimerais et le Perche, on obtient le chiffre de 1395 lieues carrĂ©es, c'est-Ă -dire la surface de quatre dĂ©partements rigoureusement Ă©gaux, de 324 lieues carrĂ©es chacun. Ce calcul est un argument de plus en faveur de la vĂ©racitĂ© de ce document. 3 Thomas Lindet, Correspondance, p. 19. — Le 28 novembre, Lindet Ă©crivait aux mĂȘmes On n'est pas d'accord sur la division en cinq ou six ; l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral doit l'emporter sur l'intĂ©rĂȘt particulier... S'il n'y a que cinq dĂ©partements en Norman- die, on gagnera les frais d'administration d'un dĂ©partement et de ses districts, les frais d'une cour de justice, les frais d'un Ă©vĂȘchĂ© et d'un chapitre. » Ibid., p. 23. 4 Lisieux notamment, qui fit de pressantes dĂ©marches dans ce but. Ibid., p. 23. b D'aprĂšs une lettre de Thomas Lindet aux officiers municipaux de Bernay, la division en cinq dĂ©partements Ă©tait dĂ©jĂ  dĂ©cidĂ©e le 4 dĂ©cembre 1789. Ibid., p. 27. — La prĂ©sente division gĂ©nĂ©rale de la Normandie et partie du Perche en dĂ©parte- ments a Ă©tĂ© adoptĂ©e et arrĂȘtĂ©e par l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de la province, aprĂšs la Limite des dĂ©partements Echelle Vz PROJET DE DIVISION DE LA NORMANDIE en 4 DĂ©partements 29 Septembre 178p. MODE DE DÉLIMITATION DES DEPARTEMENTS 405 au tracĂ© de ce plan ; les dĂ©putĂ©s mirent Ă  ce travail, plus de chaleur qu'au partage d'une succession » 0. Le 17 dĂ©cembre, ils se rendirent au ComitĂ© de constitution pour l'examiner en dĂ©tail. Par cinquante-neuf voix contre trois, ils l'adoptĂšrent en y faisant de lĂ©gĂšres retouches. On trouva trop rapprochĂ©e de Saint-LĂŽ la ligne qui sĂ©parait les dĂ©partements de Caen et de Cotentin et il fut rĂ©solu, avec l'assentiment des dĂ©putĂ©s de Caen, qu'on la ramĂšnerait Ă  la DrĂŽme. On proposa aussi de soustraire au dĂ©partement d'Alençon plusieurs communes voisines de Mortain qui par erreur y Ă©taient comprises. Cette division de la Normandie n'eut rien d'arbitraire. On se prĂ©occupa de satisfaire Ă  la fois aux conditions imposĂ©es par la nature, par les intĂ©rĂȘts locaux et par les exigences du plan gĂ©nĂ©ral de division. La nature semblait avoir dĂ©signĂ© les limites des dĂ©partements de Rouen et de Cotentin on n'avait qu'Ă  suivre ses indications. Celui de Caen Ă©tait si heureusement placĂ© qu'on lui assigna facilement ses bornes occidentale et orientale. Ces trois dĂ©partements furent tranchĂ©s par des sections de longitude, du nord au midi, parce que les riviĂšres coulant dans cette direction formaient entre eux des lignes naturelles de sĂ©paration. Le reste de la Normandie devant former deux dĂ©partements, il ne s'agissait plus, Ă©crit Lindet, que de prendre le compas ». On s'efforça d'ailleurs de conserver le plus possible les anciennes habitudes, les relations de commerce; on eut Ă©gard Ă  la direction des routes». En divisant les dĂ©partements de Caen et d'Alençon dans le sens de la latitude, on chercha Ă  respecter l'Ă©tendue de surface » dĂ©terminĂ©e par l'AssemblĂ©e nationale dans son plan gĂ©nĂ©ral de division du royaume. Il n'Ă©tait pas possible, Ă©crivaient les dĂ©putĂ©s extraor- dinaires envoyĂ©s par Caen Ă  l'AssemblĂ©e, de tracer une coupe intĂ©rieure qui satisfĂźt mieux tous les intĂ©rĂȘts et conciliĂąt plus heureusement les considĂ©rations politiques avec les sections indiquĂ©es par la nature » 2. Le dĂ©membrement de la province morcelait les trois gĂ©nĂ©ra- discussion et l'examen des diffĂ©rents plans de division en un moindre, ou un plus grand, ou un Ă©gal nombre de dĂ©partements qui lui ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s. ProcĂšs-verbal de la division de la province de Normandie. Arch. nat, D ivbis 1, 1. 23. 1 Chacun, ajoute Lindet, a prĂ©sentĂ© ses plans. J'ai lavĂ© une carte et tĂąchĂ© d'accor- der Ă  chacun ses objets de prĂ©dilection. » Lettre du 17 dĂ©cembre 1789. Thomas Lin- det, Correspondance, p. 31. 2 Observations sur la division territoriale de la Normandie et sur le dĂ©partement de Caen en particulier, par les dĂ©putĂ©s extraordinaires de la commune de Caen, 5 dĂ©cembre 1789. 106 LIMITES DES OÉP AHTKMENTs f>E CAEN, COTENTIN, ALENOON liU's normandes. Des cinq dĂ©partements nouveaux, les deux extrĂȘmes, ceux de Rouen et de Cotentin, Ă©taient entiĂšrement taillĂ©s dans le ressort d'une seule gĂ©nĂ©ralitĂ©. Deux autres emprun- taient leur territoire Ă  deux gĂ©nĂ©ralitĂ©s le dĂ©partement d'Evreux gĂ©nĂ©ralitĂ©s de Rouen et d'Alençon et celui d'Alençon gĂ©nĂ©ra- litĂ©s d'Alençon et de Caen. Quant au dĂ©partement de Caen, situĂ© au point de soudure des frontiĂšres intĂ©rieures des trois gĂ©nĂ©ralitĂ©s, il n'avait pu se constituer qu'aux dĂ©pens de toutes trois. La gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, en cessant d'exister» donna ainsi nais- sance Ă  trois dĂ©partements celui de Cotentin en totalitĂ© ; ceux de Caen et d'Alençon en partie, Son territoire fut partagĂ© en trois zones inĂ©gales par les lignes frontiĂšres des circonscriptions nouvelles. Une ligne sinueuse, traversant les Ă©lections de Mortain, de Vire, de Saint-LĂŽ et de Bayeux, sans respecter leurs limites, fut tracĂ©e du sud au nord, de la frontiĂšre du Maine Ă  la baie des Veys. Depuis HeussĂ© jusqu'Ă  Gathemo, elle sĂ©parait les dĂ©parte- ments de Cotentin et d'Alençon, laissant Mortain, Sourdeval et toute la forĂȘt de Landepourrie au premier l\ Tinchebrai au second; de Gathemo Ă  la mer, elle s'inflĂ©chissait en formant deux courbes irrĂ©guliĂšres dont la concavitĂ© se tournait successivement vers Vire et vers Saint-LĂŽ, comme pour arrondir leurs districts. Le fossĂ© de la Vire, primitivement choisi comme limite, avait Ă©tĂ© abandonnĂ© sur un assez long parcours, pour la DrĂŽme et pour F Elle !'2' ; Tessy, Torigni, Cerisy -l'Abbaye Ă©taient au Cotentin, Saint-Sever, Pontfarcy, le bois l'EvĂȘque, la forĂȘt de Cerisy, celle de Neuilly au dĂ©partement de Caen. Du confluent de l'Elle aux Veys, la Vire redevenait barriĂšre, fermant Ă  l'est les marais de Carentan 3 . Ce travail s'opĂ©ra sans difficultĂ©s apparentes et sans incident notable. Une lutte assez vive s'engagea au contraire Ă  propos de la dĂ©limitation des dĂ©partements de Caen et d'Alençon 4l. La ligne de sĂ©paration adoptĂ©e par leurs dĂ©putĂ©s longeait au sud Vassy 1 ProoĂšs-rerb»! de dĂ©limitation des dĂ©partements du Cotentin et d'Alençon Arch.. lnvl,ls 1, 1. 23, -2-2 dĂ©cembre 1789, signĂ© par Le Sacher de la PalliĂšre, Le Bigot de Beauregard et Belzais-Courmesnil. 2 ProcĂšs-verbal de rassemblĂ©e de la province de Normandie, 17 dĂ©cembre 1789. Ibid. 3 ProcĂšs-verbal de dĂ©limitation des dĂ©partements de Caen el de Cotentin. 7 fan- vin- 1790. Ibid. I ProcĂšs-verbal dĂ© dĂ©limitation des dĂ©partements de Caen et d'Alençon, 22 dĂ©- cembre 1789 [signĂ© par le comte de Ypssv el BĂ©lzais Courmesnil Ibid. LA MÊLÉE DES CONVOITISES RIVALES 407 et CondĂ©-sur-Noireau, pour aboutir Ă  l'Orne au pont d'Ouilly. Le procĂšs-verbal particulier du 22 dĂ©cembre 1789 indiquait formellement in fine que les deux Regards Saint-Martin et Saint-Pierre, faisant partie du bourg de CondĂ©, appartiendraient au dĂ©partement de Caen. » On oublia de transcrire cette mention Ă  la fin du procĂšs-verbal gĂ©nĂ©ral de division de la Normandie, arrĂȘtĂ© le 7 janvier 1790 *. Saint-Pierre Ă©tant situĂ© sur la rive droite du Noireau, le dĂ©partement d'Alençon en disputa la pos- session Ă  son voisin. La querelle fut assez longue et ne fut tran- chĂ©e que le 3 fĂ©vrier 1791, par un arrĂȘtĂ© du ComitĂ© de constitu- tion attribuant Saint-Pierre au dĂ©partement de l'Orne 2. Au delĂ  de l'Orne, la frontiĂšre quittait le territoire de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen et, de chaque cĂŽtĂ© de l'ancienne limite administrative Ă  jamais effacĂ©e, de Pont-d'Ouilly Ă  l'embouchure de la Dives, les paroisses autrefois sĂ©parĂ©es Ă©taient rĂ©unies dans un ressort commun. Pendant que se poursuivait Ă  Paris le travail de division intĂ©- rieure de la province, la Normandie ne restait pas indiffĂ©rente Ă  ses futures destinĂ©es. Les projets de l'AssemblĂ©e nationale y furent Ă  peine Ă©bruitĂ©s, que la mĂȘlĂ©e des intĂ©rĂȘts rivaux co- mença. Il n'y eut ville, ni bourg si peu important qui ne rĂȘvĂąt d'ĂȘtre chef-lieu de dĂ©partement, tout au moins de district. Une pluie de requĂȘtes tomba sur le bureau du ComitĂ© de constitution, une nuĂ©e d'ambassadeurs locaux vint assaillir ses membres. Si quelques villes de Basse-Normandie, confiantes dans la sollicitude de leurs dĂ©putĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e nationale, se contentĂšrent de correspondre trĂšs rĂ©guliĂšrement avec eux sur le grand objet qui dĂ©chaĂźnait alors toutes les convoitises 3, la plupart cherchĂšrent 1 Arch. nat., Divbisl, 1. 23. 2 MĂ©moire des propriĂ©taires forains de Sainl-Pierre-du-Regard au dĂ©partement du Calvados au ComitĂ© de Constitution, 16 janvier 1791. Ibid., D ivhis 12, 1. 249. Sur cette question, voir Paul Le Brethon, La Formation du dĂ©partement du Calvados, p. 5. Paris, 1894, in-8\ 3 Bayeux entretient avec le baron de Wimpfen et Delauncy une correspondance presque quotidienne. Arch. comm., Bayeux, Registre de correspondance. — Mortain a laissĂ© Ă  Le Sacher de la PalliĂŽre le soin de ses intĂ©rĂȘts {Ibid., Mortain. Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ance du 22 dĂ©cembre 1789. — Saint-LĂč est dĂ©fendu par Vieillard Arch. nat., Divhls 10, 1. 231. — PĂ©riers fait appuyer ses prĂ©tentions par Pouret-Roquerie Ibid., D ivbis 10, 1. 230. — Le 18 septembre 1789, les officiers muni- cipaux de Caen Ă©crivent Ă  Lamy, dĂ©putĂ© du bailliage Nous ne comptons point envoyer de dĂ©putĂ©s aux Etats gĂ©nĂ©raux. Nous nous reposons avec confiance sur vos lumiĂšres pour prendre en considĂ©ration tout ce qui peut concerner l'intĂ©rĂȘt de cette partie de la province, qui vous a si justement donnĂ© sa confiance. Aih comm., Caen, carton 56. 408 DÉPUTATIONS EXTRAORDINAIRES A L'ASSEMBLÉE NATIONALE d'autres appuis et ne reculĂšrent pas devant les frais de dĂ©puta- tions extraordinaires pour augmenter leurs chances de succĂšs. Caen dĂ©lĂ©gua deux de ses bourgeois les plus en vue, Signard d'OuffiĂšres et Bougon-Longrais, membres influents du ComitĂ© permanent, pour obtenir un chef -lieu de dĂ©partement et une cour souveraine U. Coutances envoya trois dĂ©putĂ©s extraordinaires pour disputer Ă  Saint-LĂŽ le chef-lieu du Cotentin ~\ Avranches dĂ©puta BrĂ©mesnil, maire et lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage, et GuĂ©rin pour s'assurer la possession d'un district a. Granville chargea d'une mission semblable son maire et ancien subdĂ©- lĂ©guĂ© Couraye-Duparc W. Cherbourg fit appuyer les mĂȘmes prĂ©- tentions par Chantereyne, avocat au Parlement, qui rĂ©sidait Ă  Paris et lui adjoignit plus tard son maire, le chevalier de GassĂ©, et un Ă©chevin, Vastel 5. DĂ©sireuse d'empĂȘcher le triomphe des projets de Cherbourg, inquiĂ©tants pour elle, Valognes envoya comme avocats le chevalier de Mesnildot et de Rozy 6l. Carentan, menacĂ©e par PĂ©riers et par la Haye-du-Puits, confia sa dĂ©fense Ă  Caillemer et Le Maignen et sollicita plus tard les bons offices d'un compatriote, Yver de la Bruchollerie, avocat Ă  la Cour des aides 7. Torigni donna mission Ă  deux membres de son ComitĂ© permanent, Plouin du Breuil et Lechartier de la VarigniĂšre 8, de solliciter un district avec un tribunal. Vire chargea un instant de ses intĂ©rĂȘts le comte de PontĂ©coulant W. Des villes qui n'a- 1 Il s'agissait aussi de dissiper les prĂ©ventions amassĂ©es contre cette ville Ă  la suite de l'assassinat de Belzunce, de rĂ©futer les dĂ©nonciations portĂ©es Ă  la tribune ou insĂ©rĂ©es dans des libelles contre l'anarchie caennaise. La mission de Signard d'OuffiĂšres et de Bougon-Longrais rĂ©ussit pleinement. 2 Allusion faite Ă  cette dĂ©putation par le mĂ©moire de Vieillard, dĂ©putĂ© de Saint- LĂŽ, du 19 dĂ©cembre 1789. Arch. nat., D ivbis 10, 1. 231. 3 Arch. Avranches, Registre des dĂ©libĂ©rations, sĂ©ance du 19 dĂ©cembre 1789. BrĂ©mesnil et GuĂ©rin rendent compte de leur mission Ă  Paris et assurent, leurs concitoyens de la possession d'un district. 4 Ibid., Granville. Registre des dĂ©libĂ©rations n° 2. DĂ©libĂ©ration du Conseil gĂ©nĂ©- ral et ComitĂ© national de Granville, 30 dĂ©cembre 1789. 5 Lettre du ComitĂ© municipal Ă  Chantereyne, 13 novembre 1789 {Ibid. Cherbourg. BB11 et dĂ©libĂ©ration du 2 janvier 1790. Ibid., BB5 6 MĂ©moire prĂ©sentĂ© Ă  MM. du ComitĂ© de constitution }> apportĂšrent Ă  leurs revendications beau- coup d'ardeur et de tĂ©nacitĂ©. Lindet dĂ©plore, comme une faute grave, l'accueil que leur rĂ©serva le ComitĂ© de constitution. Leur long sĂ©jour Ă  Paris 4J, leurs dĂ©marches rĂ©itĂ©rĂ©es, les intrigues qu'ils nouĂšrent firent, Ă  l'en croire, perdre du temps aux dĂ©putĂ©s et retardĂšrent la division du royaume. S'il y eut parmi ces solli- citeurs beaucoup de mĂ©contents pour avoir mangĂ© leur argent et n'avoir rien obtenu » 5, tous ne furent point Ă©conduits et plus d'un put rentrer la tĂȘte haute dans sa ville, aux acclamations de ses concitoyens 6. L'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des dĂ©putĂ©s de Normandie avait, dĂšs le 17 dĂ©cembre, divisĂ© la province en cinq dĂ©partements ; cinq assemblĂ©es particuliĂšres, respectivement composĂ©es des dĂ©putĂ©s 1 Arch. comm., Villedieu. Registre des dĂ©libĂ©rations, 30 dĂ©cembre 1789. Cf. Arch. nat, D ivbis 10, 1. 230. 2 Arch. comm., CondĂ©, D 1. Registre des dĂ©libĂ©rations, 19 aoĂ»t 1790. 3 Th. Lindet, Correspondance, p. 57. Lindet Ă©value leur nombre Ă  plus de 3,000 pour la France. 4 Les deux envoyĂ©s de Caen restĂšrent Ă  Paris du 21 novembre 1789 au 1er avril 1790 et dĂ©pensĂšrent 6,351 livres 5 sols. MĂ©moire de MM. les dĂ©putĂ©s extraordinaires de la ville de Caen, sur le but de leur mission et les dĂ©penses qu'elle leur a occasionnĂ©es. Arch. comm., Caen, carton 56. Ceux d'Avranches ont dĂ©pensĂ© 1,000 livres et remet- tent dix louis au ComitĂ© gĂ©nĂ©ral de la ville. Ibid., Avranches, Registre des dĂ©libĂ©ra- tions, sĂ©ance du 19 dĂ©cembre 1789. 5 Th. Lindet, Correspondance, p. 57. 6 Les dĂ©putĂ©s extraordinaires de Caen se vantent d'avoir appuyĂ© avec succĂšs le projet de la division de la province en cinq dĂ©partements au lieu de six qu'on voulait adopter et que l'intĂ©rĂȘt de Caen rejetait ». — Parmi les frais consignĂ©s sur le mĂ©moire de ces dĂ©putĂ©s, figure un article ainsi conçu Nourriture tant de dĂ©putĂ©s que domestiques, y compris huit repas donnĂ©s Ă  des protecteurs, 2,173 livres 17 sols. » Arch. comm., Caen, cirton 56. — Les officiers municipaux de Caen leur Ă©crivaient Nous savons que pendant votre sĂ©jour Ă  Paris vous vous ĂȘtes fait de puissants protecteurs. Nous connaissons vos relations avec noire zĂ©lĂ© concitoyen M. Bayeux, si bien accueilli de celui qui dirige encore les plus importantes opĂ©ra- lions du gouvernement Necker. Nous n'ignorons pas que vous avez mis dans vos intĂ©rĂȘts le cĂ©lĂšbre M. Thouret, etc. » Ibid., Caen. Registre de correspondance, lettre du 29 fĂ©vrier 1790 — Couraye-Duparc accusa les dĂ©putĂ©s du Cotentin de s'ĂȘtre laissĂ© sĂ©duire par un certain genre d'Ă©loquence des envoyĂ©s extraordinaires de Cher- bourg ». Arch. nat., D iv1,ls 10, 1. 231. — La VarigniĂšre, dĂ©putĂ© extraordinaire de To- rigni, raconte qu'il offrit Ă  l'AssemblĂ©e nationale, en don patriotique de sa ville, une superbe boĂźte en or enrichie de diamants, enveloppĂ©e dans un PrĂ©cis imprimĂ© en faveur de Carentan. » Lettre Ă  mes commettants. Ibid., AD xvi 49. 410 CAEN CHEF-LIEU DE DÉPARTEMENT rĂ©sidant sur le territoire des circonscriptions nouvelles, se rĂ©u- nirent aussitĂŽt pour dĂ©signer les cinq chefs-lieux nouveaux. Des compĂ©titions se produisirent entre les villes principales des trois dĂ©partements occidentaux. Si, dans le dĂ©partement d'Alen- çon, cette ville vit s'Ă©lever en face d'elle les prĂ©tentions de SĂ©es et d'Argentan, ni Tinchebrai, ni Fiers, ni aucune des localitĂ©s dĂ©tachĂ©es de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ne se posa en rivale leur mĂ©diocre importance et l'excentricitĂ© de leur situation ne leur permettaient point de telles ambitions. Dans le dĂ©partement de Caen, le choix ne semblait pas douteux. SiĂšge de la gĂ©nĂ©ralité» puis en dernier lieu de l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Nor- mandie, situĂ©e au centre du nouveau -dĂ©partement, Caen en Ă©tait le chef-lieu tout indiquĂ©. Son importance ancienne, le renom de son UniversitĂ©, sa population, sa facilitĂ© d'accĂšs, la grandeur de ses Ă©difices publics, la puissante sympathie des ducs d'Harcourt et de Coigny, tout la dĂ©signa pour cet honneur W. Elle se le vit toutefois disputer par deux villes, Lisieux et Vire. Lisieux, ville Ă©piscopale, fit de pressantes dĂ©marches pour joindre Ă  son Ă©vĂȘchĂ© le siĂšge de l'administration dĂ©partementale ; elle ne put ni obte- nir l'un, ni garder l'autre 2. Vire, malgrĂ© sa chĂ©tive importance, aspirait aussi au rang de chef-lieu. N'Ă©tait-elle pas la patrie du vaudeville et ne comptait-elle pas des enfants illustres comme Flaust, le dernier commentateur de la coutume de Normandie? Ne pouvait-elle devenir l'entrepĂŽt du Maine, de la Bretagne et de la Normandie? Les connaissances de ses habitants, leurs lumiĂšres politiques, civiles et naturelles le cĂ©daient-elles Ă  celles des Caennais? Sans s'arrĂȘter Ă  ces considĂ©rations, l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s rĂ©unis le 18 dĂ©cembre sous la prĂ©sidence de Coigny fixa Ă  Caen le chef -lieu du dĂ©partement 3. Vire protesta contre cette dĂ©cision ; un avocat, Michel Le Besnerais, se fit l'interprĂšte des ressentiments de ses concitoyens, indignĂ©s d'ĂȘtre traitĂ©s de marchands de caudelĂ©e, de mangeurs de bouillie de sarrasin ». Il reprocha Ă  Caen de mĂ©priser et d'insulter, sous le nom de bourgades renforcĂ©es » des villes qui avaient fait sa fortune, creusĂ© son canal, payĂ© ses impĂŽts et bĂąti ses Ă©difices *. 1 Observations soumises Ă  .Y .Y. .S'.S. de l'AssemblĂ©e nationale par la Commission inter- mĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie en faveur de Caen. Arch. nat., D iv 21, 1. 230. 2 Le Brethon, La Formation du dĂ©parlement du Calvados, p. 89. 3 Lettre du duc de Coigny, 18 dĂ©cembre 1789. Arch. nat., Divbisl, 1. 23. 1 Aux Observations sur lu division territoriale de la Normandie et sur le dĂ©parte- rnenl Ăźle Caen eu particulier, prĂ©sentĂ©es /»// les dĂ©putĂ©s extraordinaires de lu commune de LA LUTTE POUK LE CHEF-LIEU EN COTENTltf 411 I ans le dĂ©partement de CĂŽtĂ«ntin, la lutte fut plus vive encore. En novembre 1789, lorsqu'on croyait a la formation de six dĂ©par- tements, la petite ville d'Avranches, situĂ©e Ă  l'extrĂ©mitĂ© de la province, avait adressĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale un mĂ©moire- reprĂ©sentant qu' elle Ă©tait nĂ©cessairement le point central d'un des six dĂ©partements dĂ©crĂ©tĂ©s par les dĂ©putĂ©s de Normandie » et organisĂ© une propagande assez active en faveur de son vƓu 0. Mais SeS prĂ©tentions devaient vite cĂ©der devant les revendica- tions plus pressantes et plus motivĂ©es de deux villes rivales, Coutances et Saint-LĂŽ. Le 17 dĂ©cembre, trois dĂ©putĂ©s extraordi- naires de Coutances produisirent un factum imprimĂ© intitulĂ© Observations sur le chef-lieu du Cotentin. Ils y proclamaient le droit absolu de leur ville Ă  ĂȘtre ce chef-lieu. Faisant ressortir l'importance historique de Coutances, la possession de l'Ă©vĂȘchĂ© et du siĂšge prĂ©sidial, l'existence du vaste couvent de Domini- cains prĂȘt Ă  contenir les divers services administratifs, ils rappe- laient que cette ville avait Ă©tĂ© le lieu de rĂ©union des dĂ©putĂ©s de dix bailliages Ă  la ronde et le berceau de la dĂ©putation du Coten- tin aux Etats gĂ©nĂ©raux W. Le lendemain, 18 dĂ©cembre, l'assem- blĂ©e des dĂ©putĂ©s du dĂ©partement rĂ©unie aux Capucins, sous la prĂ©sidence de l'Ă©vĂȘque de Coutances, mit aux voix la question du chef-lieu. Un membre proposa de dĂ©cider l'alternat entre les divers districts, comme le permettait le dĂ©cret du 9 dĂ©cembre 1789. Vieillard, dĂ©putĂ© de Saint-LĂŽ, s'Ă©leva contre cette propo- sition, en exposant les inconvĂ©nients qu'entraĂźnerait le dĂ©place- ment perpĂ©tuel des administrateurs et des archives. Son obser- vation prĂ©valut ; il fut arrĂȘtĂ© que, laissant le choix de l'alternat ou d'un chef-lieu dĂ©finitif Ă  la premiĂšre assemblĂ©e administra- tive du dĂ©partement, on se bornerait Ă  dĂ©signer le siĂšge provi- soire du Directoire. Sur quatorze votants 8, Coutances rĂ©unit sept suffrages et Saint-LĂŽ autant. Les dĂ©putĂ©s de Coutances s'opposĂšrent Ă  une proposition de tirage au sort et l'on convint Caen Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 5 dĂ©cembre 1789 piĂšce imprimĂ©e, 16 p., Le Besnerais opposa, le 20 dĂ©cembre, une protestation intitulĂ©e RĂ©ponse que fournit aux Etats gĂ©nĂ©raux un habitant de la ville de Vire aux observations de MM. de la commune de Caen sur la division, etc. Arch. nat., D ivbis 5, 1. 173. 1 DĂ©lĂ©gation d'Avranches Ă  Granville sur cet objet, 23 novembre 1789. Ibid., Divbis10, 1. 231. 2 Lepingard, Une Paye Ăźle l'Histoire de Saint-LĂŽ, Annuaire de la Manche, 1836. 3 L'assemblĂ©e aurait dĂ» compter 17 suffrages, mais le baron de JuignĂ© Ă©tail absent ; Ango, dĂ©putĂ© de Saint-Sanveur-le-Vicomte, s'Ă©tait retirĂ© au dĂ©but de la sĂ©ance; Pouret-Roquerie, dĂ©putĂ© de Saint-Snuyeur-Lendelin, prĂ©sent, s'abstinl de yoter. 412 COUTAMES. CHEF-MEU PROVISOIRE DU COTENTIN de s'en remettre Ă  la dĂ©cision de la province » M. Dans l'inter- valle de ces rĂ©unions, Vieillard se fit l'avocat de Saint-LĂŽ, et se hĂąta de rĂ©futer les arguments invoquĂ©s par Coutances en faveur de sa prééminence. Il invoqua la situation plus centrale de Saint- LĂŽ, la facilitĂ© plus grande des communications avec tous les points du dĂ©partement, due aux voies nouvellement tracĂ©es, la proximitĂ© plus grande de Paris, c'est-Ă -dire des ordres du pouvoir central, la population supĂ©rieure de cette ville, l'immensitĂ© de son abbaye de chanoines rĂ©guliers, au moins comparable pour son Ă©tendue Ă  celle des Dominicains de Coutances. Il invoqua enfin deux arguments d'un grand poids l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie avait projetĂ©, dans son unique session, de transfĂ©rer Ă  Saint-LĂŽ le siĂšge de la Commission intermĂ©diaire provinciale et, plus rĂ©cemment, pour assurer l'exĂ©cution des dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale sur la circulation des grains, c'est Ă  Saint-LĂŽ que venaient de se rĂ©unir les dĂ©lĂ©guĂ©s des ComitĂ©s permanents des villes du Cotentin, Ă  l'exception de ceux du ComitĂ© de Coutances que ce choix avait blessĂ© ?l. Ce plaidoyer habile, dont Vieillard avait dĂ» prĂ©cipiter la rĂ©daction, n'eut pas tout le succĂšs qu'en attendait son auteur. L'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s normands, qui rĂ©unit le 23 dĂ©cembre quarante et un membres, sous la prĂ©sidence de Coigny, tra- vaillĂ©e sans doute par l'influence personnelle de l'Ă©vĂȘque Talaru, accorda trente suffrages Ă  Coutances, tandis que Saint-LĂŽ n'en recueillit que dix 3;. Coutances fut ainsi dĂ©clarĂ© chef -lieu provi- soire. En mĂȘme temps que la division de la Normandie en dĂ©parte- ments s'opĂ©ra la division des dĂ©partements en districts. Les appĂ©tits s'y montrĂšrent aussi ardents et beaucoup plus nom- breux. Non seulement les chefs-lieux d'Ă©lection, et il y en avait neuf dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, mais encore ceux des subdĂ©lĂ©- gations Granville et Cherbourg, mais les siĂšges des bailliages ou de juridictions moins importantes demandĂšrent un district et un tribunal, tout au moins l'un ou l'autre, surtout Ă  partir du jour oĂč le ComitĂ© de constitution fit luire Ă  leurs yeux la 1 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du Cotentin. 18 dĂ©cembre 1789. Arch. nat., Div" 1, 1. 23. 2 RĂ©futation de l'imprimĂ© ayaiil pour titre Observation* sur le chef-lieu du dĂ©parte- ment de Cotentin ». pur Vieillard, dĂ©putĂ© du Cotentin, habitant de Saini-LĂŽ, imprimĂ©e, 15 p. Ibid., 1>ivMs 10. 1. 231. 3 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e de la province de Normandie, 23 dĂ©cembre \789, Ibid.. Divbisl, LA LUTTE POUR LES DISTRICTS I DANS LE DÉPARTEMENT DE CAEN 413 promesse de dĂ©dommager, par la rĂ©partition des autres Ă©ta- blissements publics, les villes qui auraient vu leurs premiĂšres espĂ©rances trompĂ©es » -1. Dans la partie du dĂ©partement de Caen qui avait appartenu Ă  l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© 2, en dehors de Caen, que sa situation de chef -lieu dĂ©partemental plaçait tout naturellement Ă  la tĂȘte d'un district, quatre villes ambitionnaient cet honneur Bayeux, Vire, Isigny et CondĂ©-sur-Noireau. Bayeux, capitale du Bessin, ville Ă©piscopale, siĂšge d'une Ă©lection et d'un bailliage, pria ses dĂ©putĂ©s de Wimpfen et Delauney de s'entremettre en sa faveur ; avec l'obtention d'un district, cette ville demandait le maintien de son Ă©vĂȘchĂ©, menacĂ© par les intrigues de Lisieux et l'Ă©rection d'un tribunal supĂ©rieur, en souvenir du Conseil supĂ©rieur dont Mau- peou l'avait dotĂ©e en 1771. Elle craignait que les relations de Thouret, si influent au ComitĂ© de constitution, avec ses amis de Caen, Le Telier de Vauville et Alexandre, ne fissent attribuer Ă  cette ville la juridiction d'appel qu'elle souhaitait si ardemment^. Vire, aprĂšs avoir rĂȘvĂ© d'ĂȘtre capitale du dĂ©partement, se rabat- tait sur un district auquel semblait lui donner droit son rang de chef-lieu de bailliage et d'Ă©lection et mettait sa confiance dans les talents de son dĂ©putĂ©, Flaust, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bail- liage 'll Isigny, placĂ©e entre Bayeux et Carentan, dĂ©sirait, sinon un district, au moins une juridiction spĂ©ciale elle vantait son port, son commerce important de beurre, de cidre, de bois ; son tribunal d'amirautĂ© et sa haute justice domaniale. PrĂ©voyant son Ă©chec probable, elle exprimait sa volontĂ© d'ĂȘtre rattachĂ©e Ă  Bayeux et d'ĂȘtre sĂ©parĂ©e de Carentan, dont l'accĂšs Ă©tait trop pĂ©rilleux 5. CondĂ©-sur-Noireau, situĂ©e Ă  six heures de Vire, se flattait de l'emporter sur sa voisine ou d'ĂȘtre traitĂ©e comme elle. A l'appui de ses prĂ©tentions, elle faisait valoir son anciennetĂ©, sa population supĂ©rieure Ă  5,000 Ăąmes ; elle exhalait sans retenue ses rancunes contre une rivale qui l'avait dĂ©pouillĂ©e de l'Ă©lection, 1 Rapport sommaire de la nouvelle division du royaume, par Bureaux de Puzy, 8 janvier 1790. Arch. nat., AD1 60. 2 C'est Ă  dessein que j'omets les rĂ©clamations de Lisieux, Honfleur, Orbec et Saint-Pierre-sur-Dives pour l'obtention d'un district, ces villes Ă©tant Ă©trangĂšres Ă  la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. 3 Lettres des officiers municipaux Ă  Wimpfen et Delauney, 8 et 15 mai, 12 juin, 7 juillet 1790. Arch. comm., Bayeux. Registre de correspondance. 4 Lettres des officiers municipaux Ă  Flaust, juin 1790. Ibid., Vire. Registre de correspondance. 5 RequĂȘtes du ComitĂ© municipal d'Isigny, reçue au ComitĂ© de constitution le 2 janvier 1790. Arch. nat., Divbis 21, l. 328. 414 NOMBREUSES COMPETITIONS DANS LE COTENTIN ! TOIUONI de la subdĂ©lĂ©gation et du quart bouillon et qui n'Ă©tait que trop accoutumĂ©e Ă  s'enrichir de ses pertes ». Elle rĂ©clamait, par la voix de son pasteur protestant, GĂ©dĂ©on Gourjon, un arrondisse- ment de quatre-vingts paroisses. C'est, ajoutait-elle, dans la ville de CondĂ© que se sont concentrĂ©s les sentiments patrio- tiques de ce territoire et que, dĂšs le commencement de la RĂ©vo- lution, il fut arrĂȘtĂ© solennellement un acte de confĂ©dĂ©ration pour la protection et le maintien de la nouvelle Constitu- Ă©e lion » "l. Elle espĂ©rait que l'heure Ă©tait venue de la rĂ©com- penser d'avoir Ă©tĂ©, Ă  l'aube des temps nouveaux, le foyer du patriotisme ». Dans le dĂ©partement du Cotentin, les convoitises Ă©taient plus nombreuses encore. IndĂ©pendamment des six anciens chefs- lieux d'Ă©lection que ce ressort contenait Avranches, Carentan, Coutances, Mortain, Saint-LĂŽ et Valognes, de nombreuses villes et bourgades prĂ©tendaient devenir le siĂšge d'une administration. A les en croire, il eĂ»t fallu multiplier les districts et le dĂ©parte- ment n'en eĂ»t pas contenu moins de treize. Torigni menaçait de dĂ©membrer Saint-LĂŽ et Granville de dĂ©membrer Avranches ; Villedieu se taillait un ressort au dĂ©triment de Coutances et de Vire ; PĂ©riers et la Haye-du-Puits projetaient des empiĂ©tements sur Carentan et Coutances ; Cherbourg voulait s'affranchir de Valognes et former un district aux dĂ©pens de sa rivale. Et chacune de ces prĂ©tentions s'armait de longs considĂ©rants, s'Ă©tayait d'arguments en apparence irrĂ©futables. RĂ©sidence princiĂšre, fiĂšre de son chĂąteau splendide, Torigni rappelait son glorieux passĂ©, le temps oĂč elle possĂ©dait six juridictions ; elle vantait son bailliage, oĂč ressortissaient quatre-vingts paroisses et 60,000 jus- ticiables, dont les titres de famille dormaient chez les notaires de la ville ; elle arguait de sa position centrale, qui l'avait dĂ©si- gnĂ©e comme le futur rendez -vous des dĂ©putĂ©s du Cotentin, char- gĂ©s de la question des subsistances. A dĂ©faut d'un district, dont elle avait soigneusement dĂ©limitĂ© l'Ă©tendue, elle demandait au moins Ă  conserver son bailliage et elle promettait que les juges maintenus Ă  Torigni ne demanderaient pas d'appointements *2. 1 adresse de la municipalitĂ© de CondĂ©-sur-Noireau Ă  NN. SS. les dĂ©putĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e nalionale, 23 dĂ©cembre 1789. Arch. nat , Divbis5, 1. 172.— KequĂȘte de la mĂȘme municipalitĂ©, du 14 fĂ©vrier 17!!. Ibid., Divb,s21, 1. 327. — Cf. Arch. comm., CondĂ©-sur-Noireau, Dl. Registre des dĂ©libĂ©rations, 19 aoĂ»t 1790. 2 ReprĂ©sentations de la ville et arrondissement du bailliage de Torigni sur la 11011- Velle division territoriale, prĂ©sentĂ©es par les dĂ©putĂ©s extraordinaires de la commune de Torigni Ă  NN. SS. les dĂ©putĂ©s de l'AssemblĂ©e nationale, 2 janvier 1790, ms. Dix signa- tures, lleudeline rĂ©dacteur. Arch. nat., Divlm5, 1. 172. PRÉTENTIONS JE GRAN VILLE, YILLEDIEU, PÉRIERS 415 Granville mettait en avant sa qualitĂ© de ville franche, ses nom- breuses juridictions vicomte, amirautĂ©, consulat et traites, sa population de 12,000 Ăąmes, le produit de ses douanes 300,000 li- vres par an, de sa pĂȘche Ă  Terre-Neuve. N'Ă©tait-elle pas le port principal de commerce du dĂ©partement, qu'elle approvisionnait en poisson, rĂ©sine, huile, savon, vins et eaux-de-vie? N'Ă©tait-elle pas une pĂ©piniĂšre pour la marine militaire et n'avait-elle pas fourni dix mille matelots au roi dans la guerre d'AmĂ©rique? A tous ces titres, elle escomptait l'obtention d'un district. DĂšs la fin de novembre, la petite ville de Villedieu, dĂ©sireuse d'obtenir une juridiction et un district, avait provoquĂ© un pĂ©titionnement Ă  plusieurs lieues Ă  la ronde, parmi les paroisses trop Ă©loignĂ©es de Goutances ou de Vire, leurs centres administratifs et qui dĂ©siraient un chef-lieu d'accĂšs plus facile. Dans le nord de la presqu'Ăźle, mĂȘmes compĂ©titions, avec plus d'acharnement peut-ĂȘtre de part et d'autre. PĂ©riers, siĂšge du bailliage de Saint-Sauveur- Lendelin, inquiĂšte des bruits qui courent sur la division du dĂ©par- tement et l'insuffisance du nombre des districts projetĂ©s, jette un cri d'alarme et les soixante-dix paroisses de son ressort lui font Ă©cho. En dĂ©cembre 1789 et janvier 1790, il n'est pas de jour oĂč l'une d'entre elles ne demande par dĂ©libĂ©ration spĂ©ciale le main- tien d'un tribunal et l'Ă©tablissement d'un district Ă  PĂ©riers. Toutes adressent leurs vƓux au dĂ©putĂ© du bailliage, Pouret- Roquerie, en sollicitant son intervention. Vaudrimesnil, le 6 dĂ©- cembre, lui promet de chanter un Te Deum pour la santĂ© des Constituants. S'il est impossible d'obtenir un arrondissement administratif, PĂ©riers demande avec insistance le maintien de son tribunal, dont l'Ă©tablissement se perd dans la nuit des temps » ; elle invoque l'intĂ©rĂȘt des justiciables et aussi celui des juges et hommes de loi ayant une situation acquise dans cette ville, y Ă©tant fixĂ©s en grand nombre avec leurs familles. Un dĂ©mĂ©nagement brutalement imposĂ© serait leur ruine et celle du pays &\ La Haye-du-Puits ne se crut pas moins autorisĂ©e que ses voisines Ă  demander Ă  la fois district et juridiction. Une carte du Haut-Cotentin, visiblement dressĂ©e dans cette intention, faisait ressortir la position avantageuse de cette ville, au centre d'un arrondissement de soixante paroisses, dont elle avait pris 1 1° RequĂȘte de PĂ©riers Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 25 dĂ©cembre 1789. — 2° Adresse de Saint-Sauveur-Lendelin Ă  Pourot-Pioquerie, 10 janvier 1790, et dĂ©libĂ©rations de nombreuses paroisses du bailliage, prises en dĂ©cembre 17N9 et janvier 1790. Arcb* nat., Divbis10, 1. 230. 416 PRÉTENTIONS DE LA HAYE-DU-PUITS ET DE CHERBOURG l'agrĂ©ment. Un des notables les plus en vue de l'endroit, Regnault de Bretel, futur prĂ©sident de l'administration dĂ©partementale de la Manche, Ă©crivit lettres sur lettres Ă  l'AssemblĂ©e nationale pour lui dĂ©crire la misĂšre de cette contrĂ©e, qui n'attendait sa rĂ©gĂ©nĂ©- ration que d'un trait de plume *. Pour Ă©craser une rivale, tous les moyens semblaient bons ; la jalousie engendrait l'intrigue, les manƓuvres perfides, les insinuations calomnieuses. Carentan fut obligĂ©e de se dĂ©fendre contre les attaques de la Haye-du- Puits et de PĂ©riers. On lui reprochait son insĂ©curitĂ© parce qu'elle avait Ă©tĂ© le théùtre d'une Ă©meute Ă  propos des grains ; grief de mauvaise foi et qu'on eĂ»t pu formuler contre mainte ville de Basse-Normandie. On dressait surtout comme un Ă©pouvantail l'insalubritĂ© de ses marais, les miasmes pestilentiels qui avaient autrefois empĂȘchĂ© d'y Ă©tablir garnison ^K Carentan crut devoir adresser Ă  l'AssemblĂ©e nationale, pour sa justification, l'Ă©tat des naissances et des dĂ©cĂšs de 1784 Ă  1789 3. A son tour, elle usa de reprĂ©sailles ; elle fit procĂ©der Ă  une enquĂȘte par le receveur prin- cipal de la vente du sel blanc afin de connaĂźtre la population exacte de ses deux rivales, d'aprĂšs les rĂŽles de vente et de mettre au point leurs affirmations audacieuses 4. Elle signala l'insuffi- sance de leurs ressources, dĂ©crivit leur aspect chĂ©tif et en fit un portrait peu flatteur telle la Haye-du-Puits, misĂ©rable bour- gade, ensevelie dans un pays inaccessible, composĂ©e au plus de cent maisons, dont vingt Ă  peine ont un Ă©tage au-dessus du rez- de-chaussĂ©e. » Le nord du Cotentin ne formait qu'une seule Ă©lection, celle de Valognes. Sans vouloir enlever Ă  cette ville le rang de chef-lieu, Cherbourg demandait un district spĂ©cial. Sa population, Ă©cri- vait Chantereyne, son dĂ©putĂ© extraordinaire, excĂšde celle de 1 1° MĂ©moire de Regnault de Bretel en faveur de La Haye-du-Puits, 20 dĂ©cem- bre 1789; 2° A ce mĂ©moire est joint un Plan du'IIaut-Cotentin divisĂ© [Kir cantons de frenle-six lieues carrĂ©es, avec la position de chaque chef-lieu et les routes . Celle du Cotentin exigea trois semaines de pourparlers et de discussions. DĂšs la premiĂšre sĂ©ance, le 18 dĂ©cembre, la division Ă©clata entre les dĂ©putĂ©s. L'assem- blĂ©e comprenait seize membres, par suite de l'absence du baron de JuignĂ© ; l'Ă©vĂȘque de Coutances prĂ©sidait. On mit en avant le chiffre de neuf districts ; dix voix contre six le rejetĂšrent. Ango, bailli et dĂ©putĂ© de Saint-Sauveur-le-Vicomte, jugeant la partie perdue pour sa ville, quitta la salle des confĂ©rences. AprĂšs son dĂ©part, on proposa huit districts ; ce nombre fut encore Ă©cartĂ© par neuf voix contre six. Au troisiĂšme scrutin, huit suf- frages se prononcĂšrent pour six districts, six suffrages pour sept et l'on trouva un bulletin blanc. La majoritĂ© absolue Ă©tant atteinte, le nombre des districts du Cotentin fut fixĂ© Ă  six. Sen- tant que le sort de leurs citĂ©s Ă©tait compromis, les dĂ©putĂ©s de PĂ©riers et de Granville, Pouret Roquerie et PerrĂ©e Duhamel firent entendre de vaines protestations. Ils s'abstinrent de voter dans le scrutin relatif Ă  la dĂ©signation des chefs-lieux. Les treize suffrages de l'assemblĂ©e se rĂ©unirent en faveur de Valognes, Carentan, Saint-LĂŽ, Coutances et Avranches. Mortain fut choisi par douze voix seulement, la treiziĂšme passa Ă  Cherbourg. On arrĂȘta que les districts seraient faits de maniĂšre Ă  ce que chacun obtĂźnt un territoire Ă  peu prĂšs Ă©gal et que les avantages fussent Ă©quitablement balancĂ©s » 3. GuidĂ©s par la tradition, les dĂ©putĂ©s du Cotentin attribuĂšrent la prĂ©fĂ©rence aux anciens siĂšges d'Ă©lec- tion W ; pour ne pas faire de jalouses, ils avaient Ă©cartĂ© les prĂ©ten- 1 Th. Lindet, Correspondance, p. 12. 2 Une seule rĂ©clamation s'Ă©tait Ă©levĂ©e, pour que le bourg de Vassy fĂ»t joint au dĂ©partement oĂč se trouvent Vire et CoudĂ© ». 3 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du dĂ©partement du Cotentin, 18 dĂ©cembre 1789. Arch. nat, Divbis1, 1. 23. 4 Dans sa rĂ©clamation Ă  l'AssemblĂ©e nationale, du 2 janvier 1790, PerrĂ©c-Duha- mel Ă©crit On jeta sur le bureau un plan reprĂ©sentant le dĂ©partement divisĂ© en *ix districts Ă©gaux ayant pour chefs-lieux les six viles d'Ă©lection. L'apparition FORMATION D'UN SEPTIEME DISTRICT A CHERBOURG 419 tions des autres villes. Granville, PĂ©riers, Saint-Sauveur-le- Vicomte, dont les dĂ©putĂ©s avaient Ă©tĂ© en minoritĂ© ; Torigni, Villedieu, La Haye-du-Puits et Cherbourg, qui n'avaient pas de reprĂ©sentants directs Ă  l'AssemblĂ©e, se voyaient dĂ©boutĂ©es de leurs demandes. Elles ne se tinrent pas pour battues. Ce fut Cherbourg qui revint la premiĂšre Ă  la charge. Le 24 dĂ©cembre, son dĂ©putĂ© extraordinaire, Chantereyne, introduit par Beaudrap de Sotteville dans l'assemblĂ©e des dĂ©putĂ©s que prĂ©sidait Achard de Bonvouloir, y plaida trĂšs habilement la cause de ses concitoyens. Il dĂ©montra la nĂ©cessitĂ© d'une juridiction pour Cherbourg trop Ă©loignĂ©e de Valognes. Il rappela l'intention que plusieurs dĂ©putĂ©s avaient manifestĂ©e d'accorder un tribunal Ă  Cherbourg. D'aprĂšs le nouveau plan du ComitĂ© de constitution, l'obtention d'un tribunal Ă©tait insĂ©parable de celle d'un district. S'ils avaient pu connaĂźtre Ce plan avant de prendre leur arrĂȘtĂ©, leur dĂ©cision eĂ»t Ă©tĂ© tout autre. Obtenue par surprise, celle-ci pouvait ĂȘtre rapportĂ©e. L'assemblĂ©e se rendit Ă  ces raisons et, Ă  une grande majoritĂ©, vota la formation d'un septiĂšme district avec Cherbourg comme chef-lieu ll Il fallut remanier les limites prĂ©cĂ©demment arrĂȘtĂ©es entre les districts. La carte du dĂ©partement fut soumise Ă  un examen nouveau. Les contours des six districts Ă©taient indiquĂ©s par des couleurs Ă  l'eau ; des lignes tracĂ©es Ă  l'encre noire vinrent che- vaucher sur les anciennes frontiĂšres ; plusieurs d'entre elles, raturĂ©es, rĂ©vĂšlent les hĂ©sitations, les tĂątonnements, les luttes qui durent se produire entre les copartageants 2. Le district de Cherbourg fut taillĂ© en entier dans celui de Valognes ; une ligne tirĂ©e du Rozel Ă  la pointe de Gatteville attribua Ă  son arrondisse- ment soixante-neuf paroisses. Chantereyne fit de vains efforts pour conquĂ©rir » Barfleur, qui resta au district de Valognes 3. Pour compenser les pertes de ce dernier, on recula ses frontiĂšres vers le sud, on l'Ă©largit aux dĂ©pens de Carentan ; la limite nouvelle subite de ce tableau n'Ă©tait pas propre Ă  dissiper le soupçon d'une cabale prĂ©judi- ciable au bien public ». Arch. nat., D ivbls 10, 1. 231. 1 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Cotentin, 24 dĂ©cembre 1790* Ib'uL, Divblsl, 1. 23 et 10, 1. 231. — Lettre de Chantereyne aux officiers municipaux de Cherbourg, 25 dĂ©cembre 1789. La journĂ©e d'hier, leur Ă©crit-il, est la plus belle de ma vie. » Arch. eomm., Cherbourg, AA 65. 2 Cette nouvelle division en sept districts est signĂ©e Beaudrap, Achard de Bon- vouloir, Artur de la Villarmois et Le Sacher de la Pal li Ăšre. Arch. nat., Divbis 1, 1. 23, 3 Lettre des officiers municipaux Ă  Chantereyne, 29 janvier 1790. Arch. Cherbourg, BB 11. 4*20 REMANIEMENT DES DISTRICTS DU COTENTIN coupait la presqu'Ăźle d'une ligne oblique de Port-Bail Ă  Saint- Marcouf ; le tracĂ© en fut plus d'une fois remaniĂ© ; la Bonneville, FrĂ©ville et Saint-Marcouf, disputĂ©es entre Carentan et Valognes, restĂšrent Ă  cette derniĂšre l. DĂ©pouillĂ© de certains bourgs impor- tants comme Saint-Sauveur-le-Vicomte, Carteret, Port-Bail, le district de Carentan ne reçut que de mĂ©diocres dĂ©dommage- ments un trĂšs lĂ©ger empiĂ©tement sur Coutances, Ă  qui il enle- vait trois paroisses, FeugĂšres, Saint-Ebremont-sur-Lozon et Saint-Christophe-d'Aubigny, compensĂ© d'ailleurs par deux pertes au profit de Saint-LĂŽ MĂ©nil-VĂ©neron et MĂ©nil-Ango. Son dĂ©putĂ©, Dumesnil-Desplanques, aprĂšs avoir tremblĂ© pour la possession du district, se contenta du sort fait Ă  Carentan, qui englobait dans sa circonscription ses deux rivales, PĂ©riers et la Haye-du- Puits l2. Dans le sud du dĂ©partement, une seule modification Ă  signaler. Le chemin neuf de Granville Ă  Villedieu continua Ă  for- mer la dĂ©marcation entre Coutances et Avranches ; les paroisses devaient appartenir au district sur le territoire duquel se trouvait leur clocher. Exception fut faite pour Donville, Yquelon, Cham- prepus, la BloutiĂšre et Fleury qui, malgrĂ© leur situation au nord de la route, demeurĂšrent Ă  Avranches. Granville et Villedieu furent aussi rattachĂ©es Ă  ce district. Le succĂšs de Cherbourg provoqua des plaintes et rĂ©veilla des convoitises. Valognes, amoindrie par la crĂ©ation du septiĂšme district, se posa en victime et fit demander par ses deux envoyĂ©s extraordinaires, le chevalier du Mesnildot et de Rozi, le retour Ă  l'ancienne division en six districts \ A en croire les autres villes sacrifiĂ©es, il fallait augmenter le nombre de ceux-ci ; elles livrĂšrent dans ce but un nouvel assaut Ă  la dĂ©putation du Cotentin. Le 30 dĂ©cembre, Villedieu, jugeant qu'elle avait un intĂ©rĂȘt pressant Ă  saisir l'AssemblĂ©e nationale de ses vƓux, dĂ©lĂ©gua vers elle l'abbĂ© 1 Une dĂ©limitation ultĂ©rieure, tracĂ©e sur les reprĂ©sentations d'Ango, rendit au district de Valognes les deux paroisses de Neuville-en-Beauniont et de Catteville et, par compensation, lui enleva La Bonneville au profit de Carentan. Arch. nat.. Divblsl, 2 Liste des paroisses qui forment les frontiĂšres" arrĂȘtĂ©es entre les districts de Valognes et de Carentan, prĂ©sentĂ©e Ă  MM. formant le ComitĂ© de constitution par Dumesnil-Desplanques. maire de Carentan, suivi de l'Ă©tal des frontiĂšres arrĂȘtĂ©es ntre les districts de Coutances et de Carentan, de Saint-LĂŽ et de Carentan, 15 jan- vier 1790. Ibid., Divbisl, 1. 23. 3 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e du Cotentin, 3, janvier 1790. Ibid. AprĂšs leur Ă©chec» les dĂ©putĂ©s extraordinaires de Valognes prĂ©sentĂšrent, le 7 janvier, un MĂ©moire Ă  MM. du ComitĂ© de constitution contre l'Ă©tablissement d'un district Ă  Cherbourg, imprimĂ©, 7 p>, suivi d'Observations et conclusions additionnelles manuscrites et annexĂ©es Ă  l'im- primĂ©. Ibid., Divbis10, 1. ?31. \ Cherbourg Leitesnil-a&Val Si-Jfartir -&fr>, te Grenrd . Ccudeloup Brdleuast 0 O ' °-LeVast Teurthevit SansscmjesnU. lequeboscq o ii/ l f^ ©ValognesX o °SlGermaiii-UCaUla*d. . Si quelques villes sacrifiĂ©es, cĂ©dant Ă  leur impression premiĂšre, exhalĂšrent leurs sentiments de jalousie contre des voisines mieux traitĂ©es, la plupart des mĂ©contents s'apaisĂšrent bientĂŽt, dans l'espoir des compensations prochaines. Toutes les citĂ©s qui avaient eu part Ă  la curĂ©e furent naturelle- ment les premiĂšres Ă  s'en rĂ©jouir. Fiers de possĂ©der un district, les officiers municipaux d'Avranches dĂ©cernĂšrent des titres hono- rifiques aux dĂ©putĂ©s de leur rĂ©gion dont l'appui leur avait profitĂ© ; ils nommĂšrent Artur de la Villarmois notable honoraire. Burdelot et BĂ©cherel, l'un habitant de Pontorson, l'autre curĂ© de Saint- Loup, furent nommĂ©s citoyens d'Avranches 3. Mortain organise une fĂȘte en l'honneur de l'AssemblĂ©e nationale et de son dĂ©putĂ©, Le Sacher de la PalliĂšre. On cĂ©lĂšbre une messe en musique avec Te Deum d'actions de grĂące ; on allume des feux de joie sur la place publique ; une pyramide y est dressĂ©e, portant cette ins- cription Vive le Roi ! Vive l'AssemblĂ©e nationale ! Vive Le Sacher de la PalliĂšre » 4. A Cherbourg, pour fĂȘter l'acquisition du nouveau district, le ComitĂ© national fait tirer vingt et un coups de canon du fort Longlet ; il se confond en protestations de gratitude envers Chantereyne, le bienfaiteur de la citĂ© et tous ceux qui l'ont si heureusement secondĂ© l'Ă©vĂȘque de Coutances, 1 M. Brette reproche cette hĂąte aux Constituants. Il les accuse d'une imprĂ©- voyance funeste dont la France porte, depuis cent vingt ans, le poids. Il reconnaĂźt, d'ailleurs, que les circonstances les forcĂšrent Ă  dĂ©crĂ©ter promptement la nouvelle organisation administrative. Brette, La RĂ©forme des DĂ©partements, art. citĂ©, p. 265-267. 2 Voici, Ă  lilre d'Ă©chantillon, un extrait rie l'adresse que la municipalitĂ© de Vire envoya, le 10 mars 1790, Ă  l'AssemblĂ©e nationale DĂ©jĂ  [le paysj vous doit cette helle et sublime organisation qui ne le divise en 8? parties que pour le tenir Ă  jamais uni avec plus d'ordre et plus de force. Il vous doit ces administrations paternelles qui font jouir chaque section du bonheur des petites rĂ©publiques, en leur conservant la force d'une monarchie imposante. » Arch. nat., C 111, 1. 247. 9 Arch. coram., Avranrhes, Registre des dĂ©libĂ©rations, 20 fĂ©vrier 1700. '- ii Ibid., Mortain, Registre des dĂ©libĂ©rations, 22 dĂ©cembre 1789. 4*28 LE DÉPARTEMENT, CADRE ÉLECTORAL ET ADMINISTRATIF JuignĂ©, Beaudrap et Pouret l\ La municipalitĂ© nouvelle est animĂ©e des mĂȘmes sentiments et la flamme allumĂ©e au bĂ»cher du 21 fĂ©vrier symbolise l'attachement passionnĂ© des citoyens de Cherbourg pour le grand Ɠuvre » de ses reprĂ©sentants 2>. Les Constituants mĂ©ritaient de tels hommages. Assez habiles pour ne pas dĂ©ranger les habitudes acquises et les rapports tradi- tionnels, tout en remaniant assez profondĂ©ment la carte adminis- trative du pays, ils avaient su concilier les exigences de la nature avec les intĂ©rĂȘts et les besoins des populations. Cette division nouvelle du royaume, comme l'indiquait expressĂ©ment le dĂ©cret du 16 fĂ©vrier 1790, n'avait en vue que l'organisation des assem- blĂ©es administratives et des assemblĂ©es Ă©lectorales. Le dĂ©parte- ment de 1790 Ă©tait une intendance de moindres dimensions; c'Ă©tait aussi la pĂ©piniĂšre Ă©lectorale des lĂ©gislateurs, l'unitĂ© de mesure de la souverainetĂ© nationale Ă©quitablement distribuĂ©e dans toutes les parties du royaume. Le dĂ©cret du 16 fĂ©vrier 1790 maintenait jusqu'Ă  nouvel ordre les anciennes divisions relatives Ă  la perception des impĂŽts, Ă  l'exercice de l'autoritĂ© judiciaire ; les circonscriptions ecclĂ©siastiques n'avaient reçu encore aucune atteinte. Toutefois, en fixant les limites des dĂ©partements, dis- tricts et cantons, l'AssemblĂ©e nationale avait tracĂ© le cadre oĂč allait se mouvoir, dans un avenir peu Ă©loignĂ©, non seulement l'activitĂ© du pouvoir administratif, mais encore celle des pouvoirs financiers, judiciaires, ecclĂ©siastiques ; elle avait prĂ©parĂ© le fonc- tionnement mĂ©thodique et rĂ©gulier des grands services de la France moderne. Une telle Ɠuvre Ă©tait solide et durable ; elle a survĂ©cu Ă  ses ouvriers ; aprĂšs plus d'un siĂšcle d'existence, en dĂ©pit des rĂ©volutions politiques et Ă©conomiques qui lui ont livrĂ© assaut et, en attendant la destruction, peut-ĂȘtre fort prochaine, dont elle est menacĂ©e, elle est, aujourd'hui encore, debout. 1 Arch. comm., Cherbourg, BB11. de correspondance, 31 janvier 1700. ‱"> fbiti., BBo, Registre des dĂ©libĂ©rations, 21 fĂ©vrier 1790. PERSISTANCE DES TROUBLES 429 CHAPITRE XVI LES TROUBLES PUBLICS DANS LA GENERALITE DE CAEN PENDANT LES DERNIERS MOIS DE SON EXISTENCE JANVIER -AOUT 1790 Persistance des troubles causĂ©s par la disette et le chĂŽmage. Improvisa- tion de secours par les municipalitĂ©s. Demandes d'assistance Ă  l'Etat. — Agitation populaire dans les villes l'Ă©meute de Carcntan. Malaise des campagnes insĂ©curitĂ© des propriĂ©tĂ©s privĂ©es et publiques. — DĂ©sarroi des finances ; retards dans l'assiette et la perception des impĂŽts ordinaires et de la contribution patriotique ; refus de paiement des aides et octrois ; Ă©chec de la mission de PomiĂ©s en Basse-Nor- mandie. — Insubordination des gardes nationales dĂ©sertions et sou- lĂšvements dans plusieurs villes ; demandes d'organisation gĂ©nĂ©rale Ă  l'AssemblĂ©e nationale. — Le fanatisme religieux. Attitude rĂ©volu- tionnaire des curĂ©s au dĂ©but de la RĂ©volution. Volte-face amenĂ©e par la nationalisation des biens ecclĂ©siastiques et la politique de tolĂ©- rance religieuse de l'AssemblĂ©e constituante. Le clergĂ© agent de la contre-rĂ©volution. — Impuissance avouĂ©e des municipalitĂ©s Ă  rĂ©tablir l'ordre ; espoirs placĂ©s dans la prochaine activitĂ© des assemblĂ©es administratives. Il eut Ă©tĂ© prudent de hĂąter l'organisation des corps adminis- tratifs, car le dĂ©sordre Ă©tait Ă  son comble. Pas plus que les auto- ritĂ©s anciennes, les municipalitĂ©s nouvelles ne parvenaient Ă  l'enrayer. AprĂšs comme avant l'Ă©tablissement de celles-ci, la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen demeura le théùtre d'une agitation incessante et la proie de l'anarchie. De fĂ©vrier Ă  juillet 1790, c'est-Ă -dire pendant la pĂ©riode de gestation du rĂ©gime administratif nouveau, les troubles publics y furent aussi frĂ©quents et l'insĂ©curitĂ© sociale aussi grande. La question des subsistances restait toujours aussi angoissante. DĂšs le 31 octobre 1789, jugeant la rĂ©colte de l'annĂ©e fort mĂ©- diocre, l'intendant avait prĂ©dit la disette des grains U. Ses prĂ©vi- sions se rĂ©alisĂšrent. Le peuple eut Ă  souffrir de la raretĂ© du pain 1 Lettre do l'intendant de Launay, 31 octobre 1789. Arch; Calvados. C264CU 430 DISETTE ET CHÔMAGE. SECOURS IMPROVISÉS et de son prix excessif. A Caen le blĂ© valut 50 livres le sac Ă  la halle du 12 mai 1790 ]. Bayeux t2, Vire3 se plaignaient de sa chertĂ© qui Ă©puisait les bourses. Le 30 mai, les greniers des cam- pagnes Ă©taient dĂ©jĂ  vides '4. Comme les anciens ComitĂ©s perma- nents, les municipalitĂ©s formĂšrent des bureaux de subsistances pour veiller Ă  l'approvisionnement des villes ; leurs officiers fixĂšrent le prix du pain et de la viande ; en plus d'un endroit, ils eurent Ă  lutter contre les boulangers, qui refusaient de cuire, contre les bouchers qui menaçaient de suspendre leur vente 5. La charitĂ©, publique et privĂ©e, se dĂ©pensa en efforts souvent insuffisants pour allĂ©ger les souffrances populaires. On vit les grenadiers du rĂ©giment d'Aunis, Ă  Caen, abandonner au profit des pauvres la solde qu'ils recevaient pour leur service de garde au théùtre °>, le chevalier de Buffon, lieutenant-colonel du rĂ©gi- ment de Lorraine et les officiers de ce rĂ©giment distribuer aux pauvres de Bayeux des aumĂŽnes assez considĂ©rables 7. Des collectes faites Ă  l'occasion de cĂ©rĂ©monies publiques reçurent la mĂȘme destination 8. L'UniversitĂ© de Caen remit aux officiers municipaux, pour ĂȘtre employĂ© en Ɠuvres de bienfaisance, le crĂ©dit annuel affectĂ© Ă  sa distribution des prix f9. Le chĂŽmage aggravait la misĂšre. Les mendiants pullulaient dans les villes et les campagnes 10. Les officiers municipaux de 1 Lettre des officiers municipaux Ă  de Cussy, 12 mai 1790. Arch. comm., Caen, Registre de correspondance. 2 Lettre du procureur-syndic de Bayeux, Le Tellier, aux procureurs-syndics pro- vinciaux. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7780. 3 Lettre des officiers municipaux Ă  Flaust, 7 juin 1700. Arch. comm., Vire, Registre de correspondance. 4 Lettre des officiers municipaux Ă  Necker, 30 mai 1790. Ibid., Caen, Registre de correspondance. 5 Les officiers municipaux de Caen sont obligĂ©s d'augmenter le prix du pain pour amener les boulangers Ă  en cuire. Ibid., Caen. Registre de correspondance, lettre du 12 mai 1790. — A Avranches, un arrĂȘtĂ© de police municipale taxant Ă  8 sols le prix de la livre de bƓuf, est rapportĂ© sur la rĂ©clamation des bouchers et la livre taxĂ©e 8 sols 6 deniers. Ibid., Avranches, Registre des dĂ©libĂ©rations, 17 juin 1790. — Nombreux exemples de taxations du pain Ă  Tinchebrai. Ibid., Tinchebrai. Registre de dĂ©libĂ©rations, 12 mars, 25 avril, 20 mai, 20 mai, 2 juin, 20 juin, 27 juin 1790. 6 Lettre de remercĂźmenfs des officiers municipaux au lieutenant-colonel du rĂ©gi- ment d'Aunis, 15 avril 1790. Ibid., Caen. Registre de correspondance. 7 Ibid., Baveux. Registre de correspondance, mai 1790. 8 A Caen, une quĂȘte faite Ă  la messe de la foire, le 25 avril 1790, produisit 521 liv. Ibid., Caen, Dl. 9 DĂ©libĂ©ration de l'UniversitĂ© de Caen, du 21 juillet 1790. Ibid., ancien carton 25. Cf. Arch. dĂ©p., Calvados, D83. 10 Ibid., C 7780. Cf. Lettres des officiers municipaux de Caen Ă  Le Cavelicr, nĂ©go- ciant au Havre, 9 mars 1790 ; Ă  Cussy et Lamy, dĂ©putĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e nationale.* DEMANDES D 'ASSISTANCE A L'ÉTAT 431 Caen redoutaient la fermeture prochaine des manufactures, qui eĂ»t livrĂ© Ă  une dangereuse oisivetĂ© vingt mille journaliers dĂ©sƓu- vrĂ©s et sans pain l. Les ateliers de charitĂ©, Ă©tablis par la Com- mission intermĂ©diaire provinciale, languissaient par la faute du trop modeste crĂ©dit destinĂ© Ă  leur usage "2. Sur la proposition de son maire, VendƓuvre, le Conseil gĂ©nĂ©ral de Caen, vota le 20 mars, 4,000 livres pour occuper les ouvriers sans travail 3. Le 30 mai, un dĂ©cret de l'AssemblĂ©e nationale accorda 30,000 livres Ă  chacun des dĂ©partements de la Manche, du Calvados et de l'Orne pour le mĂȘme objet 4. Dans la situation critique oĂč elles se trouvaient, les villes furent obligĂ©es de mendier les secours de l'Etat. Le 31 mars, Caen expose au contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral la dĂ©tresse de la caisse muni- cipale Ă©puisĂ©e au profit des pauvres et lui demande la remise exceptionnelle de la taxe reprĂ©sentative de la corvĂ©e, qui s'Ă©lĂšve Ă  6,000 livres », d'avoir injustement fixĂ© la pro- portion de cote entre le maĂźtre de la terre et celui qui l'exploite, en faisant supporter Ă  ce dernier les dix-neuf vingtiĂšmes de la charge t'2. Si le fermier rĂ©clame contre son propriĂ©taire, certaines municipalitĂ©s se prĂ©tendent sacrifiĂ©es par la lĂ©gislation nouvelle et opposent Ă  leur malheureux sort celui de leurs voisines mieux traitĂ©es par le fisc. Le nouveau mode de taxation, en frappant la terre au lieu de sa situation et non plus Ă  celui du domicile de son possesseur, menace d'Ă©craser, sous une cotisation trop lourde, plus d'une communautĂ© qui ne pourra plus demander Ă  ses principaux contribuables qu'une faible partie de leurs an- ciennes impositions. D'oĂč des demandes en rĂ©duction qui viennent s'entasser dans les cartons du ComitĂ© des finances de l'AssemblĂ©e nationale 3. Dans l'attente d'une rĂ©ponse, les rĂŽles ne sont pas arrĂȘtĂ©s et le paiement de l'impĂŽt est ajournĂ© 4. Et que de diffi- cultĂ©s lors du recouvrement ! L'Ă©levage des chevaux a subi de grandes pertes dans le Cotentin ; la dĂ©tresse y est extrĂȘme, les fermiers Ă©migrent, le numĂ©raire disparaĂźt ; oĂč le collecteur trou- verait-il de l'argent? les parages de l'Ăźle. Archi nat. Dxxix >s. 6 Lettre de PomiĂšs, commissaire du roi, aux officiers municipaux de Caen., 27 mars 1790. Arch. comm,, Caen, carton 43. RÉSISTANCE AU PAIEMENT DES DROITS D 'OCTROI ET TARIF 439 l'expulsion de Fleury, directeur de la RĂ©gie, les assemblĂ©es des paroisses ont autorisĂ© la perception des droits d'aides, boucherie, tannerie et autres y rĂ©unis, mais Ă  condition qu'elle soit confiĂ©e aux commis de la ville et que le produit en soit versĂ© dans une caisse municipale l>. A Avranches, les employĂ©s des aides ont depuis longtemps abandonnĂ© leurs fonctions ; sans mĂȘme attendre qu'on les menace, ils ont cessĂ© l'exercice », nĂ©gligĂ© la marque des cuirs et de la viande 3. Les octrois des villes sont onĂ©reux aux paysans, qui s'ima- ginent payer la taille des bourgeois ; les droits de tarif perçus sur les bestiaux amenĂ©s dans les marchĂ©s ne se lĂšvent plus qu'au prix des plus grandes difficultĂ©s ; Ă  Mortain, Ă  Vire, plusieurs marchands de bƓufs rĂ©sistent et font scandale ; ils veulent qu'on leur montre pourquoi ils doivent » . Bayeux, peuplĂ© d'anciens privilĂ©giĂ©s et qui vit de la consommation qu'ils y font, considĂšre sa garde nationale comme une garantie indispensable contre les mĂ©con- tents dont elle est environnĂ©e. Les officiers municipaux dĂ©plorent sa dĂ©sorganisation et le relĂąchement des citoyens qui introduit le dĂ©sordre dans un corps fait pour maintenir le bon ordre UK En maint endroit, le service est interrompu et les municipalitĂ©s ont peine Ă  le rĂ©tablir 5;. En attendant une rĂ©glementation gĂ©nĂ©rale, certaines d'entre elles rĂ©digent leur code militaire, aux pres- criptions rigoureuses et le soumettent Ă  l'approbation de l'Assem- blĂ©e nationale §, A de telles exigences, plus d'un rĂ©calcitrant rĂ©pond par le refus de monter la garde et mĂȘme de payer un 1 Lettre d'Aveline, maire de Caumont, aux commissaires du roi pour la formation du dĂ©partement du Calvados, 12 avril 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inven- toriĂ©e. — Les municipalitĂ©s, tant des villes que des campagoes, sont des corps sans Ăąme, Ă©crit Capron, curĂ© de Mondeville prĂšs Caen. Loin de prĂȘter la main aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale, elles semblent craindre, de sorte que tout le monde est maĂźtre; » 4 juin 1790. Ibid. 2 Exemples de ces cĂ©rĂ©monies Ă  Vire, 21 fĂ©vrier 1790 ; Ă  Avranches, 2 mars ; Ă  Caen, 11 avril ; Ă  Granville. 13 mai ; Ă  Cherbourg, etc. 3 Lettre des officiers municipaux au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 30 mai 1790. Arch. comm., Caen. Registre de correspondance. 4 Lettres des officiers municipaux au prĂ©sident du ComitĂ© des rapports de l'As- semblĂ©e nationale et au baron de Wimpfen, 13 avril 1790. Ibid., Bayeux. Registre de correspondance. 5 A TinchebraU Ă  Vire, par exemple. G Projet d'un code militaire provisoire, 15 avril 1790. Ibid., Bayeux,, Di12. Registre de. A CondĂ©- sur-Noireau, la milice nationale parle en maĂźtresse et fait la loi les soldats des quatre compagnies, rĂ©unies pour entendre la lec- ture d'un arrĂȘtĂ© municipal relatif au rĂ©tablissement des aides, s'Ă©crient qu'ils ne veulent plus de commis, et dictent Ă  la muni- cipalitĂ©, par un arrĂȘtĂ© en forme, les conditions dans lesquelles ils protĂ©geront la perception des impĂŽts W. A ces ferments de dĂ©sordre s'en ajoute bientĂŽt un autre, le fanatisme religieux. La RĂ©volution allait voir se dresser contre elle un nouvel ennemi et non le moins redoutable le clergĂ©. Quand l'Ă©vĂȘque de Bayeux et son chapitre avaient protestĂ© 1 Lettre des ofiiciors municipaux au baron de Wimpfcn, 30 mal 1790. Arch. BĂŽmm., Caen. Registre de correspondance. — RĂ©ponse de Wimpfcn, 2 juin 1790. Ibid.. car- ton 50. 2 Lettre des officiers municipaux de Tinchebrai au ComitĂ© de constitution, 28 mars 1790. Arch. nat., Div21. 3 Lettre des officiers municipaux de Valognes au ComitĂ© des rapports, mars 1790. Ibid.. D xxix 81. 4 Arch. comm., Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, 10 et 11 dĂ©cembre 1789. 5 Lettre des officiers municipaux de Carentan au ComitĂ© des rapports, B juin 1790. Arch. nat., Dxxtx30. 0 Areh. comm., ComlĂ©-snr-Noireau, D t. Registre des dĂ©libĂ©ralinns, -27 BÔû! À Saint-Georges-des-Groseillk'rs. le 9 juin 1700. la milice nationale BĂ© Lins M rend coupable de sĂ©vices Ă  l'Ă©gard des habitants. Plaintes de la mithicijnUifcĂ© de Saint- Georges Ă  l'AssemblĂ©e nationale, lu juillet 1790. Arch. nat., lxxix'"s7, 103. 444 LA DÉCLARATION DE GUERRE DIT CLERGÉ contre l'illĂ©galitĂ© des Ă©lections de leur ordre aux Etats gĂ©nĂ©raux, quand un peu plus tard ils avaient contestĂ© la validitĂ© des dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale, la masse des curĂ©s bas normands ne les avait pas suivis dans leur rĂ©sistance. Le souvenir des humi- liations passĂ©es, l'espoir de l'indĂ©pendance et du bien-ĂȘtre futurs avaient alors inclinĂ© ces derniers vers la cause rĂ©volutionnaire. Le mouvement Ă©lectoral de 1789, Ă  Coutances comme Ă  Caen, avait rĂ©vĂ©lĂ© l'antagonisme profond qui sĂ©parait le haut et le bas clergĂ© et au sein des Etats gĂ©nĂ©raux, c'est l'appui des curĂ©s ruraux qui avait rendu possible la fusion des ordres et prĂ©parĂ© le triomphe du Tiers Ă©tat. Mais le haut clergĂ© n'avait pas dĂ©sarmĂ© ; les Ă©vĂ©nements lui fournirent l'occasion de ressaisir l'influence qu'il avait perdue. Le clergĂ© du bailliage de Caen, dans son cahier de dolĂ©ances, avait Ă©mis le vƓu ferme que la religion catholique fut religion d'Etat et la seule reconnue en France ; le dĂ©cret du 13 avril 1790, qui, rejetant une motion analogue de dom Gerle, acheminait le pays vers la libertĂ© des cultes, vint troubler la conscience d'un grand nombre de prĂȘtres. La tolĂ©rance religieuse de l'AssemblĂ©e nationale alarma un clergĂ© intransigeant en matiĂšre de dogme et trĂšs jaloux de sa domination. L'Ă©vĂȘque de Bayeux, alors maire de cette ville, laissa le 27 mai 1790 une dĂ©putation de son chapitre dĂ©poser sur le bureau de l'hĂŽtel de ville une protestation contre le dĂ©cret du 13 avril, protestation qu'il avoua ĂȘtre en partie son ouvrage et qui constituait un vĂ©ri- table appel Ă  la rĂ©volte /]. Le Conseil gĂ©nĂ©ral de Bayeux, malgrĂ© les sentiments catholiques de ses membres, dĂ©clara cette protes- tation attentatoire aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e », en ordonna la suppression, interdit d'en donner lecture publique. L'Ă©vĂȘque de Bayeux eut de nombreux imitateurs. Plus d'un prĂȘtre commença Ă  tenir des propos incendiaires, Ă  prĂȘcher les maximes les plus sĂ©ditieuses et les plus intolĂ©rantes '2; ; des libelles circulĂšrent clandestinement dans les villes et les villages criant haro sur les douze cents coquins des Tuileries qui s'enrichissaient des largesses des protestants et des juifs pour couper dans ses racines 1 Arch. comm., Baveux. Registre des dĂ©libĂ©rations, Di12, 27-29 mai 1790.— Cf. Pezet, Bayeux au XVIII* sii-cle, p. 138. 2 Le Courrier de Gorsas contenait, Ă  la date du 28 mai 1790 Les nouvelles que nous recevons de Caen et d'autres villes de la Normandie, annoncent les tentatives les plus criminelles de la majeure partie des prĂȘtres, pour soulever les peuples et allumer le feu de la guerre civile. » Le corps municipal de Caen ayant cru devoir protester Arch. comm., Caen, Dl, 28 mai 1790, Gorsas rĂ©pondit par un article, RĂ©tractons-nous, oĂč il prouvait la vĂ©ritĂ© de ses allĂ©gations. LE CLERGÉ AGENT DE LA CONTRE-REVOLUTION 445 l'arbre de la religion » 1^. Une campagne de brochures travailla les fidĂšles et le clergĂ© 2l. EffrayĂ©s par les affirmations menson- gĂšres que celles-ci renfermaient, se croyant trahis par leurs dĂ©putĂ©s », inquiĂ©tĂ©s dans leurs croyances et menacĂ©s dans leurs intĂ©rĂȘts matĂ©riels par l'adoption des lois qu'on leur prĂ©sentait comme des lois de spoliation 8, les curĂ©s firent volte-face, se rejetĂšrent dans le camp des Ă©voques et des privilĂ©giĂ©s. AprĂšs avoir Ă©tĂ© au dĂ©but les auxiliaires de la RĂ©volution, ils allaient devenir les agents les plus actifs de la contre-rĂ©volution. En prĂ©sence de tant de pĂ©rils, les municipalitĂ©s se rendaient un compte exact de leur faiblesse. Elles en faisaient publiquement l'aveu. Tous les liens paraissent dĂ©truits, Ă©crivaient les officiers municipaux de Caen Ă  leurs collĂšgues de Rennes. La force publi- que n'existe que dans l'opinion et chacun a la sienne. Chaque individu, dĂ©finissant la libertĂ© Ă  sa maniĂšre, n'admet des dĂ©crets que ce qui convient Ă  ses intĂ©rĂȘts ou Ă  ses passions et s'Ă©rige en despote pour gouverner tout ce qui l'environne; de sorte que, dans le chaos de l'anarchie qui rĂšgne depuis neuf mois, l'orage s'obscurcit de plus en plus, et nous n'apercevons point encore la terre qui nous est promise 4. » Tous les citoyens, cependant, n'Ă©taient pas aussi pessimistes ; plus d'un partisan de la RĂ©volution croyait alors, avec Aveline, que le terme de l'anarchie Ă©tait proche et que l'Ă©tablissement des assemblĂ©es administratives inaugurerait une Ăšre d'ordre et de prospĂ©ritĂ© &h 1 Courrier de Gorsas, n° du 14 juin 1790. 2 Lettre de GĂ©dĂ©on Gourjon, pasteur de CondĂ©-sur-Noireau, au curĂ© Gouttes, vice -prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, 28 mai 1790. Arch. nat., Dxxiv 33. 11 se plaint des injures et des menaces que les catholiques, fanatisĂ©s par les prĂȘtres, l'ont subir aux protestants, nombreux dans sa rĂ©gion. 3 Les dĂ©crets des 2 novembre 1789 et 14 mai 1790, en mettant Ă  la disposition de la nation les biens ecclĂ©siastiques, puis en ordonnant leur aliĂ©nation jusqu'Ă  con- currence de 400 millions de livres, avaient jetĂ© un certain trouble dans les habitudes et le train de vie des curĂ©s ruraux. Ils dĂ©tachĂšrent un grand nombre de ceux-ci de la cause de la RĂ©volution. Voir Sagnac, La LĂ©gislation civile, etc., p. 168-169. 4 Lettre des officiers municipaux de Caen Ă  ceux de Rennes, 2 avril 1790. Arch. comm., Caen, Registre de correspondance. 5 Lettre d'Aveline, maire de Caumont, aux commissaires du roi pour la formation du Calvados, 12 avril 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 14 LE DÉCRET DU 22 DECEMBRE 1789 CHAPITRE XVII l'organisation administrative des dĂ©partements et des districts AVRIL - JUILLET 1790 Le dĂ©cret du 22 dĂ©cembre 1789. — Comparaison de l'ancienne et de la nouvelle organisation administrative ressemblances superficielles, diversitĂ© des principes.— Les Commissaires du Roi pour la formation du Calvados, de la Manche et de l'Orne ; limitation de leurs attribu- tions par l'AssemblĂ©e nationale. — Les assemblĂ©es primaires des trois dĂ©partements difficultĂ©s de leur rĂ©union, longueur des opĂ©ra- tions Ă©lectorales. HostilitĂ© des campagnes contre les villes. Condi- tion sociale des Ă©lecteurs du second degrĂ© minoritĂ© d'hommes de loi, majoritĂ© de paysans et laboureurs. La- ^emblĂ©e Ă©lectorale du Calvados. Mode de rĂ©partition des trente-six administrateurs entre les six districts. PrĂ©dominance des Ă©lus ruraux. Protestations urbaines. Les assemblĂ©es Ă©lectorales des districts incident Ă  Vire. L'assemblĂ©e Ă©lectorale de la Manche. Les deux modes de scrutin successifs. RĂšglement du dĂ©bat sur le chef-lieu choix de Coutances. Condition sociale des trente-six Ă©lus, en majoritĂ© propriĂ©taires ruraux. Les assemblĂ©es Ă©lectorales des sept districts incident Ă  Carentan. L'assemblĂ©e Ă©lectorale de l'Orne et du district de Domfront faiblesse numĂ©rique du contingent fourni par l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. — Election des Directoires des dĂ©partements et des districts Ă©limination de l'Ă©lĂ©ment rural au profit de l'Ă©lĂ©ment urbain. L'administration aux mains des hommes de loi. Cessation des pouvoirs de l'intendant et de la Commission intermĂ©diaire provinciale. — Remise des archives des anciennes administrations. Liquidation des affaires communes aux trois dĂ©partements com- missaires liquidateurs et vĂ©rificateurs. Compte rendu de la Commis- sion intermĂ©diaire provinciale rĂ©ponses Ă©vasives des trois derniers intendants. Cordier de Launay Ă©migrĂ©, fonctionnaire en Russie, homme de lettres. Ce fut le dĂ©cret du 22 dĂ©cembre 1789, suivi de l'instruction du 8 janvier 1790, qui rĂ©gla l'organisation administrative de la France l. La hiĂ©rarchie parallĂšle des circonscriptions adminis- tratives et Ă©lectorales créées par l'AssemblĂ©e nationale n'Ă©tait 1 Un dĂ©cret du 10 dĂ©cembre 178!» avait, au prĂ©alable, supprimĂ© les commissaires dĂ©partis et leurs taureaux. DIRECTOIRES ET CONSEILS DES DEPARTEMENTS ET DISTRICTS 447 pas, de la base au sommet, rigoureusement symĂ©trique. Si les dĂ©partements, et au-dessous d'eux les districts, Ă©taient Ă  la fois des ressorts administratifs et des cadres Ă©lectoraux, il n'en Ă©tait plus de mĂȘme Ă  l'Ă©chelon infĂ©rieur. Le territoire soumis Ă  l'action des municipalitĂ©s resta, sous le nom de commune, une division purement administrative et ce fut en principe un groupement de communes qui constitua, sous le nom de canton, le premier rouage du systĂšme Ă©lectoral nouveau. RĂ©unis en assemblĂ©es primaires dans chaque canton, tous les citoyens actifs devaient y nommer les Ă©lecteurs chargĂ©s Ă  leur tour d'Ă©lire, outre les dĂ©putĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e nationale, les administrateurs de dĂ©partement et de district. Ces Ă©lecteurs Ă©taient choisis Ă  raison de un par cent citoyens actifs, prĂ©sents ou non Ă  l'assemblĂ©e, mais ayant droit d'y voter, et parmi les contribuables qui acquittaient une impo- sition directe au moins Ă©gale Ă  la valeur locale de dix journĂ©es de travail. Leur assemblĂ©e plĂ©niĂšre, rĂ©unie au chef -lieu du dĂ©par- tement, nommait les trente-six membres de l'administration dĂ©partementale et le procureur gĂ©nĂ©ral syndic ; elle se fraction- nait en assemblĂ©es partielles de districts, qui dĂ©signaient les douze membres de l'administration des districts et leur procureur syndic. Chaque administration de dĂ©partement et de district se divisait en deux sections le Conseil et le Directoire, ce dernier comprenant huit membres pour le dĂ©partement et quatre pour le district, Ă©lus par les membres du Conseil et dans son sein. La durĂ©e de leur mandat Ă©tait de quatre annĂ©es, avec renouvelle- ment par moitiĂ© tous les deux ans. Les administrations de dĂ©par- tement Ă©taient chargĂ©es, sous l'inspection du corps lĂ©gislatif, de rĂ©partir les contributions directes du dĂ©partement entre les districts, d'ordonner la confection des rĂŽles des contribuables dans chaque municipalitĂ©, de rĂ©gler et de surveiller la perception et la rentrĂ©e de l'impĂŽt. Elles Ă©taient, en outre, chargĂ©es, sous l'autoritĂ© du roi, de ce qui concernait l'administration gĂ©nĂ©rale, notamment le soulagement des pauvres et la police de la mendi- citĂ©, le rĂ©gime des hĂŽpitaux, des ateliers de charitĂ© et des prisons, la surveillance de l'Ă©ducation publique, les encouragements Ă  l'agriculture, Ă  l'industrie et au commerce, la conservation des propriĂ©tĂ©s publiques, forĂȘts, riviĂšres, chemins, la direction des travaux publics, l'entretien, rĂ©paration et reconstruction des Ă©glises et presbytĂšres, le maintien de la salubritĂ© et de la sĂ»retĂ© publique, le service des gardes nationales. Les administrations de district devaient exercer ces diverses fonctions dans leur ressort plus restreint et sous le contrĂŽle des administrations de 448 RESSEMBLANCES SUPERFICIELLES ENTRE ANCIEN ET NOUVEAU RÉGIME dĂ©partement ; elles avaient surtout Ă  rĂ©partir les contributions directes entre les municipalitĂ©s du district. C'est au Conseil de dĂ©partement qu'il appartenait de fixer les rĂšgles de chaque partie importante de l'administration du dĂ©partement et d'ordonner les travaux et les dĂ©penses gĂ©nĂ©rales. Les Conseils de districts, sans pouvoir de dĂ©cision propre, devaient seulement prĂ©parer les demandes Ă  prĂ©senter, et les matiĂšres Ă  soumettre Ă  l'adminis- tration du dĂ©partement. Les Directoires Ă©taient chargĂ©s de l'exĂ©- cution des arrĂȘtĂ©s pris par les Conseils et de l'expĂ©dition des affaires courantes ; ceux des districts Ă©taient Ă  cet Ă©gard dans la subordination absolue de l'administration dĂ©partementale. Les Conseils Ă©taient pĂ©riodiques ; ceux de districts devaient tenir une session annuelle, de quinze jours au plus, avant la session des Conseils de dĂ©partement, qu'ils avaient mission d'Ă©clairer ; ceux- ci devaient siĂ©ger un mois chaque annĂ©e et six semaines pour la premiĂšre fois. Les Directoires Ă©taient permanents, en leur qualitĂ© de bureaux exĂ©cutifs ; ils s'absorbaient Ă  chaque session dans le sein des Conseils. Quant au procureur gĂ©nĂ©ral syndic du dĂ©parte- ment et aux procureurs syndics des districts, Ă©lus pour quatre annĂ©es, ils avaient sĂ©ance au Conseil et au Directoire de leur ressort ; ils n'y avaient pas voix dĂ©libĂ©rative, mais simplement consultative. Toutefois, on ne pouvait faire aucun rapport sans leur en donner communication, ni prendre aucun arrĂȘtĂ© sans les consulter et les entendre. Agents d'exĂ©cution de l'administration, ils Ă©taient chargĂ©s de la suite de toutes les affaires, mais ne devaient agir que de concert avec leur Directoire. Pour les sup- plĂ©er en cas de maladie ou d'absence, les Conseils devaient dĂ©si- gner un membre du Directoire. L'examen de la nouvelle organisation administrative du royaume rĂ©vĂšle de grandes ressemblances entre le passĂ© et le prĂ©sent. Les Conseils gĂ©nĂ©raux des dĂ©partements, ce sont, dans un cadre plus restreint, les anciennes AssemblĂ©es provinciales la Normandie en compte cinq alors qu'elle avait trois assemblĂ©es. Les' Conseils de districts remplacent les anciennes assemblĂ©es d'Ă©lection ou de dĂ©partement la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen comprenait neuf Ă©lections ; on a taillĂ© environ dix districts dans son ressort. Les Directoires de dĂ©partement succĂšdent aux Commissions intermĂ©diaires provinciales, ceux de district aux bureaux inter- mĂ©diaires de dĂ©partement ; ils n'ont fait que changer de nom. Les procureurs syndics existaient dĂ©jĂ  sous ce titre on a gardĂ© le nom et la chose. Il n'y en a plus qu'un par circonscription, car depuis la fusion des ordres la dualitĂ© des syndics nobles et rotu- DIVERGENCES PROFONDES ENTRE EUX 449 riens ne se justifie plus ; encore dans la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, la simplification est-elle dĂ©jĂ  faite. Les cadres Ă©lectoraux infĂ©rieurs, les cantons, existaient dĂ©jĂ  en germe dans les arrondissements Ă©lectoraux » chers Ă  Necker ; le nombre en est seulement multipliĂ©. La pĂ©riodicitĂ© prĂ©vue pour les Conseils, la permanence imposĂ©e aux Directoires sont des pratiques dĂ©jĂ  usitĂ©es depuis trois ans ; l'absorption momentanĂ©e des Directoires par les Conseils est un emprunt au fonctionnement du systĂšme administratif aboli. Il n'est pas jusqu'aux attributions des corps nouveaux qui ne rappellent celles des AssemblĂ©es provinciales celles-ci n'a- vaient-elles point comme tĂąche essentielle la rĂ©partition des impĂŽts, la surveillance des routes, les encouragements Ă  l'indus- trie et Ă  l'agriculture ? Enfin, si les Conseils nouveaux avaient l'incontestable avantage d'ĂȘtre issus de libres Ă©lections, le roi n'avait-il pas expressĂ©ment promis aux AssemblĂ©es provinciales ce mode de recrutement dans un assez court dĂ©lai? Les corps administratifs de 1790 semblaient donc, au premier abord, pro- longer l'action des administrations créées par l'Ă©dit de 1787. Et pourtant le dĂ©cret du 22 dĂ©cembre 1789 avait opĂ©rĂ© une rĂ©forme administrative profonde. Si les AssemblĂ©es provinciales et leurs subordonnĂ©es, avec leurs commissions, semblaient se survivre Ă  elles-mĂȘmes en changeant de forme et de nom, l'inten- dant et ses subdĂ©lĂ©guĂ©s disparaissaient sans laisser de trace. Il ne devait plus y avoir d'intermĂ©diaire entre les administrations de dĂ©partement et le pouvoir exĂ©cutif suprĂȘme. Plus de commissaire dĂ©parti, organe du gouvernement, recevant directement ses ordres et veillant Ă  leur exĂ©cution ; la police elle-mĂȘme, qui, Ă  l'Ă©poque du condominium entre Commission intermĂ©diaire et intendant, avait Ă©tĂ© rĂ©servĂ©e Ă  celui-ci parce qu'elle devait ĂȘtre exercĂ©e d'une main ferme et sans dĂ©faillance, avec la rigueur d'une consigne reçue d'en haut, allait ĂȘtre dĂ©sormais livrĂ©e Ă  des collectivitĂ©s indĂ©pendantes et en quelque sorte souveraines dans l'exercice de leurs fonctions », c'est-Ă -dire Ă©miettĂ©e et Ă©ner- vĂ©e. Laissant une libertĂ© sans contrepoids aux pouvoirs locaux, le nouveau systĂšme les coordonnait dans un concert prĂ©sumĂ© de bonnes volontĂ©s convergentes, au lieu de les subordonner Ă  l'autoritĂ© d'un gouvernement obĂ©i. Une extrĂȘme dĂ©fiance envers le roi, une confiance sans bornes envers la nation avaient eu pour effet de substituer une dĂ©centralisation absolue Ă  l'excessive centralisation de l'ancien rĂ©gime. C'Ă©tait au roi nĂ©anmoins que l'AssemblĂ©e nationale avait dĂ©lĂ©guĂ©, par son dĂ©cret du 8 janvier 1790, le soin de surveiller et 29 450 LES COMMISSAIRES Dl KOI POUR LA FORMATION DES DÉPARTEMENTS de diriger au plus tĂŽt, dans chaque dĂ©partement, l'exĂ©cution de la loi relative Ă  la formation des assemblĂ©es administratives. Celui-ci mit deux mois Ă  choisir ses collaborateurs. Par commission du 6 mars 1790, il dĂ©signa trois commissaires pour former chacun des dĂ©partements de la Manche et de l'Orne et quatre pour former celui du Calvados. FrĂ©min de Beaumont, maire de Coutances, Le Tuilier, procureur Ă  l'Ă©lection de cette ville et Bernard, avocat du roi Ă  Saint-LĂŽ, furent les trois commissaires de la Manche W. Pour le Calvados, Louis XVI choisit le comte de VendƓuvre, maire de Caen ; Revel de la Brouaise, substitut du roi au Parle- ment de Rouen ; Signard d'OuffiĂšres, riche nĂ©gociant de Caen, et Bayeux, ancien avocat au Parlement de Rouen, ancien secrĂ©- taire provincial de la Haute-Normandie 2. La formation de l'Orne fut confiĂ©e aux soins de Marescot, doyen du prĂ©sidial d'Alençon ; du vicomte de Chambray de la BelliĂšre et de Lepelle- tier-Ducoudray, vicomte d'Argentan 3J. Ces choix Ă©taient l'Ɠuvre d'une prudente rĂ©flexion on avait tenu Ă  ne dĂ©signer que des gens mis en vue par leur situation et Ă©prouvĂ©s par les circons- tances, c'est-Ă -dire qui fussent Ă  la fois en mesure de plaire Ă  l'opinion publique et de servir les intĂ©rĂȘts du roi. VendƓuvre, Beaumont, Chambray, Revel appartenaient Ă  la noblesse, les autres Ă  l'Ă©lite de la magistrature et du barreau. Le comte de VendƓuvre avait Ă©tĂ© membre de l'AssemblĂ©e des Notables de 1787 et de l'AssemblĂ©e provinciale de Caen et prĂ©sident de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Falaise-Domfront. FrĂ©min de Beaumont avait Ă©tĂ© le collĂšgue de Bernard Ă  l'AssemblĂ©e provin- ciale de Caen et celui de Le Tuilier dans les fonctions de syndic au dĂ©partement de Coutances. Ducoudray avait fait partie de l'assemblĂ©e du dĂ©partement d'Argentan. Bayeux avait, dans une fonccion subalterne, jouĂ© un rĂŽle considĂ©rable Ă  l'AssemblĂ©e provinciale de Rouen. La capacitĂ©, le zĂšle et la sagesse » dont tous avaient fait preuve dans leurs fonctions administratives avaient sans aucun doute fixĂ© l'attention du ministre. Signard d'OuffiĂšres, ancien prĂ©sident du ComitĂ© permanent de Caen, Il tlegĂŻslre de la commission royale copie de ces trois commissions Ă  la date du 23 mars 1790, loi. 2, 3, 4. Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie L non invenioriĂ©e ancienne M 7. Si Registre des procĂšs-verbaux de la commission du roi pour le dĂ©partement du Calvados. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. — Cf. Arch. comm., Caen, carton 56. Lettre des commissaires envoyant leurs commissions Ă  la municipalitĂ© de Caen, 31 mars 1790. 3 Commission de Marescot et lettre d'envoi des commissaires aux diverses muni- cipalitĂ©s, 7 avril 1790. Arch. dĂ©p., Orne, L 376. ACCUEIL QUE LEUR FONT LES DÉPARTEMENTS 451 ambassadeur extraordinaire de sa ville auprĂšs de l'AssemblĂ©e nationale, s'Ă©tait fait Ă  Paris de puissantes protections, il y gagna son brevet de commissaire 1. Quant Ă  Bayeux, appelĂ© de Rouen Ă  Paris par Necker, qui l'avait nommĂ© commis au ministĂšre des finances, puis en avait fait son secrĂ©taire et son confident, il fut adjoint aux trois premiers commissaires du Calvados Ă  la requĂȘte expresse de la municipalitĂ© de Caen, qui espĂ©rait profiter de ses relations et de sa grande influence 2. Des nominations faites avec un souci aussi Ă©vident de mĂ©nager les convenances locales ne pouvaient qu'ĂȘtre favorablement accueillies. Lorsque les commissaires du Calvados prĂ©sentĂšrent leur commission Ă  l'hĂŽtel de ville de Caen, les officiers munici- paux se fĂ©licitĂšrent que le choix du roi se fut portĂ© sur des citoyens de leur ville qui dans tous les temps avaient captivĂ© l'estime et les suffrages de ses habitants » 3. La municipalitĂ© de Coutances Ă©crivit aux commissaires de la Manche qu'elle Ă©taii heureuse d'ordonner la transcription sur ses registres d'une commission inscrite dans tous les cƓurs » 4. Le concert d'Ă©loges ne fut pas sans notes discordantes. Les officiers municipaux de Bayeux regardaient comme un grand mal que les quatre com missaires du roi fussent de Caen » et leur prĂȘtaient de mauvais desseins Ă  l'Ă©gard des campagnes III, Calvados 12. Discours de MM. les commissaires du roi Ă  la municipa- litĂ© de Caen, 2 avril 1790 Caen, Le Roy, 8 p. avec lettre d'envoi des commissaires Ă  Saint-Priest, du 3 avril. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. Registre de la commission du roi, 29 mars 1790. 3 Lettre des commissaires Ă  Saint-Priest, 11 avril 1790. Arch. nat., FlcIII, Cal- vados 12. 4 Registre de la commission du roi, 17 avril 1790 accusĂ© de rĂ©ception Ă  Saint- Priest de ce dĂ©cret, qui a Ă©tĂ© adressĂ© le 14 avril. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e, 454 LENTEUR DE LEUR FORMATION sion ' . Et les commissaires Ă©crivirent lettres sur lettres aux municipalitĂ©s *2. Les listes leur parvinrent peu Ă  peu des divers cantons. Le 23 avril, neuf communes n'avaient pas encore donnĂ© signe de vie; une ordonnance pressante enjoignit aux habitants de dresser eux-mĂȘmes la liste des citoyens, si les municipalitĂ©s s'y refusaient, et menaça les rĂ©calcitrants de la perte des droits civiques '. Un autre moyen d'accĂ©lĂ©rer l'opĂ©ration, fut la convo- cation des assemblĂ©es primaires pour le 28 avril. Elles devaient se rĂ©unir dans l'Ă©glise paroissiale de chaque chef-lieu de canton ; quand le nombre des citoyens actifs du canton dĂ©passait neuf cents, les commissaires dĂ©cidaient la tenue de deux ou plusieurs assemblĂ©es W. Les apports tardifs de certaines listes les obligĂšrent Ă  modifier leurs dispositions premiĂšres et Ă  crĂ©er, par ordonnances postĂ©rieures, des assemblĂ©es supplĂ©mentaires "". Parfois aussi l'arrivĂ©e imprĂ©vue de nouveaux citoyens actifs les forçait Ă  aug- menter le chiffre des Ă©lecteurs 0. Enfin, en prĂ©sence des rĂ©cla- mations de certaines paroisses, les commissaires crurent sage de dĂ©roger provisoirement aux rĂšgles tracĂ©es par l'AssemblĂ©e natio- nale pour la circonscription des cantons. C'est ainsi qu'ils dĂ©mem- brĂšrent sept communes du district de Pont-1'EvĂȘque pour les rattacher au district de Caen, partie au canton de Troarn, partie Ă  celui de Ranville 7. Ces modifications de la derniĂšre heure ajournĂšrent la date de plusieurs assemblĂ©es ; commencĂ©es le 28 avril, les opĂ©rations Ă©lectorales Ă©taient terminĂ©es le 12 mai. Dans le dĂ©partement de la Manche, elles souffrirent de plus longs retards. Les trois commissaires du roi s'Ă©taient cependant donnĂ© rendez-vous Ă  Coutances dĂšs le 22 mars, dans l'hĂŽtel de 1 RĂ©ponse de Saint-Priest aux commissaires, 15 avril 1790. Arch. nat., F1 ' III, Calvados 12. 2 Lettres des 16 et 19 avril 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 3 Ordonnance du 23 avril 1790. Arch. nat., F1'' III, Calvados 1. Ces neuf paroisses Ă©taient La Caine, GoupilliĂšres. Ouf/GĂšres, Grimbosq. Boullon, Croisilles, Valcon- giain, CampandrĂ©, Bonnemaison. 4 Ce qui arriva pour les cantons de Caen, Bayeux. Vire, Le BĂ©ny, Vassy, CondĂ©- sur-Noireau. r> Ordonnance du 20 avril, crĂ©ant deux assemblĂ©es primaires dans le canton de La FernĂšre-au-Doven. 6 A Caen ils accordĂšrent un huitiĂšme Ă©lecteur Ă  la section de l'UniversitĂ©, qui compta 758 Citoyens actifs au lieu de 707 prĂ©vus, et un septiĂšme Ă©lecteur Ă  celle des Cordeliers, qui, avec 623 inscrits, comptait 653 citoyens. 'Ordonnances des 8 et 9 mai 1790. 7 Varaville, Petitville et Bobehomme furent rattachĂ©s au canton de Troarn ; Gonneville, Merville, Le Buisson et Cabourg Ă  celui de Banville. Ordonnance du 27 avril 1790. LES ASSEMBLÉES PRIMAIRES DE LA MANCHE 455 l'un d'eux, FrĂ©min de Beaumont et s'y Ă©taient constituĂ©s en commission avec un avocat de la ville, Burnouf, pour secrĂ©taire. Empressement inutile, car ils ne reçurent que le 31 mars le procĂšs- verbal de division et la carte du dĂ©partement, piĂšces qui leur Ă©taient indispensables pour commencer leurs opĂ©rations. Du 5 au 10 avril, ils adressĂšrent aux municipalitĂ©s des circulaires et des instructions en vue de l'Ă©tablissement des listes de citoyens actifs et Ă©ligibles. Le 27 avril, lettres de rappel provoquĂ©es par l'inertie gĂ©nĂ©rale. Le 6 mai, quatorze cantons seulement sur soixante-trois leur avaient rĂ©pondu. Comme leurs collĂšgues du Calvados, ils se plaignirent Ă  Saint-Priest de la nĂ©gligence et de l'insouciance des municipalitĂ©s *>. Pour activer les opĂ©rations, ils rĂ©solurent de s'en partager la surveillance. FrĂ©min de Beau- mont, qui resta Ă  Coutances, eut dons son ressort les districts de Coutances et de Saint-LĂŽ, les cantons de PĂ©riers, la Haye-du- Puits et Lessay dans le district de Carentan, le canton de Gran- ville dans le district d'Avranches. Bernard se chargea des districts de Valognes et de Cherbourg et des autres cantons du district de Carentan. Le Tuilier prit le reste, c'est-Ă -dire les districts de Mortain et d'Avranches, moins le canton de Granville 2>. Leurs efforts rĂ©itĂ©rĂ©s triomphĂšrent de l'inertie des autoritĂ©s locales. Le 14 mai, trente-quatre cantons avaient envoyĂ© leurs listes 3 ; le 19 mai, arrivĂšrent celles des districts d'Avranches et de Mor- tain ; le 20, parvint le dernier envoi, celui de la paroisse d'Enne- ville, au district de Carentan W. Les soixante-trois cantons du dĂ©partement comptaient cent trente-six assemblĂ©es primaires 5. Celles-ci avaient dĂ» ĂȘtre dĂ©doublĂ©es dans plus d'un canton, en raison du nombre des citoyens actifs ; c'est ainsi que l'arrivĂ©e d'un tableau supplĂ©mentaire des citoyens actifs de CrĂ©ances força les commissaires Ă  Ă©tablir, par ordonnance du 21 mai, trois assemblĂ©es dans ce canton 8. La rĂ©union de ces assemblĂ©es fut fixĂ©e au 31 mai pour six districts ; celles du district de Valognes 1 Lettre des commissaires de la Manche Ă  Saint-Priest, 6 mai 1790. Arch. nat., Flf III, Manche 1. 2 Circulaire imprimĂ©e des commissaires indiquant ce partage. Ibid. 3 Lettre des commissaires Ă  Saint-Priest, 14 mai 1790. 4 Registre de la commission royale, 20 mai 1790, fol. 9. Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 5 Lettre des commissaires Ă  Sainl-Priest.. 22 mai 1790. Arch. nat., F1 ° III, Manche 1. 6 Registre de la commission royale, 21 mai 1790, fol. 9. Arch. dĂ©p.. Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 456 LES ASSEMBLÉES PRIMAIRES DE LORNE furent ajournĂ©es au 2 juin, Ă  cause des foires de Brix et de Cher- bourg. Dans les trois cantons du dĂ©partement de l'Orne dont les chefs-lieux appartenaient au ressort de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, les Ă©lections eurent lieu Ă  une date ultĂ©rieure. Les Ă©lecteurs de Fiers se rĂ©unirent le 11 juin ; ceux de la Carneille, le 25 juin seule- ment !/. LĂ  encore, il y eut plus d'assemblĂ©es que de cantons ceux de Fiers et d'Athis comprenaient deux sections Ă©lectorales ; celui de Tinchebrai en comptait cinq. Deux communes Ă©taient demeurĂ©es sourdes Ă  l'appel des commissaires Caligny et Saint- Pierre-du-Regard ; elles envoyĂšrent leurs listes au Calvados et leurs citoyens actifs Ă  l'assemblĂ©e de PontĂ©coulant. Les opĂ©rations Ă©lectorales s'Ă©chelonnĂšrent ainsi, dans les trois dĂ©partements, sur deux mois, de fin avril Ă  fin juin 1790. Elles ne furent exemptes ni de confusion, ni de troubles. C'Ă©tait la premiĂšre fois qu'on groupait en si grand nombre et sur tant de points les citoyens des campagnes. Les assemblĂ©es primaires de 1789, avec leur cadre restreint, la paroisse, constituaient des groupements numĂ©riques assez modestes. Les dĂ©putĂ©s ruraux issus de leur choix, qui s'acheminĂšrent le plus souvent deux par deux vers le chef-lieu du bailliage, y formĂšrent sans doute des rĂ©unions imposantes ; mais les garanties d'ordre pouvaient ĂȘtre facilement assurĂ©es dans des centres peu nombreux, qui Ă©taient des siĂšges de juridiction et des rĂ©sidences de marĂ©chaussĂ©e, et la compĂ©tence des gens de loi y put guider sĂ»rement le travail des assemblĂ©es. Aussi leurs sĂ©ances furent-elles calmes et leurs opĂ©- rations rĂ©guliĂšres. Pouvait-on attendre autant de tranquillitĂ© et de correction du vaste pĂ©titionnement Ă©lectoral qui, sur le territoire de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, allait mettre en mouvement plus de cent mille citoyens dans 202 assemblĂ©es? N'Ă©tait-il pas permis de supposer que dans ces rĂ©unions improvisĂ©es, oĂč les Ă©lecteurs devaient se compter par centaines '2; oĂč les premiers 1 Arch. dĂ©p., Orne, L388. 2 11 serait intĂ©ressant de dĂ©terminer exactement la valeur de la comparution individuelle des citoyens actifs aux assemblĂ©es primaires de 1790. Un si long travail serait dĂ©placĂ© ici. Les documents que j'ai recueillis sur quelques points rĂ©vĂšlent d'assez nombreuses abstentions. Dans les sections de Baveux, Ă©crit le maire de Magny Ă  l'AssemblĂ©e nationale, il n'y eut, le second jour de l'Ă©lection, presque per- sonne de la campagne. » Lettre de Comin Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 29 mai 1790. Arch. nat., D iv 21. — A l'assemblĂ©e des Capucins de Vire, on Ă©lut les six Ă©lecteurs en petit comitĂ©, en profitant de l'absence d'un grand nombre de membres qui assistaient Ă  une procession. PĂ©tition des citoyens de Vire Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 25 mai 1790. Ibid. — Les procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es primaires des cantons d'Athis, Fiers et CONFUSION ET IRREGULARITES DES ASSEMBLEES PRIMAIRES 457 Ă©lans d'une libertĂ© impatiente de la rĂšgle allaient se donner carriĂšre, l'ordre subirait plus d'un flĂ©chissement? Et faut-il s'Ă©tonner si cette consultation de la premiĂšre heure d'un suffrage censitaire encore peu Ă©clairĂ© fut accompagnĂ©e d'incidents isolĂ©s qui la troublĂšrent superficiellement, sans altĂ©rer d'ailleurs la sincĂ©ritĂ© de ses rĂ©sultats ? Il fallait compter d'abord avec l'inexpĂ©rience de citoyens dĂ©butant dans la vie publique. Les formalitĂ©s Ă©lectorales prescrites par le dĂ©cret du 22 dĂ©cembre 1789 Ă©taient si longues et si com- pliquĂ©es que plus d'une assemblĂ©e s'y embrouilla. Dans la Man- che, Ă  Quibou, Ă  Marigny, Ă  Saint-Denis-le-Gast, Ă  Saint-Sau- veur-Lendelin, le prĂ©sident et les scrutateurs furent Ă©lus par acclamation, contrairement au dĂ©cret et le serment civique ne fut pas prĂȘtĂ©. A Lessay, l'appel nominal des votants avait Ă©tĂ© si prĂ©cipitĂ© et si confus que la plupart d'entre eux n'avaient point eu le temps de prononcer la formule sacramentelle ; des discus- sions avaient surgi sur la rĂ©gularitĂ© de la procĂ©dure et le curĂ© de Saint-Germain-sur-l'E, prĂ©sident, avait levĂ© brusquement la sĂ©ance, emportant l'urne et laissant les opĂ©rations inachevĂ©es. Ailleurs, Ă  Saussemesnil, trois Ă©lecteurs sur huit n'avaient Ă©tĂ© nommĂ©s qu'Ă  la pluralitĂ© relative ; Ă  la Rondehaye, on avait procĂ©dĂ© au vote par acclamation tt». Dans l'Orne, le curĂ© d'Athis, Josset, avait Ă©tĂ© Ă©lu prĂ©sident par une majoritĂ© relative de 101 voix sur 234 votants et contraint, il avait dĂ» s'incliner devant une assemblĂ©e qui ne voulait pas recommencer le scrutin ?. On ne voulait ni sĂ©journer longtemps au chef-lieu, ni y revenir et l'on abrĂ©geait les formalitĂ©s. Un diffĂ©rend s'Ă©leva, dans l'assem- blĂ©e de Ver, entre cette commune et Langronne d'une part et les cinq autres communes du ressort ; les deux premiĂšres vou- Tinchebrai Arch. dĂ©p.. Orne. L 388, permettent une dĂ©termina' ion prĂ©cise. Dans le canton d'Athis, la section d'Athis 8 Ă©lecteurs, 841 citoyens actifs compte 234 votants ; celle de Berjou 5 Ă©lecteurs, 494 citoyens actifs, 185 votants. L'assemblĂ©e de Fiers 8 Ă©lecteurs, 771 citoyens actifs, ne s'Ă©leva qu'Ă  84 membres aprĂšs le dĂ©part des Ă©lecteurs d'Aubusson et de Saint-Georges-des-Groseillers. Il semble aussi que les dĂ©faillances, au cours des sĂ©ances prolongĂ©es, furent nombreuses l'assemblĂ©e de la Carneille tombe rapidement de 130 votants Ă  50. A Saint-Pierre-de-Tinchebrai, 139 citoyens actifs se rĂ©unissent le matin du 15 juin pour nommer 8 Ă©lecteurs ; le soir du mĂȘme jour ils ne sont plus que 46. Le. premier des huit avait obtenu 114 suf- frages, le dernier n'en recueillit que 24. 1 Registre de la Commission royale. Rapport des commissaires du roi sur leurs diverses opĂ©rations, 12 juin 1790, fol. 11-12. Arch. dĂ©p,, Manche, sĂ©rie L non inven- toriĂ©e. 2 Jbid., Orne, L 388. 458 HOSTILITÉ DES GAMPAOffBS contre les villes laient soumettre le litige aux commissaires du roi, mais les Ă©lec- teurs des cinq communes qui formaient la majoritĂ© de l'assem- blĂ©e dĂ©clarĂšrent qu'ils ne pouvaient toujours ĂȘtre en route et continuĂšrent les opĂ©rations Ă©lectorales ' . Parfois des rivalitĂ©s entre communes voisines amenĂšrent des conflits regrettables au sein des assemblĂ©es ; les Ă©lecteurs des villages jalousaient ceux du chef-lieu et le moindre prĂ©texte Ă©tait bon pour une rupture. Les Ă©lecteurs de Saint-Georges-des- Groseillers et d'Aubusson quittĂšrent l'AssemblĂ©e de Fiers sans remettre leurs listes et sans donner le motif de leur retraite'2. Les gens de BerniĂšres, maltraitĂ©s Ă  l'assemblĂ©e de Luc, refusĂšrent d'y retourner fl. Les campagnes Ă©taient en gĂ©nĂ©ral hostiles aux villes. C'Ă©tait le Tiers Ă©tat urbain qui l'avait emportĂ© dans les assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages aux Ă©lections des Etats gĂ©nĂ©raux. Pour prĂ©venir le retour d'un semblable Ă©chec, les ruraux ne vou- laient plus ĂȘtre confondus avec les citadins et rĂ©clamaient une circonscription Ă©lectorale distincte. En formant les trois sections de Bayeux et les quatre sections de Vire, les commissaires y avaient fait entrer des villages de la banlieue. Leur dĂ©cision souleva de vives protestations. A Bayeux, de graves dissenti- ments Ă©clatĂšrent dans l'assemblĂ©e Ă©lectorale des Capucins, entre les bourgeois et les dĂ©putĂ©s des campagnes, qui se croyaient lĂ©sĂ©s. Le 29 mai, le maire de Magny, les officiers municipaux des communes de Guernon, Longues, Marigny, Saint-Germain-des- EntrĂ©es, Sommervieu et Saint-Germain-de-la-Lieue se plai- gnirent Ă  l'AssemblĂ©e nationale de la part insuffisante que la campagne avait eue aux sections de la ville ». Ils accusaient les agents du pouvoir exĂ©cutif d'avoir frauduleusement dĂ©pouillĂ© vingt paroisses de l'avantage d'avoir des Ă©lecteurs de leur Ă©tat. La ville de Bayeux, a joutaient -ils, est intĂ©ressĂ©e Ă  la conservation d'un corps qui vient de manifester des sentiments rĂ©prouvĂ©s par le patriotisme de tous les bons citoyens du dĂ©partement » W. 1 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e primaire Ă©lectorale de Ver canton de CĂ©rences. Arch. nat., Div 27, 1. 394. — Cf. Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e, dos- sier identique. Le ComitĂ© de constitution ordonna aux commissaires de faire annu- ler les opĂ©rations; une nouvelle assemblĂ©e fut tenue Ă  Ver le 11 juin. 2 Arch. dĂ©p., Orne, L 388. 3 IUid., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 4 Plainte de Jean Comin, maire de Magny, 29 mai 1790. Extraits des procĂšs-ver- baux des dĂ©libĂ©rations des paroisses sus-visĂ©es, avec mĂ©moire; collectif du 31 mai 1790. Arch. nat., Div 21. — Cf. une lettre des commissaires du Calvados Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 3 juin 1790. Ibid., F1 c III, Calvados 1. CABALES ET VIOLENCES DANS LES ASSEMBLÉES PRIMAIBES 459 Une protestation en sens contraire, mais dirigĂ©e aussi contre les commissaires, avait Ă©tĂ© adressĂ©e quelques jours plus tĂŽt par un groupe de bourgeois de Vire. Ils n'avaient pas vu sans dĂ©plaisir l'annexion de quatre paroisses rurales Ă  la ville ; l'assemblĂ©e urbaine n'eut dĂ» contenir que des citadins. Il semble, Ă©crivait l'avocat Brouard, que tout ait concouru pour mettre l'aristo- cratie aux prises avec le patriotisme. Le choix a donnĂ© pour Ă©lecteurs des citoyens qui, avec sept Ă  huit mille livres de rente, n'ont pas rougi de faire une contribution patriotique de 150 li- vres » 0. Des inimitiĂ©s personnelles trouvĂšrent l'occasion d'Ă©clater au milieu de ces rĂ©unions et y provoquĂšrent le tumulte. A l'assem- blĂ©e du canton de BĂ©ny, le notaire Fortin avait Ă©tĂ© Ă©lu prĂ©sident, malgrĂ© une vive opposition de son concurrent le prieur de Car- ville. Une table, apportĂ©e dans l'Ă©glise, servait de bureau. Le curĂ© du Reculey monta dessus et vocifĂ©ra comme un furieux». Les gens de Monchamp, de Percy et du DĂ©sert le traitĂšrent de calotin impertinent » et ce jour-lĂ  le clergĂ© fut un peu hous- pillĂ© ». A Pontfarcy, un malavisĂ©, profitant de la confusion gĂ©nĂ©rale, s'Ă©tait enfui en emportant l'urne 2. A l'assemblĂ©e du canton de Juaye, la cabale avait prĂ©sidĂ© aux Ă©lections ; les billets n'Ă©taient pas inscrits sur le bureau, des gens apostĂ©s les Ă©crivaient dehors et les distribuaient publiquement, l'injure et la menace Ă  la bouche » l3\ Des paroles violentes et des formules d'ostracisme furent entendues dans plus d'une assemblĂ©e ; dans celle de Mondeville, un membre demanda qu'on frappĂąt d'une amende ceux qui voteraient pour un gentilhomme ou un ecclĂ©- siastique ; le procureur de la commune, Cauvet, victime d'un zĂšle protocolaire excessif, fut lui-mĂȘme violemment expulsĂ© 4. Au moment oĂč les opĂ©rations Ă©lectorales de la Manche allaient ĂȘtre closes, on crut qu'il faudrait les recommencer. Dans aucune des assemblĂ©es primaires les citoyens actifs n'avaient reprĂ©sentĂ©, conformĂ©ment aux dĂ©crets, l'extrait de leur dĂ©claration pour la contribution patriotique. FrĂ©min de Beaumont trembla Ă  l'idĂ©e 1 PĂ©tition des citoyens Ăźle Vire Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 25 mai 1790. Arch. nat., Div21. 2 Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 3 Lettre des commissaires Ă  Saint-Priest, 22 mai 1790. Arch. nat., F1' 111, Calva- dos 1. 4 Registre des ordonnances de la Commission royale, 21 mai 1790. Arch. dĂ©p., CaNados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e 460 CHOIX PRUDENT DES ASSEMBLÉES PRIMAIRES de faire procĂ©der Ă  un nouveau choix de prĂšs de huit cents Ă©lec- teurs et de mettre en mouvement, pour la seconde fois, une masse de 80,000 citoyens. Il en fut quitte pour la frayeur fl. L'Ɠuvre des assemblĂ©es primaires Ă©tait grosse de consĂ©quences. Les Ă©lecteurs qu'elles avaient dĂ©signĂ©s, appelĂ©s Ă  leur tour Ă  nommer les lĂ©gislateurs de la nation et les administrateurs des dĂ©partements, tenaient entre leurs mains le sort de la future RĂ©volution. Une fois de plus, la prudence normande se rĂ©vĂ©la dans leur choix. Les citoyens actifs n'Ă©cartĂšrent pas systĂ©ma- tiquement les membres de l'ancienne administration provinciale. Massieu et TesniĂšres de BrĂ©mesnil, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage d'Avranches, qui avaient Ă©tĂ© dĂ©putĂ©s Ă  l'AssemblĂ©e provinciale de Caen, Daigremont, membre de la Commission intermĂ©diaire provinciale, furent parmi les Ă©lecteurs. Quarante-trois membres des administrations des neuf dĂ©partements de la gĂ©nĂ©ralitĂ©, magistrats, avocats, mĂ©decins ou laboureurs, jouirent de la mĂȘme popularitĂ© ; ils avaient fait leur apprentissage administratif soit aux sĂ©ances annuelles des assemblĂ©es de 1787 et de 1788, soit aux frĂ©quentes rĂ©unions des bureaux intermĂ©diaires '2'. Un trĂšs 1 Lettre de FrĂ©min de Beaumont aux commissaires du Calvados, juin 1790. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 2 Voici la liste de ces quarante-trois membres 1° DĂ©partement pu Calvados. — District de Caen Bacon de Saint-Manvieu, con- seiller honoraire au bailliage; de Chappedelaine, conseiller au bailliage; HĂ©bert. Nourry. PiĂ©plu, Baisin, propriĂ©taires Ă  Fontenay-le-Marmion, Bretleville-sur-Odon, BrĂ©ville et Lanteuil, membres le l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Caen. — District de lia yeux Le Bret, Bunouf-Bunouville, avocats ; Denise, de Septvents ; Lepeton, d'En- glesqueville ; Milon, de Crouay ; Bourdiaux, d'AsniĂšres, propriĂ©taires, membres de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Bayeux ; Renouard. propriĂ©taire Ă  Sermentot, membre de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Caen. — District de Vire Brouard de Clermont, lieutenant gĂ©nĂ©ral honoraire du bailliage, prĂ©sident de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Vire ; Monlien de Perthou, prĂ©sident honoraire de l'Ă©lection, membre du bureau intermĂ©diaire ; Roger SoriĂšre, nĂ©gociant, membre de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Vire. ^° DĂ©partement de la Manche. — District d'Avranches Longrais de la Snunerie, ThĂ©ault des Orgeries et Lechevalier, laboureurs au Grippon, Ă  Saint-Auhin-de-Tor- regate et ;'i Servon, membres de l'assemblĂ©e du dĂ©partement d'Avranches. — Dis- trict de Çarentan Laurens et Caillemer, avocats, membres du bureau intermĂ©diaire ; Lcmaignan, procureur-syndic du dĂ©partement ; Begnault, de La Haye-du-Puits, membre de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Çarentan. — District de Cherbourg Dulongprey-Couet, nĂ©gociant, membre de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Valognes.— District de Coulances BontĂ©, conseiller au prĂ©sidial, membre du bureau intermĂ©- diaire ; Leforeslier de Mobccq, de Ver ; Desmarets de Monlchalon, lieutenant gĂ©nĂ©- ral du bailliage Alexandre, notable de Coutances ; Lel'ebvre Dubuisson, avocat Ă  Gavray ; Baudry, notaire Ă  Hambye ; Sadot, laboureur Ă  Savigny, membres de l'as- semblĂ©e du dĂ©partement de Coutances. — District de Morlain Lerebours de la PigeonniĂšre, avocat Ă  Saint-IĂŻilaire-du-IiarcouĂ©t, membre du bureau intermĂ©diaire ; Blanchet l'AumĂŽne, propriĂ©taire aux Biards ; BonnesƓur-BourginiĂšre, avocat Ă  CONDITION SOCIALE DES ÉLECTEURS DU SECOND DEGRE 461 grand nombre d'Ă©lecteurs furent choisis parmi les anciens syndics municipaux de 1787, parmi les maires, procureurs de la commune ou officiers des municipalitĂ©s nouvelles. On en Ă©lut un plus grand nombre encore parmi les citoyens qui avaient pris une part active Ă  la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux, soit comme dĂ©putĂ©s des assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages secondaires aux assemblĂ©es dĂ©finitives de Gaen et de Coutances iD, soit comme dĂ©putĂ©s de leurs paroisses Ă  ces assemblĂ©es prĂ©liminaires ,2. Tous avaient dit leur mot sur les affaires du temps, contribuĂ© Ă  la rĂ©daction des cahiers, Ă©mis des vƓux de rĂ©formes ; tous Ă©taient attachĂ©s Ă  la RĂ©volution et plus d'un dĂ©sirait en voir accĂ©lĂ©rer la marche. Au point de vue social, les distinctions d'ordre avaient disparu ; les votes ne se rĂ©partirent plus entre clergĂ©, noblesse et Tiers Ă©tat selon une proportion mathĂ©matiquement Ă©tablie ; tous les citoyens Ă©ligibles furent confondus dans une masse unique, abstraction faite de leur condition. Ce fut le Tiers Ă©tat qui y gagna. TrĂšs peu d'anciens nobles furent Ă©lus, une douzaine au plus sur douze cents ; les ecclĂ©siastiques, un peu moins rares, n'atteignirent pas la quarantaine ; les avocats, les magistrats et les hommes de loi formĂšrent un groupe un peu plus compact de cent quarante-six unitĂ©s ; quant au commerce et Ă  l'agriculture, on ne les voit reprĂ©sentĂ©s que par des chiffres insignifiants, vingt-trois nĂ©gociants et marchands et trente-huit laboureurs. Pure apparence sur les 886 Ă©lecteurs compris dans le ressort de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen dont les listes officielles, dressĂ©es par les commissaires du roi, n'accompagnent les noms d'aucune Barenton ; Homo dos VallĂ©es, papetier Ă  Vengeons Leroux de Launey, propriĂ©taire au Grand-Ccllant, membres de l'assemblĂ©e du dĂ©partement de Mortain. — District . Dans une instruction prĂ©alable envoyĂ©e Ă  tous les Ă©lecteurs, ceux-ci avaient cru prudent, en leur retraçant la procĂ©dure Ă©lectorale, de leur donner de sages conseils. Les Ă©lecteurs, disaient -ils, Ă©carteront avec soin les vues intĂ©ressĂ©es, les suggestions perfides ; ils mĂ©priseront et dĂ©concerteront les cabales et les intrigues ; c'est l'homme propre Ă  la chose qu'ils chercheront. . . Mais c'est surtout l'homme sage et vertueux, le citoyen honnĂȘte et modeste, qui, loin de sacrifier Ă  l'ambition, fuit les places et dĂ©daigne les honneurs qu'ils iront chercher dans sa retraite. Ils ne choisiront par prĂ©fĂ©rence aucun citoyen, comme ils ne donneront l'exclusion Ă  aucun, par la seule raison de la 1 Listes des Ă©lecteurs de ces trois dĂ©partements envoyĂ©es par les commissaires du roi Ă  Saint-Pricst. Arch. nat., FlcUl, Calvados 1, Manche 1, Orne 1. Les Ă©tats d'imposition des Ă©l-celeUrs de Caen et Vire Arch. dĂ©p., Calvados, C 7816-80X9. les procĂšs-verhaux des assemblĂ©es prĂ©liminaires des bailliages, et surtout ceux des assemhlĂ©es paroissiales des bailliages de Caen Greffe de le Cour d'appel de Caen, Vire Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie B non inventoriĂ©e;, Coutances, Moi tain, Avranches Greffe du Tribunal de Coutances, de Torigni et de Valognes Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie B non inventoriĂ©e, m'ont permis de restreindre assez notablement la liste des Ă©lecteurs sans profession. 2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement du Calvados. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. — Cf. Arch. nat., Ficlll, Calvados 1, trois exem- plaires de ce procĂšs-verbal, adressĂ©s l'un par les commissaires du roi au ComitĂ© de constitution le 2 juillet, les deux autres par Bayeux, procureur gĂ©nĂ©ral syndic, Ă  Necker et Saint-Priest, le 16 juillet 1790. 3 Discours de MM. les Commissaires du rĂŽipOOT l'ouverture de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement du Calvados. Caen, Leroy, 21 p. Ibid., F ' 111, Calvados 1. ÉLECTION DES ADMINISTRATEURS DU CALVADOS 463 classe oĂč il est placĂ©, du rang qu'il occupe ou de l'Ă©tat qu'il a embrassĂ©. C'est le plus digne qu'ils choisiront » W. Le chiffre lĂ©gal de l'assemblĂ©e Ă©tait de 594 Ă©lecteurs ; elle ne l'atteignit jamais. Forte de 499 membres au dĂ©but, elle comprit 535 membres le 15 juin ; la lassitude des Ă©lecteurs, que les travaux de la saison rappelaient pour la plupart Ă  leurs champs, rĂ©duisit vite ce nombre il descendit Ă  440 le 19 juin, Ă  378 le 21, Ă  369 le 24. Les trois premiers jours furent absorbĂ©s par l'accomplisse- ment des formalitĂ©s rĂ©glementaires vĂ©rification des pouvoirs, qui fut quelque peu orageuse, et nomination du bureau. L'assem- blĂ©e Ă©lut pour prĂ©sident le 13 juin, Ă  la pluralitĂ© absolue des suffrages, par 251 voix sur 490 votants, Brouard de Clermont, ancien lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage de Vire. C'Ă©tait un magis- trat gĂ©nĂ©ralement estimĂ© et dont le choix parut de bon augure pour la suite des opĂ©rations » C2. Lacroix-Saint-Michel, maire de Honfleur, fut nommĂ© secrĂ©taire dans les mĂȘmes formes. Tous deux prĂȘtĂšrent le serment civique et reçurent le serment collectif de l'assemblĂ©e. L'Ă©lection des trois scrutateurs mit fin aux prĂ©li- minaires. Le 15 juin commença l'Ă©lection des trente-six administrateurs. D'aprĂšs la loi, chacun des six districts devait compter au moins deux reprĂ©sentants ; on convint d'une rĂ©partition plus Ă©quitable, en leur attribuant Ă  chacun six membres. La partie occidentale du Calvados, dĂ©membrĂ©e de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen et composĂ©e des trois districts de Caen, Bayeux et Vire, fournit donc dix-huit administrateurs. Les six reprĂ©sentants du district de Caen furent Ă©lus, LeliĂšvre, laboureur, maire de Creully, par 438 voix ; Gosset de la Rousserie, conseiller au bailliage de Caen, par 353, le 15 juin ; Lebidois, laboureur d'Ardennes, maire de Saint-Germain-la -Blanche-Herbe, par 270, et Robert, laboureur d'AmfrĂ©ville, par 131, les 18 et 19 juin ; Dobiche de Lamont, procureur du roi Ă  la Monnaie de Caen, par 217, HĂ©lie, laboureur de Mondeville, par 128 voix, les 21 et 22 juin. Pour le district de Bayeux, furent successivement Ă©lus le 16 juin, Renouard, laboureur, maire de Sermentot, par 502 voix, et Robert Milon, laboureur, maire de Crouay, par 299 ; le 19 juin, Maheust et Le Bret, tous deux avocats Ă  Bayeux, recueillirent le premier 324 suf- frages, le second 311 ; le 23 juin, les deux derniers Ă©lus du district 1 Instruction sur lu formation de l'AssemblĂ©e du dĂ©partement , l'Ă©lĂ©ment rural triompha avec Ă©clat, au grand dĂ©sespoir des officiers municipaux de la ville. Nous avons un district, Ă©crivirent-ils Ă  Wimpf en, mais bon Dieu, quel district ! Il faut que le ciel soit bien d'accord avec l'assemblĂ©e si la machine marche bien. Neuf personnes de la campagne, trois de la ville ; pour procureur syndic, notre procureur de la commune. M. Le Tellier, seul en Ă©tat de faire marcher la machine, a Ă©tĂ© repoussĂ©. La campagne a eu grande influence ; elle veut Ă©craser les villes. VoilĂ  son but elle en a tous les moyens ».3. MĂȘmes rĂ©sultats du scrutin dans l'assemblĂ©e Ă©lectorale de Vire, oĂč dix membres sur douze sont choisis parmi les citoyens de la campagne. Seuls, l'ancien maire de Vire, Michel Mauduit et le maire nouveau, Richard Castel, Ă©lu procureur syndic, reprĂ©sentĂšrent les intĂ©rĂȘts de cette ville au sein du conseil l*. L'assemblĂ©e de Vire fut trou- blĂ©e par un incident qui eut pu devenir tragique et qui dĂ©voila les sentiments de haine amassĂ©s au cƓur de certains partisans de l'ancien rĂ©gime contre les adeptes de la RĂ©volution. Le fils 1 ProcĂšs-verbal do l'assemblĂ©e Ă©lectorale du district de Caen, Arch. dĂ©p., Cal- vados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e; triple exemplaire, avec lettres d'envoi des commis- saires, Bayeux et Signard, Ă  Saint-Priest, Neckeret au garde des sceaux, 6 aoĂ»t 1790. Arch. nat., FlcIIl, Calvados 1. 2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du district de Bayeux, Arch. dĂ©p., Cal- vados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e, en triple exemplaire- Arch. nat., F1 c 111, Calvados 1. 31 Lettre des officiers municipaux Ă  Wimpfen, 13 juillet 1790. Arch. connu., Bayeux. Registre de correspondance. 4 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du district de Vire, Arch. dĂ©p., Calva- dos, sĂ©rie L non inventoriĂ©e; en double exemplaire adressĂ©s Ă  Necker et au garde des sceaux. Arch. nat., Flc 111, Calvados 1. l'assemblĂ©e Ă©lectorale de la manche 467 du marquis de PontĂ©coulant, Gustave Doulcet, le futur conven- tionnel dont le nom fut mĂȘlĂ© plus tard au procĂšs de Charlotte Corday, Ă©tait connu pour ses opinions libĂ©rales et sympathique au peuple. En 1789, le Tiers Ă©tat de sa petite paroisse l'avait envoyĂ© comme dĂ©putĂ© Ă  l'assemblĂ©e du bailliage de Vire, oĂč il avait prĂ©sentĂ© des vƓux dĂ©mocratiques » ; le 7 juillet 1790, il Ă©tait revenu Ă  Vire comme Ă©lecteur du canton de CondĂ©. Le chevalier de Campagnolles ayant voulu faire mention de sa qualitĂ© au procĂšs-verbal, Doulcet protesta avec Ă©nergie et rappela le dĂ©cret du 19 juin qui avait aboli les titres de noblesse. Cette attitude lui attira de vives haines parmi les gens de son ordre. Le 10 juillet, deux nobles des environs, Achard, seigneur de Saint-Manvieu et le fils du seigneur de Percy l'insultĂšrent dans la rue ; Achard le provoqua en duel. Le peuple s'ameuta pour le protĂ©ger et faillit faire un mauvais parti Ă  Achard ; il assiĂ©gea la maison du receveur des finances, Longueville, oĂč celui-ci s'Ă©tait rĂ©fugiĂ© et dont on ne le fit Ă©vader qu'Ă  grand peine. La munici- palitĂ© apaisa l'affaire assez difficilement et l'insulteur fut obligĂ© d'Ă©crire Ă  Doulcet une lettre d'excuses, oĂč il mettait son agression sur le compte d'une ivresse passagĂšre ]. L'assemblĂ©e Ă©lectorale de la Manche dura un peu moins long- temps que celle du Calvados. Sa premiĂšre sĂ©ance eut lieu le 14 juin, sa derniĂšre le 23 juin 3. D'abord rĂ©unie dans l'Ă©glise du sĂ©minaire, elle trouva le local trop Ă©troit pour ses 781 membres et se transporta Ă  la cathĂ©drale. La vĂ©rification des pouvoirs sou- leva quelques contestations. Les dĂ©putĂ©s Ă©lus par les cinq pa- roisses scissionnaires de la section de Ver prĂ©tendaient ĂȘtre admis Ă  l'assemblĂ©e. Les commissaires du roi, qui avaient annulĂ© les opĂ©rations et ordonnĂ© de nouvelles Ă©lections, les priĂšrent d'en attendre le rĂ©sultat 3. Les six nouveaux Ă©lecteurs de Ver se prĂ©sentĂšrent le 16 juin, porteurs du procĂšs-verbal de leur dĂ©pu- tation et prirent place dans l'AssemblĂ©e. DĂšs la veille, celle-ci avait nommĂ© comme prĂ©sident, Ă  la pluralitĂ© » absolue de 393 voix, TesniĂšre de BrĂ©mesnil, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage d'Avranches. MalgrĂ© sa grande jeunesse il n'avait pas encore 1 Arch. mit., D xxix 84. -2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale de la Manche en double exemplaire adressĂ© au ComitĂ© de constitution et Ă  Saint-Priest, avec lettres d'envoi de FrĂ©min de Beaumont, procureur gĂ©nĂ©ral syndic, du 19 juillet 1790. Ibid., F III, Manche 1. 3 Registre de la Commission royale, 15 juin 1790, fol. 13 14. Arch. dĂ©p., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 468 ÉLECTION DES ADMINISTRATEURS DE LA MANCHE trente ans, celui-ci l'avait emportĂ©, au second tour de scrutin, sur son collĂšgue de Coutances, Desmarets de Monchaton n. Tesson, avocat de Coutances, vit son titre de secrĂ©taire provisoire confirmĂ© Ă  titre dĂ©finitif par 420 suffrages ; le 17 juin, aprĂšs l'Ă©lection des trois scrutateurs, 407 Ă©lecteurs tĂ©moignĂšrent leur confiance Ă  l'un des commissaires du roi, FrĂ©min de Beaumont, en le dĂ©signant comme procureur gĂ©nĂ©ral syndic du dĂ©partement. Les formalitĂ©s prĂ©liminaires avaient pris trois jours entiers ; restait Ă  Ă©lire les trente-six membres du Conseil de dĂ©partement. L'assemblĂ©e rĂ©solut de procĂ©der d'abord Ă  la nomination des sept premiers un pour chaque district au scrutin de liste double et Ă  la pluralitĂ© absolue. Les sept administrateurs dĂ©signĂ©s par les suffrages des 740 Ă©lecteurs rĂ©unis obtinrent un nombre de voix qui varia entre 712 et 691 voix, Ă  savoir Tesson, avocat de Cou- tances, 712 voix ; TesniĂšre de BrĂ©mesnil, maire d'Avranches, 711 ; Le Rebours de la PigeonniĂšre, avocat du district de Mortain, 704 ; Vastel, avocat de Cherbourg, 702 ; Bernard, avocat du roi Ă  Saint-LĂŽ et un des trois commissaires du dĂ©partement, 700 ; Gilles le Chanoine, laboureur de Varenguebec, au district de Carentan, 692, et Deslongchamps-DesprĂ©s, lieutenant de la maĂźtrise des eaux et forĂȘts de Valognes, 691. En raison de la lenteur du scrutin et du dĂ©pouillement il avait fallu deux jours pleins pour Ă©lire sept conseillers ; une procĂ©dure si compliquĂ©e ne pouvait que lasser les Ă©lecteurs. Le 18 juin, l'assemblĂ©e Ă©lectorale avait dĂ» s'ajourner Ă  cause de son insuffi- sance numĂ©rique. Forte de 723 votants au 15 juin, elle Ă©tait descendue Ă  712 le 20, Ă  696 le 21, Ă  665 le 22 on la voyait fondre peu Ă  peu. La majoritĂ© des Ă©lecteurs fit valoir l'urgence des travaux de la campagne et menaça de se retirer si les choses traĂźnaient en longueur. On convint d'adopter une mĂ©thode plus expĂ©ditive, qui permĂźt de les libĂ©rer au plus vite. L'assemblĂ©e se divisa, le 20 juin, en sept bureaux, composĂ©s d'Ă©lecteurs pris proportionnellement dans chaque district ; chacun d'eux devait former une assemblĂ©e partielle, avec son prĂ©sident, son secrĂ©taire et ses scrutateurs et procĂ©der sĂ©parĂ©ment Ă  la nomination de 1 Renseignements relatifs Ă  BrĂ©mesnil, fournis Ă  l'intendant par MeslĂ©, su b dĂ©lĂ©- guĂ© d'Avranches en 1787. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 6343. AgĂ© de 25 Ă  26 ans, beau- coup d'esprit, parle bien, annonce des vues de bonne administration, prend la qua- litĂ© d'Ă©cuyer, fondĂ©e sur ce que son pĂšre a achetĂ©, il y a environ trois ans, une charge de secrĂ©taire du roi ; peut-ĂȘtre dĂ©daignerait-il de figurer dans le Tiers Ă©tat. » BrĂ©mesnil fit allusion Ă  sa jeunesse dans les deux discours qu'il prononça, aprĂšs son Ă©lectron et pour la clĂŽture de l'assemblĂ©e. RÈGLEMENT DU DEBAT SUR LE CHEF-LIEU 469 vingt-huit administrateurs par un scrutin de liste double. Qua- torze commissaires, Ă©lus Ă  raison de deux par chaque bureau, se joindraient Ă  leurs collĂšgues pour opĂ©rer le dĂ©pouillement collectif des scrutins. Quant au trente-sixiĂšme administrateur, on procĂ©derait Ă  sa dĂ©signation isolĂ©ment, mais dans les mĂȘmes formes. Le premier scrutin, de 696 suffrages, donna la majoritĂ© absolue aux vingt-huit membres ; le premier Ă©lu recueillit 612 voix, le dernier 580. Ce furent, dans un ordre de popularitĂ© dĂ©croissante Langlois, vicomte de Barfleur, 612 voix ; Buhot, laboureur, maire des Pieux et Brostin-Desfontaines, de Montai- gu, 611 ; Jean-François Duval-LariviĂšre, laboureur de GrĂ©ville, 609 ; Dulongprey-Cabart, du Vicel, 608 ; Euvremer, avocat de PĂ©riers, 607 ; La Houguette-LemaĂźtre, laboureur de Clitourps, La Roque-Laloi, herbager de Saint-Marcouf et Dubost-Dulong- prey, laboureur de Saint-Martin-le-HĂ©bert, 606 ; BonnesƓur- BourginiĂšre, avocat Ă  Barenton et Dubreuil, maire de Heugue- ville, 604 ; Michel Ernouf, maire de Saint-Germain-sur-E, et Joseph Lafosse, herbager de Saint-CĂŽme, 600 ; Lemaignen, maire de Carentan et Pouret-Longueval, laboureur de Geffosses, 599 ; Duhamel, avocat et maire de Mortain et Regnault, avocat de Saint-Michel-la-Pierre, 598 ; Heudeline, avocat Ă  Torigni, 597 ; de BrĂ©cey de la VallĂ©e, avocat Ă  Saint-Jores et Ernoul-Deslandes, avocat de Vengeons, 596 ; Poisson de Coudreville, avocat Ă  Saint-LĂŽ, ancien procureur du roi au bailliage d'Alençon, 595 ; Loquet, maire de la Lande d'Airou, 592 ; Hubert-Dumanoir, de Saint-Gilles, 589 ; Le_ Gorju, laboureur de Saint -Vigor-des- Monts, 588 ; Loisel, avocat Ă  Saint- James, 587 ; Le Mengnonnet fils, nĂ©gociant de Granville, 584, et JuhĂ©, avocat de Mortain, 580. Ce fut Ă©galement au premier scrutin que fut Ă©lu, par 435 suffrages, le trente-sixiĂšme administrateur du dĂ©partement, Regnault de Bretel, de la Haye-du-Puits. L'assemblĂ©e administrative de la Manche, avant de se sĂ©parer, avait Ă  rĂ©gler la question de son siĂšge. C'Ă©tait aux Ă©lecteurs que le dĂ©cret du 16 fĂ©vrier 1789 avait laissĂ© le soin de dĂ©libĂ©rer si l'assemblĂ©e de dĂ©partement devait alterner ou si Coutances devait dĂ©finitivement en demeurer le chef-lieu ». Dans la matinĂ©e du 22 juin, plusieurs orateurs se succĂ©dĂšrent Ă  la tribune pour y discuter les avantages et les inconvĂ©nients des deux solutions ; le vote qui suivit donna 440 voix aux partisans de Coutances contre 225 aux dĂ©fenseurs de l'alternat. Coutances fut proclamĂ© chef -lieu permanent du dĂ©partement. La composition du nouveau Conseil de dĂ©partement attestait 170 CONDITION SOCIALE DES ADMINISTRATEURS ÉLUS en mĂȘme temps qu'une rĂ©partition Ă©quitable de ses membres entre les sept districts, une prĂ©pondĂ©rance assez marquĂ©e dĂ© l'Ă©lĂ©ment rural sur l'Ă©lĂ©ment urbain. Onze avocats, six magistrats, neuf laboureurs, un nĂ©gociant et neuf membres sans profession indiquĂ©e, mais domiciliĂ©s dans les bourgs et villages et probable- ment propriĂ©taires ruraux, tels furent les trente-six administra- teurs chargĂ©s des intĂ©rĂȘts du dĂ©partement. Douze d'entre eux reprĂ©sentaient la ville, oĂč ils exerçaient pour la plupart des fonctions de l'ordre judiciaire ; vingt et un Ă©taient domiciliĂ©s Ă  la campagne ; trois enfin, citadins d'origine Ă  coup sĂ»r, Ă©taient des Ă©lecteurs issus des suffrages d'assemblĂ©es primaires rurales. L'assemblĂ©e Ă©lectorale avait fait preuve dans ses choix du patriotisme le plus pur et de la sagesse la plus Ă©clairĂ©e ». Ses membres avaient franchement rĂ©pudiĂ© les principes de l'ancien rĂ©gime. Lorsque le comte Leforestier de Mobecq et de PĂ©ronne, seigneur de Lengronne, vinrent exprimer Ă  leurs collĂšgues leur Ă©tonnement de se voir qualifiĂ©s de nobles sur le procĂšs-verbal et leur ambition de n'ĂȘtre appelĂ©s que citoyens, ils furent vigou- reusement applaudis. Cette assemblĂ©e d'hommes libres qui, au dire des commissaires, avait montrĂ© les rapides progrĂšs accom- plis en France par l'esprit public » eut Ă  cƓur de nommer des dĂ©fenseurs d'une libertĂ© sage et bien ordonnĂ©e », des amis d'une Constitution qui, marchant d'un pas majestueux et tranquille, parviendrait au terme dĂ©sirĂ© de son accomplissement ». Sans se montrer systĂ©matiquement hostile aux anciennes administra- tions provinciales, puisqu'elle leur emprunta neuf membres de l'administration nouvelle, elle entendit prouver par ses choix son attachement au nouveau rĂ©gime ; sept de ses Ă©lus devaient figurer dans les futures assemblĂ©es rĂ©volutionnaires. A peine constituĂ©e, son premier acte avait Ă©tĂ© une adhĂ©sion unanime aux dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale et dans une de ses derniĂšres sĂ©ances elle vota l'achat d'un portrait de Louis XVI, restaura- teur de la libertĂ© » ; elle associait donc dans ses vƓux le culte de la monarchie Ă  l'amour de la RĂ©volution. Les assemblĂ©es Ă©lectorales de chacun des sept districts de la Manche suivirent de prĂšs celle du dĂ©partement l. Elles se rĂ©u- nirent successivement Ă  Coutances, le 24 juin, dans l'Ă©glise des Capucins ; Ă  Saint-LĂŽ, le 26 juin, dans l'abbaye Sainte-Croix ; Ă  1 ProcĂšs- verbaux des assemblĂ©es Ă©lectorales des sept districts copies conformes rĂ©taires; celui de Carentan en double expĂ©dition. F1'" IIT, Manche 1. LES ASSEMBLÉES ÉLECTORALES DES DISTRICTS DE LA MANCHE 471 Avranches, le 28 juin, dans l'Ă©glise des Capucins ; Ă  Mortain, le 1er juillet, dans l'auditoire du bailliage ; Ă  Cherbourg, le 2 juil- let, dans la salle d'audience de la juridiction ; Ă  Valognes, le 6 juillet, dans l'Ă©glise des Capucins. La derniĂšre de toutes, celle de Carentan, avait Ă©tĂ© ajournĂ©e au 7 juillet, pour permettre au ComitĂ© de constitution de statuer sur une demande dont l'avaient saisi, le 18 juin, les Ă©lecteurs du canton de la Haye-du-Puits, qui dĂ©siraient voir fixer dans leur petite ville le chef-lieu du district *. Elle se tint, comme l'avaient ordonnĂ© les commissaires, dans l'abbaye de Carentan et ne fut point exempte de troubles. Les Ă©lecteurs y agitĂšrent la question du chef-lieu et la rĂ©solurent, par 45 voix contre 44, en faveur de Carentan, au dĂ©sespoir des gens de PĂ©riers, dont le reprĂ©sentant, l'avocat Vaultier, Ă©lu admi- nistrateur, menaça de donner sa dĂ©mission 2, et des gens de la Haye-du-Puits qui envoyĂšrent aussitĂŽt une dĂ©putation extra- ordinaire pour protester contre la dĂ©libĂ©ration illĂ©gale de l'assem- blĂ©e 3. Les six autres assemblĂ©es, trĂšs calmes, s'Ă©taient bornĂ©es Ă  nommer les membres des conseils. L'esprit qui guida les suf- frages des Ă©lecteurs des districts Ă©tait celui qui les avait inspirĂ©s Ă  l'assemblĂ©e du dĂ©partement. Parmi les quatre-vingt-quatre administrateurs Ă©lus dans les sept districts ne figurent que peu de nobles 4, deux ecclĂ©siastiques seulement 5, une quarantaine de magistrats, hommes de loi, avocats, notaires 6 ; le reste, t Registre de la Commission royale, fol. 16. Areh. dĂ©p., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 2 Registre de la Commission royale. Ibid. 3 RequĂȘte des citoyens de La Haye-du-Puits Ă  l'AssemblĂ©e nationale, 18 juillet 17!M. MĂ©moire de Roger le Boiteux et Hotot, dĂ©putĂ©s de cette commune, pour ĂȘtre prĂ©sentĂ© Ă  l'AssemblĂ©e nationale quand ils pourront avoir l'avantage d'y ĂȘtre admis », 25 juillet 1790. Arch. nal., D iv 9. 4 Noble* Desmarets de Montcbaton, Dufouc de Maisoncelles district de Cou- tances ; Cassel de la Chaise d. de Mortain. 5 EcclĂ©siastiques Roulin, curĂ© de Moidrey, et Lechevalier, vicaire de Saint-Lau- rent- de-Terregate d. d'Avranches. G Magistrats TesniĂšre de BrĂ©mesnil, lieutenant gĂ©nĂ©ral du bailliage d. d'Avran- ches ; Quenault de la GrondiĂšre, prĂ©sident de l'Ă©lection, Yver de la Rruchollerie, avocat gĂ©nĂ©ral Ă  la Cour des comptes de Rouen d. de Carentan Duhamel, lieute- nant gĂ©nĂ©ral de police, Boni/'-, conseiller au bailliage d. de Coutances ; Michel de PrĂ©fossĂ©, lieutenant civil et criminel de la haute justice d. de Cherbourg ; de Lau- briĂšre, conseiller au Parlement de Rouen, VĂ©zard et Pallix-Deschamps, conseillers au bailliage d. de Mortain; Courtin de la BrĂ©audiĂšre, conseiller Ă  l'Ă©lection, et Denier- Desfresnes, lieutenant criminel du bailliage d. de Saint-LĂŽ ; Bauduin, con- seiller au Conseil supĂ©rieur de Corse. — Avocats Auvray. Giroult, Molel, Pinel d. d'Avranches ; Caillemer, EuvreraĂ«r, Vaultier d. de Carentan Avoyne, llirard, Vastel d. de Cherbourg ; Joly, Lecoq, LefĂšvre, Pignard d. de Coutances ; Blon- del, Clouard, Gautier, Gesbert, James, des Yvets d. de Mortain ; Beaufils, Bour- 472 l'assemblĂ©e Ă©lectorale de l'orne et du district de domfront c'est-Ă -dire la grande majoritĂ©, Ă©tait formĂ© de propriĂ©taires ruraux et de laboureurs. A cĂŽtĂ© de personnages dĂ©jĂ  mis en vue par leurs anciennes fonctions, comme Duhamel Ă  Coutances, Courtin Ă  Saint-LĂŽ, DumĂ©ril, mĂ©decin Ă  Valognes, etc . . . , beau- coup de noms encore inconnus. LĂ  encore, la campagne Ă©tait, pour les conseils, une pĂ©piniĂšre d'hommes nouveaux. L'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement de l'Orne se rĂ©unit Ă  l'Ă©glise Notre-Dame d'Alençon le 30 juin 1790 ; ses sĂ©ances se prolongĂšrent jusqu'au 7 juillet. Sur les 607 Ă©lecteurs dont elle se composait, cinquante-huit seulement reprĂ©sentaient la portion de territoire empruntĂ©e Ă  l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© ; c'Ă©tait ceux des cantons de Fiers, Athis et Tinchebrai. L'un d'entre eux, Lesueur, avocat de Tinchebrai, fut choisi comme administrateur du dĂ©par- tement i1. Les mĂȘmes Ă©lecteurs se retrouvĂšrent Ă  Domfront, le 16 juillet, pour former l'assemblĂ©e Ă©lectorale , du district, chargĂ©e d'en nommer les douze administrateurs. Quatre de ceux-ci appartenaient au ressort des anciens districts de Mortain et de Vire ; ce furent Graindorge des Domaines, avocat de Fiers, Lefebvre-Dufau, d'Athis, Lasne de Beaulieu, docteur en mĂ©decine de Tinchebrai et Signard, maire de Notre-Dame-des- Moutiers 2. Les fonctions des commissaires du roi, d'aprĂšs le dĂ©cret du 29 mars, devaient cesser le jour de la clĂŽture du dernier procĂšs- verbal d'Ă©lection. L'assemblĂ©e du district de Carentan ayant terminĂ© ses opĂ©rations le 9 juillet, les commissaires de la Manche arrĂȘtĂšrent les leurs le 10 3. Dans le Calvados, ce fut l'assemblĂ©e du district de Caen qui fut la derniĂšre close, le 13 juillet ; ce soir mĂȘme, les commissaires du roi rĂ©digĂšrent leur dernier procĂšs- verbal et apposĂšrent pour la derniĂšre fois leur signature sur le registre de la Commission, qu'ils avaient ouvert le 29 mars. Ils avaient cru devoir, prĂ©caution bien inutile, convoquer par don, Havin, Heudeline, Lescot de la Bigne, Letellier-Duhutrel d. de Saint-LĂŽ ; BitauzĂ©-Daumesnil, Desiles-BoUin et Mauger d. de Valognes. — Notaires Boivin, Planchon d. de Coutances ; Vigot d. de Valognes. 1 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du dĂ©partement de l'Orne. Arch. dĂ©p., Orne, L391. 2 ProcĂšs-verbal de l'assemblĂ©e Ă©lectorale du district de Domfront. Ibid., L 396. 3 Registre de la commission royale. Ce registre n'a Ă©tĂ© clos que le 2 octobre. Ibid., Mancbe, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. Le dernier document qui y figure est l'Ă©tat des dĂ©penses de la commission, s'Ă©levant Ă  3,087 livres 13 sols ; les trois commis- saires sollicitent, en outre, pour leurs frais personnels, une indemnitĂ© de 1,100 livres par tĂȘte, soit 3,300 livres, ÉLECTION DES DIRECTOIRES DES TROIS DEPARTEMENTS 473 ordonnances spĂ©ciales le Conseil de dĂ©partement pour le 13 juillet, celui du district de Caen pour le 15, ceux des autres districts pour le 19, en vue de la vĂ©rification de leurs pouvoirs et de l'Ă©lection de leurs Directoires 0 '. Le Directoire du Calvados fut en grande partie Ă©lu dans la journĂ©e du 13 juillet et complĂ©tĂ© le matin du 14 '2\ L'assemblĂ©e suivit les conseils de son procureur gĂ©nĂ©ral syndic, qui lui recom- manda de choisir des hommes dĂ©jĂ  douĂ©s de connaissances administratives et rompus aux affaires » elle nomma Dobiche de Lomont, Maheiist, RiviĂšre, avocat d'Orbec, Vardon Saint- Lambert, notable de Falaise, Jouenne, avocat de CondĂ©-sur- Noireau, Lacroix-Saint-Michel, maire de Honfleur, Renouard et Richer, laboureurs. Tous les districts du dĂ©partement Ă©taient reprĂ©sentĂ©s, ceux de Bayeux et de Vire par un membre, celui de Caen par deux. Le Directoire de la Manche ne fut constituĂ© que le 20 juillet 3. Il comprit des avocats en grande majoritĂ©, Euvremer, de Caren- tan ; Tesson, de Coutances ; Heudeline, de Torigni ; Loisel, de Saint-James ; Errioul Deslandes, de Vengeons ; JuhĂ© du district de Mortain ; un magistrat, DesprĂ©s, du district de Valognes ; un laboureur du district de Cherbourg, Duval la RiviĂšre. Quant au Directoire de l'Orne, formĂ© le 23 juillet, il compta parmi ses huit membres Lesueur, avocat de Tinchebrai, qui fut Ă©lu au second rang, Ă  la majoritĂ© absolue des suffrages >4. De l'Ă©tude de ce mouvement Ă©lectoral de 1790, se dĂ©gage une conclusion Ă©clatante l'accroissement graduel de l'influence acquise par les magistrats et hommes de loi Ă  chaque Ă©tape d'un suffrage de plus en plus restreint et leur triomphe dĂ©finitif. Ils n'Ă©taient qu'une poignĂ©e d'individus dans l'immense armĂ©e des cent dix mille citoyens actifs de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen ; ils ne formaient encore qu'une fraction peu importante, un hui- tiĂšme environ, dans l'ensemble des huit cent quatre-vingt-six Ă©lecteurs rĂ©unis dans ce mĂȘme cadre Ă©lectoral. Ils avaient gagnĂ© du terrain dans les assemblĂ©es administratives de dĂ©partement 1 Registre des procĂšs-verbaux des commissaires du roi, 7 et 11 juillet 1790. Arch. dĂšp., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 2 ProcĂšs-verbal de la premiĂšre session du Conseil gĂ©nĂ©ral de l'administration du dĂ©partement du Calvados. Ibid., L 599. ^3 ProcĂšs-verbal de la premiĂšre session du Conseil gĂ©nĂ©ral de la Manche. Ibid., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 4 ProcĂšs-verbal d'Ă©lection du Directoire de l'Orne. Ibid., Orne, L 392. 474 PRÉPONDÉRANCE DES HOMMES DE LOI et de district dans le Calvados, ils constituaient le tiers du Conseil gĂ©nĂ©ral ; dans la Manche ils en formaient la moitiĂ©. Ils entraient aussi pour la moitiĂ©, parfois pour les deux tiers, dans la composition de maint conseil de district. Ce fut surtout dans la formation des Directoires qu'ils l'emportĂšrent. Tandis que, sous le rĂ©gime de l'Ă©dit de 1787, les magistrats et avocats, mĂȘlĂ©s le plus souvent aux propriĂ©taires ruraux dans la reprĂ©sentation du Tiers Ă©tat, ne pouvaient jamais former qu'une minoritĂ© au sein de la commission et des bureaux intermĂ©diaires, rigoureuse- ment composĂ©s par moitiĂ© d'ecclĂ©siastiques et de nobles, ils figu- rĂšrent en trĂšs grande majoritĂ© dans les Directoires nouvellement Ă©lus. Six membres sur huit dans le Directoire du Calvados, sept sur huit dans celui de la Manche appartenaient au tribunal ou au barreau. Dans les Directoires de districts, la proportion n'Ă©tait pas sensiblement diffĂ©rente th. Quant aux procureurs-syndics qui, placĂ©s auprĂšs des Directoires comme agents d'initiative et d'exĂ©cution, allaient ĂȘtre la cheville ouvriĂšre de l'administration nouvelle, eux aussi avaient Ă©tĂ©, presque tous, choisis dans l'Ă©lite du Tiers Ă©tat judiciaire. Si l'on excepte Castel, le procureur- syndic de Vire, qui de directeur de la poste aux lettres devint inspecteur gĂ©nĂ©ral de l'UniversitĂ©, tous les autres syndics, Costy Ă  Caen, Delauney Ă  Bayeux, Dufour de Maisoncelles Ă  Coutances, du Hutrel Ă  Saint-LĂŽ, Caillemer Ă  Carentan, Mauger Ă  Valognes, Avoine Ă  Cherbourg, Auvray Ă  Avranches, Ă©taient des avocats ; Pallix-Deschamps, Ă  Mortain, Ă©tait conseiller honoraire au bailliage. Des trois procureurs syndics gĂ©nĂ©raux de la Manche, du Calvados et de l'Orne, deux, Bayeux et Lepelletier du Coudray, appartenaient Ă  la robe ; FrĂ©min de Beaumont lui-mĂȘme, bien que de condition noble et secrĂ©taire de son ordre Ă  l'assemblĂ©e de Coutances, n'Ă©tait-il pas avocat au Parlement, ancien prĂ©si- dent du Conseil supĂ©rieur de Bayeux et n'avait-il pas Ă©tĂ© rangĂ© dans le Tiers Ă©tat en 1787, lors de la formation de l'AssemblĂ©e provinciale? 1 Hommes de loi figurant parmi les membres des Directoires des districts Calvados A Caen, un avocat et un professeur de droit Ă  l'UniversitĂ© ; — Ă  Bayeux, un procureur du roi et un conseiller au bailliage, deux avocats; — Ă  Vire, un con- seiller au bailliage, un avocat — Manche ; Ă  Avrancbes, trois avocats; — Ă  Caren- tan, un prĂ©sident d'Ă©lection, deux avocats ; — Ă  Cherbourg, cinq avocats ; — Ă  Cou- tances. un lieutenant gĂ©nĂ©ral de police, un conseiller au bailliage et trois avocats ; — Ă  Mortain, un conseiller au bailliage, deux avocats ; — Ă  Saint-LĂŽ, un lieutenant criminel et un conseiller au bailliage, quatre avocats ; — Ă  Valognes, un conseiller honoraire du Conseil supĂ©rieur de Corse, et trois avocats. CESSATION DES POUVOIRS DE L INTENDANT 475 Ainsi, dans la Basse-Normandie, la fusion des ordres profita surtout au Tiers Ă©tat Ă©clairĂ©, Ă  la bourgeoisie des villes ; une sĂ©rie de sĂ©lections successives lui assurant la prĂ©pondĂ©rance dĂ©finitive sur l'Ă©lĂ©ment rural, fit de cet Ă©tat-major bourgeois le personnel dirigeant des dĂ©partements et de leurs districts pendant les pre- miĂšres annĂ©es" de la RĂ©volution, L'erttrĂ©e en activitĂ© des Directoires de dĂ©partements et de districts marquait le terme de l'existence lĂ©gale de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Intendant et subdĂ©lĂ©guĂ©s, Commission et bureaux intermĂ©diaires virent leurs fonctions cesser presque a la mĂȘme date. DĂšs le 20 juin 1790, l'archevĂȘque de Bordeaux Ă©crivait Ă  Cordier de Launay La mission que vous tenez du roi doit finir au moment oĂč les assemblĂ©es de dĂ©partement seront en acti- vitĂ© » *. Ce fut les 14, 20 et 23 juillet que les trois Directoires du Calvados, de la Manche et de l'Orne commencĂšrent successive- ment leurs opĂ©rations. Les pouvoirs de l'intendant durĂšrent quel- ques jours de plus. Le 1er aoĂ»t, il recevait du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral de nouvelles instructions sur la remise au Directoire du Calvados des papiers de son administration. Lambert ajoutait A partir du moment oĂč la prĂ©sente lettre vous parviendra, toute la portion de territoire qui entre dans la composition du dĂ©parte- ment du Calvados cessera de vous appartenir et vous n'aurez plus d'autoritĂ© et de pouvoirs que sur le surplus de l'ancienne consistance de la province. Il en sera ainsi, successivement, de tous les autres dĂ©partements qui se partagent l'ancienne division d'administration qui Ă©tait confiĂ©e Ă  vos soins, Ă  mesure que je vous ferai passer les ordres du roi Ă  ce sujet » 2. Le mĂȘme jour, Lambert adressait Ă  Cordier de Launay des instructions analogues pour la Manche, et le 4 aoĂ»t pour l'Orne. Chacune de ces mesures diminuait les pouvoirs de l'intendant ; la troisiĂšme, exĂ©cutĂ©e le 6 aoĂ»t, les anĂ©antit totalement. La derniĂšre lettre officielle de Cordier de Launay, datĂ©e de ce jour, fut un acte de gĂ©nĂ©rositĂ© elle recommandait au ministre les employĂ©s de ses bureaux, que la nouvelle organisation laissait sans emploi et sans ressources s. Sa suppression ne fut pas plus remarquĂ©e que ne 1 Arch. dĂ©p., Calvados, C 6334. 2 Ibid., C 6334. 3 Ibid. Le 31 dĂ©cembre 1789, les employĂ©s de l'intendance de Caen, alarmĂ©s par le dĂ©cret dn 10 dĂ©cembre, qui rĂ©duisait Ă  nĂ©ant leurs moyens d'existence, avaient adressĂ©, au nombre de sept, une requĂȘte Ă  l'AssemblĂ©e nationale, en vue d'obtenir des places dans la nouvelle formation administrative ». Arch. nat., Dvi 24, 1. 317. 476 CESSATION DES POUVOIRS DE LA COMMISSION INTERMEDIAIRE l'avait Ă©tĂ© son dĂ©part de Caen un an plus tĂŽt. Il vivait Ă  Paris, sans influence et sans crĂ©dit, entretenant peu de relations avec les membres de l'AssemblĂ©e nationale et n'en ayant aucune avec ces messieurs qui tiennent le gouvernail ». Passif, il y avait attendu avec rĂ©signation qu'on lui signifiĂąt l'Ă©tat de nullitĂ© oĂč il allait rentrer » !^\ A son exemple, ceux de ses subdĂ©lĂ©guĂ©s que le dĂ©couragement ou la crainte 2> n'avaient pas encore enlevĂ©s Ă  leurs fonctions durent en cesser l'exercice. La Commission intermĂ©diaire provinciale reçut aussi du contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral, Ă  la date du 1er aoĂ»t, l'ordre de se sĂ©parer; mais les compliments dont cet ordre Ă©tait accompagnĂ© Ă©taient plus dĂ©licats que le tĂ©moignage de satisfaction » un peu bref dĂ©cernĂ© Ă  l'intendant 3. Le 4 aoĂ»t fut le dernier jour de son administration ; elle en informa les neuf bureaux intermĂ©diaires en les invitant Ă  cesser aussitĂŽt leurs fonctions ; le bureau de Caen tint sa derniĂšre sĂ©ance le 6 aoĂ»t *> ; celui de Bayeux, le 7 aoĂ»t 5 ; celui d'Avranches, le 14 aoĂ»t l6K Seuls dĂ©positaires du pouvoir exĂ©cutif, les Directoires n'avaient point encore en mains tous les instruments indispensables Ă  son exercice. Pour continuer l'Ɠuvre des anciennes administrations, ils avaient besoin des nombreuses piĂšces conservĂ©es dans les bureaux de celles-ci. Tous ces documents, qui constituaient les deux fonds de l'Intendance et de la Commission intermĂ©diaire provinciale, Ă©taient dĂ©jĂ  classĂ©s par les soins du premier secrĂ©- taire de l'intendant ou du secrĂ©taire archiviste de l'AssemblĂ©e provinciale. Restait Ă  en dresser l'inventaire et Ă  en former trois lots, pour les remettre aux secrĂ©tariats des trois dĂ©partements qu'ils concernaient. Le ministre de la province, Saint-Priest, et le contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral avaient envoyĂ© des instructions prĂ©cises Ă  ce sujet /;. Les subdĂ©lĂ©guĂ©s et les membres des bureaux inter- mĂ©diaires Ă©taient invitĂ©s Ă  procĂ©der de la mĂȘme façon vis-Ă -vis des districts. La remise de ces papiers se fit avec lenteur le manque de concordance prĂ©cise entre les anciennes et les nou- 1 Lettre de Cordier de Launay Ă  Morin, subdĂ©lĂ©guĂ© d'Avranches, 18 juin 1790. Arch. dĂ©p., Calvados. C 6331. 2 Tels Couraye Duparc et Garantot, subdĂ©lĂ©guĂ©s de Granville et de Cherbourg. 3 Arch. dĂ©p., Calvados. C 7627. 4 Ibid., C 7664bis. 5 Ibid., C 7655. 6 Ibid., Manche, s 'rie L non inventoriĂ©e. Registre du Conseil du district d'Avranches. 7; Ibid., Calvados, C6334. LIQUIDATION DES AFFAIRES COMMUNES AUX TROIS DEPARTEMENTS 477 velles circonscriptions, la nĂ©cessitĂ© d'un triage minutieux des multiples dossiers, et parfois aussi le peu d'empressement que certains administrateurs apportĂšrent Ă  cette opĂ©ration la contra- riĂšrent et en retardĂšrent l'achĂšvement l. Cet apport des fonds de l'Intendance et de la Commission intermĂ©diaire provinciale, augmentĂ© de l'envoi des piĂšces fournies par les commissaires du roi, forma le noyau primitif des Archives dĂ©partementales ; de mĂȘme, les archives des divers districts furent constituĂ©es, Ă  l'origine, par la rĂ©union des dossiers et des registres provenant des subdĂ©lĂ©gations et des bureaux intermĂ©diaires *2. Un des premiers objets de l'activitĂ© des administrations nou- velles fut la liquidation des affaires communes aux trois dĂ©parte- ments nĂ©s du dĂ©membrement de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen. Chacun d'eux Ă©tait intĂ©ressĂ©, au dĂ©but de son existence, Ă  connaĂźtre exactement les ressources et les dettes que le rĂ©gime prĂ©cĂ©dent lui lĂ©guait. Le dĂ©cret du 22 dĂ©cembre 1789 avait prĂ©vu ce travail de rĂ©partition et en confiait l'exĂ©cution Ă  une commission inter- dĂ©partementale, formĂ©e de deux commissaires Ă©lus par chaque assemblĂ©e administrative 3>. Ces commissaires liquidateurs devaient soumettre le procĂšs-verbal de leurs opĂ©rations Ă  d'autres commissaires vĂ©rificateurs, dĂ©signĂ©s par la mĂȘme voie 4. Ce fut une besogne assez compliquĂ©e et qui leur demanda plus de deux ans 5. Pour rĂ©partir dans une juste proportion le passif 1 Arch. rtĂ©p., Manche, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. Premier registre du Conseil de district de Mortain. Ce Conseil nomme un commissaire pour se transporter chez le subdĂ©lĂ©guĂ© et son greffier et s'y faire remettre les papiers de la subdĂ©lĂ©gation. 2 Sur la formation des archives dĂ©partementales du Calvados, voir Lebrethon, olw. citĂ©, p. 115-122. 3 Les commissaires-liquidateurs furent Le Bret et NoĂ«l Durocher pour le Cal- vados, BonnesƓur et Le Maignan pour la Manche ; ceux de l'Orne ne se prĂ©sen- tĂšrent pas, quoique convoquĂ©s » Ă  l'assemblĂ©e tenue Ă  Caen en mars 1791. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 4 Les commissaires vĂ©rificateurs furent Poisson, Euvremer et Vastel pour la Manche ; LempĂ©riĂšre, LefĂšvre-Cramoisy et Dubois Dubais pour le Calvados. 5 Extrait du registre des actes ou arrĂȘtĂ©s des commissaires des dĂ©partements de Calvados, Orne et Manche, entre lesquels les paroisses de la gĂ©nĂ©ralitĂ© sont parta- gĂ©es, 3-5 octobre, 23 octobre et 13 novembre 1790 Arch. dĂ©p., Orne, L 1022. — Liqui- dation des affaires communes de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ© examen du compte de la Commission intermĂ©diaire provinciale, 13 fĂ©vrier 1791 ; examen du compte des inten- dants, 1er mars 1791; procĂšs-verbal des commissaires vĂ©rificateurs, 1-6 juin 1793. Ibid., L 1023. — Tableau du partage entre ces trois dĂ©partements des diverses espĂšces de fonds confiĂ©s Ă  l'administration de l'assemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie, 6 mars 1791. Ibid., L 1024. — Les sĂ©ances de ces commissions se tinrent Ă  l'abbaye Saint-Etienne de Caen. Le procĂšs-verbal dĂ©finitif ne fut envoyĂ© par les administra- teurs du Calvados que le 10 janvier 1793 Ă  Roland, ministre de l'intĂ©rieur. Ibid., Cal- vados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 178 RÉPONSES Ă©VASIVES DES TROIS DERNIERS INTENDANTS et l'actif de chaque dĂ©partement, ils devaient au prĂ©alable Ă©tablir le bilan financier de l'ancienne gĂ©nĂ©ralitĂ©. La collabora- tion des anciens administrateurs leur Ă©tait indispensable pour cette opĂ©ration. De lĂ  vinrent les obstacles. Sans doute le pro- cureur-syndic provincial, Le Telier de Vauville, mit un louable empressement Ă  publier le Compte rendu de l'administration de la Commission intermĂ©diaire provinciale de Caen » l. Au prix d'un labeur Ă©norme, il put mettre ce compte, dĂšs le 24 octobre 1790, Ă  la disposition des liquidateurs, avec les douze mille piĂšces qui en formaient la justification. LĂ  se borna son rĂŽle ; aux demandes postĂ©rieures des commissaires, avides de renseigne- ments plus dĂ©taillĂ©s, il rĂ©pondit Ă©vasivement ?, puis fit la sourde oreille. Cette demi satisfaction Ă©tait un succĂšs si on la compare au refus poli, mais Ă©nergique que les commissaires Ă©prouvĂšrent de la part des anciens intendants. Esmangart, Feydeau de Brou et Cordier de Launay, qui s'Ă©taient succĂ©dĂ© depuis dix ans dans l'administration de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen et qui, Ă  ce titre, de- vaient rendre compte de l'emploi des fonds mis Ă  leur disposition pendant cette pĂ©riode, opposĂšrent tous les trois une fin de non- recevoir aux injonctions qui leur Ă©taient faites. Esmangart avait quittĂ© Caen en 1783, pour l'intendance de Lille ; il soignait Ă  ce moment, dans une ville d'eaux des PyrĂ©nĂ©es, sa santĂ© gravement compromise et avait eu le temps d'oublier le dĂ©tail de son administration en Normandie. Aussi pria-t-il les commis- saires de consulter ses successeurs, dont les souvenirs devaient ĂȘtre plus prĂ©cis 3. Feydeau de Brou, qui aprĂšs avoir Ă©tĂ© Directeur gĂ©nĂ©ral des Ă©conomats, vivait dans la retraite Ă  Viessoix, prĂšs de Gex, leur adressa des dĂ©veloppements lumineux sur les diverses parties de son administration, mais ne leur rendit aucun compte ». Il les renvoya aux bureaux de l'intendance de Caen, oĂč il avait fait dĂ©poser, en 1787, des papiers dont il Ă©tait actuellement dessaisi 4. Quant Ă  Cordier de Launay, auquel sa qualitĂ© de der- nier titulaire crĂ©ait des obligations plus Ă©troites, il le prit d'assez 1 Compte-rendu, par la Commission intermĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie, de son administration, du 7 dĂ©cembre 1781 au 1 aoĂ»t 1790. Caen, Le Roy, 1790 avec tableaux annexes. 2 Lettre de Le Telier au Directoire du Calvados, 13 novembre 179U. Arcb. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 3 Deux lettres d'Esmangart Ă  Baveux, procureur gĂ©nĂ©ral syndic, 27 dĂ©cembre 1790 et 24 fĂ©vrier 1791. Ibid. 4 Lettre de Feydeau de Brou Ă  Ba\eux. procureur gĂ©nĂ©ral syndic, 12 janvier 1791. Ibid. VAINES SOMMATIONS A L INTENDANT CORDIER DE LAUNAY 479 haut avec les liquidateurs ; il chargea Lamy-DesvallĂ©es, secrĂ©taire de l'intendance, de nĂ©gocier avec eux. Le Tableau de son admi- nistration M n'Ă©tait point pour les satisfaire il y dĂ©clarait for- mellement que les intendants Ă©taient des ordonnateurs et non des comptables et que, n'ayant jamais Ă©tĂ© chargĂ©s d'aucune perception ni maniement de deniers, ils n'Ă©taient passibles d'aucun compte 2. Les Directoires des dĂ©partements eurent beau rĂ©itĂ©rer leurs sommations, il les envoya aux calendes. Les commissaires de liquidation et de vĂ©rification furent obligĂ©s de conclure en arrĂȘtant le procĂšs-verbal de leurs sĂ©ances &, que le compte de l'intendant n'Ă©tant appuyĂ© d'aucune piĂšce justifi- cative, n'Ă©tait susceptible d'aucun contrĂŽle complet et satisfai- sant » 4i. La loi du 3 septembre 1792, qui prescrivait des poursuites contre les ci-devant commissaires dĂ©partis, ne pouvait plus atteindre Cordier de Launay. Le procureur gĂ©nĂ©ral syndic du Calvados chercha vainement sa rĂ©sidence^. Moins maltraitĂ© par le sort que ses collĂšgues de Rouen et d'Alençon, de Maussion 6 et Jullien {1, qui pĂ©rirent sur l'Ă©chafaud, et plus heureux que son prĂ©dĂ©cesseur Fontette, qui, arrĂȘtĂ© comme suspect, mourut dans une prison de Rouen, le dernier intendant de Caen avait demandĂ© son salut Ă  l'Ă©migration. Si l'idylle amoureuse dont il 1 Tableau de l'administration de Cordier de Launay. Arch. dĂ©p , Calvados, C 233. 2 Lettre de BrĂ©mesnil, prĂ©sident du conseil gĂ©nĂ©ral de la Manche, au directoire du Calvados, 10 novembre 1790. Ibid., sĂ©rie L non inventoriĂ©e. M. de Launay, au lieu de rendre les comptes de son administration, comme son devoir lui en imposait l'obligation, n'a fait prĂ©senter par ses commis que des bordereauu informes et quel- ques Ă©lats vagues qui ne forment aucun ordre de comptabilitĂ©. » 3 Voir, Ă  l'Appendice 1° La rĂ©partition des impositions directes de la gĂ©nĂ©ra- litĂ© de Caen, opĂ©rĂ©e par ces commissaires entre les dĂ©partements du Calvados, de la Manche et de l'Orne ; 2" le tableau de la reprise, au profit de ces trois dĂ©parte- ments, des fonds disponibles laissĂ©s par la Commission intermĂ©diaire provinciale de Basse-Normandie. 4 ProcĂšs-verbal de la commission de vĂ©rification. 0 juin 1791. Arch. dĂ©p., Calva- dos, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. — Cf. Ibid., Orne, L 10?3. — Sur le mauvais vouloir » et le sans-gĂšne » des trois derniers intendants de Caen, cf. Lebretbon, ouu. citĂ©, p. 61. 5; Lettre de Bougon Longrais, procureur gĂ©nĂ©ral syndic du Calvados, Ă  son col- lĂšgue de la Manche, 11 janvier 1793. AccusĂ© de rĂ©ception, par Louis Caille, procu- reur syndic du district de Caen, le 14 janvier 1793, de l'arrĂȘtĂ© des commissaires liquidateurs du 8 dĂ©cembre 1792, prescrivant des poursuites en vertu de la loi du 3 septembre 1792. Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie L non inventoriĂ©e. 6, Thomas de Maussion, ancien intendant de Rouen, fui condamnĂ© Ă  mort par le Tribunal rĂ©volutionnaire le 6 ventĂŽse an II. Arch. nat, W 332, d. 560. 7 Alexandre Jullien, ancien intendant d'Alençon, fut condamnĂ© Ă  mort par le mĂȘme Tribunal, le 20 messidor an IL II appartint Ă  la premiĂšre fournĂ©e de la cons- piration dile des prisons. 11 Ă©tait ĂągĂ© de 80 ans. ibid., W 409, d. 941. 480 GORDIER DE LAUNAY ÉMIGRÉ est le hĂ©ros et qui constitue le fond de son roman intitulĂ© la Veuve de Catane » n'Ă©tait pas une ingĂ©nieuse fiction, si le dĂ©cor n'en Ă©tait pas imaginaire, nous pourrions refaire aprĂšs lui l'iti- nĂ©raire de ses nombreuses pĂ©rĂ©grinations. La Suisse, Turin, Venise, Florence, Rome et Naples l'auraient, semble-t-il, tour Ă  tour arrĂȘtĂ© quelques instants, mais la Sicile aurait attirĂ© son humeur solitaire et c'est au pied de l'Etna, Ă  Catane, sur les bords d'une mer agitĂ©e, qu'il serait venu guĂ©rir les blessures d'une Ăąme ulcĂ©rĂ©e par l'infortune v. Ce roman pourrait bien n'ĂȘtre qu'un conte 2 ; ce fut dans le nord de l'Europe que Cordier de Launay Ă©migra. Il dut passer en Allemagne et de lĂ  en Russie oĂč il s'attacha Ă  la puissante famille des NicolaĂŻ. Henri-Louis NicolaĂŻ, secrĂ©taire privĂ© de l'impĂ©ratrice Marie FĂ©o- dorovna, femme du tsar Paul Ier, lui confia l'Ă©ducation de son fils 3. GrĂące Ă  ses relations, il fut ensuite nommĂ© secrĂ©taire chargĂ© de l'expĂ©dition française Ă  la chancellerie du MinistĂšre du com- merce, puis obtint le brevet honorifique de conseiller d'Etat. Devenu fonctionnaire russe, Cordier de Launay ne bĂ©nĂ©ficia point, on ne sait pourquoi, de l'autorisation de rentrer en France que le premier Consul avait accordĂ©e Ă  de nombreux Ă©migrĂ©s W. Il vĂ©cut Ă  Saint-PĂ©tersbourg jusqu'Ă  l'Ăąge de 75 ans ; frappĂ© d'une attaque de paralysie, il mourut le 24 janvier 1820 et fut enterrĂ© dans le cimetiĂšre de Smolensk 5. Cordier de Launay avait consacrĂ© la derniĂšre partie de sa vie Ă  la production d'ouvrages de valeur trĂšs inĂ©gale compilation historique relative Ă  la Russie Tables chronologiques et gĂ©nĂ©- 1 Cordier de Launay, La Veuve de Calcine. Berlin, Ch. Quien, 1803, in-8. Bibl. nat., Y2 24561. 2 Cordier de Launay s'endort en Sicile et se rĂ©veille en Russie ; la vue d'un domestique Ă  longue barbe et habillĂ© Ă  la russe le rappelle Ă  la rĂ©alitĂ©. Il a fait un rĂȘve et sortant comme par un bond de son somnambulisme littĂ©raire, il se trouve une plume dans la main, un conte dans l'autre, et les jette tous deux avec dĂ©pit ». Voir Appendice n° Ăź. 3 Un des fils de son Ă©lĂšve, LĂ©once de NicolaĂŻ, aprĂšs avoir Ă©tĂ© lieutenant gĂ©nĂ©ral, aide-de-camp du tsar et vice-empereur du Caucase, mourut en 1891 sous l'habit reli- gieux, Ă  la Grande-Chartreuse, oĂč il Ă©tait entrĂ© en 1868. La sƓur de LĂ©once, Mme de Sutof, est morte assez rĂ©cemment au couvent de Notre-Dame-de-la-DĂ©livrande, prĂšs Caen, dont elle Ă©tait supĂ©rieure. 4 Le nom de Cordier de Launay figure sur les listes envoyĂ©es en l'an X par HĂ©douville, ambassadeur de France Ă  Saint-PĂ©tersbourg, Ă  Talleyrand, contenant les noms des Ă©migrĂ©s qui demandaient l'autorisation de rentrer en France. Note de M. Tastevin, libraire Ă  Moscou. 5 Arch. de l'Ă©glise Sainte-Catherine de Saint-PĂ©tersbourg. Communication de M. Loutreuil, industriel Ă  Moscou. CORDIEH DE LAUNAY HOMME DE LETTRES 481 alogiques des Maisons princiĂšres de l'Empire de Russie ; Ă©tudes gĂ©ographiques sur l'Asie et l'AmĂ©rique Tableau topographique et politique de la SibĂ©rie, de la Chine, de la zone moyenne de l'Asie, et du Nord de l'AmĂ©rique ; traitĂ© d'esthĂ©tique dont le titre seul rĂ©vĂšle un esprit fantasque ThĂ©orie circonsphĂ©rique des deux genres de Beau, avec application Ă  toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts ; roman d'imbroglios, d'aventures galantes, Ɠuvre littĂ©raire mĂ©diocre, au style ampoulĂ© et prĂ©- tentieux, oĂč la bizarrerie du fond le dispute au pĂ©dantisme guindĂ© de la forme La Veuve de Catane *. Aussi, tandis qu'un historien russe a cru devoir le ranger, sans enthousiasme d'ail- leurs, dans la catĂ©gorie des intendants hommes de lettres 2, un autre Ă©crivain du mĂȘme pays n'a-t-il pas hĂ©sitĂ© Ă  le classer, comme son beau-frĂšre, le licencieux auteur de Justine, parmi les fous littĂ©raires 3. 1 Voir Appendice I, ƒuvres de l'intendant Cordier de Launay. 2 Ardascheff, Provintsialnaia administratsia, t. II, p. 230. Cordier de Launay, Ă©crit Ardascheff, a essayĂ© ses forces dans la carriĂšre des belles-lettres, sans grand suc- cĂšs, paraĂźt-il. Avant d'ĂȘtre nommĂ© intendant il avait traduit l'Iliade, et cette Ira luc- tion n'avait pas eu moins de cinq Ă©ditions. Voir ci-dessous, Appendice 1 Tcherpakoff, Les Fous littĂ©raires, Moscou, 188!, p. 31-32. 31 482 PRÉLUDES DE LA FEDERATION EN BASSE-NORMANDIE CHAPITRE XVIII LA FÊTE DE LA FEDERATION ET L'UNITÉ NATIONALE JUILLET -AOUT 1790 La FĂȘte nationale de la FĂ©dĂ©ration est contemporaine de l'avĂšnement du nouveau rĂ©gime administratif. PrĂ©ludes de la FĂ©dĂ©ration en Basse- Normandie. L'idĂ©e de fraternitĂ© dans les AssemblĂ©es provinciales ; dans les cahiers de dolĂ©ances du Tiers Ă©tat. Les confĂ©rences frater- nelles des villes de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen, relatives aux subsistances. Les confĂ©dĂ©rations patriotiques des milices nationales au lendemain de la Grande Peur. Atteinte portĂ©e au particularisme rĂ©gional par la rĂ©forme administrative. Les menaces de la contre-rĂ©volution. L'appel du roi. DĂ©cret du 5 juin 1789. L'invitation de Bailly aux municipalitĂ©s. Projets antĂ©rieurs des villes normandes. Date de la fĂȘte fixĂ©e par Paris. PrĂ©- paratifs et cĂ©lĂ©bration de la fĂȘte de la FĂ©dĂ©ration dans les villages et les villes. Les fĂ©dĂ©rations dĂ©partementales Ă  Caen et Ă  Coutances. Les dĂ©putĂ©s de la Basse-Normandie Ă  la fĂȘle de la FĂ©dĂ©ration natio- nale Ă  Paris. Les impressions d'un garde national caennais espĂ©- rances fondĂ©es sur l'avenir. Grande portĂ©e morale de la journĂ©e du 14 juillet 1790. Le 13 juillet 1790, les commissaires du Calvados, rĂ©unis Ă  l'abbaye Saint-Etienne de Caen, arrĂȘtaient la clĂŽture du registre de leurs procĂšs-verbaux ; quelques instants plus tard la nouvelle assemblĂ©e administrative du dĂ©partement tenait sa premiĂšre sĂ©ance dans le mĂȘme lieu et y nommait son Directoire. Dans son discours d'inauguration, le procureur gĂ©nĂ©ral syndic Bayeux fit entendre des paroles d'espĂ©rance ; il se plut Ă  Ă©voquer les bienfaits que le pays pouvait attendre d'une administration dĂ©sormais fraternelle et, rappelant les sentiments d'union qui rappro- chaient tous les Français, il fit allusion Ă  la journĂ©e du lendemain, oĂč allait apparaĂźtre, dans l'imposante solennitĂ© de sa premiĂšre manifestation, l'unitĂ© nationale ]. C'Ă©tait l'heure oĂč les vieilles institutions s'Ă©croulaient, oĂč le 1 Arch. dtp., Calvados, L 599. l'idĂ©e de fraternitĂ© dans les assemblĂ©es provinciales 483 nouveau rĂ©gime administratif naissait au chant des Te Deum, aux joyeux carillons des cloches, aux salves bruyantes des canons. Le 14 juillet 1790, au jour anniversaire de la prise de la Bastille, la FĂ©dĂ©ration de tous les soldats citoyens, confondant toutes les banniĂšres avec la banniĂšre nationale, tous les uniformes avec les uniformes des dĂ©fenseurs de la libertĂ©, toutes les affec- tions avec l'amour du bien public » C1, allait donner au monde, sur le Champ-de-Mars, devant l'autel de la patrie, le spectacle d'une nation d'hommes libres unis par les liens de la fraternitĂ©. Avant de se rĂ©aliser dans ce cadre grandiose et avec cet Ă©clat inaccoutumĂ©, l'idĂ©e de la FĂ©dĂ©ration s'Ă©tait dĂ©gagĂ©e progressive- ment par une Ă©volution dont il est possible de marquer les diver- ses Ă©tapes. Elle avait germĂ© dans plus d'un esprit avant le mois de juillet 1790 et s'Ă©tait traduite par des manifestations partielles, prĂ©ludes de la cĂ©rĂ©monie solennelle du Champ-de-Mars. La rĂ©forme de 1787, en rendant uniforme l'administration du royaume, tendait Ă  faire cesser l'isolement dans lequel s'Ă©taient jusque-lĂ  confinĂ©es les provinces. De l'une Ă  l'autre on se commu- niqua les procĂšs-verbaux d'assemblĂ©es ; il y eut des Ă©changes de vues assez frĂ©quents sur le meilleur systĂšme de rĂ©gie, un rappro- chement des esprits appliquĂ©s Ă  une Ɠuvre commune et des volon- tĂ©s convergeant vers un but unique. Les procureurs-syndics provinciaux de la gĂ©nĂ©ralitĂ© d'Auch Ă©crivaient Ă  leurs collĂšgues La France ne devrait plus former qu'une grande famille, dont tous les citoyens, se regardant comme des frĂšres, contribue- raient par leur union et leurs dĂ©couvertes Ă  la prospĂ©ritĂ© de l'Empire » ?. Tentative prĂ©maturĂ©e Ă  coup sĂ»r, mais de quel- ques annĂ©es seulement, et qui n'en rĂ©vĂ©lait pas moins un ache- minement de l'opinion vers l'unitĂ© nationale. Cette correspondance, que trop d'obstacles empĂȘchaient encore de s'Ă©tablir avec rĂ©gularitĂ© d'un bout de la France Ă  l'autre, Ă©tait au moins possible entre voisins. Elle exista entre les trois administrations provinciales de Normandie et elle aboutit Ă  la campagne entreprise sur tous les points de cette province en faveur de la restauration de ses anciens Etats. Le dĂ©sir de ces Etats se rĂ©veilla aussi impĂ©rieux qu'autrefois, mais rajeuni et Ă©largi par un sentiment nouveau qui attĂ©nuait l'ancien Ă©goĂŻsme 1 Discours de Baveux, procureur gĂ©nĂ©ral syndic du Calvados. Arch. dĂ©p., Calva- dos, L 599. 2 Lettre des procureurs-syndics provinciaux d'Auch Ă  la Commission intermĂ©- diaire de Caen, 31 mars 1788. Ibicl., C 7628. Voir ci-dessus, chap. VI, p. 122. 484 l'idĂ©e DE FRATERNITÉ DANS LES cahiers de dolĂ©ances provincial, en subordonnant l'individualitĂ© de la Normandie au maintien de l'unitĂ© française. Les citoyens d'une mĂȘme province allaient se sentir bientĂŽt les citoyens d'une mĂȘme nation. Bien plus, les citoyens de toutes les provinces, de tous les ordres, de toutes les classes allaient comprendre la valeur du titre de Français, qui les mettait en sociĂ©tĂ© d'intĂ©rĂȘts, de devoirs et d'en- gagements ». C'Ă©tait l'espĂ©rance exprimĂ©e, dĂšs le 7 janvier 1789, par la commune de Rouen dans son mĂ©moire au roi H. L'Avis des bons Normands Ă  leurs frĂšres tous les bons Français de toutes les provinces et de tous les ordres traduisait lumineusement ces aspirations gĂ©nĂ©reuses. L'auteur y conjurait tous ses concitoyens de former une confraternitĂ© » gĂ©nĂ©rale contre le mal public. C'est afin d'y atteindre qu'il leur recommandait la concordance des vƓux et l'uniformitĂ© des cahiers, qu'il souhaitait la forma- tion d'un esprit public, seul capable de sauver la France » M. Son appel fut entendu. Une sorte de plan gĂ©nĂ©ral prĂ©sida Ă  la rĂ©daction des cahiers de dolĂ©ances normands, qui, avec plus ou moins d'ampleur et de prĂ©cision, exprimĂšrent des sentiments unanimes. Sans doute leurs auteurs avaient soif tout d'abord de libertĂ© et d'Ă©galitĂ© et c'est la revendication de ces deux biens qui fut le premier thĂšme de leurs dolĂ©ances. Mais la communautĂ© des souffrances avait engendrĂ© une gĂ©nĂ©reuse solidaritĂ©. La fra- ternitĂ© inspira l'esprit gĂ©nĂ©ral des cahiers ; elle fut inscrite en toutes lettres dans plus d'un d'entre eux. Les communes rurales du bailliage de Caen s'associĂšrent Ă  la ville chef-lieu pour dĂ©clarer que les Français se considĂ©raient comme une mĂȘme famille » et pour rĂ©gler les moyens pratiques de maintenir l'alliance et la bonne union qui devaient rĂ©gner entre des citoyens et des frĂš- res » 3'. La crainte de la famine ne contribua point peu Ă  resserrer les 1 PubliĂ© par Hippeau, Le Gouvernement de Normandie, t. VI, p. 217-222. 2 Avis des bons Normands Ă  leurs frĂšres, etc., dans Hippeau, ouu. citĂ©, t. VI, p. 276-291. L'auteur Ă©tait Thouret. 3 Arch. dĂ©p., Calvados, sĂ©rie B non inventoriĂ©e. Cahier du bailliage de Caen, 1" partie, art. 4, et Arch. coram., Caen, AA50. Cahier de la ville de Caen, lrc partie, art. 4. Les deux articles sont identiques.; — Le cahier des juges-consuls de Caen, demandant la libre circulation des marchandises dans l'intĂ©rieur du royaume, s'ex- prime ainsi Qu'il n'y ait plus de provinces rĂ©putĂ©s Ă©trangĂšres, puisqu'elles sont toutes annexĂ©es Ă  la France, et que les habitants de la Bretagne et autres comme elles, sont nos frĂšres.» Arch. comm., Caen, AA49. Lire, dans le mĂȘme esprit, le cahier d'Anneville-en-CĂšres bailliage de Valognes La France ne fera plus qu'une seule famille dont tous les membres porteront Ă  leur pĂšre commun le tribut respec- tif et proportionnel de leur reconnaissance. » Bridrey, Cahiers du Cotentin, t. II, p. 86. MESURES FRATERNELLES D'APPROVISIONNEMENT ET DE DEFENSE 485 liens de sympathie entre les villes. A l'Ă©goĂŻsme de plusieurs d'entre elles, qui gardaient jalousement le blĂ© dans leurs halles et s'oppo- saient mĂȘme par la violence Ă  son enlĂšvement, avait succĂ©dĂ© une entente fraternelle en vue de faciliter la rĂ©gularitĂ© des appro- visionnements. Pour assurer l'exĂ©cution des dĂ©crets de l'Assem- blĂ©e nationale sur la libre circulation des grains, des confĂ©rences, dont Bayeux semble avoir pris l'initiative ll\ avaient Ă©tĂ© orga- nisĂ©es entre les villes du Bessin et du Cotentin. Deux dĂ©lĂ©guĂ©s de chacun des ComitĂ©s permanents de Bayeux, Isigny, Carentan, PĂ©riers, Torigni, Saint-LĂŽ s'Ă©taient donnĂ© rendez-vous dans cette derniĂšre ville. Des dĂ©libĂ©rations de ce congrĂšs bas-normand, rĂ©uni les 10 et 11 dĂ©cembre 1789, Ă©tait sorti un rĂšglement qui protĂ©geait la libertĂ© du transit des grains Ă  travers la province "2l On y avait dĂ©cidĂ© la tenue de confĂ©rences fraternelles » pĂ©rio- diques, chargĂ©es de prendre les mesures relatives Ă  la subsistance commune. Cette association de secours mutuels contre la faim n'ouvrait-elle pas les voies Ă  la FĂ©dĂ©ration? La Grande peur de juillet-aoĂ»t 1789 ne fut point Ă©trangĂšre Ă  cet Ă©lan gĂ©nĂ©ral de sympathie. La nĂ©cessitĂ© de se grouper contre les Ă©meutiers et les brigands, contre les dangers rĂ©els et les pĂ©rils imaginaires provoqua, non seulement la crĂ©ation spontanĂ©e de ComitĂ©s de dĂ©fense locaux au sein de chaque ville, mais encore la formation de ligues dĂ©fensives rĂ©gionales entre villes et villages. En l'absence d'un pouvoir exĂ©cutif obĂ©i, les campagnes deman- daient protection au centre urbain le plus proche. Caen Ă©tait Ă  la tĂȘte d'une association de paroisses auxquelles elle donnait le mot d'ordre *3. Tinchebrai avait formĂ© avec les villages des alentours une alliance dĂ©fensive envers et contre tous les malintentio- nĂ©s » *. Vire organisait une confĂ©dĂ©ration patriotique, qui ralliait les adhĂ©sions des bourgs voisins au nom de la confra- ternitĂ©, bouclier commun contre les ennemis de la nation » 5. Les dĂ©lĂ©guĂ©s de quarante-cinq paroisses du Bocage, rĂ©unis Ă  1 Arcli. coram., Cherbourg, AA 66 allusion Ă  une tournĂ©e de propagande faite par les dĂ©putĂ©s de Bayeux auprĂšs des divers ComitĂ©s de la rĂ©gion, pour la rĂ©union d'une confĂ©rence Ă  Saint-LĂŽ, 30 novembre 1789. 2 ProcĂšs-verbal de la premiĂšre confĂ©rence tenue Ă  Saint-LĂŽ, suivi d'un rĂšgle- ment en 22 articles. Arch. comra., Bayeux, D l13 bis. Registre du ComitĂ© national permanent, fus 95 Ă  99. — Cf. Ibidi. Carentan. Registre des dĂ©libĂ©rations, 7 dĂ©cembre 1789. Voir ci-dessus, chap. XIII, p. 354. 3 Arch. comm., Caen, BB 93. Registre des dĂ©libĂ©rations, 7, 11, 12 septembre 1789. 4 Ibid., Tinchebrai. Registre des dĂ©libĂ©rations, 16 aoĂ»t 1789. 5; Ibid., Torigni. Registre des dĂ©libĂ©rations, 3 octobre 1789. 486 LES MENACES DE LA CONTRE-REVOLUTION CondĂ©-sur-Noireau le 26 aoĂ»t 1789, y avaient signĂ© un contrat d'association et d'union contre les perturbateurs de l'ordre public, se promettant secours rĂ©ciproque en cas d'attaque imprĂ©- vue et de danger pressant il. Les villes rivalisaient entre elles d'Ă©gards et de bons offices. Cherbourg faisait des ouvertures amicales Ă  sa rivale Valognes, en vue de leur dĂ©fense rĂ©ciproque et son appel Ă©tait entendu 2. Granville permettait aux chasseurs auxiliaires d'Avranches de rĂ©unir sur leur drapeau les armes des deux citĂ©s et le ComitĂ© d'Avranches, dans sa lettre de remercĂźments, regardait l'assem- blage des deux Ă©cus » comme un symbole de concorde et d'Ă©troite confraternitĂ© 3. Les dĂ©marches prĂ©venantes de Mortain com- blaient Avranches de reconnaissance et de confusion et abou- tissaient Ă  une agrĂ©gation civique » entre les citoyens des deux villes W. La division de la France en dĂ©partements avait Ă©tĂ© aussi un auxiliaire efficace de l'unitĂ© nationale en brisant les cadres oĂč le particularisme rĂ©gional s'enfermait, elle avait, selon l'expression de Louis XVI, rĂ©uni davantage Ă  un mĂȘme esprit et Ă  un mĂȘme intĂ©rĂȘt toutes les parties du royaume » 5. Et les paroles du roi trouvaient un Ă©cho dans le cƓur de tous ses sujets. Le temps est venu, Ă©crivaient les officiers municipaux de Rennes Ă  leurs collĂšgues de Caen de renverser les barriĂšres qui nous sĂ©parent. Aujourd'hui que nous n'avons plus que les mĂȘmes principes, les mĂȘmes lois, une mĂȘme patrie, nous ne devons plus nous considĂ©- rer que comme une grande sociĂ©tĂ© de frĂšres et d'amis » . A Vire, c'est aussi en plein air, au pied du donjon, sur le tertre dominant les vaux agrestes oĂč serpente la Vire, que la fĂȘte devait se cĂ©lĂ©brer ; une bourrasque rendit les prĂ©paratifs inutiles et ce fut l'Ă©glise Notre-Dame qui abrita l'assistance 3;. Partout la cĂ©rĂ©monie eut lieu le matin et, Ă  l'heure de midi, des forĂȘts de bras se levaient et des milliers de bouches pronon- çaient le serment fĂ©dĂ©ra tif. Les citoyens juraient de rester Ă  jamais fidĂšles Ă  la nation, Ă  la loi et au roi, de maintenir de tout leur pouvoir la constitution dĂ©crĂ©tĂ©e par l'AssemblĂ©e nationale et acceptĂ©e par le roi, de protĂ©ger en particulier la sĂ»retĂ© des personnes et des propriĂ©tĂ©s, la libre circulation des grains et des subsistances, la perception des contributions publiques et de demeurer unis Ă  tous les Français, par les liens indissolubles de la fraternitĂ© » 4. AprĂšs le serment, les troupes se retiraient en bon ordre, les corps administratifs se sĂ©paraient, les simples citoyens rentraient chez eux ; dans quelques villes, pour rendre leur fraternitĂ© plus apparente, ils se rĂ©unissaient autour de la mĂȘme table. Des ban- quets populaires furent ainsi organisĂ©s Ă  Vire 5, Ă  Avranches, oĂč un repas frugal fut dressĂ© sous les allĂ©es du bois des Capu- cins 6, Ă  Torigni, oĂč l'orangerie du chĂąteau princier de Monaco servit de rĂ©fectoire 7. A Tinchebrai, il y eut plusieurs repas communs et, dĂ©tail intĂ©ressant, l'un de ces banquets fut exclu- 1 Arch. comm., Cherbourg, BB 5. Begistre des dĂ©libĂ©rations, 14 juillet 1790 Cf. ProcĂšs-verbal imprimĂ©, Cherbourg, imp. Clamorgan, 8 p. 2 Ibid., Granville Begistre des dĂ©libĂ©rations, 14 juillet 1790. 3 Ibid., Vire. Begistre des dĂ©libĂ©rations, 14 juillet 1790. 4 Voir le texte complet dans les procĂšs-verbaux de Cherbourg et de Tinchebrai. 5 Le Gorgeu, La FĂȘte de la FĂ©dĂ©ration Ă  Vire en 1790. Le banquet fut fixĂ© Ă  trois livres par lĂšte, dont la moitiĂ© devait ĂȘtre consacrĂ©e aux pauvres ». 6 Arch. comm., Avranches. Begistre des dĂ©libĂ©rations, 14 juillet 1790. 7 Journal de la Basse-Normandie, n° 83, 8 aoĂ»t 1790. RÉJOUISSANCES ET LIBERALITES PUBLIQUES 491 sivement fĂ©ministe ; ses organisatrices n'admirent parmi elles qu'un seul convive masculin, un vieux tabellion octogĂ©naire qu'elles allĂšrent chercher en triomphe *. Dans la soirĂ©e, des feux de joie furent allumĂ©s sur les place publiques r? ; les monuments publics furent illuminĂ©s et plus d'un particulier Ă©claira sa façade avec l'autorisation des municipalitĂ©s 8 ; les danses terminĂšrent cette journĂ©e d'allĂ©gresse. Si la partie officielle de la cĂ©rĂ©monie semble avoir Ă©tĂ© rĂ©servĂ©e aux seuls citoyens actifs, les rĂ©jouis- sances qui suivirent furent accessibles Ă  tous les habitants ; la foule des prolĂ©taires en prit sa part et se mĂȘla Ă  la joie gĂ©nĂ©rale. On avait mĂȘme, dans certaines villes, pris des mesures excep- tionnelles pour faciliter le chĂŽmage des journaliers 4>. Les pau- vres n'avaient point Ă©tĂ©- oubliĂ©s dans cette journĂ©e fraternelle. A Granville, Ă  Bayeux, Ă  Vire, Ă  Caen, les dons des officiers municipaux, le produit des souscriptions recueillies entre les gardes nationaux ou des quĂȘtes faites par les dames pendant la cĂ©rĂ©monie avaient permis des distributions de vivres et d'argent. Caen et Coutances durent Ă  leur titre de chef-lieu de dĂ©parte- ment d'ĂȘtre le théùtre de fĂȘtes encore plus imposantes. Les dĂ©lĂ©- gations des gardes nationales du Calvados et de la Manche s'y Ă©taient donnĂ© respectivement rendez-vous, les premiĂšres Ă  Caen pour le 1er juillet, les secondes Ă  Coutances pour le 5 aoĂ»t. A Caen 5, la solennitĂ© avait Ă©tĂ© annoncĂ©e dĂšs le 30 juin par le canon du chĂąteau ; le cortĂšge officiel qui, le lendemain matin, 1 Arc h. comm., Tinchebrai. Registre des dĂ©libĂ©rations, 14 juillet 1790. Ce convive, choyĂ© par les femmes, Ă©tait Michel Pitot, fermier gĂ©nĂ©ral de la chĂątellenie de Tin- chebrai et greffier du bailliage. Sa popularitĂ© a empĂȘchĂ© l'incendie des registres de la chĂątellenie, qui nous ont Ă©tĂ© conservĂ©s. 2 ĂŻbid., Mortain. Registre des dĂ©libĂ©rations, 13 septembre 1790. Paiement de dix livres pour un demi-cent de bourrĂ©es, pour les feux de joie le jour de la fĂ©dĂ©- ration. 3 Un conflit Ă©clata Ă  cette occasion entre la municipalitĂ© de Cherbourg et la SociĂ©tĂ© des amis de la Constitution, de crĂ©ation rĂ©cente ; celle-ci avait eu le tort d'il- luminer la Chambre littĂ©raire » sans demander l'autorisation de la municipalitĂ©, qui fit Ă©teindre les chandelles. La SociĂ©tĂ© s'inclina, mais adressa une rĂ©clamation Ăč l'AssemblĂ©e nationale. Arch. nat., D xxix 32. La municipalitĂ©, dans un mĂ©moire d'observations relatif Ă  cette plainte, apprĂ©ciait ainsi l'attitude indocile de cette SociĂ©tĂ© Une portion d'une SociĂ©tĂ© naissante, Ă©chauflĂ©e du premier feu d'une doc- trine qu'elle a mal digĂ©rĂ©e, veut changer les limites posĂ©es par la loi. » Elle lui reproche d'ĂȘtre une institution dangereuse, formĂ©e par une exclusion arbitraire et injurieuse pour les citoyens d'une ville oĂč il y a autant d'amis de la Constitution que d'habitants ». Ibid. 4 Arch. comm., Bayeux, Di12. Registre des dĂ©libĂ©rations, 11 juillet 1790. 5 ProcĂšs-verbal de la confĂ©dĂ©ration des gardes nationales et troupes de ligne du dĂ©partement du Calvados. Ibid., Caen, carton 30. 192 LES FÉDÉRATIONS DU CALVADOS ET DE LA MANCHE se rendit vers la plaine d'Ifs, comprenait, outre le Conseil gĂ©nĂ©ral de la commune, les commissaires du roi pour la formation du dĂ©partement, les Ă©lecteurs du dĂ©partement, dont les sĂ©ances n'Ă©taient pas terminĂ©es, les membres du dĂ©partement nouvelle- ment Ă©lus et les divers corps de la ville. Il Ă©tait encadrĂ© par la marĂ©chaussĂ©e, les rĂ©giments d'Aunis et de Lorraine, un dĂ©tache- ment du rĂ©giment de cavalerie Commissaire gĂ©nĂ©ral, la garde nationale de Caen et les dĂ©tachements des milices citoyennes de nombreuses villes et bourgades du dĂ©partement il. Quelques-uns avaient, pour la circonstance, fait les frais d'un Ă©quipement neuf 2. Aux cĂŽtĂ©s de l'autel de la patrie, Ă©levĂ© sur une Ă©minence et auquel on accĂ©dait par des escaliers de gazon, deux colonnes portaient les bustes du roi et de Lafayette, Le drapeau fĂ©dĂ©ratif, symbole de l'union rĂ©alisĂ©e en ce jour, fut prĂ©sentĂ© Ă  l'autel et bĂ©ni par l'aumĂŽnier de la garde nationale de Caen. Il Ă©tait Ă  fond blanc, ornĂ© de fleurs de lys Ă  chaque angle ; un cercle aux cou- leurs tricolores le bordait ; au milieu, Ă©tait un faisceau de six flĂšches, unies par un ruban, qui portait une inscription latine In fƓdere virtus ; autour du faisceau on lisait les noms des six chefs-lieux de district. PrĂ©cĂ©dĂ©e d'un sermon de l'aumĂŽnier, qui se rĂ©jouit de voir la religion Ă  la place d'honneur dans cette fĂȘte, la messe fut suivie de deux discours le comte de VendƓuvre, maire de Caen, cĂ©lĂ©bra l'avĂšnement du rĂ©gime nouveau ; le comte de Faudoas, colonel de la garde nationale, adressa un vibrant appel d'union aux lĂ©gions citoyennes et militaires, ainsi qu'aux magistrats et fonctionnaires de tout ordre. Entre les deux haran- gues, le major de la place avait lu le pacte fĂ©dĂ©ratif, acclamĂ© par des milliers de voix et le lieutenant du roi l'avait signĂ© sur l'autel, au nom de toute l'armĂ©e confĂ©dĂ©rĂ©e. Pour perpĂ©tuer le souvenir de cette sainte alliance », on donna Ă  la plaine d'Ifs le nom de plaine des Six districts et on dĂ©cida d'y Ă©lever une pyramide commĂ©mora tive, couverte d'une longue inscription. La fĂ©dĂ©ration du dĂ©partement de la Manche fut cĂ©lĂ©brĂ©e le 5 aoĂ»t, dans la Lande-d'Orval, aux environs de Coutances l3K 1 Le procĂšs-verbal mentionne celles de Baveux, Isigny. Balleroy, Lisieux, Orbec, Cambre mer, Falaise, Vire. CondĂ©, Vassy, Pont-1'EvĂȘque, Honfleur. Tilly- d'Orceau, Creully, Bavent. Villers-Bocage. 2 Arch. comm., Bayeux, Di12. Registre des dĂ©libĂ©rations, 18 juin 1790. On fait faire, Ă  l'usage des dĂ©putĂ©s, quatre habits de drap rouge, Ă  revers et parements blancs, collet jaune et doublure bleue, vestes et culottes blanches, qui ne serviront que ce jour-lĂ  et qu'on dĂ©posera au retour Ă  l'hĂŽtel de ville. » 3 ProcĂšs-verba] de la fĂ©dĂ©ration des gardes nationales, troupes de ligne et mare- LA DÉLÉGATION DES BAS-NORMANDS A LA FÉDÉRATION NATIONALE 493 Les gardes nationales, la marĂ©chaussĂ©e et les troupes de ligne y resserrĂšrent le pacte d'association volontaire. De tous les points du dĂ©partement, les dĂ©tachements des milices citoyennes s'y Ă©taient donnĂ© rendez-vous. Entre la messe et le serment, des discours furent prononcĂ©s. Le chanoine de Beaudre, Lemonnier, procureur de la commune de Coutances, Pothier, garde national de Sainte-MĂšre-Eglise, et TesniĂšre de BrĂ©mesnil, prĂ©sident de l'assemblĂ©e administrative de la Manche, prirent tour Ă  tour la parole. Les dĂ©putĂ©s de la Manche qui avaient assistĂ© Ă  la fĂ©dĂ©- ration parisienne, remirent en ce jour la banniĂšre qu'ils avaient reçue comme gage de fraternitĂ©. La fĂ©dĂ©ration du Calvados avait prĂ©cĂ©dĂ© de quatorze jours la grande fĂ©dĂ©ration nationale ; celle de la Manche la suivit Ă  trois semaines de distances. Ces deux dĂ©partements avaient d'ailleurs envoyĂ© leurs reprĂ©sentants Ă  cette fĂȘte. La Basse-Normandie exĂ©cuta avec empressement le dĂ©cret du 8 juin, par lequel l'Assem- blĂ©e constituante avait prudemment endiguĂ© l'enthousiasme rĂ©volutionnaire et rĂ©glementĂ© la future manifestation parisienne. Elle n'envoya pas Ă  Paris une foule indisciplinĂ©e et tumultueuse, oĂč les prolĂ©taires, confondus avec les citoyens actifs, auraient peut-ĂȘtre laissĂ© Ă©chapper des plaintes importunes, mais des compagnies d'Ă©lecteurs enrĂ©gimentĂ©s, porteurs de mandats rĂ©gu- liers et attachĂ©s sans rĂ©serve Ă  la Constitution nouvelle. Les gardes nationales des divers cantons rĂ©unies au chef-lieu des districts nommĂšrent un homme sur six cents ; ces Ă©lus dĂ©si- gnĂšrent, Ă  leur tour, un dĂ©lĂ©guĂ© pour deux cents hommes. Ces dĂ©lĂ©gations devant occasionner des frais de voyage et de sĂ©jour assez Ă©levĂ©s, ce furent les municipalitĂ©s qui s'en chargĂšrent provisoirement, en attendant la formation des districts. Une somme de 1430 livres fut rĂ©partie entre les onze dĂ©putĂ©s du district de Bayeux, ce qui leur donnait 130 livres Ă  chacun x. Les vingt et un dĂ©lĂ©guĂ©s de Caen, nommĂ©s Ă  l'assemblĂ©e des Jacobins, dans la journĂ©e du 2 juillet *, devaient recevoir cha- cun 100 sols par jour pendant vingt jours 3. chaussĂ©es du dĂ©partement de la Manche, Ă  Coutances, le jeudi 5 aoĂ»t 1789. Arch. Bat., AD xvi 49. 1 Arch. comm., Bayeux. Registre des dĂ©libĂ©rations, Di12, 1er juillet 1790. 2 Noms des Ă©lecteurs de la garde nationale de Caen par paroisses, etc., 8 p., et ProcĂšs-verbal de la noini nation des dĂ©putĂ©s de la garde nationale de Caen, etc., 2 juillet 1790. Ibid.. Caen, carton 36. 13 Ibid., Caen, D 1. Registre des dĂ©libĂ©rations, 3 juillet 1790. 494 IMPRESSIONS DIX CAENNAIS SFU LA FÊTE PARISIENNE Ces dĂ©putĂ©s avaient mission de reprĂ©senter Ă  la cĂ©rĂ©monie du pacte fĂ©dĂ©ratif, non seulement la garde nationale qui les avait Ă©lus, mais toute la citĂ© et tout leur district ». Le cƓur de tous les habitants leur sera uni, disait l'un des procĂšs-verbaux d'Ă©lection, lorsqu'ils renouvelleront leur serment solennel en face de toute la France, pour le succĂšs de la RĂ©volution » W. Le pays lĂ©gal rĂ©volutionnaire, bien que seul invitĂ© Ă  la fĂȘte, enten- dait s'y porter caution pour l'ensemble des citoyens, mĂȘme des citoyens passifs, que l'AssemblĂ©e nationale avait exclus des honneurs, comme elle les avait Ă©loignĂ©s des urnes. La journĂ©e du 14 juillet 1790, qui, pour les Parisiens, Ă©tait une sorte de revue des gardes nationales de France, passĂ©e par Lafayette, eut, aux yeux des fĂ©dĂ©rĂ©s normands, comme Ă  ceux de leurs frĂšres des provinces, une tout autre portĂ©e. Le chef de la dĂ©lĂ©gation caennaise, Bonnet de Meautry, capitaine de la lre compagnie de Saint-Sauveur, qui fut plus tard maire de Caen, lĂ©gislateur et conventionnel, fit part de ses impressions sur cette journĂ©e dans une lettre qu'il adressa le lendemain aux officiers municipaux de Caen *. Ce qui le frappe, ce n'est point le triomphe de Lafayette, dont il ne prononce pas le nom, c'est le cadre grandiose de la cĂ©rĂ©monie, c'est l'imposant spectacle du cortĂšge qui se dĂ©roule Ă  travers les rues de la capitale, aux applaudissements chaleureux des Parisiens, pressĂ©s Ă  leurs fenĂȘtres ; c'est la vue de l'amphithéùtre du Champ-de-Mars, garni d'un peuple immense et oĂč Ă©voluent des milliers d'hommes en armes, des quatre-vingt-trois banniĂšres dont les plis flottent au vent, du magnifique autel, assez vaste pour contenir six cents prĂȘtres et musiciens ; c'est le spectacle Ă©blouissant » de l'Assem- blĂ©e nationale, du trĂŽne royal, placĂ© pour ĂȘtre vu de tous, de la tribune oĂč est assise la reine tenant le dauphin sur ses genoux ; c'est le bruit des salves d'artillerie qui frappent l'Ăąme et l'oreille Ă©galement » ; c'est le concert de quatre cent mille voix, capable d'attendrir l'Ăąme la plus endurcie ». Si le beau temps n'est pas de la partie, si une pluie persistante mouille les fĂ©dĂ©rĂ©s jusqu'Ă  la peau, leur gaĂźtĂ© n'en est pas moins extraordinaire ». Le soleil, qui apparaĂźt vers midi, a vite fait de sĂ©cher les vĂȘtements et d'Ă©panouir les cƓurs. Bonnet a conscience qu'il jouit du plus 1 Arcli. comrn.. Baveux, Di ".Registre des dĂ©libĂ©rations, 1er juillet 1790. 3 /hiil., Caen. PiĂšces sur la RĂ©volution, carton 36. — Voir F. Mourlot, Impressions d'un darde national normand sur la FĂȘte de la FĂ©dĂ©ration, dans La RĂ©uol. française, t. LIV, p. 23-29. ESPÉRANCES FONDEES SUR L'AVENIR 495 beau spectacle qu'il y a sĂ»rement jamais eu dans l'univers » et que cette fĂȘte sera, sans contredit, une Ă©poque mĂ©morable dans les fastes de notre histoire . Cette impression fut celle de tous ses compagnons d'armes. En rapportant aux chefs-lieux de leurs dĂ©partements la banniĂšre fĂ©dĂ©rative qu'ils avaient reçue au Champ-de-Mars, les dĂ©putĂ©s de Basse-Normandie rentraient ivres d'illusions. L'avenir leur semblait plein d'heureuses promesses. Leur horizon politique s'Ă©tait subitement Ă©largi. DĂ©sormais, plus de gĂ©nĂ©ralitĂ© humiliĂ©e et passive sous la tutelle arbitraire d'un intrus indiffĂ©rent ou despote ; plus de province jalouse de ses franchises, isolĂ©e de ses voisines par une barriĂšre matĂ©rielle et morale ; plus de castes politiques et sociales se superposant dans une injuste hiĂ©rarchie ; gouverneurs, intendants, subdĂ©lĂ©guĂ©s, ordres privilĂ©giĂ©s, toutes ces formes du passĂ© s'Ă©vanouissant dans le lointain, comme les ombres d'un mauvais rĂȘve. Au lieu de l'obscur chaos, l'ordre et la lumineuse unitĂ©. Au bas, des milliers de municipalitĂ©s, urbaines et rurales, cellules vivantes de la grande citĂ© ; au-dessus, des conseils administratifs de districts et de dĂ©partements, judicieuse- ment recrutĂ©s dans leurs milieux immĂ©diats et parmi les citoyens les plus dignes ; au sommet, une AssemblĂ©e de lĂ©gislateurs, issue du libre choix de la nation et gardienne vigilante de ses libertĂ©s 0. Et, dans tous ces organismes, harmonieusement hiĂ©rarchisĂ©s, municipalitĂ©s, districts, dĂ©partements, nation, une mĂȘme vo- lontĂ©, une seule Ăąme, celle de la France. Jamais, depuis le com- mencement de son histoire, l'unitĂ© morale du pays n'avait Ă©tĂ© aussi complĂštement atteinte ; en la rĂ©alisant de façon tangible et si Ă©clatante, la fĂȘte de la FĂ©dĂ©ration l'avait cimentĂ©e d'un ciment indestructible. CĂ©lĂ©brĂ©e au moment prĂ©cis oĂč sombraient 1 Il y avait toutefois des ombres a ce srduisant tableau. Les partisans de l'ancien rĂ©gime n'avaient pas dĂ©sarmĂ©. Un pamphlet anonyme contemporain, au ton inju- rieux, allait exhaler leurs rancunes contre l'Ɠuvre de l'AssemblĂ©e constituante, en ces termes Depuis que votre roi est le premier salariĂ© de l'Etat, que son pouvoir est rĂ©duit Ă  proclamer les dĂ©crets de l'Ă©ternelle AssemblĂ©e, qne vous avez 1,200 rois qui commandent en tyrans, qui dĂ©truisent sans justice et sans pitiĂ©, qui crĂ©ent sous la direction de l'ignorance et de la folie, et que les dĂ©partements et districts sont implantĂ©s au milieu de vous, en ĂȘtes-vous plus libres et plus heureux ? » Cette vĂ©hĂ©- mente protestation, qui n'Ă©pargnait aucun des trois anciens ordres de l'AssemblĂ©e nationale, curĂ©s sans doctrine et avides, que l'appĂąt des richesses a corrompus, — nobles, aimables rouĂ©s, — avocats qui ont dĂ©shonorĂ© ce beau titre », et qui accu- sait le rĂ©gime nouveau de voler le temps du peuple qui se passait en Ă©lections de toutes sortes », indiquait assez nettement que si la RĂ©volution comptait en Norman- die d'ardents dĂ©fenseurs, elle devait s'y heurter aussi Ă  des adversaires irrĂ©duc- tibles. Adresse aux Normands par un Normand. 496 PORTÉE DE LA FÊTE DU 14 JUILLET 1790 des institutions sĂ©culaires, oĂč naissait un rĂ©gime administratif universellement acclamĂ©, elle semblait briller comme une aurore au seuil d'une Ăšre nouvelle ; grĂące Ă  cette heureuse coĂŻncidence de circonstances, le serment que les citoyens avaient prĂȘtĂ©, sur tous les points du pays, avait une double portĂ©e il confondait dans un commun enthousiasme le triomphe de deux causes indissolublement liĂ©es, celle de la patrie unifiĂ©e et indivisible, et celle de la RĂ©volution. CORDIER DE LA UN A Y TRADUCTEUR ET ROMANCIER 497 APPENDICE I ƒUVRES DE L'INTENDANT CORDIER DE LAUNAY 1° Nouvelle Traduction de l'Iliade en prose par Gordier de Lau- nay de Valeri. Paris, ThĂ©ophile Barrois, Nyon le jeune, 1782,2 vol. in-12, dĂ©diĂ© Ă  Monsieur, frĂšre du roi Bibl. nat., Yb 1063-1064. Cette traduction eut cinq Ă©ditions, ce qui n'en implique nulle- ment le succĂšs. La deuxiĂšme Ă©dition, en deux volumes in-8°, comprend le tome I, anonyme, publiĂ© en 1785, le tome II, portant le millĂ©- sime 1784 et intitulĂ© Traduction de V Iliade par M. de Launay, ValĂ©ry, M. D. R. maĂźtre des requĂȘtes, nouvelle Ă©dition revue, corrigĂ©e, augmentĂ©e de plusieurs notes par l'auteur et prĂ©cĂ©dĂ©e de Recherches historiques et philosophiques sur HomĂšre ». Paris, de l'imp. de Valade, chez Laurent. TroisiĂšme Ă©dition, sans date Traduction de Ylliade, par M. de Launay, ValĂ©ry, M. D. R., nouvelle Ă©dition, etc. . . A Paris, de l'imp. de Quiber Palissaux, rue et faubourg PoissonniĂšre, n° 2. QuatriĂšme Ă©dition Traduction de ĂŻ Iliade, par M. de Launay, ValĂ©ry, M. D. R., nouvelle Ă©dition, etc.. Paris, Michel, 1795, 2 vol. in-4°. CinquiĂšme Ă©dition. Paris, 1800, 2 vol. in-8°, tirĂ©s sur papier vĂ©lin, in-4°. 2° Discours prononcĂ© par l'intendant Cordier de Launay Ă  la sĂ©ance d'ou- verture de l'AssemblĂ©e provinciale de Basse-Normandie, 25 aoĂ»t 1787- ImprimĂ© dans le ProcĂšs-verbal de l'AssemblĂ©e. Bibl. nat., Lk 15/42, in-4°. AnalysĂ© ci-dessus, chap. IV, p. 59-60. 3° PanĂ©gyrique de la PitiĂ© opuscule non mis dans le commerce. 4° La Veuve de Catane, roman. Berlin, Ch. Ouien, 1803, in-8°. Bibl. nat. Y-2 24561. Ce roman est divisĂ© en trois parties l'Entrevue, p. 1-32 ; la DĂ©claration, p. 33-66 ; le Triomphe, p. 67-87. Le dĂ©but en est 32 198 OORDIER bE vu chitique littĂ©raire assez Ă©trange Les hommes de la plaine, Ă©crit l'auteur, ont l'Ăąme rase comme leurs demeures. Ceux des montagnes, au contraire, ont de l'Ă©lĂ©vation dans la pensĂ©e, de la profondeur dans le sentiment ». La fin n'en est pas moins bizarre Enfin, achevant de sortir comme par un bond de mon somnambulisme littĂ©raire, je me trouvai une plume dans une main, ce conte dans l'autre. Je les jetai tous deux avec dĂ©pit. Ah ! m'Ă©criai-je, fan- tomes de la nuit, pourquoi vous Ă©vanouissez -vous? Plume, instru- ment de mes illusions, je te dĂ©pose. PuissĂš-je n'ĂȘtre jamais conduit Ă  te reprendre que dans mes songes ! » 5° ThĂ©orie circonsphĂ©rique des deux genres de Beau, avec application Ă  toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts. Berlin, 1806, in-4°, VIII-282 p. et une carte. Paris, imp. Baudoin, 1812, in-8° Bibl. R 283?. Ce livre, dĂ©diĂ© Ă  S. M. I. Alexandre premier, empereur et autocrateur de toutes les Russies », porte comme Ă©pigraphe un verset de la Bible In anliquis est sapientia, el in multo lempure prudentia. Job, chap. XII, vers. 12. La sagesse est dans les vieillards, et le discernement est le fruit des longs jours. » Voici le thĂšme de cet ouvrage, bizarre d'inspiration et de titre, que Cordier de Launay fit imprimer Ă  500 exemplaires celui de la Bibl. nat. porte le n° 402. L'auteur dĂ©clare qu'il n'y a pas de beau unique, mais deux genres de beau, le beau d'imitation exacte et le beau composite. Pour le prouver, il en appelle Ă  toutes les mythologies, Ă  toutes les poĂ©sies, Ă  toutes les peintures, Ă  toutes les sculptures, Ă  toutes les architectures, Ă  toutes les musiques, enfin Ă  toutes les langues et Ă  toutes les bibliothĂšques de l'Univers». Cordier de Launay, dans un passage de ce livre, fait allusion Ă  ses anciennes fonctions et Ă  sa dĂ©chĂ©ance ; sa haine contre la RĂ©volution française s'y donne libre carriĂšre. J'ose le dire, spoliĂ© de toute ma fortune par des compatriotes Ă©garĂ©s et con- duits par des sacrilĂšges, des rĂ©gicides, des brigands, errant sur une terre Ă©trangĂšre, ignorant s'il me reste un seul parent et une Ă©pouse *, j'Ă©carte un opprobre passager du nom de ma patrie, je ne suis point honteux d'avoir reçu le jour en France.» 1 J'ai, depuis, appris que je ne l'avais plus » Note de l'auteur. — PĂ©tronille de la Lande Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ©e, le 26 prairial an III, aprĂšs l'Ă©migration de son mari ; elle avait demandĂ© le divorce pour faciliter la liquidation de ses droits et l'avait obtenu le 12 frimaire an II. Arch. dĂ©p., Orne, sĂ©rie O. g&quefitçe SON JUGEMENT SUR VOLTAIRE 199 La ThĂ©orie circonsphĂ©rique » consacre un long commentaire Ă  l'Apocalypse que l'auteur appelle le plus intelligent de tous les poĂšmes Ă©piques » et aussi un saint paravent composite ». Dans sa revue des littĂ©rateurs modernes, Cordier de Launay a formulĂ© sur Voltaire un jugement qu'il me paraĂźt intĂ©ressant de reproduire. Il y a Ă©tĂ© amenĂ© par la comparaison d'une tragĂ©die chinoise, intitulĂ©e Le petit Orphelin de la Maison de Tchao, Ă  laquelle il consacre une trĂšs minutieuse analyse, avec la tragĂ©- die que Voltaire a tirĂ©e du mĂȘme sujet et qu'il a intitulĂ©e L'Or- phelin de la Chine. Qui croirait, ajoute-t-il, que ce dĂ©licieux drame composite est le tableau original d'aprĂšs lequel Voltaire a fait son Gengis Khan, ou son Orphelin de la Chine ! Il laissa son original, en prit le nom et, brochant rapidement, grĂące Ă  son Ă©tonnante facilitĂ©, une sĂ©rie de maximes politiques, de fadeurs amoureuses, divisĂ©es en actes, en scĂšnes, dĂ©bitĂ©es par des hommes en casques, en cuirasses grecques et par des dames en grand panier, il a donnĂ© ce que nous avons vu, son prĂ©tendu Orphelin de la Chine. Cette tragĂ©die ressemble Ă  la Tartarie et Ă  la Chine comme son Alzire au PĂ©rou, son Mahomet Ă  l'Arabie. Quand on lit Athalie de Racine, on reconnaĂźt qu'avant de l'entreprendre Racine s'Ă©tait, pendant dix ans, pĂ©nĂ©trĂ© de la Bible et du costume judaĂŻque. Voltaire n'y mettait pas tant de façons. Epique Ă  18 ans, tragique jusqu'Ă  84, tous les six mois accouchant de quelque chef-d'Ɠuvre, il a estampĂ© le clinquant au lieu de ciseler lentement l'or. Cela est incomparablement plus tĂŽt fait et brille Ă©tonnamment les premiers jours. Le fĂącheux est que l'Ă©clat n'en est pas de longue durĂ©e. Dans le prodigieux nombre de volumes dont Voltaire a surchargĂ© les bibliothĂšques et gangrenĂ© son siĂšcle, un seul petit poĂšme, riche d'imagination et semĂ© d'agrĂ©a- blĂ©s dĂ©tails, peut subir l'examen rigoureux du connaisseur, et ce poĂšme burlesque, ordurier, travestit l'hĂ©roĂŻne de notre histoire en personnage de l'ArĂ©tin ou d'ApulĂ©e. PoĂšte laurĂ©at d'une capi- taie superficielle et corrompue, plus favorisĂ© de la nature en esprit qu'en cƓur et en raison, Voltaire se laissa ensoufrer de l'adulation publique et mit ses talents trĂšs rĂ©els, comme sa for- tune, en rentes viagĂšres. Au reste, je lui dois cette justice qu'il a ouvert, Ă  cet Ă©gard, les yeux quelques jours avant sa mort. Tout le peuple de Paris s'Ă©tait assemblĂ© Ă  la porte de la ComĂ©die oĂč il fut couronnĂ©, comme chacun sait. Le spectacle de cette multitude enthousiaste et ameutĂ©e par des intrigues, dont Ă  peine la moitiĂ© savait lire, dont peut-ĂȘtre pas un centiĂšme ne l'avait lu, lui apprit ce qu'aucune parole n'aurait pu lui faire 500 BIZARRERIE DE SES CONCEPTIONS LITTERAIRES entendre. Il sentit, en ce moment, le nĂ©ant futur de sa rĂ©putation. Je me trouvai quelques jours aprĂšs seul avec lui. On venait de a l'Ă©tourdir encore de fĂ©licitations et de flagorneries sur ce triom- a phe. Je ne disais mot, Il me prit la main et me dit HĂ©las ! j'ai lĂąchĂ© la proie pour l'ombre ! » Je fis semblant de ne l'avoir pas compris. Grand exemple de l'orgueil philosophique et littĂ©- raire ! » W. Si l'imagination de Cordier de Launay n'a pas fait tous les frais de cette anecdote, nous possĂ©dons lĂ  un curieux document sur les derniers jours du patriarche de Ferney. La fin de cet ouvrage contient des fautes de goĂ»t, dont voici un Ă©chantillon J'ignore comment on accueillera toutes ces nouveautĂ©s. Tromper mes chagrins, tel a Ă©tĂ© mon objet en les rĂ©digeant. Je suis lettrĂ©, point homme de lettres. J'ai traversĂ© les arts et les sciences pour arriver Ă  la sphĂšre de profession oĂč je devais me reposer, mais je ne m'y suis point arrĂȘtĂ©. Si, chemin faisant, j'ai jetĂ© des coups d'Ɠil autour de moi, si j'ai saisi dans une rĂ©gion de passage quelques rapports jusqu'Ă  prĂ©sent inaper- çus, si, par une thĂ©orie complĂšte, j'ai reculĂ© la borne mĂ©taphy- sique des connaissances humaines et prĂ©sentĂ© sous son vrai jour le dernier, le moins compris de nos livres saints, honneur Ă  Celui sous la main duquel nous ne sommes que des claviers, des tuyaux d'orgue! Quoi qu'on en dise ou qu'on en juge, voilĂ  des Ɠufs de ma pensĂ©e. Comme l'autruche, je les dĂ©pose dans le sable, et je les abandonne Ă  la fortune. » *2 6° Tableau topographique et politique de la SibĂ©rie, de la Chine, de la zone moyenne de l'Asie et du Nord de l'AmĂ©rique, par M. Cordier de Launay, intendant de justice, police et finances, de S. M. TrĂšs ChrĂ©- tienne en la province de Normandie, Ă  prĂ©sent conseiller d'Etat de S. M. Imp., empereur et autocrate de toutes les Russies. Louis Ouien, Berlin, 1806 tirĂ© Ă  400 exemplaires, aux frais de l'auteur. Bibl. ImpĂ©r. Saint-PĂ©tersbourg, 29 X, n° 1138, armoire IX. Communi- cation de M. Jules Goujon, Ă  Moscou. Cette plaquette, de 129 pages, porte en Ă©pigraphe Corona senum multa perĂŻlia et gloria illorum limor Dei. EcclĂ©siaste, c. XXV, vers. 25. Elle traite de questions ethnographiques, Ă©conomiques, politi- ques et sociales relatives Ă  l'Empire russe d'Asie, Ă  la Chine, Ă  la 1 Cordier de Launay, ThĂ©orie circonsphĂ©rique des deux genres de Beau, avec appli- cation Ă  toutes les Mythologies et aux cinq Beaux-Arts, p. 231-232. 2 Cordier de Launay, Ibid., p. 282. SA PLACE PARMI LES FOUS LITTERAIRES 501 Mongolie, Ă  la Tatarie » et au Canada. Chemin faisant, l'ou- vrage fourmille d'allusions Ă  la RĂ©volution française ; en voici trois caractĂ©ristiques. — 1° p. 15. Cordier de Launay parle de la dissolution dont la France nous offre en ce moment le plus hideux tableau ». — 2° p. 75. Nouvelle apostrophe Ă  la dissolution politique Non, ce n'est pas de la mort d'une Ă©pouse que je t'accuse; non, ce n'est pas le sang d'un frĂšre que je te redemande. Je te pardonne et le pillage de nos fortunes et l'incendie de nos demeures ». Suit une violente diatribe contre la RĂ©volution, l'exĂ©cution du roi, la dĂ©christianisation de la France et le culte de la Raison, accompagnĂ©e de menaces Ă  l'adresse de Paris, qui pĂ©rira comme Sodome et Gomorrhe ». — 3° A la fin du livre, p. 129 Le siĂšcle s'est terminĂ©, en France, par une dissolution vomitoire de brigands, de sacrilĂšges, de rĂ©gicides, de charlatans... Nuit orageuse, dans laquelle on n'aperçoit que le rapide trajet de quelques mouches phosphoriques... Triomphe de mort, oĂč tout se couvre de ces insectes, qui, nĂ©s de la putrĂ©faction, ne savent rien que pulluler, ronger et mourir sur un cadavre ». 7° Tables historiques, chronologiques el gĂ©nĂ©alogiques de toutes les IVIaisons princiĂšres de l'Empire de Russie, rĂ©digĂ©es en allemand sur les Archives ImpĂ©riales de Moscou, par MM. Millier, conseiller d'Etat, et baron de NicolaĂŻ, conseiller privĂ© ; traduites en français et augmentĂ©es par M. Cordier de Launay, conseiller de S. M. ImpĂ©- riale, et ci-devant intendant de S. M. TrĂšs ChrĂ©tienne en Norman- die. Saint-PĂ©tersbourg, 1805, ms. in-f°. Bibl. ImpĂ©r. Saint-PĂ©ters- bourg, IV F 169. Communication de M. Ardascheff, professeur Ă  l'UniversitĂ© de Kiev. Ces divers spĂ©cimens de la prose de Cordier de Launay sem- bleraient faire douter, non seulement du bon goĂ»t, mais du bon sens de l'auteur ; ils suffisent, en tout cas, Ă  expliquer pourquoi un Ă©crivain russe, M. Tcherpakoff, a offert l'hospitalitĂ© Ă  l'ancien intendant de Caen dans un ouvrage consacrĂ© aux Fous littĂ©- raires » U. 1 Tcherpakoff, Les Fous littĂ©raires, Moscou, 1883, 1 vol. in-12, p. 31-32. 502 1 \ PROPRIÉTÉ FONCIÈRE AUX PRIVILÉGIÉ APPENDICE II EXTRAITS DES CAHIERS PAROISSIAUX DES BAILLIAGES DE COUTANCES, VALOGNES, TORIGNI ET VIRE RELATIFS AUX DOLÉANCES AGRICOLES Nota. — Aux renseignements tirĂ©s des cahiers ruraux de dolĂ©ances, qui forment le contenu des trente-deux alinĂ©as de cet Appendice, j'ai cru bon d'ajouter, en note, des indications bibliographiques ayant trait Ă  d'autres documents contemporains. Il s'agit des Observations gĂ©nĂ©- rales » annexĂ©es aux Ă©tats d'imposition dressĂ©s par les municipalitĂ©s des dĂ©partements de Caen et de Vire, de juillet Ă  septembre 1788. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7817-8088. Ces documents fort intĂ©ressants, que M. BĂ©net a appelĂ©s les cahiers de 1788 », complĂštent le tableau de la situation Ă©co- nomique de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Caen pour une rĂ©gion assez vaste dont les cahiers de 1789 ont presque tous disparu dĂ©partements de Caen et de Vire. Sur la possession des propriĂ©tĂ©s fonciĂšres par les privilĂ©giĂ©s. La communautĂ© d'Acqueville, malgrĂ© son peu de revenu et d'Ă©tendue, est affaiblie sic de deux seigneurs, d'oĂč elle relĂšve, avec plusieurs nobles ou exempts qui en emportent tant en fonds qu'en rentes au moins le tiers de son revenu. » Acqueville. — Les deux tiers des biens-fonds de notre paroisse sont possĂ©dĂ©s en propre par deux seigneurs possĂ©dant fief, par plusieurs autres personnes nobles, prĂȘtres, moines, privilĂ©giĂ©s et exempts. » Gatte- ville. — Le seigneur possĂšde presque la moitiĂ© de la paroisse, ce qui fait que les habitants sont trĂšs pauvres. » Herqueville. — Les deux tiers du revenu de cette misĂ©rable paroisse sont possĂ©- dĂ©s par les seigneurs nobles et ecclĂ©siastiques tant en fonds qu'en rentes et dĂźmes.» Montfarville. — La communautĂ© est affaiblie par trois seigneurs dont elle relĂšve, avec les nobles et exempts, qui emportent tant en fonds qu'en rentes presque les trois quarts RENTES GREVANT LA PETITE PROPRIÉTÉ FONCIÈRE 503 du revenu d'icelle. » Vasteville. — La paroisse est composĂ©e de 90 feux, fournissant environ 460 personnes, d'oĂč il suit que chaque propriĂ©taire qui l'habite n'a que de trĂšs faibles propriĂ©tĂ©s ; et pour le prouver en peu de mots, il suffit de dire qu'il n'y a dans toute la paroisse que deux habitants qui aient chacun un harnais complet. » Chantelou. — La communautĂ©, composĂ©e de 60 feux, ne possĂšde que la moitiĂ© des fonds ; le reste apparte- nant au seigneur du lieu. » Heranguerville. — Le seigneur possĂšde plus du tiers de la paroisse.» Montagu. — L'abbaye du Mont- Saint-Michel possĂšde au moins les deux tiers de la paroisse... » Saint- Jean-des-Champs. — La paroisse n'est habitĂ©e que par 14 particuliers possĂ©dant fonds ; chacun d'eux n'y est propriĂ©taire que de trĂšs peu de terrain. » Saint-Martin-le-Vieux. — Cette paroisse contient Ă  peu prĂšs 1100 acres, dont environ 700 acres dans les cantons les plus fertiles, appartenant Ă  des seigneurs gentilshommes, ecclĂ©siastiques et autres privilĂ©giĂ©s. » Landelles- et-Coupigny. — La paroisse est presque Ă  moitiĂ© possĂ©dĂ©e par Mme la marquise de Longaunay, et il n'en revient pas un sixiĂšme aux propriĂ©taires... » Septvents. ' Sur les rentes qui grevaient la petite propriĂ©tĂ© fonciĂšre. Notre malheureuse communautĂ© est accablĂ©e d'un grand nom- bre de rentes dues Ă  diffĂ©rents seigneurs, tant ecclĂ©siastiques que laĂŻques... » Picauville. — Nous comptons 14 privilĂ©giĂ©s gen- tilshommes dans la paroisse, possĂ©dant les grandes terres, et en outre, nous payons au seigneur seul 1,800 boisseaux de blĂ© et autres redevances, sans aucune diminution de dixiĂšme. » Surtain- ville. — La paroisse doit un nombre considĂ©rable de rentes en blĂ© et en argent, tant au domaine de Valognes qu'Ă  l'abbĂ© et aux religieux de Lessay et aux diffĂ©rents seigneurs...» Saint-LĂŽ- d'Ourville.— La paroisse est chargĂ©e de plus de 3,400 livres de rentes seigneuriales, dues au seigneur prince de Monaco, et de 250 dues Ă  l'abbaye de Hambye. » BrĂ©hal. — La paroisse de 1 Voir les mĂȘmes observations pour les paroisses d'Argences, Bellengreville Bonnemaisons, Canteloup, Carcagny, Courseulles, FrĂ©nouville, Maisoncelles-sur- Ajon. Tailleville, Verson, etc. dĂ©partement de Caen, Arch. dĂ©p., Calvados, C 7823. 7833, 7844, 7861. 7862, 7877, 7898, 7932, 7991, 8008 ; — de Saint- Martindon, Saint- Vigor-des-MĂ©zerets dĂ©partement de Vire, Ib'ul, C 8072, 8075, 8079. 5Ô4 RENTES GREVANT LA PETITE PROPRIÉTÉ FONCIERE Hugueville Ă©numĂšre ainsi les charges dont elle est maculĂ©e Elle paie au domaine de S. A. S. Mgr le duc d'OrlĂ©ans 80 bois- seaux de froment ; aux dames religieuses hospitaliĂšres de Cou- tances, 522 boisseaux de froment et de menues rentes ; Ă  la sieurie d'Hugueville, 160 boisseaux de froment et 25 boisseaux d'orge et avoine et de menues rentes ; Ă  la sieurie de Montfort, 110 bois- seaux de froment et de menues rentes ; Ă  ia sieurie de CondĂ©, 20 boisseaux de froment ; Ă  l'Ă©glise cathĂ©drale de Coutances, aux religieux dominicains de la dite ville et autres particuliers privi- lĂ©giĂ©s, 150 boisseaux de fromenl, ce qui donne en total 1042 bois- seaux de froment et 25 boisseaux d'orge et avoine sans compter les menues rentes, et 4,000 livres de rentes fonciĂšres en argent aux Ă©glises et Ă  diffĂ©rents particuliers privilĂ©giĂ©s...» Hugueville, 122 feux. — La paroisse est considĂ©rablement chargĂ©e en rentes seigneuriales,., et autres charges, tant en froment, qu'avoine, brebis, porcs, chapons, poules, gĂ©lines, Ɠufs et argent, toutes ces rentes valent annĂ©e commune 3,000 livres.» Montaigu-les-Bois. — Le peu de terrain possĂ©dĂ© par les habitants de cette paroisse est encore grevĂ© de beaucoup de rentes seigneuriales et fonciĂšres, au point que les propriĂ©taires en plus grand nombre ne sont guĂšre que fermiers du terrain qu'ils ont dans les mains.» Saint -Martin- le-Vieux. — Il y a dans la paroisse de Tourville 7 fiefs, dont relĂšvent les fonds des habitants ; ils doivent aux diffĂ©rents sei- gneurs de ces fiefs payer tous les ans les rentes qu'ils doivent en argent ; ils sont Ă©galement obligĂ©s de payer les rentes qu'ils leur doivent tant en froment, avoine, qu'eeufs, volailles, pain et autre- ment. En apprĂ©ciant le tout Ă  raison de l'apprĂ©cis des 5 derniĂšres annĂ©es, ils se trouvent qu'ils doivent annuellement la somme de 2,569 livres 1 sol... Il est dĂ» tous les ans Ă  MM. du chapitre, aux RĂ©vĂ©rends frĂšres prĂȘcheurs, Ă  l'hĂŽtel Dieu de Coutances, et Ă  autres diffĂ©rents particuliers Ă©trangers, la somme de 3,783 1. 19 s. 9 d. pour rentes fonciĂšres, tant en argent que froment, sans comprendre les rentes hypothĂšques dont ils sont grevĂ©s. » Tour- ville, 178 feux. — Nos terres ne sont pour ainsi dire que des fiefs que nous tenons de M. l'abbĂ© de Saint-LĂŽ, auquel nous faisons des rentes seigneuriales considĂ©rables. Nous n'avons pas, dans la paroisse, dix vergĂ©es de terre qui n'en soient maculĂ©es.» Saint- Evremond-de-la-Barre. — La paroisse paie au moins 6,000 liv. de rentes seigneuriales...» Landelles-et-Coupigny. W 1 Voir les mĂȘmes observations faites en 178S par lc 8 Sur la pĂ©nurie de la main-d'Ɠuvre agricole, occasionnĂ©e par les travaux de Cherbourg. L'agriculture de nos cantons est nĂ©gligĂ©e pour les ouvrages de Cherbourg, par faute d'ouvriers.» Theurteville-en-Bocage. — Les travaux de Cherbourg dĂ©peuplent les ouvriers de cette paroisse, de sorte que le cultivateur manque des secours pour ses opĂ©rations.» Valcanville. — Que Sa MajestĂ© fasse descendre des troupes pour la perfection des ouvrages qu'elle entreprend Ă  sa ville de Cherbourg, sans pouvoir prendre aucun des naturels du pays, attendu que l'agriculture a singuliĂšrement souffert de la dĂ©sertion des laboureurs et domestiques du canton.» Saint- Martin-d'Andouville. — Le cultivateur [est] chargĂ© d'impĂŽts qui chaque jour deviennent plus insupportables, surtout cinq ou six lieues autour de Cherbourg. Les travaux de cette ville occupent presque tous les bras de cette malheureuse contrĂ©e, de telle maniĂšre que les domestiques manquent et deviennent d'un prix si grand que la culture est presque totalement nĂ©gligĂ©e par l'impuissance oĂč se trouvent les cultivateurs de les payer Ă  leur taux. » Carneville. 2 9 Sur la pĂ©nurie de la main-d'Ɠuvre agricole, occasionnĂ©e par la milice. Cette communautĂ© ne peut trop marquer son amertume du genre de violence qui tous les ans y ĂŽte aux infortunĂ©s vieillards 1 Les plaintes abondaient dĂ©jĂ  en 1788. Voir Ă©tats d'imposition d'Hermanville Mathieu, Rocquencourt dĂ©partement de Caen, Arch. dĂ©p., Calvados, C 7913, 7935 7963, et surtout des paroisses du Rocage virois, fort Ă©loignĂ©es des pays producteurs de tangue et de chaux Ă©tats d'Annebecq, RĂ©ny-Rocage, Coulonces, Courson, Perri gny, Presles, Rully, Saint-Denis-Maisoncelles, Saint-Manvieux, Sainte-Marie-Lau- mont, Sainte-Marie-Outreleau, Le Theil, Le Tourneur, Truttemer dĂ©partement de Vire, Arch. dĂ©p., Calvados, C 8014, 8020, 8030, 8032, 8051, 8060, 8066, 8069, 8073, 8080, 8081, 8082, 8083,8084. 2 Sur la pĂ©nurie et la chertĂ© de la main-d'Ɠuvre, voir les Ă©tats d'imposition de 1788 pour Raron,Colleville, Hermanville, Champ-du-Roult. Ibid., C 7830,7871,7913, 8026. 510 ' LES MÉFAITS DE LA MILICE leur unique soutien, et des bras Ă  l'agriculture, dans les jeunes gens qu'on lĂšve par la voie du sort, ou pour servir en qualitĂ© de canonniers garde-cĂŽtes, ou pour ĂȘtre embarquĂ©s sur les vaisseaux de Sa MajestĂ©. » Saint-Martin-le-Vieux. - — On sait que pour cultiver la terre il faut des bras ; souvent dans cet endroit et en temps de guerre on en manque, presque la plupart des hommes sont employĂ©s sur mer soit au service du Roi ou Ă  celui du mar- chand.» Tourville. — L'agriculture souffre et a beaucoup souffert depuis qu'on a enlevĂ© un grand nombre d'hommes sur nos cĂŽtes pour canonniers-matelots, parmi lesquels il s'en trouve qui sont obligĂ©s d'abandonner leur terre et la laisser sans culture. » Helle- ville. — On fait tirer au sort ensemble pour les deux sortes de services levĂ©e des canonniers garde-cĂŽtes et matelots auxiliaires, les propriĂ©taires, les fermiers, avec les artisans et ouvriers, sans distinction ; ...le propriĂ©taire et le fermier, si le sort les force de partir pour des embarquements Ă©loignĂ©s, sont obligĂ©s d'aban- donner des exploitations qu'ils ne trouvent pas mĂȘme toujours Ă  confier Ă  des mains sĂ»res. » RĂ©ville. 10 Sur l'exemption de milice accordĂ©e aux domestiques. Que les milices, au moins en temps de paix, soient supprimĂ©es. Il est dĂ©solant pour les campagnes que le danger du sort force les jeunes gens bien constituĂ©s Ă  les fuir, pour prendre le parti d'ĂȘtre laquais ou domestiques chez des ecclĂ©siastiques, nobles ou privi- lĂ©giĂ©s Ă  un mĂ©diocre prix, et que les. cultivateurs soient obligĂ©s de payer un domestique frois ou quatre fois le prix qu'ils le paie- raient sans cette considĂ©ration. » Le Ham. — La noblesse et le clergĂ© nourrissent pendant cinq ou six mois, avant et aprĂšs les tirages de la milice, un grand nombre de domestiques inutiles, parce qu'ils sont exempts de tirage et de tout service dĂ» au roi. » Pierreville. — La crainte de la milice fait qu'un jeune homme qui se donnerait Ă  la culture de la terre... quitte son champ, et va chercher chez un maĂźtre riche une exemption que sa petite for- tune ne lui donne point, et offre parfois ses sueurs aux condi- tions seulement d'ĂȘtre exempt. On accorde Ă  un seigneur dix, vingt laquais, qui ne travaillent Ă  rien d'utile, et on refuse un ou deux domestiques Ă  un laboureur qui ne peut s'en passer on lui refuse mĂȘme souvent son enfant. Sauxemesnil. — La milice fait dĂ©serter les campagnes, la capitale est remplie de beaux TAILLE INIQUEMENT ttEPARTÏË, DUREMENT PERÇUE .Ml hommes inutiles, qui ne servent qu'Ă  soutenir et relever le faste des petits maĂźtres dont ils dĂ©corent les antichambres. L'habit de livrĂ©e, contre lequel son valet de harnais n'aurait pas voulu changer sa souquenille, est devenu un habit respectable en ce qu'il exempte de la milice. » Surtainville. Sur l'injustice de la rĂ©partition de la taille. La taille, tant qu'elle a Ă©tĂ© soumise aux collecteurs, n'a pu ĂȘtre rĂ©partie avec Ă©quitĂ© ; les uns, c'Ă©tait vengeance, les autres craignaient le retour, les autres, c'Ă©taient des amis. »Digosville. — L'exemption des tailles... exercĂ©e jusqu'ici parles ecclĂ©siastiques, les nobles, les officiers de justice et autres qui se disent privilĂ©- giĂ©s, a tellement grevĂ© et surchargĂ© les laboureurs et autres sujets du roi, qu'ils peuvent Ă  peine fournir Ă  l'acquit des impositions et Ă  leur subsistance. »Biville. — La paroisse se plaint de l'Ă©nor- me surcharge de sa contribution Ă  la taille, contre laquelle elle a rĂ©- clamĂ© sans fruit depuis bien des annĂ©es.» Carantilly.— La paroisse est chargĂ©e d'impositions plus qu'aucune paroisse de l'Ă©lection ; si quelquefois il y a eu modĂ©ration dans l'Ă©lection, les paroisses protĂ©gĂ©es par ceux qui ont accĂšs auprĂšs de M. l'Intendant lors du dĂ©partement des tailles en ont profitĂ©. » Quettreville. — La taille est devenue un impĂŽt effrayant pour les malheureux cultivateurs... Si le fardeau Ă©tait partagĂ© Ă©galement entre tous les habitants et propriĂ©taires de fonds, il en deviendrait plus facile Ă  supporter ; mais il n'est pas un impĂŽt qui ne tombe sur le roturier, il en est une grande partie dont le clergĂ© et la noblesse sont exempts. » Surtainville. — Le cahier de Landelles-et-Cou- pigny donne d'intĂ©ressants dĂ©tails sur l'Ă©normitĂ© de la proportion delĂ  taille...!l 12 Sur la duretĂ© de la perception de la taille. Que le cultivateur ne soit plus dĂ©sormais contraint au paiement des deniers royaux par le dĂ©pĂŽt d'un invalide chez lui ; c'est une 1 Les plaintes Ă©taient dĂ©jĂ  trĂšs nombreuses en 1788 sur cette matiĂšre. J'en trouve dans 47 paroisses du dĂ©partement de Caen et dans ->tj paroisse- du dĂ©partement de Vire. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7817-8088 passim. 512 ASSIETTE ARBITRAIRE DES VINGTIÈMES vexation horrible. »Fres ville.— On trouve une surcharge dans... les courses des huissiers des tailles qui n'ont d'autre fin que multiplier les frais Ă  la charge du collecteur et du prĂ©posĂ©, dans renvoi des invalides dont la vacation est excessive pour des gens d'ailleurs soldĂ©s par l'Etat. »La Pernelle. — La paroisse demande qu'Ă  l'Ă©gard des garnisonniers, qui viennent ordinairement dans les paroisses pour les contraindre au paiement des impositions des tailles, que leur honoraire soit rĂ©duit aux 10 sols et leur nour- riture, ou 20 sols pour tout. Ces sortes de personnes, qui restent le plus souvent Ă  la charge des collecteurs, aggravent considĂ©rable- ment leur sort. » Saint-Christophe-du-Foc. — Qu'on diminue les frais immenses de la perception des impĂŽts, et qu'on adou- cisse les rigueurs de la contrainte contre les pauvres qui ne peuvent payer. » Bricqueville prĂšs la mer. 13 Sur l'assiette arbitraire des vingtiĂšmes. La grande disproportion qui a toujours rĂ©gnĂ© dans les vingtiĂš- mes est venue de ce que ceux qui faisaient cette rĂ©partition ne connaissaient pas les paroisses.» Digosville. — Que les commis- saires ou vĂ©rificateurs des vingtiĂšmes devront Ă  jamais abolir leur ignorance, leur arbitraire, leur maniĂšre d'opĂ©rer n'ayant que multipliĂ© les abus, l'inĂ©galitĂ© des cotes, avec une multiplicitĂ© de vexations qu'il serait trop long de dĂ©tailler. » Yvetot. — Saint- Martin-du-Mesnil se plaint d'ĂȘtre la seule paroisse avec celle de Pierreville qui ont Ă©tĂ© vĂ©rifiĂ©es au pied la perche, et d'ĂȘtre par lĂ  considĂ©rablement augmentĂ©e, quoiqu'elle soit peut-ĂȘtre celle de toute la province la moins susceptible d'augmentation. — Pierre- ville consacre la plus grande partie de son cahier Ă  la reproduction de plaintes dĂ©jĂ  anciennes sur la surcharge exorbitante de ses vingtiĂšmes, qui, en l'espace de dix ans, avaient subi une crue de 3,262 livres. U 1 En 1788, plusieurs paroisses des dĂ©partements de Caen et de Vire, rĂ©cemment vĂ©rifiĂ©es, se plaignent aussi de l'augmentation de leurs vingtiĂšmes. Ce sont Saint' Contest, Beaumesnil, Sainl-Marlindon, Saint-Sever et Vaudry. Arch. dĂ©p., Calva dos, C 7970, 8019, 8075, 8078 et 8086. l'injustice de la corvĂ©e 513 14 Sur l'iniquitĂ© et le mauvais emploi de la prestation de la corvĂ©e. L'impĂŽt reprĂ©sentatif de la corvĂ©e pour la confection et entre- tien des routes ne doit point, comme il a Ă©tĂ© pratiquĂ© jusqu'ici, ĂȘtre portĂ© sur le Tiers Ă©tat seul. Ce sont les grands propriĂ©taires qui profitent le plus en toutes maniĂšres des routes ; les seules lumiĂšres de la raison et de l'Ă©quitĂ© naturelle dictent assez qu'ils doivent donc contribuer Ă  leur entretien, Ă  raison de leurs pro- priĂ©tĂ©s.» Breuville. Il se commet de grands abus dans la percep- tion des impĂŽts qu'on paie pour l'entretien des grandes routes; on payait la moitiĂ© moins pour les faire toutes neuves qu'on ne paie maintenant pour les entretenir. » HĂ©mevez. — Que le clergĂ© et la noblesse soient dans le cas de concourir Ă  la confection, rĂ©paration et entretien des chemins. » Urville prĂšs Valognes. — Que les deniers levĂ©s pour la confection et entretien des chemins ne soient employĂ©s que pour les chemins les plus voisins des lieux oĂč lesdits deniers auront Ă©tĂ© levĂ©s. » Belval.— Depuis l'imposition des cor- vĂ©es pour la confection des grandes routes, lebourg de Gavray etles paroisses du canton ont toujours payĂ© des sommes trĂšs considĂ©- rables,, sans qu'ils aient eu l'avantage des grandes routes, quelques rĂ©clamations qu'ils aient faites.» Gavray -bourg. — L'on voit cer- tains abus dans l'application des deniers publics destinĂ©s Ă  la confection des grandes routes et autres ouvrages utiles au public, et l'on distrait journellement partie de ces deniers pour les em- ployer Ă  des ouvrages qui ne sont absolument que pour la com- moditĂ© de quelques particuliers.» Montchaton.— Depuis l'Ă©poque oĂč on a commencĂ© Ă  ouvrir des routes nouvelles, cette paroisse a toujours eu la douleur de contribuer Ă  la prestation des impĂŽts levĂ©s pour leur confection, sans avoir eu l'avantage de pouvoir s'en servir. » Percy. — Nous voyons avec douleur que depuis plus de 38 ans que nous payons des sommes considĂ©rables pour les grandes routes, il y en a cependant trĂšs peu de faites dans notre Ă©lection.» Rampan. — On a attentĂ© Ă  la propriĂ©tĂ©... en Ă©tendant d'abord la corvĂ©e et ensuite la prestation en argent reprĂ©senta- tive de la corvĂ©e Ă  des chemins peu utiles au public ou de pur agrĂ©ment pour de simples particuliers, pendant qu'on nĂ©glige les plus nĂ©cessaires Ă  l'agriculture et au commerce.» La BloutiĂšre.^ 1 Voir les plaintes des municipalitĂ©s de 1788 dans les Ă©tats d'imposition d'Am- blie, Bavent, Colombelles. Colomby, PrĂ©aux, Saint-Sylvain, Troismonts dĂ©parte- ment de Caen ; Courson, Lassy et Mesnil-Robert dĂ©partement de Vire Arch. dĂ©p., Calvados, C7820, 7832, 7872, 7873, 7958, 7983, 8001, 8032, 8042 et 8048. 33 514 ARBITRAIRE DES IMPOSITIONS SPÉCIALES A LA GENERALITE 15 Sur l'impĂŽt territorial et sur l'impĂŽt des bĂątiments de justice. On a attentĂ© Ă  la propriĂ©tĂ© en... assujettissant le gĂ©nĂ©ral d'une province Ă  une charge locale qui ne devrait regarder que les habitants de la ville, du port ou du canton qu'elle peut seule- ment intĂ©resser, comme entre autres les juridictions de Gaen auxquelles la paroisse ne ressortit pas et pour la reconstruction desquelles elle est nĂ©anmoins imposĂ©e. » La BloutiĂšre. — La paroisse paie encore pour la rĂ©fection des ports de Granville et des prisons de Caen dont elle est Ă©loignĂ©e de vingt lieues au moins. » Flottemanville prĂšs Valognes. — Nous payons un impĂŽt pour l'entretien des bĂątiments de justice et prisons, et nous voyons, tant Ă  Torigni qu'Ă  Saint-LĂŽ, qu'on n'y fait aucune rĂ©paration ; que les criminels s'Ă©vadent des prisons de ces deux endroits qui sont dans le plus mauvais Ă©tat. » Rampan. 16 Sur les abus dans la perception des aides et gabelles. 1° Gabelles et quart-bouillon. — Les entraves qu'on donne [Ă  l'habitant] pour se procurer le sel dont il a besoin pour sa consommation sont innombrables il faut dĂ©clarer de combien de personnes son mĂ©nage est composĂ©, qu'il n'y comprenne pas les enfants en dessous de 8 ans, en eĂ»t-il six Ă  sept, qu'il signe sa dĂ©claration, ou fasse attester par deux tĂ©moins ; que le curĂ© et les collecteurs s'y joignent, qu'il paie trois feuilles de papier timbrĂ© pour la moindre provision, qu'il ne la transporte que depuis le lever jusqu'au coucher du soleil ; s'il en cĂšde une lĂ©gĂšre portion Ă  un malheureux voisin qui n'a pu lever la sienne, il sera ruinĂ© ou condamnĂ© aux galĂšres. » Carantilly. — Pour montrer les affreuses vexations que les pauvres habitants des paroisses situĂ©es sur le bord de la mer Ă©prouvent de la part des tyranniques suppĂŽts de la gabelle, on citera l'exemple de plusieurs nĂ©cessi- teux de cette paroisse qui, rencontrĂ©s avec quelques bouteilles d'eau de mer, ont Ă©tĂ© maltraitĂ©s par ces employĂ©s et rançonnĂ©s, les uns Ă  six francs, les autres Ă  douze. » Le Rozel. — Parlerons- nous des vexations de la ferme gĂ©nĂ©rale ? HĂ©las, sous un roi bien- faisant, bon, pĂšre de son peuple, un malheureux habitant du bord Les \iujk des aides et gabelles 515 de la mer, qui n'a pas moyen d'acheter du pain, encore moins du sel, s'en va puiser une seule bouteille pour saler sa soupe il est arrĂȘtĂ©, rançonnĂ©, quelquefois battu par les gardes de la ferme. Oui, il faut ĂȘtre sur les lieux, pour pouvoir se reprĂ©senter la duretĂ© de ces sangsues un malheureux pĂšre de famille, dont le fils Ă©tait attaquĂ© d'Ă©crouelles, fut arrĂȘtĂ© avec une pinte d'eau de mer qu'il devait faire boire Ă  son enfant. » Surtainville. D 2° Aides et droits y rĂ©unis. — Qu'il soit apportĂ© un adoucisse- ment aux lois dures qui ne permettent pas que de pauvres familles de campagne, souvent sans pain, aillent, quoique Ă©loi- gnĂ©es quelquefois d'une auberge ou d'un cabaret d'une lieue, chercher chez un habitant du lieu un pot de cidre soit Ă  prix d'argent, soit Ă  titre d'aumĂŽne, pour cause de maladie ou pour d'autres besoins, sans ĂȘtre exposĂ©es, soit Ă  une amende pĂ©cu- niaire, soit Ă  une punition corporelle. » Clitourp. — Les perqui- sitions journaliĂšres des employĂ©s aux aides dans nos habitations, Ă  visiter les endroits les plus cachĂ©s sous diffĂ©rents prĂ©textes, nous glacent le cƓur et l'Ăąme... Nous sommes prĂȘts Ă  faire le sacrifice du quart de nos biens pour bannir Ă  jamais les traitants... de nos foyers. Cela conserverait bien la vie Ă  beaucoup d'hom- mes ; et combien de femmes enceintes qui se blessent Ă  l'aspect de ces satellites toujours grondants et menaçants. »Hainneville. — Les importations de toutes espĂšces de productions, denrĂ©es, ouvrages, marchandises, vins, biĂšres, cidres, poirĂ©s, grains, grenailles, fourrages doivent ĂȘtre permises dans tous les lieux du royaume et dĂ©gagĂ©es des dĂ©clarations, congĂ©s, visites et droits gĂ©nĂ©ralement quelconques. » Bricqueville-la-Blouette. J7 Sur les frais occasionnĂ©s par l'entretien des presbytĂšres. La communautĂ© reprĂ©sente qu'Ă  joindre Ă  toutes ses charges la plus onĂ©reuse, quoi qu'accidentelle, est l'entretien ou recons- truction des presbytĂšres. » BrĂ©hal. — On voit avec douleur que 1 On trouve de nombreuses plaintes contre les vexations de L'impĂŽt du sel dans les Ă©tats d imposition de 1788 paroisses d'AinayĂ©-sur-Sculles, BĂ©nmiville. BiĂ©ville- sur-Orne, Blainville, BourguĂ©bus Maisoneelles-Pelvey, Saint-Georges-d'Aunay. Saint-Louet-sur-Seulles, Toufl'rĂ©ville, Tracy-Bocage, Valcongrain, Villers- Bocage dĂ©partement de Caen et Saint-Pierre-la-Vieille dĂ©partement de Vire. Arch. dĂ©p.. Calvados, C 7819, 7835, 7839, 7843, 7847, 7891, 7931, 7973, 797G, 79%, 7999,8103, 9010 et 8076. 516 frais d'entretien des presbytĂšres MM. les curĂ©s exigent que leurs paroissiens leur fassent des pres- bytĂšres quelquefois plus beaux que des chĂąteaux, qui coĂ»tent des sommes immenses,, ce qui met fort souvent de pauvres paroissiens dans la derniĂšre misĂšre, pendant que MM. les curĂ©s et bĂ©nĂ©ficiers sont dans l'opulence. » Mesnil-Bonnant. — Nos dĂ©putĂ©s reprĂ©senteront combien il est onĂ©reux pour les paroisses d'ĂȘtre obligĂ©es de bĂątir les presbytĂšres Ă  leurs frais, et combien il rĂ©sulte d'abus Ă  cet Ă©gard. On est presque obligĂ© de les recons- truire Ă  chaque mutation ; les architectes nommĂ©s par les paroisses pour faire les visites sont intĂ©ressĂ©s Ă  ce qu'il se fasse des recons- tructions ; Ă  ce moyen, le plus petit dĂ©faut les fait dĂ©clarer mau- vais un ouvrage qui pourrait subsister cent ans...»Saint-Nicolas- de-Granville. — Que les possĂ©dant -fonds soient dĂ©chargĂ©s de la reconstruction et de l'entretien des presbytĂšres, en considĂ©ration de ce que les curĂ©s, ordinairement les plus riches de leurs pa- roisses, sont plus en Ă©tat d'en faire la dĂ©pense que les propriĂ©- taires chargĂ©s d'impĂŽts et souvent de famille ; d'ailleurs les curĂ©s veilleront mieux Ă  leur entretien. La communautĂ© en Ă©prouve aujourd'hui toute la rigueur et la charbe, ayant Ă  payer pour la reconstruction de son presbytĂšre une somme de 3,000 livres. » Acqueville. — AprĂšs la mort d'un curĂ©, son successeur ruine quelquefois une paroisse, pour rĂ©parer et mettre Ă  neuf un pres- bytĂšre. » Herqueville. — La paroisse se trouve maintenant dĂ©solĂ©e par une surcharge qui lui tombe pour rĂ©paration de son presbytĂšre qui se monte Ă  une somme de 2,000 livres et plus. » La Ghapelle-au-Moine. l 18 Sur les dĂźmes. Nous demandons la suppression des dĂźmes en accordant Ă  MM. les curĂ©s du royaume une pension honnĂȘte et suffisante... Si les Etats gĂ©nĂ©raux conviennent Ă  continuer les dĂźmes, qu'elles soient rĂ©glĂ©es d'une maniĂšre certaine, particuliĂšrement les inso- lites, et qu'elles soient payĂ©es conformĂ©ment Ă  l'arrĂȘt du Parle- ment de 1784. » Baudreville. — L'impĂŽt des dĂźmes, qui, bien 1 Voir ces mĂȘmes plaintes dans les Ă©tats d'imposition des municipalitĂ©s d'Authie, BourguĂ©bus, Canteloup, Mouen, Saint-Laurent-de-Condel dĂ©partement de Caen ; Ardais, Courson, La Rocque, Saint-Jean-le-Blanc, Sainte-Marie-Outreleau et Le Theil dĂ©partement de Vire. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7826, 7817, 7861, 7944, 7975, 8015, 8032, 8063, 8072, 8081 et 8082. LES DÎMES 517 apprĂ©ciĂ©, comprend le cinquiĂšme, mĂȘme le quart des productions de chaque paroisse, demande qu'il soit modifiĂ©, de maniĂšre qu'il soit moins onĂ©reux au peuple, dĂ©jĂ  beaucoup surchargĂ© d'im- pĂŽts. » Breuville. — Les gros dĂ©cimateurs, dans la majeure partie de nos paroisses du Bocage, ont Ă  peu prĂšs un sixiĂšme du revenu, et ne nous donnent que peu de secours. » Theurteville- au-Bocage. — Les dĂźmes emportent le produit effectif du cin- quiĂšme au moins des fonds en culture...» Annoville-Tourneville. — On paie dans cette paroisse les dĂźmes Ă  l'onziĂšme. »Tourville. — Le sieur abbĂ© de Cherbourg, ainsi que MM. les chanoines de Coutances, possĂšdent Ă©galement toutes les grosses dĂźmes sans payer aucun impĂŽt et sans faire aucun secours. » Gatteville. — [La communautĂ©] ne voit pas avec moins de peine un gros dĂ©ci- mateur enlever annuellement la moitiĂ© des dĂźmes de sa paroisse, sans y faire aucune aumĂŽne, ni contribuer Ă  ses charges.» Saint- Maurice. — Les mercredis de chaque semaine, Ă  l'issue du catĂ©- chisme, il y a plus de 60 ou 70 enfants Ă  l'aumĂŽne du curĂ©, qui ne jouit que d'un sixiĂšme des grosses et partie des menues dĂźmes de la paroisse ; le surplus appartient aux religieux de Savigny, ordre de Citeaux, diocĂšse d'Avranches, et Ă  l'abbaye des cha- noines rĂ©guliers de Saint-LĂŽ, qui n'ont jamais donnĂ© la moindre chose aux pauvres de cette paroisse, ni fait aucun bien.» Quettre- ville.— Les sieurs religieux de l'abbaye de Belle-Etoile, Ă©loignĂ©e de ladite paroisse de quinze lieues, Ă©tant propriĂ©taires des deux tiers [des dĂźmes], ne font aucune espĂšce de charitĂ© aux pauvres, et ne chargent pas les fermiers de les faire.» Mesnil-Villeman. — Que toutes dĂźmes insolites, telles qu'elles puissent ĂȘtre, Ă  l'excep- tion uniquement des dĂźmes de froment, seigle, orge, avoine soient supprimĂ©es. » Saint-Martin-de-BonfossĂ©. — Que les dĂźmes... soient restreintes, surtout relativement aux insolites, qui pour la majeure partie sont de pure usurpation. » Fresville. — Que l'on fasse cesser la diversitĂ© de jurisprudence sur la perception de l'impĂŽt dĂ©cimal, et que les fruits rĂ©coltĂ©s en vert et en sec, desti- nĂ©s Ă  nourrir les bestiaux employĂ©s Ă  la culture des terres, en soient partout exempts. » Le Rozel. 19 Sun l'aggravation des exigences en matiĂšre de redevances seigneuriales. Les taillables sont chargĂ©s en des sommes considĂ©rables pour le paiement des rentes seigneuriales dues Ă  M. le prince de Monaco, f>18 AGGRAVATION DES EXIGENCES SEIGNEURIALES sur lesquelles ledit seigneur n'en fait aucunes dĂ©ductions, depuis plusieurs annĂ©es, au contraire exige qu'ils lui soient payĂ©s en la nouvelle mesure, ce qui est une aggravation considĂ©rable, et qui oblige le laboureur et paysan Ă  vendre leur propre substance. » Moyon. — Qu'il soit fait un assurant gĂ©nĂ©ral et invariable pour les rentes seigneuriales des engrais, volailles, pains et Ɠufs. Les gĂ©lines Ă©tant jadis payĂ©es Ă  6 sols, ensuite Ă  8 sols, les chapons Ă  18 sols, aujourd'hui les receveurs les font payer 20 sols la gĂ©line et 25 sols les chapons gras, ce qui augmente quatre fois le prix. On demande la rĂ©duction Ă  un prix fixe, afin d'ĂŽter aux rece- veurs toute occasion d'usurpation. Fourneaux. — Le receveur gĂ©nĂ©ral du prince de Monaco depuis 1769 augmente les rentes seigneuriales de moitiĂ© en chapons et guĂ©lines. Cet objet de sur- charge cause beaucoup de peine aux vassaux dudit seigneur. » Montbertrand. D Les plaintes contre les exactions fiscales des agents du prince de Monaco se reproduisirent en 1790 auprĂšs de l'AssemblĂ©e nationale on les trouve consignĂ©es dans les cartons du ComitĂ© des droits fĂ©odaux. Voir la requĂȘte des paroisses de Moyon, Tessy, Villebaudon, Mesnil-Opac, Beaucoudrey, du 17 fĂ©vrier 1790. Arch. nat., Dxiv5. — Les habitants, y est-il dit, payaient [en vertu d'infĂ©odations anciennes] des rentes en froment et avoine Ă  raison de 8 mettants le quartier, chaque mettant com- posĂ© de 12 pots une chopine. Les agents du prince ont tout Ă  coup doublĂ© la mesure ». — Le futur gĂ©nĂ©ral Dagobert, alors major du bataillon des chevaliers royaux du DauphinĂ©, envoyait de Romans au prĂ©sident de l'AssemblĂ©e nationale, le 27 fĂ©vrier 1790, des plaintes contre les vexations fĂ©odales d'un M, de Beaugendre, possesseur de deux fiefs dans la paroisse de La Chapelle-Enjuger, qui ne cessait de tourmenter ses vassaux et de les cumuler de frais pour faire renouveler les aveux pour faire revivre des redevances Ă©teintes ou amorties ». Ibid., D xiv 5, lj Les rentes seigneuriales consistaient parfois en redevances d'espĂšces assez bizarres. Le SenĂ©cal, contrĂŽleur des vingtiĂšmes, signale parmi les rentes que la paroisse de Bellengreville, prĂšs Caen, devait Ă  son seigneur en 1781, outre les bois seaux de froment ou d'orge, les chapons et les Ɠufs, un quartier de veau, une culotte d'agneau, deux livres de sucre, une demi-livre de poivre, un quarteron de cannelle, Arch. dĂ©p., Calvados, C 5187- AUGMENTATION DES RENTES SEIGNEURIALES 519 20 Sur les rĂ©clamations des arrĂ©rages des rentes seigneuriales. Le seigneur, pour le bien de ses sujets, qui ne pouvaient payer annuellement leurs rentes, a laissĂ© quantitĂ© d'arrĂ©rages der- riĂšre sic. Si les hĂ©ritiers, lorsque les affaires seront finies, exi- gent les arrĂ©rages..., la plus grande partie seront obligĂ©s d'aban- donner leurs propriĂ©tĂ©s. » La BesliĂšre. — Ce qui a rĂ©duit la pa- roisse Ă  la misĂšre, ce sont des arrĂȘts [de paiement de rentes qui ont durĂ© pendant seize annĂ©es. Au levĂ© d'iceux, les vassaux en grande partie ont Ă©tĂ© forcĂ©s de les payer, avec des frais considĂ©- rables, frais faits par des sergents, et qu'ils ont payĂ©s aux dĂ©pens de leur plus nĂ©cessaire et en vendant la majeure partie de leurs fonds par de nouveaux arrĂȘts. Ces infortunĂ©s habitants vont encore se trouver en arriĂšre de cinq annĂ©es qui vont Ă©choir au jour Saint-Michel 1789 c'est lĂ  le coup fatal qui va forcer la majeure partie desdits habitants d'abandonner ce qui leur reste de fonds et d'aller chercher un autre asile. » Montaigu-les-Bois. Voir Bridrey, ouu. citĂ©, tome I, p. 158, note 3. 21 Sur la non-dĂ©duction des vingtiĂšmes des rentes seigneuriales. Qu'on ne perde pas de vue que depuis l'annĂ©e 1769 les seigneurs des paroisses se sont dits en droit de ne point diminuer Ă  leurs vassaux les dixiĂšmes sur les rentes seigneuriales. » Dangy. — Nous nous plaignons que les seigneurs, depuis au moins vingt- cinq annĂ©es, ne nous ont point diminuĂ© les dixiĂšmes des rentes seigneuriales, ce qui nous a Ă©tĂ© Ă  grand charge et nous a emportĂ© notre substance. » Carantilly. — Il est surprenant que depuis douze ou quinze ans que les dixiĂšmes ont Ă©tĂ© haussĂ©s sur tous les possĂ©dant-fonds des paroisses, que les seigneursdes paroisses se soient fait une loi de ne rabattre aucun dixiĂšme Ă  leurs vas- saux sur les rentes qu'ils leur payent annuellement, comme Ă©tant presque tous fieffataires des seigneurs, ce qui fait que le peuple paye annuellement deux dixiĂšmes sur le revenu de leurs biens. » HĂ©mevez. — D'aprĂšs les anciennes et nouvelles dĂ©cla- rations concernant les vingtiĂšmes, l'on a vu se lever des contes- tations dispendieuses et funestes entre les seigneurs d'une part, et leurs vassaux de l'autre, les seigneurs refusant de diminuer Ă  leurs vassaux les vingtiĂšmes des rentes, que ceux-ci leur doivent 5*20 ' TREIZIÈMES ET SERVICE DE PREVOTE pour des terres qu'ils tiennent d'eux en vassalitĂ© ; et les vassaux prĂ©tendant de leur cĂŽtĂ© que les seigneurs doivent leur en faire dĂ©duction, puis qu'ils payent les vingtiĂšmes comme si leurs biens n'avaient pas Ă©tĂ© grevĂ©s de rentes seigneuriales. Ces contesta- tions ont imposĂ© aux pauvres la loi de payer et de se taire ; les riches ont plaidĂ© et ont irritĂ© leur seigneur contre leurs parois- siens ; et de lĂ  le mal qui en est rĂ©sultĂ©, injustice envers le pauvre, animositĂ© et ressentiment envers le reste des habitants. » Biville. — Que les propriĂ©taires de rentes seigneuriales qui n'ont point dĂ©clarĂ© leurs gages-piĂšges et qui, par consĂ©quent, n'en paient pas de dixiĂšmes, en doivent faire la dĂ©duction aux dĂ©biteurs qui, dans la confiance qu'elle leur serait faite, n'en ont point demandĂ© la dĂ©falcation dans leurs dĂ©clarations. » Saint-Nicolas- de-Coutances. — Voir Bridrey, tome I, p. 300, note 1. l 22 Sur les treiziĂšmes ou droits de lods et ventes. Seront tenus les propriĂ©taires des fiefs de passer leur dĂ©clara- tion de la valeur de leurs gages exigĂ©s pour une annĂ©e commune sur les cinq derniĂšres annĂ©es, des treiziĂšmes et droits de lots et ventes par eux perçus ou dĂ»s percevoir.» Gavray. — Le Tiers Ă©tat observe que, si quelqu'un de ses membres, aprĂšs beaucoup de peines et d'Ă©pargnes, peut acquĂ©rir un champ de terre, ou il est clamĂ© par le seigneur fĂ©odal, ou on lui fait payer le treiziĂšme, et mĂȘme le treiziĂšme du treiziĂšme, sans aucune remise. »Crasville. — Les droits de treiziĂšme sur les Ă©changes gĂȘnent considĂ©rable- ment les propriĂ©taires et empĂȘchent quantitĂ© de mutations. » Montebourg. — Les treiziĂšmes sont souvent considĂ©rables par les mutations frĂ©quentes qui se font dans cette paroisse. » Tour- ville. 2 23 Sur le service de prĂ©vĂŽtĂ©. Les habitants sont sujets Ă  rendre aveux et dĂ©claration aux plaids des seigneurs et Ă  la comparance ; ils doivent aussi le 1 En 1788, Neuville, paroisse voisine de Vire, se plaint dĂ©jĂ  d'avoir Ă  payer Ă  son seigneur, annĂ©e commune, 1,000 livres, sans aucune dĂ©duction de deniers royaux. Arch. dĂ©p., Calvados, C8052. 2 Presque partout ce droit de lods et ventes est fixĂ© au douziĂšme du prix princi- pal ; mais les seigneurs sont dans l'usage de faire la remise du quart. Ex. Ă  Rures, Venoix, Saint-Contest, etc. Ibid., C5512, 5721, 5681. LES CORVÉES SEIGNEURIALES 521 service de prĂ©vĂŽtĂ©. » Tourville. — [Que les seigneurs ne puissent] exiger de service de prĂ©vĂŽtĂ©, qui est une chose ruineuse Ă  leurs vassaux, auxquels ils tirent des sommes considĂ©rables dont ils paient leurs gens d'affaires. » Picauville. — Le receveur du prince de Monaco fait Ă©lire des prĂ©vĂŽts chaque annĂ©e pour faire le ser- vice de prĂ©vĂŽtĂ©, s'accommode avec le vassal sur qui tombe la prĂ©vĂŽtĂ©, et fait payer jusqu'Ă  50 et 60 livres par an.» Montber- trand. — Les seigneurs se font payer par leurs vassaux un dixiĂšme de leurs rentes, pour le service de prĂ©vĂŽtĂ©, ce qui est une aggravation considĂ©rable. » Saussey. — Voir Bridrey, ouv. citĂ©, tome I, p. 530, note 2. n 24 Sur les corvĂ©es seigneuriales. [La paroisse] doit charroyer tous les matĂ©riaux nĂ©cessaires pour la construction et entretien de la maison et basse-cour du seigneur qui a Ă©tĂ© brĂ»lĂ©e il y a deux ans en intĂ©gritĂ©, doit faire et charroyer ses foins, les fournitures de sa maison, des journĂ©es de charrue et les matĂ©riaux de son moulin. » La BesliĂšre. — Les habitants doivent tous les ans curer les biefs et Ă©cluses du moulin, aller chercher les piĂšces de ce moulin mĂȘme oĂč le seigneur les achĂšte, et les porter audit moulin. » Tourville. — Si les cahiers donnent peu de renseignements prĂ©cis sur les droits de cette nature voir Bridrey, ouv. citĂ©, tome I, p. 158, note 2, les vĂ©rifi- cations gĂ©nĂ©rales effectuĂ©es pour les vingtiĂšmes dans certaines paroisses de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de 1778 Ă  1782 attestent la survivance des corvĂ©es dans plus d'une d'entre elles Ă  la veille de la RĂ©vo- lution... A ClĂ©cy, dont le comte de Vassy est seigneur patron, les habitants sont encore assujettis en 1781 et aux charrois des meules du moulin banal, curage des bieux, prise Ă  eaux et rĂ©pa- rations d'Ă©cluses, qui s'acquittent en nature et Ă  rĂ©quisition. Arch. dĂ©p., Calvados, C 5803. — A Saint-Clair-de-Halouze, en 1782, on doit encore le charroi des meules et le curage des bieux ces charges sont parfois estimĂ©es en argent. Ibid., C 5861. 1 Le service de prĂ©vĂŽtĂ© Ă©tait dĂ» par les masuriers, c'est-Ă -dire par les vassaux habitant une maison manable de la seigneurie. Ils Ă©taient tenus d'Ă©lire, chaque annĂ©e, l'un d'entre eux, nommĂ© prĂ©vĂŽt, chargĂ© de percevoir les rentes dues au sei- gneur. En fait, celui-ci mettait la prĂ©vĂŽtĂ© en adjudication ou en chargeait un homme Ă  ses gages, et il exigeait de ses dĂ©biteurs, pour acquitter ce service, un dixiĂšme en sus de leurs rentes. 522 LES BANALITÉS DE MOULIN, FOLR ET PRESSOIR — Ces corvĂ©es ont toutefois disparu dans beaucoup de paroisses exemples Ă  Authie, Venoix, Aignerville, Engran ville, etc. — Arch. dĂ©p., Calvados, C 5479, 5721, 5297 et 5351. 25 Sur les banalitĂ©s de moulin, four et pressoir. Les banalitĂ©s tant de moutures, fours que pressoirs favorisent les vexations et concussions que trop ordinaires de ceux qui les font valoir. »Bricqueville-la-Blouette. — Que les vassaux auront la libertĂ© de moudre tout grain oĂč bon leur semblera, sans ĂȘtre tenus de suivre la banalitĂ©. ..»Ouville.— Les paroissiens supplient d'abolir la banalitĂ© des moulins ou d'astreindre les meuniers Ă  des lois strictes et tranquilles pour les banoniers sic, qui se trouvent dĂ©jĂ  trop lĂ©sĂ©s du seiziĂšme qu'ils sont obligĂ©s de payer.» Saint-Malo-de-la-Lande. — Il est un droit banal dans cette pa- roisse, lequel est extrĂȘmement Ă  charge aux habitants. Il est relatif au moulin nommĂ© de la Chevalerie ; soit que l'eau y manque dans l'Ă©tĂ© par la sĂ©cheresse, ou dans l'hiver Ă  cause des glaces, ou qu'il se trouve noyĂ© par des crues d'eau, on n'est pas moins obligĂ© d'y porter et laisser sĂ©journer en dĂ©pĂŽt pendant 24 heures les grains destinĂ©s Ă  faire farine, avant de les trans- porter dans une autre usine pour pouvoir s'en procurer ; on court Ă  ce moyen le danger de les retirer dĂ©naturĂ©s, ou, si les besoins sont urgents et qu'on manque aux formalitĂ©s pour procurer du pain assez tĂŽt Ă  sa famille, on s'expose Ă  une amende perçue et exercĂ©e avec la derniĂšre duretĂ©. » Saint-Romphaire. — Comme nous avons trop peu de moulins Ă  faire farine, et que l'on en souffre beaucoup, surtout dans les annĂ©es que les eaux sont bien des fois faibles, et surtout cette annĂ©e, nous avons vu des familles nombreuses ĂȘtre huit jours sans pain, ne pouvant pas faire moudre leur blĂ©. » Helleville. — On fera connaĂźtre [au roi] qu'il est bien dur Ă  un malheureux d'ĂȘtre obligĂ© de faire moudre son blĂ© chez un meunier qui le vole, et cela parce que le seigneur l'assujettit Ă  cette redevance. » Surtainville. — Le droit de bana- litĂ©, auquel toute notre paroisse est sujette, est la plus singuliĂšre et la plus criante vexation des seigneurs envers leurs vassaux. Un malheureux laboureur, Ă©puisĂ©, pour ainsi dire, par toutes les charges auxquelles son petit territoire est assujetti, est encore obligĂ© et contraint de faire moudre le peu qui lui reste pour sa LES MÉFAITS DES COLOMBIERS 523 subsistance Ă  un moulin banal, d'oĂč il ne rapporte souvent qu'un huitiĂšme et quelque fois mĂȘme moins. Saint-Marcouf- de-1'Isle. — La banalitĂ© du moulin LĂ©vĂȘque auquel le fermier fieffataire dudit moulin vient d'assujettir la paroisse par le gain d'un procĂšs qui a ruinĂ© celle-ci, devient de jour en jour plus dure par la sĂ©vĂ©ritĂ© et la malhonnĂȘtetĂ© des procĂ©dĂ©s du meunier. La FerriĂšre-Harang. — Lesmuniers sic tiennent en captivitĂ© les vassaux. » Montbertrand. l 26 Sur les ravages dĂ»s Ă  la multiplicitĂ© des colombiers. Que les ordonnances concernant les colombiers soient remises en vigueur ; tout le monde s'avise dans la paroisse de construire des fuies ou voliĂšres sans droit ni qualitĂ©, ce qui fait un grand tort aux laboureurs. » Brainville. — Qu'il soit discutĂ© Ă  l'Assem- blĂ©e sur le droit de colombier et que ceux oĂč il se trouvera Ă©tabli, il soit ordonnĂ© qu'ils soient bouchĂ©s ou grillĂ©s pendant la semence ec rĂ©colte, afin que leurs terres ne soient point dessumensĂ©es sic ni leurs rĂ©coltes battues sur leurs terres. »Longueville. — Les sei- gneurs ont chacun leur colombier et voliĂšre, en sorte que la communautĂ© de cette paroisse est au centre de six tours..., qui fournissent une quantitĂ© prodigieuse de pigeons qui ne sont enfermĂ©s en aucune saison de l'annĂ©e, ce qui fait tort au labou- reur.» Saint-Planchers.— Douze ou quinze colombiers et voliĂšres, sont si garnis de pigeons qu'ils sont obligĂ©s d'avoir toujours des gardes pour conserver leurs rĂ©coltes et d'en placer plusieurs dans chaque champ. » Pierreville. - — Cette paroisse est encore affligĂ©e et pillĂ©e par les pigeons voraces de trois colombiers qui semblent ĂȘtre de concert pour absorber les grains de toutes espĂšces, il faut les garder constamment et encore trop souvent on ne peut rĂ©ussir Ă  les chasser. » Le Rozel. — Des seigneurs humains avaient autrefois fait raser les colombiers de dessus leurs terres ; nous nous rappelons avec respect le souvenir de la l Les vĂ©rificateurs des vingtiĂšmes, dans quelques-unes des paroisses vĂ©rifiĂ©es de 1778 Ă  1782, constatent la disparition des banalitĂ©s. Ex. Ă  Authie, Venoix, Giber- ville, Bellengreville, Saint-Contest, Aignerville, Engranville ; Ă  Bures et Ă  Monde ville, on ne trouve que la banalitĂ© du four ; Ă  Beaumesnil, Ă  ClĂ©ry el Ă  Saint-CIair- de-Halouze, la banalitĂ© du moulin les vassaux doivent aller y moudre au seiziĂšme boisseau ». Arch. dĂ©p., Calvados, C 5479, 5721, 5396, 5487, 5681, 5297, 5351 - 5512. 5641 - 5777, 5803, 5861. 524 LES DROITS DE garenne et de chasse maison de Longueville, Ă  laquelle nous devons le bienfait d'avoir fait dĂ©truire ceux qui Ă©taient sur ses terres et renoncĂ© Ă  ce pri- vilĂšge ; comment se fait-il que de simples gentilshommes, sur des terres roturiĂšres, aient des pigeons dans des colombiers ou autres retraites, qui dĂ©vastent nos moissons? Faire des procĂšs pour les dĂ©truire, il faut du moyen, des ressources on est pillĂ©, on souffre, on se plaint, enfin, on se tait. » Surtainville. ^ 27 Sur les droits de garenne et de chasse. Que les garennes des seigneurs, et principalement ceux qui ne sont point sur le bord de la mer soient closes et fermĂ©es par des murs qui auront six pieds de fondement et six pieds d'Ă©lĂ©vation au-dessus des terres, afin de pouvoir contenir leurs lapins. Que le particulier qui aura le malheur d'avoir de ce gibier dans sa terre ait la libertĂ© de le dĂ©truire. » Martinvast. — Les lapins dĂ©- pouillent les blĂ©s en vert dans tout l'arrondissement qui avoisine la garenne ; ils le coupent quand le blĂ© est montĂ© en tuyaux, ou ils le mangent quand il est coupĂ©, jusqu'Ă  ce que la gerbe soit enlevĂ©e, si le propriĂ©taire ne fait pas garder ses rĂ©coltes nuit et j our. » Biville. — Il est une autre espĂšce de droit non moins rĂ©vol- tant, non moins Ă  charge Ă  l'agriculture, le droit de garennes. Par quelle fatalitĂ© la satisfaction et les plaisirs des possĂ©dant -fiefs sont-ils toujours inhĂ©rents Ă  la spoliation du cultivateur? Pour- quoi ces peuplades de lapins autour du royaume, dont les fuyards vont exercer leurs dĂ©gĂąts dans les campagnes? Pourquoi ne sont-elles pas murĂ©es, au vƓu des ordonnances? » Saint- Waast- la-Hougue.— Les seigneurs permettent ou ordonnent Ă  leurs do- mestiques de chasser avec nombre de chiens en toutes saisons, ce qui cause [aux habitants] une douleur extrĂȘme et un tort considĂ©rable, dont ils ne peuvent que gĂ©mir en secret.» Sain t- 1 Voir des plaintes analogues formulĂ©es en 1788 par les municipalitĂ©s de Ber- niĂšres-sur-Mer et de Villers- Bocage dĂ©partement de Caen. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7837 et 8010. — Une sentence de la MaĂźtrise des eaux et forĂȘts de Caen, du 28 juillet 1787, avait prononcĂ© condamnation contre le seigneur d'Airan, Baudre de Saint- Enoux, qui avait fait afficher aux Ă©glises d'Airan, Moult. Canteloup, Croissanville, et au marchĂ© d'Argences^ un placard intitulĂ© Secours Ă  l'humanitĂ© », oĂč il invitait ses vassaux Ă  venir concourir Ă  la destruction pleine et entiĂšre des pigeons que ren- fermaient ses quatre colombiers, dont il leur donnerait les clefs». Lamare, MĂ©moires, p. 208-209. l'existence d'un prolĂ©tariat rural 525 Jean-des-Champs. — Que des lois sĂ©vĂšres et des prĂ©cautions actives empĂȘchent l'abus de la chasse et que les malheureux cultivateurs ne voient plus leurs champs ravagĂ©s et leurs rĂ©coltes dĂ©truites par ces oisifs dangereux qui osent mĂȘme menacer les laboureurs qui les surprennent et se plaignent de leurs excĂšs. » LeVretot. M 28 Sur l'existence d'un prolĂ©tariat rural. A Carpiquet, les trois quarts des habitants sont journaliers sans aucune propriĂ©tĂ© et Ă  charge Ă  la paroisse. Arch. dĂ©p. Cal- vados, C 7863. — A Maisoncelles-sur-Ajon, presque tous les habitants sont journaliers et mĂȘme souvent manquent d'ou- vrage ou sont obligĂ©s de se rĂ©duire Ă  filer du coton pour subvenir Ă  leurs besoins et Ă  la subsistance de leur famille» Ibid., C 7932.— A Mal tĂŽt, il n'y a guĂšre que des journaliers qui, selon les circons- tances et les saisons, sont dans un temps maçons, couvreurs, charpentiers, dans d'autres batteurs en grange, valets de har- nais, etc.» Ibid., C 7934. — A Monts, les habitants sont pour la plupart de pauvres journaliers chargĂ©s d'enfants qui mendient leur pain». Ibid.,C 7943. — A Neuilly-le-Malherbe, ils sont tous journaliers n'ayant pour la plupart qu'une salle et un petit jardin, encore tous n'en ont pas ». Ibid., C 7949. — A Saint - Vaast, le plus grand nombre des habitants n'a d'autres occu- pations que de travailler Ă  leurs journĂ©es ». Ibid., C 7984. — A Courson et Ă  la Lande- Vaumont, une partie des habitants sont obligĂ©s d'aller gagner leur vie au dehors comme rĂ©mouleurs et chaudronniers. Ibid., C 8032 et 8041. — Neuville renferme une quarantaine de malheureux manƓuvres, qui n'ont d'autre fortune que leur pelle et leur pioche ». Ibid., C 8052. — A Rully, plusieurs de ceux qui sont imposĂ©s de 6 Ă  10 sols au rĂŽle de la taille, sont obligĂ©s d'aller mendier leur pain. Ibid., C 8066. — A Saint-Pierre-la-Vieille, la plus grande partie des 1 Sur les ravages causĂ©s par les lapins, renards, biches, sangliers, etc., dans les paroisses des dĂ©partements de Caen et de Vire en 1788, voir les Ă©tats d'impositions d'AmayĂ©-sur-Orne, Barbery, La Bigne, Espins, Fresnay-le-Puceux, Grimbosq, Jurques, Maizet, Les Moutiers, MutrĂ©cy, Saint-Georges-d'Aunay, Saint-Laurent-de- Condel, Danvou, Ondefontaine, Saint-Denis-Maisoncelles et Saint-Sever. Arch. dĂ©p., Calvados, C 7818, 7829, 7840, 7887, 7900, 7908, 7918, 7933, 7947, 7948, 7973, 7975, 8033, 8053, 8069 et 8078. 526 l'avarice des dĂ©gimateurs et l'abus des dĂ©ports habitants sont journaliers ou fileurs de coton ; les journaliers gagnent 3 ou 4 sols par jour et les fileurs de coton depuis 5 Ă  8, sur quoi il faut se nourrir eux et leurs enfants. Il y a au moins 50 familles dans la derniĂšre misĂšre sur 234 taillables et Ă  la charge de ceux qui ont un peu de bien ». Arch. dĂ©p., Calvados, C 8076. 29 Sur l'avarice des dĂ©cimateurs et l'abus des dĂ©ports. Remontrent les habitants que dans la plupart des paroisses de la campagne, ce sont les seigneurs-Ă©vĂȘques, les abbĂ©s, les cha- pitres qui possĂšdent les dĂźmes que l'on a appelĂ©es de tout temps le patrimoine des pauvres, et que cependant il ne s'y fait en leur faveur aucunes distributions de la part de ces gros dĂ©cimateurs sur un revenu si considĂ©rable qu'ils tirent de ces paroisses, et qu'ainsi les pauvres, qui sont partout en grand nombre, restent Ă  la charge des curĂ©s et des habitants. » Biville. — Ce sont des dĂ©ci- mateurs Ă©trangers, qui perçoivent toutes les dĂźmes ; ils ne font aucun bien dans la paroisse, laissant au sieur curĂ© pour sa part le soin et la charge des pauvres et des misĂ©rables. » Le Rozel. — Vous, codĂ©cimateur, oĂč placez -vous vos aumĂŽnes, et pourquoi l'indigent dont vous dĂ©pouillez le pasteur, n'y participe-t-il pas? Vous, BĂ©nĂ©dictins de FĂ©camp, dĂ©cimateurs de cette paroisse, y avez-vous jamais fait l'aumĂŽne? » Saint-Waast-la-Hougue. — Que l'on anĂ©antisse et supprime entiĂšrement les dĂ©ports en Normandie il est affreux et contre toutes les lois qu'un Ă©vĂȘque, Ă  chaque mutation, prenne le revenu d'une annĂ©e de cure et se dispense de faire l'aumĂŽne, par une clause gĂ©nĂ©rale que ses agents ne manquent pas d'insĂ©rer dans les adjudications publi- ques qu'ils font faire desdits dĂ©ports..., de maniĂšre que les curĂ©s... ne peuvent soulager Ă  leur grĂ© la misĂšre des pauvres, dont ils sont journellement les tĂ©moins oculaires. » Emondeville. — Le dĂ©port n'a pour titre que l'usurpation surannĂ©e. L'annĂ©e de vacance, on loue les dĂźmes Ă  l'encan, on y attache la desserte de la paroisse, l'on reçoit pour ce les enchĂšres au rabais. Quelle part, Ă©vĂȘque de Coutances, avez-vous faite aux pauvres de ces paroisses dont vous avez rĂ©coltĂ© les dĂźmes? Ils y auraient parti- cipĂ© si leurs curĂ©s n'eussent permutĂ© et ne fussent dĂ©cĂ©dĂ©s. Vous avez tout enlevĂ©, tout consumĂ© ; les communautĂ©s ont Ă©tĂ© contraintes de supplĂ©er Ă  votre dĂ©faut de charitĂ©. Quelle injustice LA MENDICITE 527 dans le titre, quelle indĂ©cence dans la desserte, quelle inhuma- nitĂ© dans l'administration ! » Saint- Waast-la-Hougue. 30 Sur la terreur causĂ©e par la mendicitĂ©. Obligation Ă  chaque paroisse de nourrir ses pauvres, ce qui peut empĂȘcher de beaucoup le coquinisme, et diminuer le nom- bre des vagabonds.» Annoville-Tourneville. — On voit tous les jours dans nos campagnes des pauvres de huit Ă  dix lieues. Qu'est-ce qui peut faire Ă©carter ces gens si loin ? Y a-t-il paroisse qui ne soit capable de nourrir ses pauvres? Il y en a parmi eux qui ne sortent que pour voler ; si on les voit, on ne sait d'oĂč ils sont et ils ne vont pas revenir dans le hameau oĂč ils ont volĂ©. » Hocquigny. — Nombre de mendiants rĂ©pandus dans le pays, comme incendiĂ©s ou grĂȘlĂ©s, forcent l'aumĂŽne et sont dangereux. » Saint-Pierre-du-Fresne. — Comme il arrive trĂšs souvent que des voleurs se couvrent de l'habit d'un pauvre mendiant, il paraĂźt qu'il serait bien avantageux pour l'Etat qu'on n'en souffrĂźt aucun. » Notre-Dame-des-Bois-d'Elle. — L'abus de la mendicitĂ© est un flĂ©au dans les campagnes. » Montchaton. * 31 Sur les mesures proposĂ©es pour l'extinction de la mendicitĂ©. Aucun pauvre ne pourra mendier, et celui qui sera trouvĂ© mendiant sera arrĂȘtĂ© et constituĂ© prisonnier comme vagabond et sans aveu. » Gavray. — Qu'il ne soit permis Ă  aucun pauvre de sortir de sa paroisse pour mendier, sous peine d'ĂȘtre arrĂȘtĂ©. » Hocquigny. — Le coquinisme ne fait de progrĂšs de jour en jour que parce que les auteurs des dĂ©lits ne sont pas punis, ils le se- raient infailliblement, si on parvenait Ă  les arrĂȘter. » Rideau- ville. 1 Voir les plaintes formulĂ©es Ă  ce sujet, Ă  la suiie de son Ă©tat d'imposition, en 1788, par la municipalitĂ© de Neuville, prĂšs Vire Cette paroisse, si voisine de la Ville, est continuellement fatiguĂ©e par l'importunitĂ© d'une multitude de pauvres qui descendent de la ville, Ă  qui elle est forcĂ©e de donner tantĂŽt par les sentiments dhu- manitĂ©, tantĂŽt par ceux de la crainte ». Arch. dĂ©p., Calvados, C 8052. 528 ‱ LE PARTAGE DES BIENS COMMUNAUX 32 Sun le partage des biens communaux au profit des possĂ©dant-fonds. Que tous les biens communaux soient partagĂ©s par tĂȘte entre les usagers, afin de mettre cette portion considĂ©rable de terres en valeur et la rendre profitable Ă  ses propriĂ©taires. » La Haye- Bellefond. — Ce marais serait d'un grand avantage aux habi- tants de ces paroisses y ayant droit, si Ă  leur dĂ©sir et selon leurs vƓux, il se trouvait partagĂ© entre eux en proportion des propriĂ©- tĂ©s de chacun. » Saint-Martin-le-Vieux. — Que les biens com- munaux soient partagĂ©s, et que chacun soit forcĂ© de clore sa part. » Gonneville. SOURCES DU CAHIER DU BAILLIAGE DE CAEN 529 APPENDICE III SOURCES DES DEUX CAHIERS GENERAUX DU TIERS ÉTAT DES BAILLIAGES DE CAEN ET DE COUTANCES Cahier des dolĂ©ances rĂ©unies du Tiers Ă©tat du bailliage de Caen et de ses quatre bailliages secondaires, Bayeux, Falaise, Torigni et Vire. Introduction inspirĂ©e par Torigni apO, Introduction. Constitution Bayeux a p, i, art. 1 initio et art. 2 fondus. Bayeux a p, i, art. 20. Caen a p, i, art. 3. Vire a p, art. 4 alinĂ©a 2 abrĂ©gĂ©. Caen a p, i, art. 14. Peut-ĂȘtre inspirĂ© par Vire a p, art. 3 al. 2. Caen a p, i, art. 1. Caen a p, i, art. 8. Bayeux a p, i, art. 17, pour la premiĂšre partie ; Vire a p, art. 13 al. 2 pour la seconde partie. Art. 10. Bayeux a p, i, art. 16 un peu modifiĂ©, pour la premiĂšre partie ; la seconde partie inspirĂ©e par Falaise a p, iv-, art. 16 et Torigni a p, art. 42. Art. 1 1 . InspirĂ© par Falaise a p, iv1, art. 3, Bayeux a p, xviii, art. 2, Torigni a p, art. 24 in fine, Bayeux a p, xviii, art. 1 in fine, ces divers articles amalgamĂ©s. Art. 12. Caen a p, ii, art. 78, pour les deux premiers tiers ; Bayeux a p, xiĂŻ, art. 1, pour le dernier. 1 AP dĂ©signe, par abrĂ©viation, le cahier de Y AssemblĂ©e prĂ©liminaire de chacun des cinq bailliages principal de Caen, et secondaires de Bayeux, Falaise, Torigni et Vire, qui ont formĂ© le ressort Ă©lectoral du badliage de Caen pour la convocation des Etats gĂ©nĂ©raux de 1789. Art. 1 . Art. 2. Art. 3. Art. 4. Art. 5. Art. 6. Art. 7 . Art. 8. Art. 9. 530 CONSTITUTION, SUBSIDES ET PERCEPTION Art. 13. Caen a p, ii, art. 79 abrĂ©gĂ©. Art. 14. Vire a p, art. 15, lĂ©gĂšrement modifiĂ©, pour la premiĂšre partie ; Bayeux a p, i, art. 23, pour la seconde. Art. 1 Ăč . Bayeux a p, i, art. 18. Art. 16. Caen a p, ii, art. 91. Art. 17. Nulle trace dans aucun des cinq cahiers d'assemblĂ©es prĂ©liminaires. Source probable Instructions en- voyĂ©es par M. le duc d'OrlĂ©ans, etc., art. 3. M Art. 1 8 . Falaise a p, iv2, art. 8 modifiĂ©. Art. 19. Nulle trace de cet article dans aucun des cinq cahiers des assemblĂ©es prĂ©liminaires. Art. 20. Falaise a p, iv2, art. 4 modifiĂ©. Art. 21 . Bayeux a p, i, art. 22. Art. 22 . Caen a p, ii, art. 92 ; Falaise a p, iv2, art. 12 ; Torigni a p, art. 32 ; Bayeux a p, vu, art. 1. Art. 23 . Bayeux a p, i, art. 6 modifiĂ©. Art. 24. Vire a p, art. 4, alinĂ©a 4 abrĂ©gĂ© et al. 1 in fine. Art. 25 . Vire a p, art. 7 al. 3. Art. 26 . Falaise a p, ii, art. 1 ; Vire a p, art. 7 ; Caen a p, i, art. 9. Art. 27 . Bayeux a p, ii, art. 3 et 4 fondus. Subsides et perception. Art. 2 H . Falaise a p, iii, art. 1 initio, pour la premiĂšre partie ; Bayeux a p, ii, art. 6 pour la seconde. Art. 29. Bayeux a p, ii, art. 7. Art. 30. InspirĂ© par Bayeux a p, i, art. 14. Art. 3 1 . Caen a p, ii, art. 19 modifiĂ©. Art. 32. Caen a p, n, art. 20. Art. 33. Caen a p, n, art. 21. ; 1 Les Instructions envoyĂ©es par M. le duc d'OrlĂ©ans pour les personnes chargĂ©es de sa procuration aux assemblĂ©es des bailliages relatives aux Etats gĂ©nĂ©raux, s. I. n. d. Bibl. liĂąt., LI 39/1379, ainsi que la Circulaire adressĂ©e aux curĂ©s, au nom du duc d'Or- lĂ©ans, par M. de Limon, contrĂŽleur gĂ©nĂ©ral du prince, 7 mars 1789 Ibid., Lb 39/1378, ont du inspirer surtout les cahiers des paroisses des bailliages de Mortain et de Tinchebrai, apanage du duc d'OrlĂ©ans. C'est tout au moins une hypothĂšse qu'il est impossible de vĂ©rifier, vu la disparition de ces cahiers. — C'est aux Instructions qu'est trĂšs probablement empruntĂ© le vƓu de l'articie 17 du cahier gĂ©nĂ©ral du bail- liage de Caen, relatif Ă  l'interdction de la violation du secret des lettres. L'article 3 de ct-s Instructions Ă©tait ainsi conçu Le respect le plus absolu pour toute lettre confiĂ©e Ă  la poste, sera pareillement ordonnĂ©. On prendra les moyens les plu- sĂ»rs d'empĂȘcher qu'il n'y soit portĂ© atteinte. » Art. 35. Art. 3 6 . Art. 37. Art. 3 S . Art. 39. DOMAINES, DROITS FÉODAUX, COMMENCE 531 Domaines. Art. 34. Caen a p, ii, art. 24. Vire a p, art. 8, et Torigni a p, art. 40 fondus. Caen a p, ii, art. 22. Torigni a p, art. 27, pour la premiĂšre partie ; Caen a p, ii, art. 9 abrĂ©gĂ©, pour la seconde. Bayeux a p, xiv, art. 1. InspirĂ© par Falaise, a p, ni, art. 1. Droits fĂ©odaux et polices de chasse. Art. 40 . Caen a p, ii, art. 31 et 32, trĂšs abrĂ©gĂ©s et fondus. Art. 41 . Caen a p, ii, art. 33, trĂšs abrĂ©gĂ©. Art. 42. Bayeux a p, ni, art. 1 initio et xv, art. 1, pour la pre- miĂšre partie ; Caen a p, ii, art. 25, pour la fin. Art. 43 . Bayeux a p, xv, art. 2, modifiĂ©. Art. 44. Caen a p, ii, art. 23. Art. 45 . Caen a p, ii, art. 58 modifiĂ©. Commerce. Art. 46 . Caen a p, ii, art. 63. Art. 47 . Caen a p, ii, art. 65 pour la premiĂšre partie et 64 pour la fin. Art. 48 . Caen a p, ii, art. 12. Art. 49 . Caen a p, ii, art. 66 abrĂ©gĂ©. Art. 50 . Caen a p, ii, art. 61. Art. 5 1 . Caen a p, ii, art. 62. Art. 52. Caen a p, ii, art. 72. Art. 53 . Caen a p, ii, art. 76 modifiĂ©. Art. 54 . Falaise a p, v, art. 24. Art. 55. Falaise a p, v, art. 15. Art. 56 . Caen a p, m, art. 7 abrĂ©gĂ©. Affaires bĂ©nĂ©ficiales Art. 5 7 . Vire a p, art. 12 initio, et Bayeux a p, iv, art. 1. Art. 5 8 . Caen a p, ii, art. 36 modifiĂ©. Art. 59. Torigni a p, art. 16. Art. 60 . Vire a p, art. 12 in fine. Art. 6 1 . Bayeux a p, iv, art. 11 et 12 fondus. Art. 62. Bayeux a p, iv, art. 13 initio ; Falaise a p, v, art. 14 initio. Art. 64. Art. 65. Art. 66. Art. 67. Art. 68. Art. 69. Art. 70. 532 AFFAIRES BÉNÉFICIAIRES, JUSTICE, TRAVAUX PUBLICS Art. 63. Caen a p, h, art. 44 modifiĂ© ; Bayeux a p, iv, art. 13 in fine ; Falaise a p, v, art. 14 in fine. Caen a p, ii, art. 46 modifiĂ©. Caen a p, ii, art. 40 abrĂ©gĂ©. Caen a p, ii, art. 41 abrĂ©gĂ©. Caen a p, ii, art. 42. Caen a p, ii, art. 43 modifiĂ©. InspirĂ© par Falaise a p, iv2, art. 14. Caen a p, ii, art. 75 ; Bayeux a p, xvii, art. 3 et 4. Justice. Art. 71 . Vire a p, art. 17, alinĂ©a 1 initio. Art. 72 . Caen a p, i, art. 6 initio. Art. 73. Caen a p, i, art. 6 in fine. Art. 74 . Bayeux a p, v, art. 1 initio, pour la premiĂšre partie ; Caen a p, i, art. 51 initio pour la seconde. Art. 75 . Bayeux a p, v, in fine abrĂ©gĂ© ; Caen a p ii, art. 51 in fine. Art. 76 . Bayeux a p, v, art. 18. Art. 77 . Bayeux a p, v, art. 2 abrĂ©gĂ©. Art. 78. Caen a p, ii, art. 54 lĂ©gĂšrement modifiĂ©. Art. 79 . Caen a p, ii, art. 3. Art. 80. Caen a p, ii, art. 71. Art. 8 1 . Falaise a p, iv1, art. 15 initio; Bayeux a p, v, art. 17. Art. 82 . Bayeux a p, v, art. 11 initio. Art. 83. Falaise a p, v, art. 22. Art. 84. Caen a p, ii, art. 39. Ouvrages publics. Bayeux a p, xxi, art. 1 initio. Bayeux a p, xxi, art. 3. Bayeux a p, xxi, art. 2 initio. Caen a p, iii, art. 4 abrĂ©gĂ©. Caen a p, ii, art. 94 abrĂ©gĂ©. DĂ©cision de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale. Art. 85 Art. 86 Art. 87 Art. 88 Art. 89 Art.
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Reminder of your requestDownloading format TextView 1 to 16 on 16Number of pages 16Full noticeTitle L'Ouest-Éclair journal quotidien d'informations, politique, littĂ©raire, commercialPublisher [ RennesPublication date 1937-01-20Contributor DesgrĂ©es du Lou, Emmanuel 1867-1933. Directeur de publicationRelationship textType printed serialLanguage frenchFormat Nombre total de vues 135307Description 20 janvier 1937Description 1937/01/20 NumĂ©ro 14683.Description Collection numĂ©rique Fonds rĂ©gional BretagneDescription Collection numĂ©rique Yroise, bibliothĂšque numĂ©rique de BrestRights Consultable en ligneRights Public domainIdentifier ark/12148/bpt6k6607788Source BibliothĂšque nationale de FranceProvenance BibliothĂšque nationale de FranceOnline date 18/01/2011The text displayed may contain some errors. The text of this document has been generated automatically by an optical character recognition OCR program. The estimated recognition rate for this document is 100%.On a pose hier Ă  Paris la premiĂšre pierre du pavillon de la Bretagne Ă  l'Exposition de 1937 M. Gasnier-Duparc, ministre de la Marine, scelle la premiĂšre pierre. Voir en c Informations rĂ©gionales DRAME DE LA MER A CANCALE PARTIS EN PECHE DEPUIS TRENTE-SIX HEURES, PAR UN TEMPS EFFROYABLE. DEUX CANOTS A MOTEUR, MONTÉS CHACUN PAR TROIS HOMMES, NE SONT PAS RENTRÉS AU PORT Cascale, 19 janvier. De notre correapondant particulier. Lundi, vers 10 heures du matin, malgrĂ© le mauvais temps, cinq des canots Ă  moteur de notre flottille cancalaite, pratiquant, la petite pĂšche, prenaient' le large. Vers 13* h. 30, le vent, jusqu'alors de la partie du Sud-surolt, montait ĂŻubiteme* Ă  l'Ouest et se mettait Ă  ‱ouffler en cyclone. Un vĂ©ritable coup de temps, comme il est rare d'en voir Au port de la Houle, sous Cancale, les familles des intrĂ©pides marins partis en mer se montraient justement inquiĂštes sur leur sort. Entre 15 h. 30 et 16 heures, trois des frĂȘles embarcations avaient rĂ©ussi. aprĂšs une lutte titanesque contre les Ă©lĂ©ments dĂ©chaĂźnĂ©s, Ă  se rĂ©fugier a proximitĂ© du port. Malheureusement. on dĂ©plorait l'absence de deux autres barques. Il s'agissait de deux canots Ă  moteur Le Fend-i'Onde, construit Ă  Cancale en 1932, jaugeant 1 tonneau 89 brut. muni d'un moteur de 6 chevaux, Ă©tait montĂ© par le patron Maillard Eugene. nĂ© le 7 septembre 1897, et les matelots Leroux Francis, nĂ© le 11 septembre 1914 Devran Julien, nĂ© le 3 dĂ©cem bre 1900. La France-AmĂ©lie, canot non pontĂ© moteur de 6 chevaux. 1 tonneau 89 de jauge brute, Ă©tait montĂ©e par le patron Couapel François, nĂ© le 8 no- vembre 1691 et ses matelots Verdier Jean-Marie, nĂ© le 26 juillet 1889. et Lebrun Louis, nĂ© le 12 novembre 1912. Depuis hier, malgrĂ© toutes les recherches entreprises pour', retrouver trace des canota disparus, d'abord par la grande Jjisquine La France, pui* par quatre canots Ă  moteur de la Houle et le canot de sauvetage de SaintMalo-Saint-Servan, on reste sans aucune nouvelle Ă  l'heure oĂč nous transmettons ces lignes. AprĂšs une accalmie, la tempĂȘte fait rage Ă  nouveau. Parmi les six vaillants marins disparus et dĂ©jĂ  pleurĂ©s dans leurs familles, se trouvent quatre pĂšres de femille, MM. Maillard, deux enfants Couapel, trois enfants Davran, un Verdier, un. Ce tragique Ă©vĂ©nement de mer a causĂ© une grosse et lĂ©gitime Ă©motion dans toute la rĂ©gion. Vaines recherches au large Saiht-Malo, 19 janvier de notre rĂ©daction malouine Le Capitaine-de-Vaisseau-Recoloux et rentrĂ© ce soir Ă  son mouillage vers 20 h. 30. Il avait accompli, sous la direction du capitaine Bourges, une vaste randonnĂ©e, allant jusqu'Ă  Chausey et aux Minquiers, Ă  la recherche des bateaux de Cancale. A son retour, l'Ă©quipage a dĂ©clarĂ© n'avoir rien trouvĂ©. M. VINCENT AURIOL PARLERA DEMAIN AU CLUB AMÉRICAIN Paris, 19 janvier. Le Journal des DĂ©bats annonce que M. Vincent Auriol, ministre des Finances, a acceptĂ© l'invitation qui lui a Ă©tĂ© faite par M. ThĂ©odore Rousseau, prĂ©sident du club. d'ĂȘtre l'hĂŽte du Club AmĂ©ricain, Ă  son dĂ©jeuner d'aprĂšs demain jeudi. On se rappelle que c'est au Club AmĂ©ricain que M. LĂ©on Blum prononça non premier discours politique comme chef du Gouvernement. Les dĂ©clarations du ministre des Fifiances sont attendues dans les circonstances actuelles avec un particulier intĂ©rĂȘt. SIX DISPARUS RETROUVÉS VIVANTS DANS L'ANTARCTIQUE Lombres, 19 janvier. Un radiogramme Ă©manant du croiseur britannique Ajax a Ă©tĂ© reçu au Foreign Office, disant que les membres de l'expĂ©dition du Discovery Il perdus dans l'Antarctique avaient Ă©tĂ© retrouvĂ©s et ramenĂ©s Ă  bord du Discovery. Il s'agit, comme on le sait. de six officiers et marins qui avaient disparu aprĂšs avoir dĂ©barquĂ© Ă  Esther Harbourg, dans l'Ile du Roi George, qui fait partie des Shetlands. L' Ajax avait Ă©tĂ© accompagnĂ© dans ses recherches par plusieurs baleiniĂšfes. LES AFFAIRES D'ESPAGNE Le contre-torpilleur français ci MaillĂ©-BrĂ©zĂ© » qui fut bombardĂ© par un avion au large da cĂŽte» d'Eipafne, ainsi que nous l'avons relatĂ© hier. .jtVoir en deuxiĂšme page. DuplicitĂ© de Moscou ‱ Paria; 19 janvier. La note jiar laquelle Moscou rĂ©pond Ă  Londres, en ce qui concerne les enrĂŽlement» de volontaires pour l'Espagne, est vraiment fadĂ©fendable. Elle dĂ©clare que le gouvernement soviĂ©tique ne se livre pas Ă  l'envoi de volontaires alors que depuis des mois, le gouvernement de Valence et les autoritĂ©s de Barcelone ne cessent de proclamer, avec de longues effusions de gratitude, l'aide que leur apporte la 3' Internationale On reconnaĂźt bien, dans ces dĂ©nĂ©gations moscoutaires, le systĂšme du mensonge cynique systĂšme plus ImbĂ©cile encore que rĂ©voltant dont s'inspirent les communistes depuis l'avĂšnement du Front populaire en France. La vĂ©ritĂ©, c'est que les nombreux soldats et techniciens russes qui se trouvent actuellement en Espagne y sont partis sur l'ordre du Komintern d'accord avec le gouvernement soviĂ©tique. Us sont la en service commandĂ© , avec tout leur matĂ©riel. Il en est de mĂȘme des Italiens et des Allemands qui combattent dans les armĂ©es Franco, direz-vous. Je le Mais que M. Litvinolf et ses compĂšres ne viennent pas nous raconter qu'ils sont, eux. innocents de tout recrutement, de tout armement. de tout appui militaire aux marxistes espagnols 1' Le gouvernement soviĂ©tique est coupable en outre, si nous en croyons les rumeurs les plus autorisĂ©es. de la suggestion faite au gouvernement de Valence de naturaliser en massĂ© les Ă©trangers combattant dans les range communoanarchistes. Le procĂ©dĂ© est simple autant que dĂ©loyal. Il prĂ©vient le rapatriement de ces Ă©trangers pour le cas oĂč, d'id un mois, France et Angleterre dĂ©cideraient de les rappeler sous peine de condamnations sĂ©vĂšres. Il permet de recruter sans cesse, au mĂ©pris des conventions internationales car il suffira au cabinet de Valence d'envoyer massivement en Russie, ou Ă  Perpignan, des lisasses d'actes de naturalisation et de passeports en blanc. Les recruteurs y inscriront le nom des soi-disant volontaires, et ceux-d passeront les frontiĂšres comme de iraia Espagnols jsnfjant chss eux. ̃̃'̃'â€ąÌƒ ̃ ‱‱- '̃ Telle est l'attitude de grossiĂšre duplicitĂ© adoptĂ©e par un gouvernement que toute l'Europe se plait Ă  considĂ©rer comme notre intime alliĂ©. C'est flattent. en vĂ©ritĂ© Hitler et Mussolini ont la partie belle et la propagande facile lorsque, lisant nos annales parlementaires et les votes de la Chambre depuis juin 1936, ils constatent que les communistes sont les soutiens fidĂšles de M. Blum et les animateurs d'une C. G. T. qui Ă©st lĂ  maĂźtresse absolue des destins du gouvernement français Signalons enfin que Moscou se livre, depuis quelques jours, Ă  un singulier chantage Ă  notre Ă©gard et Ă  l'Ă©gard de l'Angleterre. Staline fait savoir Ă  une agence britannique qu'il considĂšre que, depuis la remilitarisation de rhĂ©nane et la guerre espagnol. France et Grande-Bretagne sont stratĂ©giquement beaucoup moins fortes qu'auparavant se solidariser avec elles devient, pour l'U. R. S. S., une affaire mĂ©diocre on ne pourrait conjurer l'affaiblissement commun qu'en agissant tous de concert en Espagne d'une façon ImmĂ©diate. Si Paris et Londres refusent, dit-on au Kremlin, l'U. R. S. S. se repliera sur elle-mĂȘme et abandonnera Ă  leur sort les dĂ©mocraties occidentales. Le mensonge ou le bluff, la tromperie ou la menace, tels sont les procĂ©dĂ©s internes et internationaux du communisme. Son but, c'est la rĂ©volution violente au profit d'une dictature. Nous ne pouvons concevoir comment les radicaux ont pu admettre, mĂȘme un Instant, l'alliance politique avec un parti qui n'a pour objet que la destruction intĂ©grale du rĂ©gime dĂ©mocratique 1 DANS L'OISE UN AVION HOLLANDAIS S'ECRASE AU SOL. Ses quatre occupants sont tuĂ©s Senus, 19 janvier. Cet aprĂšs-midi, Ă  14 h. 5, un avion de tourisme hollandais immatriculĂ© c P. H. M. A. J. » s'est Ă©crasĂ© sur le sol prĂšs de la commune de Pontarme. L3 chute s'Ă©tait produite prts du bois de Mocreux, sur le territoire de la commune de Mont-L'EvĂȘque. On ne trouva dans les dĂ©bris de l'appareil, dont l'aile droite avait Ă©tĂ© arrachĂ©e, que deux des 'aviateurs. MM. Scenmer et Fissot. Les corps des deux autres, Adrianin HƓrtens et Jacob Maltha, furent retrouvĂ©s dans les chamns Ă  environ 150 mĂštres du point de-chute. Des morceaux de l'aile de l'avion ont Ă©tĂ© dĂ©couverts Ă  800 mĂštres de lĂ . Les corps des quatre victimes ont Ă©tĂ© transportĂ©s ce soir Ă  l'hĂŽpital de Senlis. On attend l'arrivĂ©e du consul wĂ©nĂ©ral des Pays-Bas et du commandant Girardot, du Bourget. LES CONFLITS ÏE TRAVAIL DOIT REPRENDRE CE MATIN AUX AB A TTOIRS Le diffĂ©rend, aux termes de la loi, sera tranchĂ©' par arbitrage LE CONFLIT. DES ABATTOIRS PARISIENS MalgrĂ© la grĂšve, l'activitĂ© rĂ©gnait hier Ă  l'intĂ©rieur des abattoirs. PARIS, 19 janvier. Les pourparlers engagĂ©s hier entre les patrons et employĂ©s des abattoirs ayant Ă©chouĂ©, la grĂšve commencĂ©e la veille continuait ce matin. Cependant, il est dĂ©sormais Ă©tabli que le travail reprendra demain matin. ,,Aux Halles Centrales, on dĂ©clarait, Ă  la fin de la matinĂ©e, que la grĂšve des abattoirs avait eu pour consĂ©quence de faire baisser l'approvisionnement des pavillons de la boucherie. NĂ©aninoins, grĂące aux rĂ©serves, les bouchers dĂ©taillants Ă©taient pourvus comme Ă  l'ordinaire. Les reprĂ©sentants des ouvriers des abattoirs de la Seine ont Ă©tĂ© reçus Ă  la prĂ©sidence du Conseil par M. Marx Dorinoy, qui, aprĂšs cette entrevue, a Ă©galement reçu M. Robert LĂ©vy, prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration des Boucheries en gros, et M. Joubin, prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration des sous-produits des abattoirs. Une rĂ©union, commune a eu lieu ensuite souc la prĂ©sidence du ministre de l'IntĂ©rieur entre les reprĂ©sentants patronaux et ouvriers. Au cours de cette rĂ©union, il a Ă©tĂ© convenu ce qui suit 1° ConformĂ©ment Ă  l'article 2, paragraphe 2 de la loi du 31 dĂ©cembre 1936, le travail reprendra immĂ©diatement; 2° Les contestations qui existent actuellement entre les parties seront portĂ©es immĂ©diatement devant un arbitre dĂ©signĂ© par le .gouvernement. Cet arbitre rendra sa sentence le plus rapidement possible. Cette derniĂšre, conformĂ©ment Ă  l'article 6 de la loi du 31 dĂ©cembre 1936, sera publique, obligatoire et sans appel. Il n'y aura pas de renvois pour faits de grĂšves. L'intendant gĂ©nĂ©ral Bernard, directeur gĂ©nĂ©ral de l'Intendance au ministĂšre de la Guerre, a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© par le PrĂ©sident du Conseil comme arbitre dans le conflit de la boucherie. Voir en DERNIERE HEURE n LES R1C0E0R8 DE HIVER TEMPETE DE NEIGE sur l'Allemagne Berlin, 19 janvier. Un ouragan de neige s'est abattu cette nuit sur toute l'Allemagne. De nombreux navires, surpris par la tempĂȘte, se sont rĂ©fugiĂ©s en hĂąte Ă  Kiel et dans la plupart des ports allemands de la Mer du Nord et de la Baltique. A Sassanitz. de nombreux arbres ont Ă©tĂ© arrachĂ©s. La neige a considĂ©rablement gĂȘne la circulation ferroviaire. INONDATIONS en AmĂ©rique New-York, 19 janvier. Les inondations de la riviĂšre Ohio et de ses affluents qui touchent huit Etats sur un parcours de kilomĂštres ont causĂ© la mort de six personnes et contraint trois mille familles Ă  Ă©vacuer leurs domiciles. Les dommages matĂ©riels s'Ă©lĂšvent Ă  plusieurs millions de dollars. Cinq mille employĂ©s de l'organisation du travail des chĂŽmeurs, sous la direction d'ingĂ©nieurs du gĂ©nie militaire, combattent le flĂ©au qui est dĂ» aux pluies incessantes des deux derniĂšres semaines. LE FROID SÉVIT en Europe Centrale Varsovie, 19 janvier. Un froid trĂšs, vif rĂšgne dans toute la Pologne. A Varsovie, par 170 au-dessous de zĂ©ro, la Vistule est gelĂ©e. Le fleuve charrie des glaçons jusqu'Ă  son embouchure et les brise-glaces fonctionnent sans arrĂȘt dans la baie de Dantzig. A Lwow, le froid atteint moins 20"; 87 personnes se sont prĂ©sentĂ©es hier dans les hĂŽpitaux avec les mains, les pieds ou les oreilles gelĂ©es. BUCAREST, 19 janvier. Le Danube est gelĂ© entre Galatz et Tulcea. La couche de glace est trĂšs Ă©paisse et l'on peut traverser le fleuve d'une rive a l'autre. A Constanza, la Mer Noire est gelĂ©e jusqu'Ă  100 mĂštres de la rive. Plusieurs personnes sont mortes de froid. Un paysan a Ă©tĂ© dĂ©vorĂ© par les loups qui, en plusieurs endroits, cherchent Ă  pĂ©nĂ©trer dans les villages. A PROPOS DE LA TAXE UNIQUE DE 6 SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES Voir plns loin en Informations diverses L'OURAGAN SUR LA MANCHE Ou difue anflaite est battue par le* flot*. LES ENTREVUES CƒRING-MUSSOUNI Il faut rĂ©gler d'abord l'affaire espagnole dit un article inspirĂ© Roux, 19 janvier. Les premiĂšre* prĂ©cisions sur les conversations Goering-Mussolini et sur la rĂ©ponse italoallemande Ă  la note anglaise sont donnĂ©es par Virginio Gayda dans le Giornale d'Italia organe nettement inspirĂ© par le Duce. D'aprĂšs celui-ci, le voyage du gĂ©nĂ©ral Goering a confirmĂ© la soliditĂ© du front italo-allemand Ă  l'Ă©gard de tous les problĂšmes europĂ©ens. Entre Rome et Berlin, il n'y a plus rien Ă  Ă©claircir ou Ă  dĂ©finir; il suffit de mettre Ă  jou! la collaboration d'aprĂšs les variations du moment. L'axer Rome-Berlin demeure la directive essentielle de la politique extĂ©rieure italienne. Les autres collaborations auxquelles participe l'Italie, par exemple le c Gentlemen's agreement », ne s'opposent pas Ă  cette directive centrale, mais s'harmonisent avec elle. Le problĂšme espagnol a Ă©tĂ© le principal de ceux qui furent examinĂ©s dans les conversations de Rome. Son importance dĂ©coule non seulement des complications internationales qu'il peut entrainer, mais aussi de ce que rien ne pourra ĂȘtre tentĂ© en Europe tant qu'il ne sera pas rĂ©solu. Qu'il s'agisse de Locarno ou du pacte Ă  quatre, il faut d'abord rĂ©gler l'affaire espagnole. Les trois principes de la politique italo-allemande Ă  l'Ă©gard de l'Espagne sont 1° pas de rĂ©gime communiste 2" nĂ©cessitĂ© de cantonner la guerre civile dans les limite de ses Ă©lĂ©ments nationaux authentiques; 3* LE DUCE ET LE GENERAL assistant Ă  une parade au Forma Mussolini prompte collaboration Ă  toute initiative de bonne foi en faveur de la neutralitĂ©. Le miniatre allemand admire les collines d'Anacapri CAPRI, 19 janvier. Le gĂ©nĂ©ral Hermann Goering a passĂ© la matinĂ©e dans son appartement, oĂč il a travaillĂ©. Il avait reçu ce matin un courrier particulier qui avait Ă©tĂ© amenĂ© spĂ©cialement Ă  Naples par le contre-torpilleur Baleno. Cette nuit, le gĂ©nĂ©ral, accompagnĂ© de olusieurs autoritĂ©s italiennes, avait fait une' longue promenade jusqu Ă  Anacapri, oĂč il Ă©tait restĂ© jusqu'Ă  2 heures du matin. Le prince de PiĂ©mont, venu de Naples, a pris part Ă  un dĂ©jeuner que le gĂ©nĂ©ral GƓrinfc a offert en son honneur. Le gĂ©nĂ©ral Goering a dĂ©cidĂ© de prolonger son sĂ©jour Ă  Capri jusqu'Ă  vendredi. POUR SECONDER SON FRÈRE LE DUC DE GLOUCESTER VA QUITTER L'ARMÉE Londres, 19 janvier. On annonce de source officielle que le duc de Gloucester a dĂ©cidĂ© de renoncer Ă  poursuivre sa carriĂšre dans l'armĂ©e afin de pouvoir aider le roi George VI dans l'exercice de ses fonctions. Le duc et la duchesse de Gloucester viendront donc rĂ©sider Ă  Londres et s'installeront Ă  York-House vers la fin du mois de mars. LE RAID PARIS-TOKIO Paris, 19 janvier. L'Ă©quipage Doret-Micheletti compte s'envoler demain matin Ă  6 heures du terrain d Bourget pour Tokio. LA CHAMBRE A REPRIS LE DEBAT SUR L'AMNISTIE Aucin des correctifs dĂ©tendus ĂąV trouvĂ© grĂące Paiub, 19 janvier. La Chambre reprend cet aprĂšs-midi le projet t!'amnistie, dont la discussion avait etĂ© abandonnĂ©e le 31 dĂ©cembre. L'article 2, auquel on en Ă©tait restĂ©, ..concerne entre autres les dĂ©lits de certificats, de violences, voies de faits officiers ministĂ©riels ou agents de la force publique, menaces, M. Marin voudrait que l'on exceptĂąt de ;'amnistie, comme le demandait le gouvernement, le port illĂ©gal d'uniformes et la vente de timbres-poste ayant dĂ©jĂ  servi, mais il renonce bientĂŽt sur les instances de M. SĂ©rol, prĂ©Ìƒx aident de la Commission de lĂ©gislation. M. Parmentier. lui, souhaite que l'on ne montre pas d'indulgence pour les faux commis dans les passeports. Il n'obtient pas davantage gain de cause. *‱ Le dĂ©lit de dĂ©tournement V d'objets saisis ‱‱ M. Vallat est d'avis de refuser l'amnistie pour le dĂ©tournement d'objets saisis. mais M. SĂ©rol soutient que le petit fermier ruinĂ©. qui emporte sa tortie de la ferme un peu de matĂ©riel qui Ă©tait lĂ  Ă  son entrĂ©e dans la ferme, et sur lequel le propriĂ©taire a pratiquĂ© une saisie, ne peut ĂȘtre taxĂ© d'abus de confiance. Une fois de plus, la Commission l'emporte. M. Emile Perrein. dĂ©putĂ© du Maineet-Loire, plaide la cause de ceux qui ont offert, donnĂ© ou reçu des paris pour les courses de chevaux. Ce texte est trop large au grĂ© de la Commission, qui oppose une rĂ©daction limitatlxe lixant des cas exceptionnels, et notamment ceux des petits cafetiers ayant acceptĂ© des paris clandestins. AprĂšs quelques mots de M. François Martin en faveur de l'amendement Perrein. celui-ci est repoussĂ© par 528 voix contre 88. M. Parmentier rĂ©clame l'indulgence pour les contrevenants aux lois sur les lotissements. M. Brmehard l'appuie, mais M. SĂ©rol combat. Une joute au sujet de l'affichage ^des Iocaux disponibles Finalement, M. Parmentier abandonne, mais c'est pour mieux rompre des lances en faveur des propriĂ©taires 'qui ont omis d'afficher les locaux disponibles dans les formes prescrites par lq loi. Le rapporteur, M. Richard, s associe cette façon de voir. AprĂšs deux Ă©preuves douteuses et un scrutin pu- bUe, le second amendement Parmen- -Aler est repoussĂ© par 360 voix contre 3W. Enfin, l'article 2 est adoptĂ©. M, Quenette demande la suppression de l'article 3. qui dĂ©crĂšte l'amnistie pour certains faits commis antĂ©rieurement au 12 novembre 1936 qui ont entrainĂ©, pour les dĂ©linquants primaires, soit une peine d'emprisonnement infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  15 jours, soit une peine d'emprisonnement avec sursis infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  3 mois. soit une peine d'amende infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  500 francs, soit une peine d'amende avec sursis. M. Quenette fait valoir que des petnea diffĂ©rentes peuvent, selon les divers tribunaux, frapper les mĂȘmes dĂ©lits. On aboutirait A l'application d'une Ipi d'amnistie par le pouvoir Judiciaire. ce qui est intolĂ©rable. Sans mĂ©connaĂźtre que l'article en discussion pĂšche par certains cĂŽtĂ©s, M. RĂčcart, garde des Sceaux, prie la Chambre de le voter dans un geste de gĂ©nĂ©rositĂ© envers ceux qui ont fautĂ© une seule fois. t En 1025. rappelle-t-il, l'amnistie personnelle avait Ă©tĂ© accordĂ©e de la mĂȘme façon par M. LĂ©on BĂ©rard » .Tout en reconnaissant oue les moelles du gouvernement sont trĂšs res'pectables. M. Quenette rĂ©pond que les arguments sentimentaux invoquĂ©s par M. Rucart ne dĂ©truisent pas les motifs juridiques sur lesquels il avait basĂ© son raisonnement. Quoi qu'il en soit, le dĂ©putĂ© de Meurthe-et-Moselle s'incline. La suppression de l'article 3 i est repoussĂ©e M. Richard réédite nĂ©anmoins le discours du garde des Sceaux et M. Drouot celui de M. Quenette La suppression de l'article 3. sollicitĂ©e par le dĂ©putĂ© fie la Haute-SaĂŽne, est repoussĂ©e par S93 voix contre 200. aprĂšs explications de vote de MM. Desbons et Parmentier. Le communiste Langumier rĂ©clame l'amnistie pour divers dĂ©linquants primaires condamnĂ©s avant le 1er janvier 1937 Ă  des peines d'amende et de prison avec ou sans sursis. 1 VOUS ne pouvez tout de mĂȘme amnistier tous les escrocs a, proteste le prĂ©sident de la Commission de lĂ©gislation, approuvĂ© par le gouvernement. La Chambre dit de mĂ©me par 428 voix contre 75. en rejetant l'amendement Langumier. M. Parmentier voudrait qu'au moins il fut entendu que l'amnistie ne bĂ©nĂ©ficiera pas aux infractions non encore jugĂ©es car les magistrats ne peuvent tout de mĂȘme pas condamner un individu eh le sachant par avance amnistie- L'AssemblĂ©e, qui n'en e3t pas Ă  une contradiction prĂšs, dĂ©cide que si i par 312 voix contre 216. Elle adopte, par contre, Ă  mains levĂ©es, un amendement de M. Frot. visant une derniĂšre catĂ©gorie de peines. Mais voici que s'ouvre le chapitre des restrictions ExceptĂ©s, suggĂšre M. Marin. e vol, les coups et blessure3 ayant entraĂźnĂ© une incapacitĂ© de plus Par 378 voix cette sutgestion est repoussĂ©;. t Am^lst'ei les chĂŽmeurs condamnĂ©s pour escroanerle et abus de confiance plaide M. LĂ©gumier qui se contente d'ailleurs, d'une manifestation Ă©lectorale et se garde d'insister. Pu 'd'amnistie pour les fraudes en matiĂšre d'appellation d'origine,. souhalte M. Parmentier, bientĂŽt battu par 398 voix contre 201. Les communistes n'oublient pas les leurs Le communiste Quinet voudrait que l'on rĂ©intĂšgre dans la nationalitĂ© française ceux qui en ont Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©s dĂ©chus en vertu de l'article 9 de la loi du 10 aoĂ»t 1927. Il s'agit du cas d'un Polonais naturalisĂ©, militant syndicaliste, nommĂ© Olzanski, et d'une femme française par son mariage. Mme RĂ©gnier, qui distribua des tracts antimilitaristes. Pour repousser l'amendement, le rapporteur fait valoir la gravitĂ© des faits. Le cas des commerçants faillis On vote. Il. y a lieu de procĂ©der au pointage. Pendant qu'on s'y livre, la Chambre aborde l'article 4 qui rĂ©habilite, Ă  certaines exceptions prĂšs et les droits des crĂ©anciers Ă©tant rĂ©serves, les commerçants dĂ©clarĂ©s en Ă©tat de faillite ou de liquidation judiciaire antĂ©rieurement Ă  la promulgation de la loi. Sauf en cas de rĂ©cidive, veut faire prĂ©ciser M. Vallat. Un nouveau scrutin intervient. L'amendement Vallat est repoussĂ© par 328 voix contre 218. L'article 4 votĂ©, la suite du dĂ©bat est renvoyĂ©e Ă  jeudi aprĂšs-midi. La sĂ©ance est levĂ©e Ă  19 heures Quelques Instants plus tard, on apprenait dans les couloirs que l'amendement Quinet Ă©tait adoptĂ© par 299 voix contre 245. M. P. LA CRISE DE LA NATALITÉ Une proposition de M. Le Poullen Paris, 19 janvier. Dans son rapjport sur l'aide Ă  apporter aux familles nombreuses, M. Le Poullen, dĂ©putĂ© d'Iile-et-Vllaine, rappelle la situation dĂ©mographique de la France en 1935 dĂ©cĂšs de p!u3 que de naissances. t La France, ajoute-t-il, a le bilan naissances-dĂ©cĂšs le plus dĂ©favorable de toutes les nations de l'Europe et sans doute du monde entier. L'Italie, population sensiblement Ă©gale Ă  la nĂŽtre, compte un excĂ©dent annuel de naissances depuis trois ans. L'Allemagne volt cet excĂ©dent approcher de Nous devons, par tous les moyens. nous efforcer de favoriser le nombre des naissances, si -nous voulons conserver il. notre pays son rang de grande nation x Nous ne pouvons plus espĂ©rer, au-' jourd'hui. un relĂšvement de notre po- pulation en abaissant le pourcentage do" la mortalitĂ© infantile les lois d'hygiĂšne sociale, de ce cĂŽtĂ©. ont donnĂ© leur plein rĂ©sultat. Ne nous leurrons donc pas d'espoirs chimĂ©riques Ne comptons pas sur des naturalisations aouvent reerettables pour maintenir le chiffre de notre population. La crise de la natalitĂ© est due chez nous Ă  l'affaiblissement du niveau mora des jeunes gĂ©nĂ©rations, du fait de 1n guerre et des annĂ©es d'aprĂšs-guerre et aux difficultĂ©s matĂ©rielles de toutes Fortes auxquelles se heurtent les jeunes nonr fonder un foyer. La crise agricole a Ă©prouvĂ© une population oĂč nous trouvions le plus de berceaux. Si nous voulons Ă©viter que les Jeunes mĂ©nages ne limitent pas le nombre de leurs enfants. 11 faut leur donnPr la possibilitĂ© de les Ă©lever en leur Ă©VUant la gĂšne et la misĂšre. En conclusion, M. Le Poullen prĂ©sente la proposition tendant Ă  accorder aux chefs de famille de nationalitĂ© française non assujettis Ă  l'impĂŽt gĂ©nĂ©ral sur le revenu, une allocation annuelle de 900 francs par enfant de moins de 14 ans Ă  partir du troisiĂšme. interdisant les dĂ©parts de volontaires pour l'Espagne Dans son discours de réélection, M. Jeanneney avait prĂ©cĂ©demment rappelĂ© le rĂŽle de la Haute AssemblĂ©e Paris, 19 janvier. La sĂ©ance est ouverte a 15 h. 30, sous la prĂ©sidence de M. Jeanneney qui, l'on s'en souvient. fut réélu prĂ©sident Ă  la derniĂšre sĂ©ance. AprĂšs les remerciements et les congratulattons d'usage. M. Jeanneney fait le tour de l'activitĂ© sĂ©natoriale au cours des huit premiers mois de la lĂ©gislature. Il commence par regretter que le SĂ©nat ait Ă©tĂ© parfois dans l'obligation de discuter de maniĂšre hĂątive des textes lĂ©gislatifs importants et plus particuliĂšrement le projet de budget de 1937. Il observe, Ă  ce propos, que la Haute AssemblĂ©e n'a jamais, Ă  aucun moment de son histoire, songĂ© Ă  se drexser contre la Chambre issue du suffrage universel. Elle ne poursuit qu'un but lĂ©gifĂ©rer avec mĂ©thode dans la clartĂ©, et rien de plus. Le SĂ©nat est tout entier acquis aux idĂ©es de progrĂšs social, mais une difficultĂ© subsiste assortir aux choses conçues les moyens de les rĂ©aliser. Le rĂŽle modĂ©rateur de la Haute AssemblĂ©e C'est ici que le rĂŽle modĂ©rateur du SĂ©nat a l'occasion de s'exercer de façon utile. En fin de compte, nul n'oserait prĂ©tendre que le stage subi ici par maints projets de loi n'ait pas Ă©tĂ© grandement profitable Ă  leur mise au point. nous Le pays, continue l'orateur, dont pensĂ©e, s'en aperçoit avec le temps. Ne s'en rend-il pas mĂȘme, dĂšs maintenant, un peu compte ? Les conditions de la reprise des affaires Le prĂ©sident du SĂ©nat, aprĂšs avoir dit les inquiĂ©tudes par lesquelles avait passĂ© l'opinion publique, envisage les possibilitĂ©s de reprise des affaires. Mais il prĂ©cise Qu'on se le dise bien, toutefois, les capitaux nĂ© consentiront Ă  s'employer que dans la stabilitĂ©, dans le respect des engagements, dans l'ordre lĂ©gal. » Et. pour terminer, M. Jeanneney adresse un appel Ă  la collaboration de tous les Français. Sa pĂ©roraison est saluĂ©e de bravos prolongĂ©s. La liste des interpellations Le prĂ©sident du SĂ©nat donne ensuite lecture des Interpellations dĂ©posĂ©es depuis la derniĂšre session, interpellations que nous avons donnĂ©es au fur et mesure de leur dĂ©pĂŽt. D autre part, M. Jeanneney rappelle au SĂ©nat que les interpellations suivantes avaient Ă©tĂ© prĂ©oĂ©demment dĂ©posĂ©es 1" par M. Gautherot, sur les menĂ©es communistes en France et en Afrique du Nord; 2° par M. Gaston RugĂ© sur les licences d'importations; 3u par M. Le Bail sur les mesures relatives Ă  l'importation de l'iode; 4° par M. Armbruster sur la politique extĂ©rieure 5° par MM. Jean Philipp et Bstoulle concernant les travaux et le personnel de la radiodiffusion; enfin, 6° par M. Roux-Freisslneng sur les menĂ©es antifrança'ies en AlgĂ©rie. L SĂ©nat fixe aux dates suivantes 1m Interpellations ci-aprĂšs le 26 janvier, interpellation Ce MM. Philipp et Batoulle le 29 janvier, celle de MM. Oautherot et Roux-Freislneng situation en AlgĂ©rie le 2 fĂ©vrier, celle de M. aautherot menĂ©es communis- tes en France et aprĂšs la prochaine seasion de la 8. D. N.. l'interpellation de M. Marcel Plaisant. La nomination des commissions Le SĂ©nat dĂ©cide ensuite, qu'il nommera ses Commissions annuelles, le mardi 2 fĂ©vrier, et le jeudi 4 fĂ©vrier. celle de la Commission d'instruction de la Cour de justice. Le prĂ©sident du Conseil dĂ©pose le projet de loi adoptĂ© par la Chambre concernant le dĂ©part de volontaires pour l'Espagne. Ce projet sera discutĂ©, jeudi prochain. La Haute AssemblĂ©e valide encore l'Ă©lection de M. Ouilhem dans le dĂ©- partement de l'Aude et s'ajourne au. 21 janvier, 15 heures. UN INCENDIE MONSTRE DANS LES DOCKS DE MELBOURNE Un paquebot est endommagĂ© par les flammes qui causent cent millions de dĂ©gĂąts Melbourne, 19 janvier. Un violent incendie a eclatĂ© dans les docks Victoria, oĂč se trouvent entreposĂ©es de grandes quantitĂ©s de vivres appartenant au gouvernement australien. Les flammes, activĂ©es par le vent, se sont rapidement communiquĂ©es au paquebot Port-de-Wellington, qui a dĂ» ĂȘtre remorquĂ© jusqu'au fleuve. Les dĂ©gĂąts sont Ă©valuĂ©s Ă  prĂšs de cent millions de francs. C'est Berchtesgaden que siĂ©gerait dĂ©aormaia la chancellerie du Reich MUNICH, 19 janvier. Berchtesgaden parait devoir devenir, dans un avenir prochain, le siĂšge de la chancellerie du Reich. L'Ă©rection, Ă  Berchtesgaden, d'un Ă©diflce destinĂ© Ă  abriter les services de la chancellerie semble indiquer que M. Adolphe Hitler veut Ă©tablir sa rĂ©sidence habituelle dans les Alpes bavaroises. On remaroue, Ă  ce propos, que les sĂ©jours de M. Adolphe Hitler Ă  Berlin se font de plus en plus rares et ne durent gĂ©nĂ©ralement que quel- ques jours. ÉCHOS PARLEMENTAIRES Une dĂ©lĂ©gation radtcale-ioelaliite se rendra Ă  Barcelone PARts'19 janvier. Le groupe rdlclsoclallate s'est rĂ©uni ce matin Ă  la Chambre. RĂ©pondant Ă  une Invitation de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Catalogne, il a dĂ©signĂ© une dĂ©lĂ©gation composĂ©e de MM. Bosaoutrot, Bezos. Fully. Galimand. Ouiebard, LauaUe, Manent et Naudin, qui aura pour mission de se rendre Ă  But- celone, afin de recueillir dee informations au. situation. La question de la retraite des Inscrits maritimes a Ă©tĂ© ensuite exposĂ©e par M. Perrot et un ordre du jour a Ă©tĂ© votĂ© pour signaler au Gouvernement l'urgente nĂ©cessitĂ© du relĂšvement de la pension des Inscrits maritimes Une dĂ©- I lĂ©gation se rendra. cet effet, auprĂšs au mUçOsUe des Finanett, LA GUERRE D'ESPAGNE Valence et Salamanque ont rĂ©pondu r!au plan due contrĂŽle des voies d'accĂšs en Espagne LEURS RÉPONSES SONT, ELLES AUSSI, TRÈS CONDITIONNELLES. SINON NÉGATIVES Une bombe tombĂ©e dans une des artĂšres du centre de Madrid, a erevĂ© la voĂ»te du mĂ©tro LONDRES. 19 janvier. Les rĂ©ponses de Valence et de Salamanque au plan provisoire de contrĂŽle des voies d'accĂšs terrestres et maritimes Ă  l'Espagne sont maintenant parvenues Ă  Londres. On sait que ce projet, Ă©laborĂ© par le ComitĂ© de non-intervention, avait Ă©tĂ© soumis, au nom de ce comitĂ© et par les moins du Gouvernement britannique. aux autoritĂ©s des deux partis espagnols, au dĂ©but de janvier. rĂ©ponse de Valence Ă©numĂšre certaines conditions dont la rĂ©alisation pourrait, aux yeux du Gouvernement espagnol, rendre ce plan acceptable. Elle fait notamment observer que le plan du ComitĂ© demande Ă  ĂȘtre prĂ©cisĂ© en ce qui concerne le contrĂŽle des ports aux mains des insurgĂ©s, et que ce projet doit ĂȘtre Ă©tendu aux arrivĂ©es de volontaires en Epsagne. Elle spĂ©cifie Ă©galement que la violation du projet par l'une quelconque des parties contractantes devrait rendre leur libertĂ© d'aotion aux autres signataires. Les objections des nationaux La rĂ©ponse de Salamanque, dont le rĂ©sumĂ© tĂ©lĂ©graphique seulement a Ă©tĂ© reçu Ă  Londres, n'accepte ni ne refuse .en termes spĂ©cifiques le plan de contrĂŽle mais on a l'impression, dans les milieux bien informĂ©s. que les autoritĂ©s de Salamanque rĂ©pugnent Ă  prendre ce plan en considĂ©ration. Ces autoritĂ©s. aprĂšs avoir rendu hommage au strict respect de la neutralitĂ© par le Gouvernement britannique, expriment le regret que d'autres puissances ne se conforment pas aussi rigoureusement Ă  leurs engagements en particulier en ce qui concerne les dĂ©parts de volontaires. Vers l'Ă©laboration d'un nouveau projet Relativement Ă  ces deux rĂ©ponses et au caractĂšre nĂ©gatif de celle de Salamanque, on fait observer, dans les milieux autorisĂ©s, que de nombreux aspects du plan de contrĂŽle soumis aux Espagnols ont Ă©tĂ© modifiĂ©s au cours des travaux ultĂ©rieurs du ComitĂ© de non-intervention. Le projet initial est, en fait, actuellement en voie de remplacement par un nouveau plan de contrĂŽle qui. espĂšre-t-on, enrayera les dĂ©parts de volontaires aussi bien que l'envoi de matĂ©riel de guerre. Ce projet, qui pourrait voir le jour prochainement, aurait, en outre, l'avantage de rĂ©pondre Ă  la- plupart-des points soulevĂ©s par les deux rĂ©ponses espagnoles, et de ne pas' dĂ©pendre, autant1 que le prĂ©cĂ©dent, de l'acceptation des deux partis en prĂ©sence. MalgrĂ© la rĂ©ticence des milieux ofnciels, au sujet de ce nouveau projet, on recueille l'impression qu'il combinerait le contrĂŽle terrestre et maritime prĂ©vu dans le plan initial, avec un systĂšme de surveillance qui fonctionnerait en dehors du territoire et des eaux territoriales espagnoles. LE BOMBARDEMENT PAR UN AVION INCONNU DU CONTRE-TORPILLEUR FRANÇAIS MAILLÉ-BRÉZÉ » Toutou, 19 janvier. Un officier du MaillĂ©-BrĂ©zĂ©, arrivĂ© cette nuit Ă  Toulon, a fait la dĂ©claration suivante, au sujet du bombardement de cette belle unitĂ© navale française, par un mystĂ©rieux avion, au large du Cap San Sebastian Le MaillĂ©-BrĂ©zĂ©, a-t-il dit, avait quittĂ© hier matin, vers 8 heures, Barcelone. Une heure plus tard, un avion trimoteur, ne portant aucune marque extĂ©rieure, a survolĂ© le contre-torpilleur Ă  une hauteur d'environ mĂštres, et a lancĂ© six bombes qui sont tombĂ©es Ă  environ 200 mĂštres du bord. L'Ă©quipage, massĂ© sur le pont, hurlait apres les aviateurs. MalgrĂ© la demande des matelots, les officiers du bord refusĂšrent de tirer sur l'avion et le navire a poursuivi sa route sur Toulon. En dĂ©pit de tous les efforts des observateurs de ce navire, il a Ă©tĂ© matĂ©riellement impossible d'Ă©tablir la nationalitĂ© de l'avion. Le MaillĂ©-BrĂ©zĂ©. qui fut lancĂ© en 1931 aux chantiers de PenhoĂ«t, Ă  StNazaire, Ă©tait parti de Palma le 16 Ă  destination de Barcelone. Il est actuellement dĂ©tachĂ© sur les cĂŽtes d'Espagne, prĂȘt Ă  assurer Ă©ventuellement l'Ă©vacuation des ressortissants français des ports de la pĂ©ninsule. Le ministĂšre de la marine confirme l'agreeeion Paris, 19 janvier. Le miniatĂ©re de la Marine communique Le contre-torpilleur MaillĂ©-BrezĂ©, venant de Barcelone et ralliant Toulon, a Ă©tĂ© attaquĂ© en mer et bombardĂ© a deux reprises, le 18 janvier, a 9 h. 35. Ă  15 milles au large du Cap San SĂ©bastian. Cinq bombes ont Ă©tĂ© lancĂ©es, dont aucune n'a atteint le MaillĂ©-BrĂ©zi. Une enquĂȘte est ouverte pour identifier l'agresseur. Le ministre de la Marine, prĂ©cis» nt les rĂšgles gĂ©nĂ©rales Ă©dictĂ©es par le dĂ©cret sur le service Ă  bord des bĂątiments de la Flotte, a donnĂ© comme Instructions aux navires de guerre francais croisant sur les cĂŽtes d'Espagne, l'ĂȘtre en tout temps prĂȘts Ă  riposter Ă  toute attaque nettement dirigĂ©e contre eux. Un bĂątiment italien aurait Ă©tĂ© capturĂ© par les gouvernementaux Midrid, 19 janvier Selon un rappor venant de Valence, un bateau marchand Italien transportant' une cargaison d bombes et de matĂ©riel de guerre destinĂ© aux nationalistes aurait Ă©tĂ© capturĂ© par un navire appartenant aux loyalistes. Un submersible tente de torpiller un vapeur VALENcp, 19 janvier. On mande de Tarragone qu'un sous-marin dont on ignore la nationalitĂ©, a lancĂ© deux torpilles en direction du vapeur espagnol au large du lieu dit La Punta Del Faro. Les engins n'ont pas atteint le bateau et sont venus Ă©clater contre les rochers, au pied du port. Le s'est mis Ă  l'abri dans le port de Tarragone. Quel est le sort du Français Georges Hamel ? BAYONHE, 19 janvier. Des renseignements particuliers de bonne source contredisent l'information publiĂ©e ces jours derniers au sujet de la rĂ©cente exĂ©cution, Ă  Santander, du Français Georges Hamel, qui dirigeait les entrepĂŽts de pĂ©trole d'une maison française. Quand le gouvernement espagnol dĂ©crĂ©ta le monopole du pĂ©trole, M. Hamel abandonna cette direction et crĂ©a une distillerie Ă  son compte. DĂšs le dĂ©but de la guerre civile, il fut l'objet de menaces de moft de la part des extrĂ©mistes. C'est dans le courant de septembC qu'un matin, vers 10 h. 30, il fut apprts hendĂ© Ă  son domicile et jetĂ© dans une automobile. Depuis on est restĂ© sans nouvelles de lui Les consuls français de Santander et de Eilbao ont ouvert une enquĂȘte, mais toutes les recherches sont restĂ©es vaines. Georges Hamel Ă©tait le doyen de la colonie française de Santander. Le cardinal-primat d'Espagne Ă©crit au gouvernement basque PAR BAYowre, 19 janvier. Le cardinal primat d'Espagne a adressĂ© une lettre Ă  M. Aguirre, prĂ©sident du gouvernement basque de Bilbao, reprochant Ă  celui-ci et ses collaborateurs de continuer leur collaboration au gouvernement de Valence. LA LOTERIE NATIONALE Aujourd'hui, Ă©mission de la premiĂšre tranche 1937 PARIS, 19 janvier. Le SecrĂ©tariat de la Loterie Nationale procĂ©dera demain Ă  rĂ©mission de la premiĂšre tranche de la loterie 1937. Le tirage aurait 1'.u au dĂ©but de la seconde quinzaine de fĂ©vrier. COURTE FUGUE. Guxlph Ontario, 19 janvier. A l'exception de cinq d'entre eux, la totalltĂ© des prisonniers qui s'Ă©taient Ă©vadĂ©s de la maison de rĂ©forme d'Ontario ont Ă©tĂ© capturĂ©s. LE PAPE SOUFFRE A NOUVEAU DE DOULEURS PLUS FREQUENTES Crrt du Vaticak, 19 janvier. Les douleurs que le pape ressentait & la jambe sont devenues plus frĂ©quentes depuis deux jours, aprĂšs l'apaisement qui s'Ă©tait vĂ©rifiĂ© ces derniers temps. Cela ne l'empĂȘche pas, cependant, de continuer Ă  se consacrer Ă  ses occupations habituelles. Une ConfĂ©dĂ©ration nationale des Syndicats professionnels On nous communique La ConfĂ©dĂ©ration Nationale des Syndicats Professionnels Français vient de se constituer. Son siĂšge social, est fixĂ© provisoirement 34, rue Godotde-Mauroy 9*, ses statuts ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s sous le n, Elle a pour but De crĂ©er des syndicats professionnels dans chaque Ă©tablissement commercial et industriel ou agricole, pour la dĂ©fense des intĂ©rĂȘts .de leurs »dhĂ©rents. De grouper lesdits syndicats en fĂ©> dĂ©rations dĂ©partementales et de rĂ©unir ces fĂ©dĂ©rations dans la ConfĂ©dĂ©ration Nationale. D'observer si les conditions de travail sonc conformes au code de travail, soit en raison de la lĂ©gislation Ă©tablie, soit en raison de contrats individuels et collectifs, soit par suite de rĂšglements existants entre les directions et les salariĂ©s. Faire connaĂźtre au patronat la doctrine Ă©conomique et sociale de la ConfĂ©dĂ©ration nationale des syndicats professionnels français, travailler Ă  Ă©tablir dans l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral une coopĂ©ration sur toutes les amĂ©liorations aux conditions de travail. Faire respecter la libertĂ© du travail et des opinions, obtenir pour chaque travailleur un salaire lui permettant d'Ă©lever dignement sa famille et assurer la sĂ©curitĂ© de ses vieux jours. RĂ©solument placĂ©e en dehors de toute Ă©cole politique et religieuse, la ConfĂ©dĂ©ration des syndicats professionnels français rĂ©unira les travailleurs conscients de la lutte Ă  mener pour la reconstitution Ă©conomique et sociale et pour la revalorisation de l'homme dans son mĂ©tier. Pour tous renseignements. s'adresser au siĂšge, 34, rue Godot-de-Mauroy. LE SHAH DE PERSE RAPPELLE SON mINISTRE A PARIS Une allusion littĂ©raire serait Ă  l'origine de cette mesure Paris, 19 janvier. IndisposĂ© par une allusion d'un Ă©chotier parisien, jugĂ©e par lui blessante pour l'Iran, le Shah de Perse vient de rappeler son ministre Ă  Paris. M. Abolghassen Frouhar. Le souverain iranais a dĂ©commandĂ© du mĂȘme coup la participation de la Perse A l'Exposition Universelle de Paris. SOURIMES II ne faut Jurer de rien. Surtout, vteux garçons fiers de votre libertĂ©, n'affirmez pas devant tĂ©moins que vous n'ĂȘtes point eatpĂ©trĂ©s dans les Ilens du marlage. On ne sait Jamais. Supposer que l'aventure dont ne rit pas, mals pas du tout, son hĂ©ros, un habitant du douziĂšme arrondissement parisien, vous soit arrivĂ©e f. L'homme se prĂ©sente il la mairie Je viens chercher une piĂšce d'Iden. tltĂ©. la meilleure de toutes, un extrait des reglstres de l'Ă©tat civil. VoilĂ , monsieur. "Hein ? Mais vous faites erreur. Je suis cĂ©libataire Non, monsieur. Vous avea Ă©pousĂ©, 11 y a vingt ans, au Creusot, une dame qui ee prĂ©nomme Augustlne. Mol f. Vous-mĂȘme. C'est Ă©crit. Bt sur papier timbrĂ© encore L'explication est simple pendant la guerre un soldat Ă©gare son livret mlHtaire, un quidam s'en empare et vit sous le nom du poilu dĂ©possĂ©dĂ©. C'est aiĂ»il qu'un cĂ©libataire prend femme sans le savoir. a plusieurs enfant* qu'il ne connaĂźtra Jamais et endosse aux yeux de la toi une responsabilitĂ© Ă  laquelle Il ne saurait se soustraire. Le voilĂ  bien, le vrai dĂ©doublement de la personnalitĂ© Avec cette mĂ©thode d'usurpation un honnĂȘte citoyen peut non seulement Ă©pouser Ă  son Insu la plw Insupportable mettre du paye. mais passer aux Assise» sans se douter de sa culpabilitĂ© et finir sei Jour» au bagne, malgrĂ© lui, malgrĂ© se» bons antĂ©cĂ©dents. CĂ©libataires, Je vous en prie, acceptez le conseil suivant.. Courez vite au bureau de l'Ă©tat civil. VĂ©rifiez donc si personne n'a eu l'IdĂ©e saugrenue de se marier pour vous. 81 oui, entamez le tour de Franee la recherche de l'autre vous-mĂȘme. Si non, convolez en justes noces aa plus tĂŽt afin de couper court a un vol d'IdentitĂ© toujours possible et Ă  un nuriage mystĂ©rieux dont vous ferte7. les trafs sans ĂȘtre prĂ©sent a la cĂ©rĂ©monie.. Ah qu'il est malaisĂ© de rester rĂ©IU bataire > LE PETIT QBfOOUUS PARIS, 20 janvier, 5 heures du matin. LE CONSEIL DE LA SE REUNIRA DEMAIN A GENEVE Six ministres des Affaires EtrangĂšres seront prĂ©sents GErtvE, 19 janvier. On confirme l'arrivĂ©e imminente Ă  GenĂšve de MM. Anthony Eden, Litvinoff et Antonesco. Avec MM. Delbos. Rustu Aras et Sandler, la 96' session au Conseil qui s'ouvre jeudi, Ă  17 heures, rĂ©unira, a GenĂšve, six ministres des Affaires EtrangĂšres d'Europe. Il est impossible que l'occasion ne soit pas mise Ă  profit par eux pour confĂ©rer, en marge du Conseil, des grands problĂšmes actuels de la politique extĂ©rieure. Abstention de l'Italie ROME. 19 janvier. L'Italie ne participera pas aux travaux du Conseil de la S. D. N. On fait, en effet, remarquer qu'aucun Ă©vĂ©nement nouveau n'est venu modifier l'attitude de l'Italie Ă  l'Ă©gard de GenĂšve. Une confĂ©rence Ă  l'HĂŽtel Matignon PARIS, 19 janvier. M. Blum prĂ©si- dent du Conseil, a prĂ©sidĂ© cet aprĂšsmidi, Ă  l'hĂŽtel Matignon, une confĂ©rence en vue d'examiner les diverses questions qui vont ĂȘtre posĂ©es au prochain conseil de la S. D. N., Ă  GenĂšve. A cette confĂ©rence assistaient notamment MM. Delbos, Vienot, Massigli, Daladler et Gasnier-Duparc et Pierre Cot. M. Yvon Delbos quitte Paris PARIS, 19 janvier. Ce soir, Ă  23 h. 20, M. Yvon Delbos a quittĂ© Paris par la gare de Lyon pour GenĂšve. Il Ă©tait accompagnĂ© de MM. ViĂ©not, soussecrĂ©taire d'Etat Massigli, directeur politique, et Basdevent, jurisconsulte. LA LIBÉRATION DE LA CLASSE » AURA UEU LE 10 AVRIL Les opĂ©rations de libĂ©ration des militaires appartenant aux catĂ©gories suivantes a engagĂ©s par devancement d'appel en avril 1935 et astreints Ă  2 ans de service b ajournĂ©s ou sursitaires appartenant Ă  la troisiĂšme fraction de la classe 1933 et Ă  la premiĂšre fraction de la classe 1934, incorporĂ©s en octobre 1935 et astreints Ă  18 mois de service c ajournĂ©s ou sursitaires appartenant Ă  la deuxiĂšme fraction de la classe 1933 incorporĂ©s en avril 1936 et astreints Ă  un an de service par application des dispositions de l'article l" de la loi du 17 mars 1936 d tous autres jeunes gens dont les obligations lĂ©gales d'activitĂ© expirent le 15 avril 1937, auront lieu par anticipa- tion le 10 avril 1937. Toutefois. les jeunes gens appartenant Ă  la catĂ©gorie b ci-dessus et incorporĂ©s en septembre 1935 dans les unitĂ©s de forteresses dent les obligations lĂ©gales d'activitĂ© expirent 'e 1ℱ mars 1937. seront libĂ©rĂ©s par anticipation le 20 fĂ©vrier 1937. LES RECOUVREMENTS DES IMPOTS SONT EN DIMINUTION Paris, 19 janvier. Le ministre des Finances vient de communiquer le tableau du rendement des impĂŽts en dĂ©cembre dernier et pour l'ensemble de 1936. Au titre des impĂŽts indirects, il a Ă©tĂ© perçu 3 milliards 689 m'llions en dĂ©cembre. Les recouvrements effectuĂ©s au titre des impĂŽts cĂ©dulaires de l'impĂŽt gĂ©nĂ©ral sur le revenu des Contributions directes et des taxes assimilĂ©es, au cours de dĂ©cembre, s'Ă©lĂšvent Ă  francs. Cette somme est infĂ©rieure de francs aux recouvrements constatĂ©s en dĂ©cembre 1935. pendant la mĂȘme pĂ©riode. Il a Ă©tĂ© recouvrĂ© au profit des dĂ©partements et des communes, au titre des anciennes Contributions directes, une somme de francs. Le total des Contributions directes encaissĂ©es en dĂ©cembre 1936 atteint ainsi la somme de francs. On arrĂȘte les agresseurs du notaire de Saint-Antonin Toulouse, 19 janvler. L'enquĂȘte menĂ©e de concert avec la SĂ»retĂ© car la police mobile de Toulouse au sujet de l'agression commise sur la personne du notaire de Saint-Antonin Tarn-etGaronnei, vient d'aboutir Ă  l'arrestation de deux mauvais sujets dĂ©jĂ  connus de la police. Une troisiĂšme arrestation serait imminente dans la rĂ©gion parisienne. Paris, 19 janvier. Le Journal Officiel va publier demain matin le dĂ©cret portant application de la semaine de 40 heures aux chemins de fer. Ce decret prĂ©voit une pĂ©riode d'application oui lm Juaou'Ă . la fin du mois d» mai, LES CONFLITS DU TRAVAIL Le personnel des abattoirs de la Villette et de Vangirard accepte les dĂ©cisions prises par les dĂ©lĂ©gaĂ©s PARis, 19 janvier. Les ouvriers et employĂ©s des abattoirs de la Villette et de Vaugirard, ainsi que des boucheries et charcuteries en gros, Ă  l'issue d'une rĂ©union cet aprĂšs-midi, ont dĂ©cidĂ© d'accepter le protocole et de reprendre le travail demain matin. Des ouvriĂšres parisiennes occupent un magasin PARIS, 19 janvier. Les ouvriĂšres d'un magasin de nouveautĂ©s, 36, faubourg Saint-Denis, se sont mises en grĂšve et ont occupĂ© les locaux. GrĂšve du bĂątiment dans le Limousin LIMOGES, 19 janvier. Les pourparlers entamĂ©s au sujet de l'augmentation des salaires et de l'application des lois sociales ne leur ayant pas donnĂ© satisfaction, les ouvriers du bĂątiment et des scieries de la rĂ©gion de Sainte Amand. Magnazeix et de Fromental se sont mis en grĂšve. .et Ă  Vichy ViCHY, 19 janvier. Les ouvriers du bĂątiment de Vichy se sont mis en grĂšve. Ils estiment que l'accord mtervenu entre patrons et ouvriers concernant la semaine de 40 heures n'est pas respectĂ©. Pas de grĂšve gĂ©nĂ©rale dans les charbonnages belges BRUXELLES, 19 janvier. Un accord a Ă©tĂ© conclu entre patrons et ouvriers mineurs au sujet de l'application de la semaine de 45 heures. Tout danger d'une grĂšve gĂ©nĂ©rale dans les charbonnages serait donc Ă©cartĂ©. wvw> M. Bastid parle au dĂźner de YUnion des Industries exportatrices La dĂ©valuation de-franc a Ă©tĂ© opĂ©rĂ©e, affirme-t-il, dans l'intĂ©rĂȘt de notre commerce Paris, 19 janvier. M. Bastid, ministre du Commerce, a prononcĂ© ce soir au diner de l'Union des Industries Exportatrices une importante allocution, dont voici les principaux passages Nous avons conscience de ne pouvoir demander aux producteurs français les sacrifices qui dĂ©pendent d'eux pour reprendre plus largement pied sur les marchĂ©s extĂ©rieurs que si de notre cĂŽtĂ©. nous Gouvernement, nous manifestons une activitĂ© renouvelĂ©e en matiĂšre de traitĂ©s de commerce. Certaines nĂ©gociations sont engagĂ©es. d'autres vont l'ĂȘtre. Nous offrons, ou nous offrirons, aux pays Ă©trangers des avantages oui ne seront consentis que contre des avantages Ă©quivalents. » Le ministre a ensuite assurĂ© les exportateurs de la sollicitude du Gouvernement et il s'est exprimĂ© en ces termes au sujet du lien qui existe entre la politique monĂ©taire et la politique commerciale nui la cracruĂšle. la gerce et favorise l'aioarltion de' rides. Le chaque soir avec une hu!!e vĂ©f*tiile- D"ns l'Rnthong'a'mo du dĂ©part Pt dons 'i hft»» de faire vo'r le .uir'Ă  votre bel neuf, n» rw» ci soi"» qui ont »>'us prĂ©rleilx qu» iimut» pour conserver la beautĂ© de votrĂ© teint. Claude Jakt. Deux parures de lingerie en deux patrons sealement X» 561, comprenant dans une mĂȘme pochette COMBINAISON, CHEMISE et Cl'LOTTE. Cette parure est garnie de festons de mĂȘme ton ou de teinte tranchante. La combinaison, cintrĂ©e Ă  la taille, est composĂ©e d'un corselet montĂ© Ă  la Jupe par des Jours roulĂ©s. 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Adressez les commandes, accompagnĂ©es des nom et adresse Ă©crits trĂšs lisiblement et de 3 francs par mandat ou timbres-poste Ă©tranger. 4 francs par mandat au service des patrons de la Page FĂ©minine de L'Ouest Ecialr, 11. boulevard des Italiens, Paris. Les commandes ne sont reçues que pendant huit Jours. DĂ©lai de livraison. une semaine environ. Aucun envoi n'est fait contre remboursement. Nous rappelons nos lectrices que seules correspondent Ă  un patron les figurines au-dessus desquelles une mĂ«nt'on l'indique expressĂ©ment. oooaeaoaMoaaaaeoooooaaa L'origine du mot Moutarde On peut le donner en cent, on peut le donner en mille, nul ne devwera. ft quelque savant ne le lui souffle. d'oĂč la moutarde et principalement celle de Dijon a tirĂ© son nom pourtant si rĂ©pandu. Cette mine la moutarde trĂšs connue des anciens qui l'employaient dans leur cuisine s'appelait alors c fa rive » ou sĂ©venĂ© ». Une circonstance aussi curieuse qu'inattendue vint la dĂ©- baptiser. Voici comment En l'an 1382. la ville de Dijon nyant fourni mille hommes d'armes Ă  Philippe le Hardi, duc de Bourgoan». celui-ci reconnaissant, accorda entre autres prlvlĂšges celui de porter ses armes avec aa propre devise Moult me tarde 9 c'eat-Ă -dire 11 me tarde beaucoup i\. Heureux et fiers, les Dijonnais flrent graver cette devise sur leur porte principale. Mais un accident survInt qui dĂ©truisit le mot c me ». en sorte qu'on ne lisait plus que 1 Moult tarde P. Ces deux mots restants sonnaient bien aux oreilles. On en Rt bientĂŽt qu'un mot qu'on appliqua au cĂ©lĂšbre condiment au'on prĂ©pare en si grande quantitĂ© Dijon. Et VoilĂ  pourquoi la devise de Philippe le Hardi figure aujourd'hui sur toutes les NAISSANCE Nous avons le plaisir d'apprendre l'heureuse naissance, chez notre directeur gĂ©nĂ©ral, M. Pierre Artur, et Madame, d'un neuviĂšme enfant qui a reçu le prĂ©nom de Philippe. L'Ouest-Eclair s'associe Ă  la joie de son directeur et de Mme Pierre Artur il leur exprime ses respectueux compliments, en mĂȘme temps qu'il forme pour le bĂ©bĂ© tous les meilleurs vƓux de bonheur. CALVADOS ARRESTATION D'UN ESCROC DE GRANDE ENVERGURE Il avait opĂ©rĂ© notamment Ă  Falaise, Domfront, Argentan, Saint-Malo et dana la Sarthe Bayeux, 19 janvier. De notre correspondant L'Ouest-Eclair a relatĂ©, Ă  diverses reprises, les mĂ©faits de Victor MĂ©tairie, coiffeur, demeurant Ă  Saint-Frambault-sur-Pisse, qui recherchĂ© par plusieurs parquets pour vols et escroque ries avait toujours rĂ©ussi Ă  s'Ă©clipser. C'est ainsi que traquĂ© par toutes les brigades des environs, il Ă©tait encore parvenu Ă  exercer ses tristes exploits dans la rĂ©gion de Vire et de CondĂ©sur-Noireau et Ă  s'enfuir vers ThuryHarcourt. Or il Ă©tait bientĂŽt signalĂ© Ă  Bayeux oĂč les gendarmes se mettant immĂ©diatement Ă  sa recherche purent l'apprĂ©hender chez un commerçant de la localitĂ©. Il Ă©tait encore en possession de la bicyclette dĂ©robĂ©e Ă  Mme Jehan lors de son passage au Plessis-Grimmoult. Les gendarmes de Bayeux n'ont pas perdu leur temps car on se trouve en prĂ©sence d'un malfaiteur d'une certaine envergure. En effet. MĂ©tairie a opĂ©rĂ© dans presque toute la France, peut-ĂȘtre mĂȘme en Belgique. Il est officiellement l'objet des recherches des Parquets de Domfront, Argentan, Saint-Malo, Saumur. Auxerre. Il doit ĂȘtre Ă©galement signalĂ© dans la Sarthe et l'on peut craindre encore des surprises Ă  son sujet. MĂ©tairie faisait en outre l'objet d'une contrainte par corps de M. le Percepteur de Caen et enfin pour couronner sa carriĂšre il Ă©tait recherchĂ© par le bureau de recrutement d'Alençon pour insoumission. ̃ C t sur cette derniĂšre ville que le Parquet de Bayeux a dirigĂ© sa belle capture. ÎAKMKBÀftMJ E PARIS SUCCURSALE A NANTES 27 rue du Calvaire nnexe Ă  St-NAZAtRE 2 rue VlllĂšt-Mortlr Aujourd'hui, 20 janvier St SĂ©bastien Le soleil se lĂšve Ă  7 h. 37 et se couche & 16 h. 27. La lune se lĂšve a 10 h. 47 et se couche Ă  1 h. 4. Pleine lune le 26 a 17 h 15. Temperature maxima du 18 20° Pau. 19° Ajaccio. 17"; Perpignan. Bordeaux, Cazaux, 14» Toulouse, AngoulĂšme, Rochefort, ClermontFerrand. Nantes, Rennes. 13° Le Bourget. OrlĂ©ans. Chartres, Le Havre. Cherbourg. Brehat. Belle-Ile, Tours Royan, Marseille, Amibes. 12° Avord, Brest, Reims. Paris. Abbeville. 11° Calais. Valenciennes, Lyon. Nlmes, 10° Nancy. Dtjon, MontĂ©limar. 8° Upaix. 5° Strasbourg. 41 Lanslebourg, 2°. Temperhture minima du 19 fĂ©vrierBiarritz, 10° Belle-Ile. Bordeaux, Cazaux, AĂźaccio. 9° Marseille. Nimes, Lyon Royan. AngoulĂ©me, 8° Le Bourget. BrĂ©hat. Brest. Rochefort. MontĂ©limar, Antibes. 7°; Avord Nantes. Cherbourg. Le Havre. Pans, Chartres. Strasbourg 8° OrlĂ©ans. Nancy. Dijon. Reims. Tours, Toulouse. Perpignan. 5° Calais, Abbeville. Besancon, 4°; Valenciennes, 3° Upalx, 2o Lanslebourg, 1°. Evolution probable. Les perturbations venant du large continuent a se succĂ©der assez rapidement sur notre pays. Une zone de mauvais temps. qui couvrait Ă  7 heures la majeure partie de la France extrĂȘme nord et littoral mĂ©diterranĂ©en exceptĂ©s se dĂ©placers vers l'est-nord-est et ne laissera demain matin des rĂ©sidus que dans les PyrĂ©nĂ©es et le sud-est Elle sera suivie d'une zone de temps Instable, Ă  Ă©claircles et Ă  averses, qui dĂ©bute dĂ©jĂ  dans le nord-ouest et qui est accompagnĂ©e d'air plus frais. ProbabilitĂ©s pour la journĂ©e du 20 janvier Etat du ciel. Dans les rĂ©gions Nord, Parisienne. Nord-Ouest. Bretagne, nuageux Ă  trĂšs nuageux avec Ă©claircies et queliues averses. Vent». Secteur Ouest modĂ©rĂ© et IrrĂ©gulier. Coup de vent d'Ouest & NordOuest. TempĂ©rature. Maximum en baisse de 2 Ă  4° par rapport Ă  la veille. 1 M. H" S. H" dm dm Cherbourg 63 Oranvllle 112 Saint-Malo 102 Salnt-Brleuc . 95 915 Siimpol 86 84 Lorlent 42 Vannes 42 2352 Sables-d'Olonne. 43 La Rochelle ‱t-Mazalre 9-5 44 L'EXPOSITION DE 1937 La pose de la premiĂšre pierre du Pavillon de la Bretagne a donnĂ© lieu Ă  une cĂ©rĂ©monie solennelle Trois orateurs M. Louis AUBERT, prĂ©sident du ComitĂ© Breton M. Edmond LABBÉ, commissaire gĂ©nĂ©ral de l'Exposition M. GASNIER-DUPARC, ministre de la Marine, ont cĂ©lĂ©brĂ© Ă  l'envi la gloire de notre province Paris, 19 janvier De notre rĂ©daction parisienne. Le crachin qui, depuis quarante-huit heures, mouille le sol parisien et obscurcit le ciel de la capitale, a fait place ce matin vers 10 heures Ă  une bise froide qui faisait claquer brutalement le drapeau tricolore flottant au bord de la Seine, audessus de l'emplacement mĂȘme, sur lequel s'Ă©lĂšvera le pavillon breton Ă  l'Exposition de 1937. C'Ă©tait aujourd'hui la pose de la premiĂšre pierre d'un pavillon dont nous avons donnĂ© toutes les caractĂ©ristiques. Comme toujours, depuis le dĂ©but d2 l'Exposition, le ComitĂ© breton qui fut le premier constituĂ© le premier dont les plans du pavillon furent prĂ©sentĂ©s, le premier dont les plans furent acceptĂ©s, a Ă©tĂ© le premier des cĂŽmitĂ©s rĂ©gionaux Ă  cĂ©lĂ©brer la pose de la premiĂšre pierre de son pavillon. Cette cĂ©rĂ©monie a Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ©e devant de nombreuses personnalitĂ©s qui avaient tenu Ă  assister Ă  la premiĂšre manifestation tangible de l'activitĂ© bretonne Ă  l'Exposition de 1937. Nous avons remarquĂ© notamment M. Gasnier-Duparc, ministre de la Marine, qui prĂ©sidait le commandant Balat, son officier d'ordonnance M. Aubert, prĂ©sident du ComitĂ© breton MM. Le Trocquer, sĂ©nateur, ancien ministre Gautherot, sĂ©nateur TrĂ©mintin, Morane, Tristan, Peaet, Guernier, Desgranges, dĂ©putĂ©s Petrhe, Charles Brun, Ancel et Rodel, du centre rĂ©gional Ă  l'Exposition Lesage, prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration des SociĂ©tĂ©s Bretonnes de Paris et d* la rĂ©gion parisienne BeaufrĂšre, directeur de La Bretagne Ă  Paris Bahon-Rault et Roulaud, prĂ©sident de Chambre de Commerce en Bretagne Couarnon, architecte du pavillon breton RĂąteau, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du ComitĂ© Breton, etc. Le premier, M. Aubert prit la parole et prononça Ă  la gloire de la Bretagne le discours suivant LE DISCOURS DE M. AUBERT Monsieur le Ministre, Mesdames. Messieurs, Le ComitĂ© de participation de la Bretagne Ă  l'Exposition des Arts et Techniques vous remercie trĂšs sincĂšrement du grand honneur que vous lui faites en venant aujourd'hui procĂ©der solennellement Ă  la pose de la premiĂšre pierre de la Maison oĂč doit, au cours des mois rayonnants que chacun attend, se manifester la vie intellectuelle et active d'un pays qui vous est, comme Ă  nous particuliĂšrement cher la Bretagne. Vous Ă©tiez plus que quiconque cher Monsieur le Ministre, dĂ©signĂ© pour accomplir ce geste rituel. La Bretagne est, en effet, la noble terre fĂ©conde et rude qui fournit Ă  la marine de guerre dont vous ĂȘtes. au Gouvernement, le chef trĂšs respectĂ©, le plus fort contingent de ces vaillants marins, fiertĂ© de la France, et que le monde entier admire. c Mais, Ă  nos yeux, Ă  nos cƓurs aussi, vous avez un autre titre. Vous ĂȘtes de chez nous, vous ĂȘtes au SĂ©nat le reprĂ©sentant de l'un de nos plus beaux dĂ©partements, et vous prĂ©sidez tout Ă  la fois Ă  ses destinĂ©es et Ă  celles de la ville si bretonne qui a mis en vous toute sa confiance SaintMalo. Et voyez combien s'accordent, s'harmonisent les hautes fonctions du ministre national et du magistrat municipal. Il suffit pour illustrer le rapprochement de rappeler que la vieille citĂ© malouine, aux toits Ă©levĂ©s qui jaillissent avec tant de pittoresque grandeur sous la pression de son corset de pierres grises, battu par des flots d'Ă©meraude, est la patrie de Jacques Cartier, de Duguay-Trouin de MahĂ©, de La Bourdonnais et de bien d'autres grands dĂ©couvreurs de terres nouvelles, qu'ils ont donnĂ©es Ă  la France; la Patrie des lĂ©gendaires corsaires de Robert Surcouf, la Patrie des Terreneuvas dont les ancĂȘtres, bien avant les Conquistadors, connurent les rivages du nouveau monde, la Patrie, en un mot de tous ceux qui ont, depuis des siĂšcles, manifestĂ© sans arrĂȘt leur intense amour pour la mer, leur passion jamais satisfaite pour l'aventure, et dont l'inlassable dĂ©vouement atteint, si souvent aux limites de l'hĂ©roĂŻsme, et de cet esprit de sacrifice qu'il y a peu de temps vous exaltiez et magnifiiez en saluant, au nom du gouvernement et au nom de la France, les dĂ©pouilles des victimes glorieuses du Pourquoi-Pas ? ». La prĂ©sence Ă  vos cĂŽtĂ©s de M. le sous-secrĂ©taire d'Etat nous aurait fait plaisir; si des engagements antĂ©rieurs ne lui ont pas permis d'ĂȘtre lĂ , du moins s'est-il fait reprĂ©senter par M. le Directeur de son Cabinet et nous l'en remercions vivement. M. GaanierDuparc d'une part, M. Blancho, d'autre LA MAQUETTE DU FUTUR PAVILLON DE BRETAGNE On reconnait le ministre de la Marine et M. LabbĂ©, commissaire gĂ©nĂ©ral de l'Exposition. M Pezet et M. le chanoine Des crantes, dĂ©putĂ©s du Morbihan. part, Ă©voquaient en notre esprit une image toute symbolique. Je les voyais tous deux entourant l'ensemble de la pĂ©ninsule armoricaine d'un long ruban, qui Ă©pouserait les mille dentelures de nos cĂŽtes tourmentĂ©es de Saint-Malo Ă  Saint-Nazaire, et dont ils auraient chacun une extrĂ©mitĂ©. C'Ă©tait montrer ainsi bois au milieu, mer tout autour que la Bretagne que l'on dit individualiste et cloisonnĂ©e, forme au contraire un tout indissoluble dont les diverses parties s'associent toujours, quand, il s'agit d'exalter leua intĂ©grale affection pour elle. Vous me permettrez maintenant de saluer M. le Commissaire gĂ©nĂ©ral LabbĂ©. Que de reconnaissance ne lui devons-nous pas de s'ĂȘtre un instant arrachĂ© Ă  ses Ă©crasants travaux, Ă  ses formidables responsabilitĂ©s pour venir nous apporter, Ă  l'occasion de la pose d'une premiĂšre pierre du centre rĂ©gional, le prĂ©cieux encouragement de son appui si bienveillant. Les PrĂ©sidents de rĂ©gions qui l'ont vu Ă  l'Ɠuvre et ont Ă  cƓur de suivre de leur mieux son laborieux exemple, savent ce que la France entiĂšre lui doit et lui devra pour l'Ɠuvre titanesque qu'il a mission de rĂ©aliser et qu'il rĂ©alisera, soyons en surs, en heure et temps. Ces discours terminĂ©s, sous le feti des photographes, M. Gasnier-Duparc, prenant en main la truelle symbolique, scella la premiĂšre dalle de granit, car nos architectes bretons ne s'Ă©taient pas contentĂ©s d'une vulgaire meuliĂšre, mais avaient tenu Ă  employer du roc breton. Cette traditionnelle cĂ©rĂ©monie terminĂ©e, un dĂ©jeuner amical rĂ©unit, sous la prĂ©sidence de M. Aubert, les personnalitĂ©s qui avaient assistĂ© Ă  la pose de la premiĂšre pierre du futur pavillon breton Ă  l'Exposition internationale de 1937. Arts et Technique b. Si tous les participants Ă  l'Exposition apportent Ă  leur tĂąche le mĂȘme cƓur et la mĂȘme ardeur que les membres du ComitĂ© de Bretagne, nous pouvons ĂȘtre sĂ»rs que non seulement l'Exposition sera prĂȘte Ă  temps, mais qu'elle connaltra un magnifique succĂšs. Nous le lui souhaitons. P. Laureht. La Gadnase est plns Ă©conomiqne Non seulement la Gaduase est plus agrĂ©able au goĂ»t. plus facile Ă  digĂ©rer et tout aussi efficace que l'huile de foie de morue, mais encore elle est plus Ă©conomique parce qu'elle se prend il. doses et que personne n'en laisse la moindre goutte dans le flacon La Gaduase, dĂ©licieux sirop framboisĂ©, accroit l'appĂ©tit, favorise la croissance, purifie le sang, et fortifie petits et grands. Demandez de la Gaduase Ă  votre pharmacien. MAYEKNE APRÈS LE DRAME DE L'ALCOOLISME D'ANDOUILLÉ Lever., 12 janvier de notre rĂ©daation Ainsi que nous le disions hier, les constatations du mĂ©decin lĂ©giste ont permis Ă  M. le Juge d'instruction de dĂ©clarer que la mort de la femme Carre Ă©tait due Ă  une cause naturelle. Il ne reste donc plus qu'Ă  expliquer le dĂ©sordre constatĂ© dans la piĂšce oĂč l'on trouva des dĂ©bris de bouteilles et de verres brisĂ©s, des chaises renversĂ©es, le tapis de la table avait dĂ» ĂȘtre tirĂ© violemment et pendait jusqu'Ă  terre. Le tout laissant croire Ă  une lutte qui prĂ©cĂ©da la mort de la femme CarrĂ©. Personne, et nous moins que tout autre, ne peut avoir la prĂ©tention de discuter une dĂ©cision qui repose sur les donnĂ©es de la science mais comment s'expliquer la posture dans laquelle fut trouvĂ© le cadavre par MM. Hardy, Halouze, MarcadĂ© et Lefaucheux ? GrĂące au tĂ©moignage du propriĂ©taire et du charpentier que les travaux de rĂ©parations l'immeuble avaient mis dans l'obligation de passer la nuit de jeudi Ă  vendredi Ă  la GaufriĂšre, dans le mĂȘme appartement que les Ă©poux CarrĂ©, le mari put ĂȘtre mis hors de cause parce que rien ne fut relevĂ© contre lui, malgrĂ© tout le zĂšle dĂ©ployĂ© par l'actif marĂ©chal des logis chef Germain qui commande la brigade d'AndouillĂ© et les gendarmes sous ses ordres. Pour expliquer le dĂ©sordre de la piĂšce et celui des vĂȘtements de la morte, il faudrait donc supposer que dans la journĂ©e de vendredi, alors que la victime se trouvait seule dans cette maison isolĂ©e, un homme restĂ© inconnu se soit introduit Ă  la GaufriĂšre comme s'introduisit, il y a quatre mois, dans une autre maison IsolĂ©e de Landivy, un misĂ©rable qui commit le crime abominable dont on se souvient encore et que l'on n'a pu dĂ©couvrir. La suite de l'enquĂȘte jettera sans doute un peu de lumiĂšre sur les circonstances qui ont entourĂ© la mort de Mme CarrĂ©. THEATRE MUNICIPAL DE RENNES Jeudi 21 Janvier, Ă  14 heures, unique MatinĂ©e populaire Ă  prix rĂ©duits, places de 1 fr. Ă  9 fr. tout compris LA VEUVE JOYEUSE avec le concours de toute la troupe d'opĂ©rette. Samedi 23 soirĂ©e et Dimanche 24 matinĂ©e et soirĂ©e, 3 reprĂ©sentations de FRASQUITA, avec les danseurs Marilinda et JosĂ© Kico. On peut retenir les places Ă  l'avance par lettre, mandat ou tĂ©lĂ©phone 20-37 Rennes. LOIRE-INFEr L'ÉNIGME D'AVIGNON Le canonnier nantais serait en TchĂ©coslovaquie Avignon, 19 janvier. La SĂ»retĂ© a reçu un tĂ©lĂ©gramme venant de TchĂ©coslovaquie et adressĂ© au canonnier Jean Journel Ă  sa caserne de Fontainebleau, ainsi que deux lettres venant, de Prague et parvenues aprĂšs son dĂ©- part. Or, comme on sait que Journel avait, Ă  Prague, une amie et qu'il est en possession d'un passeport gĂ©nĂ©ral, il est vraisemblable qu'il a gagnĂ© en chemin de fer l'Italie par VintuniUsv puis la TchĂ©coslovaquie. CÔTES-SHORt Dans nne crise de folie, une jeune mĂšre tue son enfant Powtritox, 19 janvier. De notre correspondant Cet aprĂšs-midi, nous Ă©tions prĂ©venus tĂ©lĂ©phoniquement, vers 14 h., qu'un crime venait d'ĂȘtre commis Ă  Brelldy. Nous nous sommes immĂ©diatement rendua sur les lieux, Ă  quatre kilomĂštres environ du bourg de Brelidy, dans la direction de Saint-Laurent, nous quittons la route praticable et c'est A travers des chemins remplis d'orniĂšres et de boue que nous arrivons Ă  la ferme de Keravel. La maison sans Ă©tage est parfaite- ment tenue les meubles et le sol, tout est propre. Notre regard se fixe Ă  l'arrivĂ©e sur un berceau d'enfant dans lequel git un bĂ©bĂ© de cinq mois que la folie d'une mĂšre vient de tuer. Quand nous arrivons Ă  BrĂ©lidy, le pays est en Ă©moi; c'est que depuis la veille, ces braves paysans viennent d'ĂȘtre bouleversĂ©s par un drame navrant. A notre arrivĂ©e Ă  la ferme nous trouvons MM. Lautier, juge d'instruction Ă  Guingamp; Geffroy, son gref-,fier Gauffenlc, lieutenant de gendar-' merie et les gendarmes de Pontrieux qui firent la premiĂšre enquĂȘte et les gendarmes de Guingamp. La meurtriĂšre. Mme Bellec. nĂ©e Ma- ria Offret, 24 ans, est assise prĂšs de la table, calme en apparence, vĂȘtue d'un sarrau gris et coiffĂ©e d'un bĂ©ret de laine rouge. Les questions posĂ©es n'ont pas l'air de l'Ă©mouvoir et c'est par oui et non qu'elle rĂ©pond aux questions du juge d'instruction. Voici d'abord, Ă  peu de choses prĂšs, sa dĂ©claration de samedi aprĂšs-midi J'ai frappĂ© mon enfant, ma petite Jeanne. ĂągĂ©e de cinq mois; Ă  son arrivĂ©e, mon mari, ouvrier agricole, m'a demandĂ© ce qui s'Ă©tait passĂ©; je lui ai rĂ©pondu que l'enfant Ă©tait tombĂ©e; lundi aprĂšs-midi, vers 14 h. 30, j'ai pris l'enfant. je l'ai dĂ©shabillĂ©e. je me suis assise prĂšs du feu et je l'ai frappĂ©e 6 coups de poing. Voyant qu'elle ne mourait pas. je l'ai allongĂ©e sur la table et je l'ai Ă©tranglĂ©e. Puis je l'ai rhabillĂ©e et mise dans son berceau; ensuite je suis allĂ©e prĂ©venir mon mari qui travaillait chez M. Le Peuch. Ă  environ mĂštres de la ferme. s Sur les mobiles de son crime, la femme rĂ©pond J'ai volĂ© il y a quelques semaines un morceau de pain au bourg et l'idĂ©e d'ĂȘtre poursuivie m'a complĂštement affolĂ©e c'est la raison pour laquelle j'ai tuĂ© mon enfant. » L'autopsie qui aura lieu aujourd'hui dĂ©terminera exactement les causes de la mort du bĂ©bĂ© qui. Ă  notre avis, a succombĂ© Ă  une fracture du crĂąne. MariĂ©s depuis quatorze mois, M. et Mme Bellec formaient un mĂ©nage trĂšs uni Mme Bellec est enceinte de trois mois et ce n'est que depuis le larcin qu'elle commit dans un geste probablement inconscient vers le 1" Janvier, que son caractĂšre changea du tout au tout. Devant la gravitĂ© des faits, M. Lautier, juge d'instruction, a dĂ©cernĂ© con'tre elle un mandat d'arrĂȘt et nous quittons la ferme devant un pauvre homme dĂ©solĂ©, qui pleure sur le cada- vre de son enfant. La meurtriĂšre a Ă©tĂ© conduite Ă  la gendarmerie de Pontrieux en attendant son transfert Ă  Saint-Brieuc. INQUIÉTANTE DISPARITION D'UN FACTEUR ET DE SES DEUX FILLETTES Auray, 19 janvier. M. Le BlĂ©, facteur au bureau d'Auray, Ă©tant en .congĂ©. la semaine dirnlĂšre, devait re- prendre son service dimanche matin, et ne parut pas au bureau. M. Le TrĂ©is, receveur, inquiet, entreprit immĂ©diatement des dĂ©marches, notamment, prĂšs du frĂšre du facteur, adjoint au maire de Saint-PierreQuiberon, chez qui on pensait qu'il avait pu se rendre. Or, personne ne l'avait vu dans cette rĂ©gion. Au cours des recherches, on apprit seulement, qu'il avait quittĂ© son domicile, rue Georges-ClĂ©menceau, dans la journĂ©es de vendredi, avec ses deux fillettes, AgĂ©es respectivement de 7 et 8 ans. Depuis cette date, on ignorait ce qu'il Ă©tait devenu, et toutes les recherches furent vaines. Mardi matin, le receveur envoya quelqu'un au domicile de M. Le BlĂ©, pour voir si, par hasard, sa mĂšre, avec qui il hebitait, avait eu de ses nouvelles. La rĂ©ponse fut nĂ©gative, mais on apprit qu'il avait Ă©crit sur un cahier toute la journĂ©e de jeudi. Le facteur envoyĂ© par le receveur, trouva, en effet, sur la table un cahier, sur lequel il jeta un coup d'Ɠil. La lecture des derniĂšres lignes ne lui laissa aucun doute, il acquit la certitude que Le BlĂ© avait mis fin Ă  ses jours, entraĂźnant avec lui dans la mort ses deux fillettes. Dans ce cahier, aprĂšs avoir dĂ©crit sa vie et les souffrances qu'il endura durant son sĂ©jour Ă  la poste de GuĂ©menĂ©-sur-Scorff, c 13 mois, Ă©crit-il, qui diminuĂšrent sa vie de 20 ans », l'infortunĂ© facteur continue c Je vais disparaĂźtre a l'aurore due la vie, 47 ans arrivĂ© Ă  l'Ăąge mĂ»r, je n'ai pas de peine toute grande pour moi-mĂȘme, c'est pour mes enfants. Adieu Ă  ceux qui ont Ă©tĂ© bons pour moi et misĂšre et maladie Ă  ceux qui ont Ă©tĂ© mĂ©chante pour moi. J'ai Ă©crit Ă  M. le Keceveu en lui disant de donner tout mon bien Ă  l'Orphelinat des P. T. T., & Vannes, livret de caisse d'Ă©pargne, pension, mobilier, etc. c J'aurais bien Ă©tĂ© faire mon testament chez un notaire, mais J'aurais Ă©tĂ© lui donner l'Ă©veil de mon projet. Adieu. c Cependant, j'avais prie il. tĂąche d'Ă©lever mes enfants jusqu'Ă  20 ans, mais, inutile, peut-ĂȘtre qu'elles sont malades comme moi. M. Le BlĂ©. mutilĂ© de guerre, Ă©tal' fi -̃♊nme sĂ©rieux, trĂšs sobre, mais neufhstbĂ©rvque et d'un caractĂšre sombre et trĂšs renfermĂ©. Malade, il se croyait certainement plus atteint qu'il ne l'Ă©tait a LA JOURNÉE A I/A4EOPOBT 9 heures 15 heures. AĂ©roport de Rennet-St-Jaccruer BaptĂȘmes de Vair et votmoes aĂ©riens. CONFÉRENCES 17 heures. Salle du Beaux-Arts, rue Hoche ConfĂ©rence dt 11. AndrĂ© Foulon de Vaulx, prĂ©sident de l'Association des PoĂštes Français sur l'Ame Bretonne dans l'Ɠuvre d'EugĂšne Le MouĂ«l. 18 h. 30. Boulevard de la LibertĂ©, 26 ConfĂ©rence de M. l'abbĂ© Simonntau directeur des ƒuvres Soclalu sur Les dĂ©lĂšgues du personnel. 20 h. 30. Salle des FĂȘtes de la Maison du Peuple ConfĂ©rence de Af. Ouy Robert, professeur agrĂ©gĂ© au LycĂ©e de Saint-Brieue sur L'Histoire du Syndicalisme français de 1905 Ă  1921. FETES ET REUNIONS 17 heures. Maison du Peuple RĂ©unton gĂ©nĂ©rale du Syndicat du BĂątiment. 18 h. 30. AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale annuelle de l'Association des Anciens Etudiants et des Amis de la FacultĂ© de Droit, sous ta prĂ©sidence de M. Georpea Phllippar, prĂ©sident du Conseil d'administration de la Compapnie des Messageries Maritimes, prĂ©sident du ComitĂ© Central des Armateurs de France, prĂ©sident de l'AcadĂ©mie de Marine, membre de l'AcadĂ©mie des Sciences Coloniales. BANQUETS le h. 30. Salons de l'HĂŽtel Duguesciens Etudiants et des Amie de La FacuttĂ© de Droit de Rennes. BALS 23 heures. Salona de la FacultĂ© de Droit, tace St-Melaine SoirĂ©e dansante de l'Association des Anciens Etudiants et des Amis de la FacultĂ© de Droit de Rennes. CINEMAS 14 h. 30. Au Royal Merluaae. 14 h. 48. Select La p'tite dame du wagon-lit. 14 h. 45 Sxcelsior Bach dĂ©tective. 20 h. 30 A la Tour d'Auvergne Rose-Marie. 20 h. 41 Royal Merlu_. 20 h. 45. Setect La p'tlte dame du wagon-lit. 20 h. 45. Excclsior Bach dĂ©tective. LA JOURNEE JUDICIAIRE 13 h. 30. Falaise de Justice Audience de la Cour d'Appel. HALL DE CI 'L'OUEST-ECLAIR » 16 h. 30 Informations. Expositions des plus rĂ©centes photographies de l'actualitĂ© mondiale. L'OFFICE DES VOYAGES DE cc L'OUEST- ECLAIR n Dans le hall du Journal Vous dĂ©livrera les billets de chemin de ter pour toute8 destinations, sans attente et aux mĂ©mes prix qu'aux guicheta des gares. Pour vos dĂ©placements, consultez L'Office des voyages de i L'Ouest-Eclalr ». RIMA If AH créé pour votre acte, DlHlVlVnU contient de la figue pasteurisĂ©e pulvĂ©risĂ©e Se digĂšre Jtlenx JOURNÉES DENTAIRES DE RENNES OrganisĂ©es par l'Ecole Dentaire de Rennes, ces journĂ©es scientifiques auront lieu les 5 et 6 fĂ©vrier. M. Davy. recteur de l'AcadĂ©mie et M. le docteur Dufourmentel, professeur de chirurgie maxillo-faciale, ont acceptĂ© la prĂ©sidence d'honneur de ce congrĂšs. Les confĂ©rences et les dĂ©monstrations seront faites Ă  l'Fcole de MĂ©decine, au Centre anti-cancĂ©reux et a l'Ecole Dentaire. L. CAILLER, Chirurgien Dentiste 5, rue de l'Horloge TĂ©l. 43-42 LES CONFERENCES DE LA SOCIÉTÉ DESTRUCTION POPULAIRE DE RENNES Dimanche prochain 24 janvier, Ă  17 heures, salle des Beaux-Arts, 30, rue Hoche, sera donnĂ©e une confĂ©rence sur La crise Ă©conomique, la crise du chĂŽmage et leur solution ». Le confĂ©rencier. M. Louis Grillet, examinant les crises de mĂȘme nature du XIX- siĂšcle 1810 et 1846 notamment montrera que toutes ces crises dĂ©coulent d'une mĂȘme cause gĂ©nĂ©rale. qu'elles se dĂ©veloppent d'aprĂšs les mĂȘmes rĂšgles, et qu'elles se sont toutes rĂ©solues par le dĂ©veloppement Intensif d'industries, travaillant jusqu'alors pour une minoritĂ© de consommateurs et qui de ce fait deviennent des industries de fabrication de produits d'une consommation plus gĂ©nĂ©rale. puis de produits de premiĂšre nĂ©cessitĂ©. Jusqu'alors. toutes les crises ont abouti Ă  une augmentation du standard de vie pour J'ensemble de la nation. Le dĂ©veloppement de l'industrie de la construction pour l'habitation doit avoir la plus heureuse consĂ©quence pour la rĂ©solut!on de la crise actuelle dans tous les pays. UNIVERSITÉ DE RENNES ConfĂ©rences publiques de la FacultĂ© des Lettres M. Collas, profeaseur, fera jeudi. 21 janvier, a 17 heurea, salle A. Le Bras, une confĂ©rence publique sur le sujet suivant La bataille des Satfrea. suadĂ© qu'il avait communiquĂ© sa maladie a ses enfants. M. Le TrĂ©is s'est empressĂ© de mettre la gendarmerie de notre ville au courant et des recherches sont actuellement en cours pour Ă©tablir dans quelles circonstances le facteur Le BlĂ© a Ole Ă  Ă©cutiQtt w Iune»t proJM» LE KRACH DE LA SOCIÉTÉ DE PANIFICATION DeuxiĂšme audience Les dĂ©bats, interrompus lundi soir ont repris hier. M. le bĂątonnier de Goascaradec, reprĂ©sentant, avec Me Bourrut-Lacouture, les parties civiles, jointes, prend la parole. Il signale d'abord le diacredit que les prĂ©venus tentĂšrent de jeter parmi les intĂ©ressĂ©s, sur leurs conseils. M. Marçais jurait qu'il' n'avait pas voulu cela et qu'il Ă©tait prĂȘt Ă  rĂ©parer dana la mesure de sa fortune. Plusieurs se dĂ©clarĂšrent disposĂ©s Ă  Ă©couter ses propositions, mais il out se rendre insolvable en tnuvant acquĂ©reur, Ă  des prix suffisants, pour couvrir lĂ©galement le chiffre des hypothĂšques grevant ses immeubles. Du moins ces prix furent les prix officiels, ce qui ne veut pas dire qu'il ne tirĂąt point de ces ventes un certain profit. Quelques jours avant l'audience du 21 novembre 1935, Il se dĂ©barrassa de cette façon de propriĂ©tĂ©s aux environs de HĂ©dĂ©, chĂąteau, dĂ©pendances et bois. C'est pourquoi, aujourd'hui, les commettants du bĂątonniers ont chargĂ© ce dernier d'affirmer Ă  la barre que, contre le sentiment du tribunal, cest M. Marçais qu'ils considĂšrent comme le plus coupable. S'ils n'avaient pas constatĂ© sa prĂ©sence aux confĂ©rences des dĂ©marcheurs, ils n'eussent point souscrit. M* de Goascaradec regrette que dans l'inculpation dirigĂ©e contre M. Marçais, s'il a Ă©tĂ© tenu compte du dĂ©lit de mise en circulation d'actions non libĂ©rĂ©es du quart, il n'ait pas Ă©tĂ© retenu contre lui la souscription Ă  l'aide de traites, dĂ©lit pour lequel Thibault a Ă©tĂ© condamnĂ©. L'avocat croit pouvoir demander la requallflcation de ces manƓuvre dolosives. La Cour peut condamner aussi bien l'un que l'autre pour dĂ©lit de droit commun, d'escroouerie et tentative d'escroquerie, dĂ©lits dĂ©coulant des articles 13 et 15 de la loi du 24 juillet 1867. Car, Ă  la base de toute cette affaire, il y a abus de confiance et escroquerie. La panification de Rennes n'a Ă©tĂ© tentĂ©e que pour voiler le dĂ©ficit du Mans. Puis, dana la pensĂ©e du prĂ©venu, l'affaire Ă  crĂ©er Ă  Nantes eĂ»t cachĂ© les pertes de Rennes et ainsi de suite Angers et Tours. C'Ă©tait dĂ©pouiller Saint Pierre pour habiller Saint Paul. C'Ă©tait encore faire la boule de neige. La panification du Mans est dĂ©jĂ  malade quand, le 24 dĂ©cembre 1931, est dĂ©cidĂ©e la crĂ©ation de celle de Rennes, Ă  qui on donne tout de suite une personnalitĂ© juridique autonome, avec des statuts tout preparĂ©s pour le notaire. Sans tarder, paraissent quelques articles de presse, puis des dĂ©marcheurs Ă©trangers au pays, bien stylĂ©s, et en juin 1932 tout est prĂȘt peur l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale. Le capital sera de francs, comprenant de l'argent frais et les effets souscrits Ă  prĂ©senter Ă  l'escompte. D'octobre 1931 Ă  juin 1932, l'argent afflue en billets de banque ou en bons de la DĂ©fense Nationale. Tous les fonds sont adressĂ©s au Mans et dĂ©posĂ©s, par la SociĂ©tĂ© de PaniScation de cette ville, au CrĂ©dit Lyonnais. MalgrĂ© tout, le versement du premier quart n'a pu ĂȘtre rĂ©alisĂ©. Ce n'est pas la faute des dĂ©marcheurs, de leurs rĂ©unions oĂč les dĂ©tenteurs de petits capitaux Ă©taient conviĂ©s par cartes de convocation signĂ©es Marçais. M. Marçais payait ces agents a la journĂ©e. Il laissait dire qu'il avait souscrit francs, alors qu'il n'avait pas dĂ©passĂ© et versĂ© seulement Les dĂ©marcheurs parlaient en public du patronage du ministre de l'Agriculture ou de celui de M. Guernier, ministre des de la garantie de l'Etat pour un capital pouvant aller jusqu'Ă  4 millions. On produisait des souscriptions fictives ou majorĂ©es, on promettait du 6 InterrogĂ©s devant le juge d'instruction, des dĂ©marcheurs comme Bazin et Chatelard ont dĂ©clarĂ©, sous la foi du ferment, n'avoir rien fait que d'aprĂšs les instructions de M. Marçais. Si l'une des dupes, enfin Ă©clairĂ©e, demande des explications, M. Marçais l'envoie avec un billet Ă  M. Thibault pour qu'on la rembourse. Sur l'application de l'article 15 de la loi du 24 juillet 1867, le Tribunal correctionnel de Rennes a trouvĂ© qu'il s'agissait moins, dans cette propagande, de faits prĂ©tendument rĂ©alisĂ©s que de promesses. L'article 15 n'ayant pas dĂ©fini le caractĂšre de la publicitĂ©, il faut s'en tenir sur ce chapitre aux notions gĂ©nĂ©rales. Pourquoi la souscription s'est-elle faite par des effets de commerce acceptĂ©s par les cultivateurs ?. Pourquoi ne s'est-on pas bornĂ© Ă  faire des appels de fonds ? C'est que, Ă©tablis sur le papier de la SociĂ©tĂ© de Panification du Mans portant la signature, non pas d un administrateur dĂ©lĂ©guĂ© de la sociĂ©tĂ© rennaise, comme M. Thibault. mais celle de l'administrateur manceau, feu M. DemeurĂ©, ces eSets Ă©talent destinĂ©s Ă  ĂȘtre remis Ă  l'escompte. au profit de la sociĂ©tĂ© du Mans. MO de Goascaradec rend justice aj CrĂ©dit Lyonnais qu'il a pu croire ur instant de connivence, mais dont la bonne foi lui a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©e. Au dernier moment, lorsque les cultiva- teurs alertĂ©s orirent une position me- nacante. M. Thibault essaya de rĂ©cu- pĂ©rer une somme de fr. payĂ©e de cette façon aux Ă©tablissement!» Lldon avec l'argent rennais, pour le compte de la Panification du Mans. Ce sont lĂ  les novations dont a parlĂ© Mc Apnleson. La dĂ©claration, sur le vereimnnt in- tĂ©gral du premier quart, Ă©tait donc controuvĂ©e. Des cultivateurs s'Ă©talent intĂ©frrelement libĂ©rĂ©s, d'autres valent versĂ© moins d'un quart, et d'autres rien du tont. C'est alors que la So- ciĂ©tĂ© du M»ns prĂ©tendit, par une somme de francs, couvrir la diffĂ©rer^ un t'ers Tv>uvnnt. Ă  la coti- dition d'aviser le dĂ©biteur, libĂ©rer luimĂȘme 1% crĂ©ance d'autrui. Un tel ti- glement doit ĂȘtre rĂ©el et effectif. Or de cette opĂ©ration, il n'est pas de trace pour ia sortie dans les registres du Mans, en faillite Ă  la date indiquĂ©e par la lettre, oĂč il n'est question de ce virement, non plus que dans les entrĂ©es de la SociĂ©tĂ© de Rennes. Le 6 juin 1932, la SociĂ©tĂ© du Mans auraitelle pu s'y prĂȘter elle qui, en faillite, n'avait plus un sou ? Cette lettre a Ă©tĂ© fabriquĂ©e, dit le bĂątonnier, pour les besoins de la cause, M. Marçais n'Ă©tait-il pas le prĂ©sident de l'une et de l'autre ? n y a activitĂ© de correspondance et de versement. Et c'est cependant sur ce virement, que le tribunal a fondĂ© sa clĂ©mence relative. M* de Goascaradec s'Ă©tonne que le tribunal ait pu dĂ©bouter les parties civiles de leurs conclusions, sous prĂ©texte qu'il n'y avait pas de relation entre les effets et la cause, entre le prĂ©judice subi et la nullitĂ© de la SociĂ©tĂ©. Le tribunal n'a voulu voir cette cause que dans l'emploi fautif des fonds. Et cependant, vu la non libĂ©ration du quart de la souscription, la SociĂ©tĂ© n'existe pas et ne peut avoir d'effets juridiques. M* de Goascaradec termine sa longue plaidoirie en dĂ©clarant n'avoir aucun doute sur la non passivitĂ© de M. Marçais en cette affaire. Il n'aurait jamais dĂ» accepter ces prĂ©sidences. Il est mal venu Ă  feindre d'ignorer ce qui se passait, n doit supporter l'entiĂšre responsabilitĂ©. D'accord en cela, avec M* Appleton, M' de Goascaradec estime que le premier coupable est M. Marçais. Plaidoirie de Me BourrutrLaeoutnre M* Bourrut-Lacouture partage entiĂšrement cette conviction. M. Marçaia a la responsabilitĂ© morale aussi bien que pĂ©nale. Il ne faut point lui attribuer un rĂŽle effacĂ©. C'est grĂące Ă  son influence que, fin 1931 et dĂ©buts 1932, se sont formĂ©es ces masses de souscriptions. Les campagnes Ă©taient encore en pleine vigueur et cette prospĂ©ritĂ© factice de la veille. Elles s'Ă©merveillaient de fortunes marchandes ou Industrielles si rapides Ă  s'Ă©chafauder, prĂšs du dur travail de la terre. Comme elles avaient encore de l'argent, il Ă©tait facile de leur faire rechercher dans une belle entreprise, un enrichissement plus rapide. n se trouva des gens qui leur parlĂšrent de la suppression de l'intermĂ©diaire, dans la transformation de leur principal produit le blĂ©, d'oĂč idĂ©e d'une coopĂ©rative. Ce fut le moment psychologique, pour l'ancien dĂ©putĂ©, homme trĂšs riche et influent. Celui-ci ne parla ni n'Ă©crivit. Mais sa prĂ©sence aux confĂ©rences, les mensonges et les manƓuvres dont il laissa les dĂ©marcheurs Ă©blouir les gens simples, les articles, les prospectus, l'exemple des souscripteurs et son propre exemple, les convocations signĂ©es de sa main, tout cela crĂ©a l'atmosphĂšre favorable. Qui connait mieux que lui, les ressources de ces laborieux ? Il paie ses dĂ©marcheurs sur le pied de 15 En huit mois, deux d'entre eux se font chacun plus de francs. On draine ainsi une somme de Ir. M. Marçais aurait pu se ressaisir. Le 27 et le 28 novembre 1931, deux cultivateurs viennent le trouver. Ils t'Ă©tonnent de certains propos entendus et voici la rĂ©flexion Ă e M. Marçais. fiairant le danger c Est-ce que Thibault voudrait rembourser la SociĂ©tĂ© du Mans ? Il y a abus de confiance chez ces deux hommes. L'argent recueilli, dĂ©tournĂ© de sa destination, a Ă©tĂ© remis au Mans. On trouve ici tous les Ă©lĂ©ments constitutifs d'un tel dĂ©lit dĂ©fini par l'article 408 du C. P. Les prĂ©venus se sont mis dans l'impossibilitĂ© de reprĂ©senter les fonds dissipĂ©s. Il n'est point nĂ©cessaire, pour que le dĂ©lit existe, qu'ils en aient profitĂ©. Ils ont fait servir Ă  autre usage ce qui Ă©tait destinĂ© Ă  la SociĂ©tĂ© de Rennes. Les premiers temps, on peut s'expliquer qu'ils considĂ©raient l'argent confiĂ© comme les prodromes de la rĂ©alisation du projet primitif, Le MansRennes-Nantes-Angers qui nĂ©cessiterait un capital de francs. Le succĂšs, lamentable au Mans, Ă©tait moins mĂ©diocre t Rennes Ă  cause de la notoriĂ©tĂ© de Marçais. Mais aprĂšs 1931, les choses changent. Il ne s'agit plus que du sauvetage du Mans. C'est au Mans que se concentrent toutes les affaires. On a excusĂ© cela en disant qu'au Mans existaient d'importants services de comptabilitĂ©. Il est plus croyable qu'on eut de suite l'idĂ©e de faire marcher Le Mans avec l'argent de Rennes et de solder ainsi les fournitures des Ă©tablissements Lidon Car tout Ă  Rennes semble abandonnĂ© de bonne heure. Le 16 janvier 1933, sur ordre de la police judiciaire, il est constatĂ© avenue de Chardronnet, l'Ă©tat lamentable des constructions. Vu l'heure tardive, M. le conseiller Poret, prĂ©sident de la 3' Chambre, renvoie Ă  aujourd'hui la suite de la plaidoirie de M* Bourrut-Lacouture. Ce soir, Ă  17 heures, aux Beaux-Arts, confĂ©rence littĂ©raire sur l'Ăąme bretonne dans l'Ɠuvre d'EugĂšne Le MouĂ«l Aujourd'hui mercredi 20 janvier, salle des Beaux-Arts, rue Hoche, Ă  17 heures, M. AndrĂ© Foulon de Vaulx, prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© des PoĂštes Français donnera une grande confĂ©rence, avec interprĂ©tation de poĂšmes, sur L'dme bretonne dans l'Ɠuvre d'EugĂšne Le MouĂ«l. Avec son beau talent de confĂ©rencier, il saura faire revivre les plus belles pages d'Enfants bretons, de Fleur de blĂ© reoir, de Bonnes gens de Bretagne et de tant d'oeuvres du poĂšte qui a si bien compris sa province et chantĂ© avec tant de force rame des gens et des choses de son pays. M. Davy, recteur de l'AcadĂ©mie prĂ©sidera. Tous ceux qui aiment la Bretagne et la poĂ©sie se feront un devoir d'y assister. EntrĂ©e gratuite. Une quĂȘte sera faite aprĂšs la confĂ©rence au profit du monument. 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Ces prescriptions sont particuliĂšrement ImpĂ©rieuses Ă  l'Ă©gard des enfants en bas Age, des personnes AgĂ©es ou affaiblies. 2° Eviter le refroidissement, surtout aprĂšs le travail; Ă©viter le surmenace. 3° Antisepsie de la bouche et du nez brossage des dents deux fois par jour; lavages de bouche et gargarismes chauds Ă  l'eau salĂ©e Ă  15 p. une cuillerĂ©e cafĂ© pour un demi-litre d'eau, ou Ă  l'eau oxygĂ©nĂ©e une cuillerĂ©e Ă  cafĂ© par verre d'eau; instillations nasales, deux fois par jour, d'huile gomĂ©nolĂ©e Ă  10 p. 100. 4° Eviter les poussiĂšres, Le balayage Ă  sec doit ĂȘtre proscrit en particulier dans tous les lieux de rĂ©unions. Lorsqu'en dĂ©pit de ces prĂ©cautions, une personne ressent les signes avantcoureurs trĂšs connus frissons, courbature, fiĂšvre, enchifrĂšnement, sensation de chaleur Ă  la gorge, elle doit, dans son intĂ©rĂȘt, en raison des complications qu'une grippe mĂȘme fruste peut occasionner, rester Ă  son domicile et appeler un mĂ©decin. La dĂ©claration de la maladie n'est pas obligatoire, mais les chefs de famille auront intĂ©rĂȘt Ă  la faire ou Ă  la demander Ă  leur mĂ©decin, car la dĂ©sinfection des linges et des locaux est nĂ©cessaire. A l'Amicale des Bretons bretonnants de Rennes On nous communique Le comitĂ© de l'Amicale des Bretons Bretonnants de Rennes, rĂ©uni Ă  l'HĂŽtel de Brest, son siĂšge social, le vendredi 15 janvier, se joint Ă©nergiquement au grand mouvement de protestation qui se manifeste dans tous les milieux bretons vraiment conscients de leur dignitĂ© Ă  l'Ă©gard de l'odieuse bande cinĂ©matographique Tout va tris bien, Madame la Marquise. Ce film fait suite Ă  La Marpoton du Bataillon et Ă  d'autres insanitĂ©s issues d'un esprit de dĂ©nigrement systĂ©matique que nous ne pouvons admettre. Si BĂ©cassine amuse les gens Ă  nos dĂ©pens, les autoritĂ©s responsables ne devront pas oublier le lourd tribut de la Bretagne pendant la guerre, qui doit lui donner droit au respect elĂ©mentaire. La Bretagne n'est pas ce pays rĂ©trograde qu'on veut faire conn»!.tre au public. On a voulu matĂ©rialiser le mĂ©pris que l'on porte aux hacheurs de paille x, mais en les ridiculisant ainsi, on s'attaque Ă  une industrie vitale pour eux le tourisme. Notre prestige moral veut qu'Ă  la suite de cet acte, il y ait rĂ©paration. Les platitudes de NoĂ«l-NoĂ«l ne suffisent point, pas mĂȘme des coups de ciseaux par ci, par lĂ . Nous aurons l'occasion d'applaudir de tout cƓur prochainement un geste sympathique de M. le Ministre dĂ©truisant par devoir cette ordure. Une attitude nĂ©gligeante de sa part envers cette infamie donnerait au sĂ©paratisme le champ libre; aussi, soutenant moralement les bruyants protestataires de Paris, nous demandons d'urgence justice. 1 BACH DETECTIVE! Ăąuiiiiiimiiiiiiiiiii Le ui des Policiers iiiiimiinmiimih' fait MOURIR de rire 1 1 TĂ©l. L'ENCELSIOR TĂ©l. ^llllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllN JEUDI 21 JANVIER, Ă  14 heures MATINEE A PRIX REDUIT PLACES DE 1 FRANC Ă  9 FRANCS tout compris LA VEUVE JOYEUSE Le triomphal succĂšs de Mlle G. AVRIL-PARELLY et de M. Ed. DEMONTY, avec toute la Troupe Louez vos places. TĂ©lĂ©phone 20-37. SAMEDI 23 SoirĂ©e, DIMANCHE 24 MatinĂ©e et SoirĂ©e, 3 reprĂ©sentations de FRASQUITA », avec les danseurs MARELINDA et RICO LOCATION VENDREDI. fÂŁ2i5 AU ROYAL f2=ÂŁ5 g Avez-vous Ă©tĂ© voir 5 i MERLUS SE 1 g C'est un film de Marcel PAGNOL g cÏNÈ^AMIuÀrLA ^^tÔu^aÛvERGNeTl42^891 Exceptionnellement, SoirĂ©e aujourd'hui Ă  20 h. 45 MatinĂ©es Jeudi. Ă  14 h. 15 Dimanche, Ă  14 h. 30. SoirĂ©es Jeudi, Samedi, Dimanche, Ă  20 h. 30- x H n Location gratuite tous le» Jours, de 10 h. a 12 h. et de 16 h. Ă  18 h. Il EN VISITE CHEZ NOTHE CONFRÈRE L'A », LE PREMIER JOURNAL ou MONDE, JOURNAL DES ÉTUDIANTES ET ÉTUDIANTS RENNAIS Photo-clichĂ© L'Ouest-Eclair ». La rĂ©daction de l' cc A groupĂ©e dans cc son » bureau de la rue Saint- Yves. L'Ouest-Eclair en visite Ă  l'A. Nous devions cette visite Ă  nos Ă©minents confrĂšres du premier journal du Monde. par lettre alphabĂ©tique, c'est entendu, mais aussi par l'esprit et l'humour que ses collaborateurs dispensent deux fois par mois seulement, hĂ©las! dans les douze pages de ce journal bi-mensuel, dont les Etudiants ne sont pas les seuls lecteurs Ă  attendre impatiemment la parution. de toute la ville que l'A prĂȘte Ă  L'Ouest-Eclair *ses ateliers, ses machines, pour lui permettre de paraĂźtre chaque jour. Comment dĂšs lors manquer aux devoirs de politesse et de reconnaissance en oubliant d'aller, Ă  l'occasion de la nouvelle annĂ©e., prĂ©senter nos vƓux Ă  ceux qui assument la lourde responsabilitĂ© de prĂ©sider Ă  l'administration et Ă  la rĂ©daction du journal estudiantin. Avec une bonne grĂące charmante et un esprit de confraternitĂ© dont nous les remercions ici, nos Ă©minents confrĂšres ont bien voulu nous recevoir chez eux, dans leurs bureaux de la rue Saint-Yves. Et je vous prie de croire que ce ne fut pas sans Ă©motion que je pĂ©nĂ©trais dans ce sanctuaire oĂč le rĂ©dacteur en chef, un prĂ©nommĂ© Maxime, dont le sourire dĂ©couvrait des crocs bien faits pour mordre, avait rĂ©uni son Ă©tat-major. Ainsi, je me trouvais en compagnie de l'Ă©lite journalistique du moment de cette phalange qui deux fois par mois met le feu Ă  la ville c'est une image par ses potins et ses on-dit habilement prĂ©sentĂ©s, par ses grands reportages toujours vĂ©cus, par ses critiques littĂ©raires et artistiques toujours marquĂ©es au bon coin de. la satire correcte et amusante. Maxime, son Ă©ternel sourire narquois aux coins des lĂšvres fit les prĂ©sentations. Et c'est ainsi que je connus les noms et que je serrai la main de Leroy, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la rĂ©daction, du prĂ©sident Le Mazou, grand censeur de la maison, de Le Goff, prĂ©posĂ© Ă  la chronique scientifique ouand il n'est pas pris par l'organisation de service d'ordre et qu'il peut, sans danger pour la sĂ©curitĂ© de la ville, troquer son bĂąton blanc pour le stylogranhe du chroniqueur, de Jean-Pierre Gasnier, un cumulard celui-lĂ , puisque en dehors de ses fonctions administratives et de son rĂŽle d'avocat stagiaire, il collabore aussi Ă  la revue corporative des Etudiants en Droit L'Hermine. Devant d'aussi Ă©minents confrĂšres.. l'avais conscience de ma faiblesse. Heureusement, ils eurent la gentillesse de ne pas abuser de leur supĂ©rioritĂ© et c'est sans forfanterie aucune qu'ils me firent visiter leur installation. Sur 1 le bureau du patron j'apercevais mon rĂȘve » une machine Ă  Ă©crire. Maxime qui avait traduit l'envie de mes regards me dit Eh oui. vous voyez, nous possĂ©dont mĂȘme une machine Ă  Ă©crire que nous mettons Ă  la disposition de nos rĂ©dacteurs. Quel luxe Oui. n'est-ce pas ? Il n'est du reste qu'un trĂšs lĂ©ger ennui la machine Ă  Ă©crire ne fonctionne pas. Mais nous l'avons. Evidemment, c'est dĂ©jĂ  quelque chose. Autre avantage l'A est rĂ©digĂ© par une Ă©quipe de collaborateurs si distinguĂ©s que les titres n'y comptent pas. Le rĂ©dacteur en chef, les Ă©chotiers, les critiques, le gĂ©rant, sont tous placĂ©s sur le mĂȘme plan. C'est pourquoi nous n'avons qu'un bureau, et dans ce bureau qu'un seul fauteuil. C'est le bureau, le fauteuil de tous. Entre nous, nos collaborateurs prĂ©fĂšrent travailler at home ». Pensez-donc, si l'un de nous rĂ©ussissait Ă  rĂ©parer la machine et Ă  s'en servir, ça en ferait du bruit. » Quelques minutes plus tard, le prĂ©nommĂ© Maxime et son fidĂšle second Leroy me font visiter ruche fiĂ©vreuse et bruyante les ateliers d'imprimerie de l'A. Oh bien sĂ»r, je ne suis pas certain de ne pas avoir rencontrĂ© lĂ  des visages et des silhouettes connues, mais la prĂ©sence des grands chefs du journal estudiantin mettait dans cette maison qui, dĂšs l'entrĂ©e, m'avait semblĂ© familiĂšre, un je ne sais quoi de nouveau et d'inattendu qui transformait les gens et les choses. Et je fus saisi de l'accent de sincĂ©ritĂ© avec lequel Maxime, qui prenait une Ă©preuve Ă  la brosse, cependant que Leroy, tel un typographe expĂ©rimentĂ©, maniait des paquets de lignes et effectuait sur le plomb des corrections, me dit en me montrant tout l'atelier Voici notre marbre. nos linotypes. en bas, je vous ferai voir notre clichĂ©rie, nos rotatives. » Quelle magnifique organisation 1 Vous voyez, nous prĂ©parons le prochain numĂ©ro de l'A, celui qui paraĂźtra jeudi. » Un coup d'oeil rapide sur les Ă©preuves me permet de me rendre compte qu'il contiendrait des Ă©chos fameux. Avec esprit, avec humour, quelquefois avec rosserie, mais jamais avec mĂ©chancetĂ©, les collaborateurs de l'A font de la mise en boite ». Et je ne suis pas trĂšs sĂ»r que certains de leurs prochains Ă©chos n'Ă©gratigneront pns nuelque peu le reporter qui se permit d'aller troubler leurs travaux. Comme tout le monde, jeudi matin, je m'empresserai d'acheter le premier journal du monde l'A. J. TH. Un neveu qui n'attend pas. vole une f orte somme d'argent Ă  son oncle, la dĂ©pense et se f ait arrĂȘter Le 9 janvier dernier, M. François Daniel, demeurant 154. rue de Brest, portait plainte, une forte somme d'argent environ francs lui ayant Ă©tĂ© dĂ©robĂ©e chez lui. Une enquĂȘte fut ouverte et la SĂ»retĂ© fit des recherches adroites. Les circonstances du vol permettraient d'affirmer que seul un habituĂ© de la maison pouvait l'avoir commis. On limita le cercle des poursuites Ă  l'entourage immĂ©diat de M. Daniel. C'est ainsi que le Jeune Antoine Poussier, 24 ans, chauffeur-livreur, habitant citĂ© Villebois-Mareuil, fut Ă©troitement surveillĂ©. Neveu du plaignant. il pouvait bien ne pas ĂȘtre Ă©tranger Ă  l'affaire. Les agents Gautier et Tirel, du Service de la SĂ»retĂ©, s'attachĂšrent Ă  ses pas Ils ne tardĂšrent pas Ă  reoiarquer les exagĂ©rations monĂ©taires du chauffeur-livreur. Poussier menait grand train, trop grand train pour sa condition. Ce qui devait arriver, arriva. Poussier fut invitĂ© Ă  venir expliquer l'emploi et la source de ses revenus anormaux. Hier donc il fut conduit Ă  la SĂ»retĂ© oĂč aprĂšs quelques hĂ©sitations, il avoua ce qu'on devinait fort bien. Effectivement il avait volĂ© son oncle sans en attendre l'hĂ©ritase. Il n'avait pas pris le gros magot d'un seul coup Pas si bĂȘte Par billets de francs et petit Ă  petit il avait rassemolĂ© le pactole qui lui permit d'amĂ©liorer son standard de vie. C'est ainsi qu'il s'Ă©tait achetĂ© des meubles, qu'il avait Ă©changĂ© en mettant la diffĂ©rence une vieille automobile contre une plus rĂ©cente. Il s'Ă©tait payĂ© des voyages. Bref, il avait bien profitĂ© et quelquefois sagement d'une richesse malheureusement illĂ©galement et malhonnĂȘtement obtenue. Le chauffeur-livreur pourra grandement Ă©diter sur les circonstances de la i ortun* LES GRANDS BALS DE L'HOTEL DE VILLE SAMEDI PROCHAIN BAL DE BIENFAISANCE DE L' A » EN FAVEUR DU SANATORIUM DES ETUDIANTS L' des Etudiants organise le 23 janvier, un grand bal dans les salons de l'HĂŽtel de Ville, au profit du Sanatorium des Etudiants. Le traditionnel entrain de la jeunesse universitaire, la verve des dix boys du Lily's Orchestra, la splendeur du cotillon doivent en faire une des plus joyeuses soirĂ©es de l'annĂ©e. Le comitĂ© de l'A. a dĂ©jĂ  reçu de nombreuses demandes de cartes d'entrĂ©e au bal. Il s'excuse de ne pouvoir y rĂ©pondre, des circonstances exceptionnelles ne lui ayant pas permis d'organiser leur distribution comme par le passĂ©, sous le patronage des principales personnalitĂ©s rennaises. En consĂ©quence, ces cartes ne pourront ĂȘtre mises en vente qu'Ă  l'entrĂ©e du bal aux prix de 8 et 15 francs. Le 13 fĂ©vrier bal des Sports Nous apprenons que le Bal des Sports 1937 aura lieu le samedi 13 fĂ©vrier dans les Salons de l'HĂŽtel de Ville, sous la prĂ©sidence d'honneur de M. Bodenan, prĂ©fet d'Ille-et-Vllaine, M. le gĂ©nĂ©ral d'Arbonneau. commandant la place et M. ChĂąteau. maire de Rennes. L'organisation de ce bal, dont les bĂ©nĂ©fices, on le sait. doivent ĂȘtre repartis entre les diffĂ©rentes Ɠuvres de bienfaisance pour l'enfance, a Ă©tĂ© confiĂ©e Ă  un comitĂ© qui comprend tous les prĂ©sidents des sociĂ©tĂ©s sportives rennaises. Nous pouvons dire, dĂšs maintenant, que le c Lily's Orchestra », dans sa grande formation, divisĂ©e en deux orchestres qui joueront sans interruption, assurera au Bal des Sports 1937 un succĂšs sans prĂ©cĂ©dent. Nous donnerons prochainement tous dĂ©tails sur l'organisation de ce bal. RENSEIGNEMENTS MILIIA1KE8~ ttecruiuoinnt oursin d'Incorporation, rĂ©loruie pensions. etc.. Sadreniier Ă  Baoiu». Uun'»nts et la famille remercient bien slncĂšrament les personnes qui leur ont tĂ©mnlsnĂ© de la sympathie l'occasion du dĂ©cĂš? de Monsieur Alphonse GOURMAUX at en particulier celles qui ont offert der fleurs. Mm* et M. Beaup'.et. lnstl- ti'*»ur le fqmtll Ouprm^nd. B»flU"'‱t. i,e Cm-»"nel. FrĂ©my. DescMmns, r-MTcrrtpm hlMl s1nc*'P"nU toutp i** p*»non"» r^iTi leur ont tĂ©moignĂ© un- si vive svm"n>Mi> k l'occasion du dĂ©cĂšs de leur cher petit ALAIN SAINT- Mme Paul Blllaz. M. et Mme StĂ©phane Noury. leurs enfants et leurs familles, remercient bien sincĂšrement toutes les personnes qui leur ont tĂ©moignĂ© leur sysmpathie Il l'occasion du dĂ©cĂšs de Monsieur Paul BILLAZ COMZTi DfPARIEHEKTAI. Artisans maf/v aiavĂ« si Altiste rva't rdue de Cl,udlençe, M* Carra, avouĂ©, dĂ©clare se porter partie civile pour M. Hameiot, pĂšre de l'enfant. M* Naut, avouĂ©, assure la dĂ©fense de M. Momi. Jugement le 2 fĂ©vrier. IL FAUT DES PREUVES A la requĂȘte de M. Delegge, propriĂ©- taire au Pertre, M. Martin Louis, cul- j tivateur Ă  la Nafterie, en 8t-M'HervĂ©, est prĂ©venu d'avoir, le 29 novembre 1936, vers 14 heures, chassĂ© dans un bois bordant la ferme de la Caillefer, en La Chanelle-ErbrĂ©e, bois appartenant au plaignant. A l'audience, les dĂ©clarations du garde sont en contradiction avec celles du prĂ©venu et celles d'un tĂ©moin. Alors M' Carro, reprĂ©sentant la par- tie civile, dĂ©clare ne pas vouloir poursuivre l'affaire. Le tribunal, estimant que la preuve du dĂ©lit n'est pas faite, acquitte Martin, et condamne la partie civile aux dĂ©pens, au bourg de Cornil'Ă©; Perrier Maurice, charron au mĂȘme l'eu. et Loury Jo seph, cultivateur Ă  la Mai'larditre, en CornillĂ©, prĂ©venus de chance sur autrui, le 15 novembre dernier, Ă  la re- quĂȘte de M. Lemonnier, cultivateur au PĂ tis, en CorniUĂ©. ont Ă©tĂ© acquittĂ©s, la preuve du dĂ©lit n'ayant pas Ă©tĂ© faite. M' Carro. avouĂ©, plaidait pour la partie civile et M' Perdriel-ValssiĂšre. avocat Ă  la Cour d'Appel de Rennes pour les prĂ©venus. AU DISPENSAIRE ANTITUBER- CULEUX. n n'y aura pas de consultation demain jeudi 21 janvier, le doc- teur Ă©tant souffrant. CLASSE 1927. Les membres de la classe 1927 sont priĂ©s de se rĂ©unir ce soir, Ă  20 heures, au cafĂ© LhermenierLetort, boulevard de Lavel. But de la rĂ©union organisation du banquet. CLASSE 1918. Le banquet de la classe 1918 aura lieu le samedi 6 fĂ©vrier prochain, Ă  20 heures, au cafĂ©-restau- rant Gasnier, boulevard Pierre-Landais Ă  VitrĂ©, oĂč les cotisations devront ĂȘtre versĂ©es au moins huit jours Ă  l'avance. OUTRAGES A AGENTS. Dimanche soir, M. Louln, agent de ville Ă  VitrĂ©, Ă©tant de service au cinĂ©me, fut prĂ©venu que deux Individus en Ă©tat d'ivresse causaient du scpndale dans un cafĂ©. Se rendant en ce lieu, M. Louin invita les deux hommes Ă  sortir. C'Ă©- taient les nommĂ©s Gilbert Pierre, do- j miciliĂ© rue du Val, et Peltier Auguste, mĂȘme lieu. Au lieu d'obtempĂ©rer Ă  cet ordre, les deux Ivrognes insultĂšrent grossiĂšrement le reprĂ©sentant ds l'ordre public, puis rentrĂšrent chez eux. Le lendemain lundi. 16 heures, rencontrant Ă  nouveau l'pgcnt Louin, Gil- bert et Peltier l'insultĂšrent derechef. Gilbert, retrouvĂ© le soir mĂȘme en complet Ă©tat d'ivresse, fut conduit au violon oĂč il passa la nuit. ProcĂšs-verbal fut dressĂ© aux deux hommes. LA OUERCHE-DE-BRETAGNE BAL DE LA MUSIQUE MUNICIPALE. Le deuxiĂšme bat de la Musie Municipale pour l'hiver 1936-1937 .2* lieu dimanche prochain, Ă  20 h. 30, dara les salons de l'hĂŽtel Gandon. Ce bal. qui est ouvert Ă  tous, aura un excellent orchestre sous la direc- tion de M. Laurent, chef de la musique. CONSEIL MUNICIPAL. Le Conseil municipal se rĂ©unira en sĂ©ance publique vendredi prochain 22 Janvier, Ă  Ordre du jour communication d'un mĂ©moire prĂ©alable Ă  l'ouverture d'une instance Ă  engager contre la commune de La Guerche par M. Solnicka. LE PERTRE CONFÉRENCE SUR LES ASSURANCES SOCIALES, Jeudi prochain, Ă  19 heures, salle du Patronage, une causerie sur les assurances sociales sera faite. Un confĂ©rencier de Rennes donnera des renseignements pour les cas particuliers qui pourront ĂȘtre demandĂ©s. SAINT-M'HEKVB GRAVE ACCIDENT. Un pĂ©nible accident est survenu lundi Ă  M. Ange Oranger, propriĂ©taire cultivateur Ă  i l'Orriere. M. Oranger se rendait au Moulin-Neuf. en La Croixille, avec sa voiture, conduire du blĂ© et pour ramener de la farine. En route, considĂ©rant que la selle de sa jument Ă©tait mal assujettie il descendit de voiture, pour la remettre, quand faisant un faux pas, il se brisa la jambe. M. le docteur Chevallier, de VitrĂ©, lui a prodiguĂ© ses soins et lui a prescrit un long repos. Nous formons des vƓux pour le prompt et complet rĂ©tablissement du MOUTIERS Un cultivateur est blessĂ© par une ruade Lundi aoir, vers 17 h. 30, M. LemariĂ© Aman 35 ans, cultivateur au PetitChevroiais, allait chercher ses chevaux 1 dans une prairie afin de les faire rentrer Ă  l'Ă©curie. Il avait ouvert la barMĂšre du champ et se tenait Ă  l'entrĂ©e lorsque le dernier cheval en sortant lui dĂ©cocha une ruade qui l'atteignit Ă  la Jambe gauche Ă  hauteur de la cuisse. Ayant beaucoup de peine Ă  marcher, le blessĂ© fut transportĂ© Ă  son domicile oĂč M. le docteur VallĂ©e, de La Guerche, fut appelĂ© Ă  lui donner ses soina; le praticien ne releva aucune fracture. M. LemariĂ© devra garder le lit quelques jours et un repos de 15 jours sera nĂ©cessaire Ă  sa guĂ©rison si aucune complication ne survient. EspĂ©rons que cet accident n'aura pas d'autre suite et nous souhaitons prompt rĂ©tablissement Ă  M. LemariĂ©, i 5, ni'A an-JaurĂšs. L'Ă©clairage de la chaussĂ©e de Saint-Nicolas Nous avions annoncĂ© que des travaux Ă©taient en cours pour l'Ă©clairage de la chaussĂ©e de Salnt-Nicoias. Ces travaux sont aujourd'hui termines; on a conservĂ© deux lanternes surplombant le milieu de la chaussĂ©e Ă  La Digue; les autres lampes centrales >..t Ă©tĂ© supprimĂ©es et remplacĂ©es par 13 lanternes placĂ©es sur le passe-pied de 1 la route. Cette idĂ©e excellente devrait permettre aux piĂ©tons de circuler sans danger sur l'emplacement qui leur a Ă©tĂ© rĂ©servĂ©, une lueur suffisante Ă©clairant la route elle-mĂȘme, sans aucune gĂšne pour les automobilistes. Mais. pour un motif que nous ignorons et qui pourrait ĂȘtre la surcharge de la ligne, l'Ă©clairage est nettement insuffisant. Aussi devrons-nous attendre que l'Energie Electrique de la Basse-Loire ait remĂ©diĂ© Ă  ce manque de courant pour apprĂ©cier pleinement le travail rĂ©alisĂ© Ă  la demande de la municipalitĂ© de Saint-Nicolas. LES SEANCES DU PATRONAGE SAINT-CONWOION. La premiĂšre des reprĂ©sentations des Deux OrpheUnes au patronage St-ConwoĂŻon, a obtenu, dimanche dernier, un grand succĂšs et nombre de personnes n'ont pu trouver de place. Rappelons que la deuxiĂšme sĂ©ance aura lieu dimanche prochain, Ă  14 h. 30 Dores et dĂ©jĂ  on peut retenir ses places chez M. Trochu, directeur de 1 ƒuvre, rue de la Gare. EPAVE. Un vĂȘtement caoutchouc d'enfant, a Ă©tĂ© recueilli sur la vole publique Ăšt dĂ©posĂ© au bureau de police oĂč l'ayant droit pourra le rĂ©cla- MESSAC LA FOIRE. La premiĂšre foire de l'annĂ©e, bien connue dans le pays, se t'endra au bourg de Messac, le qua- triĂšme mardi de janvier, c'est-Ă -dire le 26. Cette foire, la plus importante de l'annee. est trĂšs suivie et attire dans la localitĂ© beaucoup de monde. Les agriculteurs et les marchands de bestiaux y viennent trĂšs nombreux et y trouvent de beaux animaux. SÉANCE THEATRALE DU TIM- BRE ANTITUBERCULEUX. Nous apprenons que la matinĂ©e théùtrale au profit du timbre antituberculeux qui devait avoir lieu le dimanche 31 janvier a Ă©tĂ© reportĂ©e courant fĂ©vrier. Nous tiendrons ultĂ©rieurement nos lecteurs au courant de la date exacte de cette sĂ©ance. MINIAC-SOUS-BECHEREL NECROLOGIE. Nous avons appris avec regret le dĂ©cĂšs, survenu Minac, dans sa 84' annĂ©e, de Mlle Marie Gendrot. Dimanche dernier, au sortir de l'Ă©glise, elle fut prise d'un malaise su- bit et dĂ©cĂ©dait dans la soirĂ©e, vers j 20 heures, sens avoir repris connais- sance. A la famille de la vĂ©nĂ©rable dĂ©funte trĂšs sympathiquement connue Ă  Mi-' n'ac, et en particulier Ă  M. Constant Gendrot. son frĂšre, maire de cette commune et conseiller gĂ©nĂ©ral du canton de BĂ©cherel, nous offrons nos bien vives condolĂ©ances. BREAL-SOUS -MONTFORT PAIEMENT DES ASSISTANCES DIVERSES. Le percepteur de Mordelles prĂ©vient les administrĂ©s que les assistances aux vie'llards. aux femmes en couches et l'encouragement national aux familles nombreuses devront ĂȘtre encaissĂ©s par les intĂ©ressĂ©s avant le 23 janvier 1837, dernier dĂ©lai. CHIFFRE D'AFFAIRES. Il Mt rappelĂ© que l'lmp0t sur le chiffre d'aSai- ras aĂ©ra perçu la mairie de Saint- MĂ©en le Jeudi 21 courant toute la JourMONTAUBAN-DE-BRETAONE Un grave accident un passage Ă  niveau UN JEUNE CYCLISTE A LE PIED ÉCRASÉ PAR UNE MICHELINE Un grave accident s'est produit hier matin, vers il heures, au passage i, niveau de la ligne Paris-Brest, situĂ© sur le G. C. 28 bis allant de Montau- ban-de-Bretagne Ă  Saint-MĂ©en-le- Grand, Ă  environ mĂštres de la gare de la BrohiniĂšre. Un jeune cultivateur, de Montauban, M. Henri Blanchet, 16 ans, roulait a bicyclette, sur le chemin de grande communication. Lorsqu'il fut il. hauteur du passage Ă  niveau, il vit que les barriĂšres Ă©taient fermĂ©es. Au lieu d'attendre le passage des convois signalĂ©s, sans descendre de sa macnine, il poussa le portillon et s'Ă©lança sur les voies mais comme il s'Ă©tait engagĂ©, il entendit soudain le roulement rapide d'un train venant de Rennes. Le jeune homme crut ĂȘtre sauf en faisant un bond en avant. Par comble le malchance arrivait Ă  cet instant sur la vole montante une Micheline dont le conducteur voyant soudain l'obstacle qui surgissait sur les rails, immo- bilisa son automotrice. Celle-ci avait cependant happĂ© la roue arriĂšre de la bicyclette tandis que le jeune imprudent tombait sous la Micheline donl une roue lui Ă©crasa un pied. Un automobiliste de Saint-MĂ©en-leGrand conduisit le blessĂ© A Rennes, oĂč Il fut hospitalisĂ© la clinique SaintYves. Dans le courant de l'aprĂšs-midi, l'amputation du pied dut ĂȘtre pratiquĂ©e. En fin de soirĂ©e, nous avons pris des nouvelles du blessĂ©. Son Ă©tat ne donne pas d'inquiĂ©tude. Nous souhaitons Ă  la victime un rĂ©tablissement rapide. Les dĂ©bris du théùtre et la tempĂȘte Nous avons dit hier comment on avait dĂ» abattre une cheminĂ©e de l'ancien théùtre municipal que le vent menaçait de faire tomber. Un pan de mur donnant sur la place des Champs-Vauverts oscillait Ă©galement de façon inquiĂ©tante. Hier matin, des barriĂšres ont Ă©tĂ© dressĂ©es pour prĂ©venir tout accident et la dĂ©molition de ce morceau va ĂȘtre entreprise, sitĂŽt que la bourrasque sera calmĂ©e. SYNDICAT DES OUVRIERS DE LA METALLURGIE ET DES GARAGES. Il est rappelĂ© aux adhĂ©rents du Syndicat que la rĂ©union gĂ©nĂ©rale annuelle aura lieu jeudi prochain 21 courant, Ă  18 h. 30. Maison du Peuple. Ordre du jour Rapport moral et financier de 1936 dĂ©signation du bureau de 1937 l'application des 40 heures et divers. CommuniquĂ©. SERVICE DE NUIT DES TRAMWAYS BRETONS. A l'occasion de la soirĂ©e donnĂ©e le jeudi 21 janvier 1937, au CinĂ©ma Celtie, Ă  ParamĂ©Rochebonne par la Lyre Municipale, un service spĂ©cial de tramways desser- vira Saint-Servan et Saint-Malo. DĂ©part de Saint-Servan Ă  20 h. 10 et de Saint-Malo-Saint-Vincent Ă  20 heures 30. ArrĂȘts aux haltes habituelles des tramways. Retour assurĂ© pour les deux villes Ă  la fin du spectacle. FRANÇOIS LE CHAMPI. Dimanche dernier, la troupe Les Mouettes de Tourville » ont interprĂ©tĂ© avec succĂšs la magnifique piĂšce de G. Sand. Le public, trop peu nombreux, a admirĂ© le Jeu des artistes qui se sont surpassĂ©. FĂ©licitations Ă  toute la troupe et Ă  son rĂ©gisseur, M. Hareng. Nous invitons le public Ă  venir trĂšs nombreux dimanche prochain Ă  la derniĂšre reprĂ©sentation, qui aura lieu en soirĂ©e. Retenez vos places chez M. Jouanne, libraire, rue de Dinan. SYNDICAT DES EMPLOYAS. AGENTS, OUVRIERS MUNICIPAUX ET HOSPITALIERS DE SAINTMALO. Les membres du Syndicat sont priĂ©s de bien vouloir assister il. l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale qui aura lieu il. la Maison du Peuple mercredi 20 jan- vier, il. 17 h. 15 trĂšs prĂ©cises. La prĂ©sence de tous est Indispensa- ble, vu l'ordre du jour trĂšs chargĂ©. CommuniquĂ©. Convoi mortuaire 10 h. Mme Guihanat, avenue Moka; Ă©gllsl N,-D. Auxlllatrlce; cimetiĂšre Salnt-Malo. COMBOURG Une sĂ©rieuse collision entre une auto et un camion Une blessĂ©e Hier aprĂšs-midi, vers 14 h. 30, un 1 sĂ©rieux accident de la route s'est pro- duit au lieu dit Les Landelles s sur la route de Dol, Ă  3 kilomĂštres de Combourg. M. Edouard LognonĂ©, plombier, pla- ce de la Mairie Ă  Dol-de-Bretagne, se dirigeait en auto vers Rennes, via Combourg, il Ă©tait accompagnĂ© de sa femme. PrĂšs de Combourg, aussitĂŽt aprĂšs avoir traversĂ© le passage Ă  niveau des Landelles, M. LognonĂ© fut soudainement aveuglĂ© par le soleil et n'aperçut pas un lourd camion qui venait sa rencontre. Le chauffeur du camion, voyant le I danger, appuya sensiblement Ă  droite, mais cependant une collision brutale se produisit. Dans une terrible embardĂ©e, la conduite intĂ©rieure de M. LognonĂ© fit un tĂ©te-Ă -queue et me coucha dans le fossĂ© droit de la route, l'avant de la voi- ture vers Dol. Le camion s'arrĂȘta sur le milieu de la chaussĂ©e, Ă  35 mĂštres du lieu de la rencontre. Les tĂ©moins de l'accident ne portĂšrent au secours des occupants de la conduite IntĂ©rieure, mais dĂ©jĂ  ceux-ci s'en retiraient par leurs propres moyens. Mme LognonĂ©, fortement commotionnĂ©e, portait en outre de lĂ©gĂšres blessures Ă  la face. La blessĂ©e fut reconduite Ă  son domicile, alors Que M* Blouet, huissier arrivait sur les lieux pour procĂ©der aux constatations La voiture de M. LognonĂ© est hors d'usage. Le camion, appartenant Ă  M. Busnel, minotier Ă  La ChapelleChaussĂ©e, a, lui aussi, subi de graves dĂ©gĂąts. SOCIETE DE SECOURS MUTUELS. Tous les membres de la sociĂ©tĂ© de Secours Mutuels de Combourg sont priĂ©s d'assister aux obsĂšques de leur camarade M. Louis Horvais. Rassemblement vendredi Ă  9 h. 45, place de l'Eqllse, autour du porte-banniĂšre M. Peuvrel. DOL-DE-BRETAGNE SPECTACLES, Cette semaine, au CinĂ©ma du Patronage Salnt-Samson Le comte de Monte Cristo, d'aprĂšs l'Ɠuvre d'Alexandre Dumas. Au CinĂ©ma des Familles Pasteur et Bonne chance, avec Sacha Guitry. A LA PERCEPTION. Le personnel de la perception Ă©tant sensiblement rĂ©duit par nĂ©cessitĂ©s de service, jeudi 21, vendredi 22 et samedi 23 janvier, les personnes qui ont des opĂ©rations Ă  effectuer dans ce bureau sont priĂ©es de les reporter au lundi 25 janvier. TINTENIAC CONSULTATION DE NOURRISSONS. Aujourd'hui, troisiĂšme mercredi du mois, jour de la foire mensuelle, aura lieu la consultation habituelle des nourrissons. Cette consultation aura lieu Ă  14 heures, Ă  la mairie de TlntĂ©niac. ASSISTANCES. Rappelons aussi l'urgence pour toutes les personnes touchant soit l'assistance aux vieil- lards, soit l'assistance aux femmes en couches, soit l'encouragement aux familles nombreuses, d'avoir Ă  ee prĂ©- senter aujourd'hui Ă  la perception de TintĂ©nlac pour toucher leurs mensualitĂ©s, les Ă©tats devant ĂȘtre retournĂ©s incessamment Ă  la Recette principale. LE TRONCHET ASSEMBLÉE ANNUELLE. L'AssemblĂ©e annuelle du Tronchet aura lieu le dimanche 7 fĂ©vrier. Les forains sont priĂ©s de bien vouloir faire retenir leur emplacement. Aucun droit de place ne sera perçu. NOZAY REPRESENTATION AU PATRONAGE. Nos artistes du patronage se sont remis au travail depuis quelques semaines dĂ©jĂ  et doivent nous prĂ©senter dimanche 24 courant, en matinĂ©e Ă  3 heures, dans leur superbe salle de la rue de la Gare, une superbe reprĂ©sentation de La Femme aux yeux ouverts, drame en 9 tableaux, tirĂ© par M. l'abbĂ© Pineau du cĂ©lĂšbre roman de Pierre L'Ermite. Les principaux rĂŽles masculins de cette magnifique piĂšce seront tenus par MM. ThĂ©ophile Renard. Prosoer Provost et Paul Bouteiller. Les rĂŽles si IntĂ©ressants de tante CĂ©cile, Rolande, Mme et Mlle Maud seront jouĂ©s par les artistes habituellement chargĂ©s des rĂŽles fĂ©minins. au patronage, et dont tous les habituĂ©s de nos sĂ©ances rĂ©crĂ©atives ont pu depuis longtemps apprĂ©cier le fin talent. MM Pierre Friou. Alex Leguippe, Blouin. Ch. Gauthier, etc., etc. avec leur talent habituel, se chargeront d'amuser les spectateurs pendant les entr'actes. Le piano d'accompagnement sera tenu par Mlle MĂ©raud. NORT-SUR-ERDRE DÉCOUVERTE D'UN CADAVRE Mardi matin, vers 7 heures, le cadavre de M. Leclaire Pierre, journalier, a Ă©tĂ© dĂ©couvert sur le champ de foire de cette localitĂ©. Le docteur Clenet, de Nort-sur-Erdre, a constatĂ© le dĂ©cĂšs dĂ» Ă  une congestion. INFORMATIONS DIVERSES A propos de la taxe unique de 6 °!o sur le chiffre a affaires ‱ JlfJtf. F. Saudubrav et P. Ooussu, dĂ©- putĂ©s de la Sarthe afin de rĂ©pondre au vƓu exprimĂ© par de nombreux commerçants donnent ci-dessous les modalitĂ©s que de 6 sur le chiffre d'affaires TAXE UNIQUE SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES LOI DU 1" JANVIER 1937 Cette loi stipule Art. 2. Il sera instituĂ© sur les affaires au sens des dispositions des articles 1" Ă  4 du dĂ©cret de codification du 27 dĂ©cembre 1934 11 En ce qui concerne les ventes, une taxe unique de 6 2 En ce qui concerne toutes autres opĂ©rations, une taxe de 2 Art. 3. i 1. La taxe unique globale de 6 sera perçue a Sur les ventes effectuĂ©es par un producteur ou fabricant soit Ă  un commerçant, en vue de la revente en l'Ă©tat, soit Ă  un consommateur b Sur les importations faites destination, soit d un consommateur, soit d'un commerçant, en vue de la revente en l'Ă©tat, Ă  moins que ce commerçant prenne la qualitĂ© de producteur dans les conditions dĂ©terminĂ©es Ă  l'article 12. 1 2. Sont assimilĂ©es des ventes Ă  la consommation al Les ventes faites pour l'exercice de sa profession artisanale, Ă  un artisan, remplissant les conditions prĂ©vues par l'article 23 du code gĂ©nĂ©ral des ImpĂŽts directs b Les ventes faites a toua les assujettis Ă  la taxe de 2 c Les livraisons, par un producteur, d'objets ou de produits de sa fabrication, a titre de primes, a l'occasion de ventes de produits non fabriquĂ©s par lui; d Les ventes aux coopĂ©ratives de consommation et groupements d'achat. 1 6. Devront prendre la qualitĂ© de producteurs pour la totalitĂ© de leurs ventes les commerçants qui seraient imposables pour un montant annuel de ventes supĂ©rieur Ă  franca. Pourront, dans des conditions dĂ©finies Ă  l'article 12, prendre la qualitĂ© de producteurs. ies commerçants qui achĂštent ou qui Importent des produits pour les revendre directement ou par l'intermĂ©diaire d'autres commerçants ayant euxmĂȘmes pris la qualitĂ© de producteurs, Ă  des fabricants ou en vue de l'exportation. 17. La taxe unique globale de 8 devra faire l'objet sur facture, d'une mention ainsi libellĂ©e Taxe perçue pour le TrĂ©sor ». ART. 5. Seront soumis a la taxe de 2 2 Les ventes la consommation effectuĂ©es par les redevables dĂ©finis au 4 4 de l'article 3 de la prĂ©sente loi susceptibles de bĂ©nĂ©ficier du rĂ©gime forfaitaire prĂ©vu en matiĂšre d'impĂŽts sur les bĂ©nĂ©fices Industriels et commerciaux et achetant la plus grande partie de leurs matiĂšres premiĂšres des commerçants qui les ont acquises libĂ©rĂ©es de la taxe de 8 ainsi que les ventes de produits fabriquĂ©s par des commerçants lorsque celles-ci ne douassent pas francs. ART. la. Pour la pĂ©riode transitoire, la taxe ancienne sur le chiffre d'affaires concernant les stocks existant au 31 Janvier 1937 et exigible lors de la vente des produits sera recouvrĂ©e comme suit .1* Chez les commerçants soumis au rĂ©gime au paiement mensuel, au taux de 2 pour les dĂ©taillants, 4 pour les grossistes sur la valeur des stocks au 31 janvier 1937 la taxe sera payĂ©e au fur et mesure des ventes Jusqu'Ă  ce que ces ventes atteignent la valeur du 2° Chez les commerçants soumis au forfait. par versement des trois douziĂšI mes du forfait annuel pour les dĂ©taillante, des six douziĂšmes pour les grossistes. Cette disposition rĂ©sulte d'un amendement dĂ©posĂ© par nous il la sĂ©ance du 27/11/1936. Lee stocks existant chez les producteurs donneront droit au taux de 2 Ă  une imputation sur les sommes dont ces producteurs seront ultĂ©rieurement redevables au titre de la taxe unique. A cet effet. les IntĂ©ressĂ©s, il l'exception des commerçants soumis Jusqu'Ici au rĂ©gime forfaitaire, denoat rMMttr* dis» le dĂ©lai d'un mois une dĂ©claration de leurs stocks Suivant ces textes, la loi devra s'appliquer comme suit I. Grossistes Les grossistes pourront ou prendre la qualite de producteur, en vertu du paragraphe 6 de l'article 3 Dans ce cas ils devront demander, la Direction ne8 Contributions indirectes dont Ils dĂ©pendent, un certificat dĂ©clarant qu'ils rentrent dans la catĂ©gorie des producteurs, adresser ce certificat A tous leurs fournisseurs et recevoir leurs marchandises sans taxe. Par contre, pour leurs ventes, Ils devront Soit ajouter, sur leurs factures. la taxe de 6 sous la rubrique Taxe perçue pour le TrĂ©sor » pour toutes les ventes faites par eux Ă  un commerçant en vue de la revente en l'Ă©tat, ou Ă  un consommateur soit facturer sans taxe, pour toutes marchandises Ă  destination d'un producteur, sous la condition que ce producteur leur envole un certificat de la Direction des Contributions indirectes dont il dĂ©pend, attestant qu'il est producteur. Le grossiste qui aura ainsi pris la qualitĂ© de producteur devra faire, en conformitĂ© de l'article 12. Ă  la date du 31 Janvier un inventaire de ses stocka Ă©tabli Ă  ses prix de vente et remettre celui-ci dans le dĂ©lai d'un mois. Ă  l'Administration des Contributions Indirectes dont il dĂ©pend Sur le montant de cet inventaire, Il aura droit Ă  une ristourne de 2 Il retiendra le montant de cette ristourne par imputation sur la taxe de 6 qu'il aura Dayer mensuellement partir du 1 fĂ©vrier Ou prendre la position de commerçant. Dans ce cas. ils devront recevoir de leurs fournisseurs toutes les marchandises, taxe acquittĂ©e c'est-a-dlre que sur les factures de leurs fournisseurs sera ajoutĂ©e la taxe de 6 sous la rubrique Taxe perçue pour le TrĂ©sor Ils n'auront, eux-m*mes. aucune taxe Ă  ajouter Ă  leurs ventes. Le grossiste qui aura ainsi pris la position de commercant devra faire, en conformitĂ© de l'article 12. Ă  la date du 31 1anvler. un Inventaire de ses stocks Ă©tabli ses prix de vente et remettre celui-ci, dans le dĂ©lai d'un mois. a l'Administration des Contributions indirectes dont il dĂ©pend. Il sera redevable, sur le montant de cet mventafre, d'une taxe de 4 cette taxe devant ĂȘtre payĂ©e au fur et a mesure de ses ventes Jusqu'Ă  ce que celles-ci atteignent la valeur de ses stocks II. MAGASINS DE dĂ©tail rABRiouAinr TOUT OU PARTIE DES ARTICLES qu'ils vendent. La loi prĂ©voit pour les magasins de dĂ©tail fabriquant tout ou partie des articles qu'ils vendent deux catĂ©gories La premiĂšre. Les magasins faisant un chiffre d'objets transformĂ©s par eux sunĂ©rleur Ă  francs. Ils devront, dans ce cas. prendre obligatoirement la qualitĂ© de producteur. en conformitĂ© du paragraphe 6 de l'article 3. La deuxiĂšme. Les magasins faisant un chiffre d'objets transformĂ©s par eux infĂ©rieur & francs Dans ce cas ces magasins pourront Soit prendre la qualitĂ© de producteur, en vertu du paragraphe 6 de l'article 3 soit prendre la qualitĂ© A commerçant. en vertu du paragraphe 2 de l'article 5. Ci-dessous, les obligations auxquelles la loi astreint chacune de ces deux catĂ©gories ̃ PremiĂšre catĂ©gorie. Magasins de dĂ©tail faisant plus de francs de vente d'objets fabriquĂ©s par eux et devant prendre la qualitĂ© de producteur. Ces magasins devront recevoir de leurs fournisseurs toutes leurs marchandises exemptes de la taxe. Pour cela. ces magasina demanderont Ă  l'Administration des Contributions Indirectes dont Ils dĂ©pendent des certificats attestant qu'ils rentrent dans la catĂ©g le des producteurs. Ces certificats seront envoyĂ©s par eux Ă  tous leurs fournisseurs pour leur permettre de recevoir leur» nwgriinfliM» M* taxa. Par contre, ces magasin» paieront une [ taxe du 6 sur toutes leurs ventes. aous dĂ©duction cependant d'un abattement ce 25 sur toutes leurs ventes au dĂ©tau. En vertu de l'article 12, ce* magasin» devront faire un inventaire au 31 Janvier. Cet inventaire, Ă©tabli Ă  leurs prix 1 de vente sera remis dans le dĂ©lai d'un, mois a l'Administration des Contrlbutlone indirectes. Sur le montant de cet inventaire, Cas magasins auront droit une ristourne de 2 Cette ristourne leur sert rĂ©glĂ©s par imputation sur la taxe de 8 qu'ils auront Ă  payer sur leurs ventes 6 partir du 1" fĂ©vrier. DeuxiĂšme ‱catĂ©gorie. Magasins de dĂ©tail faisant moins de franca de vente d'objets fabriquĂ©s par eux. Cea magasins peuvent prendre, en vertu de l'article 3, paragraphe 6, li qualitĂ© de producteurs. Dans ce cas. leurs obligations seront les mĂȘmes que celles de la premiĂšre catĂ©gorie examinĂ©e ci-dessus. Cth magasins peuvent prendre, au contraire, en vertu du paragraphe 2 de l'article 5 la QualitĂ© de commerçants. Dan* co cas, Ils recevront de leurs fournisseurs toutes les marchandises nĂ©cessaires Ă  leur commerce, taxe acquittĂ©e, c'est-Ă -dire que sur toutes les factures de leurs fournisseurs figurera en sus .du prix une taxe de 8 sous 18 libellĂ© Taxe perçue pour le TrĂ©sor Les ventes faites par ces magasins leur clientĂšle e-ont, par contre. exemptes de la taae Ă  l'exception dea ventes des objets qu'ils auront fabriques, qui seront soumises Ă  la taxe de 2 en vertu du paragraphe 2 de l'article 9. Ces magasins devront faire, en con»formltĂ© de l'article 12. un inventaire au 31 Janvier. Cet Inventaire. Ă©tabli aux prix de vente, devra ĂȘtre remis, dana le dĂ©lai d'un mois, Ă  l'Administration des Con»tribut Ions indirectes. Si un magasin de dĂ©tail, fabriquant moins de francs d'objets fabriquĂ©s par lui, a pris la qualitĂ© de producteur. 11 aura droit, sur cet lnventaire, une ristourne de 2 cette ristourne Ă©tant rĂ©glĂ©e par imputation sur la taxe de 6 qu'il aura Ă  payer Ă  partir du l– fĂ©vrier. Si ce magasin de dĂ©tail, faisant moins de francs de vente d'objets fabriquĂ©s par lui, a pris, au contraire, la qualitĂ© de commerçant. il devra, sur son inventaire, payer une taxe de 9 cette taxe devant ĂȘtre payĂ©e au fur et Ă  mesure des ventes Jusqu'Ă  ce que celles-ci atteignent la valeur du stock. III. MAGASINS DE dĂ©tail acheta» TOUTES LEURS MARCHANDISES ET NE FAISANT AUCUNE TRANSFORMATION A partir du 1" fĂ©vrier, ces magasin* recevront toutes leurs marchandises, avec, sur les factures de leurs fournisseurs. une majoration de 6 mention. nĂ©e sous la rubrique Taxe perçus pour le TrĂ©sor », Ă  moins que leurs fournisseurs, ayant eux-mĂȘmes payĂ© cette taxe, n'aient pas la facturer nouveau. Ils n'acquitteront eux-mĂȘmes aucun* taxe sur leurs ventes. En vertu du paragraphe 1 classe ̃ M. Prln3ault. en remplace- ment de M. le commissaire en chef de 2' classe Borius. Au grade de commissaire princtpal lwtour. anciennetĂ© M. Marty. en rempl. de M. le commissaire principal Pnngault. Au Drade de commissaire de 1" classe 1*r tour, anciennetĂ© M. Berthemet, en rempl. de M. le commissaire de 1ℱ cl. Merty, promu. DIRECTIONS DE TRAVAUX Ont Ă©tĂ© promus et nommĂ©s dans le corps des IngĂ©nieurs des directiona de travaux des constructions navales pour compter du 19 Janvier Au grade d'ingĂ©nieur de 1" classe il" tour, anciennetĂ© M. Bougaran, .nu. de 2. clecse. Au grade d'ingĂ©nieur de 2e classe choix, A Indret. M. Averty. A. T. principal de 1'" classe, port matriculaire Brest. B. M. R. Lorient. Nouvelles diverses Les nouvelles promotions daus l'Ă©tat-major gĂ©nĂ©rale Le vice-amiral Le Bigot Le contre-amiral Le Bigot qui vient d'ĂȘtre promu vice-amiral, nĂ© Ă  SaintBrieuc en 1833, fut nommĂ© aspirant le 1" avril 1901. Il lit campagne de guerre au Maroc en 1907. En 1915, Il fit partie de la brigade de fusiliers-marins commandĂ©e par l'amiral Ronarch. Il prit, en 1916. le commandement de la canonniĂšre contre sous-marins Railleuse. EntrĂ© Ă  l'Ecole SupĂ©rieure de Marine en 1920. diplĂŽmĂ© le 2 Janvier 1921. il fut appelĂ© Ă  l'Ă©tat-major de la Marine. Commandant du contre-torpilleur LĂ©opard. en 1925 chef-adjoint du cabinet du ministre de la Marine, 11 fut en 1929 appelĂ© au commandement du croiseur Colbert. Choisi par M. Paul Doumer. en mal 1931. pour faire partie de aa maison militaire, le contre-amiral Le Bigot a conservĂ© les mĂȘmes fonctions auprĂšs de M. Albert Lebrun Jusqu'en '.936 oĂč il s'est vu confier le commandement de la divtslon d'instruction en escadre de la MĂ©diterranĂ©e. Le vlce-amirai Le Bigot, commandeur de la LĂ©gion d'honneur, croix de guerre. est titulaire de plusieurs citations. Il vient d'ĂȘtre nommĂ© commandant en chef des forces navales d'ExtrĂȘmeOrient. Le vice-amiral Uensoui Le vce-amlral Gensoul, nĂ© Ă  Montpellier, en 1880, fut nommĂ© aspirant le 1" aoĂ»t 1900. Pendant la nuerre il commanda le torpilleur Fanfare, dans la zone des armĂ©es du Nord. Chef Q'Etat-MaJor de division en 1922, Il fut appelĂ© au commandement du torpilleur Lansquenet en 1924. puis du culrasrĂ© Brelagne^en 1927. capitaine de pavillon du vice-amiral Durand-Viel Ă  bord du eu rasgĂ© Provence en 1929. puis chef d'Etat-Major de la 3" rĂ©gion maritime en 1931. Il fut dĂ©signĂ© pour remplir les fonctions de sous-chef d'EtatMajor de la marine en 1932, poste qu'il occupa dans le grade de contre-amiral Jusqu'en 1934. Il fut alors nommĂ© au commandement de la 3' escadre lĂ©gĂšre et avait son pavillon sur le croiseur Foch. Le vice-amiral Qeneoul en commandeur de la LĂ©gion d'honneur. Le vice-amiral Uldive Le vlce^mlraJ Olllve est ne a RezĂ© LoirĂ»-InfĂ©r^ur;, le 1" juin 1B82. EntrĂ© 4 l'Ecole Navale le 1" octobre 1899, 1l 4 fait campagne en Atlantique de 1901 Ă  i 1902; puis en ExtrĂȘme-Orient en 19041905 promus lieutenant de vaisseau en 1911. Il Ă©tait versĂ© au dĂ©but de la guerre dans le rĂ©giment des canonniers marins de 1914 Ă  1917 puis de 1917 Ă  1918. 11 a commandĂ© le torpilleur Fauconneau. Promu capitaine de corvette en 1919. il a commande le torpilleur TĂ©mĂ©raire de 1919 Ă  1920. Promu capitaine de frĂ©gate en 1923. 11 a Ă©tĂ© nommĂ© professeur Ă  l'Ecole d'application de tirs la mer et confĂ©rencier Ă  l'Ecole de Guerre Navale de 1922 Ă  1924. Ensuite Il a commandĂ© dane ce grade la sixiĂšme escadrille de torpilleurs et l'AlgĂ©rien, de 1924 Ă  1928 Promu capitaine de vaisseau en 1927, il a exercĂ© les fonctions de chef d'Ă©tatmajor du vice-amiral commandant en chef la premiĂšre escadre de 1927 929 dans le mĂȘme grade Il a commandĂ© de 1929 a 1931 le croiseur Gueydon et l'Ecole d'application de tirs Ă  la mer. En 1932, Il a exercĂ© les fonctions de chef d'Ă©tat-major du vice-amiral Inspecteur gĂ©nĂ©ral des forces maritimes du Nord. Il a Ă©tĂ© promu contre-amiral en 1933 et a commandĂ© a 3' escadre lĂ©gĂšre de l'e» cadre de la MĂ©diterranĂ©e. Il vient d'ĂȘtre nommĂ© premier sous-chef de l'Ă©tatmajor gĂ©nĂ©ral. Le vice-amiral Olllve est commandeur de la lĂ©gion d'honneur. Le contre-amiral BourraguĂ© Le capitaine de vaisseau BourraguĂ© qui Vient d'ĂȘtre promu contre-amiral est nĂ© le 22 novembre 1886 Ă  Brassac Tarn. EntrĂ© Ă  l'Ecole Navale en 1902, il effectue comme aspirant et comme enseigne diverses campagnes dans l'Atlantique, en ExtrĂȘme-Orient et au Maroc. Promu lieutenant de vaisseau en 1916. il devient officier d'ordonnance du viceamiral commandant les patrouilles de la MĂ©diterranĂ©e; en 1917 Il commande une section Ge chalutiers Apres la guerre, Il vient Ă  l'Ă©tat-maJor gĂ©nĂ©ral et dt 1919 a 1921 est officier d'ordonnance du ministre. Il commande ensuite le Matelot Leblanc. Comme capitaine de corvette. puis comme capitaine de frĂ©gate, de 1923 & 1927 Il est professeur a l'Ecole de guerre navale qu'il quitte pour commander le torpilleur Le Mars Japltaine de vaisseau en 1931, Il commande le croiseur Dupleix de 1933 1935 et prend ensuite les fonctions de chef d'Ă©tat-major dans la 1" escadre. Depuis l'an dernier l'amiral BourraguĂ© est secrĂ©taire du Conseil supĂ©rieur de la marine et chef de la section d'Ă©tudes des armements navals. Il est officier de la LĂ©gion d'honneur. Le contre-amiral de Carpentier Le capitaine de vaisseau de Carpentier qui vient d'ĂȘtre promu contre-amiral, nĂ© le 31 dĂ©cembre 1881 Eplnal. est entrĂ© & l'Ecole Navale le ln octobre 1899. Successivement promu aspirant de 2' et de 1" classe. puis enseigne Ge vaisseau 16 octobre 1904 et lieutenant de vaisseau 9 aoĂ»t 1912, Il fait de nombreuses campagnes lointaines Ă  Madagascar, au Maroc et en Indochine. Pendant la guerre Il commande L'Engageant. Capitaine de corvette le 18 mal 1920, Il commande le Delage, puis comme capitaine de frĂ©gate 14 Juin 1923 la TempĂȘte et une escadrille de torpilleurs. Dans le grade de capitaine ne vaisseau 2 Janvier 1930, Il commande successivement le Tourville et le cuirassĂ© Paris. Depuis avril 1936. l'amiral de Carpentier est directeur du port de Toulon. Il vient d'ĂȘtre dĂ©signĂ© pour y occuper les fonctions de major gĂ©nĂ©ral. Il est officier de la LĂ©gion d'honneur. Le contre-amiral Derrien Le capitaine de vaisseau Derrien Edmond, qui vient d'ĂȘtre promu contreamiral, est nĂ© le 2 novembre 1882, Ă  ChAteauneuf h FinistĂšre EntrĂ© Il l'Ecole Navale en 1900, Il effectue diverses campagnes de 1902 a 1910 en Atlantique. en Orient et dans l'OcĂ©an Indien. Lieutenant de vaisseau en 1914. il commande en 1915 le Canada-il et en 1917 La Luronne. Dans le grade suivant il est aide de camp du prĂ©fet maritime de Lorient, puis commande le RĂ©gulus de 1921 Ă  1923. Capitaine de frĂ©gate en 1924. Il commande le torpilleur Ouragan capitaine de vaisseau en 1930. il exerce successivement les commandements de l'Adroit et de la 2' escadrille de torpilleurs, du Lion et de la 4' division lĂ©gĂšre, du MaillĂ©BrĂ©zĂ© et enfin du cuirassĂ© Provence. Depuis octobre 1936. l'amiral Derrien est chef d'Ă©tat-malor de la 2H. Messon Kalougi Expert J'ai Comprts Margueti ‱ Jean -de- la -Lune- IV M Gougeon ̃ JĂ©hu IL Souchoni Jatnac-VIl A. Lecomte Justice-11 'Alb TambĂ©rii- Jalapine iL. CarrĂ© i Je suis Bille M. LsrivlĂšrei Jap-Il iG. ChĂ©ron Prit DE Croise ville, MontĂ©. 10000 fr.. 2625 m.. La RĂ©ponse iH. Picard Ltonie iAndrĂ© Thibaut La VivandiĂšre ' 8'monarii- Lot Nationale ou Lanrousrin» ÉA DĂ©croche Lolotte ,B. Man-*on> La r'-ueuterte iR. Boudeaui; La TĂ©nĂ©breuse U. Merlsse L'Amourette P QuH'.oui; La Haute-Folie iH Mariel. La Divex Bertog'.latl La Ntrerna*'e lE. CarrĂ© Lvneravximne rG PentecĂŽtet La Pailu iM. Dejean- Langrune 'E. Marie L'Abeille ̃Gamet LuCette 'A. Porcinal; Lune dt Miei Il iCh Frestel Prix DE MaR'.t ,attelĂ©, 15 000 fr., mĂštres. Jamta E. Bulhion Pupiter XIV iA. Deheegherl- Jean Bart Il M James Jessika iH. Masson. PRIX CHARLES TIE CFLIN ÂĄattelĂ©, fr.. 2600 mitres Lulu M M. Roussel; Lancrlot A. Morel Loupiac io. Bottonll Liban Il A Cholsselct Le Bienfaisant .C VtrzĂš'.ei- lord Williams R. Geenen.» Labarte lA, SourrouVlle. PRIX DE Lectoupe montĂ©. fr., mĂš'resi Julube A LefĂšvrel Jack lA. Delarochei J'Arriverai IV Jin2 Port Gras.' Jour tf'E'oo'r Il[ tSustroneki JouĂ©-rtu-Bois R C S'.mnnard" J l*ronotl 1ℱ courte Jean-de-la-Lvne, Ktnd-M 21 c. La-Rtponae. Langoustine 3' c. Joyeuse-CommĂšre. Jacinthe-G 4' c. Jujube. Jurgues 5* c. Laut, Lotka 6* c.. Kenai Karinette Pronosttcs de la prease spĂ©ciale Paris SPORT. 1" course Justice-II 2' c ‱ La-RĂ©pOtise; 3* c. Jessika; 4* c. Labnrd'-L ̃ 5* c. Jujube 6' c Lallcdone T c. Kenai Le Jockey. 1" course Tferlureffe 2* c La-Ripcnse 3* c. Jakcw f c. Le-Cid S* c. Jutube c. Paris, le 19 Janvier. De notre correspondant spĂ©cial BEURRES. Vente ordinaire. On a casĂ© un peu plue que les arrivages modĂ©rĂ©s du Jour et la resserre n'Ă©tait dĂ©jĂ  guĂšre Importante. C'est pourquoi les cours ont Ă©tĂ© bien tenus, sauf pour les centrifugeas ordinaires. On cote au ktlo cours extrĂȘmes avec cours moyens entre parenthĂšses Beurres en mottes Centrifuges des Laiteries CoopĂ©ratives et Industrielles Oharentea Poitou, Normandie 12 Ă  Touralne, 15 Il autres provenani ces. 10 Il MalaxĂ©s Normandie, Ă  Bretagne. 11 a 15 13 autres provenances, 10 Ă  14 12. Beurres en vrac Provenances diverses. a Beurres en ltvres Provenances diverses. 12 Arrivages du jour Beurre français kilos pour mottes. Ventes du jour mottes. Resserre du Jour mottes. ƒUFS. Devant l'importance de 1la resserre, les acheteurs ont fait preasion sur les cours. Les petits arrivages du Jour ont Ă©tĂ© casĂ©s, ainsi Que prĂ©s de 500 colis de la resserre, mais celleci est encore Importante. Cours par colis de mille oeufs cours extrĂȘmes avec cours moyens entre Normandie, 550 6 700 660 Brie Beauce. 410 Ă  650 t6OO Bretagne, 370 a 560 5301 Poitou. Touraine, Cen- Itre. 520 Ă  700 660 Champagne, Bour- Bogne. Bourbonnais. 570 a 580 5i5i Auvergne. Midi. 510 a 580 550 conserve par le froid. 400 Ă  480 1440 Ma- roc. 350 & 450 380. Arrivages du jour 450 colla. Ventes du Joue 945 colla. Resserre du Jour colis. FROMAGES. PATES MOLLES. Vente facilitĂ©e par les petits arrivages. Hausse sur le Brie. Prix au cent Camemberts Normandie, 210-350 divers, 160-210; Pont-1'EvĂȘ- que. 200-340 chĂšvre. 65-350. Prix Ă  la dizaine Brie grand moule. 190-210; moyen moule, 130-180 laitier, 60-120. PĂątes SÈCHES. Vente moyenne. Cours peu soutenus en gruyĂšre. Aux 100 kilos Port-salut, gruyĂšre, ComtĂ©, Arrivages PĂątes molles, kilos; pĂątes sĂšches, kilos. VIANDES. A cause de la grĂšve des tueurs Ă  La Valette, Il fallait s'attendre une restriction sensible des offres et un accroissement de la deman- de aux Halles. Une forte hausse s'est donc produite. On cote au kilo cours extrĂȘmes BƓuf. Hausse de Il 1. sauf sur les quartiers. Quart derriĂšre non traitĂ© PremiĂšre qualitĂ© a deuxiĂšme. 8 A troisiĂšme. quart devant, 2 Ă  aloyau et milieu de train de cĂŽte. 8 Ă  tram entier, 12; pale- VEAU. Entier ou demi PremiĂšre qualitĂ©, Ă  deuxiĂšme, & troisiĂšme, Ă  pans, cuisseau, carrĂ©. 10 & 11; basse complĂšte. 8 Mocton. Hausse de sur le mouton entier et l'agneau. PremiĂšre qualitĂ©, a deuxiĂšme. Ă  troisiĂšme, Ă  gigot, 14 20; carrĂ©, 8 Ă  26 Ă©paule. 6 a 11 agneau de lait, 13 Ă  chĂšvre, 2 a 4 PoRc. Hausse de sauf sur la poitrine et le lard. Demi PremiĂšre QualitĂ©, a deuxiĂšme, 8 Ă  longe ou filet. 9 Ă  13; reins. A poitrine, Ă  .tambon, a lard Arrivages du jour kilos. VOLAILLES. La restriction des offres de viandes a fait que l'on s'est IntĂ©ressĂ© a la volaille. Une hausse a Ă©tĂ© possible sur les canards morts, dindes. coqs, lapins vivants. oies en peau et lapins de garenne. Cependant, les canards sauvages poules mortes et agneaux de lait sont en rĂ©gression. On cote au Kito 1 cours extrĂȘmes Agneaux de lait. 9, agneaux gros. 10-14; canards rouennais. canards nantais. 14-16,50; canards de ferme 10-12 5G; dindes GĂątinais et Touraine poules, 13-14,50; coqs, 9-11 dindes du Midi poules, 13,50-15,50; foie gras d'oie, 35-45; lapins du GAtinala et Touraine, 10,50-11; lapins de provenances diverses, 10, poulets nantais. 13-15; poulets du GĂątlnals. 14-16 poulets de Touralne, 14-16 poulets de Bresse, 17-19; poules de Bretagne, On cote la piece cours extrĂȘmes Pigeons gros et petits, 5-10,50; pintades. 14-22. On cote les volailles vivantes au kilo cours extrĂȘmes Canards, 8-10 lapins ofes, dindes. 8-12; poulets Jeunes GĂątlnals. Charentes. 10-12 poulets vieux GĂątlnals, Bretagne. 9-10 Arrivapes kilos. Resserre de la veille kilos. GIBIER. On cote la piĂšce cours extrĂȘmes BĂ©casses. 12-18 bĂ©casstnes 6-7; canards sauvages. 14-23; lapins de garenne 5-9; sarcelles, 4-7. On cote au kilo cours extrĂȘmes Lapins de garenne dĂ©pouillĂ©. 5-7. Arrivages 850 kilos. LEGUMES. La demande manquait d'entrain. Quant Ă  l'offre elle Ă©tait abondante pour les produits de la rĂ©gion parisienne. plus modĂ©rĂ©e pour ceux des dĂ©partements. Un? hausse a Ă©tĂ© posslble sur les choux-fleurs, Ă©pinards. scaroles. Par contre, les carottes de Meaux, choux de Bruxelles, pois mange-tout. artichauts d'Alger. choux verts et poireaux communs accusent un certain recul. Cours extrĂ©mes aux 100 Kilos Ail, 250 500- carottes de Meaux. 40 Ă  55; carottes de CrĂ©ances, 60 80' carottes d'AlgĂ©rie. 180 a À50; champignons couche extra. 550 & 700 champignons moyens 450 a 550; champignons de conserve, 00 a 450 chicorĂ©es du Midi. 80 & 163; chicorĂ©es amĂ©liorĂ©es. 100 a 250 choux de Bruxelles. 60 a 150 crosnes. 400 a 500 Ă©chalotes 150 a 250; echalotes-ognons. 140 a 180 endives belges. 160 a 190; Ă©pinards dĂ©partements. 170 a 220- Ă©pinards rĂ©gion parisienne. 100 a 200 escaroles Nantes et Saumur, 160 a 180 escaroles rĂ©gion parisienne 140 Ă  160 escaroles du Midi. 100 200 fĂšves du Maroc. 500 a 600 fenouil du Midi, 100 a 180 haricots verts du Maroc. 750 A d'AlgĂ©rie. 700 A 1200; haricots secs, 340 a 450- laitues du Midi, 100 350 lentilles 40. a 650 mĂąches dĂ©partements. 200 a 320 mĂąches rĂ©gion parisienne. 350 a 450 navets de Fins et Vlarmev 20 a 40 navets d'AlgĂ©rie nouveaux. 150 a 25U oignons en grains. 40 Ă  70 oseille. 250 350 patates. 150 220 persil. 140 a 160; poivrons, 380 & 420- pissenlits de VendĂ©e. 200 Ă  250; pissenlits verts de Paris, 250 300 pissenlita blanc» de Paris, 420 Ă , 460;. pl8-,1 senlits blancs de Meaux. 360 Ăą 400; pois verts du Midi. 500 Ă  600; pois verts d'Al- gĂ©rie, 450 550; pois cassĂ©s 230 270; potirons, 80 Ă  100; raifort, 450 & 550 topinambours. 40 Ă  60; salsifis de Hollande, 280 330; salsifis d'OrlĂ©ans, 80 t 250. Cours extrĂȘmes aux 100 kilos Pommes de terre Hollande commune 65 Ă  100 Rosa. 95 le Saucisse rouge 65 & 90; Jaune ronde. 50 & 60; Eerstelingen, 60 Ă  65; nouvelles d'AlgĂ©rie. 140 & 180; nouvelles rouges, 160 Ă  250 nouvelles du Midi. 240 Ă  2ti0. Cous au cent Artlchauts d'AlgĂ©rie, .130 A 200; chicorĂ©es du Midi, 50 A 100; choux verts de Paris. 15 45; choux rouges, 50 200 choux brocolis, 30 40; choux-fleurs du Midi, 150 326 choux-fleurs de RoscofI, 120 200; escaroles, 60 Ă  100; laitues du Midi. Sa k 100. Cours aux 100 bottes Barbe de Capucin. 80 & 90; carottes des Vertus. 100 & 150; ciboules, 20 Ă  60; estragon, 75 125; panais, 40 A 60; poireaux de Montesson. 175 225 poireaux ordinaires, 75 A 150 radis de Nantes et OrlĂ©ans. 40 A 90; radis noirs. 100 140. Cours aux 218 bottes Cresson. 75 & 145. Cours Ă  la botte Salsifis rĂ©gion parisienne. Ă  2 salsifis de la Manche, A 10; thym. Cours d la piĂšce Cardons, 3 & 7; cĂ©leri-rave. A FRUITS. MarchĂ© peu actif gĂ©rie. On cote aux 100 ktlos cours extrĂȘme Abricots secs, 800 A amandes sĂšches. 700 750 clĂ©mentines. 350 Ă  700 dattes. 350 790 figues sĂšchea 300 Ă  800 mandarines, 300 Ă  500 marrons français. 150 Ă  280 marrons d'Italie 220 300 nĂšfles. 150 Ă  250 noisettes sĂšches, 400 Ă  550 noix sĂšches de Grenoble, 500 600 noix sĂšches diverses. 320 A 500 oranges d'AlgĂ©rie, 1932. 767 »! 762 NICKEL 1310 » 1305 » OITV OEEP 216 50 219 » BONS 4 I 133 » 10 ni 908 »! 910 » PENARROV* 361 » 361 » 0ONC0RO1A 90 » 88 50 BONS 5 1933 963 ni 965 » UGINS 11861 » 1855 » OROWN mines 1783 » 1781 BONS S 19!4 940 » 941 KUNLMANH 783 » 770 » DacgafOntein 264 50 264 » BONS 4 1/} , 1934 971 971 50 MAT. OOLOR. SI OENIS.. 1410 » 11383 » OE BeERl Ordinaire 1721 » 1714 4 BONS 4 1936 950 et[ 950 » PHOSPHATE DE OAFSA 885 ni 872 » prof 1850 ,Il 0 O-» UTON»" D MORT 796 793 » PEOHINEV 2090 i> 12052 » OURBAN ROODEPORT.. 387 11 376 » BANQUE OE FRANCE 8305 11,8075 il RHONE POULEU0 1357 » 1325 EA8TERN RUBBER . 247 il 243 BANQUE OE L ALGERIE 66J0 » 6510 » SAINT GOBAIN 2070 II 2040 » EAST OEOULD 1082 »11081 n BANQUE DE PARIS 1508 11483 PORT DU ROSARIO 5750 »15740 » EAST RAND 428 »l 428 » BANQUE UNION PARIS. 621 »l 621 CHARGEURS REUNIS 520 501 » FRANCO- W YOMINO 385 501 383 50 C" ALGÉRIENNE 1357 »H369 » AIR LIQUIDE 1491 »I1466 » GENERAL MINING 626 » 626 » OOMPT' O ESCOMPTE.. 811 > 840 » BRASSERIE OUILMEL. 4495 » 14495 il GOLOFIELOS 588 » 579 » OREDIT COM FRANCE. 679 675 » OAOUTCH INDOCHINE., 686 665 » HOTCHKIS8 1235 i 1206 » CRÉDIT FOND. FRANCE 2885 » 12840 CITROEN i 769 » 742 .1 JACER8FONTEIN 191 501 289 » CRÉDIT LYONNAIS 1753 11716 n COMPT' MAT US. ‱ GAZ 900 876 » JOHANNESBURG 482 501 476 » SOCIÉTÉ GENERALE 748 » 745 » PEUGEOT 683 » 684 » KUALA LUMPUR 360 nI 344 » PENTE FONCIERE 555 » 620 » SAV Raltintrlt 782 » 751 » lanClaaote 122 501 122 50 SU GENERALE FONO 172 » 173 » TERRES ROUGIS 513 » 501 » MAIN REEF 500 496 ‱ -JEZ Action* 26805 » 127020 » UNION EUROPtENNt.. 781 » 784 n MALAOCA ORDINAIRE.. 260 »I 251 50 Parts de Fondit.. 23750 » 23900 » PLAN VOUNO 428 n 420 » MEXIOAN EAOLa 165 SOI 166 50 -sociĂ©tĂ© Civil* /5 6?50 » 6*20 n ORED ARDENT 4 ‱ 1934. 666 n 665 » MIOHELIN 1/6 ci$ arts 1775 » 1770 » EST 625 ni 624 tELOt ĂŽ 11 1934 1487 »11485 NEW STATU ARIAS. 354 » 352 50 LYON 769 »! 771 » EGYPTE UNIFIEE 1 2225 12225 » PAOANO 700 » 683 i> MIDI 650 625 » JAPON 6 t> 1907 i 1627 ». PERNOD 1910 n 1990 ̃> SANTA-FE 778 »I81O » TURO 7 i t 1913 1'* 328 322 » rand mines 983 » 985 METROPOLITAN 1200 i> 1 1 C3 » BANQ. NAT. MEXIQUE. 301 »l 299 » ROAN ANTELOPE 410 x 403 » PARISIENNE IND. CLEO.! 431 429 » BANQUE OTTOMANE 525 512 n ROBINSON OEEP B 330 501 331 » TRAM. OE SHANCHAI 1031 » 10*?4 CRÉDIT FOND EOVPT. 4610 14600 » SHELL TRANSPORT 729 nI 722 » LYONNAISE d EAUX 0-1. 1S85 » 1602 ̃> OANAOIAN PACIFIO .l 3S1 11 346 i> SIMMER AND JAOK. 90 501 90 i> J-. 1i40 n'mn » WAGONS-LITS JIW 501 103 » SPRINC8 226 »l 222 CAUX ‱ EL. INDOCHINE 1875 ii'lIftO » PHILIPPS 2»*ÎO » 12780 tDS NICEL 1526 »I1518 n DI8TRIB. D'ELECTRIO liĂąt ,1170 » CENTRAL MINING I 31X0 Il -11, ,> TANGANVIKA 101501 101 n ELEOTRIO OE PARIS, 795 »I7*8 » GEDULD IllOO nHft5 THARSIS' 337 501339 50 ÉLECTR DE LA SEINE., 442 ni 4M MONTECATINI JWS »l 1*8 51 TRAN8VAAL 349 501 350 ‱> ELEO. ‱ OAZ 0" NORO 4R? »l 470 » RIO TINTO ?W- n'7340 » SOIE OE TUBIZI 187 183 i> ELlOTR Dit O* ].t0 1 AZOTE Rte WORViQn* 1309 ,i 13 UNION CORPORATION J081 »']0S7 n EN'' ELEO LIT. MEDIT. 714 nl 641 » PETROFINA S'fl »I SK7 » U'"MIN Ht » » T Ăą N 0 ‱ '47?8 U '° MIN H -K AT ANC 3 »l PAO » AMttTEBOAM UBBER.. JIMII » 3MI » VIEILLE MONTAGNE 24R7 , 23RS n T S. F Ç77 ni P'M n NESTLE 5115 »>545 » VINS SPIRITUEUX.. 377 'il 144 THOMSON HOUSTON 9*7 21S n PORTUON DES TABACS 400 11 397 » WEST RAND 212 ni 211 50 UNION D'ELECTRICITE. 535 il 525 SUCR O'ECYPTE Ord..1 715 702 i> WEST $PRIMO$ 312 313 50 VALEURS SE NÉGOCIANT AU COMPTANT PrĂšcĂ©d. loor PrĂ©eĂ©d. Jour BANQUE INDOOHINB 4530 » 4520 4 1/J 19Î9 d. 500. 399 398 ‱ BANQ. NAT. COM. e- ind. 540 » 538 » S 1934. d* 805 » 804 a SOO. marseillaise 524 525 i> 1 &% 1919 s lot*. 495 » 490 » EAUX 01* Oansr. Oap. 1440 » 1380 =z>6 Iflil 495 490 » VIOHY Aotion A .1 '» »l » » *j° 960 » haVraise D'EN'' ËLEO. 911 895 MAROO 4 1930 658 »l 647 » NANTAISE O-EOLAIR 410 » 391 OEp. AISNE 1 il 1918,. 491 493 ‱ TELEPHONES 351 338 » I 1927.. 566 560 » GAZ LEBON Jouit. 1450 » 1430 OEP NORD t 1911 441 440 » ACIERIES lONOWV 494 n 465 » 8 1M3. 455 455 a atel. â€ąÌƒ Oh BRETAONE 260 » 280 » IX ant. 1926 483 477 » OHANTIERSSI NAZAIRE 750 740 » J Mpl 1926 494 494 ‱ FIVES-LILLÏ 890 850 PAS-OE-OALAIS 7 1928 489 » 487 » PONTOIBAUD 1870 »I177O » J 1927 486 » 484 » FRANC MATER. OH FER 720 i> 701 » IND. SIN. 4 t In 193t 722 754 a METAUX 01* 2720 "J2680 n PARIS S 1910 ‱ Ion 219 217 » SENELLB MAUBEUGE. 865 815 n 4 l't 19t9 » >ol* 716 719 Il aniche 1230 »I115O n 4 1931 lot. 658 » 660 » ANZIN 636 i>l 600 » 4 ♩ '932 ‱ lot* 720 » 720 » CHARBONN. du TONRiN 3690 113514 n 5 ‱ 1934 ‱ lot* 886 875 Il vokt» Ci HAOID 5526 "15340 OOMM» 3 i»" 'en 287 ni 286 » MINES OF BOR srdln B600 »!2595 FONO"» 3 1909 0 10» 147 501 146 Il ZINOdsi UEHOOUR Ao. 2050 u n » 00 M M» 3 1911 0 loto 147 n 145 » ETAINS d* TEKKA Ao. 1475 nl n » OOMMM* 4 1931 ‱ >ott 670 ni 672 n â–ș ĂąLI SAINTE THERESE 1760 ni 1650 0OMM 4 1/4 1131 a lois 682 ni 680 » SOIE ARTIF. GIVETi I “,» »l n OOMMI** 6 l'i 1934 s lot* 91g nI 908 » ENTREP nr QRENELlt 915 865 IONS EST 5 io 1931/41 871 871 » OLIDA 3995 »I395O » BONS TAT t 1931/41 865 » 858 » St-RAPHABl Quinquina., 6800 »I66SO BONS ETAT 1914/49 901 Il 900 » SUORERIES OOLON» 360 345 50 ETAT 5 1911 A 611 Il 608 » POLIET 0HAUSS0N.. 717 » 688 ETAT 5 1/1 1935 '785 » 788 a BON MARCHE 225 n 225 ETAT S 1936 873 n 871 GALERIES LA"AYETTB 59 ni 57 n BONS lVOm i 1934 '49 908 Il 895 a PARIS-FRANCE 895 »l 850 n LYON 6 1921 A 608 »l 606 » PRINTEMPS ‱ n »1 » » LYON s 1933 700 »l 696 n AIR LIQUIDE Psrt 4000 »'385O n MIDI s frocanao 3X75 »!3!MM> Il ORLEANS 4, 1991 A 550 553 EST asiatiQ OANOIS 5975 .5910 n ORLEANS S 1933 M7 ni 96 Il ELEOTRO OIVES 4 11. J1K »l 515 n OUEST 3 J4fl ni 339 Il HUTCHINSON ]620 »ll50ft n ANGLAIS CONSOL. I . 9102 19080 Il MONACO ldfil Il'1420 BRESIL 4 1910 I ‱ 400 ni 409 » HOTELS oeunis c 1/4- 750 nt 755 Il NORVIOE 1 11 1901.. a ni » Feuilleton de L'Ouesi-Eclatr du 20 Janvier 1937 32 O'NEVÊS d'aprĂšs Charles QARVICE Une jeune fille aux enchĂšres Crand roman d'amour et d'aventirn inĂ©dit Vous pensiez que je pourrais voua payer une seconde lois? Vous vous trompez. J'ai Ă©coutĂ© patiemment vos divagations. Avec plus de patience que n'en auraient des juges et un ;ury. Personne ne croirait a votre Histoire d'un second testament, une h'stolre racontĂ©e plr un forçat Ă©vade. Ce second testament, n'a jnmsl* existĂ© que dans votre imagination. L'invention est digne d'un homme condamnĂ© comme faussaire, d'un cr'm'npl bien connu qu'il est de mon devoir de Urrer Ă  la polio*. Lavaric lui jeta un regard de cĂŽtĂ©. Ah je suis un imbĂ©cile, n'est-ce pas ? Peut-ĂȘtre bien, mais pas plus sot que vous, car vous oubliez que ce testament a Ă©tĂ© signĂ© par deux temoms. La vieille mistress Parsons vit toujours et n'a pas du tout envie de quitter le monde. Elle a toute sa tĂȘte et sa memoire. Jordan tressaillit et son visage qui s'Ă©tait empourprĂ© reprit une pĂąleur de cadavre. Pourtant, il se força a rire. TrĂšs bien. dit-il. Admettons le second testament Mais votre interprĂ©tation de la scĂšne est fausse. C'est mon pĂšre qui s'est repenti de l'avoir Ă©crit et m'a demande de le dĂ©truire C'est par son ordre que je l'ai brtllĂ©, quelquea minutes avant sa mort. Lavaric se frappa les genoux avec admiration. Sur mon Ăąme. Sir Jordan, vous ĂȘtes trĂšs fort Votre coup est une parade habile Moi-mĂȘme Je n aurais pas trouvĂ© mieux. FĂącheusement pour vous. il se pencha en avant, ses yeux sur ceux de Jordan, malheureusement pour vous. vous ne l'avez pas brĂ»lĂ©. parce qu'il existe encore Sir Jordan se serra les mains. C'est un mensonge S il existe encore. ou est-il ? Qui le dĂ©tient ? Lavaric pnt l'air solennel. autant que son laid visage pouvait prendre de dignitĂ©. Moi, Sir Jordan. XXXI Les lĂšvree palet de l'Honorable Sir Jordan. Membre du Cabinet, s'ouvrlrent et laissĂšrent tomber une exclamation de dĂ©pit. Et oui. Sir Jordan. il est en ma possession. Quand vous avez quitte la otatunbre pour parler a la nurse, il ne m'a pas fallu vingt secondes pour me glisser dans la piĂšce, prendre le document a terre et revenir dans mon abri. Je me suis toujours Ă©tonne qu'intelligent comme vous l'ĂȘtes vous ne l'aylez pas devine tout de suite. Sir Jordan essayait de bien saisir la situation. Ce bandit, ce faussaire dont l'audace Ă©galait la ruse. le tenait en sa puissance; s'il exhibait ce testament, c'Ă©tait la ruine, car quelque Importante que fĂ»t la fortune Ă  partager, la part qui lui reviendrait ne comptait pas pour un homme dans sa position. Un membre du Cabinet qui veut devenir Premier Ministre a besoin de ressources considĂ©rables L'habiletĂ© sert peu sans l'appui de l'argent. Sir Jordan ne pouvait renoncer a un penny En plus. il y avait le scandale. Avec quelle joie ses ennemis il les savait nombreux s'empareraient de cette histoire. avec quelle ardeur ils le poursuivraient de leurs aboiements La pensĂ©e lui donnait tour Ă  tour chaud et froid. A tout pnx 0 fallait acheter cet homme, sans pourtant lui cĂ©der tout de suite. pour sauver les apparences Il prit un air dĂ©tache Voyons. dit-il si l'admettais, pour l'amour de la discussion, que vous avez dĂ©robĂ© ce testament. je ne vois pas quel parti vous pourriez en tirer. Lavanc eut un nre sinistre. Vous ne voyez pas, vrai. voua ne voyez pas ? Non D'abord. vous ne pouver pas le montrer. Vous ne pouvez expliouer comment il est tombĂ© en votre possession sans vous accuser vous-mĂȘme de cambriolage. sans parler du risque ou plutĂŽt de la certitude d'ĂȘtre repris. C'est mon affaire. Laissez-moi vous rappeler qu'une lois dĂ©jĂ  vous avez Ă©tĂ© condamne comme faussaire. Banks. Et vous auriez de la peine Ă  prouver l'authentlcite d'un document que je dĂ©clarerais faux. Je ne doute pas que vous le ferlez. Mais vous oubliez les tĂ©moins Je n'oublie rien. Mais en admettant mĂȘme que vous rĂ©ussissiez a convaincre un jury, et n'oubliez pas que pour la lutte je dĂ©penserais jusqu'a mon dernier penny. en admettant que vous rĂ©ussissiez, je ne vois pas comment cela vous rapporterait ce que vous cherchez. de l'argent. Vous dues que mon demi-frere. Neville, bĂ©nĂ©ficierait; mais peut-ĂȘtre est-il mort; c'est mĂȘme probable. C'est possible, admit froidement Lavanc. Et s'il Ă©tait vivant pourquoi me dĂ©nonceriez-vous a son profit puisque vous ne le connaissez pas ? Je ne l'ai jamais vu. = La seule autre personne Ă  considĂ©rer, c'est cette jeune tille de Je ne sais rien. ni vous non plus. Elle aussi peut ĂȘtre morte Elle l'Ă©tait peut-ĂȘtre avant que le testament tĂ»t Ă©crit. Lavanc se pencha en avant et posa sur la table ses deux larges mains C'Ă©tait le moment de son triomphe. Il le savoura lentement Elle est vivante prononça-t-il avec emphase Un spasme contracta le visage de Jordan. Vous le dites n faudrait le prouver. Je peux le prouver. Je ne crois pas beaucoup Ă  la Providence. Sir Jordan, pourtant quand je vois les Ă©vĂ©nements, J'incline Ă  penser qu'il y a pour gouverner le monde, quelque chose d'autre que le hasard. Regardez un peu je me suis trouvĂ© sur le bord d'une fenĂȘtre a point pour apprendre l'existence d'un testament, et quelques mois plus tard. je me suis trouve, a l'autre bout du monde, a proximitĂ© d'une pauvre cahute pour voir mourir le pĂšre de l'hĂ©ritiĂšre dĂ©signĂ©e. Oh 1 Je le connaissais de longue date et il m'a suffi d'entendre sa voix pour n'avoir aucun doute. Oui. sa fille etait l'hĂ©ritiĂšre de Sir GrĂ©ville et moi J'avais en ma possession le testament qui la ferait riche N'est-ce pas Ă©tonnant ? Sir Jordan Ă©coutait, fascinĂ© par l'Ă©trange enchaĂźnement. C'est l'exacte vĂ©ritĂ©. J'avais Ă©tĂ© tente de rester en Angleterre et de me mettre Il sa recherche e n'avais pas eu le courage de courir le risque.. heureusement. car si j'Ă©tals restĂ©. je l'aurais peut-ĂȘtre manquĂ©e Jordan ncana. J'ai peine a croire que vous ayez dĂ©couvert cette personne. Ă  l'autre bout du monde. Comment prouverezvous son IdentitĂ© ? Son pere lui a remis les papiers nĂ©cessaires, en lui recommandant de ne pas les ouvrir dans un dĂ©lai qu'il lui a fixe. Il redoutait que la haine de Sir GrĂ©ville poursuivit l'enfant comme elle avait poursuivi les parents. J'ai vu la petite les cacher daa* sa poitrine. Sir Jordan releva la tĂȘte vivement. Vous les avez. ces papiers ? Pour la premiĂšre fois. Lavaric parut dĂ©primĂ© et honteux. Je vous ai dit que je Jouerais franc-Jeu, et je le ferai. Non. je ne les ai pas J'ai risquĂ© ma vie pour les prendre, pas seulement une fois. mais plusieurs, et j'ai toujours manquĂ©. Il frappa la table de son poing. Je jure que je les surai. Jordan l'Ă©tudiait avec attention. De tant parler m'a sĂšche la gorge, dit brusquement Lavanc N'y aurait-il pas moyen de boire quelque chose ? Certainement dit Jordan. Il se leva et sortit de la piĂšce. Lavanc le suivit jusqu'Ă  la porte et jeta un coup d'Ɠil sur le corridor couvert d'un tapis Ă©pais, dĂ©corĂ© de bellea tentures. Sir Jordan revint portant une bouteille de whiaky, une carafe d'eau et des verres qu'il poda sur la table. Servez-vous, dit-il bnevement. Lavarie but largement et reposa le verre sur la table. PinlMons-en. dit Sir Jordan. Ma patience est Ă  bout. J'aimerais mieux tout abandonner que de respirer le mĂȘme air que vous un quart d'heure de plus. Vous ĂȘtes venu me vendre le testament Dites votre prix Je l'achĂšterai tout de suite, ou jamais. Lavaric remplit une seconde fois son verre et le vida d'un trait. Nous verrons bien, ncana-t-il. remis de bonne humeur par l'alcool Me Jugez-vous assez mais pour ĂȘtre venu vous trouver avec la chose dans ma poche ? Je vous connais trop bien. Je me fierais plutĂŽt Ă  un tigre qu'Ă  vous. Sir Jordan, malgrĂ© votre beau parler et vos grandes maniĂšres. Jordan, blĂȘme de colĂšre, frappa du pied. N'allez pea trop loin. Banks, menaca-t-il. Je suis dĂ©jĂ  bien tentĂ© de vous laisser vous livrer Ă  vos fantaisies. USNS21ONIIalÂŁN TS JUKIDIWUCS Oowntieui procM »tT»iro* nurfieuMe, baux. loyers jucce*iion», impĂŽt», des renueignemenu contra aaiH IMMEI/BLÉSutr. Ventes et locations AGENCE LAORANGE. fondĂ©e en 1878 34. rue Pasquier. PARIS B1 AlfClinDC PropriĂ©tĂ© 33 hect. seul iCnilnC tenant prĂšs Saintes, louĂ© ou libre. Prix 145000 fr. PropriĂ©tĂ© 22 hect. s/rlviĂšre Ă  Pons. ^Ecr! Faveau, ROYAI. 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Un grand mouvement de sympa- hie reconnaissante se dessine Ă  'Ă©gard du savant botaniste, mais une Ă©quivoque s'est produite en iiĂšme temps. Certains ont pensĂ© que l'AbbĂ© Blanc faisait figure de guĂ©risseur donnait des consultations, prescrivait des remĂšdes. La vĂ©ritĂ©, plus simple, reste conforme Ă  la dignitĂ© ecclĂ©siastique comme aux lois françaises. Il nous a paru nĂ©cessaire de le prĂ©ciser. Les dĂ©couvertes de l'AbbĂ© Blanc M. l'abbĂ© Blanc a toujours tu la passion de la botanique appliquĂ©e au soulagement des souffrances humaines. Vivant depuis bien longtemps en AlgĂ©rie, joiqnant l'expĂ©rience Ă  l'obaervation, guidĂ© aussi par quelque mystĂ©rieuse intuition, il eut le bonheur de rĂ©aliser d'inestimables dĂ©couvert»». C'est 1919 qu'il trouva dans les montagnes du Zaccar les plantes rares dont la mĂ©decine arabe fait un usage empirique pour dĂ©congestionner les volet respiratoires. AprĂšs plusieurs mois d'Ă©tude et de recherches, l'abbĂ© Blanc mit au point un remĂšde dont la premiĂšre application fut La commande du carillon Ă©lectrique unique ta Afrique du Nord installĂ© Ă  aux frais de M. l'AbbĂ© Blanc. merveilleuse un flacon suffit Ă  quĂ©rir la coqueluche qui Ă©touffait une petite fille d'Ain-Sultan commune d'Affreville. La semaine suivante, un autre enfant le petit Trantour Ă©tait guĂ©ri de mĂȘme. De 1919 Ă  1928, l'abbĂ© poursuivit ses travauz, perfectionna les dosages et la prĂ©sentation de son remĂšde, qui devint le ameux Coqueluchsirop Et les quirivu se multipliĂšrent Peu aprĂšs, naissait le Bronchocure >, autre forme du mĂȘme remĂšde, spĂ©cialement dosĂ© pour combattre la toux de rhume, de bronchite et mĂȘme d'asthme. chez les adultes, les vieillards, comme chez les petits enfants. En 1928. l'abbĂ© Blanc. dĂ©bordĂ© par les demandes de sirops, confia leur preparation aux Laboratoires BourĂ©ly, les plus importants spĂ©cialistes de l'Afrique du Nord. LibĂ©rĂ© de cette charge, l'Ă©minent botaniste put mettre sur pied un autre remĂšde non moins prĂ©cieux des gouttes antipaludiques, produit vĂ©gĂ©tal dont les essais, maintenant achevĂ©s, ont Ă©tĂ© satisfaisants dans la remarquable proportion de 89 des cas. Le dĂ©sintĂ©ressement de l'AbbĂ© Blanc Menant une vie de labeur et de dĂ©vouement M. l'abbĂ© Blanc ne tire aucun profit personnel de ses dĂ©couvertes. De par sa volontĂ© formelle, le prix de vente de ses produits a Ă©tĂ© fixĂ© fort au-dessous de la valeur des spĂ©cialitĂ©s pharmaceutiques correspondantes. C'est ainsi que le flacon de Bronchocure n'est pas vendu plus de 12 francs. En raison de sa contenance 400 gr., c'est le moins cher de tous les sirops contre la toux. Les redevances minimes perçues par l'abbĂ© Blanc sont entiĂšrement consacrĂ©es Ă  ses Ɠuvres paroissiales. En 1934, l'abbĂ© Blanc a fait installer dans son Ă©glise de Beni-Mered un superbe carillon Ă©lectrique, le plus moderne de toute l'AlgĂ©rie. L'annĂ©e derniĂšre, il dotait l'Ă©glise des grandes orgues dont nous publions ci-contre la photo. Et, bien en- Le 15 mara 1935. J'ai pris du c Bronchocure d plusteurs reprises et chaque fois avec un rĂ©el soulagement. Je conseille tous votre excellent remĂšde, car c'est rendre service. FONS, de Gendarmerie, Blida. Le 30 dĂ©cembre 1936.. Quand mon mari, mes enfants, ou moi, nous nous enrhumons, le ne donne que le Bronchocure ». Ça suffit I Mme Douillet, Fort Lamothe, Duperre. Le 22 dĂ©cembre 1936. Mes deux fillettes 7 et 9 on» Ă©taient atteintes d'un rhume tenace. Ignorant le Bronchocure ». le leur donnai diffĂ©rents sirops Qui n'eurent aucun effet. Avec deux flacons de e Bronchocure », leur rhume disparut. M. LONGHI, 85, rue Alger, Le 22 novembre 1936. J'ai l'honneur de vous adresser mes remerciements et fĂ©licitations pour l'efficacitĂ© du e Coqueluchstrop » dana la guĂ©rison de notre enfant. M. RurroRT, 24, rue Alger. Le 4 janvier 1936. J'Ă©tais affligĂ© d'une toux opiniĂątre qui durait depuis plusieurs annĂ©es a la suite d'une bronchite. Ayant essayĂ© le Bronchocure », Je Jus surprise d'ĂȘtre calmĂ©e dĂšs la premiĂšre bouteille, et complĂštement dĂ©ltvrĂ©e de cette mauvatse toux1 aprĂšs une cure de quelques semaines. Mme Debakd, 28, rue Dr-Trolard, Alger. M. l'AbbĂ© Blanc exerce une surveillance active sur toutes les opĂ©rations de la fabrication du Coqueluchsirop et du Bronchocure. Le voici, dans la rĂ©serve des plantes, contrĂŽlant le hachage et vĂ©rifiant l'homogĂ©nĂ©itĂ© du mĂ©lange. tendu, on ne compte pas les oeuvres d'assistance auxquelles il apporte sa collaboration gĂ©nĂ©reuse et discrĂšte. Les grandes joies d'un saint homme Ce bienfaiteur ne eonnait pas de joies plus vives que d'enregistrer les tĂ©molqnages de confiance et de reconnaissance qui lui parviennent chaque jour de l'Afrique du Nord et des rĂ©gion. de France oĂč sa rĂ©putation s'est Ă©tablie. Il a constituĂ© un album de gratitude » qui s'enrichit rapidement. L'origine et l'aspect divers de toutes ces lettres font mieux ressortir l'unanimitĂ© des sentiments exprimĂ©s. En voici quelques-unes Le 21 octobre 1936. Je suis heureux de pouvoir vous remercier de votre excellent produtt le c Coqueluchsirop » qui a guĂ©ri en quelques jours ma fille ĂągĂ©e de 4 ans 1/2. atteinte d'une forte coqueluche. Je me fais un plaisir de le conseiller Ă  chaque occasion, car il est vraiment efficace. M. Compaih, 4, rue Clos-Margot, Le Mans. Le 6 dĂ©cembre 1936. La coqueluche ayant sĂ©vt dans notre localitĂ©, l'ai demandĂ© en deux fois, 35 flacons de votrt merveilleux remĂšde. Le 1- envoi a fait si bon effet auprĂšs des fillettes que lorsque le mal s'est attaquĂ© aux garçons, j'ai dĂ» faire une nouvelle commande par avion. Je vous fĂ©licite de ce bon remĂšde qui soulage tant les petits enfants. SƓur J. B. I. SupĂ©rieure de la CommunautĂ© de C6te*-du-Nord. Le pĂšre du Bronchocure » reçoit une visite inattendue Au Jour de l'An, parmi les visiteurs venus lui apporter leurs voeux, l'abbĂ© Blanc distingue un couple jeune et vigoureux. L'homme te prĂ©sente Femand Trastour. Le visage du prĂȘtre s'Illumine de plalsir Femand Trostour. le petit qarçon d'AĂŻn-Sultan, le deuxiĂšme 0 guĂ©ri de la coqueluche par les plantes merveilleuses Et l'abbe prend plaisir Ă  rappeler ces heures passionnantes des dĂ©buts du Maurjr; 18 h. 50. MĂ©tĂ©o. 7 h. Informations 8 h. Informations Presse rĂ©pĂ©tition 9 h. 45 Concert de musique variĂ©e, organisĂ© pur ie Conseil de GĂ©rance de Rennes-Bretagne avec le concours d'un orchestre de ciambre sous la direction de Maurice Henderick Les Cadets, marche Ssusai Ouverture italienne Zercj Isoline, ballet Messagers Mignon sĂ©lection Thomas Valse poudrĂ©e Francis Popy La Gardetde nuit en Chint iL. S'.Ă©del Gazouillement du printemps ISinding Pour une rose, suite de valses ,Wa'.dteurel. 10 h. 45. Limoges ‱ Criari Linckel; Le Cvone lEalnt-SaĂ«n» Phi-Phi iChristlnĂ©i La Marcna iChaxlnadei Hans. le joueur de flĂ»te CKinne La Balerine Marie. .1 h 35. Tour Eiffel Cours commerciaux. 11 h. 45 Disques Lolita BuzziPecciat Mai d'amour Buzz'Peccla > OpĂ©ra de ctuaf sous We'l'.i a Chant de* cenous». b 1 Ballade 12 h. Lyon Marche italienne Rousseau* Doux sommeil G Marlel Le nouLrau setpneur du village Boleldieu E*pana lAlbeniz EugĂšne OnĂ©puitte 'TcnaĂŻkov.'sky En vacances RhenĂ©-Baton Danses norvĂ©giennes Or'eg ̃ PassionnĂ©ment Messager. '12 h. 50. Relais de Par' Informations du Radio Journal. 13 h. Suite du concert de Lyon. 13 h. 30 Tour Elffe Physionomie de Is Bourse MĂ©tĂ©o. 13 h 50. Musique enregtstrĂ©e. 14 h. 20 Tour Eiffel Cours. 14 h. 30. St-itlsn Radlo-Co'.onlnle Jeux d'enfants Blzetl Esquisses maritimes, harpe et orchstre MTlottei Scherzo iLa'.oi S-'ite pastorale ichabrter La petite chanson des hommes Clerguel. 16 h. 45. Tour Elflel Bourse. 16 h. Llle ̃ Mu?lerbrr>cnt. 22 h 30. Relui* de P* DerniĂšre* Informations MĂ©tĂ©o. ECOLE SUPÉRIEURE DES P. T. T 4S1 m. 7. 120 kw. 6 h. 50. MĂ©tĂ©o. 7 h., 7 h. 30, 8 h.. 8 h. 30. Presse.. 8 h. 40. MĂ©tĂ©o. 8 h. 50. Revues, par Alex Surchamp. + 9 heures. Lecture par RenĂ©e Bourgeon. ♩ 10 heures. J'avais un Camarade, de Paul Vialar. 10 to. 45 Limoges. ♩ 11 h. 35. Cours. 11 h. 45. Tourisme.. 12 h. Disques 12 h. 50. Informations, 13 h. Disques ♩ 13 h. 30. Bourse. 13 h. 45. MĂ©tĂ©o. ♩ 13 h. 50. MĂ©lodies par Mlle Wlthe. 14 h. EspĂ©ranto, par Rousseau. 14 h. 20. Ohroniaue astronomique par Hamon. + 14 n. 30 La radio aux aveugles Lea PrĂ©sents FaurĂ© Berceuse Boellmanni Causerie de M. Maheut Cette mĂ©lodie Plniault Chez mol iFĂ©llne L'HĂŽtel au clair de lune Jacque-Simonot La Longue Route ÂĄParĂ©s 1 Barcarolle Cho- pin Ronde des lutin; iFr Llazt Cabaret des noctambules PiĂšces pour piano Mirny, InterprĂ©tĂ©es par l'auteur Mireille dans ses oeuvres. 16 h. Cauerie a Le raisin et le jus de raisin au Contres de Tunl* ». par Daude-Ban- cel. 16 h. 10. Causerie scientlfioue. r>ar Paul Oetova ̃ c Cru^ticte envahis- MĂ©phiftos » Faust svmnhovie. MĂȘphlsiB»r!loz. ♩ 16 h. 30 Chansons, par Mlle Mnud O'psy. 16 h. 46. Lecture lHt^r1re Extraits de Dai'id Couperfield de Dlcken», rar Mme Rlvain. 17 h Dli"es ƒuvres de ThĂ©odore Botrel QrĂšHnds et GoĂ©l'ttes. Ln F»nchette Crv'le berceuse. La Pafmvolai* Le Mouchoir ronge nrotfl?es de ©‹we» t,!on 18 h. ro'.e Ce qu'a vu le vent d'Ouest iD»bTJf>sv> Le Vent IBol'erĂŻ Mon ami Ie vent DelertreĂŻ Ar'et'e de Cl"iutine iSrrtub°rt\ Cantique A l'Ă©pouse Chausson Je vux SĂ©rĂ©nade Strn"»*i. ♩ 18 h 30. Radl ^Tournai de France 19 h. 30. MĂ©tĂ©o, 19 h. M Disques c Contes s Ma Mdre t'Ot'e Riveli Jolis de fĂ©es Marinier Conte bleu et or iRoeirsenCh»m-lonl ‱ 20 h. Le tourisme, par Geor?»s GĂ©vllle. ♩ 20 h. 15. Poli- tique "TtĂ©riei're. pur Jacnues Knyser. 20 h. 23 L*s hommes et les livres. noir PhlUppp Soupault. 20 h. 30 L'Appel du clocher, scĂšne berrichonne ĂŻt un acte en vers de Jacques Martel. ♩ 21 h. Minique de chambre par l'Association des Anciens ÉlĂšves du Conservatoire Commentaires sur Morart par Rpvnaldo Hahn Sonate en la mnleur Mozart par Benvenutl MĂ©lodies par Arnoult EnlĂšvement au SĂ©rail AIr de Don Juin Le Ruban Ă©garĂ©, trio Mlle Joncplm. O'rlat et Barbero Variations sur un thĂšme de Mozart iR Hahm. flĂ»te et piano. par Gaston Blsnquart et l'auteur Deux piĂšces pour violoncelle R. Hahn. par Mas accompairnĂ© par l'auteur MM"dles par Louis Amoult Brummel L'Atr, accompagnĂ© par l'auteur Oufntette pour piano et cores iHahn. par Bfvenutl et le quatuor Calvet 22 h. 80. Information* des *tt-Unl» d'A-nĂ©-ique. ♩ 22 h. 45. R*di"Tournal de Prence Informations mĂ©tĂ©o. TOUR EIFTEL 86 m. 15 kw- 20 h. 30. Par la ComĂ©die-FrançaUe Le Chandelier Musset. POSTE NATIONAL RADIO-PARIS L650 m. 75 kw. 6 h. 45. Gymnastique. ♩ 7 h. Disques ♩ 7 h. 15. Heure Presse. 0 7 h. 45. Gymnastique. 8 h. Disques. 11 h. Musique variĂ©e. 12 b. BretlgnlĂ©res. 1. Les prix de revient agricoles ». ♩ 12 h. 15. Heure ̃ Caste-noisette Tchalkowaky Valse des Brunes IL. Ganne Scherzo Moussorgsky Les MaĂźtres chanteurs Wagner MĂ©lodies par Germaine Geniayre Cantate lOarlsslml; Mon amour fleurit Brahms Le plus doux chemin iPaurĂ© Roses en bracelets igaubert Lu Papillons iChau.*son> Rhapsodie Ph. Gaubert NapoĂŒ Charpentier. ♩ 12 h. 45 Chronique, par Fernand Divolre. ♩ 14 h. Chronlaue musicale. 14 h. 15. Rossllon L'Ă©conomie politique dans la littĂ©rature ». ♩ 14 h. 30 Poste Colonial. ♩ 16 h Pierre LiĂšvre Corneille et son oeuvre ». 16 h 15. Philippe Marx La justice a travers les temps et les n»uple » ♩ 16 h. 30. Revue de la Presse humoristique.. 16 h. 40. Muxln"» MirĂ©e. 17 h. Causerie sclenflflmie. par Albert Ranc. 4 17 h. 15. Courrier des llv-es. ♩ 17 h. 30. Dlsriue» ♩ 17 h. 45. MĂ©lodies car Lucie Rauh. ♩ 18 h. Informations pour les Jeunp*. nar Mme Conudo. 18 h. 30. e Histoire du Théùtre lyrlnue en France » par Guy de Pourta'Ăšs P-emi*re de TannhnUser, de Wafner. 19 h. 30. Politique IntĂ©-ieure. 19 h. 40. Fernand Gregh Le Théùtre po'tique Pn Franr» deouls Beaumarchais. ‱ 20 h. RpMtal de nioTio. nar WtĂŻsb'^1! von M's»n p»*liirt. Sini^'ridP. Oi?ue. Rigaudon K-T.!inn Clair de lune De^iiR'v I p~j'ti*0 Le .rrmnlei/r 'T>n-tk'°wicz>. ♩ 20 *i. 30. Pre* ♩ 90 h. 45 Her»e. Nice. 22 'h. 45 inforviat'oT» Hei"e. ♩ 93 h. Must"'Ìƒâ€ą de danse.. 23 h. 30. Musique lĂ©gĂšre. BC n" » tIX-L AP A VETTE 278 m 6 25 kw. 20 h 15 Informations. 4 20 h. 30. Radlo-Parls. 20 h. 45. Nice. ♩ 22 h. 45. Radio-Paris. RADIO-NORMANDIE FĂ©camp 269 m. 5 I kw. 7 h. 10. Presse rĂ©gionale. ♩ 7 h. 30. Journal parlĂ©. ♩ 7 h. 50. Orchestre. 9 h Disques. 10 h. 30. Concert, populaire 11 h Chansonnettes. ♩! 12 h. Musique lĂ©KĂ©re. ♩ 12 h. 40. Journa. parlĂ©. ♩ 13 h. Heure des auditeurs. 14 h. 30. VariĂ©tĂ©., 16 h. 45. Émission enfantine.. 17 h. 30 Disques ♩ 19 h. Concert des auditeurs. 4 19 h. 40. Journal parlĂ©. 21 n. Concert. Vieilles, chansons. Danses d'autrefois. 23 h. Musique de danse. POSTE PARISIEN 312 m. 8. 80 kw 20 h 34. La minute policiĂšre. 20 h. 40 Simone fait la tournĂ©e des grands-ducs ». prĂ©sentation Louis Merlin. ♩ 21 h. 10. Le portrait en cinq sec. par Georges QucsMau. + 21 h. 12. causerie. 21 h. 25. Marguerite Msreno Pauline Carton. Claude Dauphin, Balder serjius. Vallauris et Jean Nohain comparaĂźtront c En Correctionnelle ». Diamant-Berger. 4 22 h. Orchestre du Lido. retransmission. ♩ 22 h. 30. Disques. RADIO-TOULOUSE 328 80 tw 19 h 50 Ray Ventura et ses collĂ©giens. Retransmission depuis la Pleyel. ♩ 21 h 46, La demi-heure de Paris ♩ 22 h. 15. Concert sur Trots de la Marine. de Scotto. 22 h. 40. Orchestre de danse. ♩ 22 h. 55. Informations. ♩ 23 h. Extraits de films 23 h. 16. Ordhestre de salon. 23 h. 40. 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